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STC 174 STC 16 F bis Original : anglais Assemblée parlementaire de l’OTAN COMMISSION DES SCIENCES ET DES TECHNOLOGIES L’AVENIR DES CAPACITÉS ALLIÉES DE RENSEIGNEMENT, SURVEILLANCE ET RECONNAISSANCE AÉROPORTÉES RAPPORT GÉNÉRAL Philippe VITEL (France) Rapporteur général

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STC174 STC 16 F bisOriginal : anglais

Assemblée parlementaire de l’OTAN

COMMISSION DES SCIENCES ET DES TECHNOLOGIES

L’AVENIR DES CAPACITÉS ALLIÉES DE RENSEIGNEMENT, SURVEILLANCE ET

RECONNAISSANCE AÉROPORTÉES

RAPPORT GÉNÉRAL

Philippe VITEL (France)Rapporteur général

www.nato-pa.int 20 novembre 2016

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TABLE DES MATIÈRES

I. INTRODUCTION.......................................................................................................................1

II. LES CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES DE L’OTAN : ENSEIGNEMENTS ET ADAPTATION............................................................................................................................3

A. LES ENSEIGNEMENTS : LES CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES DE L’OTAN DANS UN PASSÉ RÉCENT............................................................................................3

B. L’ADAPTATION DES CAPACITÉS ISR DE L’OTAN......................................................51. Renseignement, surveillance et reconnaissance interarmées...............................52. Force aéroportée de détection lointaine et de contrôle de l'OTAN........................63. Système allié de surveillance terrestre (AGS)........................................................7

III. LES PRINCIPAUX EFFORTS DES ALLIÉS DANS LE DOMAINE DES CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES................................................................................................................7

A. LES EFFORTS NATIONAUX..........................................................................................8B. COOPÉRATION ENTRE PAYS EUROPÉENS.............................................................10

IV. LES TENDANCES ET LES DÉFIS EN MATIÈRE DE CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES.....................................................................................................................11

A. LES CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES DANS L’ENVIRONNEMENT STRATÉGIQUE FUTUR................................................................................................11

B. TRAITEMENT, EXPLOITATION ET DIFFUSION DES DONNÉES..............................12C. L’ÉQUILIBRE ENTRE LES SOLUTIONS ISR AÉROPORTÉES AVEC OU SANS

PILOTE..........................................................................................................................14D. AUTRES POSSIBILITÉS D’ÉVOLUTIONS TECHNOLOGIQUES................................15

V. REMARQUES FINALES.........................................................................................................15

BIBLIOGRAPHIE CHOISIE.....................................................................................................17

ÉCHANTILLON DE PLATEFORMES ISR AEROPORTÉES..................................................18

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I. INTRODUCTION

1. Comme l’a indiqué le stratège militaire Carl von Clausewitz, « La guerre est le domaine de l’incertitude ; les trois quarts des éléments sur lesquels se fonde l’action flottent dans le brouillard d’une incertitude plus ou moins épaisse ». Le renseignement, la surveillance et la reconnaissance (ISR) sont des activités essentielles pour dissiper « les brouillards de la guerre » et, à l’époque de la guerre hybride, les « brouillards de la paix » également. Le fait de disposer de renseignements précis peut procurer un avantage décisif. Napoléon a, de fait, déclaré un jour : « La guerre est faite à 90 % de renseignement ».

2. À l’heure actuelle, l’environnement de sécurité de l’OTAN se caractérise par une intensification de l’incertitude, de l’instabilité et des risques. Des menaces asymétriques viennent s’ajouter aux défis conventionnels que représentent les adversaires étatiques potentiels. Sur le flanc oriental de l’Alliance, la Russie – et son armée renaissante – a annexé illégalement et de façon illégitime la Crimée et poursuit son agression militaire à l’est de l’Ukraine. Sur le flanc méridional, les Alliés font face au flux grandissant de combattants étrangers ainsi que de membres de l’organisation terroriste Daech1 et autres groupes extrémistes radicaux. Dans ce contexte, il devient plus important que jamais de disposer de systèmes ISR aéroportés de pointe pour réduire l’incertitude et informer les décideurs politiques et militaires, tant sur le plan stratégique que pour les opérations militaires proprement dites.

3. En 1794, l’armée française a déployé un ballon à air chaud – L’Entreprenant – pour réaliser une mission d’observation au cours de la bataille de Fleurus. Cet épisode fut le premier où l’utilisation de moyens de renseignement, de surveillance et de reconnaissance aéroportés a fait la différence dans l’issue d’une bataille. Depuis, les systèmes ISR aéroportés sont automatiquement associés aux opérations des forces armées. Au cours des 15 dernières années, en particulier, ces systèmes n’ont cessé d’apporter à l’OTAN la preuve de leur utilité, en fournissant un appui direct à ses trois tâches fondamentales : la défense collective, la gestion de crise et la sécurité coopérative. Les systèmes ISR aéroportés ont également été utilisés lors des opérations menées par l’Alliance dans les Balkans et en Afghanistan. Aujourd’hui, ces systèmes assurent la surveillance d’exercices surprises de l’armée russe à proximité du territoire de l’Alliance, suivent les flux de migrants à destination de l’Europe, et fournissent un appui à la lutte antiterroriste au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.

4. Au début de l’année 2016, l’OTAN a pris plusieurs décisions attestant la grande utilité des systèmes ISR :

- En mer Égée, le 2e groupe maritime permanent de l’OTAN effectue des missions de reconnaissance, de contrôle et de surveillance à l’appui des actions menées par la Grèce, la Turquie et Frontex (Agence de protection des frontières de l’Union européenne) pour mettre un terme au trafic de migrants et à l’immigration illégale ;

- En réponse à la guerre civile qui fait rage en Syrie, l’OTAN a renforcé ses activités de renseignement, surveillance et reconnaissance à la frontière entre la Turquie et la Syrie ;

- Les Alliés participant à la coalition contre Daech avec des moyens nationaux aéroportés d’alerte lointaine et de contrôle aérien ont été autorisés à utiliser la flotte de Boeing E-3A Sentry de l’OTAN – équipés de systèmes aéroportés de détection et de contrôle (AWACS) – pour répondre à leurs besoins nationaux.

5. Lors du sommet de l’OTAN qui s’est tenu à Varsovie en juillet 2016, les chefs d’État et de gouvernement sont allés encore plus loin sur le dernier point, en donnant leur accord de fournir « un soutien direct des AWACS de l'OTAN, afin que la coalition ait une meilleure connaissance de la situation », prévu à partir de l’automne 2016. Les Alliés ont toutefois précisé que cette contribution ne faisait pas de l’OTAN un membre de la coalition. Ils ont également donné leur

1 Acronyme arabe utilisé pour désigner l’organisation terroriste « État islamique » (EI).

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accord de principe à « un éventuel rôle pour l'OTAN en Méditerranée centrale afin de venir compléter et/ou, sur demande de l'Union européenne, soutenir, comme il conviendra, l'opération Sophia ». Avec cette opération, l’UE cherche à s’attaquer à la traite et au trafic de migrants qui ont lieu dans la partie sud de la Méditerranée centrale. Les systèmes ISR figurent parmi les capacités que l’OTAN pourrait fournir en cas de demande.

6. L’amélioration du partage du renseignement – provenant notamment des systèmes ISR alliés – est depuis longtemps un objectif hors de portée de l’OTAN. Or, il y a peu, l’idée a pris un nouvel élan. Le Concept stratégique, approuvé lors du sommet de Lisbonne en 2010, appelle à un renforcement du partage du renseignement « afin de mieux anticiper l’apparition possible d’une crise et la meilleure façon de la prévenir ». À cette fin, les Alliés ont décidé « de continuer de renforcer tant les aspects politiques que les aspects militaires de la contribution de l’OTAN visant à décourager et à contrecarrer [la menace du terrorisme] aussi bien qu’à s’en défendre et à s’en protéger, notamment grâce aux technologies de pointe et par un plus grand partage de l’information et du renseignement ». Le paquet de Lisbonne appelle les Alliés à « acquérir des capacités facilitatrices essentielles – notamment des systèmes d’information, pour un processus décisionnel et des fonctions de commandement et de contrôle plus efficaces, et de meilleurs arrangements pour le partage du renseignement ». Ce nouvel élan s’est poursuivi lors du sommet de Chicago en 2012, au cours duquel l’OTAN a lancé une initiative de renseignement, surveillance et reconnaissance interarmées (JISR) afin de mieux synchroniser et intégrer les systèmes ISR des Alliés. Lors du sommet du pays de Galles en 2014, un paquet « planification de défense » a été adopté en replaçant les moyens ISR au cœur des priorités de l’OTAN. Le système allié de surveillance terrestre (AGS), qui repose pour l’essentiel sur un système aérien sans pilote Global Hawk, devrait être mis à la disposition de l’OTAN en 2017. Par ailleurs, suite au sommet de Varsovie de 2016, l’Alliance a entamé le processus de définition des options possibles pour les futures capacités de détection et de contrôle de l’OTAN une fois que le dernier avion sera retiré du service en 20392. Lors de ce sommet, les Alliés ont déclaré : « Nous améliorerons encore notre capacité d'anticipation stratégique en développant notre connaissance de la situation, s'agissant en particulier de l'est et du sud, ainsi que de l'Atlantique Nord. » Ils ont également ajouté : « Notre aptitude à comprendre, à suivre et, au final, à anticiper les actions d'adversaires potentiels grâce à des moyens de renseignement, de surveillance et de reconnaissance (ISR) et à des arrangements de large portée en matière de renseignement revêt une importance croissante. »

