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« Sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire. » (Lénine, 1902, Que faire ?) Les dossiers du PCMLM 1949 et la Chine populaire La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne Juin 2014 (1 re édition) Parti Communiste Marxiste-Léniniste-Maoïste de France

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« Sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire. »

(Lénine, 1902, Que faire ?)

Les dossiers du PCMLM

1949 et la Chine populaire

La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne

Juin 2014 (1re édition)

Parti Communiste Marxiste-Léniniste-Maoïste de France

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Les dossiers du PCMLM

Résumé

La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne est centrée sur la question de l'idéologie et de sonrapport avec l'opinion publique, question parfaitement assimilée par Mao Zedong. L'objectif est alorsdouble : approfondir l'analyse du phénomène révisionniste et comprendre pleinement le matérialismedialectique. Les Gardes Rouges, jeunes activistes ayant lancé le phénomène des dazibaos, menaient ainsides opérations d'agitation et de propagande visant à critiquer et à combattre le révisionnisme et àdéfendre et répandre la « pensée Mao Zedong ». Les ouvriers des usines prirent également part à cemouvement sous le nom de « rebelles » et de « révolutionnaires prolétariens » et se révoltèrent contreles partisans de la voie capitaliste. Shanghai fut, à cette époque, un lieu cristallisant la lutte contre lesdroitistes et l'ultra-gauche, une ultra-gauche dont l'objectif était de liquider littéralement le Parti lui-même. Un comité révolutionnaire fondé sur la « Triple Union », armée, cadres et révolutionnairesprolétariens, fut alors installé à la direction de Shanghai. Du fait de l'importance de l'armée pourempêcher les affrontements idéologiques d'aller à la guerre civile, comme le désirait les droitistes etl'ultra-gauche, cette « Triple Union », dont l'objectif était au contraire d'unifier au maximum les masses,fut généralisée dans tout le pays. Mais la situation imposée par la tentative de coup d'État de Lin Piao,le responsable de l'armée, figure majeure de la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne, devenaitextrêmement difficile : Deng Xiaoping put revenir à la direction du Parti et, dès la mort de Mao Zedong,le bloc conservateur prit complètement le pouvoir.

Table des matières1. L'arrière-plan..........................................................................................................................................22. Révisionnisme et opinion publique.........................................................................................................43. Dazibaos et Gardes Rouges.....................................................................................................................74. La « pensée Mao Zedong ».....................................................................................................................95. L'action des Gardes Rouges..................................................................................................................106. La bataille de Shanghai et le modèle de la « Triple Union »................................................................127. Généralisation de la « Triple Union »...................................................................................................138. La tentative de coup d'État par Lin Piao.............................................................................................149. La Chine change de couleur..................................................................................................................15

1. L'arrière-plan

La Grande Révolution CulturelleProlétarienne (GRCP) a été un phénomèneessentiel de l'histoire du socialisme chinois, etelle suit directement le Grand Bond en Avant.Pour comprendre son sens, il faut saisir lagrande compréhension qu'a eu Mao Zedong dela question de l'idéologie et de son rapport avecl'opinion publique, en deux points essentiels,intrinsèquement liés. Déjà, Mao Zedong avaitconstaté la prise du pouvoir sans accrocs réelsréussi par le révisionnisme en URSS : une fois le

pouvoir pris par en haut, les forcesrévolutionnaires y furent liquidéesadministrativement sans réel souci, au moyen depurges s'étalant de 1953 à 1956. Dans cecontexte et avec cette compréhension, MaoZedong fut en mesure d'approfondir l'analyse duphénomène révisionniste.

L'un des exemples frappants fut la pièce dethéâtre intitulée La Destitution de Hai Hui,écrite par le vice-maire de Pékin Yao WenHuan. On y voit comment un fonctionnaireinspecteur est condamné par l'empereur pour

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La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne

avoir fait exécuter un fils de noble ayant tué unpaysan et enlevé sa fille. Mise en scène en 1961,elle est une allusion à la destitution de PengDehuai suite à son opposition à Mao Zedong etau Grand Bond en Avant. Elle est de nouveaujouée en 1965, alors que l'offensive de LiuShaoqi et Deng Xiao Ping atteint un niveauextrêmement élevé de conflictualité. En réponse,dans le journal Wenhui Bao, le 10 novembre1965, puis dans Le Quotidien du Peuple le 30,est publié un article de Yao Wenyuan attaquantla pièce.

Cet article provoqua des troubles au seind'un groupe de réflexion sur la culture organisépar Mao Zedong et composé notamment dumaire de Pékin Peng Zhen, du responsable dudépartement de propagande Lu Dingyi, durédacteur en chef du Quotidien de Pékin WuLengxi, ainsi que du responsable de la sécuritéKang Sheng. Il provoqua également unaffrontement interne, dans le Parti lui-même,aboutissant à l'expulsion de ses rangs de YangShangkun, responsable des affaires internes,ainsi qu'au remplacement à la tête de l'ArméePopulaire de Libération de Luo Ruiqing. Par lasuite, l'offensive idéologique sera menée contrela clique anti-Parti dirigée par Peng Zhen, LuDingyi, Yang Shangkun et Luo Ruiqing, en mai1966, aboutissant à la formation du Groupe de

la Révolution Culturelle.

Ensuite, il y a la question du matérialismedialectique et de sa compréhension. La luttecontre le révisionnisme n'est pas la seule chosequi amena à la Grande Révolution CulturelleProlétarienne. En effet, le Grand Bond en Avantavait montré une limite dans l'action que lesmasses pouvaient mener, les choses s'avéraientplus complexes que prévues. Cependant, il seposait la question de savoir d'où provenait cettecomplexité. On en revient au fait que la

contradiction est interne. Stalinel'avait compris, mais il pensaitqu'on pouvait simplement agirsur cette contradiction, demanière unilatérale parfois, sanss'apercevoir qu'en fait, la réalitéa plusieurs plans, plusieurscouches : agir sur lacontradiction interne peut setransformer en idéalisme si on nevoit pas à quoi cettecontradiction est liée comme planmatériel.

Pour cette raison, au milieudes années 1960, Mao Zedongfait sauter le cadre. Lematérialisme dialectique selonLénine et Staline considérait déjà

l'univers comme infini, comme sans limites. MaoZedong va lui généraliser ce point de vue, avecle matérialisme dialectique « absorbant »pratiquement le matérialisme historique.L'humanité et le marxisme eux-mêmesdeviennent relatifs, de par le mouvementininterrompu de la matière infinie : il y a là unsaut qualitatif par rapport au matérialismedialectique de l'époque de Lénine et Staline.

Voici des remarques faites par Mao Zedongdans discussion au sujet d'un article du grandphysicien japonais Soichi Sakata :

« Le monde est infini. À la fois dans letemps et l'espace, le monde est infini etinépuisable. Au-delà de notre systèmesolaire, il y a de nombreuses étoiles qui,ensemble, forment la Voie Lactée. Au-delàde cette galaxie, il existe de nombreuses

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autres galaxies. Considéré globalementl'univers est infini, et considéréétroitement, l'univers est aussi infini. Nonseulement l'atome est divisible, mais c'estaussi le cas du noyau atomique et il peutêtre divisé à l'infini […].Tous les individus et toutes les chosesspécifiques ont leurs naissances, leursdéveloppements, et leurs morts. Chaquepersonne meurt, parce qu'elle est née.L'être humain doit mourir, et Chang San1

