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Notes du mont Royal Cette œuvre est hébergée sur « No- tes du mont Royal » dans le cadre d’un exposé gratuit sur la littérature. SOURCE DES IMAGES Google Livres www.notesdumontroyal.com

 · 2 Ciao-nuis. sur tous les points de la carte, arrêtons-les sur la ville de Narbonne. Voyez la Méditerranée, qui étend, non loin la, ses flots bleuâtres sur des rives sablonne

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Notes du mont Royal

Cette œuvre est hébergée sur « No­tes du mont Royal » dans le cadre d’un

exposé gratuit sur la littérature.SOURCE DES IMAGES

Google Livres

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CINQ-MARS.

II.

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CINQ-MARS,

on

W333 (NDNBWIRAüIlŒü

SOUS LOUIS 11H;

RAI LI COI Il

ALES!) DE VIGNY-Quatriëmc ébitian,

Aucun-réa D’un PRÉFACE n un nous,

Tous DEUXIÈME.

par: I s ,CHARLES GOSSELIN, LIBRAIRÈ

’I 3°! LUPIN! ROYAL! [CESSION]!!! Il DUC DE IOIDIAUX ,un IAIIquAu-nunh . 1° 9-

1829.

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TUNIVERSH r ô

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Isa AYàik

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semassions

CHAPITRE vu.

giflât

Le ;Les hommes ont rarement le couraged’être toutÏ-Lâ- fait bons ou tout -à-fait

méchons.

- nonuvn.Ne cherche z point ailleurs un arbitre

suprême. vComte a. un P0118.

Laissons notre jeune voyageur en-.dormi. Bientôt il va suivre en paix une

grande. et belle route. Puisque nousavons la liberté de promener nos yeux

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2 Ciao-nuis.sur tous les points de la carte, arrêtons-les sur la ville de Narbonne.

Voyez la Méditerranée, qui étend,

non loin la, ses flots bleuâtres surdes rives sablonneuses; Pénétrez danscette cité semblable à celle d’Athènes;

mais pour trouVer celui qui y règne,suivez cette rue inégale et obscure,montez les degrés du vieux archevêché ,

et entrons dans la première et la plusgrande de ses salles.

Elle étoit fort longue, mais éclairée

par une suite de hautes fenêtres enogive , dont la partie supérieure seule-mentïa’w’oit ’cons’ervé des vitraux bleus ,

jaunes etllrouges, qui répandoient unelueur mystérieuse dans l’appartement.

Une table ronde , énorme ,- la remplissoit

dans toute’sa largeur, du côté de lagrandè’cheïninêe; autour de cette table,

couvertead’un tapis bariolé et chargée

de papi’erset de portefeuilles, étoient

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LE mon! ET. . 5assis et’coùrbés sur leurs plumes huit’

secrétaires oecupés à-cbpier des lettres’

qu’on leur paSsoit d’une table plus pe-

tite. D’autres hommes debout ran- lgeolent les papiers dans les rayons d’une

bibliothèque, que des livres reliés ennoir ne remplissoient pas tout entière,et marchoient avec précaution sur letapis dont la salle étoit garnie.

Malgré Cette quantité’de personnes

réunies, on eût entendu les ailes d’une

mouche. Le seul’bruit qui s’éleVât étoit

celui des plumes qui couroient rapide-ment sur le papier , et une voix grêlequi dictoit, en s’interrompant pourtousser. Elle sortoit d’un immense fau-teuil à grands bras , placé au coin dufeu, allumé en dépit (les chaleurs de la

saison et du pays. C’était un de ces fau-

teuils qu’on voit encore dans quelques

vieux châteaux, et qui semblent faitspour s’endormir en lisant, sur eux,

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4 ciné-MARS.quelque livre que ce soit, tant chaquecompartiment en est soigné; un crois-A

sant de plumes y soutient les reins; sila tête se penche, elle trouve ses jouesreçues par des oreillers couverts de soie,et le coussin du siège déborde tellement

les coudes qu’il est permis de croireque les prévoyants tapissiers de nospères avoient pour but d’éviter que le

livre ne fit du bruit et ne les réveillât en

tombant.Mais quittons cette digression pour

parler de l’homme qui s’y trouvoit et

qui n’y dormoit pas. Il avoit le frontlarge et quelques cheveux fort blancs ,des yeux grands et doux , une figurepâle et effilée à laquelle une petite

barbe blanche et pointue donnoit cetair de finesse que l’on remarque danstousles portraits du siècle de Louis XIII.

Une bouche presque sans lèvres, eta nous sommes forcés. d’avouer que

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LE CABINET. 5le docteur Lavater regarde ce signecomme indiquant la méchanceté à n’en

pouvoir douter; une bouche pincée,disons-nous , étoit encadrée par deux

petites moustaches grises et une royale,ornement alors à la mode , et qui res-semble assezà une virgule W sa forme.Ce vieillard avoit surla-tête une calotterouge et étoit enveloppé dans une vaste

robe de chambre, portoit des bas (lesoie pourprée, etn’étoit rien moins que

ArmandDuplessis,cardinaltdeRichelieu.Il avoit très-près de luit, autour de la-

plus petite table dont il a été question ,

quatre jeunes gens de quinze à vingtans : ils étoient pages ou domestiques,selon l’expression du temps , qui signi-

fioit alors familier , ami de la maison.Cet usage étoit un reste de patronageféodal demeuré dans nos mœurs. Les

cadets gentilshommes des plus hautes. familles reéevoient des gages des grands

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6 CINQ-MARS.seigneurs, et leur étoient dévoués en

toute circonstance, allant appeler enduel le premier venu au moindre désir

de, leur patron. Les pages, dont nousparlons rédigeoient des lettres dont leCardinal. leur avoitldit la substance;etaprès un coup d’œil du maître, les

passoient aux secrétaires qui les met-toient au net. Le vieux duc de son côté

écrivoit sur son genou des notes se-crètes sur de;petimWers qu’il glissoit

dans presque tous les paquets avant deles fermer de sa propre main.

Il y avoit quelques instants qu’il écri-

voit, lorsqu’il aperçut dans une glace

placée en face de lui le plus jeune deses pages traçant quelques ligues inter-rompues sur une feuille d’une taillefort inférieure a celle du papier mi-nistériel ; il sehâtoit d’y mettre quel-

ques mots, puis la glissoit rapidementsous la grande feuille qu’il étoit chargé

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LE CABlNET. 7de rempliràson grand regret; mais placé

derrière. le Cardinal, il espéroit quesa difficulté à se retourner l’empêche-

roit de s’apercevoir du petit manègequ’il sembloit exercerlavec assez d’habi-

tude. Tout à coup Richelieu lui adres-sant la parole sèchement, lui dit : Ve-

nez ici , monsieur Olivier. jCes deux mots furent un coup de

foudre pour ce pauvre enfant qui pa-roissoit n’avoir pas seize ans. Il se leva

pourtant très-vite et vint se placer de-bout devant le ministre, les bras pen-dans et la tète baissée. I

Les autres pages et les secrétaires ne

remuèrent pas, plus que des soldatslorsque l’un d’eux tombe frappé d’une

balle, tant ils étoient accoutumés à ces

sortes d’appels. Celui-ci pourtant s’an-

nonçait d’une manière plus vive que

les autres,-- Qu’écrivez-vous la?

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8 "CINQ-M’A as.-- Monseigneur... ce que votre Émi-

nence me dicte.” -- Quoi? .. - Monseigneur... la lettre à D. JuandetBragance. ’ L L ’

-- Point de détours , Monsieur, vous

faites autre chose. ’--- Monseigneur, dit alors le page ,

les larmes aux yeux, c’était un billetà

une de mes cousines. I . à- Voyons-le.

H Alors un tremblement universel l’a-gita, et il fut obligé de s’appuyer sur la

cheminée , en disant à demi-voix: C’est

impossible. I’--- M. le vicomte Olivier d’Entrai-

gues, dit le ministre sans marquer lamoindre émotion, vous n’êtes plus à

mon service. Et le page sortit; il savoitqu’il n’y avoit pas à répliquer; il glissa

son billet dans sa poche, et ouvrantla porte à deux battans, justement’assez

s

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LE CABINET. gpour qu’il y eût place pour lui, il s’y

glissa comme un oiseau qui s’échappe

de sa cage.Le ministre continua les notes qu’il

traçoit sur son genou.Les secrétaires redoubloient de si-

lence et d’ardeur, lorsque la porte s’ou-

vrant rapidement de chaque côté, on vit

paroître debout, entre les deux battans,un capucin qui, s’inclinant les brascroisés sur la poitrine, sembloit atten-

dre l’aumône ou l’ordre de se retirer.

ï Il avoit un teint- rembruni, profondé-ment sillonné par la petite-vérole, des

yeux assez doux, mais un peu louches.et toujours couverts par des sourcilsqui se joignoient au milieu du front;une bouche dont le sourire étoit rusé ,

malfaisant et sinistre; une barbe plateet rousse à l’extrémité, et le costume

de l’ordre de Saint-François dans toute

l son horreur , avec des sandales et des

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10 CINQ-MARS.pieds nus qui paraissoient fort indignesde s’essayer sur un tapis.

Tel qu’il étoit, ce personnage parut

faire une grande sensation dans toutela salle; car, sans achever la phrase,la ligne ou le mot commencé, chaqueécrivain se leva et sortit par la porte où

il se tenoit toujours debout, les uns lesaluant en passant, les autres détour-

. nant la tête; les jeunes pages se bou-chant le nez , mais par-derrière lui, carils paroissoient en avoir,- peur ensecret.Lorsque tout le monde eut défilé, ilentra enfin, faisant une profonde révé-

rence, parce que la porte étoit encoreouverte; mais Isitôt qu’elle fut fermée ,

marchant sans cérémonie, il vint s’as-

seoir auprès du Cardinal, qui, l’ayant

reconnu au mouvement qui se faisoit,lui fit une inclination de tète sèche et

silencieusa , le regardant fixementcomme pour attendre une nouvelle, et

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LB CABINET. l lne pouvant s’empêcher de froncer lesourcil, comme à l’aspect d’une arai-

gnée onde quelque autre animal dés-agréable.

Le Cardinal n’avait pu résister à ce

mouvement de déplaisir, parce qu’il se

seutoitobligé, par la présence de son

agent, à rentrer dans ces conversationsprofondes et pénibles dont il s’était re-

posé pendant quelques jours dans unpays dont l’air par lui étoit favorable,

et dont le calme avoit un peu ralentiles douleurs de sa maladie. Elle s’étoit

changée en une fièvre lente, mais sesintervalles étoient assez longs pour qu’il

pût oublier pendant son absence qu’elle

devoit revenir. Donnant donc un peude repos à son imagination jusqu’alors

infatigable, il attendoit sans impatience,pour la première fois de ses jours peut-être, le retour des courriers qu’il avoit

fait partir dans toutes les directions ,

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12 CINQ-MARS.comme les rayons d’un soleil qui don-

noit seul la vie et le mouvement à laFrance. Il ne s’attendoit pas à la visitequ’il recevoit alors, et la vue d’un de

ces hommes qu’il trempoit: dans le crime,

selon sa propre expression, lui rendittoutes les inquiétudes habituelles de savie plus présentes , sans dissiper entiè-

rement le nuage de mélancolie qui ve-noit d’obscurcir ses pensées.

Le commencement de sa conversa-.tion fut empreint de la couleur sombrede ses dernières rêveries; mais bientôt

il en sortit plus vif et plus fort que- jamais, quand la vigueur de son esprit

rentra forcément dans le monde réel.

Son confident, voyant qu’il devoitrompre le silence le premier, le fit ainsiassez brusquement;

-- Eh bien! Monseigneur, à quoipensez-vous ?

---Hélas l Joseph! à quoi devons-nous

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LE CABINET. 15penser tous tant que nous sommes, si-non à notre bonheur futur dans une viemeilleure que celle-ci P Je songe, depuis

plusieurs jours, que les intérêts hu-mains m’ont trop détourné de cette

unique pensée , et je me repens d’avoir

employé quelques instans de loisir à.des ouvrages profanes tels que mes tra-gédies d’Europc et de M irame, malgré

la gloire que j’en ai tirée déjà parmi nos

plus beaux esprits , gloire qui se répan-dra dans l’avenir.

Le P. Joseph, plein des choses qu’il

avoit à dire, fut d’abord surpris de ce

début, mais il connoissoit trop sonmaître pour en rien témoigner, et sa-chant bien par où il le ramènerpit àd’autres idées, il entra dans leslsiennes

sans hésiter.

- Le mérite en est pourtant biengrand, ditlil avec un air de regret, etla France gémira de ce que ces œuvres

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l 4 CINQ-MARS.immortelles ne sont pas suivies de pro-

, ductions semblables. V -’-- Oui, mon cher Joseph, c’est en

vain que des hommes tels que Boisro-bert, Claveret, Colletet, Corneille, etsurtout le célèbre Mairet, ont proclamé

ces tragédies les plus belles. de toutes-celles que les temps présens et passés

ont vu représenter; je me les reproChe,je vous jure, c0mme un vrai péchémortel, et je ne m’occupe dans mesheures de repos que de ma Méthode des

controverses, et du livre sur la Perfic-tionidu chrétien. Je songe que j’ai cin-

(plante-six ans et une maladie qui nepardonne guère.

- Ce sont des calculs que Vos enne-mis font aussi exactement que VotreÉminence, dit le Père à qui cette cmversationcommençoit à donnerde l’hu- .

meut; et qui vouloit en sortir plusvite;

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LE Gamin. 15Le rouge monta au ’visage du Car-

dinal. --Je le sais, je le sais bien , dit-il,je connais toute leur noirceur, et jem’attends à tout. Mais qu’y a-tà-il donc

de nouveau? ’e Nous étions convenus déjà, Mon-

seigneur, de remplacer mademoiselled’Hautefort ; nous l’avOns éloignée

comme mademoiselle de La Fayette,c’est fort bien, mais sa place n’est pas

remplie, et le roi....-« Eh bien?

- Le roi a des idées qu’il n’avait pas

eues encore.- Vraiment? et. qui ne viennent pas

de moi? Voilà qui va bien, ditlle mi-nistre avec ironie.

- Aussi , Monseigneur , pourquoilaisser six jours entiers la place de fa-vori vacante? Ce. n’est I pas prudent,

permettez que je le dise.

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16 CINQ-MARS. -- Il a des idées, des idées, répétoit

RicheHÊu avec une sorte d’effroi, et

lesquelles P ’ "-Il a parlé de rappeler la reine-’-

mère, dit le capucin. à voix basse, de la

rappeler de Cologne.

-4Marie de Médicis? s’écria le Car-

dinalen frappant sur les bras de sonfauteuil avec ses deuxvmains. Non , parle Dieulvivant! elle ne rentrera pas surle sol de France, d’où je l’ai chassée

pied par pied! L’Angleterre n’a pas osé

la garderexilée par moi, la Hollandea craint de crouler sous elle , et monroyaume la recevroit! Non, non, cetteidée n’a pu lui venir par lui-même.

Rappeler mon ennemie, rappeler samère, quelle perfidie! non, il n’aurait

jamais osé y penser... ’

Puis, après avoir rêvé un instant, ilajouta en fixant un regard pénétrant et

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LE’ CABINET. i7encorevplein du feu de sa colère sur le

P. Joseph. ’ ’ ,-- Mais..... dans quels termes a-t-il

exprimé ce désir? dites-moi les motsprécis.

---Il a dit assez publiquement et enprésence de Monsieur : Je sens bienque l’un des premiers devoirs d’unchrétien est d’étre’bon fils, et je ne

résisterai pas long-temps aux murmures

de ma conscience. .-- Chrétien! conscience! ce ne sont

pas ses expressions ; c’est le P. Caussin ,c’est son confesseur qui me trahit , s’é-è

cria le Cardinal. Perfide jésuite! je t’ai

pardonné-ton intrigue de La Fayette;mais je ne te passerai. pas tes conseilssecretere ferai chasser ce confesseur,Joseph , il est ennemi de l’État, je le vois

bien. Mais aussi, j’ai agi avec négligence

depuis quelques jours; je n’ai pas assez-hâté l’arrivée. de ce petit d’Effiat,’ qui

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1 8 aïno-Mans.réussira sans doute: il est bien fait etspirituel, dit-on. Ah! quelle’faute! jemériterois une bonne» disgrâce moi-

même. Laisser près (lu-roi ce renard de

jésuite, sans lui avoir donné mes. ino- structions semâtes, sans avoir un otage,

un. gage de. sa fidélité à mes ordres!

quel oubli! Joseph, prenez uneplume,et écrivez vite ceci pour l’autre confes-

seur, que nouschoisirons mieux. Jepense au P. Sirmond...