7. Ce rapport a pour but d’alimenter le débat parlementaire sur les capacités ISR aéroportées existant au sein de l’Alliance. Il s’appuie sur les précédents travaux réalisés par la commission des sciences et technologies (STC) de l’AP-OTAN concernant les véhicules aériens sans pilote (UAV) et les aéronefs de nouvelle génération. Ce projet a été examiné dans un premier temps lors de la réunion de la STC qui s’est tenue le dimanche 29 mai 2016 dans le cadre de la session de printemps de l’AP-OTAN à Tirana. Depuis cette date, le rapport a été mis à jour, révisé et étoffé en vue de son examen et de son adoption lors de la réunion de la STC qui se tiendra le 20 novembre 2016 à Istanbul, à l’occasion de la session annuelle de l’Assemblée. Ce rapport a été élaboré grâce notamment aux précieuses informations recueillies lors d’une table ronde organisée en avril 2016 à Washington DC par le Center for Technology and National Security Policy, à l’Université de défense nationale des États-Unis. Les membres de la STC ont pu, à cette occasion, s’entretenir avec le lieutenant-général John N.T. Shanahan, directeur du renseignement en matière de défense (Warfighter Support) au Bureau du Secrétaire adjoint à la défense pour le renseignement des États-Unis, mais aussi rencontrer des représentants de Lockheed Martin, Northrop Grumman Corporation, Silent Falcon UAS Technologies et Textron AirLand. Les thèmes abordés dans ce rapport sont les suivants :

2 La décision de maintenir les avions AWACS de l’OTAN en service jusqu’aux alentours de 2035 doit être confirmée par les 16 Alliés qui financent le programme AWACS. Cette confirmation ne devrait pas être donnée avant 2018.

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- le rôle des capacités ISR aéroportées, notamment dans le cadre des opérations récentes ainsi que de l’environnement stratégique actuel et futur ;

- les principaux efforts des Alliés dans le domaine des capacités ISR aéroportées ; - l’adaptation des capacités ISR de l’OTAN ; et - les tendances en matière de capacités ISR aéroportées.

II. LES CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES DE L’OTAN : ENSEIGNEMENTS ET ADAPTATION

8. A la base, l’objectif des capacités ISR est de recueillir des données et des informations et de les transformer en renseignement utilisé pour la prise de décisions politiques ou militaires. Si la surveillance consiste à contrôler continuellement une cible possible (par exemple, l’espace aérien de l’OTAN), la reconnaissance est une activité plus ciblée qui vise à apporter des réponses à des questions bien précises (par exemple, localisation en Méditerranée d’un navire présentant de l’intérêt). Les données se rapportant à tel ou tel domaine militaire (aérien, cybernétique, terrestre, maritime et spatial) peuvent provenir de sources diverses telles que le renseignement humain, des systèmes aéroportés ou des satellites. Les capacités ISR aéroportées ne sont qu’une facette de l’ensemble des moyens de renseignement, surveillance et reconnaissance. Une fois recueillies, les informations doivent être traitées pour produire du renseignement, lequel peut ensuite être diffusé et utilisé pour prendre des décisions avisées, prévenir les surprises, commander et protéger les forces armées, et affronter l’ennemi.

9. Contrairement aux satellites, les plateformes ISR aéroportées peuvent se déplacer avec rapidité et flexibilité là où on en a besoin. En comparaison avec les moyens de renseignement terrestres, elles offrent une vue générale de la situation. Par conséquent, elles peuvent fournir aussi bien du renseignement en temps réel pour répondre à des besoins tactiques, que du renseignement stratégique pour améliorer la connaissance de la situation. Un système ISR aéroporté n’est donc pas seulement une capacité facilitatrice, mais aussi un élément clé de la prise de décision politico-militaire. Cela dit, le principal facteur qui limite son utilisation est le manque de personnel suffisamment formé pour assurer les opérations aériennes, la maintenance et l’analyse des renseignements.

A. LES ENSEIGNEMENTS : LES CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES DE L’OTAN DANS UN PASSÉ RÉCENT

10. Malgré un recours généralisé aux systèmes ISR aéroportés tout au long du XXe siècle, les attaques terroristes du 11 septembre 2001 ont marqué un tournant dans les pratiques modernes du renseignement, de la surveillance et de la reconnaissance : l’émergence de menaces asymétriques sous la forme d’adversaires non étatiques, ainsi que les progrès technologiques rapides dans le domaine des véhicules sans pilote, ont fait des systèmes ISR aéroportés un acteur important des récentes interventions militaires, en particulier pour apporter un appui aux opérations tactiques.

11. L’utilisation de capacités ISR aéroportées à l’appui des missions terrestres en cours a montré toute son utilité lors des efforts déployés en Iraq par des pays non membres de la coalition de l’OTAN. La stratégie consistant à fournir du renseignement exploitable directement à de petites unités a été rendue possible par la prolifération de systèmes assortis d’un équipement permettant de visionner des vidéos plein débit. Dotés d’informations précises et fournies en temps voulu, les commandants présents sur le théâtre pouvaient frapper l’ennemi par surprise et déplacer les soldats au bon moment et au bon endroit. Ainsi, sur le plan tactique, chaque unité a pu recevoir des renseignements adaptés à sa mission en cours. De par la flexibilité et la rapidité qu’elle confère, cette gestion très décentralisée des capacités ISR permet aux commandants militaires d’avoir un net avantage tactique. Les capacités intégrées – et souvent déployées à l’avant –

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d’analyse et de diffusion des informations ont permis aux analystes de s’entretenir avec les commandants et de les aider à décider s’il fallait lancer une opération, déclencher une frappe aérienne, envoyer un autre outil de collecte ou poursuivre le travail d’observation. En vérité, le renforcement des moyens ISR mis à la disposition des commandants de forces terrestres a souvent été plus important que le simple ajout d’un appui aérien. Sur le plan stratégique, les décideurs militaires ont également bénéficié d’un niveau de connaissance de la situation sans précédent, ce qui leur a permis de planifier et de conduire avec succès des opérations de lutte contre les insurgés. Le caractère typiquement fluctuant des opérations de lutte anti-insurrectionnelle a montré qu’il n’existait pas d’approche universelle de la gestion des capacités ISR. Cette gestion doit en revanche rester flexible, car les besoins apparaissent sans que l’on s’y attende et changent continuellement.

12. D’une certaine manière, les capacités ISR aéroportées ont été – et demeurent – encore plus importantes en Afghanistan qu’en Iraq, du fait de l’étendue du pays, de son faible niveau de développement et de son relief montagneux. En Afghanistan, les systèmes ISR aéroportés ont fourni à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) dirigée par l’OTAN des renseignements qui ont permis de protéger les soldats et les convois ; ces systèmes ont en outre constitué une première ligne de défense contre les engins explosifs improvisés (EEI). En créant un environnement plus sûr pour les soldats, les systèmes ISR aéroportés ont également facilité les contacts de la FIAS avec la population afghane, un aspect essentiel de la stratégie anti-insurrectionnelle. Cela dit, le principal avantage procuré par ces capacités ISR fut leur « disposition en groupes et en couches » sur les objectifs prioritaires, permettant au commandant des opérations d’avoir une vision globale de la situation. En d’autres termes, plusieurs plateformes ISR aéroportées dotées de plusieurs capteurs apportaient un appui en matière de surveillance et de reconnaissance dans le cadre de la même mission. Ce résultat ne peut toutefois être obtenu que si le classement des objectifs par ordre de priorité est établi avec une grande rigueur. Bien qu'une grande répartition de l’appui des systèmes ISR aéroportés entre plusieurs zones d’opérations puisse paraître la façon la plus efficiente d’utiliser ces capacités, cela n’a pas toujours été la méthode la plus efficace. Par ailleurs, outre leur fonction de renseignement, surveillance et reconnaissance, les véhicules aériens sans pilote (UAV) équipés d’armes et opérés par des pilotes expérimentés effectuent régulièrement des frappes contre les insurgés et leur infrastructure. Les opérations en Afghanistan ont montré qu’il est important d’intégrer étroitement les capacités ISR aéroportées dans la planification et l’exécution des opérations, et que souvent, le plus grand défi n’est pas d’éliminer des cibles mais de les trouver et de les localiser avec précision. Le niveau d’entraînement requis pour conduire avec succès les missions de « localisation » ne saurait être sous-estimé.

13. Les opérations aériennes menées en 2011 en Libye pour faire respecter la résolution 1973 du Conseil de sécurité des Nations unies a été appuyée par des plateformes ISR aéroportées, avec ou sans pilote. Les avions AWACS de l’OTAN ont, avec leurs capteurs de pointe, contribué au renseignement, à la surveillance et à la reconnaissance ; ils ont également mené à bien la fonction capitale consistant à assurer le commandement et le contrôle de l’ensemble des moyens aériens de l’Alliance. Sur le plan tactique, les UAV ont été particulièrement utiles pour mener des opérations au-dessus des zones urbaines à forte densité de population, car ils ont pu voler plus bas et offrir une vision de la situation au sol plus précise que des aéronefs habités. Sur le plan stratégique, l’immensité du territoire libyen a mis en évidence la nécessité d’utiliser des systèmes ISR présentant une grande endurance, de manière à avoir une meilleure connaissance de la situation.