étant un homme, il doit mourir. Personnene peut voir Confucius qui vivait il y a2000 ans, parce qu'il devaitmourir. L'humanité est née, etpar conséquent l'humanité doitaussi mourir. La Terre est née,et ainsi elle doit égalementmourir. Toutefois, quand nousdisons que l'humanité mourra etque la Terre mourra, c'estdifférent de ce que disent leschrétiens au sujet de la fin dumonde. Lorsque nous parlons dela mort de l'humanité et decelle de la Terre nous voulonsdire que quelque chose de plusavancé que l'humanité viendrala remplacer, et ceci est unstade plus élevé dans ledéveloppement des choses.J'ai dit que le marxisme avaitégalement sa naissance, sondéveloppement et sa mort. Celapeut sembler absurde. Maiscomme Marx dit que toutes leschoses qui se déroulent ont leurmort, comment cela ne serait-ilpas applicable au marxisme lui-même ?Dire qu'il ne mourra pas, c'est de lamétaphysique. Naturellement, la mort dumarxisme signifie que quelque chose deplus élevé que le marxisme viendra leremplacer. »

2. Révisionnisme et opinion publique

Voici comment la situation de la périodejuste avant la Grande Révolution CulturelleProlétarienne est présentée dans un éditorial duHongqi (« Le drapeau rouge ») de 1966 :

« Il [Mao Zedong] a souligné : Pourrenverser un pouvoir, il faut commencerpar opérer dans le domaine de lasuperstructure et de l'idéologie et par bienpréparer l'opinion ; cela est valable aussibien pour une classe révolutionnaire quepour une classe contre-révolutionnaire […].Depuis la «Renaissance », la bourgeoisiede l'Europe ne cessa de critiquerl'idéologie féodale et de propagerl'idéologie bourgeoise. C'est après avoir

1 L'équivalent de Dupont, Durand, etc.

préparé l'opinion pendant plusieurs sièclesque la bourgeoisie des pays européenss'empara successivement du pouvoir auxXVIIe et XVIIIe siècles, instaurant sapropre dictature. Marx et Engelsentreprirent de propager la doctrinecommuniste il y a plus d'un siècle. C'étaitpour préparer l'opinion à la prise dupouvoir par le prolétariat. Ce n'estqu'après une préparation de l'opinion quiprit plusieurs dizaines d'années que larévolution du prolétariat russe estparvenue à prendre le pouvoir […].

En dernière analyse, l'histoire de laconquête du pouvoir par le prolétariatchinois est celle de l'assimilation de lapensée de Mao Zedong par les masses desouvriers, des paysans et des soldats. Ellesdisent à juste titre : «Sans la pensée deMao Zedong, pas de Chine nouvelle » […].Après la transformation socialiste de lapropriété des moyens de production, lesidéologies bourgeoise et féodaleconstituent la position la plus importantede la classe des propriétaires fonciers et dela bourgeoisie qui ont été renversées. Dansleurs activités de restauration, ils agissentd'abord dans le domaine de l'idéologie etils utilisent, de mille et une façons, leursidées corrompues afin de tromper lesmasses. Agir dans le domaine del'idéologie et façonner l'opinion publiquesont des préparatifs de la bourgeoisie pourrenverser la dictature du prolétariat. Et,au moment propice, elle n'hésite pas àmonter un coup d’État, par tel moyen outel autre, pour s'emparer du pouvoir.En Union soviétique, après l'établissementdes rapports socialistes de production, larévolution culturelle prolétarienne n'a pasété sérieusement entreprise. Aussi

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La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne

l'idéologie bourgeoise s'est-elle répanduechaque jour davantage, corrompant lesesprits et désagrégeant d'une manièredifficilement perceptible les rapportssocialistes de production. Après la mortde Staline, le groupe révisionnistekhrouchtchévien a, de façon encore plusflagrante, préparé l'opinion publique à lacontre-révolution. Plus tard, il a entreprisune « révolution de palais » pourrenverser la dictature du prolétariat et ausurpé la direction du Parti, clé l'armée etdu gouvernement […].Le camarade Mao Zedong nous aenseigné : « La lutte de classes entre leprolétariat et la bourgeoisie, entre lesdiverses forces politiques et entre lesidéologies prolétarienne et bourgeoise seraencore longue et sujette à des vicissitudes,et par moments elle pourrait mêmedevenir très aiguë. Le prolétariat chercheà transformer le monde selon sa propreconception du monde, et la bourgeoisieveut en faire autant. A cet égard, laquestion de savoir qui l'emportera, dusocialisme ou du capitalisme, n'est pasencore véritablement résolue. » (De lajuste solution des contradictions au seindu peuple)La révolution culturelle prolétarienne apour but de régler la question de savoirqui l'emportera dans le domaineidéologique, du prolétariat ou de labourgeoisie. C'est une tâche historiqueardue, à long terme, qui se présente danstous les domaines de notre travail. Uncertain nombre de camarades considèrentla polémique entre le prolétariat et labourgeoisie réactionnaire dans lesjournaux et périodiques comme une simple« polémique sur le papier » entre deslettrés, qui « ne peut produire de grandseffets ». Certains autres se confinent dansleurs activités professionnelles, nes'intéressent pas à la lutte sur le frontidéologique et culturel et ne prêtentaucune attention à la lutte de classes dansle domaine de l'idéologie.Ces attitudes sont entièrement erronées etextrêmement dangereuses. Si nous laissonsrépandre l'idéologie bourgeoise, ladictature du prolétariat finira par setransformer en dictature bourgeoise, et lesystème socialiste en système capitaliste,en système semi-colonial et semi-féodal. Àces camarades, nous devons crier bienfort : Camarades, l'ennemi est en traind'aiguiser son couteau pour nous couper latête et renverser notre pouvoir, commentpourriez-vous rester indifférents comme sivous n'aviez rien vu ni entendu ? […]Durant les années des difficultéséconomiques, les génies malfaisantsavaient fait leur apparition et les attaqueslancées par la bourgeoisie réactionnairecontre le Parti et le socialisme avaient été

les plus furieuses. Dans les milieuxphilosophiques, Yang Hsien-tchen prônabruyamment une thèse absurde niantl'identité de la conscience et de l'être, envue de rabattre l'activité subjective de lamasse des ouvriers, des paysans et dessoldats, et de s'opposer au grand bond enavant. Il sortit ensuite la théorie « deuxfusionnent en un », dans l'intention defournir des « fondements » philosophiquesà la ligne politique on ne peut plusréactionnaire consistant à « vivre enbonne intelligence avec l'impérialisme, laréaction et le révisionnisme moderne et àfournir peu d'assistance à la lutterévolutionnaire des peuples de tous lespays », ainsi qu'à « se réserver davantagede parcelles individuelles, à établirdavantage de marchés libres, à multiplierles entreprises disposant librement deleurs profits et supportant leurs proprespertes, et à fixer un quota de productionpar foyer paysan ».Les soi-disantes « autorités » quireprésentaient la bourgeoisie et s'étaientinfiltrées dans le Parti brandirentfurieusement les trois massues que sont lesépithètes : « vulgaire », « simpliste » et« pragmatiste », pour s'opposer à ce queles ouvriers, paysans et soldats étudient etappliquent de manière vivante les œuvresdu président Mao. Usant de leursfonctions et pouvoirs, elles interdirent auxjournaux et revues de publier les essaisphilosophiques des ouvriers, des paysanset des soldats. En même temps, certains« experts » bourgeois, sous prétexted'effectuer des recherches sur l'histoire cléla philosophie, prêchèrent à cor et à cri« la liberté, l'égalité et la fraternité » etglorifièrent bruyamment Confucius, seservant de ce cadavre pour propager leurassortiment complet de points de vuebourgeois.Dans les milieux de la science économique,Souen Ye Fang et d'autres avancèrenttoute une série d'absurdes théoriesrévisionnistes. Ils s'opposèrent à ce qu'onmette la pensée de Mao Zedong et lapolitique au poste de commandement etpréconisèrent de donner la primauté auprofit et à l'argent. Ils tentèrentvainement de modifier les rapportssocialistes de production et de transformerles entreprises socialistes en entreprisescapitalistes.Dans les milieux de la recherchehistorique, un ramassis d'« autorités »bourgeoises attaqua furieusement larévolution qui y avait débuté en 1958. Ces« autorités » s'opposèrent à ce qu'onmette le marxisme-léninisme, la pensée deMao Zedong au poste de commandementdans la recherche historique, etproclamèrent que les documents et lesmatériaux historiques étaient tout. Elles