Le P. Joseph se mit devant la. grandetable, prêt àécrire, et le Cardinal lui

dicta ces devoirs de nouvel-le nature,-qner, peu de temps après, il osa faireremettre au roi, qui les reçut, lesrespecta , et lesapprit par cœur commeles commandements de l’Église. Ils nous

sont demeurés comme un 111011thdfrayantdel’emjsiœqu’limhemme peut:

arracher à fores de temps, d’intrigues:

etd’audaee. ’ * ’ ’

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LE j PANNES. 19I. Un prince doitavoir un premier

ministre, et ce premier ministre troisqualités :-1° qu’il n’aitpas d’autrepas-

sion que, son prince; 2° qu’il soit habile

et fidèle; 5° qu’il soit ecclésiastique.

II.-Un prince doit parfaitement ai-mer son premier ministre. ’

111. Ne doit jamais changer son pre- ,nuer ministre.

. 1V. Doit;lui dire toutes choses.V. Lui donner libre accès près de sa

personne. . ’

l

V1. Lui donner une souveraine au-torité sur le peuple.

VIL Degrands honneurs et de grands

biens. ,VIH. Un prince n’a pas de plus riche

trésor que son premier ministre.1X. Un. prince ne doit pas ajouter fiai

à ce qu’on dit contre son premier mi-

nistre, ni se plaire à en entendue ané-

dire;

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20 ’ CINQ-MARS.X. Un prince doit révéler à son pre-

mier ministre tout ce qu’on a dit contre

lui, quand même on aurait exigé duprince qu’il garderoit le secret.

XI. Un prince doit non-seulementpréférer [le bien de son État, mais son

premier ministre à tous ses parens.Tels étoient les commandemens du

dieu de la France, moins étonnansencore que la terrible naïveté qui lui

fait léguer lui-même ces ordres à lapostérité, comme si elle aussi devoit

croire en lui.Tandis qu’il dictoit son instruction ,

en la lisant sur un petit papier écrit desa main , une tristesse profonde parois--soit s’emparer de lui à chaque mot, et

lorsqu’il fut au bout,il tomba au fondde son fauteuil, les bras croisés et latête penchée sur son estomac. v

Le P. Joseph," interrompant son écri-

ture, se leva, et alloit lui demander s’il.

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LE CABINET. 2lse trouvoit mal,- lorsqu’il entendit sor.

tir du fond de sa poitrine ces paroles .lugubres et mémorables:

--Quel ennui profond! quelles inter-minables inquiétudes! Si l’ambitieux

me voyoit, il fuiroit dans un désert.Qu’est-ce que ma puissance? un misé-

rable reflet du pouvoir royal; et quede travaux pour fixer sur mon étoilece rayon qui flotte sans cesse! Depuisvingt ans je le tente inutilement-Je necomprends rien à cet homme! il n’ose

pas me fuir; mais on me l’enlève: il me

glisse entre les doigts... Que de chosesj’aurois pu faire avec ses droits hérédi-

taires, si jeles avois eus. Mais employertant de calculs à se terrir en équilibre!que reste-t-il de génie pour .les entre-prises? J’ai l’Europe dans ma main, et

je suis suspendu à un cheveu qui trem-.ble.- Qu’aieje à faire de porter mes re-

gardssur les cartes du monde...-si tous

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22 CINQ-MARS.mes intérêts sont renfermés dans son

étroit cabinet? Ses six pieds d’espace me

donnent plus de peine à gouverner quetoute la terre. Voilà donc ce qu’estun

premier ministre! Enviez-moi mes gar-des à présent. ’ p

Sestraits étoient décomposés dema-

nière à faire craindre quelque accident,

et il lui prit une toux violente et longue,qui finit par un léger crachement desang. Il vit que le P. Joseph effrayé al-loit saisir une clochette d’or posée sur

la table, et, se levant tout à coup avec lavivacité d’un jeune homme , il l’arréta,

et lui dit:-Ce n’est rien , Joseph, je me laisse

quelquefois aller au découragement.Mais cesmomens sont courts, et j’ensors plus fort qu’avant. Pour ma santé,

je saisparfaitement où. j’ensuis; mais -il une s’agit pas de Cela. Qu’avez-vous

fait. à Paris? le. suis content devoir le

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LB 043mm. 23roi arrivé dans le Béarn comme je le

voulois : nous le veillerons mieux.r Que lui avez-vous montré pour le faire

partir?--- Une bataille à Perpignan.

- Allons ,ce n’est pas mal. Eh bien,

nous pouvéns la lui arranger; autantvaut cette occupation qu’une autre àprésent. Mais la jeune reine, la jeune

reine, que dit-elle? ’-- Elle est encore furieuse contre

vous. Sa correspondance découverte,l’interrogatoire que vous lui fîtes

subir.....

- Bah! un madrigal et un momentde soumission lui feront oublier que jel’ai séparée de sa maison. d’Autriche et

du pays de son Buckingham. Mais que

fait-elle? À j-- D’autres intrigues avec Monsieur.

Mais comme toutes ses confidences-

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24 CINQ-MARS:’sont à nous, en voici les rapports jour

par jour. l- Je ne me donnerai pas la peine de

les lire; tant que le duc de Bouillonsera en Italie, je ne crains rien’de la;elle peut rêver de petites conjurationsavec Gaston aulcoin du feu ; il s’en tient

toujours aux aimables intentions qu’il U

a quelquefois, et n’exécute bien que

ses sorties du royaume; il en est àzla .troisième. Jeqlui procurerai la qua-trième quand il voudra; il ne vaut pas

le coup de pistolet que tu fis donnerau comte de Soissons. Ce pauvre comten’avoit cependant guère plus d’é-

nergie.Ici le Cardinal se rasseyant dans son

fauteuil se mit àrire assez gaiement pourun homme d’état.

-. Je rirai toute ma vie de leur ex-pédition d’Amiens. Ils me tenoient la

tous les deux. Chacun avoit bien cinq

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LB CABINET. a5cents gentilshommes autour de lui , ar-més jusqu’aux dents , et tout prêts à

m’expédier comme Concini; mais legrand Vitry n’était pas la; ils m’ont

laissé parler une heure fort tranquille-ment avec eux de la chasse et de laFête-Dieu, et ni’l’un ni l’autre n’a osé.

faire un signe à tous ces coupe-jarretswNous avons su depuis par Chavigny-qu’ils attendoient depuis deux mois cet:

heureux moment. Pour moi, en vérité,

je ne remarquai rien du tout, si ce n’estce petit brigand d’abbé de Gondi qui»

rôdoit autour de moi , et avoit l’air de

cacher quelque chose dans sa manche,ce fut ce qui me fit monter en car-

rosse .- A propos , Monseigneur, la reinele veut faire coadjuteur absolument.. - Elle est folle, il la perdra si elle

s’y attache, c’est un mousquetaire man--

que , un diable en soutane; lisez son

I. ’ 2

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25.- , orne-uns.histoire de Fiesque , vous l’y verrez lui-

mérne, il ne sera rien tant. que je vivrai.

-- Eh quoi! vous jugez. si bien , etvous faites venir un autre ambitieux desen âge 1’

--Quelledifférencel Ce sera une pou.péta, mon ami, une vraie poupée que ce

jeune Cinq-Mars; il ne pensera qu’à, sa

fraise et à ses aiguillettes; sa jolie tour-nure m’en répond, et je sais qu’il est.

doux. et foible; je l’ai préféré pour cela

à’so’n frère aîné , il fera ce que nous

voudrons.. «- Athonseigneur, dit le père d’un

airvde doute, je ne me suis jamaisfiéaux gens dont les formassent si calmes,la flamme intérieure en est plus dange-

reuse. Souvenez- vous. du maréchald’Effiat son père.

v -.- "Mais encore une fois, c’est unenfant,.et je l’élèverai, au lieu queGandi est déjà un factieux accompli .

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LE miam. àj .un audacieux que rien n’arrête ; il a osé

me disputer madame de la Meilleraie,concevez -vous cela? est-ce croyable ? àmoi. Un petit prestolet qui n’a d’autre ’

mérite qu’un mince babil assez vif et un

air cavalier. Heureusement que le maria pris soin lui-même de l’éloigner.

Le P. Joseph qui n’aimait pas mieuxson maître lorsqu’il parloit (le ses bon;

ines fortunes que de ses vers, fit unegrimace qu’il vouloit rendre fine, etqui ne fut que laide et gauche; il s’ia"magina que l’expression de sa bouchetordue comme celle d’un singe vouludroit’dire: dl: .’ qui peut résister à Marr-

nt’gneur! Mais Monseigneur y lut: Jesuis un cuistre qui ne sais rien du grandmonde, et sans transition, il dit tout àcoup en prenant sur la table une lettre

de dépêches z -’ due de Rohan est mort, c’estmicheline nouvelle, voilà les lingue-5

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28 CINQ-MARS.nets perdus. Il a eu bien du bonheur ’je l’avois fait condamner par le parle.ment de Toulouse à être tiré à quatre

chevaux, et il meurt tranquillement surle champ de bataille de Rhinfeld. Maisqu’importe? le résultat est le même.

Voilà encore une grande tête par terre!

Comme elles ont tombé depuis cellede Montmorency! Je n’en vois plusguère qui ne s’inclinent devant moi.Nous avons déjàà peu près puni toutes

nos dupes de Versailles; certes on t n’a

rien à me reprocher, j’exerce contre

eux la loi du talion, et je les traitecomme ils ont voulu me faire traiterau conseil de la reine-mère; le vieuxradoteur de Bassom pierre en sera quittepour la prison perpétuelle, ainsi que

l’assassin maréchal de Vitry, car ils n’a-

voient voté que cette peine pour ’moi.

Quant au Marillac qui conseilla la mort,.je la lui réserve au premier fauxvpas,

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LE CABINET. 3 9et te recommande, Joseph, de me lerappeler; il faut être uste avec tout lemonde. Reste donc encore debout ce ducde. Bouillon à qui son Sédan donne del’orgueil, maisje le lui ferai bien rendre.

C’est une chose merveilleuse que leur

aveuglement! ils se croient tous libresde conspirer, et ne voient pas qu’ils ne

font que voltiger au bout des fils queje tiens d’une main, et que ’j’alonge

quelquefois pour leur donner de l’airet de l’espace. Et pour la mort de leur

cher duc, les Huguenots ont-ils biencrié comme un seul homme?

-- Moins que pour l’affaire de Lou-dun, qui s’est pourtant terminée heu-

reusement. .-- Quoi ! heureusement P j’espère

que Grandier est mort ?--- Oui, c’est ce que je voulois dire.

Votre Éminence doit être satisfaite, ’

touta été fini dans les vingt-quatre.

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50 ente-mans.heures; on n’y pense plus. SeulementLaubardemont a fait une. petite étour-derie, qui étoit de rendre la séance pu-

blique , ce qui a causé un peu de tu-multe , mais nous avons les signale-mens des perturbateurs que l’on suit.

-- C’est bien, c’est très-bien. Urbain

étoit un homme trop supérieur pourle laisser là; il tournoit au protestan-

Atisme; je parierois qu’il aunoit fini, par

- abjurer ; son ouvrage contre le célibatdes prêtres me l’a fait conjecturer , et

dans le doute , retiens ceci, Joseph , ilvaut toujours mieux couper l’arbre

-avant que le fruit ne soit poussé. Ces

Huguenots , voisotu , sont une vraierépublique dans l’État. Si une fois ils

avoient la majorité en France , la mo-narchie seroit perdue , ils établiroient

quelque gouvernement populaire quil pourroit être durable. .’

--- Et quelles peines profondes ils

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j n LE CABINET. t 5lcausent tous leSjours à notre SaintoPèrele pape! dit.’Joseph.

- Ah l interrompit le Cardinal ’, je

te vois venir , tu veux me rappeler sonentêtement à ne pas te donner le cha-

I peau. Sois’tranquille , j’en parlerai au-

jourd’hui au nouvel ambassadeur quenous envoyons. Le maréchal d’EstréES

obtiendra en arrivant ce qui traîne de-puis deux ans que riens t’avons nommé

au cardinalat ; je commence aussi àtrouver que la pourpre t’iroit bien, car

’ les taches de sang ne s’y voient perse

Et tous deux se. mirent à rire , l’un

comme un maître qui accable de toutson mépris le sicaire qu’il paie, l’autre

comme un esclave résigné à toutes les

humiliations par lesquelles on s’élève.

Le rire qu’avoît excité la sanglante

plaisanterie du vieux ministre duroitencore lorsque la porte du cabinet

s’ouvrit , et un page’annonça plusieurs

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.52 CINQ-MARS.courriers qui arrivoient à la fois de di-vers points; le P. Joseph se leva, et seplaçant debout , le dos appuyé contre

un mur, cOmme une momie égyptienne,

ne laissa plus paroître sur son visagequ’une stupide contemplation. Douze

messagers entrèrent sudcessivement,revêtus de déguisemens divers : l’un

sembloit un soldat suisse , un autre unvivandier , un troisième un maîtremaçon; on les faisoit entrer dans lepalais par un escalier et un corridorsecrets , et. ils sortoient du cabinet parune porte opposée à celle qui les intro-

duisoit , sans pouvoir se rencontrer etse communiq’uerrien de leurs dépêches.

Chacun d’eux déposoit un paquet de

papiers roulés ou ployés sur la grande

table, parloit un instant au Cardinal Idans l’embrasure d’une croisée , et

partoit. Richelieu s’étoit levé brusque-

ment (lès l’entrée du premier messager,

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LE CABINET. 55et attentif à tout faire par lui-même,il les reçut tous , les écouta, et referma

de sa main sur eux la porte de sortie.Il fit signe au P. Joseph , quand le der-nier fut parti , et , sans parler , tousdeux ouvrirent ou plutôt arrachèrentles paquets de dépêches , et se direnten deux mots le sujet des lettres:

- Le duc de Weimar poursuit sesavantages , le duc Charles est battu;l’esprit de notre général est assez bon ,

voici de bons propos qu’il a tenus àdîner. Je suis content.

- Monseigneur , le vicomte de Tu-renne a repris les places de Lorraine ,voici ses conversations particulières...

--’- Ah ! passez , passez cela , elles ne

peuvent pas être dangereuses. Ce seratoujours un bon et honnête homme,ne se mêlant point de politique; pourvu-qn’on lui donne une petite armée àdisposer gomme une partie d’échecs ,

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54 CINQ-MARS.il est content , n’importe contre qui ;nous serons toujours fort bons amis.

--- Voici le long-parlement qui dureencore en Angleterre. Les communespoursuivent leur projet, voici des mas-sacres en Irlande. Le comte de Straf-fort est condamné à mort.

-- A mort! quelle horreur!-iJe lis. Sa Majesté Charles I" n’a

pas eu le courage de signer l’arrêt , mais

elle a désigné quatre commissaires...

-- Roi foible! je (abandonne. Tun’auras plus notre argent. Tombe, puis?

que tu es ingrat! ...... O malheureux

Wentworth l ’Et une larme parut aux yeux de

Richelieu; ce même homme’qui venoit

de jouer avec la vie de tant d’autres ,

pleura un ministre abandonné de sonprince. Le rapport de cette situation àla sienne-l’avait frappé , et c’étoit’lui-

méme qu’il pleuroit dans cet étranger.

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LB CABINET. à!)Il cessa de lire à haute’voix les dépêches

qu’il ouvroit, et son confident l’imita.