14. Malgré ces contributions cruciales, l’utilisation de systèmes ISR aéroportés au cours de l’opération en Libye a révélé de nombreuses lacunes. Tout d’abord, les systèmes permettant de visionner des vidéos plein débit ont été indisponibles pendant les cinq premiers jours de l’opération. Ainsi, les pilotes ont dû faire de gros efforts pour distinguer les rebelles des forces inféodées à Mouammar Kadhafi, ainsi que pour repérer les cibles mobiles, qui se déplacent

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rapidement et sont beaucoup plus difficiles à frapper que les objectifs fixes, comme les stocks d’armes. Plus spécifiquement, après que les forces pro-Kadhafi eurent abandonné leurs postes conventionnels, la distinction entre les différentes factions militaires est devenue quasiment impossible en l’absence de systèmes ISR fonctionnant en continu capables de détecter les différents mouvements. Le manque de capacités ISR a également empêché de réaliser une évaluation précise des dégâts causés par les combats, et a conduit à frapper des cibles qui avaient déjà été éliminées. L’incertitude quant à la disponibilité des systèmes et leur arrivée tardive sur le théâtre a empêché une utilisation efficiente des aéronefs par les planificateurs. Par ailleurs, l’insuffisance de l’infrastructure disponible pour traiter, exploiter et diffuser les informations a montré qu’il était important que les forces, connectées à un réseau intégré, puissent communiquer de façon sécurisée et coordonnée pour traiter et analyser les renseignements. Enfin, pas moins de 80 % des missions de renseignement, surveillance et reconnaissance menées en Libye ont été le fait des États-Unis, les 20 % restantes étant assurées majoritairement par la France et le Royaume-Uni. Il convient toutefois de préciser que l’intérêt des capacités ISR aéroportées ne réside pas uniquement dans les vidéos plein débit qu’elles fournissent, mais dans l’association entre ces images et les renseignements d’origine électromagnétique et des radars. Cela dit, cet aspect fut également l’un des défis à relever lors de l’opération en Libye.

B. L’ADAPTATION DES CAPACITÉS ISR DE L’OTAN

15. Les lacunes mises en évidence, notamment lors de l’opération en Libye, ont rappelé une fois de plus la nécessité pour l’OTAN de renforcer ses capacités ISR aéroportées. Les Alliés ont donc décidé, sous la direction de la France et des États-Unis, d’améliorer l’intégration et l’interopérabilité des systèmes en question. Un autre impératif, mis en évidence par la campagne libyenne, est celui d’élargir la base des fournisseurs de capacités ISR au-delà du cercle formé par les États-Unis, la France et le Royaume-Uni.

1. Renseignement, surveillance et reconnaissance interarmées

16. Conformément à ce qui a été décidé lors du sommet de Chicago en 2012, l’OTAN met actuellement en place une capacité de renseignement, surveillance et reconnaissance interarmées (JISR), qui sera capable de fusionner des données et des informations provenant des systèmes ISR nationaux ainsi que des systèmes AWACS et AGS de l’OTAN. Lors de l’exercice Unified Vision mené en Norvège en 2014, les Alliés ont testé avec succès le concept de JISR en utilisant des satellites, des plateformes aéroportées (avec ou sans pilote), des navires, des capteurs au sol et des moyens de renseignement humain.

17. Les questions de sécurité, les procédures nationales et les contraintes technologiques représentent toujours de nombreux obstacles pour le partage de renseignement. Cela dit, une fois que la capacité JISR sera pleinement établie, les Alliés devraient être en mesure de partager en toute sécurité et de façon relativement transparente des données et informations ISR, l’objectif de l’OTAN étant de passer du principe du « besoin de connaître » à celui du « besoin de partager ». Pour atteindre cet objectif, l’Organisation prévoit de former des experts du renseignement, de la surveillance et de la reconnaissance, d’accroître la fiabilité des informations, d’adapter les doctrines et les procédures, ainsi que d’établir une architecture de systèmes d’information et de communication viable. En février 2016, la Force de réaction de l’OTAN a fourni avec succès une démonstration du concept de JISR, ce qui a conduit les ministres de la Défense de l’OTAN à déclarer que le concept avait atteint le premier stade opérationnel.

18. Lors du sommet de Varsovie en 2016, les Alliés ont indiqué qu’ils allaient « élargir la portée de notre initiative JISR, en utilisant le plus efficacement possible les contributions JISR complémentaires des Alliés pour renforcer tant notre capacité d'anticipation stratégique que notre connaissance de la situation stratégique ». Ils ont également précisé qu’ils comptaient « travailler ensemble pour promouvoir le partage du renseignement, comme il conviendra, au moyen des

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plateformes et des réseaux de l'OTAN et par une utilisation optimale des plateformes et des réseaux multilatéraux afin de renforcer l'ensemble des activités JISR, y compris, mais sans s'y limiter, le projet de défense intelligente dans ce domaine ».

19. L’édition 2016 de l’exercice Unified Vision a eu lieu en juin dans différents pays de l’Alliance, avec 400 participants de 17 pays alliés répartis sur 10 sites. Les participants étaient confrontés à plusieurs scénarios complexes, notamment la protection d’un convoi, la libération d’otages, une menace de terrorisme intérieur et la défense contre des missiles balistiques. Ils ont pu, en particulier, mettre à l’épreuve le nouveau concept de « groupement du traitement, de l’exploitation et de la dissémination ». À l’heure actuelle, l’expertise nécessaire à la conduite de missions militaires particulières est distribuée au sein d’un réseau – souvent complexe – de professionnels. Le concept de groupement des activités de traitement, d’exploitation et de dissémination désigne la capacité des forces armées à exploiter cette expertise grâce aux relations multi-nœuds réseaucentriques.

2. Force aéroportée de détection lointaine et de contrôle de l'OTAN

20. Depuis 1982, l’Alliance exploite une flotte d’aéronefs AWACS par l’intermédiaire de la Force aéroportée de détection lointaine et de contrôle de l'OTAN (Force NAEW&C). Cette force, qui représente le plus gros effort collaboratif de l’OTAN, est l’une des rares ressources militaires détenues et exploitées par l’Alliance. Avec leurs radars longue portée et leurs capteurs passifs, les 16 aéronefs AWACS peuvent détecter des objectifs au sol et dans les airs situés à une grande distance. Les missions des avions AWACS sont très variées : police du ciel, soutien aux efforts de lutte antiterroriste, évacuations de civils, respect des embargos, entrée initiale, gestion de crise et démonstration des activités de la force. Bien que les avions AWACS n’aient pas été conçus comme une plateforme ISR, ils peuvent apporter un appui aux opérations de renseignement, surveillance et reconnaissance, et effectuer une surveillance aérienne, maritime et terrestre sur des zones de la taille de l’Europe centrale. Les avions E-3A peuvent par exemple coordonner, diriger, gérer et protéger les systèmes JISR.

21. Les avions E-3A de l’OTAN devraient aborder leur dernière phase de modernisation. Le dernier programme d’extension de la durée de vie, qui devrait coûter aux alentours de 1 milliard de dollars, consistera à améliorer le dispositif d’identification, à installer des technologies numériques dans le cockpit et à perfectionner les systèmes de communication. L’OTAN n’envisage pas pour le moment de moderniser le système de radars, ce qui, selon certains critiques, pourrait entraîner une dégradation des capacités des systèmes AWACS d’ici la fin de la durée de vie des E-3A. L’OTAN prévoit par ailleurs d’intégrer les systèmes AWACS et AGS et de faire en sorte qu’ils puissent communiquer directement. Par ailleurs, un groupe placé sous la direction du comité des directeurs nationaux des armements de l’OTAN travaille sur le futur système de surveillance et de contrôle de l'Alliance, afin d’évaluer quelle capacité pourrait remplacer les avions AWACS lorsqu’ils seront retirés du service en 2035-2038.

22. Fait important, le communiqué du sommet de Varsovie de 2016 indique que l’Alliance « devra s'être dotée de la capacité qui succédera aux AWACS E-3 » d’ici à 2035. Une décision capitale a donc été prise : les Alliés ont « décidé d’entamer collectivement le processus de définition des options possibles pour les futures capacités de surveillance et de contrôle de l’OTAN ». Dans la mesure où une capacité de ce type est indispensable, où le temps presse et où les coûts sont élevés, le rapporteur exhorte l’Assemblée parlementaire de l’OTAN – et la STC en particulier – à prêter une grande attention à ce processus à mesure qu’il se mettra en place.

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3. Système allié de surveillance terrestre (AGS)

23. Faisant suite à un appel lancé par les ministres de la Défense de l’Alliance en 1992 – à savoir la mise en place d’une capacité de surveillance terrestre globale et intégrée – l’OTAN est aujourd’hui en bonne voie pour pouvoir utiliser une capacité AGS en 2017. Cette capacité repose sur cinq aéronefs Global Hawk Block 40, qui seront exploités par l’OTAN au nom des Alliés. Quinze Alliés se sont regroupés pour acquérir les Global Hawk. La France et le Royaume-Uni ont annoncé qu’ils apporteraient une contribution en nature3. Les aéronefs Global Hawk sont équipés de radars capables de suivre des objectifs mobiles au sol et de recueillir des images d’une zone terrestre ou maritime, quelles que soient les conditions météorologiques ou de luminosité. Néanmoins, malgré ses capacités, l’AGS ne saurait être considérée comme la panacée pour tous les besoins de l’Alliance en matière de renseignement, surveillance et reconnaissance.