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excipèrent du soi-disant « historisme »pour s'opposer à la théorie marxiste-léniniste sur la lutte des classes. Ellesvouent une haine profonde aux historiensrévolutionnaires qui répudient empereurs,rois, généraux et ministres et mettent enrelief paysans et guerres paysannes. Ellesportent aux nues les premiers, maiss'acharnent à calomnier ces derniers. Cesont les « monarchistes » bourgeois desmilieux historiques. Certains d'entre euxsont des anticommunistes chevronnés.Wou Han et Tsien Po-tsan sont de telspersonnages. Dans les milieux littéraires et artistiques,les représentants de la bourgeoisie n'ontépargné aucun effort pour prôner uneligne révisionniste complète en matière delittérature et d'art, afin de contrecarrer laligne du président Mao dans ces domaines,et ils se sont évertués à glorifier leursprétendues traditions des années 30.« Ecrire la vérité », « la large voie duréalisme », « l'approfondissement duréalisme », l'opposition au « rôle décisifdu sujet », « les personnages indécis »,l'opposition à « l'odeur de la poudre àcanon », « la synthèse de l'esprit del'époque », « rompre avec les canons et serebeller contre l'orthodoxie », etc., tellessont leurs thèses les plus représentatives.À la « lumière » de ces thèses sontapparues un grand nombre de mauvaisesœuvres, antiparti et antisocialistes :drames, films, romans, ouvrages surl'histoire du cinéma, ouvrages surl'histoire de la littérature.Dans les milieux enseignants, lesreprésentants de la bourgeoisie se sontefforcés de s'opposer à la politique définiepar le président Mao dans le domaine del'éducation, politique devant permettre àtous ceux qui bénéficient de cetteéducation clé se former sur le plan moral,intellectuel et physique, afin qu'ilsdeviennent des travailleurs cultivés, ayantune conscience socialiste. Ils s'évertuent às'opposer au système d'enseignement mi-travail mi-étude et prônent les« théories » sur l'éducation et le systèmed'enseignement révisionnistes de l'Unionsoviétique. Ils nous disputent avecacharnement la jeune génération ettentent vainement d'en faire la relève de labourgeoisie.Dans les milieux de la presse, lesreprésentants de la bourgeoisie se sontopposés de toutes leurs forces à ce quel'information ait une mission d'orientationet ont professé la conception bourgeoiseselon laquelle elle devait « communiquerdes connaissances » […].Les représentants de la bourgeoisie, quis'étaient infiltrés dans le Parti ets'opposaient au drapeau rouge en arborantle « drapeau rouge », ont été plongés dans

une confusion extrême. Ils ont recouru entoute hâte à cinq « talismans » poursoutenir et protéger la Droite bourgeoise,opprimer et attaquer la Gaucheprolétarienne.Le premier « talisman » s'appelle« encouragement à l'expression desopinions ». Les représentants de labourgeoisie, qui se sont infiltrés dans leParti et s'opposent au drapeau rouge enarborant le « drapeau rouge », s'efforcentde déformer la politique du Parti surl'encouragement de l'expression desopinions, la privent de son contenu declasse et la transforment en libéralisationbourgeoise […].Le deuxième « talisman » s'appelle « laconstruction avant la destruction ». Lesreprésentants de la bourgeoisie, qui se sontinfiltrés dans le Parti et s'opposent audrapeau rouge en arborant le « drapeaurouge », se posent en « dialecticiens » […].Le troisième « talisman » s'appelle :s'opposer aux « savants despotes degauche » et empêcher leur apparition.Chaque fois que la Gauche prolétariennecontre-attaquait la bourgeoisie, lesreprésentants de celle-ci, qui se sontinfiltrés dans le Parti et s'opposent audrapeau rouge en arborant le « drapeaurouge », ont exigé, entre autres prétextes,des méthodes « minutieuses » et« approfondies », accusant injurieusementla Gauche d'être « brutale », d'être le« bâton ». Dans la grande riposte contrela bourgeoisie, ils recourent encore à unautre « talisman » – s'opposer aux« savants despotes de gauche » etempêcher leur apparition –, s'imaginantpouvoir abattre la Gauche prolétarienne[…].Le quatrième « talisman » est le « débatpurement académique ». Les représentantsde la bourgeoisie, qui se sont infiltrés dansle Parti et s'opposent au drapeau rouge enarborant le « drapeau rouge », présententla lutte de classes dans le domaineidéologique comme un « débat purementacadémique », dans le double but decamoufler l'attaque de la Droitebourgeoise contre le Parti et le socialismeet d'entraver la contre-attaque de laGauche prolétarienne. Nous voudrionsdemander à ces messieurs : Mais qu'y a-t-il vraiment d'académique dans l'article« Hai Jouei invective l'Empereur » et lapièce La Destitution de Hai Jouei de WouHan, ainsi que dans les propos obscursantiparti et antisocialistes de Teng Touo,Liao Mo-cha et consorts ? Le « débatpurement académique » est unesupercherie dont se sert constamment labourgeoisie. Dans la société de classes,rien n'est « purement académique ». Lesétudes académiques sont toutes basées surla conception du monde par une classe

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La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne

déterminée et subordonnées à la politique.D'une manière ou d'une autre, ellesservent la politique et l'économie d'uneclasse déterminée […].Enfin, le dernier « talisman », qui estimportant, s'appelle « tous sont égauxdevant la vérité », « chacun a sa part depropos erronés », « un combat confus ».Dans la contre-attaque du prolétariatcontre la bourgeoisie, les représentants decelle-ci, qui se sont infiltrés dans le Partiet s'opposent au drapeau rouge enarborant le « drapeau rouge », agitent ce« talisman », d'une part, pour que leurshommes tiennent tête, défendentopiniâtrement leurs positions et nereculent pas d'un seul pouce, d'autre part,afin de semer la confusion, de pêcher eneau trouble et de saisir l'occasion pourlancer une contre-attaque. «Tous sontégaux devant la vérité », c'est le motd'ordre à cent pour cent bourgeois, unmot d'ordre entièrement hypocrite. Il n'estaucunement question d'égalité entreclasses antagonistes. La vérité a uncaractère de classe. A notre époque, seulle prolétariat peut détenir la véritéobjective, car ses intérêts de classe sontentièrement conformes aux lois objectives.Il y a longtemps que la bourgeoisieréactionnaire et décadente n'a plus rien àvoir avec la vérité. Ce qu'elle appelle la«vérité » ne peut qu'être une absurditéallant à rencontre du courant de l'époqueet des lois objectives.