Il parcourut avec une scrupuleuse at»tention tous les rapports détaillés des

actions les plus minutieuses et les plussecrètes de tout personnage un peu im-portant; rapports qu’il faisoit toujours

joindre a ses nouvelles par ses habilesespions. On les attachoit aux dépêches

du roi, qui devoient toutes lui panserpar les mains , et être soigneusementreployées pour arriver au’prince , épu-

rées et telles qu’il vouloit les lui faire

lire. Les notes particulières furent tou-tes brûlées avec soin par le Père,quand le Cardinal en eut pris connais-sance , et celui-ci cependant ne parois-soit point satisfait, il se promenoit fortvite en long et en large dans l’appar-tement avec des gestes d’inquiétude ,

lorsque la porte s’ouvrit, et un trei-zième courrier entra. Celui-ci avoit

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56 CINQ-MARS.l’air d’un enfant de quatorze ans à

peine ; il tenoit sous le bras un paquetcacheté de noir pour le roi, et ne donna

au Cardinal qu’un petit billet sur le-quel un regard dérobé de Joseph ne

put entrevoir que quatre mots. Le ductressaillit, le déchira en mille pièces,et se courbant à l’oreille de l’enfant,

lui parla assez long-temps sans réponse;

tout ce que Joseph entendit fut en lefaisant sortir de la salle: Fais-y bienattention , pas avant douze heures d ’ici.

Pendant cet à parte du Cardinal,Joseph s’était occupé à soustraire de sa

vue un nombre infini de libelles quivenoient de Flandre et d’Allemagne , et

que le ministre vouloit voir, quelqueamers qu’ils fussent pour lui. Il affec-toit à cet égard une philosophie qu’il

étoit loin d’avoir, et pour faire illusion

a ceux qui l’entouroient, il feignoitquelquefois de trouver que ses ennemis

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LE CABINET. 57n’avoient pas tout-à-fait tort, et de rire

de leurs plaisanteries; cependant ceuxqui avoient uue’oonnoissance plus ap-profondie de son caractère, démêloient

une rage profonde sous cette apparentemodération et savoient. qu’il n’était sa.

tisfait que lorsqu’il avoit fait condam-

ner par le Parlement le livre ennemi àêtre brûlé en place de Grève, comme

injurieux au rai en la personne de sonministre l’illustrissime Cardinal, comme

pu le voit dans les arrêts du temps, etque son seul regret étoit que l’auteurne fût pas à la place de l’ouvrage. Satis-

faction qu’il se donnoit quand il le pou-

voit, comme il fit pour Urbain-Gran-(lier.

C’étoit son orgueil colossal qu’il ven-

geoit ainsi sans se. l’avouer à soi-même,

et lravaillant long-temps, un an quel-quefois, à se persuader que l’intérêt del’Éta: y. étoit engagé. Ingénieur ratta-

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38 CINQ-MARScher ses affaires particulières à cellesde la France, il s’étoit convaincu lui-méme’qu’elle saignoit des blessures qu’il

recevoit. Joseph , très-attentif à ne pas

provoquer sa mauvaise humeur dansce moment, mit à part et déroba unlivre intiiulé : Mystères politiques duCardinal de la Rochelle ; un autre attri-bué à un moine de Munich, dont le titreétoit: Questions quolibe’y’ques, ajustées

au temps présent, et Impiélé sanglante

du dieu M ors. L’honnête avocatAubery,

qui nous a transmis une des plus fidèles* histoires de l’Éminentissimc Cardinal,

est transporté de filreur au seul titredu premier de ces livres, et s’écrie, que

le. grand .ministreieut bien sujet de seglorifier que ses ennemis , inspirés contreleur gré du même enthousiasme qui a fait

rendre des oracles à l’anime de Bahut",

à Caïphe et autres qui sembloient2 plusindignes du don de prophétie, l’appelaient

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Li: camer. saà bon titre Cardinal de la Rochelle, puis-qu’il avoit trois ans après leurs écrits ré-

duit cette ville ; de même que Scipion aété surnommé l’Africain pour avoir sali?

jugué cette paonnes. Peu s’en fallutque le P. Joseph, qui étoit nécessaire-ment dans les mêmes idées , n’exprimât

dans les mêmes termes son indignation,

car il se rappeloit avec douleur la partI de ridicule qu’il avoit prise dans le siège

de La Rochelle, qui, tout en n’étant

pas une province comme l’Afrique ,. .s’étoit permis de résister à l’Éminentis-

sima Cardinal, quoique le P. Josepheût voulu faire passer les troupes parun égout, se piquant d’être assez habile.

dans l’art des sièges. Cependant il se

contint et eut encore le temps de ca-cher le libelle moqueur dans la pochede,sa.robe brune, avant que le ministre.eût congédié. son jeune courrier, criât"

revenu de la porte à la table. I

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ée CINQ-MARS.-’-- Le départ , Joseph, le départ!

dit-il. Ouvre les portes à toute. cettecour qui m’assiége , et allons trouver le

roi qui m’attend à Perpignan , je le’tiens

cette fois pour toujours.Le capucin se retira , et bientôt les

pages ouvrantles doubles portes dorées, A

annoncèrent successivement les plusgrands seigneurs de cette époque quiavoient obtenu du roi la permission dele quitter pour venir saluer le ministre;quelques-uns même , sous prétextede maladie ou d’affaire de service ,étoient partis à la dérobée pour ne pas

être les derniers dans son antichambre,et le triste monarque s’était trouvé

presque tout seul, comme les autresrois ne se voient d’ordinaire qu’à leur

lit de mort; mais il sembloit que letrône fût sa couche funèbre aux yeux de

lacour,sonrègneunecontinuelleagonie,et son ministre un successeur menaçant.

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LE CABINET. 41Deux pages des meilleures maisons

de France se tenoient près de la porteoù des huissiers annonçoient chaquepersonnage qui, dans le salon précé-dent, avoit trouvé le P. Joseph. Le Car-

dinal, toujours assis dans son grandfauteuil, restoit immobile pour le com-mun des courtisans, faisoit une incli-nation de tête aux plus distingués, etpour les princes seulement s’aidoit deses deux bras pour se soulever légère-

.ment; chaque courtisan alloit le saluerprofondément, et, se tenant deboutdevant lui près de la cheminée, atten-doit qu’il lui adressâtla parole ; ensuite,

"selon le signe du Cardinal, continuoità faire le tour du salon pour sortir parla même porte ou l’on entroit, restoit

un moment à saluer le P. Joseph quisingeoit son maître, et que l’on avoitpour cela nommé l’Éminence grille , et

sortoit enfin du palais, ou bien se ran-

Ù a.il

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.42 ç CINQ-MAIS.-geoit debout derrière le. fauteuil,-si leministre l’y engageoit , ce qui étoit une

-marque de la plus grande faveur-Il laissa passer d’abord quelquespper-

sonnages insignifians et beaucoup demérites inutiles, et n’arréta cette pro-

cession qu’au maréchal d’Estre’es qui,

partant pour l’ambassade de Rome ,venoit lui faire ses adieux: tout ce quisuivoit cessa d’avancer. Ce mouvement

avertit dans le salon précédent qu’une

conversation plus longue s’engageait ,

et le P. Joseph paraissant, échangeaavec le Cardinal un regard qui vouloitdire d’une part :1 souvenez-vous de la

promesse que vous venez de me faire;de l’autre: soyez tranquille. En même

temps l’admit capucin fit voir à sonmaître qu’il tenoit sous lainas une. de

ses victimes qu’il préparoit à être un

docile instrument; c’était un jeune

- gentilhomme qui portoit immunisaitA

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. LE CABINET. à?)vert très-court , et une veste de mêmecouleur , un. pantalon rouge, fort serré,avec de brillantes jarretières d’or Ides-

sous, habit des pages de Monsieur. Le’P. Joseph lui parloit bien en secret,mais point dans le sens’du Cardinal; ilne pensoit qu’à être son égal, et be pré-

paroit d’autres intelligences en cas dedéfection de la part du premier mi-

nistre. i ’-- Dites à Monsieur qu’il ne se fie

pas aux apparences, et qu’il n’a point

de plus fidèle serviteur que moi. LeCardinal cominenCe à baisser; et I jecrois de ma conscience d’avertir de ses

fautes celui qui pourroit hériter dupouvoir royal pendant la minorité.POur donner à votre grand prince unepreuve de ma bonne foi , dites-lui qu’on

’ veut faire arrêter Puy-Laurens qui est

à un, et qu”il le fasse-cacher , ou bienle Cardinal le mettra aussi à la Bastille

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54 CINQ-MARS.Tandis que le serviteur trahissoit ainsi

son maître, le maître ne restoit pas en

arrière, et trahissoit le serviteur. Sonamour-propre et un reste de respectpour les choses de l’Église le faisoient

souffrir à l’idée de voir le méprisable

, ’agent couvert du même chapeau qui

étoit une couronne pour lui, et assisaussi haut que lui-même, à cela près de

l’emploi passager de ministre. Parlantdonc à demi-voix au maréchal d’Es-

trées: l-- Il n’est pas nécessaire, lui dit-il ,

de persécuter plus long-temps . Ur-albain VIII en faveur de ce capucin queNOUS voyez là-bas , c’est bien assez qùe

Sa Majesté ait daigné le nommer aucardinalat; nous concevons les répu-gnances de Sa Sainteté à couvrir cemendiant de la pourpre romaine.

Puis-,passant de cette idée aux choses«générales. -Je ne sais vraiment pas ce

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t LE CABINET. 45qui peut refroidir le Saint-Père à notreégard; qu’avons-nous fait qui ne fût

pour la gloire de notre sainte mèrel’Église catholique? J’ai (lit moi-même

la première messe à La Rochelle, etvous le voyez par, vos yeux, M. le ma-réchal , notre habit est partout, et même

dans vos armées; le cardinal de laValette vient de commander glorieuse-ment dans le Palatinat.

- Et vient (le faire une très-belleretraite, dit le maréchal appuyant lé-gèrement sur le mot de retraite.

Le ministre continua sans faire at-tention à Ce petit mot de jalousie dumétier, et en élevant la voix :

- Dieu a montré qu’il ne dédai-gnoit pas d’envoyer l’esprit de victoire

r à ses lévites, carie duc (le .Weimar, n’aida pas plus puissamment à la con-

, quête de la Lorraine que ce pieux Car-dinal, et jamais une armée navale ne

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46 cuve-mans.fut mieux commandée que par notrearchevêque de Bordeaux à La Rochelle.t On savoit que dans ce moment le mi.nistre étoit assez aigri contre ce prélat

dont la hauteur étoit telle, et les im-pertinences si fréquentes, qu’il avoit Ieu deux affairesassez désagréables dans

Bordeaux. Il y avoit quatre ans, le ducd’Épernon , alors gouverneur de la

Guyenne, suivi de tous ses gentilshom-

mes et de ses troupes, le rencontrantau milieu de son clergé dans une pro-cession , l’appela insolent, et lui donna

deux coups de canne très-vigoureux,sur quoi l’archevêque l’excommunia ;

et tout récemment encore, malgrécette leçon , il avoit cutine querelleavec le maréchal de Vitry dont il avoit

’ reçu vingt coups de canne ou de bâton ,

comme il vous plaira, écrivoit le Cardi-

nal-Ducsau cardinal de la Valette, etje, crois qu’il veut remplir la France

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. av

LE CABINET. 47d’acommunie’s. En effet, il excommunia

encore le bâton du maréchal, se sou-venant qu’autrefois le pape avait forcé

le duc d’Épernon à lui demander par-

don; mais Vitry, qui avoit fait assassi-ner le maréchald’Ancre, étoit trop bien

en cour pour cela, et l’archevêque fut

battu, et de plus grondé par le mi-nistre.

M. d’Estrées pensa donc avec assez

de tact qu’il pouvoit y avoir un peud’ironie dans la manière dont le Cardi-

nal vantoit les taleus guerriers et ma-ritimes de l’archevêque , et lui répondit

avec un sang-froid inaltérable :

-»-En effet , Monseigneur, personnene peut dire que ,ce soit sur mer qu’il

ait été battu. eSon Étuinenoene put s’empêcher de

sourire; mais , voyant que l’impression

électrique-de œsourire en avoit faitnaître d’autres dans la.salle, et des

.. V- u-, J....,v -n.

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48 Cinq-usas. .chuchotemens et des conjectures, ilreprit toute sa gravité sur-le-champ , et

prenant le bras familièrement au mn-réchal:

--Allons, allons, Monsieur l’ambassæ

(leur, dit-il, vous avez la repartie bonne.Avec vous je ne craindrois pas le cardinal

Albornos et tous les Borgia du monde ,ni tous les efforts de leur Espagne prèsdu Saint-Père.

Puis élevant la voix et regardant toutautour de’lui comme pour s’adresser au

salon silencieux et captivé :--J’œpère , continua-t-il, qu’on ne

nous persécutera plus comme l’on fit

autrefois pour avoir fait une juste al-liance avec l’un des plus grands hom-

mes de nos temps; mais GusmvevAdol-phe eSt’mort, le-roi catholique n’aura

plus de prétexte pour solliciter l’excen-munication du roi très-chrétien. N’éte’s.

fo’usïpas de mon avis , mon cher sei-

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il: canner. 49gneur P dit-il en s’adressant au Cardinal

de la Valette qui s’approchoit, et n’a--

voit heureusement rien entendu’sur’son

compte. Monsieur d’Estrées , restez près

(le notre fauteuil, nousavons encorehi’en

des choses à vous (lire, et vous n’êtes

pas de trop dans toutes nos conversa.tians, car nous n’avons point de secrets ;’

notre politique est franche et toute augrand jour: l’intérêt de sa Imajesté’ier

(le l’État, voilà tout. l. . ’- Le maréchal fit un profond saleuse

rangea derrière le siège du ministre,et laissa sa place au cardinal de la.

n Valette qui, ne cessant de se proster-ner, et de flatter et de jurer. dévoue-ment et totale obéissance au Cardinalcomme pour expier la roideur "de Soirpère le duc d’Épernon ,’n’eut aussi de

lui que quelques mots vagueretimeconversation distraite cit-sans intérêt,

pendant laquelle il necessoit’

a. 3

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50 CINQ-H188.garder a la porte quelle personne luisuccédoit. Il eut même le chagrin de se

vois-interrompu brusquement par leministre qui s’écria au moment. le plus

flatteur de ses discours mielleux :, e- Ah! c’est. donc vous enfin, mon

Cher Fabert! qu’il me tardoit de vous* Voir pour vous parler du siège. Le géné-

malsalua d’un air brusque et assez gau-

(filetaient le Cardinal généralissime , et

lui présenta les officiers venus du camp

aveclui; "il parla quelque temps desopérations du siège, et le Cardinalannihiloit luir’faire en quelque sorte la-

ceur pour le préparer à recevoir sesordres plus tard sur le champ de ba-’mille mène; il parla aux officiers quilesuivoientfles appelant parleurs nomeet: leur faisant desquestions sur .levœmp.

- 118188 Wrent tous pour laisserproches lethicad’Angouiême; ce [Va-lois ,« àpnèsavoir hué comme Henri 1V,

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LE CABINET. l 51se prosternoit devant Richelieu; il sol-licitoit ungcommandement qu’il n’avait

eu qu’en troisième au siège de La Ro-

I chelle. A sa suite parut le jeune Maza-rin, toujours souple et insinuant, maisdéjà confiant dans sa fortune.

-Le duc d’Halluin vint après eux : le

Cardinal interrompit les complimensI qu’il leur adressoit pourlui dire à haute

voix z Monsieurle duc, je vous annonceavec plaisir que le roi a créé en votre fa-

veur un office de maréchal de France;voussignerez Schomberg, n’est-il pasvrai P. à.Leucate délivrée par vous, on le

pense ainsi. Mais pardon, voici M. deMoutauron qui a sans douœ quelquechose d’important à; me dire,

--- O mon Dieu non l Monseigneur ,je vouloistseulement vous dire, que cepauvrejeune homme, que vous avezdaigné regardencomme avotreservice,

neurula faim. . ’

a

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61 euro-Mans;*-- Ah! comment dans ce moment-

ci me parlez-vous de choses sembla-bles? Votre petit Corneille ne veut rien ’

faire (le bon; nous n’avons vu que leCid et les Horaces encore; qu’il tra-vaille , qu’il travaille, on sait qu’il est

à Ïmoi , c’est désagréable pour moi-

même. Cependant, puisque vous vousy intéressez, je lui ferai une pension(le cinq cents écus sur ma cassette.