24. L’AGS aura la capacité de contribuer à toute une gamme de missions, telles que la protection des troupes au sol et des populations civiles, le contrôle des frontières, la sécurité maritime, la lutte contre le terrorisme, la gestion de crise ou encore l’aide humanitaire lors de catastrophes naturelles. Toutefois, ses capacités tactiques étant limitées, l’AGS devrait être utilisée pour des missions bien définies, et non en appui à des opérations tactiques peu précises. Les Global Hawk ne sont, par exemple, pas équipés de capteurs électro-optiques/à infrarouges, ni de capacités en matière de guerre électronique ou de renseignements électromagnétiques. Les Alliés doivent donc, pour que la plateforme AGS soit utilisée au maximum de ses capacités, la compléter avec des capteurs ou, à moyen terme, la mettre à niveau en y ajoutant des capteurs, de façon à accroître son utilité et son rapport qualité-prix. Des progrès significatifs ont été observés au cours du sommet de Varsovie. L’AGS devrait être en partie opérationnelle en 2017 et pleinement opérationnelle en 2018. Sa principale base d’opérations se trouve à Sigonella, en Italie. Le premier Global Hawk devrait être livré sur cette base avant la fin 2016.

25. Capacité ISR principale de l’Alliance, le programme AGS ne saurait reposer à terme sur les seuls drones et rester focalisé sur le recueil de l’information. Les capacités d’analyse reposant sur le facteur humain, il appartient à l’OTAN d’entreprendre un effort de formation des personnels concernés. La France ouvre seule à ce jour un cursus de formation utile à tous sur l’exploitation des sonars mobiles. Il faut aussi recommander pour tous les acteurs d’AGS des formations à l’interprétation de l’imagerie et à l’élaboration du renseignement, et prendre ainsi en considération la chaîne complète ressources humaines/formation/entraînement qui conditionnera l’emploi et l’exploitation de toutes les capacités futures de l’OTAN. Étoffer dans cette perspective l’offre de formation de l’école de l’OTAN apparaît opportun.

III. LES PRINCIPAUX EFFORTS DES ALLIÉS DANS LE DOMAINE DES CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES 

26. Ces dernières années, certains Alliés – en particulier européens – ont pris conscience de leur manque de capacités ISR et ont pris des mesures pour combler leurs lacunes et se doter des capacités appropriées. Cette section présente brièvement un certain nombre d’initiatives concrètes mises en œuvre aux niveaux national, bilatéral et multilatéral, en insistant plus spécialement sur les plateformes ISR stratégiques et opérationnelles, ainsi que sur les systèmes de gestion du combat. Cette présentation ne saurait être exhaustive, surtout compte tenu de la taille du marché : en 2015, les ordinateurs, ainsi que les systèmes de commandement, contrôle, communication, renseignement, surveillance et reconnaissance ont représenté la somme de 99 milliards de dollars ; d’ici 2020, ce marché devrait atteindre 125,5 milliards. Le rapporteur invite par conséquent

3 Les 15 Alliés ayant acquis les Global Hawk sont les suivants : Allemagne, Danemark, Estonie, États-Unis, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Norvège, Pologne, Slovaquie, République tchèque, Roumanie et Slovénie.

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les membres de la STC à échanger des informations complémentaires lors de la réunion de cette commission à la session annuelle de l’AP-OTAN en 2016.

27. Plusieurs points doivent être gardés à l’esprit lors de la lecture de cette section. Premièrement, comme cela a déjà été indiqué, les capacités de renseignement, surveillance et reconnaissance ne se limitent pas à des plateformes ISR aéroportées. Pour appréhender la question des capacités ISR des Alliés, il ne faut pas considérer uniquement les plateformes aériennes, mais adopter une vision globale. Deuxièmement, un grand nombre des systèmes militaires actuels peuvent remplir des missions de renseignement, surveillance et reconnaissance même s’ils ne sont pas dédiés spécifiquement à ce type de tâche. C’est le cas par exemple de l’avion de chasse Lockheed Martin F-35 Lightning II, doté d’incroyables capacités ISR. Troisièmement, l’innovation dans le domaine de l’ISR ne provient pas uniquement des projets de grande envergure décrits dans cette section. Comme l’ont appris les membres de la STC lors de la table ronde sur les capacités ISR aéroportées qui a eu lieu à Washington DC en avril 2016, il est fréquent que des projets de petite et moyenne taille soient à l’origine d’innovations majeures.

A. LES EFFORTS NATIONAUX

28. Le Canada a entrepris de moderniser son aéronef Lockheed CP-140 Aurora – une variante du Lockheed P-3 Orion – qui est conçu pour des missions de surveillance, reconnaissance, recherche et sauvetage en mer. Cette modernisation des quatre Aurora canadiens coûtera aux alentours de 550 millions CAD, et prolongera leur durée de vie jusqu’en 2030.

29. En France, Boeing a amorcé en 2013, après un peu de retard, la modernisation à mi-parcours des quatre AWACS E-3F détenus par le pays. L’opération coûtera au total 466 millions de dollars. Deux des E-3F ainsi modernisés ont déjà été livrés. Pour ce qui est des UAV de grande endurance volant à moyenne altitude, la France a décidé en avril  2016 de doter son armée de terre de 14 Sagem Patroller. Ces UAV remplaceront les 20 Sagem Sperwer qui servaient depuis 2004 de solution provisoire. Cette acquisition coûtera vraisemblablement 300 millions d’euros. La première livraison est prévue pour 2018. La France maintient par ailleurs sa volonté d’acquérir 12 General Atomics MQ-9 Reaper au cours de la période 2014-2019. Trois de ces UAV sont déjà en service, et trois autres devraient être livrés en 2016. L’opération est évaluée à quelque 670 millions d’euros. Du côté de la marine française, 15 de ses 22 avions de patrouille de longue portée – des Breguet Atlantique 2 – seront modernisés afin de leur permettre de voler jusqu’en 2032 ; la facture s’élèvera au minimum à 400 millions d’euros. Le premier avion ainsi modernisé devrait être livré en 2019. En mars 2016, la marine française a également réceptionné son huitième et dernier avion de surveillance maritime Falcon 50.

30. L’Allemagne a abandonné en 2013 son projet d’acquisition de cinq Northrop Grumman Euro Hawk, un modèle dérivé du RQ-4 Global Hawk. L’objectif était de pallier l’absence de renseignements électromagnétiques résultant de la mise hors service en 2010 des cinq aéronefs Breguet Br 1150 Atlantique de son armée. Le ministère allemand de la Défense a déjà investi 600 millions EUR dans le programme. Le but de l’armée allemande est de récupérer une partie de l’investissement, notamment en ce qui concerne les capteurs. Les essais de capteurs ont donc repris sur les Euro Hawk en 2016. Les options possibles pour l’avenir sont notamment l’intégration des capteurs sur le Northrop Grumman MQ-4C Triton (la version du Global Hawk pour la marine états-unienne), les versions AGS de l’OTAN du Global Hawk ou un avion d’affaires. En attendant qu’un nouvel UAV de grande endurance volant à moyenne altitude soit disponible en Europe en 2025 (voir ci-après), l’armée allemande prévoit de louer dès 2018 entre trois et cinq aéronefs IAI Heron TP, pour un montant de quelque 600 millions d’euros. Ces avions se présenteront initialement dans une version non armée, mais le gouvernement allemand n’a pas exclu la possibilité de les doter d’armes par la suite. Enfin, l’Allemagne a entrepris de moderniser les huit aéronefs Lockheed AP-3C Orion de sa marine. Le programme, qui prendra fin en 2023, permettra

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d’étendre la durée de vie de ces avions jusqu’en 2035. Son coût total est évalué à plus de 570 millions d’euros.

31. La Grèce modernise quant à elle sa version de l’avion de surveillance maritime P-3B Orion, en vue d’étendre sa durée de vie et d’accroître ses fonctionnalités. Le programme a été lancé officiellement à la mi-2016 et devrait coûter 142 millions de dollars.

32. L’Italie est en train d’acquérir deux aéronefs Gulfstream G550 CAEW pour un montant total de 750 millions de dollars, dans le but d’effectuer des missions de détection lointaine et de renseignement électronique. Le premier avion est en train d'être équipé pour être livré. L’armée de l’air italienne se dote également de trois UAV sans pilote Piaggio Aerospace P.1HH Hammerhead fixés sur un avion d’affaires Piaggio P180, afin de disposer d’un UAV de grande endurance et volant à moyenne altitude. L’Italie a par ailleurs obtenu fin 2015 l’autorisation – tant attendue – du département d’État des États-Unis d’armer sa flotte de systèmes Reaper.

33. Les Pays-Bas rejoignent la famille des utilisateurs de Reaper, qui comprend déjà l’Espagne, les États-Unis, la France, l’Italie et le Royaume-Uni. Le pays a en effet commandé quatre UAV de ce type, pour un coût total de quelque 300 millions d’euros. Leur capacité opérationnelle totale devrait être atteinte d’ici à 2017.