Il n'est aucunement question d'égalitéentre le prolétariat et la bourgeoisie, entrel'idéologie prolétarienne et l'idéologiebourgeoise, entre la vérité prolétarienne etl'absurdité bourgeoise ; si ce n'est pas levent d'Ouest qui l'emporte sur le ventd'Est, c'est le contraire. »

3. Dazibaos et Gardes Rouges

Le 16 mai 1966, le Parti Communiste deChine produit une circulaire visant à critiquer legroupe, composé de cinq personnes, chargé de laquestion de la révolution culturelle. On y litl'accusation suivante :

« Le Comité central décide d'annuler le« plan du compte rendu sur le débatacadémique actuel, établi par le groupedes cinq chargé de la révolutionculturelle », approuvé et mis encirculation le 12 février 1966, de dissoudrele « groupe des cinq chargé de larévolution culturelle » et les services quilui sont rattachés, et de constituer unnouveau groupe chargé de la révolutionculturelle relevant directement du Comitépermanent du Bureau politique. Le plan du compte rendu élaboré par le« groupe des cinq » est foncièrementerroné. Il est contraire à la ligne définiepar le Comité central et par le camaradeMao Zedong pour la révolution culturellesocialiste, contraire au principe directeurconcernant les classes et la lutte desclasses en société socialiste, formulé en1962 à la dixième session plénière duComité central issu du VIIIe Congrès duParti. »

Ce document, accompagné par d'autres,ouvrit la porte à une révolte demasses, dont le détonateur fut àla fin mai 1966 une affiche àgrands caractères écrits à la main,un « dazibao », critiquant ladirection de l'université de Pékin,direction qui allait dans le sensdu révisionnisme. Face à larépression, les activistes àl'origine du dazibao (qui est suivipar d'autres), s'organisèrent enGardes Rouges, menant desopérations d'agitation et depropagande contre les partisansde la « ligne noire ». Mao Zedongsoutint alors lui-même le dazibaoet dans la foulée la jeunesse sesouleva, amenant à la mi-juin à

une paralysie des lycées et des universités,malgré les tentatives de maintien de l'ordreorganisées par Liu Shaoqi et Deng Xiaoping quienvoyèrent des équipes « idéologiques »

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Les dossiers du PCMLM

contrôler les Gardes Rouges. Les partisans de laligne rouge mobilisèrent quant à eux en faveurdu mouvement. L'éditorial du 2 juin 1966 duQuotidien du peuple, intitulé « Les affiches engrands caractères sont des « miroirs magiques »qui font apparaître tous les monstres », expliqueainsi :

« Il est indispensable de mobiliseraudacieusement les masses et d'adopter laméthode consistant à exprimerfranchement et complètement les opinionset les critères des jugements, de rédigerdes affiches en grand caractères (dazibao)et de réaliser de grands débats.Il faut que les masses extériorisentcomplètement ce qu'elles pensent, qu'ellesdécouvrent tous les représentants de labourgeoisie qui s'opposent au PartiCommuniste, au socialisme et à la« pensée Mao Zedong » ; il fautqu'elles mettent en lumière tous lesmonstres et qu'elles réduisent enpoussière, unité par unité, tous lesbastions réactionnaires de labourgeoisie.Le président Mao dit : « Les affichesen grand caractères sont un nouveautype d'arme extrêmement utile ». Lesaffiches en grand caractère sontquelque chose de très bien ! Ce sontdes « miroirs magiques » qui fontapparaître tous les monstres.Si chacun d'entre nous s'en sert, ilest possible que soient découverts,rapidement et sous tous les angles,les véritables visages des sinistrescliques anti-Parti et anti-socialiste.Ces affiches présentent différentesopinions et révèlent descontradictions de toute espèce. Aumoyen de ces opinions etcontradictions, nous devons parvenirà comprendre la situation, àdécouvrir les problèmes et à les résoudre.Ces affiches posent le problème de ce quiest juste et de ce qui ne l'est au sujet desproblèmes les plus importantes, pour quetout le monde discute, analyse et critique[…].Êtes-vous révolutionnaire ? Dans ce cas,vous accueillerez avec enthousiasme lesdazibaos, vous serez en leur faveur, vousvous mettrez en tête pour les rédiger etvous mobiliserez sans réserve les massespour qu'elles fassent de même et tirent auclair les problèmes. Êtes-vous un défenseurde « Sa Majesté ? » Dans ce cas, lesdazibaos vous feront mourir de peur. Vouspâlirez de terreur et vous aurez des sueursfroides à les voir apparaître, et voustenterez par tous les moyens d'empêcherles masses d'en rédiger.

Avoir peur des dazibaos signifie avoir peurdes masses, peur de la révolution, peur dela démocratie populaire et peur de ladictature du prolétariat. »

Mao Zedong répondit par la suite à un appeldes Gardes Rouges par son propre dazibao,appelé « Bombardez le quartier général – Monpremier Dazibao ». Écrit le 5 août 1966, durantla XIe Session plénière du huitième ComitéCentral du Parti communiste de Chine, il futdirectement publié par l'organe du Parti, LeQuotidien du Peuple. Mao Zedong y écrit quedes éléments bourgeois sont présents dans leParti, qu'ils soutiennent une ligne visant àréaliser la dictature de la bourgeoisie, qu'ilss'opposent systématiquement auxrévolutionnaires.

Or, si l'on relie cela à la déviation de droitede 1962, ainsi qu'à celle de 1964 qui, selon MaoZedong, était de gauche en apparence mais dedroite en essence, alors la menace est réelle.Pour cette raison, le mouvement se prolongeajusqu'à prendre un caractère officiel, avec le 8août 1966, la « décision du Comité central surla grande Révolution culturelle prolétarienne ».

On y lit :

« La Grande Révolution CulturelleProlétarienne en cours est une granderévolution qui touche l'homme dans cequ'il a de plus profond. Elle représenteune nouvelle étape, marquée par une plusgrande profondeur et une plus grande

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La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne

ampleur du développement de larévolution socialiste de notre pays […].Bien que renversée, la bourgeoisie tente decorrompre les masses et de conquérir leurcœur au moyen de la pensée, de la culture,des mœurs et des coutumes anciennes desclasses exploiteuses en vue de sarestauration. Le prolétariat doit faire lecontraire : opposer une riposte de front àchaque défi lancé par la bourgeoisie dansle domaine idéologique et transformer laphysionomie morale de toute la sociétéavec la pensée, la culture et les mœurs etcoutumes nouvelles qui sont propres auprolétariat.A l'heure actuelle, nous avons pour but decombattre et d'écraser les responsablesengagés dans la voie capitaliste, decritiquer les « autorités » académiquesréactionnaires de la bourgeoisie, decritiquer l'idéologie de la bourgeoisie et detoutes les autres classes exploiteuses, et deréformer le système d'enseignement, lalittérature, l'art et toutes les autresbranches de la superstructure qui necorrespondent pas à la base économiquesocialiste, ceci pour contribuer à laconsolidation et au développement dusystème socialiste. »

Le 18 août 1966, Mao Zedong apparaît entenue militaire pendant six heures, avec lebrassard des Gardes Rouges qui lui est remis,lors d'un meeting massif de 800.000 personnessur la place Tian'anmen. Jusqu'en novembre, ily aura six autres meetings, rassemblant au total11 millions de Gardes Rouges venus de tout lepays, qui vont former l'armature de la GrandeRévolution Culturelle Prolétarienne.

4. La « pensée Mao Zedong »

Le mouvement des Gardes Rouges se fondesur la « pensée Mao Zedong ». L'objectif de cemouvement est la diffusion de celle-ci et commele formule Le Quotidien du peuple dans le titrede son éditorial du 1er août 1966 : « Tout lepays doit être une grande école de la pensée deMao Zedong ». Dans le document de juin 1966,dont le titre est « La pensée de Mao Zedong,jumelle et microscope de notre causerévolutionnaire », on lit ainsi :

« La grande révolution socialiste qui sedéveloppe actuellement dans le domaineculturel est une grande révolution quibalaiera tous les génies malfaisants, quiréformera l'idéologie des hommes et les

touchera dans ce qu'ils ont de plusprofond.A quelle arme doit-on faire appel pourbalayer ces génies malfaisants ? Avecquelle idéologie doit-on armer l'esprit del'homme et le transformer ? L'arme idéologique la plus puissante, laseule, c'est la grande pensée de MaoZedong. La pensée de Mao Zedong estnotre orientation politique, elle est leguide suprême de nos actions. Elle est lajumelle et le microscope avec lesquels nousobservons et analysons toute chose dansles domaines idéologique et politique. »

Il faut remarquer ici que, de manièreimpropre, en français les traductions parlèrentinitialement (comme dans le texte cité) de« pensée de Mao Zedong », au lieu de « penséeMao Zedong », ce qui fut rectifié à partir d'avril1969, date du IXe congrès du Parti Communistede Chine. La « pensée Mao Zedong » n'est, eneffet, pas simplement la pensée de Mao Zedong,c'est un concept qui exprime ce que Mao Zedonga synthétisé de la Chine du point de vue dumatérialisme dialectique. C'est le marxismeappliqué aux conditions concrètes de la Chine,et cela dépasse donc largement la simplepersonne de Mao Zedong. Vu de l'extérieur, sanscompréhension du principe de « pensée »,nombre d'observateurs ont simplement cru voirune apologie de Mao Zedong, alors qu'il s'agitd'une question d'interprétation idéologique dansun contexte précis.