Et le trésorier de l’épargne se retira

,charmé de la libéralité du ministre; et

fut chez lui receVoir avec assez debonté la dédicace de Cinna’où le grand

Corneille compare son âme a Celle d’Au-

guste, et le remercie (l’aVOir fait. l’au-I

mône à quelques Muses.

Le Cardinal, troublé par cette im-portunité , se leva en disant que lama-ti’née s’avançoit, et qu’il étoit temps de

partir pour aller trouver le Roi.En cet instant même, et comme les

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LE CABINET. :53plus grands seigneurs s’approchoientpour l’aider à marcher , un homme enrobe de maître des requêtes s’avança

vers lui, en saluant avec un sourireavantageux et confiant qui étonna tousles gens habitués au grand monde; ilsembloit dire : Nous avons (les affairessecrètes ensemble, vous allez voir comme

il sera bien pour moi , je suis chez moidans son cabinet; sa manière lourde etgauche trahissoit pourtant un être trèsinférieur, ,c’étoit Lauliardemont.

Richelieu fronça le sourcil en levoyant en face de lui, et lança un re-gard de feu à Joseph; puis se tournant

Lvers ceux qui l’entouroient, dit avec

un rire amer :- Est-ce qu’il y a quelque criminel

autour de nous?. Il Puis lui tournant le (los, le Cardinalp le laissa plus rouge que sa robe , et,V précédé de la foule des personnagës qui

1x

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54 CINQ-MARS.devoient l’escorter en voiture ou à che-

val , descendit le grand escalier de l’ar-

chevêché. ’ ’Tout le peuple de Narbonne et ses

autorités regardèrent avec stupéfaction

ce départ royal. V. Le Cardinal seul entra dans une am-ple et spacieuse litière de forme carrée,

l dans laquelle il devoit voyager jusqu’à

Perpignan , ses infirmités ne lui per-mettant ni d’aller en voiture ni de faire

toute cettelroute à cheval. Cette-sorte(le chambre nomade renfermoit un lit,une table, et une petite chaise pour unpage qui devoit écrire ou lui faire-lalecture. Cette machine couverte de da-mas couleur de pourpre fut portée pardix-huit hommes qui, de lieue lenlièue,se relevoient; ils étoient choisis dansses gardes, et ne faisoient ce serviced’honneur que la tête nue, quelle ’que

fût la. chaleur ou la pluie. Le duc d’An-

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LE menin. 55gouléme, les maréchaux de Schomberg

et d’Estrées , Fabert et d’autres dignia

taures étoient à cheval à ses portières;

on distinguoit le cardinal de la Valetteet Mazarin parmi les plus empressés;ainsi que Chavigny et le maréchal deVitry qui cherchoit à éviter la Bastilledont il étoit menacé, disoit-on.

Deux carrosses suivoient-pour les se-crétaires du Cardinal, ses médecins et:

son confesseur; huit vitures. à quatreChevaux pour ses gentilshommes, etvingt-quatre mulets pour ses bagages;deux cents mousquetaires à pied l’es-

cortoient (le très près; sa compagniede gens-d’armes de la garde et ses che-

. vau-légers, tous gentilshommes , mar-choient devant et derrière ce cortègesur de magnifiques chevaux.

Ce fut dans cet équipage que le pre-

mier ministre se rendit en peu de joursà Perpignan; la dimension de la litière

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56 CINQ-MAILS.obligea plusieurs fois de faire élargirdes chemins et abattre les murailles dequelques villes et villages où elle nepouvoit entrer; en sorte , disent les au-

teurs des manuscrits du temps, touspleins ,d’une sincère admiration pour

ce luxe , en sorte qu’il sembloit un con-

quérant qui entre par la brèche. Nousavons cherché en vain avec beaucoupde soin quelque manuscrit des proprié-taires-ou habitans des maisons qui s’ou-

vroient à son passage , où la mêmeadmiration fût témoignée , et nousavouons ne l’avoir pu trouver.

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CHAPITRE VIH.

anaL’a-Rumen

Mon génie étonné tremble devant le sien.

IIIIÀNIICUSo

Le pompeux cortège du Cardinal s’éç-

toit arrêté à l’entrée du camp ; toutes

les troupes sous les armes étoient ran-gées dans le plus bel ordre, et ce futau bruit du canon et de la musiquesuccessive de chaque régiment que lalitière traversa une longue haie de ca.valerie et d’infanterie , formée depuis

la première tente jusqu’à celle du, mi-

nistre , disposée à quelque distance du

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58 CINQ-MARS.quartier royal, et que la pourpre dontelle étoit couverte faisoit reconnaître

de loin. Chaque chef de corps obtintun signe ou un mot du Cardinal qui,enfin rendu sous sa tente, congédia sasuite, s’y enferma, attendant l’heure

de se présenter chez le Roi. Mais, avant

lui, chaque personnage de son escortes’y étoit portéindividuellement, et sans

entrer dans la demeure royale, tous at-tendoient sous de longues galeries cou-vertes de coutil rayé et disposées comme

des avenues qui conduisoient chez le’princeLes courtisans s’y’rencontroient,

et se promenant par groupes, se sa:luoient et se présentoient la main ou se

regardoient avec hauteur, selon leursintérêts ou les seigneurs auxquels ilsappartenoient; D’autres chuchotoientlong-temps et donnoient signes d’é-tonnement; de ’plaisir’ou de mauvaise

humeur qui montroient que’queique

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fantasma. 59chose d’extraordinaire venoit de se pas-

ser. Un singulier dialogue; entre milleautres; s’éleva dans un coin de la ga-

lerie principale. ’ n- Puis-je savoir , Monsieur l’abbé,

pourquoi vous me regardez d’une ma-

nière si assurée? i I-- Parbleu, Monsieur de Launav;

C’est que je suis curieux de voir ce que

vans allez faire. Tout le mende aban-donne votre ministre , depuis Votrevoyage en Touraine .;. vous n’y pensez

pas, allez donc causer un moment avecles gens de Monsieur" ou de la reine;

V vous êtes en retard’de dix minutesisu’r

la montre du cardinal de la Valette quivient de toucheryla main à Rochepot età tous les gentilshommes du feu comte

de Soissons que je pleurerai’touté’m’a

livi’e.”.’ AH .”l ; Voilà qui est bien ,, Monsieur de

hG’ondi, je, vous entends assez: c’est un

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60 crue-nus.appel que vous mefaites l’honneurde

m’adresser. ’ ,--- Oui, Monsieur le comte , reprit

le jeune abbé en saluant avec toute lagravité duptemps; je cherchois l’occa-

’ ksion de vous appeler au nom de M. d’At-

tichi , mon ami, avec qui vous eûtesquelque chose à Paris.

î - Monsieur l’abbé , jeysuis à vos or.

cires; je vais chercher mes seconds ,cherchez les vôtres. A 7 l t.

- Ce sera’à cheval, avec l’épée et

le pistolet, n’est-il pas vrai? ajôutaGandi avec le même air. dont on arran-geroit une partie. de campagne en épous-

setant la manche de sa soutane avec le

doigt. p---*Si’ tel est votre bon plaisir , reprit

l’autre; et ils se séparèrent pour un

instant en se saluant avec une grandepolitesse et de profondes révérences.

Une foule brillante de, jeunes gentils-

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L’ENTREVUE. 61hommes passoit et repassoit autourd’eux dans la galerie. Ils s’y mêlèrent

pour chercher leurs amis. Toute l’élé-

gance des costumes du temps étoit dé-

ployée par la cour dans cette matinée ;

les petits manteaux de toutes les cou?leurs en velours ou en satin, brodésd’or ou d’argent et des croix de Saint-

Michel et du Saint-Esprit , les fraises ,les plumes nombreuses des chapeaux ,les aiguillettes d’or, les chaînes qui sus-

pendoient de longues. épées, tout bril-

loit , tout étinceloit, moins encore que,

le feu des regards de cette jeunesseguerrière , que ses propos vifs , ses

.rires spirituels et éclatans. Au milieude cette assemblée passoient lentement

des personnages graves et de grandsseigneurs suivis de leurs nombreuxgentilshommes. ’’ Le petit abbé de Gondi , qui aveit

la vue très-basse , se promenoit parmi.

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6,2. Cinq-MAns. 4la foule, fronçant les sourcils , fermantà demi les yeux pour.mieux’ voir , et

relevant sa moustache ,1 car les-ecclé-

siastiques en portoient alors. Il regar-doit chacun sous le nez pour recon-noitre ses amis, et s’arrêta enfin à un.

jeune homme d’une fort grande taille,

vêtu de noir de la tête aux pieds , etdont l’épée même étoit d’acier bronzé

fort noir. Il causoit avec un capitainedes gardes lorsque l’abbé de Gondi le

tira à part.4 -- Monsieur de Thon, lui dit-il, j’aurai

besoin de vous pour second dans uneheure ,-.à cheval , avec l’épée et le pis-

tolet , si vous voulez me faire cet

honneur"... . I.- qusieur , vous savez que je suisdes vôtres tout- àefait et atout venant.Où nous trouverons-nous?g --’Devant le bastion-espagnol , s’il

vouslplait. . t

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L’euruvnz. 63ù .-- Pardon si je retourne à une con.-

versation qui m’intéressait beaucoup,

je serai exact au rendez-vous.

Et de ThOu le quitta pour retournerà son capitaine. Il avoit dit tout ceciavec une voix fort douce , le plus inal.térable sang-freid , et même quelquechose de distrait. A ’ ’

Le petit abbé lui serra la main avec

une vive satisfaction , et continua sarecherche.

Il ne lui fut pas si facile de conclurele marché avec les jeunes seigneurs aux-

quels il s’adressa , car ils le connois-

Soient mieux que de Thon , et du plusloin qu’ils le voyoient venir , cher-choient à l’éviter ou rioient de lui-rnême’. avec lui ,Vet ne s’engageoient

point à le servir. ’ " ’ ’ 4 v

fi - Eh ! l’abbé ,, vous voila; encore à

chercher; je gage que c’est un second

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64 CINQ-M Ans.qu’il vous faut, dit le duc de Beaufort.

--- Et moi , je parie , ajouta M. deLa Rochefoucault , que c’est rentrequelqu’un du Cardinal-Duc.

--- Vous avez raison tous deux ,Messieurs; mais depuis quand -riez-,vous des aflaires d’honneur?

-- Dieu m’en garde , reprit M. deBeaufort, des hommes d’épée comme

nous sommes , vénèrent toujours tierce,

quarte et octave , mais quant aux plisde la soutane je n’y connais rien.

--- Pardieu , Monsieur , vous savezbien qu’elle ne m’embarrasse point le

poignet , et le prouverai à qui vou-dra. Je ne cherche du reste qu’à jeter

ce froc aux orties. .I -- C’est donc pour le déchirer que

vous vous battez si souvent P» dit LaBochefoucault. Mais I rappelez-vous ,mon cher abbé, que vous êtes. des-

sous. ’ l ’

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L’ENTREVUE. 05Goudi tourna le dos en regardant à

une pendule et ne voulant pas perdreplus de temps à de mauvaises plaisan-teries; mais il n’eut pas plus de succès

ailleurs , car ayant abordé deux gentils-hommes de la jeune reine qu’il suppo-

soit mécontens du Cardinal, et heureux

par conséquent de se mesurer avecses créatures , l’un d’eux lui dit fort

gravement :- Monsieur de Gandi, vous savez ce

qui vient de se passer; le Roi a dit touthaut: Que notre impérieux Cardinal le .

veuille ou non , la veuve de Henri-le-Grand ne sera pas plus long-temps exi-lée . Impériaux, Monsieur l’abbé, sentez-

vous cela P Le Roi n’avait encore riendit d’aussi fort contre lui. Impériaux!

c’est une disgrâce complète. Vraiment

personne n’osera plus. lui parler , il va

quitter la cour aujourd’hui certaine-

ment. .n. ’ 3.7

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A 66 cinq-prias.- On m’a dit cela , Monsieur ; mais

j’ai uneaffaire ..... I . ’4- C’est heureux pour vous qu’il

arrêtoit tout court dans votre car-

rière. ’ 3 ’--- Une afi’aire d’honneur....

5-4 Au lieu que Mazarin test pour

vous.;... t ’- Mais , voulez-vous ou non m’é-

couter ’- Ah! s’il est pour vous l vos aven-tures ne peuvent lui sortir de la tête,votre beau duel avec M. de Contenan ,et la jolie petite épinglière , il en amême parlé au Roi. Allons , adieu ,cher abbé , nous sommes fort pressés;

adieu , adieu.... Et reprenant le bras deson ami , le jeune persifleur , sans écouo

ter un mot de plus, marcha vite dansla galerie et se perdit dans la multitudedes passans.

Le pauvre abbé restoit donc fart

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immune. 67mortifié de ne pouvoir trouver qu’unscoocl , et regardoit tristement s’éèdu-

let l’heure et la foule lorsqu’il apetçdt

un jeune gentilhomme qui lui étoit in-connu , mais près d’une table et appuyé

sur son coude , d’un air mélancolïque’;

il portoit- des habits de deuil qui n’in-

diquoient aucun attachement par-æticulier à une grande. maison , on ’àun corps; et paraissant attendrdpaHSimpatience le moment d’entrer ’chezïle

Roi, il regardoit d’un air insouciantceux qui l’entonroient let sembloit ne

les pas voir et n’en connoître aucun;

Gandi ,, jetant les yeux sur lui ,l’abord: sans hésiter: î

"Ma foi , Monsieur, lui dit-il,n’ai pas l’honneur de vous connoître’;

malouin panic d’escrime me peut ja-

mais déplaire à un me mmfaut. et si vous voulu être montés-cond , «du! un. quant «thuym

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68 CINQ-Mus.seronssur le pré. Je suis Paul de Gondi,et j’ai appelé M. de Launay , qui est au

Cardinal , mais fort galant hommed’ailleurs.

’ L’inconnu, sans être étonné de cette

apostrophe , lui répondit sans changerd’attitude: -Et quels sont ses seconds ?

-- Ma foi, je n’en sais rien g mais que

vous importe qui le servira P on’n’en

est pas plus mal avec ses amis pourleur avoir donné un petit coup de.pointe.

- L’étranger sourit nonchalamment ,

resta un instant à passer sa main dansses longs cheveux châtains , et lui ditenfin avec indolence et regardantà unegrosse montre ronde , suspendue à sa

ceinture: . n I ï-.- Au fait , Monsieur , comme jen’ai riende mieux à faire , et que jen’ai pas d’amis ici , je vous suis; j’aime

autant faire cela qu’autre chose. .

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L’eurnzvux. 69Et prenant sur la table son large

chapeau à plumes noires , il partit len-tement suivant le martial abbé, quialloit vite devant lui, et revenoit lehâter , comme un enfant qui courtdevant son père , ou un jeune carlinqui va et revient vingt fois avant d’ar-river au bout d’une allée.

Cependant, deux huissiers vêtus deslivrées royales ouvrirent les grands ri-deaux qui séparoient la galerie de lamute du roi , et le silence s’établit pan

tout. On commença à entrer successi-vement et avec lenteur dans la demeurepassagère du prince. Il reçut avec grâce

toute sa cour, et c’étoit lui-même qui

le premier. s’offrait à la vue de chaque

personne introduite. i s - ÎDevant une très-petite table , entour

rée de fauteuils dorés , étoit debout le

roi Louis XIH , environné des grands-officiersde la couronne; son costume,

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79 Gquétoit fort élégant: une sorte de Veste

decouleur chamois avec les manchesouvertes et ornées d’aiguillettes et de

rubans bleus le couvroit jusqu’à la

ceinture. Un pantalon large et flottant,comme ceux des Turcs de nos jours ,ne tomboit qu’aux genoux , et sonétoffe jaune et rayée de rouge étoit or-

née en bas de rubans bleus. Ses bottesà l’écuyère , ne s’élevant guère à plus de

trois pouces au-dessus de la chevilledu pied, étoient doublées d’une telle

profusion de dentelles, et si larges,qu’elles sembloient les porter commeun vase porte des fleurs. Un petit man»teaude velours bien, où la’croix duSaint-Esprit étoit brodée, couvroit le

bras gauche du Rai, appuyé sur lepommeau de son épée.