34. La Pologne a établi une base aérienne dédiée spécifiquement aux UAV, en liaison avec les différents programmes qu’elle met en œuvre pour accroître de manière significative ses capacités ISR aéroportées. Au total, l’armée polonaise projette d’acquérir quelque 350 UAV d’ici à 2019. Pour répondre par exemple au besoin énoncé dans le programme Zefir – à savoir, disposer d’un UAV de grande endurance volant à moyenne altitude – le ministère polonais de la Défense envisage d’acquérir des Reaper, le General Atomics MQ-1C Gray Eagle et l’Elbit Hermes 900. Dans le cadre de son programme Gryf, la Pologne projette d’acheter d’ici à 2022 12 UAV tactiques auprès d’une entreprise polonaise travaillant avec des partenaires du monde entier. WB Electronics et Thales ont proposé le Watchkeeper, tandis que le groupe polonais de l’armement et la société Elbit l’Hermes 450.

35. L’Espagne a, elle aussi, commandé quatre Reaper, pour un coût total de quelque 170 millions d’euros. La capacité opérationnelle totale devrait être atteinte d’ici à 2020. Le pays est en pourparlers avec les autres Alliés qui utilisent le même UAV afin de statuer sur l’opportunité ou non de créer une unité de formation commune.

36. La Turquie se dote de quatre aéronefs de détection lointaine et de contrôle Boeing B-737, pour un montant total de 1 milliard de dollars ; le dernier avion est actuellement en phase d’essai, avant la livraison. Le pays a également mis sur pied plusieurs programmes ambitieux de construction de véhicules aériens sans pilote. L’UAV turc Aerospace Anka est un système de grande endurance volant à moyenne altitude, conçu pour effectuer des missions de reconnaissance, de détection/d’identification de cibles et de renseignement grâce à ses capteurs électro-optiques/à infrarouges et de recherche/sauvetage. Son premier vol inaugural de mission a eu lieu en février 2016. L’UAV Baykar/Kale Kalip Bayraktar est un autre système de grande endurance volant à moyenne altitude, conçu pour des missions de reconnaissance et de surveillance tactiques. Le Bayraktar, destiné aux forces armées turques, ne sera pas armé, mais son constructeur mène actuellement des essais en l’équipant de mini-munitions intelligentes.

37. À l’issue de l’examen de la sécurité et de la défense stratégique de novembre 2015, le Royaume-Uni a décidé d’investir massivement dans l’amélioration de ses capacités ISR aéroportées. Le pays termine l’acquisition de trois Boeing RC-135W Rivet Joint (Airseeker), pour un montant total d’environ 650 millions GBP. Deux de ces avions ont été livrés, le troisième devant l’être d’ici la fin 2017. Deux UAV Airbus Zephyr volant à haute altitude seront acquis à des fins d’essais opérationnels. Le Zephyr, qui fonctionne à l’énergie solaire, est censé avoir une

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endurance maximale de 45 jours consécutifs à des altitudes pouvant aller jusqu’à 70 000 pieds (21 km), ce qui lui permet de s’affranchir des conditions météorologiques et du trafic aérien civil. Cet UAV pourrait combler l’écart existant entre les capacités des aéronefs et celles des satellites. En ce qui concerne les aéronefs de surveillance maritime, le Royaume-Uni a signé un contrat d’achat de neuf Boeing P-8A Poseidon. La facture est estimée à 3 milliards GBP sur les dix prochaines années. La première livraison est prévue pour 2019/2020. Pour ce qui est des UAV de grande endurance volant à moyenne altitude, le pays va se doter de 20 General Atomics Certifiable Predator B Protector – pour un montant total de 415 millions GBP – qui remplaceront dix UAV Reaper à l’horizon 2023.

38. Les États-Unis continuent d’étoffer leur panoplie, déjà considérable, de capacités ISR aéroportées. À la fin de 2016, par exemple, l’armée de l’air reçevra 29 nouveaux Reaper, l’armée de terre disposera de 17 Gray Eagle supplémentaires, et la marine sera dotée de 3 Triton. Après 2016, des modèles identiques et d’autres plateformes du même type seront également mis à disposition. Ainsi, plus de 100 aéronefs Poseidon devraient être commandés au total. En ce qui concerne les capacités ISR stratégiques, l’aéronef Lockheed U-2 Dragon Lady, qui vole à haute altitude, sera mis hors service d’ici à 2019. L’armée de l’air travaille à l’intégration de la technologie de l’avion U-2 dans les Global Hawk afin que ces derniers puissent remplir certaines des missions dévolues à l’U-2. La division Skunk Works de Lockheed Martin travaille sur la conception d’un avion de reconnaissance tactique – éventuellement opéré par un pilote – appelé TR-X, qui pourrait remplir les missions de l’U-2/du Global Hawk après 2025. L’armée de l’air réfléchit à la façon de redonner un coup de jeune aux capacités du système radar interarmées de surveillance et d'attaque d'objectifs (ou JSTARS) Boeing E-8, qui a pris de l’âge. Elle examine notamment combien de temps l’E-8 peut continuer à voler, et devrait communiquer les résultats de son étude en mars 2017. Trois équipes constituées par les entreprises du secteur de la défense ont été chargées de proposer des pistes concernant l’évolution possible du système JSTARS : l’équipe Northrop Grumman, L-3 et Gulfstream travaille sur une solution utilisant l’avion d’affaires G550, l’équipe Lockheed Martin et Bombardier sur une solution faisant appel à l’avion d’affaires Global 6000, et l’équipe Boeing sur une proposition s’appuyant sur l’avion de ligne B-737-700. Les experts sont d’accord sur le fait que les radars passifs dont est équipé l’E-8 devront être remplacés par un balayage électronique. Malgré ces efforts, des voix critiques se sont déjà élevées – en particulier au Congrès – pour mettre en garde contre les risques de manque de financement à l’horizon 2025. L’armée de terre états-unienne a mis en œuvre le programme EMARSS (système de reconnaissance et surveillance avancées à moyenne altitude). Elle prévoit de mettre en service 12 aéronefs satisfaisant à la nouvelle norme EMARSS, avec la possibilité d’en acquérir 20 autres. En juin 2016, L-3 a opéré un vol inaugural avec un Beechcraft King Air 350ER, qui sera mis en conformité avec la norme EMARSS. La marine des États-Unis a, quant à elle, décidé récemment de transformer son initiative controversée de conception d’un dispositif de surveillance et de frappe sans pilote lancé depuis un porte-avions en un programme de développement d’un système de ravitaillement en vol installé sur un porte-avions et doté de capacités ISR. La marine prévoit de consacrer à cet effort 2 milliards de dollars entre 2017 et 2021.

B. COOPÉRATION ENTRE PAYS EUROPÉENS

39. Selon les analystes du secteur de la défense, les États européens ont entre 10 et 15 ans de retard en ce qui concerne la capacité de leur base industrielle de défense à mettre au point des UAV de grande taille. Cela dit, les entreprises européennes de la défense ont lancé des projets de recherche et développement intéressants pour mettre au point des systèmes de ce type : c’est le cas par exemple du Taranis de BAE, du nEUROn de Dassault, ainsi que du Barracuda et du Talarion d’EADS. Ces deux dernières années, deux projets visant à remédier à cette situation se sont concrétisés.

40. En novembre 2015, l’industrie européenne de la défense – représentée par l’Allemagne, l’Espagne, la France et l’Italie – a lancé une étude concernant le développement d’un système

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aérien de grande endurance, piloté à distance et naviguant à moyenne altitude (MALE RPAS). Cette étude, étalée sur deux ans, permettra de mettre en évidence les capacités opérationnelles concrétisables, de définir la configuration requise du système et de mener des activités préliminaires de conception. Si les États décident ensuite de développer et de fabriquer le système, une première livraison pourrait intervenir avant 2025. Le ministère allemand de la Défense a pris la direction de l’étude et versé une enveloppe de 18,6 millions d’euros pour la financer, les trois autres partenaires y contribuant à hauteur de 13,8 millions d’euros. La réalisation de l’étude aurait été confiée aux sociétés Airbus Defence and Space, Leonardo-Finmeccanica et Dassault. Airbus a estimé que le développement d’un système MALE RPAS européen coûtera 1 milliard d’euros. Un aspect important du projet est qu’il ne sera pas limité aux quatre États partenaires, mais qu’il pourrait à l’avenir s’ouvrir à d’autres pays.

41. La France et le Royaume-Uni mènent actuellement une étude sur la faisabilité d’un système de combat aérien futur (SCAF) ; d’un montant de 120 millions GBP, cette étude devrait rendre ses conclusions d’ici la fin 2016. Son but est de déterminer si le développement conjoint d’un système aérien de combat sans pilote est possible. Les sociétés participant à l’étude sont les suivantes : BAE Systems, Dassault, Finmeccanica Airborne et Space Systems, Rolls-Royce, Snecma/Safran et Thales. Les gouvernements britannique et français ont d’ores et déjà prévu la phase suivante, qui préparera au développement d’un aéronef de démonstration d’ici à 2025 et à la mise en place éventuelle d’une capacité opérationnelle totale d’ici à 2030. Ensemble, la France et le Royaume-Uni prévoient d’investir 2,2 milliards de dollars dans le projet.

IV. LES TENDANCES ET LES DÉFIS EN MATIÈRE DE CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES

A. LES CAPACITÉS ISR AÉROPORTÉES DANS L’ENVIRONNEMENT STRATÉGIQUE FUTUR

42. L’Alliance continuera à l’avenir à être confrontée à des menaces asymétriques, et le risque de se trouver face à des adversaires de niveau quasiment égal s’intensifie. L’OTAN et chacun des Alliés doivent par conséquent trouver un équilibre entre la nécessité de disposer de systèmes ISR aéroportés capables de prendre l'avantage sur le plan tactique au cours d’opérations asymétriques, mais aussi de collecter du renseignement dans le cadre de missions conventionnelles menées dans des espaces aériens disputés.