Les Gardes Rouges sont ainsi le mouvementde la jeunesse défendant la « pensée MaoZedong » et la replaçant, de l'extérieur, au cœurdu Parti Communiste, dont certains cadres ontchoisi la voie capitaliste. Plusieurs documentsservent alors d'armature à la diffusion de cettepensée. Il y a tout d'abord une compilation decitations, le fameux « petit livre rouge ». Cen'est cependant qu'un aspect de la question, carles citations sont elles-mêmes reliées auxdocuments dont elles sont tirées.

Il y a ainsi surtout trois célèbres documentsqui comptent en tant que tel : A la mémoire deNorman Béthune tout d'abord, qui date dedécembre 1939 et traite de l'internationalismede ce médecin canadien qui aida les Brigades

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Internationales en Espagne, puis l'armée rougeen Chine. Puis on a Servir le peuple etComment Yukong déplaça les montagnes, de1944 et 1945, qui abordent pareillement laquestion de l'état d'esprit qu'il faut avoir, pleind'abnégation. Mao Zedong salue la mémoired'un militant ayant donné sa vie pour servir lepeuple : « Le camarade Zhang Side est mort enservant les intérêts du peuple, et sa mort a plusde poids que le mont Taishan ». Il encourageégalement, avec le texte sur Yukong, à voir leschoses sur le long terme, réussissant à déplacerles montagnes à force de persévérance. Tiré d'unconte chinois, cette histoire fut même racontéepar Mao Zedong à la conclusion du VII e Congrèsdu Parti Communiste de Chine, en 1945.

A côté de ces documents, on retrouveégalement L'élimination des conceptionserronées dans le Parti et Contre le libéralisme,qui, pareillement, concernent la question de laméthode, des principes de la vie quotidienne.Enfin, on a les œuvres choisies, en quatrevolumes, avec notamment les fameux De lapratique, De la contradiction, Analyse desclasses de la société chinoise, Problèmesstratégiques de la guerre révolutionnaire enChine. Ces œuvres n'obtiennent une réellediffusion qu'à partir de 1967, où le chiffre desventes depuis 1951 atteint 86,4 millions, contreseulement 11 millions encore l'annéeprécédente...

C'est d'autant plus frappant qu'avant 1966,c'est le document connu en France sous le titrePour être un bon communiste de Liu Shaoqi quifut largement diffusé, à 20 millionsd'exemplaires en Chine populaire et dansd'autres pays, avec à partir de 1962 une versionexpurgée de toute référence à Friedrich Engels,Staline, puis même grosso modo Mao Zedong, etenfin Karl Marx et Lénine. Le titre original étaitLa théorie du perfectionnement individuel ducommuniste et republié en 1962, avec en arrière-plan la tentative de restauration capitaliste dansl'esprit de Nikita Sergueïevitch Khrouchtchev, ilcontenait des attaques contre ceux qui ont « lamanie de la lutte », « l'habitude de repousser

tout compromis et de soulever des tempêtesdans des verres d'eau ». Aux yeux de LiuShaoqi, « selon ces gens qu'on dirait atteints dedémence, toute paix au sein du Parti seraitcondamnable. »

Par conséquent et à l'inverse, le mouvementde la jeunesse organisée en Gardes Rouges étaitainsi une force qui vient rétablir la primauté del'idéologie communiste en Chine, au moyen de la« pensée Mao Zedong ».

5. L'action des Gardes Rouges

L'objectif des Gardes Rouges était de frapperles partisans de la voie capitaliste infiltrés dansle Parti, afin de protéger la « pensée MaoZedong », et, par là même, la natureauthentique du Parti Communiste de Chine.Furent ainsi organisées des campagnes dedénonciation, par l'intermédiaire de l'agitationet de la propagande, avec les dazibaos enparticulier, jusqu'à parvenir à généraliser desmouvements de masses forçant les cadresrévisionnistes à s'avouer vaincus et à faire leurautocritique. La règle était de ne pas utiliser deviolence physique et de ne frapper que la petitminorité de cadres soutenant le révisionnisme,afin que les masses s'approprient entièrementl'expérience de la critique des révisionnistes.

Ce fut ainsi une véritable bataille idéologiqueet culturelle, où les Gardes Rouges étaientfaibles au départ mais dont le succès devaitdevenir irrésistible. Leurs apparitions furentmilitantes : les Gardes Rouges étaient le plussouvent en tenue kaki et avaient dans tous lescas un brassard rouge, où était écrit en chinois« Garde Rouge » (Hong Wei Bing). Ilsn'hésitaient pas à faire des « longues marches »pour aller dans tout le pays soutenir leurspositions.

Le mouvement va alors à s'étendre, et ced'autant plus que les Gardes Rouges étaientconstitués de jeunes de 12 à 30 ans, alors quetout le système éducatif était paralysé. Ilsmenèrent des actions visant les symbolesréactionnaires, comme par exemple des noms de

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rue, ou bien encore l'interdiction du petitcommerce de poissons rouges, d'oiseaux et decages, etc. Ils procédèrent pareillement à desperquisitions – 30.000 à la fin septembre 1966 –des logements d'anciens propriétaires fonciers oucapitalistes, confisquant les anciens titres depropriété, les livres de généalogie, l'opium, desbiens symboliques de l'ancien régime, etc. Toutcela relevait du combat contre les « quatrevieilleries » : les vieilles idées, la vieille culture,les vieilles coutumes et les vieilles habitudes. Lajeunesse portait le nouveau qui rejette l'ancien,la Chine nouvelle rejetait l'ancienne.

Dans le document Nous critiquons le vieuxmonde, on lit comme reflet de cette démarche :

« Nous critiquons les systèmesd'exploitation, les classes exploiteuses,l'impérialisme, le révisionnisme moderne,tous les réactionnaires, et les propriétairesfonciers, les paysans riches, les contre-révolutionnaires, les mauvais éléments etles éléments de droite. Nous critiquons lesreprésentants de la bourgeoisie, les« savants » et les « autorités » de labourgeoisie. Nous critiquons la conceptionbourgeoise de l'histoire, les théoriesacadémiques bourgeoises de toutes sortes,la pédagogie et le journalisme de labourgeoisie, sa conception de l'art et de lalittérature, nous critiquons toutes sespièces de théâtre, tous ses films et toutesses œuvres littéraires et artistiquesnéfastes.En un mot, nous critiquons le vieuxmonde, ainsi que la vieille idéologie, la

vieille culture, les vieilles mœurs que lesimpérialistes et toutes les classesexploiteuses utilisent pour empoisonner lepeuple travailleur ; nous critiquons toutesles idéologies non prolétariennes, toutesles idées réactionnaires qui sont enantagonisme avec le marxisme-léninisme etavec la pensée de Mao Zedong […].Les forces bourgeoises s'évertuent àprofiter de cet avantage pour préparer ledomaine spirituel et l'opinion publique àun retour au capitalisme. Au cours des 17années écoulées depuis la Libération, desluttes longues et acharnées se sont succédéen Chine entre les deux classes et les deuxvoies sur les fronts idéologique et culturel.Ces luttes, et en particulier la lutte quiest devenue récemment plus ouverte entre