Ï Il avoit la tête découverte, et l’on

voyoit parfaitement» sa figure pâle etnoble éclairée par le soleil que le haut

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n’mnnvun. 7:’de la tente laissoit pénétrer. petite

barbe pointue que l’on portoit alorsaugmentoit encore la maigreur de sonvisage, mais en accroissoit aussi l’ex-pressî0n mélancolique ; à son front

’élevé, à son profil antique, à son nez

aquilin , on reconnaissoit un princede la grande race des Bourbons; il avoit

tout de ses ancêtres , hormis la force duregardz. ses yeux sembloient r0ugis pardes larmes et voilés par un sommeilperpétuel, et l’incertitude de sa vue lui

donnoit l’air un peu égaré. IIl affecta en" cetmoment d’appeler

autour de lui’et d’écouter’avec atten-

tion-les plus grands ennemis du Cardi-nal qu’il attendoit à chaque minute, et

se balançant un peu d’un pied surl’autre , habitude héréditaire de. sa

famille, parloit avec assez de vitesse,mais s’interrompant pour faire un signe

de tête gracieux , ou un geste de la

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72. i cuve-nuas.main à ceux qui passbient devant luien le saluant profondément.

Il y avoit deux heures que l’on pas,-

lsoit ainsi devant le Roi, sans que leCardinal eût paru; toute lacour étoitaccumulée et serrée derrière le prince,

et dans les galeries tendues qui se pro-longeoient derrière sa tente; déjà un

i intervalle de temps. plus long com-.mençoit à séparer le nom des. courti-

sans que l’on annonçoit. A- Ne verrons-nous pas notre cousin

le Cardinal P dit le Roi, en se retournantet regardant Montrésdr, gentilhommede Monsieur, comme. pour l’encoura-

.ger à répondre. .-Sire, on le croit fort malade en

,cet instant, repartit celui.ci. i VL - Et je ne vois pourtantque Varie

Majesté qui le puisse guérir , dit le dqc *

de Beaufort. . ’» wI-N’ousne guérissons que les écrouel-

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L’ENTREVU la; 73

les, dit le Roi, et les maux du Cardi-nal sont toujours si mystérieux quenous avouons n’y rien connoître. ll Le prince s’essayoit ainsi de loin a

braver son ministre, prenant des f0:bces dans la plaisanterie pour rompremieux son joug insupportable, mais sidifficile à soulever. Il croyoit presquey avoir réussi, et , soutenu par l’airde

joie de. tout ce qui l’environnoit, ils’applaudissoit déjà intérieurementd’avoir su .prendrê l’empire suprême ,.

et jouissoit en ce moment de toute laforce qu’il se croyoit. Un trouble in-volontaire au fond du cœur lui disoit:

"bien que, cette heure passée , tout lefardeau de l’État alloitretombcr sur lui

seul; mais il parloit pour’s’étourdir

sur cette pensée importune, et Se dissi-mulant le sentiment intime qu’il avoit

de son impuissance à régner, il ne lais--

soit plus flotter son imagination que

a. ém-nn- üm-h

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74 CINQ-MARS.sur le résultat des entreprises, se con-traignantainsi lui-même à oublier lespénibles "chemins qui peuvent y con-duire.’ Des phrases rapides se succé-

doient sur ses lèvres.

- Nous allons bientôt prendre Per-pignan , disoit-il de loin à Fabert.

- Eh bien! cardinal, la Lorraineest à nous, ajoutoit-il pour lapValette;puis touchant le bras de Mazarin:

-Il n’est pas si difficile que l’oncroit de mener tout un royaume, n’est-,

ce pas? iL’Italien, qui n’avait paslautant de

confiance que le commun (les courti-sans dans la disgrâce du Cardinal, ré:

pondit sans se compromettre:-. Ah! Sire, les derniers succès de,

Votre Majesté, au dedans et au dehors.prouvent assez combien Elle est,habile.à choisir ses instruments et à les. diri-j

ger, et"... A l

. .7

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n’assume- a?Mais le duc de Beaufort l’interroing

peut avec cette confiancegcetlte, voixélevée et cet air qui. lui mérita par. la

suite le surnom d’important , s’écria

tout du haut de sa tête: - I V .-- Pardieu, Sire, il ne faut; que

vouloir; nue nation se, mène: comme -.un cheval avec l’éperon et; la bride, et

nous sommes tous bons cavaliers, onn’aqu’à prendre parmi nous tous. Cette

belle sortie du fat n’eut pas le tçmpsde

faire son effet, car deux. baissiers Unfois crièrent: Son Éminence. l

Le Roi rougit. involontairement,comme surpris en flagrant délit. Maisbientôt se. raffermissant, il prieur) airde hauteur résolue qui n’échappa point

au ministres l i a;Celuioei, revêtu de toute la pompe

du costume de cardinal, appuyé. surdu: jeunes pages, et. suivi de son capi-nimjdes gaudes, et déplus deal-q

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76 CINQ-nuas:cents gentilshommes attachés a sa maî-

son a, s’avança versle Roi lentement, ets’arrêtant à chaque pas comme éprouo’

vaut des souffrances qui l’y forçoient,

mais en effet pour observer les phy-sionomies qu’il avoit en face. Un coup

d’œillui suffit. ’ ’Sa. suite resta à l’entrée de la tente

royale; et de tous ceux qui la remplis-soient, pas un n’eut l’assurance de le

saluer ou de jeter un regard sur lui; laValette même feignoit d’être fort oc-

cupé d’une conversation avec Montré-

sor , et le Roi,qui vouloit le mal rece-voir, affecta de le saluer légèrement et

k de continuer un a parte à voix basseavec le duc de Beaufort. i

Le Cardinal fut donc fercé, aprèsle premier salut, de s’arrêter et depasser du côté de la foule des courti-sans, comme s’il eût voulu s’y confon-

; tire; mais .son dessein: étoit de "les

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L’ENTRFVUE’ I .77

éprouver (le plus près; ils reculèrentA tous comme à l’aspect d’un lépreux; le

.seul Fabert s’avança Iverslui avec l’air

franc et brusque qui lui étoit habituel,

et employant dans son langage les ex-

pressions de son métier: j . n--Eh bien l Monseigneur, vous faitef

une brèche au milieu d’eux comme un

boulet de canon ,1 je vous en demande

pardon pour eux. b I M v .,-- Et vous. tenez ferme devant moi

comme devant l’ennemi, dit, le Duc;.vous n’en serez. pas fâché par lajsuite,

mon cher Babas!- . , , , . . sMazarin s’approcha aussi, mais avec

précaution, du Cardinal, et donnantla ses traits mobiles l’expression d’une

tristesse profonde, lui fit Acinq ou si:révérences fort basses en tournant le

.dos- au groupe du Roi, de sorte qupl’on pausoitles prendre. de là 1)qu sessaluts froids et précipités qupl’onfait

i

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sa. CINQ-MARS.à quelqu’un dont on veut se défaire , et

du côté. du duc’pour’des marques-ide

respect, mais d’une di3crète et silen-

cieuse douleur.j i a . ’ ’ IlLe [ministre ,-toujours calme, sourit

avec dédain , et prenant ce regard fixeEn ’cet’air de grandeur [qui paroissoit

En lui dans les dangers imminens, ils’appuya de nouveau sur ses pages, et

sans attendre un mot du un regard desouverain, prit tout à’cOup sonparti et marcha dirèéteinent vers lui en

traversant la tente "dans tente sa lon-gueur. Personne nei’llàv’oi’t’lperdu de

vue, tout en le faisantïparo’itre , et’tout

se tut, ceux même qui parloient: auloi; tous les courtisans se penchèrenten avant pour voirret écèutér." i’i Louis XIII étonné se retourna,’et la

’pt’xlsence d’esprit lui manquant totale-

ment ,"il i’demeura’ immobile et attendit

avec un regard glacé qui étoit sa seille

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L’ENTREVUE. 79force, force d’inertieltr’ès grande dans ç

un prinee. I A .Le Cardinal arrive près (lumonarquene s’inclîna pas,’mais sanslchanger (l’at-

titude, les yeux baissés I et les deuxmains posées sur l’épaule des dent en-

fans à demi courbés, il dit :a- Sire , je viens suPplier Votre Ma-

jesté de m’aecorder enfin une retraite

après laquelle je soupire depuis long-temps. Ma santé chancelle; je sens quema. vie est bientôt achevée; l’éternité

s’approche pour moi, et avant de ren-

dre compte au Roi éternel," je vais lefaire au Roi passager. Il y a d’ixohuitans , Sire, que vous m’avez remis entrellesmains un r95’aume ’foible cf divisé,

je vous le rends uni et puissant. V65ennemis sont abattus et humiliés. Menœuvre est accomplie. Je demande "àVotre Majesté la permission de me re-tirer à Cîteaux, où je suis abbé-géné-

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80 CINQ-MARS.ral, pour y finir mes jours dans lesprières et la méditation.

Le Roi , choqué de quelques expres-sions hautaines (le ces paroles, ne donnaaucun des signes de faiblesse qu’atten-

doit le Cardinal et qu’il lui avoit vustoutes les fois qu’il-l’avait menacé (le

quitter les affaires. Au contraire , sesentant observé par toute sa cour, il leregarda en roi, et dit froidement:

--Nous vous remercions donc devos services, monsieur le cardinal, etnous vous souhaitons le repos que vousdemandez.

Richelieu fut ému au - fond, maisd’un sentiment de colère qui ne laissa

nulle trace sur ses traits. Voilà bienicelte froideur, se dit-il en lui-même,aveclaquelle tu laissas mourir Mont-morency. mais tu ne m’échapperas pas

ainsi. Il reprit la parole en s’inclinant:

- La seule récompense que je de-

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r

L’ENTREVUE. l 8!

mande de mes services est que VotreMajesté daigne accepter de moi en purdon le Palais-Cardinal, élevé de mes

deniers dans Paris. iLe Roi étonné fit un signe de tête

consentant; un murmure de surpriseagita un moment la cour attentive.

--Je me jette aussi aux pieds deVotre Ma esté pour qu’elle veuille m’ac-

I corder la révocation d’une rigueur que

j’ai provoquée ( je l’avoue publique-

,me’ntl); et. que je regardai peut-êtrecomme trop utile au repos de l’ÈÀtat.

.Oui , quand j’étois de ce monde ,L j’ou-

bliois trop mes plus anciens’sentimens

de respect et d’attachement pour lebien général. A présent que je jouis

déjà des lumières de la solitude , je vois.

;que j’ai eu tort , et je me repens. ,p L’attention redoubla , et l’inquiétude.

du Roi devint visible. --Oui, il est une personne, Sire,

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82 Cinq-1ans.que j’ ai toujours aimée, malgré ses torts

envers vous, et l’éloignement que les

affaires du royaume me forcèrent à luimontrer, une personne à qui j’ai dubeaucoup et qui vous doit être chère ,malgré ses entreprises à main arméecontre vous-mêmes; une personne enfinquei’je NOUS supplie de rappeler del’exil, je veux dire la reine Marie deMédicis, votre mère. i i ’ .-

Le Roi laissa échapper un cri invo-dentaire, tant il. étoit. lein de s’attendre

a ce; nom. Une agitation tout à coup’répriméeiparut’sur toutesles physiouo.

"mies. On attendit. en silencetles parolesroyales. Louis X111 regarda long-temps ’

isonivieux ministre sanstp’arler, et Cetregard décida du destin de la France.Il se rappela en un moment tous les

iserviCes infatigables de Richelieu, sondévouement sans bornes, sa Surpre-

" riante capacité, et’s’étonna d’avoir voulu

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L’arme-r. 783s’en séparer; il se sentit profondément

attendri à cette demande qui alloitchercher sa colère au fond de son cœurpour l’en arracher], et lui faisoit tom-ber des mains la seule arme qu’il-eût

contre son ancien-Serviteur; l’amourfilîai amena le pardon sur ses-Revues et

les.lannes dans ses-jeun ; heuretn d’ac-

corder ce quittassent: a; phis aumonde, il tendit la’maifi au cinc- avec

toute la noblesse et la bonté d’un Bonn-

est); Le «saisissons, la baisantavec respect; et i son cœur ’qui auroitdû se briser-ile repentir, ne’se remplitque de la” joie d’un K oiïgueilieüx’ trierai;

. Î ’ l. , ’ z! I ’ a l lv i ’ Le "prince touché ,4 lui I abandonnant

saïma’in , se retourna avecigrâce vessa

cour, et dit d’une voix très-Mue :v Neus nous trompons souvent ,ËMe’sî-

sieurs ,l et surtout. pourç connaître inaussi grand politique qnei’celui-ci: il

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64 film-nuas.ne nous quittera» jamais , j’espère , puis,

qu’il a un cœur aussi bon que sa

tête. l l .Aussitôt les cardinal (le la Valettes’empara du basfldu manteau du Roipour lebaiser avec l’ardeur d’un amant,

et le jeune Mazarin. eufit; presque, au»tant au duc de Richelieu lui:méme,;pre-

mutina visage, rayonnant de joie. et.dîattendxissçmfint aveql’admîœble 8°!!-

plesse ,italiepneh Deux flots d’adulateurs

fondirent , l’air surie Roi ,1 l’autre sur ,le

ministre; .le premier groupe non moins- adroî t que le second. quoique ; moins

direCt- , n’adressoit au: prince. que les

remerciemens que pouvoit entendre leministre, et brûloit-aux. pieds de l’unl’encensqu’il destinoit à l’autre. Pour

Richelieu , tout en faisant un signe de’ tête à droite et donnant un sourire à

gauche, il fit; deux paset se plaça de-bout à la droite du Roi, commejà sa

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L’ENTREVUB. 85place naturelle. Un étranger en entranëeût plutôt pensé que le Roi étoit à sa

gauche. Le maréchal d’Estrées et tous

les ambassadeurs, le duc d’Angouléme,-

le duc d’Halluin ( Schomberg ), le ma?-

réchal de Châtillon et tous les grandsofficiers de l’armée et de la couronne

I’entouroient, et chacun d’eux atten-.

doit impatiemment que le complimentdes autres fût achevé pour apporter le ’

sien , craignant qu’on ne s’emparât du

madrigal flatteur qu’il venoit d’impro-

viser ou de la formule d’adulation qu’il

inventoit. Pour Fabert, il s’était retiré

dans un coin de la tente , et ne sem-bloit pas avoir fait grande attention àtoute cette scène. Il causoit avec Mou.trésor et les gentilshommes de Mon-sieur, tous ennemis jurés du Cardinal,parce que hors de la foule qu’il fuyoitil n’avait trouvé qu’eux-"à qui parler.

cette conduite eût été d’une extrême

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65 .CINQ’HABS.’

maladresse dans tout autreconnu, mais on savait que tout en vi-vant au milieu de la cour il ignoroittoujours ses intrigues, et on disoit qu’ilrevenait d’une bataille gagnée comme

le cheval du Roi- de la chasse, laissantles chiens caresser leur maître et se.partager la curée, sans chercher à rapt,peler la part qu’il avoit au triomphe. ’

L’orage sembloit donc entièrement

apaisé, et aux agitations violentes dela matinée succédoit un calme fart

doux, un murmure respectueux inter.rompu par des rires agréables, et l’é-

clat des protestations d’attachement,étoient tout ce qu’on entendait dans la

tante. La voix du Cardinal s’élevait de

temps à autre pour s’écrier : Cette pau-

we. Reine! nous allons donc la revoir!je n’aurais, jamais osé. espérer caban»

,. avant- de mourir. Le Roi l’écourtoilasse confiance et ne cherchait pas

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L’asthme.à cacher sa satisfaction: C’est vraiment

une idée qui luivest venue d’en haut,

disoit-il; ce Ibon Cardinal, contre le-quel on m’avait tant fâché, ne songeoit

qu’à l’union de nia famille; depuis la

naissance-dut dauphin, n’ai pas goûté

de plus vive satisfaction quÏen ce m0,-

ment. La protection de la SainteNierge

est visible pour le-royaume. ,En ce moment un capitaine des gar-

des vint parler à l’oreille du prince; I

--.-Un courrier de CologneP-dit leRoi ; qu’il m’attende. dansmon cabinet;

Puis, n’y tenant pas: J’y vais, y vais,

dit-i15etvil entra seul: dans une: petite" tenu-f carrée attenante à la grande; on

y vitaux) jeune copulent tenant-un par-te-feuille. noir, et les rideaux s’abaissèrent

sur le Roi. . ’ . jLe Cardinal, resté senlfimaltte de lm

cour, en.ooncent;roit toutes les adura-tions; mais on s’aperçltt qn’il neles: IE1

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88 CINQ-MARS.cevoit plus avecla même présence’dies-

prit; il demanda plusieurs fois quelleheure il étoit , et témoigna un" troublequi n’était pas joué; ses regards durs

et inquiets se tournoient vers le cabi-net. Il s’ouvrit tout à coup; le Roi re-parut seul , et s’arrêta à l’entrée. Il étoit

plus pâle qu’à l’ordinaire , et tremblant

"de tout son corps; il tenoit à la mainune large lettre couverte de cinq ca-chets noirs.

l-Messieurs, dit-il avec une voixhaute, mais entrecoupée, la reine-mère

vient de mourir à Cologne, et n’aipeut-être pas été le premier à l’appren’œ

du , ajouta-t-il en jetant un regard sé-vère sur le Cardinal impassible. MaisDieu sait tout. Dans une heure, à che-val, et l’attaque des lignes. Messieurs

les maréchaux, suivez-moi ; et il tourna

le dos brusquement, et rentra dans soncabinet avec eux, ’ ’ I A

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damerez. * * 89La cour se retira après le ministre,

qui, sansrdopner. un signede tristesseou de dépit, Sortit aussi gravementqu’il étoit entré, mais en vainqueur.