43. Les efforts déployés contre des groupes terroristes comme al-Qaida et Daech continueront de s’appuyer sur le renseignement. Les terroristes sont des cibles qui se déplacent rapidement et qui, souvent, peuvent se mêler à la population locale et ne réapparaître que pour frapper. Par ailleurs, l’expérience récente au Moyen-Orient et en Afrique du Nord montre que les terroristes trouvent refuge dans des zones vastes et souvent inaccessibles, où ils peuvent s’entraîner et préparer des opérations sans être repérés. Par conséquent, il sera toujours crucial de disposer de systèmes ISR aéroportés endurants, capables de fournir une couverture continue et étendue. Sur le plan tactique, le caractère décentralisé de l’environnement où ont lieu les opérations de lutte anti-insurrectionnelle nécessite impérativement que les capacités ISR soient déployées le plus avant possible sur le terrain, afin que les unités puissent rapidement exploiter les informations recueillies. Le déploiement à l’avant de ces capacités implique également d’en faire de même avec l’appui requis en matière d’analyse du renseignement, afin que les analystes puissent travailler en étroite collaboration avec le commandant des opérations. Les systèmes ISR d’appui sont souvent le principal moyen permettant de déterminer ce qu’une unité peut ou ne peut pas faire sur le terrain. Leur utilisation au niveau tactique risque donc de devenir encore plus décentralisée. Enfin, les récentes expériences opérationnelles ont montré que les plateformes ISR devront de plus en plus être dotées de capacités létales, leur fonction de collecte étant remplacée par une fonction d’attaque.

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44. L’utilisation de la plupart des plateformes ISR aéroportées se limite aujourd’hui à l’espace aérien non disputé. Or, un certain nombre d’États pouvant devenir des adversaires sont en train de développer un arsenal de dispositifs d’interdiction d’accès/de blocage de la zone (A2/AD) qui, de plus en plus, ferment l’espace aérien à de nombreuses capacités ISR. Les systèmes de défense aérienne pourraient complètement bouleverser l’équilibre des forces sur le théâtre d’opérations et empêcher la mise en œuvre d’une puissance aérienne. La prolifération des missiles tout comme leur précision croissante posent des problèmes pour les missions ISR. Les capacités de guerre électronique peuvent cibler les nœuds de communication tels que les satellites et les stations terrestres. Nombreux sont les procédés – généralement peu coûteux – qui permettent d’interférer avec les signaux électromagnétiques des systèmes ISR aéroportés et de les rendre inutilisables. Les cyberattaques peuvent en outre endommager gravement les réseaux ISR ainsi que les systèmes de commandement et de contrôle, et ainsi paralyser les aéronefs ISR, même les plus sophistiqués.

45. Afin de prévenir toute vulnérabilité, la conception des plateformes ISR aéroportées ne devra plus à l’avenir se concentrer uniquement sur la capacité des capteurs, l’exploitation des images et l’endurance des aéronefs. Il sera de plus en plus important que ces plateformes soient également dotées de capacités d’autodéfense, voire d’autoréparation. Ces capacités pourront prendre la forme de systèmes d’alerte laser, de récepteurs d’alerte radar, de systèmes de brouillage ou d’attaque électronique, et même de leurres remorqués. Une autre spécification importante pour la survivabilité des plateformes est leur faible détectabilité. Les plateformes ISR aéroportées de nouvelle génération devront passer inaperçues dans l’espace aérien disputé, car un certain nombre d’États mettent en œuvre des systèmes de défense aérienne intégrés qui ne peuvent être évités que par des plateformes furtives.

46. Par ailleurs, les opérations dans les environnements A2/AD ne se limiteront pas à des conflits conventionnels avec des adversaires de niveau quasiment égal. Une guerre irrégulière verra le jour, dans laquelle interviendront des acteurs non étatiques équipés de roquettes téléguidés, projectiles d’artillerie, mortiers et missiles. De la même manière que la combinaison d’une surveillance aérienne continue, de réseaux et d’armes téléguidées représente une nouvelle façon de s’attaquer aux insurgés, la prolifération des armes précitées permettra également à ces groupes d’affronter les forces de l’OTAN d’une nouvelle façon.

B. TRAITEMENT, EXPLOITATION ET DIFFUSION DES DONNÉES

47. Ces 15 dernières années, l’interaction entre les besoins opérationnels et les progrès technologiques s’est traduit par le fait que les technologies de capteurs intégrés aux plateformes ISR aéroportées ont beaucoup évolué. Un ensemble de capteurs peut désormais se concentrer sur une seule cible et la surveiller presque en continu, tandis que les systèmes de surveillance de grande portée sont capables de suivre sans interruption les mouvements de l’ennemi dans une zone de la taille d’une ville. Les technologies traditionnelles comme les capteurs électro-optiques et à infrarouges ne cessent de se perfectionner et de nouvelles technologies font leur apparition. Ainsi, certains capteurs – en cours de développement – fournissant une imagerie multi spectrale permettront de surveiller des zones encore plus vastes ; de même, les radars multifaisceaux tenteront de voir à travers les bâtiments et autres structures.

48. En conséquence de cette évolution des technologies de capteurs, les capacités de collecte de données continueront à se développer – et avec elle la nécessité de traiter des volumes de données encore plus grands. Or un système de collecte, fût-il le plus élaboré qui soit, est de peu d’utilité s’il ne s’accompagne pas d’une infrastructure d’analyse pour traiter et exploiter les données. L’émergence des données massives (ou « big data ») – c’est-à-dire de vastes ensembles de données de toutes sortes, provenant de sources très diverses et recueillies/distribuées à grande vitesse – ajoute à la complexité des tâches de renseignement, surveillance et reconnaissance. Dans la mesure où les capacités de collecte de données

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augmentent aujourd’hui plus rapidement que les capacités de traitement, de nouvelles technologies et de nouvelles méthodes sont requises pour pouvoir extraire de la valeur de ces vastes ensembles de données. Cela suppose des changements dans de nombreux domaines.

49. Premièrement, les capacités ISR aéroportées doivent être mieux intégrées au réseau de renseignement global, où des analystes peuvent rapidement traiter, fusionner et interpréter les données provenant de nombreuses sources différentes. Une fois traitées, les informations doivent être transmises aux bonnes personnes au bon moment. Pour parvenir à l’intégration souhaitée, les forces armées doivent améliorer la coordination entre les efforts distincts menés aux niveaux national et international dans les domaines du renseignement, des opérations et du commandement/contrôle, et cesser de travailler chacune de leur côté. Un meilleur partage du renseignement entre les différents corps d’armée ainsi qu’entre les Alliés et leurs partenaires sera également capital. La mise en place d’une architecture technologique et d’un cadre institutionnel communs faciliterait en outre la collaboration. Aussi, les stratégies, tactiques, techniques et procédures utilisées à l’OTAN dans le domaine ISR ont récemment été réformées. Un programme multinational de recherche et développement sur les capacités ISR – baptisé MAJIIC24 – a été le premier à mettre au point des normes concernant l’échange, la recherche et la diffusion des données ISR. Le MAJIIC2 a achevé ses travaux à la fin 2015, et un grand nombre de ses résultats sont actuellement utilisés à la fois au sein de l’OTAN et par les Alliés. Ces nouvelles dispositions devront être accompagnées en permanence d'une formation et d'un entraînement du personnel.

50. Deuxièmement, l’amélioration des capacités de calcul sera cruciale pour améliorer la gestion des grandes quantités d’informations recueillies. L’informatique cognitive et l’intelligence artificielle, capables de traiter de gros volumes de données en l’espace de quelques secondes, promettent de sérieux progrès dans le traitement et l’exploitation des données collectées. Les nouvelles technologies permettront d’améliorer le traitement en temps réel des données provenant de sources diverses à bord des plateformes ISR, et donc d’accroître les capacités de ces plateformes à identifier correctement les objets et les cibles. Petit à petit, les capteurs pourraient être équipés d’une fonction de reconnaissance des cibles totalement automatisée. Parallèlement, les résultats de l’analyse humaine pourraient être considérablement améliorés grâce à l’utilisation de techniques évolutives, interactives et intégrées qui sont en train de révolutionner l’interface entre l’homme et la machine. Ces techniques ont par exemple contribué à l’autonomisation croissante des systèmes sans pilote ainsi qu’à l’individualisation et la mobilité des systèmes de contrôle, d’où une plus grande facilité et rapidité d’accès aux informations. Les futurs travaux de recherche et développement dans le domaine des capacités ISR aéroportées devront se concentrer sur les fonctionnalités de « signalisation et d’information » de machine à machine. Par exemple, si un UAV détecte une cible avec un capteur à champ large, il pourra le signaler à un autre UAV en lui indiquant de poursuivre les recherches avec une caméra plus sensible. Dans le contexte des données massives, l’exploitation des informations provenant des capacités ISR requiert également un certain degré d’automatisation, car les analystes du renseignement deviennent une ressource rare, qui ne saurait être utilisée pour visionner des centaines d’heures de vidéos plein débit.