la bourgeoisie qui travaille à larestauration du capitalisme etle prolétariat qui s'y oppose,ont pleinement mis en évidencecette question.Le président Mao Zedong disaitil y a longtemps que tout cequi est réactionnaire est pareil :si on ne le frappe pas,impossible de le faire tomber.C'est comme lorsqu'on balaie ;dans la règle, là où le balai nepasse pas, la poussière ne s'enva pas d'elle-même. Il en estainsi de toutes les choses dumonde. Nous devons détruire levieux monde avant de pouvoiren construire un nouveau. Envue d'édifier la nouvelleidéologie, la nouvelle culturedu socialisme et ducommunisme, nous devonscritiquer et liquidercomplètement la vieilleidéologie, la vieille culture de la

bourgeoisie et leur influence.L'essence même du marxisme-léninismeest critique et révolutionnaire. Il a pourbase la critique, la lutte et la révolution.Ce que nous appliquons, c'est laphilosophie militante du matérialismedialectique. La lutte, c'est la vie même.Nous avons une force de combat d'autantplus grande et nous sommes d'autant pluscapables de faire progresser notre grandecause que nous avançons le long d'une voiede lutte correcte.Le président Mao Zedong a souventsouligné: « Sans destruction, pas deconstruction ; sans barrage, pas decourant ; sans une pause, pas deprogrès. » La destruction en question,c'est la critique, la révolution. Pour ladestruction, il est nécessaire de raisonner ;raisonner c'est construire. La destructionvenant en premier lieu, elle sera toutnaturellement accompagnée de laconstruction. C'est précisément dans la

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lutte ininterrompue contre le systèmeidéologique bourgeois que le marxisme-léninisme et la pensée de Mao Zedong sesont établis et développés.Le président Mao Zedong a dit : « Ce quiest juste se développe toujours dans unprocessus de lutte contre ce qui est erroné.Le vrai, le bon et le beau existent toujoursen regard du faux, du mauvais et du laid,et se développent toujours dans la luttecontre eux. » »

6. La bataille de Shanghaiet le modèle de la « Triple Union »

C'est à Pékin que le mouvement des GardesRouges prit son envol au départ, la jeunesse detout le pays affluant dans la capitale chinoisepour rejoindre officiellementl'initiative. Toutefois, lemouvement des Gardes Rougesémula les masses en général, quise lancèrent dans la bataillepolitique. La question dépassaitdésormais la simple jeunesse. Parconséquent, les usines furentégalement touchées, avec unevague de révolte contrel'organisation du travail mise enplace par les partisans de la voiecapitaliste. Les ouvriers se lançantdans ce mouvement prirent le nomde « rebelles » et de« révolutionnaires prolétariens ».

La ville de Shanghai devientalors l’abcès de fixation de labataille. Shanghai est, à cette époque, lepremier centre industriel de Chine, et dixmillions de personnes y vivaient. Les forcesconservatrices au sein du Parti Communiste yétaient particulièrement fortes. Ainsi, lorsque seforme, le 9 décembre 1966, le Quartier Généraldes ouvriers rebelles révolutionnaires deShanghai, composé d'ouvriers venant de 200usines, la municipalité conservatrice organise deson côté le Quartier Général des unités dedéfense rouge ouvrières pour la défense de MaoZedong, avec pas moins de 700.000 personnes.

Les revendications se développant, la

municipalité prit les devants en satisfaisantcelles-ci, ce qui fit tâche d'huile et permit auxforces gauchistes de profiter de la tolérancedroitière, au point que la ville finit par êtrecoupée du reste du pays. Par contre, ennovembre 1966, la délégation desrévolutionnaires prolétariens devant partir pourPékin fut bloquée à Anjing, une petite gare aunord de Nankin. La faction de la municipalitéfut ainsi défaite dans sa tactique, mais donnal'élan aux forces d'ultra-gauche formant unenouvelle faction. Cette ultra-gauche entendaitnon pas appuyer la critique de la minorité decadres devenue révisionniste, mais littéralementliquider le Parti lui-même.

S'appuyant sur les travailleurs précaires, dontl'existence avait été permise par les partisans dela voie capitaliste, et sur les étudiants influencéspar les idéologies petites-bourgeoises, l'ultra-gauche se lança à l'offensive. Son objectifimmédiat était ainsi d'attaquer le GroupeCentral de la Révolution Culturelle, justementorgane du Parti. Une fois celui-ci brisé, l'ultra-gauche entendait développer sa propre politique,et elle était appuyée par de jeunes ouvriersentendant non pas simplement remettre encause les règles dans les usines, maispratiquement les supprimer.

Sur le plan de la méthode, l'ultra-gauche

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menait également des attaques simplementpersonnelles contre les partisans de la voiecapitaliste, basculant aisément dans la brutalité,faisant fi du rôle idéologique et éducatif demobilisation des masses pour rejeter la ligne derestauration du capitalisme. L'ultra-gaucheappuyait également une interprétationsubjectiviste de cette ligne, voyant uniquementl'égoïsme comme son moteur idéologique. Elleprônait par conséquent la négation pure etsimple des réglementations et des différences desalaires, revendiquant une lutte à outrance nepouvant aboutir qu'à l'effondrement général dupays.

Sur le plan idéologique, évidemment,l'économisme était allié au spontanéisme et àl'empirisme pur et simple, la « pensée MaoZedong » étant manipulée pour en faire« l'idéologie » de la dynamique entendant nonpas réformer l'économie, mais littéralement laliquider. Cela amena la naissance du Comitéd'union « Lutte totale » des rebellesrévolutionnaires de Shanghai, qui organisa unegrève générale que seule l'armée parvint àstopper au début février 1967.

Le mouvement d'ultra-gauche se prolongeacependant, jusqu'à s'organiser de manièrenationale et clandestine, en tant que « corpsd'armée du 16 mai », fondé lors d'un congrès, le1er juillet 1967, avant de se faire écraser dès lemois d'août avec l'arrestation de ses principauxdirigeants. Toutefois, la ville de Shanghai libéréedes droitistes et des gauchistes permit untransfert de pouvoir en un comitérévolutionnaire fondé sur la « Triple Union »composée de l'armée, des cadres et desrévolutionnaires prolétariens.

7. Généralisation dela « Triple Union »

Le transfert de pouvoir à la « Triple Union »dans la ville de Shanghai devint un modèle pourtout le pays, où le principe fut appliqué zonepar zone, les dernières étant celles du Sinkianget du Tibet en septembre 1968 et annoncées

dans un éditorial commun du Quotidien duPeuple et du Quotidien de l'armée. Cela n'allapas sans mal. Dans la ville de Wuhan, lesGardes Rouges et les rebelles, au nombre de400.000, affrontait la faction du « Million dehéros » qui profitait de l'appui du général ChenZaidao, qui fit même arrêter Xie Fuzhi, undirigeant révolutionnaire envoyé par MaoZedong pour ordonner au général de cesser untel soutien. Dans le Hunan, il y eut également lafraction ultra-gauchiste du Shengwulian (Comitéd'Union des révolutionnaires prolétariens duHunan), qui devint le centre névralgique del'ultra-gauchisme dans tout le pays.