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."z..:..1iiz :11”lll1 .canneur: ne; -*

8-08:

19814550-

J’aime les forts tonnant aux abords dificileo.Le glaive un des chefs guidant les rangs dociles.

I La vedette perdue en un bois isolé, lEt les vieux bataillons qui puant du: les villes

Avec, un drapeau mutilé.

"mon un.

1l est des momens dans la vie. où l’on

souhaite avec ardeur les fortes commo-tiens pour se tirer des petites douleurs,des époques où l’âme , semblable au

lion. de la fable , et fatiguée des attein-

tes continuelles de l’insecte, souhaite

un pins fort ennemi , et appelle les

. f i

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’ LE SIÈGE. 39!dangers de toute la puissance de sondésir; Cinq-Mars se trouvoit dans cettedisposition d’esprit , qui naît toujours

d’une sensibilité maladive des organes,

et d’une perpétuelle agitation du cœur.

Las de retourner sans cesse en lui-même les combinaisons d’événemens

qu’il souhaitoit et celles qu’il avoit à

redouter , las d’appliquer à ces proba-. bilités tout ce que sa tête avoit de force

pour les calculs , d’appeler à’son se-

” cours tout ce. que son éducation luiavoit fait apprendre de la vie des hom-mes illustres pour le rapprocher de sa si-tuation présente ,accablé deise’s regrets;

de ses songes , des prédictions , deschimères, des craintes et de tout ce

’lmonde imaginaire dans lequel il avoit’ vécupen’dant son ’lvoyage Solitaire, il

respira en se trouvant jeté" dansantmonde réel presque auSsi bruyant , et

’le sentiment des deux dangers vérita-

«A

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(l’ai

g? CINQ-MARS.bles rendit à son sang la circulation et: la jeunesse à tout son être.

Depuis la scène nocturne (le-son au-berge près de Loudun , il n’avoir: pu Are-I

Éprendre assez (l’empire sur son esprit

pour s’oCCuper d’autre chose que de

ses chères et douloureuses pensées , et31118 sorte de consomption s’emparoit

-déjà de lui, lorsque heureusement ilfarriva au camp de Perpignan et heu-reusement encore eut occasion d’ac-icepter la. .propositionüde l’abbé de

.Gondi; car on a sans doute reconnuVICinvquars dans la personne Ide-ce jeune

» étranger en deuil, si insouciant et si:mélancolique, que le duelliste en sou-1tarte avoit pris pour témoin. V V..; avoit fait établirv’satente comme:f’volontaire’, dans la rue du camp I assi-

gnée aux jeunes seigneurs qui devoientêtre présentés au Roi et servir comme

,aides-de-camp (les généraux; il s’y ren-

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, LE suiez. p p93Idit promptement , fut bientôt armé,là cheval et’cuirassé selon la coutume

qui subsistoit encore alors , et partitseul pour le bastion espagnol, lieu durendez-vous. Il ’s’y trouva le premier

et reconnut qu’un petit champ de gazon

caché par les ouvrages de la place assié-

jgée avoit été fort bien choisi par lepetit abbé pour ses projets homicides;

;car , outre que personne n’eût soup-: conné des officiers d’aller se battre sous

la ville même qu’ils attaquoient, le corps

,d’u bastion les séparoit du camp fran-’ca’isl,’ et devoit-les voiler comme un

L’immense paravent. Il [étoit bon deprendre ces précautions , car il n’enA coûtoit pas moins que la tété alors pour

s’être donné la satisfaction de risquer

corps. V ’ L ’ l, attendant ses amis et ses adver-paires, Cinq-Mars eut le temps d’exa-

miner le côté du sud Perpignan de-

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’ CINQ-MARS.vant lequel il se trouvoit. H avoit en.tendu dire que ce n’étoit pas ces ouvra-

ges que l’on attaqueroit , et cherchoit en

vain à se rendre compte de ces projets.Entre cette face méridionale de la villeet les montagnes de l’Albère et le col

du Perthus, on auroit pu tracer deslignes d’attaques, et des redoutes con-

tre le point accessible. Mais pas unsoldat de l’armée n’ylétoit placé, toutes

les forces sembloient dirigées sur lenord de Perpignan , du côté le plusdifficile , contre un l fort de briquenommé le Castillet, qui surmonte l’a

’ porte de Notre-Dame. Il vit qu’unter-

Vrain en apparence marécageux, maistrès-solide , conduisoit jusqu’au pieddu bastion espagnol ; que ce poste étoitgardé avec toute la négligence castil-

lane , et ne pouvoit avoir cependantde force que par ses défenseurs ,’ car

ses créneaux et ses meurtrières étoient

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me sises.truités et garnis de quatre pièces decanon d’un énorme calibre , encaissées

dans du gazon , et par-là rendues im- imobiles et impossibles à diriger contre ’

mine troupe qui se précipiteroit rapide.

ment au pied du mur. * . AIl étoit, aisé de voir que ces énormes

pièces’avoient été aux assiégeans l’idée

d’attaquer ce point , et aux assiégés

celle d’y multiplier les moyens de dé- Il’anse. Aussi,’d’un côté les postes avan- ’

tés et les vedettes étoient fort éloignés;

de l’autre ,’ les sentinelles étoient rares

et mal soutenues. Un jeune Espagnol,tenant une longue escopette avec safourche suspendue à son côté , et lamèche fumante dans. la main droite , sepromenoit nonchalamment sur le remn- .part, et s’arrêta à considérerCinqèMars

qui misoit a cheval le tour des fossés

et du marais. ’ Ï--.8nîor caballero, lui dit-il’,;est-ee

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96 cinQrMAns.que vous voulez prendre le bastionsvous. seulet à cheval, comme don.Quixote Qui xada de la, Manche i’.

Et en même temps il détacha. la four.-

cbe ferrée qu’il avoit au côté , la planta

en terre , et y appuyoit le boutde sonescopette pour ajuster , lorsqu’un graveEspagnol plus âgé ,, enveloppé dans un i

sale manteau brun , lui dit dans sa

langue : . À.. -- Ambrbsio de. Bermuda, ne sais:-;tu pas bien qu’il est défendu de .per-

.drc la poudre inutilement jusqu’auxsorties ou aux attaques , pour avoir leplaisir. de ztuertun enfant quine .vautpas .ta,mèche.? C’est ici même. que

Charles-Quint a jeté, et noyé,.-dans le

fossé la sentinelle endormie. Fais ton

devoir, ou je limiterai. , a ..Ambrosio remit; son , fusil sur son

épaule , son bâton fourchu àkson côté,

et reprit sa promenadesur le rempart.

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LE suies. 97Cinq-Mars avoit été fort peu ému de

ce geste menaçant , et s’était contenté

d’élever les rênes de son cheval et de

lui approcher les éperons, sachant qued’un saut de ce léger animal , il seroit

transporté derrière un petit mur d’une

cabane qui s’élevoit dans le champ ou

il se trouvoit , et seroit à l’abri du’fusil

espagnol avant que l’opération de lafourche et de la mèche fût terminée.

.11 savoit d’ail-leurs qu’une convention

tacite des deux armées empêchoit que

les tirailleurs ne fissent feu sur les sen-tinelles , ce qui eût été regardé comme

un assassinat de chaque côté. Il falloitmême que le soldat qui s’étoit disposé-

ainsi à l’attaque fût-dans l’ignorance

des consignes pour l’avoir fait. Le jeuned’Effiat ne fit donc aucun mouvement

apparent; et lorsque le factionnairereprit sa promenade sur le rempart , ilreprit la sienne sur le gazon , et aperçut

au 1 5

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98 CINQ-mas.bientôt cinq cavaliers qui se dirigeoient

vers lui. Les deux premiers qui ami.vèrent au plus grand galop ne le sa-luèrent pas; mais , s’arrêtant presque

sur lui, se jetèrent à terre , et il setrouva dans les bras du conseiller deThon qui le serroit tendrement ,tanÀisque.le petit abbé de Gondi , riant detout son cœur , s’écrioit: v

--4 Voici encore un Oreste. qui re-trouve son Pylade, et au moment d’im-

moler un coquin qui n’est pas de lata-

mille du Roi des Rois, je vous assure.’---.Eh quoi! c’est Vous, cher Cinq-

Harsl s’écrioit de Thon; quoi! sansque j’aiesu votre arrivée aucunp lOui;

c’est bien" vous , je vous reconnais,quoique vous soyez. phis. pâle...Avœ-vous été malade , cher. ami? le vous ai

écrit bien. souvent; car notre amitiéd’enfance m’est demeurée bien. avant

dans le cœur. -.2

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in: SIÈGE. 99I --- Et moi ,.répondit Henri ,d’Effiat,

j’ai été bien coupable envers vous;

je vous conterai tout ce qui m’étoulf!

(lissoit; je pourrai vous en parier, et.j’avois honte de vous l’écrire. Mais que

vous êtes bon! votre amitié no s’eçt

point lassée. .e- J avoua connoissois trop bien ,.-prenoit de Thon; je savois qu’il. ne hou.

voit y avoir d’orgueil entre nous; etque mon. âme avoit un écho dans la

. Avec ces paroles ils s’embrassoientl;

les yeux humides de ces.larmcs doucesque l’on verse si rarement dans la .viel’,

et dont ilsemble; cependant que le cœiuf

soit toujours chargé, tantales foragebimenrcoulant. , t , A l A. ,

Cet instant fut court; etzpçndçpt ç;peu de mots, Gandi: n’avait .eessédç, les

tirer pas-leur manteau a; "1.4th ê ,,r . .- A. chevalià chevalf! Messiçurgi

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i 00 CINQ-MARS.Eh! pardieu, vous aurez le temps devous embrasser, si vous êtes si tendres;-

mais nevous faites pas arrêter, et son-geons à en finir bien vite avec nos bons

amis qui arrivent. Nous sommes dansune vilaine position , avec ces troisgaillardselà en face, les archers pas loind’ici, et les Espagnols la haut; il faut

tenir tête à trois feux. ’Il parloit encore lorsque de Lau-

nay se trouvant à soixante pas de làavec ses seconds, choisis dans ses amisplutôt que parmi les partisans du Car-dinal, embarqua son cheval au petit gaà

lop, selon les termes du manège, etavec toute la précision des leçons qu’on

y reçoit, s’avança de très-bonne grâce

vers ses jeunes adversaires, et les salua t. gravement:

--. Messieurs, dit-il , je crois quenous ’feronsibien de nous choisir, et

de prendre du champ; car il est ques-

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LE suiez. 10ltion d’attaquer les lignes, il faut que je

sois à mon poste.

- Nous sommes prêts, Monsieur,dit Cinq-Mars; et quant à nous choi-sir, je serai bien aise (le me trouver enface de vous; car je n’ai point oublié

le maréchal de Bassoimpierre et le bois

de Chaumont; vous savez mon avis survotre insolente visite. chez ma mère.

-- Vous êtes jeune , Monsieur; j’ai

rempli chez madame votre mère les de-

voirs d’homme du monde; chez le ma-

réchal, ceux de capitaine des gardes ,ici ceux de gentilhomme avec M. l’abbé

quiim’a appelé, et ensuite j’aurai cet

honneur avec vous. ki --- Si je vous le permets, dit l’abbé

déjà à cheval. .Ils prirent soixante pas de champ,

.et c’étoit tout ce qu’offroit d’étendue

le pré qui les renfermoit; l’abbé de

Gandi fut placé entre de Thon et son

WhI’..»

w rfin’r’ :31- -- A-â 7-4-4

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toi» aïno-mis.ami se trouvoit le plus rapprochédes remparts , où deux officiers espa-gnols et une vingtaine de soldats se pla-cèrent (comme au balcon pour Voir ceduel de six personnes , Spectacle quileur étoit assez habituel. Ils (lonnOientles mêmes signes de joie qu’à leurs

combats de taureaux , et rioient de cerire sauvage et amer que leur physio-nomie tient dutsang arabe. . . W

VA un signetde Gandi, les six. ché-vaux partirent au galop et se rencon--trèrent sans se .heurter au milieu (lel’arène; à l’instant six coups dépisto-

let S’entendirent presque ensemble, et

, la fumée couvrit les combattaiis.t. Quand elle se dissipa , on ne vit ,’ des

six cavaliers et des six chevaux , que.trois hommes et trois animaux en bon«état. Cinq-Mars étoit à cheval, donnant

la I’main à son adversaire aussi calme

î-que lui ; à l’autre extrémité, de Thon

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n: SIÈGE. :105s’approchoit du sien , dont il avoit tué

le cheval, etfl’aidoit à se relever; pour

Gandi et de Launay, on ne "les voyoitplus ni l’un ni l’autre. Cinq- Mars,les cherchant avec inquiétude, aperçu:

en avant le cheval de l’abbé qui sau-

toit et caracoloit , traînant à sa suite le

futur cardinal, qui avoit le pied prisdans l’étrier, et juroit comme s’il n’eût

jamais étudié autre chose que le 1an-

’gage des-camps; il avoit le nez et lesmainstobt en sang de sachute et de-ses"efforts pour s’accrocher au gazons, etvoyoit avec’àsSefld’humeur son cheval,

que son pied chatouilloit bien malgrélui, se diriger vers le fossé rempli d’eau

qui entouroit le bastion , lorsque heu-reusement Cinq-.Mars, passant entre le

’bord du marécage et lui , le saisit par

la bride et l’arréta. l-- Eh bien l mon cher abbé,

vois que vous n’êtes pas bien ma-

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l 04 CINQ-nuas.lade, car vous parlez énergiquement.

- Par là corbieu! crioit Gandi. ena se débarbouillantde la terre qu’il avoit

dans les yeux , pour’tirerun coup depistolet à la figure de ce géant il a bienfallu me pencher en avant et m’élcver

sur l’étrier; aussi ai- je un peu perdul’équilibre, mais je crois qu’il est par

terre aussi. .- Vous ne vous trompez, guère,Monsieur, dit de Thou qui arriva; voilàson cheval qui nage dans. le. fossé avec

son maître, dont la cervelle est em-portée; il faut songer à nous évader.

-- Nous évader? c’est assez difficile.

Messieurs, dit l’adversaire de Cinq-Mars survenant, voici le 0011p déca» inon , signal de l’attaque; je nevçroyois

pas qu’il partît sitôt : si nousretour-

nous, nous rencontrerons lesSuisseset les Lansquenets qui sont erg-bataille

sur ce point. i;ï,’î i . 1’.

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LE smala. 105- M. de Fontrailles a raison, dit

de Thou; mais si nous ne retournonspas, voici des Espagnols qui courentaux armes , et nous feront siffler des

balles sur la tête. V i--- Eh bien l tenons conseil , dit

Gandi, appelez doncIM. de, Montrésorquills’occup’e inutilement de rechercher

le corps de ce pauvre Launay. Vous nel’avez pas blessé , Monsieur de Thou?