51. Troisièmement, l’amélioration de la connectivité peut rendre les systèmes ISR plus efficaces leur permettant de communiquer entre eux. Les nouvelles liaisons de données ont fourni une connectivité haut débit qui peut être utilisée pour le commandement et le contrôle des capacités ISR aéroportées et le transfert de données, par exemple pour transmettre des vidéos plein débit directement depuis l’appui ISR aérien jusqu’aux forces terrestres déployées à l’avant. Les progrès de la communication de machine à machine – dus à l’émergence de l’informatique en nuage et de l’analyse des données massives – vont pouvoir simplifier le traitement, l’exploitation et la diffusion des données, mais aussi accroître la vitesse et la précision de ces opérations avec de plus gros volumes d’informations. Ainsi, la connectivité plus rapide et plus sûre des plateformes terrestres et

4 Le projet MAJIIC2 (Multi-intelligence All-source Joint Intelligence Surveillance and Reconnaissance Coalition 2) a été mis en œuvre par neuf pays de l’Alliance (Allemagne, Canada, Espagne, États-Unis, France, Italie, Norvège, Pays-Bas et Royaume-Uni), avec le soutien de l’Agence OTAN d’information et de communication.

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aéroportées permettra notamment de fournir un appui de renseignement tactique en temps réel, et donc de procurer des avantages déterminants dans des environnements opérationnels où tout change rapidement. Le domaine du cyberespace permet également aux commandants des opérations de prendre des décisions rapidement et de les faire connaître tout aussi vite, et donc d’obtenir des résultats dans des délais qui étaient auparavant inimaginables. Les fonctions ISR reposaient autrefois principalement sur les plateformes. Aujourd’hui, c’est l’architecture ISR tout entière qui est en jeu. Il est indispensable de disposer de réseaux d’information et de communication fiables, solides et sûrs, qui permettent l’automatisation (la connexion des données entre elles) et la visualisation (la connexion entre l'humain et les données).

52. L’un des rôles de l’OTAN est de définir les formats pour l’élaboration et le partage de l’information, et l’interaction avec le renseignement. Les Alliés ont, à cet égard, pris une décision importante lors du sommet de Varsovie de 2016. Ils ont reconnu que « la réforme du renseignement à l'OTAN doit être un processus continu et dynamique » car le renseignement ne cesse de prendre de l’importance dans les activités de l’OTAN. Les Alliés ont donc « décidé de créer une division civilo-militaire Renseignement et sécurité, avec, à sa tête, un secrétaire général adjoint pour le renseignement et la sécurité. Celui-ci dirigera les activités de l'OTAN en matière de renseignement et de sécurité, et veillera à mieux tirer parti des ressources existantes et du personnel en place, tout en optimisant l'exploitation du renseignement fourni par les Alliés ».

C. L’ÉQUILIBRE ENTRE LES SOLUTIONS ISR AÉROPORTÉES AVEC OU SANS PILOTE

53. Les solutions ISR aéroportées sont de plus en plus fréquemment sans pilote, ce qui leur permet d’avoir une endurance beaucoup plus grande. Ainsi, les opérateurs peuvent suivre l’adversaire en continu et frapper en premier à l’endroit et au moment choisis par eux (et non par l’adversaire). En règle générale, les coûts de fonctionnement d’un UAV sont toujours plus faibles que ceux d’un système habité, en particulier grâce au rendement énergétique nettement meilleur. Bien que les coûts des UAV soient amenés à augmenter à mesure que ces véhicules deviendront de plus en plus sophistiqués, l’endurance et les faibles risques qui les caractérisent – par rapport aux solutions habitées – en font une plateforme ISR intéressante pour toutes sortes de missions (notamment de connaissance de la situation, de réaction rapide, de surveillance de cibles de grande importance et d’identification d'EEI). Lorsque les systèmes ISR de pointe sont armés et qu’ils sont utilisés en association avec des frappes air-sol précises, ils confèrent un avantage militaire décisif. Les limites d’utilisation des solutions sans pilote varient selon les systèmes et les besoins opérationnels. Pour citer un exemple, un système sans pilote requiert beaucoup plus de personnel au sol qu’une solution habitée. De surcroît, l’utilisation de systèmes sans pilote dans des espaces aériens partagés nécessite le règlement de certains aspects opérationnels, techniques et juridiques.

54. Malgré l’essor des systèmes sans pilote, les solutions ISR habitées demeurent, grâce à leurs capacités tactiques et leur agilité, extrêmement utiles pour apporter un appui aux opérations au sol. Les fonctions ISR peuvent être assurées soit par des aéronefs habités conçus spécialement à cet effet, soit par des aéronefs qui n’effectuent pas spécifiquement des missions ISR mais qui en ont les capacités du fait du degré de sophistication croissant de leurs capteurs embarqués. Ainsi, des appareils habités furtifs et équipés de technologies ISR et de dispositifs de transfert de données peuvent fournir des informations de première importance, notamment dans un environnement défavorable où les UAV sont vulnérables.

55. Les plateformes utilisables avec ou sans pilote (généralement des hélicoptères, mais aussi des aéronefs à voilure fixe) offrent une flexibilité opérationnelle. Ils complètent les drones par leur facilité de déploiement et leur discrétion, en raison de leur faible empreinte logistique. L’inconvénient en termes de capacité est néanmoins la nécessité d’y loger un pilote. À mesure que

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les niveaux d’autonomie et de fiabilité augmentent, les plateformes utilisables avec ou sans pilote risquent d’être moins intéressantes pour les missions ISR complexes.

56. Par ailleurs, les ballons, captifs ou dirigeables offrent des perspectives de durée opérationnelle de plusieurs semaines ; à mettre cependant en arbitrage avec leurs défauts : le manque d’allonge et l’absence d’armement.

57. Dans l’ensemble, les drones doivent s’inscrire dans un dispositif ISR complet, avec les satellites, les navires et les dispositifs au sol en raison de leur dépendance vis-à-vis de la météorologie. Les capacités à l'étude exigent en parallèle de développer des capacités SIC (système d’information et de contrôle).

D. AUTRES POSSIBILITÉS D’ÉVOLUTIONS TECHNOLOGIQUES

58. Les avancées technologiques, outre l’amélioration de celle des capteurs, permettront d’accroître les capacités des plateformes ISR aéroportées. Les efforts de miniaturisation de la technologie aboutiront à la création de systèmes sans pilote de taille toujours plus réduite, qui seront capables d’opérer dans des environnements urbains à forte densité de population, et même à l’intérieur des bâtiments. Les nouveaux matériaux peuvent – entre autres – alléger et renforcer les plateformes, réduire la détectabilité, fournir un blindage et améliorer les performances des moteurs. Les progrès techniques nous montrent qu’il est de plus en plus réalisable de développer des matériaux possédant des propriétés uniques. A titre d’exemple, les structures adaptatives (c’est-à-dire qui se transforment) améliorent considérablement les propriétés anti-détection. Ces « matériaux intelligents » peuvent, sous l’effet de stimuli extérieurs, se métamorphoser de façon contrôlée et rendre pratiquement indétectable un véhicule intervenant dans une mission ISR. Par ailleurs, la suppression des surfaces conventionnelles permettant d’assurer le contrôle de vol peut entraîner une amélioration considérable de la signature électromagnétique ou, du fait de l’allègement du poids, une plus grande endurance. Signe de la mise à profit des avancées réalisées dans le secteur civil, des sources d’énergie hybrides et alternatives sont utilisées pour alimenter les systèmes ISR aéroportés. Des recherches sont en cours sur les possibilités offertes par l’énergie solaire, la biomasse, l’hydrogène et l’alimentation électrique. La conception des moteurs s’appuie également sur les progrès du secteur privé pour répondre à la demande d’amélioration de la vitesse et du rendement énergétique. L’allongement de la durée opérationnelle (de quelques heures à quelques jours/semaines) devrait permettre de mener des opérations en continu dans les zones où il n’existe pas d’infrastructure pour produire des renseignements détaillés. L’amélioration constante de la résolution, ainsi qu’une grande endurance, permettront non seulement de vérifier la mise en œuvre des accords sur la maîtrise des armements, le désarmement, la non-prolifération et les cessez-le-feu, mais aussi de détecter des activités illicites (par exemple un trafic d’armes ou d’êtres humains). Cela augmentera par ailleurs les chances de réussite des missions de frappe, d’où un effet dissuasif important.

V. REMARQUES FINALES

59. Les risques et les menaces, à court et à long terme, auxquels l’OTAN doit faire face sont complexes, provenant de nombreuses directions et présentent des caractéristiques diverses. Dans ce contexte, les initiatives louables qui ont été prises par l’Alliance pour mettre au point des capacités ISR aéroportées de haute technologie doivent être mises en œuvre sans délai et de manière appropriée. La prochaine fois que l’Alliance s’engagera dans une opération militaire, elle ne pourra se permettre d’apprendre à conduire une mission ISR interarmées pendant le déroulement même de l’opération, comme cela est arrivé en Libye (où l’utilisation des systèmes ISR aéroportés a été très limitée, principalement à cause du manque de personnel compétent capable de coordonner efficacement les capacités ISR disponibles, ainsi que d’une certaine incompatibilité entre les systèmes états-uniens et européens). L’interopérabilité doit encore être

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améliorée, d’autant qu’il y a des chances pour que les opérations futures aient lieu dans des espaces aériens de plus en plus disputés. À mesure que les adversaires étatiques potentiels renforcent leur puissance militaire et que les insurgés acquièrent des armes plus performantes, l’OTAN et chacun des Alliés doivent être prêts à effectuer des missions ISR aéroportées dans des environnements de type A2/AD (déni d’accès/interdiction de zone).