En fait, l'intervention massive des forcesconservatrices, par l'intermédiaire du « Millionde héros », posait le problème de leur influenceau sein de l'armée elle-même. L'armée, dansl'affaire de Wuhan, a fini par rejoindre la causedu pouvoir central, mais la fraction ultra-gauchiste a considéré, à partir de cetteexpérience, qu'il fallait rejeter totalement la« Triple Union » pour former directement uneCommune populaire chinoise à l'échelle du paystout entier. C'est pourquoi, dès le 5 septembre1967, le pouvoir central exigea que les armesprises à l'armée – qui n'avait pas le droitd'intervenir militairement contre les masses –soient rendues. C'est par l'armée que le pouvoircentral, sous l'égide du Groupe s'occupant de laRévolution Culturelle, empêchait que lesaffrontements idéologiques, allant parfoisjusqu'aux accrochages violents et aux bagarresgénérales et plus rarement à des opérationsarmées, n'aillent là où tant l'ultra-gauche queles droitistes voulaient qu'ils aillent : la guerrecivile.

La Grande Révolution CulturelleProlétarienne était une révolution dans ledomaine idéologique et culturel, et non pas unerévolution visant à détruire l'État socialiste lui-même, disposant d'une base solide. La formulede Mao Zedong était la suivante : « Il faut êtrefermement convaincu que l'immense majoritédes masses est bonne et que les mauvaiséléments sont en nombre infime ». Par

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conséquent, étaient refusées tant les initiativeslancées par les forces conservatrices, comme leLiandong (Comité d'Action Unie) portée par desenfants de cadres défendant leurs privilèges et ceouvertement au nom de leur ascendance etn'hésitant pas à mener des attaques armées, queles ultra-gauchistes généralisant l'esprit defraction (un état d'esprit qui fascinera lafraction radicale de la petite-bourgeoisiefrançaise à la fin des années 1960, surtout àParis).

Le pouvoir central pratiquait donc unepolitique des petits pas, visant à unifier aumaximum les masses, ce qui aboutit finalementà la généralisation de la « Triple Union » danstout le pays. Ce n'est qu'au bout de ceprocessus que la Grande Révolution CulturelleProlétarienne fut considérée comme un succès, àl'occasion de la XIIe session plénière du ComitéCentral, en octobre 1968. Ce n'est de même qu'àpartir de cette date que Liu Shaoqi futpubliquement condamné : auparavant, il étaitfait référence à lui par des allusions,principalement « le Khrouchtchev chinois » ainsique « le plus haut des responsables engagésdans la voie capitaliste ». Pareillement, DengXiao Ping était désigné par l'expression « unautre haut responsable engagé dans la voiecapitaliste ».

Puis, le Parti Communiste de Chine tint sonIXe congrès, en avril 1969, rétablissant la« pensée Mao Zedong » après que celle-ci eutété rejetée en 1956, lors du précèdent congrès.

8. La tentative de coup d'Étatpar Lin Piao

En apparence, en 1969, la Grande RévolutionCulturelle Prolétarienne avait été un succèsplein. Cependant, l'intervention de l'armée pourappuyer les rebelles et les Gardes Rouges posaitun problème concret. En l'occurrence, lors duIXe congrès, le responsable de l'armée, Lin Piao,formula un document pour dire que la GrandeRévolution Culturelle Prolétarienne étaitprécisément terminée. De la même manière, Lin

Piao se posait contre la réhabilitation des cadresayant fait leur autocritique, et il sabotait leremplacement des comités révolutionnaires,supervisés par l'armée, par les comitésprovinciaux. En fait, Lin Piao comptait profiterde la situation pour que l'armée prenne lecontrôle du Parti et du pays.

En pratique, des 170 membres du ComitéCentral issu du IXe congrès du PartiCommuniste de Chine, 74 étaient desreprésentants de l'Armée Populaire deLibération, et 38 d'entre eux étaient descommandants ou des commissaires régionaux.Dans cet esprit militariste, Lin Piao avaitégalement écrit en 1965 un document intituléVive la guerre victorieuse du peuple ! où ilassimilait les continents asiatique, africain etlatino-américain aux campagnes encerclant lespays capitalistes eux-mêmes assimilés aux villes.Sa ligne était en apparence très à gauche, trèsradicale.

Lin Piao avait ainsi établi solidement saposition en soutenant le mouvement des GardesRouges et en mettant en avant le « petit livrerouge », posant toujours devant les foules aveclui dans les mains et s'affirmant comme leprincipal défenseur de Mao Zedong. Il bataillaitfermement pour qu'il y ait un poste dePrésident de la République et que Mao Zedongaccepte ce poste, même contre son gré. Le planétait de faire de Mao Zedong une icôneinoffensive, prétexte à une dictature militaire.Pour ce faire, Lin Piao réhabilitait la théorie du« génie ».

Voici comment Lin Piao tentait de construireune lecture idéaliste de ce que représentait MaoZedong :

« Mao Zedong est le plus grand dirigeantde notre Parti et toutes ses paroles sontles normes de notre mouvement. Celui quis'opposerait à lui, le Parti entier luiréglerait son compte, le Parti tout entierle critiquerait. Mao Zedong a réglébeaucoup plus d'affaires que Marx,Lénine, Engels. Eux, n'ont pas dirigépersonnellement une révolutionprolétarienne. Ils ne ressemblent pas àMao Zedong. Alors que lui, quel grandrôle il a joué sur le front des luttes

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politiques, et surtout quel rôle dans lescombats militaires ! Lénine n'a pas duréaussi longtemps que Mao Zedong. Lapopulation de la Chine est dix fois celle del'Allemagne, trois fois celle de la Russie,ses expériences révolutionnaires sontfécondes. La Chine est supérieure en tout.Dans tout le pays et dans le monde… MaoZedong est le plus grand homme. »

Lin Piao, à une conférence élargie duBureau politique le 18 mai 1966

Lors de la seconde session du nouveauComité Central, réunie à Lu-Shan, du 23 aoûtau 3 septembre 1970, Lin Piao remit en avant laquestion de la Présidence de la République. Cefut un échec. Et devant cet échec, Lin Piao pritles devants et sa clique organisa un coup d’État,qui échoua, Lin Piao mourant en Mongolie lorsde sa fuite, le 13 septembre 1971, dans le crashde son avion se dirigeant vers l'URSS.

Lin Piao entraîna dans sa chute son acolyteChen Boda, ainsi que 32 généraux, 25commandants de région ou de district, 35secrétaires provinciaux du Parti, 40 titulaires et28 suppléants du Comité Central, mais sa mortne fut rendue publique qu'une année après. Eneffet, Lin Piao avait été en apparence la secondegrande figure de la Grande RévolutionCulturelle Prolétarienne, il était considérécomme celui qui remplacerait Mao Zedong.

C'est une catastrophe politique, qui est tout

d'abord résolue par la tenue, du 24 au 28 août1973, du Xe congrès du Parti Communiste deChine. La proportion de militaires dans lenouveau Comité Central n'est plus que de 28 %,16 % des titulaires sont nouveaux, comme 49 %des suppléants. Seulement 56 membres duComité Central sur 319 étaient présents au VIIet VIIIe congrès. Mais pour triompher de lafaction de Lin Piao, Mao Zedong a dû composeravec d'autres forces. C'est alors qu'un momentclef va se jouer pour la Chine populaire.

9. La Chine change de couleur

La situation imposée par la tentative de coupd'Etat de Lin Piao était extrêmement difficile.Les droitistes avaient des arguments contre lagauche, puisque Lin Piao avait été une figure

majeure de la Grande RévolutionCulturelle Prolétarienne. Pourcette raison, Deng Xiaoping putrevenir à la direction du Parti,qui était divisée en troisfractions principales :

− celle de Mao Zedong et dedirigeants de gauche, notammentde Shanghai,

− celle des droitistes, menéepar Deng Xiaoping,

− celle des centristes,conduite par Zhou Enlai, quiprivilégiait l'efficacité étatique.