I L-Non, Monsieur l’abbé; toutle monde

n’a pas la main si heureuse que la vôtre,

dit amèrement Montrésor qui venoitboitant un peu à cause de sa chute];nous n’aurons pas le temps de conti-

nuer avec l’épée. 1, .y -’- Quant à continuer, je n’enwsuis

pas, Messieurs , dit Fontrailles; M. deCinq-Mars en a agi trop:noblementavec moi ;,mon,pistolet avoit fait longfeu,qlet ma foi, lissier) s’est appuyé surin? 1911601911. ses mon le froids il

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’ ioô CINQ-MARS.a eu la bonté de l’ôter et de tirerienl’air; je ne l’oublierai jamais, et je suis

à lui à la vie et à la mort.---’ Il ne s’agit pas de cela, Messieurs,

interrompit Cinq-Mars; voici une ballequi m’a sifflé à l’oreille; l’attaque est

commencée de toutes parts , etinoussommes enveloppés par les amis et les

ennemis, n ’ a j I ! q ’ ’" j’En effet lançanonnade étoit générale,

la madéfie un ville a "l’armée, sans:

couvertes sa fumée ;’.le bastion seul ,qui leur’l’aisoit face ,1 n’était pas atta-

qué, ’et’ses gardes Sembloient ’m’oins

Se’préparer à le défendreîq’u’à exami-

ner le sort des autres fortifications.’-- Je crois que l’ennemi a fait une

Sortie, dit Montrésor, car la fumée acessé dans laëplaine,’et je vois des mais;

ses de cavalerie qui chargent. pendant ’que le Canon de’la’pl’ace les protège.

---Messieurs, dit Cinq-Mars qui n’a-

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LE suint. - 107voit cessé d’observer les manilles, nous

pourrions prendre un parti , ce seroitd’entrer dans ce bastion mal gardé.

à C’est très-bien dit , Monsieur,dit Fontrailles ,’ mais nous ne sommes

que cinq contre trente au moins, etnous voilà bien découverts et faciles à

compter. I ’ ’--- Ma foi , l’idée n’est pas mauvaise!

dit Gandi Ê il vaut mieux être fosillé là-

haut que pendu ’là-bassi’l’on vient’à

nous trouver, car ils doivent déjà s’être

aperçus que Lâunay manque à sa oom-

paguie, et toute- la cour sait notre af-

’ faire. I I’ --- Parbleu , Messieurs , dit Montré-

sor, voilà du secours qui nous vient.Une troupe. nombreuse à cheval,

«mais fort en désordre,-arrivoit sur eux

au plus grand galop; des habits rougesles faisoient voir de loin ; ils sembloientavoir pour but de s’arrêter dans le

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t 08 euro-mans.champ même où se trouvoient nôsduellistes embarrassés, car à peine les

premiers chevaux y furent-ils, que lescris de halte l se répétèrent et se prolon-

gèrent par la voix des chefs mêlés à leurs

cavaliers. IA. - Allons au-devant d’eux, ce sontles gens-d’armes de la garde duVBoi , dit

’Fontrailles , je les reconnois aleurs co-

cardes noires. Je vois aussi beaucoupde chevau-légers avec eux; mêlons-nous à leur désordre, car je crois qu’ils

sont ramenés. ’" xCe mot est un terme honnête qui

vouloit dire et signifie encore: en dé-route dans la langue militaire. Tous lescinq s’avancèrent vers cette troupe

vive et bruyante, et virent que cetteconjecture étoit très-juste. Mais au lieu

de la, consternation qu’on pourroit at-

tendre en pareil cas, ils ne trouvèrentqu’une gaieté jeune et bruyante, et n’en-

b

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h Le SIÈGE. 109tendirent que des éclats de rire dans ces

deux compagnies. , .-- Ah! pardieu! Cahuzac , disoit

l’un, ton cheval couroit mieux que lemien; je crois que tu l’as exercé aux

chasses du Roi. ,-- C’est pour que nous soyons plus

tôt ralliés que vtu’es arrivé le premier

ici, répondoit l’autre.

’ -.Ie crois que le marquis de Coislin

est fou de nous faire charger quatrecents contre huit régimens espagnols.

-- Ah! ah! ah! Locmaria! votre pa-nache est bien arrangé! ila l’air d’un

saule pleureur. Si nous suivon.c celui-là ,ce sera à l’enterrement.

-- Eh! Messieurs l je vous l’ai dit d’ -

vance , répondoit d’assez mauvaise hu-

meur ce jeune officier; j’étois sur que

ce capucin de Joseph, qui se mêle detout, se trompoit en nous disant, de

. charger de la part du Cardinal. Mais

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1 10 CINQ-MARS.auriez-vousété contens si ceux qui ont

l’honneur de vous commander avoientrefusé la charge P

- Non 5 non , non! répondirent tousces jeunes gens en reprenant rapide-vment leurs rangs.

- J’ai dit, reprît le vieux » [nar-quis de Coislin qui, avec, ses cheveuxblancs ,l avoit encore le feu de la jeu-nesse dans les yeux, que si Yen vdusordonnoit de monter à l’assaut; à cheval,

vcus le feriez. l-- Bravo l bravo! crièrent toué 18s

gens-d’armes en battant des mains.

--Eh bien! Monsieur le marquis, ditCi nq-Mars en s’approchant ,voici l’occa-

sion d’exécuter ce quexvousavezpromis;

je ne suisqu’un simpke volantaiœ, mais

il y: déjà un instant que cas Messieurset moi examinasses: bastion, , et-je (gluis,q’u’onen pourroit venin à bout"

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LE suiez. il l-- Monsieur , au préalable , il fau-

droit sonder le gué pour...

En ce moment, une balle partie durempart même dont on parloit vintcasser la tête au cheval du vieux capi-

taine. p-Locmaria, de Mouy, prenez lecommandement, et l’assaut, l’assaut!

crièrent les deux compagnies nobles,

le croyant mort. v-- Un moment, un moment , Mes-

sieurs, dit le vieux Coislin, en se re-levant, je vous y conduirai, s’il vousplaît; guidez-nous, Monsieur le volon-

taire , car les Espagnols nous invitent àce bal , et il faut répondre poliment.

vA peine le vieillard fut-il. sur un au-tre cheval,que lui amenoit unde sesgens, et, eut-il. tiré son épée , que, sans

attendre: son commandement, toutecette ardente jeunesse , . précédée par

Çinq-Marsfiet ses amis, dont les chevaux

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! 1 a . CINQ-MARS.étoient poussés en avant par les esca-

drons, se jeta dans le marais où, à songrand étonnement et à celui des Espa-gnols qui comptoient trop sur sa pro-kfondeur, les’chevaux ne s’enfoncèreut

que jusqu’au jarret , et, malgré une deo

chargea mitraille des deux plus grossespièces, tous arrivèrent pélecmêle sur

un petit terrain de gazon . au pied desremparts à demi ruinés. Dans l’ardeur

du passage, Cinq-Mars et Fontraillesavec le jeune Locmaria lancèrent leurschevaux sur le rempart même; maisune vive fusillade tua et; renversa ces.trois animaux qui roulèrent avec [leurs

maîtres. I I l I l. q V l’---l Piediàtcrre! Messieurs! cria le

vieux Coislin, le pistolet et l’épée, et en.

avant ; abandonnez vos chevaux; ’Tous obéirent rapidement, et vinrent.

se jeter en foule à la brèche; 4Cependant de Thou , que son sang-

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LE suies. l 13froid ne quittoit jamais non plus queson amitié, n’avoit pas perdu de vue

son jeune Henri, et l’avoit reçu dans

ses bras lorsque son cheval. étoittombé. Il le remit debout, lui renditson épée échappée, et lui dit avec le

plus grand calme, malgré les balles qui

pleuvoient de tout côté : l--Mon ami, ne suis-je pas bien ri-

dicule au milieu de toute cette bagarrej avec mon habit (le conseiller aulparle-

ment? V A-Parbleu , dit Montrésor qui s’avan-çoit, voici l’abbé qui vous justifie bien.

En effet, le petit Gandi , repoussantdes coudes les chevau-légers, crioit de

toutes ses forces: Trois duels et unassaut l J’espère que j’y perdrai mascu-

tane enfin! I ,Et, en disant ces mots, il frappoitI d’est-oc et de taille sur un grand Esga-z

lgnol. I V ,I. , . 5;

1

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ri i4 mie-Mi us.t "la ËdéfenSe” ne fut pas longue... Les’s’dldats’castillanslne tinrent pas long-

’ temps contre les officiers français, etpas un d’eux n’eut le temps ni la har-

idiesse’de recharger son arme. . èI ’ -’-’ Messieurs,nous raconterons cela

d’à nos maîtresses, à Paris, s’écria Loc-

maria. en jetant son chapeau en l’air,’zét ’Ôinq-Mars , de Thou , Coislin, de .

"M’auy’, Londigny, officiers des compa-

’ gnies rouges, et tous ces jeunes gen-tilshommes, l’épée dans la main droite,

filé’pi’siolet dans la gauche, se heurtant,

se poussant et se faisant autant de mal’à’eux-mêmes qu’à l’ennemi parleur

iliem’pre’SSement’, débordèrent enfin sur

-" la plate-forme du bastion , comme l’eau’V’vérsé’e d’un vase dont l’entrée est tr0p

étroite ’aillit par torrens au dehors. ÏA ’ .Dëdaign’ant de s’occuper même des

f«Sol"da’ts’vaincus qui VSe jetoient leurs

genoux , ils les laissèrent errer dans le1

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- LE sinon. i115’fërt’sans même les désarmer,’et se mi-

rient à courirdans leur compète comme

des écoliers en vacance, riant de: tout"leur cœur comme après une partie de

plaisir. l V i’ 1- Un officier espagnol, enveloppé’ dans sonï manteau brun, les’regardoit

d’un air sombre. » i i--Quels démons est-ce là, Ambro-

sio? disoitvilià un soldat. Je ne lesaipas connus autrefois, en France. SiLouis X11! a toute une armée ainsicomposée , ’il’estr bien bon de ne pa

conquérir-l’Europe. r - :ïü-fdhlijelnei les orois pasbien nom-

breux; ilË faut que» cegsoit un corps de

pauvres avenmriers qui n’ont rienvà. perdre , etntout à gagner par le pillage.

- w- Tu’ as raison , dit l’officier , aje

vais ’ tâcher d’enflaséduire- un pour

m’échapper. I l ’Et, s’approchant avec lenteur , il

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l 16 CINQ-MARS.aborda un jeune cheveu-léger , d’eu-viron dixvhuit ans , qui étoit à l’écart,

assis sur le parapet; il avoit le, teintblanc et rose d’une jeune fille , samaiudélicate tenoit un mouchoir brodé dont

il essuyoit son front et ses cheveux d’un

blond d’argent; il regardoit. l’heure à

une grosse montre ronde couverte derubis enchâssés et suspendue à sa cein-

ture par un nœudde rubans.L’Espagnol étonné s’arrêta. S’il ne

l’eût vu renverser ses soldats, il nel’aurait cru capable que de chanterune romance , couché sur. un lit derepos. Mais prévenu par les idéesd’Ambrosio , il songea qu’il se pouvoit

qu’il eût volé ces objets de luxe au

pillage des appartemeus d’une femme,

et l’abordant brusquement, lui .dit:

Hambn.’ je suis officier; veux-tume rendre la liberté et me faire revoir

mon pays? -

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. LE suées. 1 17Le jeune Français le regarda avec

d’air-doux de son âge , et songeantsa propre famille , lui, dit z

- Monsieur , je vais vous présenter

au marquis de Coislin qui vous accor-dera sans doute ce que vous demandez;

; votre famille est-elle de Castille ou,d’Aragon P

-- Ton Coislin demandera une autrepermission encore , et me fiera atten-dre une année ; je te donnerai quatremille ducats , si tu me fais évader.

Cette figure douce , ces traits enfan-tins se couvrirent de la pourpre de lafureur ; (ces yeux bleus lancèrent deséclairs , et en disant: De l’argent , à

moi P va-t’en , imbécile!

Le jeune homme donna sur la jouede l’Espagnol un bruyant soufflet.Gelui-ci, sans hésiter , tira unnlongpoignard de sa poitrine, et saisissantle bras du Français ,1 crut le lui-plon-

,, ii-t-rzï...’..-. .L-z-

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Ïr r8 crue-Miss.ger facilement dans le cœur; mais lesteet vigoureux, l’addlescent’lui prit lui-méme le bras droit, et l’élevant avec

farce au-dessns’ de sa tête , le ramenaA avec le fer sur celle de l’Espagnol fré-

missant de rage. r ’-Ehl eh! eh! doucement,Olivi-er!

Olivier! crièrent de toutes parts sescamarades accourant: il y a assez d’Es-

’ pagnols par terre- jEt’ils désarmèrent l’officier ennemi.

- Que ferons-nous de cet enragé?

disoit l’un. i aI- Je n’en voudrois pas pour valet

de chambre , répondoit.l’autre.

-- Il mérite d’être pendu,"disoit un

troisième; mais , ma foi, Messieurs ,nous ne savons pas pendre; envoyons-le à ce bataillon de Suissesqui passedans la plaine. Et cet homme sombre .et calme, s’enveloppant de nouveau

’ dans son manteau ’, se mit marche

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L’E suées Hg’ de lui-même , suivi d’Ambrosio , pour

aller joindre le bataillon , poussé parles épaules et hâté par cinq ou six de

ces jeunes fous.Cependant la première troupe d’as-

siégeans, étonnée de son succès , l’avoit

suivi jusqu’au bout. Cinq-Mars , con-seillé par le vieux Coislin , avoit fait le

tour du bastion , et ils virent tous deux. avec chagrin qu’il étoit entièrement sé-

paré de la ville, et que leur avantagene pouvoit se poursuivre. Ils revinrentdonc sur la plate-forme, lentement et len causant , rejoindre de Thou etl’abbé de Gondi , qu’ils trouvèrent

riant avec les jeunes chenu-légers.--- Nous avions avec nous la religion

et la justice , Messieurs; nous ne pou-vions pas manquer de triompher.

- Comment donc? mais c’est qu’elles

a ont frappé. aussi fort que nous !

Ils se turent à l’approche de Cinq-

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1.20 CINQ-Mans. IMars , et restèrent un instant à chu-choter et à se demander son nom ;puis tous l’entourèrent et lui prirent la

main avec transport. ’--’Messieurs , vous avez raison, dit

leur vieux capitaine , c’est, comme di-

soient nos pères, le miens: faisant dela journée. C’est un volontaire qui doit

ê re présenté aujourd’hui au Roi par le

étrdinal;

1-. Par le Cardinal! nous le présen-terons nous-mêmes; ah! qu’il ne soit

pas Cardinalisle (1), il est trop bravegarçon pour cela , disoient avec viva-

cité tous ces jeunes gens. , I--- Monsieur , je vous en dégoûterai

bien, moi, dit Olivier d’Entraigues ens’approchant , car j’ai été son page, et

je le connois parfaitement. Servez plu-

(1) La France et l’arméeétoient divisées en Rafa-

lisies et Cardinalistes.

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LE SIÈGE. untôt dans les compagnies Rouges; allez ,vous aurezde bons camarades.

Le vieux marquis évita l’embarras

de la réponse à Cinq-Mars en faisantsonner les trompettes pour rallier ses , *brillantes compagnies. Le canon avoitcessé de se faire entendre, et un gardeétoit venu l’avertir que le Roi et le Car-

dinal parcouroient la ligne pour voir lesrésultats de la journée ; il fit passertous les chevaux par la brèche , ce quifut assez long, et ranger les deux com-pagnies à cheval en batailledans unlieu où il sembloit impossible qu’uneautre troupe que l’infanterie eût jamais

pu pénétrer. W l ’

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11’ . ’.enuvruzn. ,

’s’ M (fg-1a. . .--. ’ l’âoæ

Les récompenses.

En Man.si; comme du lithium gniüriei’vtrcpsjâlon, 4

(lourent bride abattue ail-devant demie! opium! n’ Agitez tous leurs sens d’une rage insensée. .

Tambour, fifre, trompette, ôtez-Teni- la pénurie; L

I NL-huilnu’yPMhypkm’u’ W.