60. L’amélioration du partage du renseignement est absolument indispensable, que ce soit au sein des États membres, entre les Alliés, et entre l’Alliance et ses partenaires. À l’heure actuelle, la demande de capacités ISR aéroportées est supérieure à l’offre. Une volonté politique est nécessaire pour développer les capacités requises : autrement dit, des plateformes ISR aéroportées pour collecter des informations et des systèmes d’analyse pour traiter, exploiter et distribuer les données. Telles sont les conditions qui doivent être réunies pour que l’initiative JISR de l’OTAN soit une réussite. Bien qu’il existe un stock important de capacités ISR aéroportées au sein de l’Alliance, celle-ci dépend encore trop des ressources états-uniennes. Des initiatives visant à accroître le stock d’UAV européens doivent donc être pleinement encouragées par les Alliés.

61. L’Alliance s’est engagée à produire une connaissance de la situation à 360 degrés et à respecter continuellement le principe d’anticipation stratégique. Les systèmes ISR aéroportés sont la clé pour y parvenir. Les Alliés ont jusqu’ici trop privilégié l’utilisation de ces systèmes en tant qu’appui tactique aux opérations en cours. Les capacités stratégiques du renseignement doivent donc continuer à être améliorées. Le communiqué du sommet de Varsovie a très justement mis l’accent sur ce point. Les nouvelles technologies offrent des possibilités encore plus nombreuses de surveiller des zones étendues pendant plusieurs jours voire plusieurs semaines. Si l’Alliance réussit à intégrer efficacement ces capacités dans la planification et la prise de décision stratégiques, alors elle pourra en retirer des avantages non négligeables. Aussi, maintenant que le MAJIIC2 est arrivé à son terme, les Alliés devraient envisager un nouveau programme OTAN de recherche et développement dans le domaine des capacités ISR.

62. Le contexte de restrictions budgétaires contraint les planificateurs de la défense à définir des priorités ; il n’est donc pas facile de maintenir des capacités ISR sur le plan tactique tout en les développant dans le domaine stratégique. Cela dit, compte tenu de l’incertitude stratégique qui caractérise l’environnement de sécurité transatlantique, un équilibre entre les capacités tactiques et stratégiques devra être opéré. Le sommet de Varsovie en 2016 a, une fois de plus, réaffirmé la nécessité pour l’OTAN d’accroître ses capacités ISR et d’adapter les initiatives actuelles. Le respect de l’engagement pris au pays de Galles en matière d'investissements de défense demeure primordial.

63. Comme l’a fait remarquer le lieutenant-général Shanahan devant la commission, le besoin de capacités ISR supplémentaires est infini, raison pour laquelle les décideurs militaires et politiques doivent se poser les questions suivantes : quelle finalité ont les capacités ISR ? Quelles sont leurs tâches ? Et combien en faut-il ? Il incombe en dernier ressort aux parlementaires nationaux de répondre à ces questions lorsqu’ils votent les budgets de la défense. Le rapporteur espère donc que ce document pourra contribuer à trouver les bonnes réponses, un aspect extrêmement important pour l’Alliance à une époque d’incertitude stratégique.

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BIBLIOGRAPHIE CHOISIE(Pour de plus amples informations sur les sources qui ont servi à la rédaction de ce rapport, veuillez

contacter le directeur de la commission)

Boland, Rita, « Air Force ISR Changes After Afghanistan », Signal, 1er mai 2014, http://www.afcea.org/content/?q=air-force-isr-changes-after-afghanistan

Canan, James, « ISR in Today’s War », Aerospace America, mars 2010Datla, Annand and Robert Haffa, « Joint Intelligence, Surveillance, and Reconnaissance in

Contested Airspace », Air & Space Power Journal, mai-juin 2014Fransico, Mike and Deptula Dave, « Air Force ISR Operation », Air & Space Power Journal,

Hiver 2010Greenleaf, Jason R., « The Air War in Libya », Air & Space Power Journal, mars-avril 2013Joint Air Power Competence Centre, « Air and Space Power in NATO: Future Vector », Kalkar,

Germany: Joint Air Power Competence Centre, octobre 2014Joint Air Power Competence Centre, Present Paradox – Future Challenge, Kalkar, Germany: Joint

Air Power Competence Centre, mars 2014Kimminau, Jon, « A Culminating Point for Air Force Intelligence, Surveillance, and

Reconnaissance », Air & Space Power Journal, novembre-décembre 2012Morton, Tyler, « Manned Airborne Intelligence, Surveillance, and Reconnaissance », Air & Space

Power Journal, novembre-décembre 2012Odierno R., Nichoel E. Brooks, and Francesco P. Mastrachio, « ISR Evolution in the Iraqi

Theater », Joint Force Quarterly, Issue 50, 3e trimestre 2008PR Newswire, Global C4ISR Market - By Platform, Region and Vendors - Forecasts and Trends

(2015-2020), PR Newswire, 9 mars 2016

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AVEC PILOTEBoeing E-3F AWACS

Altitude maximale : 12 500 mÉquipage maximal : 23Vitesse maximale : 1 111 km/hEndurance maximale : 11 hDistance maximale : 8 000 km

Boeing E-8 Joint Surveillance and Target Attack Radar System (JSTARS)

Altitude maximale : 12 802 mÉquipage maximal : 34Vitesse maximale : 945 km/hEndurance maximale : 9 h

Boeing P-8A Poseidon

Altitude maximale : 12 500 mÉquipage maximal : 9Vitesse maximale : 907 km/hEndurance au combat : 4 hDistance au combat : 2 222 km

Boeing RC-135W Rivet Joint

Altitude maximale : 15 200 mÉquipage maximal : 30Vitesse maximale : 933 km/hEndurance maximale : 12 hDistance maximale : 5 550 km

Northrop Grumman RQ-4 Global Hawk

Breguet Atlantique 2

Altitude maximale : 9 100 mÉquipage maximal : 12Vitesse maximale : 648 km/hEndurance maximale : 18 hDistance maximale : 7 963 km

Lockheed AP-3C Orion

Altitude maximale : 10 668 mÉquipage maximal : 13Vitesse maximale : 750 km/hEndurance maximale : 15 hDistance maximale : 4 400 km

Lockheed CP-140 Aurora

Altitude maximale : 10 668 mÉquipage maximal : 10Vitesse maximale : 750 km/hEndurance maximale : 17 hDistance maximale : 9 300 km

Lockheed U-2 Dragon Lady

Altitude maximale : >21 336 mÉquipage maximal : 1Vitesse maximale : 805 km/hEndurance maximale : 12 hDistance maximale : >9 600 km

Turkish Aerospace Anka UAV

SANS PILOTESagem Patroller

Altitude maximale : 6 000 mÉquipage maximal : 0Vitesse maximale : 200 km/hEndurance maximale : 20 hDistance maximale : 180 kmCharge utile par mission : >250 kg

General Atomics MQ-9 Reaper

Altitude maximale : 15 240 mÉquipage maximal : 0Vitesse maximale : 444,5 km/hEndurance maximale : 27 hDistance maximale : 1 850 kmCharge utile par mission : 1 746 kg

General Atomics MQ-1C Gray Eagle

Altitude maximale : 8 840 mVitesse maximale : 309 km/hEndurance maximale : 25 hDistance maximale : 400 kmCharge utile par mission : 488 kg

General Atomics Certifiable Predator B

Altitude maximale : >13 716 mVitesse maximale : 370 km/hEndurance maximale : 40 hDistance maximale : 200 km

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ÉCHANTILLON DE PLATEFORMES ISR AEROPORTÉES

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Altitude maximale : 18 288 mVitesse maximale : 575 km/hEndurance maximale : >34 hDistance maximale : 22 779.6 kmCharge utile par mission : 1 360 kg

Northrop Grumman MQ-4C Triton

Altitude maximale : 16 000 mVitesse maximale : 575 km/hEndurance maximale : 24 hDistance maximale : 15 186 kmCharge utile par mission : 2 500 kg

IAI Heron TP

Altitude maximale : 13,716 mVitesse maximale : 207 km/hEndurance maximale : 36 hoursDistance maximale : 350 kmCharge utile par mission : 1,000 kg

Piaggio Aerospace P.1HH Hammerhead

Altitude maximale : 13,716 mVitesse maximale : 732 km/hEndurance maximale : 16 hoursDistance maximale : 8,150 kmCharge utile par mission : 227 kg

Altitude maximale : 9 144 mVitesse maximale : 217 km/hEndurance maximale : 24 hDistance maximale : 4 896 kmCharge utile par mission : 200 kg

Baykar/Kale Kalip Bayraktar UAV

Altitude maximale : 7 315 mVitesse de croisière :   130 km/hEndurance maximale : 24 hCharge utile par mission : >55 kg

Elbit Hermes 450

Altitude maximale : 5 486 mVitesse maximale : 176 km/hEndurance maximale : 18 hDistance maximale : 200 km

Elbit Hermes 900

Altitude maximale : 9 144 mVitesse maximale : 220 km/hEndurance maximale : 36 hDistance maximale : 2 500 km

Watchkeeper UAV

Altitude maximale : 4 572 mVitesse maximale : 176 km/hEndurance maximale : 16 hDistance maximale : 200 km

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