Les droitistes faisaient ensorte que Lin Piao soit critiquécomme relevant d'une déviation

gauchiste, alors que la gauche bataillait pourqualifier son évolution d'ultra-gauchiste, c'est-à-dire de gauchiste en apparence, de droitiste enessence. Au Xe congrès, c'est l'interprétationfaite par la gauche qui triompha : une grandecampagne contre Confucius fut menée, la lignede Lin Piao étant considérée comme proche dansson contenu idéaliste, avec la théorie du génie.Cependant, la fraction conduite par DengXiaoping faisait en sorte que les centristesentrent en convergence avec elle, sous les

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prétextes de modernisation et de rationalisation.Deng Xiaoping soutenait l'importation detechnologies, les stimulants matériels pour lestravailleurs, ainsi que des règlements strictsdans la gestion des entreprises.

Le nouveau responsable de l'Armée Populairede Libération, Ye Jianying, soutint lui-mêmeune fraction d'anciens cadres favorables à cettetendance conservatrice. La situation était ainsiprécaire pour la gauche. À la mort de ZhouEnlai, en 1976, 100.000 personnes manifestèrenten soutien au bloc conservateur, qui finit parprendre le pouvoir dès la mort de Mao Zedongen septembre 1976.

Le nouveau régime lançaimmédiatement une campagnemassive contre la « bande desquatre », composée en fait desquatre dirigeants de la gauche :Jiang Qing, Zhang Chunqiao,Yao Wenyuan et Wang Hongwen.Le nouveau dirigeant, HuaGuofeng qui dirigeait en quelquesorte la fraction centristebureaucratique, est cependantéjecté en 1978, avec DengXiaoping comme chef de lafaction partisane de la voiecapitaliste.

Ainsi se voyait vérifiée lathèse de Mao Zedong justifiant la GrandeRévolution Culturelle Prolétarienne :

« La lutte de classes, la lutte pour laproduction et l'expérimentationscientifique sont les trois grandsmouvements révolutionnaires del'édification d'un pays socialiste puissant.Ces mouvements constituent une sûregarantie permettant aux communistes dese garder de toute bureaucratie, de seprémunir contre le révisionnisme et ledogmatisme et de demeurer toujoursinvincibles, une sûre garantie permettantau prolétariat de s'unir avec les largesmasses travailleuses et de pratiquer unedictature démocratique.Si, en l'absence de ces mouvements, onlaissait se déchaîner les propriétairesfonciers, les paysans riches, les contre-révolutionnaires, les mauvais éléments etles génies malfaisants, tandis que nos

cadres fermeraient les yeux et que nombred'entre eux n'opéreraient même pas dedistinction entre l'ennemi et nous, maiscollaboreraient avec l'ennemi, se laissantcorrompre, démoraliser et désunir par lui,si nos cadres étaient ainsi entraînés dansle camp ennemi ou si l'ennemi parvenait às'infiltrer dans nos rangs, et si beaucoupde nos ouvriers, paysans et intellectuels selaissaient aussi séduire ou intimider parl'ennemi, alors il se passerait peu detemps, peut-être quelques années ou unedécennie, tout au plus quelques décennies,avant qu'une restauration contre-révolutionnaire n'ait inévitablement lieu àl'échelle nationale, que le parti marxiste-léniniste ne devienne un partirévisionniste, un parti fasciste, et quetoute la Chine ne change de couleur. »

C'est cette juste compréhension qui justifie laconsidération selon laquelle Mao Zedong acontribué au matérialisme dialectique. Commel'enseigne Gonzalo dans Sur le marxisme-léninisme-maoïsme :

« Il [Mao Zedong] établit sa grande thèse :« Le Pouvoir naît du fusil » et il résolu laquestion de la conquête du Pouvoir dansles nations opprimées par le chemind'encerclement des villes par lescampagnes, en établissant ses loisgénérales. Il définit brillamment, en ladéveloppant, la théorie de la lutte declasses dans le socialisme au sein duquelse poursuit la lutte antagonique entreprolétariat et bourgeoisie, entre cheminsocialiste et chemin capitaliste et entresocialisme et capitalisme. Il établitégalement que, concrètement, la questionde qui vaincra n'était pas définie,problème qui demanderait du temps, le

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La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne

déroulement d'un processus derestauration et de contre-restaurationpour que le prolétariat se consolidedéfinitivement au Pouvoir au moyen de ladictature du prolétariat.Finalement, il formula la grandiosesolution de transcendance historique, de laGrande Révolution Culturelleprolétarienne, comme continuation de larévolution socialiste sous la dictature duprolétariat. Ces questions fondamentales,énoncées presque simplement, mais quisont connues et indéniables, démontrentcomment le Président Mao a développé lesparties intégrantes du marxisme etl'évidente élévation du marxisme-léninismeà une nouvelle, troisième et supérieureétape : le marxisme-léninisme-maoïsme,principalement le maoïsme […].Dans une perspective historique c'estl'aspect le plus transcendant du marxisme-léninisme que le Président Mao aitdéveloppé ; c'est la solution du grandproblème en suspend de la continuation dela révolution sous la dictature duprolétariat ; « cela représente une nouvelleétape, encore plus profonde et plus large,du développement de la révolutionsocialiste de notre pays. »Quelle était la situation qui se présentait ?Ainsi que l'exprime la Décision duP.C.Ch. sur la Grande RévolutionCulturelle Prolétarienne : « Bien qu'ayantété renversée, la bourgeoisie essaie encorede se servir des vieilles idées, de laculture, des habitudes et des coutumes desclasses exploitées pour restaurer sonPouvoir. Le prolétariat doit faireexactement le contraire : il doit porter descoups directs et impitoyables à tous lesdéfis de la bourgeoisie dans le domaineidéologique et transformer la physionomiespirituelle de toute la société enemployant ses propres idées nouvelles, sa

culture ses propres habitudes et sescoutumes.Notre objectif actuel est d'écraser, aumoyen de la lutte, ceux qui occupent despostes de direction et qui suivent lechemin capitaliste. Il faut critiquer etrépudier les « autorités » réactionnairesbourgeoises dans le domaine académique,critiquer et répudier l'idéologie de labourgeoisie et des autres classesexploiteuses et transformer l'éducation, lalittérature et l'art et les autres domainesde la superstructure qui ne correspondentpas à la base économique du socialisme,afin de faciliter la consolidation et ledéveloppement du système socialiste. »C'est dans ces conditions que se produisitle plus violent processus politique et laplus vaste mobilisation de masses que lemonde ait jamais connu et dont lesobjectifs furent défini ainsi par lePrésident Mao : « L'actuelle GrandeRévolution Culturelle Prolétarienne estabsolument nécessaire et très opportunepour consolider la dictature duprolétariat, prévenir la restauration ducapitalisme et construire le socialisme. »De plus, soulignons deux points :1) que la GRCP (Grande RévolutionCulturelle Prolétaire) représente un jalondans le développement de la dictature duprolétariat en vue de la consolidation duprolétariat au Pouvoir et qui se concrétisadans les Comités Révolutionnaires ;et 2) la restauration du capitalisme enChine, après le coup contre-révolutionnaire de 1976, n'est pas lanégation de la GRCP, mais représente,simplement, une partie de la lutte entrerestauration-contre-restauration et aucontraire elle nous démontre latranscendante importance historique de laGRCP dans l'inexorable marche del'humanité vers le communisme. »

Première publication : juin 2014

IllustrationsPremière page : Le président Mao est le soleil le plus rouge dans nos cœursp3 : Les slogans de la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne retentissentp4 : Le Président Mao observe la Révolution Culturelle dans toute son étenduep7 : Premier dazibao marxiste-léninistep8 : Le lancement de la Grande Révolution Culturelle Prolétariennep11 : Célébrons la onzième plénière du Comité central issu du VIIIe Congrès du Parti

communiste chinois !p12 : Révolution de Janvier (1967)p15 : Notre Grande Révolution Culturelle Prolétarienne bouleverse notre sièclep16 : La pensée Mao Zedong au service du monde entier

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