A 1-12!» :2 ila Pour assouvir le premier emport: l

toment du chagrin royal, avoit dit lii- ’chelieu , pour ouvrir une source d’émo-

tions qui détourne’de’la douleur cette

âme incertaine , que cette ville soit as-siégée, j’y consens; que Louis parte ;

je lui permets de frapper quelques

B A

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I LES ’. méconiums-s. i 23phivres’soldats’ des coups Lqu’il vous

droit et n’ose me donner. Que. sa "colère

timide s’éteigne dans ce sang, obscur ,

joie veux. -Maisce CapriCe de nedérangera pas mes immuables desseins;

cette ville ne tembera pas encore; ellene sera française pour toujours quedans deux. ans ; elle viendra dans mesfilets seulement au jour marqué dansma pensée. Tournez, bombes etcanons;méditez vos opérations , savaus’ sapin

tailles ; précipitez-vous , jeunes guer-riers ;. je ferai taire votre bruit, éva-

nouir vos projets, avorter vos efforts;tout finira par une vaine fumée , et jeyais vous conduire pour yens égarera

ces pensées et. Lde bien plus profana

des encore rouloient sous la tête dham’rh

du vieux Cardinal avant l’attaque (tout

.011, vient de voir Uneïpartie. Il s’étaitplacé à chenal, Saumur! de la 11113:,

pour une desïmnragnes de. Salsesï; de ’

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l 24 CINQ-MARS.ce point il’pouvoit voir la. plaine du VRoussillon devant lui, s’inclinant jus»qu’à la Méditerranée; Perpignan , avec

ses remparts de brique ,l ses bastions ,sa Citadelleet son clocher , y formoitune masse ovale et sombre sur (les préslarges et verdoyans; etlles vastes mo’n-

tagnes l’enveloppoient avec la vallée

comme un arc immense courbé du nordausud, tandis que, prolongeant sa ligneblanchâtreà l’orient , la mer sembloit

en être la corde argentée. A sa droites’élevait ce mont immense que l’on

appelle le Canigou , dont les flancsépanchent deux rivières dans la plaine;la ligne française s’étendait jusqu’aux

«pieds de cette barrière de l’occident.

Une foule de généraux et de grandsseigneurs se tenoient à cheval derrière

v le ministre, mais à vingt pas de dis--tance et ,dans un silence profond. Ilavoit commencé par suivre au plus l

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LES RÉCOMPENSES. 125

petit pas. la ligne d’opérations , et en-

suite étoit revenu se placer immobilesur, cette hauteur d’où son œil et sapensée planoient sur les destinées desassiégeans et des assiégés. L’armée avoit

les yeux sur lui , et de tous points onpouvoit le voir. Chaque homme por-tant les armes le regardoit comme sonchef immédiat et attendoit son gestepour agir. Dès long-temps la Franceétoit ployée à son joug , et l’admira-

tion avoit exclu de toutes ses actionsle ridicule auquel un autre eût étéquelquefois soumis. Ici , par exemple,il ne vint à l’esprit d’aucun homme de

sourire ou même de s’étonner que la

cuirasse revêtît un prêtre , et la sévé-

rité (le son caractère et de son aspectréprima toute idée de rapprochemens

ironiques ou de conjectures innrieuses.Cejour-là le Cardinal parut revêtu d’un

costume entièrement guerrier ; c’étoit

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1126 CINQ-MARS.un habitacouleiir de feuille morte, brodé

enor ;-u-ne cuirasse de couleur d’eau ,d’épée au côté, des. pistolets à l’arçon

de sa’selle’, d’un chapeau?! plumes ,

qu’il mettoit rarement sur sa têteont ilïcqnservoit toujours la calotte ."rouge. Déni pages-étoient derrière lui;

l’un pontoit ses-gantelets, l’autre son

casque ,..et letcapitaine de ses gardesétoità sonz’côtér K ’ ’v Comme le. Roi lavoit :Ino’uvell’enieu’t

générzilis’simeide ses troupes,c’était à lui que les générauxenvoydent

.elemamler des ordres; mais lui ,, con-naissant trop bien les secrets motifs dela colère actuelle de son maître, affecta

de renvoyer ace prince tous ceux quivouloient avoir une décision de sa bou-che; il. arriva ce qu’il avoit prévu, car

il régloit et calculoit les mouvemensde ce cœur comme ceux d’une hor-loge , et auroit pu dire avec exactitude

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LEsP’ii’ËcoeriÉnsns. 5’ 1 27

par quelles ’sensati’OHs il ïavoitr’pass’é.

’ Louis ’XIII vint se placer à ses côtés,

V mais il y vînt comme vient l’élève ad’o-

lescent ’forcé de reconnaître que sonmaître a raison, son air ’étoit hautain

"jet mécontent, ses paroles étoient-Brus-

quesfiet sèches. Le Cardinal demeura’i impassible. llfut remarquable que le -’ Boi’emploj’oit, en censdlta’nt, les pa-

’"roles du commandement, Conciliantainsi sa’foiblesse ’er-sdù pouvoir, son

irrésolution et sa fierté, son impéritie

I et’ses prétentions, tandis que soumi-A nistre lui dictoit ses lois avec le’ton de

la plus profonde’obéissancegn’ V A ’

s. --f Je veux. quel’on attaque bientôt,’Üardin’al, dit’ le rince terri arrimant;

’ c’estâà-diré, ajbu’ta-t’éil avec un air d’in-

" soudancé , lorsque louss’os’ prépara-

tifs seron’t faits et à ’l’lieure. dont vous

serez convenu avec nos maréchaux. iI ’ - Sire, si j’osois dire ma pensée,.je

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:28 .- gnan-nuits,"Imoudrois que Votre Majesté eût pour

. agréable d’attaquer dans un quart d’heu-

re, car, la montre en main, il suffit dece temps pour faire avancer la troi-

sième, ligne. ’ v ’-- Oui, oui, c’est bon , ’Monsieur le

Cardinal; je le pensois aussi , je vaisdonner mes ordres moi-même, je veuxfaire tout :moi - même, Schomherg ,

. Sçhombergl dans un quart d’heure je

A veux entendre le canon dusignal , je

le veux. - l q . . .En partant pour commander la droitede l’armée , Schomberg ordonna, et le

signal fut donné. . ’ l j ,F ’ Les batteries disposées depuis long-

; temps parfile maréchal deLa Meilleraie

,commencèrentr-à battre en brèche,Vmais mollement ,! parceque les artil-v leurs sentoient [qu’on les avoit diri-gées sur deux points inexpugnables , etqu’avec. leur espérience , et. surtout ce

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LES RÉCOMPENSES. . 129

sens droit et cette vue prompte du sol-(lat français, chacun d’eux auroit puindiquer la place qu’il eût fallu choisir.

A Le, Roi fut frappé de la lenteur des

Jeux. A ’’- La Meilleraie , dit-il avec impa-

tience, voici des batteries qui ne vontpas; vos canonniers dorment.

Le maréchal, les mestres-dc-campd’artillerie étoient présens, mais aucun

ne répondit une syllabe. Ils avoientfjeté les yeux sur le Cardinal qui Ide-meuroit immobile comme une surgieéquestre, et ils l’imitèrent. Il eût fallu

répondre quella faute n’étoit pas aux

g soldats, mais à celui qui avoit ordonné

g cette fausse disposition des batteries,etc’étoit Richelieu lui-même qui, fei-

u gnant de les croire plus utiles où elles

se trouvoient, avoit fait taire les ob-servations-des chefs.4H Le Roi fut étonné de ce. silence, et

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i 1’30 - moirasse * ï’craignant d’avoir: eh’minisi’par cette

question quelque erreur: grossière dans’l’art’m’ilitaire , «rougît légèrement, ’et

se rapprochant du groupe primesqui l’accompagnoient, leur dit-7minprendre contenance: ’ ’" ’- à Œ

---’ D’flngoulême , Beaufdrt’ , c’est

bien ennuyeux, n’est-il pas VTaÎP-Nous

restons la comme des incuries;- ’ tv lln Charles de Ïalois’s’approcha, et

n Il’me-lsembléq,I’Sfre;’ qüiè’d’ôn n’a

a "pas essuyé ’ic’rles menines dé’l’ingé-

’iiieur PompéezTargOHL’ i ’ ” ’ g

4 Parbleu, dit le» and de’JBean’fort

j en regardant fi’wrnçntlïièhe’lïéu , e’ebt

l que nous IlaimiOns- beaucoup Imiedx’ prendre’La Rochelle que Perpignan,

dans le temps: où’ vint cet. Italien. ’Iici ,

’ pas une’Lm-achine préparée , "pustule

"mine , un’pétard-sous ces-murailles, etle maréchal de La mamie mlëïdît’te

A matin qu’il avoit proposé’d’éirl’aii’é ap-

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LES amoureuses. l 51 ’procher pour ’ouvrir une tranchée. Ce

n’étoit ni le Castillct , ni ces six grands

bastions de l’enveloppe,ni la demiïlune

qu’il falloit attaquer. Si nous allons ce

train, le grand bras de pierre de la ci-tadelle nous montrera’le poing long-

temps encore.

VLe Cardinal, toujours immobile, nedit pas une seule parole, il fit seule:-ment. signe Ïà Fabert de s’approcher;

I celui-ci sortit du groupe qui lesuivoit,et rangea son cheval’derrièrecelui de.

Richelieu , près du capitaine de sesgardes...

Le duc de La Rochefoucauld , s’apr

prochant du Roi ,. prit la parole: r

- Je crois, Sire , que notre peu’d’action à ouvrir-la’brèche donne

l’insolence à ces gens-là, car voici une

sortie nombreuse qui se dirige juste-ment vers’Votre; Majesté ; les régimens

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r53 i CINQ-MARS.de’Biron et de Ponts se reploient en lai.

saut leurs feux. lt - Eh bien! dit leRoi, tirant sonépée, chargeons-les , et faisons rentrer

ces coquins chez eux ; lancez la cava-lerie avec moi , d’Angoulème. Où est-

elle, Cardinal?- Derrière cette colline, Sire , sont

en’colonne six régimcns de dragons et

les carabins de la Roque; vous voyezen bas mes gens-d’armes et mes cheVau-

légers dont je supplie Votre Majesté de

se servir , car ceux de sa garde sontégarés en avant par le marquis deICois-

lin , toujours trop zélé. Joseph, va lui

dire de revenir. ’Il parla bas au capucin qui l’avoit

accompagné affublé d’un habit militaire

qu’il portoit gauchement, et qui aussi-

tôt s’avança dans la plaine. Ig Cependant des colonnes serrées dela vieille infanterie espagnole sortoient

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LES RÉCOMPENSES. 155

de la porte Notre - Dame Comme uneforêt mouvante et sombre , tandis’que

par une autre porte une cavalerie pe-sante sortoit aussi et se rangeoit dansla plaine. L’armée française en bataille

au pied de la colline du Roi , sur desforts de gazon et derrière des redouteset des fascines, vit avec effroi les gens-d’armes’et les chevau - légers pressés

entre ces deux corps dix fois supérieurs

en nombre.-- Sonnez donc la charge! cria

Louis X111 , ou mon vieux Coislin est

perdu. .Et il descendit la colline avec toutesa suite aussi ardente que lui; mais,avant qu’il fût au bas et à la tête de ses

mousquetaires, les deux compagniesavoient pris leur parti; lancées avec larapidité de la foudre et au cri de pivele Roi! ellesfondirent sur la longuette-lonne de la cavalerie ennemie comme

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354 . CINQ-MAIS. .deux vautours sur les flancs d’unser-

peut, et, faisant une large et. sanglantetrouée , passèrent au, travers pour. aller

se rallier-derrière le bastion espagnolcomme nous l’avousvu , et laissèrent

. les cavaliers si jétomés,qu’ils ne’son-

gèrent qu’à. se reformerI et non à les

poursuivre. * iL’armée battit des ’mains; le Roi

étonné s’arrêta, il regarda autour de

lui, et vit dans tous les yeux le brûlantdésir de l’attaque; toute la v valeur de

carence étincela dans les siens ,1 il resta

encore une seconde comme en suspens,écoutant avecivresse le’brnit du canpn,

Mpirant et savourant l’odeurdç lapon-

nes; il semblait reprendre lune autrevie et redevenir’Bpurbonl; tous ceux

qui le. virent alors sep-rusentmais? tu; autmhome Jonque. été ’

misas épée et ses rentrants-1eme!éclatantpil s’écria: ’ . s ’ - I

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LES amoureuses. 155,.7-4 Suivezunoil braves amis! c’est ici

queje suis 1130i de France! l I l .. Sa. cavalerie , se déployant , i partit

avec. une [ardeur qui dévoroit l’espace , .

et, sollicitant des flots de, poussière du .sol qu’elle faisoit tremblér, fut dans un

instant mêlée à la cavalerie espagnole,

engloutie comme elle dans un nuageimmenseet. mobile. . .

«en; présent, c’est à" présent! s’é-

criade sa hauteur le Cardinal avec unevoix tonnante; qu’on arrache ces bat-

teries jà leur position inutile. Fabert, ,donnez vos. ordres ;- qu’elles sciaittoutes dirigées sur œtteaudaeiehstëær- .

tirs renversez cette’iofanterie qui va .lentement enveloppe? le: Roi. fleurez , g

velu. sauvez lestoit j , . .Aussitôtacmçssuite, ’mparawant me. i

ébranlablg;c9’agitq ou mésuse a les t

nérauxdonnent leurs ordres, lapidai,dswëmrpiæsnt et, fondent dans

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l 36 CINQ-nus.la plaine où, franchissant les fossés ,les barrières et les palissades; ils arri-vent a leur but presque aussi promp-tement une la pensée qui les dirige etque le regard qui les suit. Tout à coup Iles éclairs lents et interrompus quibrilloient sur les batteries découragées

deviennent une flamme immense etcontinuelle, ne laissant pas de place à ila fumée qui s’élève jusqu’au ,ciel en

formant un nombre infini de couronneslégères et flottantes; les volées du ca-

non qui sembloient de lointains et foi-bles échos, se changent en un tonnerre

formidable dont les coups sont aussi.rapides que ceux du tambour battantla charge; tandis que , de trois pointsopposés, les rayons larges et rouges ’

des bouches à feu descendent sur lessombres colonnes qui sortoient de laune assiégée. . I - « l

Cependant Richelieu , sans l changer

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LES méconnu-m5135. 137

de place , mais l’œil ardent et le geste

impératif, ne cessoit de multiplier lesordres en jetant sur ceux qui les rece-voient un regard qui leur faisoit entre,-voir un arrêt (le mort s’ils n’obéissoient

- pas aséez vite. i-- Le Bni.a culbuté cette cavalerie,

mais les fantassins résistent encore;nos batteries n’ont fait que tuer et n’ont

pas vaincu. Trois régimens (l’infanterie

en avant, sur-le-champ, Cession , La’Meillera ie et Lesdiguières! qu’on prenne

les colonnes par le flanc. Portez l’ordre

au reste de l’armée de ne plus attaquer,

et de rester sans mouvement sur toute* la ligne. Un papier, que j’écrive moi-

même à Schomberg. -Un page mit pied à terre et s’avança

tenant un crayon et du papier. Le mi-nistre , soutenu par quatre hommes de.sa Suite. descendit de cheval pénible-

mentet en jetant quelques cris invo-

s C.

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158 - cinq-Mans.lamaibes’que lui arrachoient ses dou-leurs, mais-il les domptaïet s’assit sur

l’affût d’unvoanon’, le pagelprésenta son

épaulecomme pupitre, en s’inclinant,et le cardinal écrivit à -la’hâte cet ordre

que les manuscrits contemporains nous Iont transmis, et que pourront imiterles diplomates de nos jours. qui sontplus jalOux’, à ce qu’il’semble, des?

tenir parfaitement en équilibre sur lalimite de deux opinions et de deux pen-sées, que de chercher ces combinaisons

qui tranchent les destinées du monde,trouvant le génie trop grossier et tropclair-pour prendre sa marche. l ’’ Quint; le’rnaré-chal, nebasiirdez rien ’

et méditez bien avant d’attaqueeruand

en vous mande que le Roi désire quevous ne hasardiez rien, ce n’est pas queSa Majesté vous défende absolument. de

combattre , mais son intention n’estpas que vous donniez un combat gêné?

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LES nicohrËNsns. 39’ral’, ce n’étoit avec unenotable espé-

rance de gain pour l’avantage qu’une

favorable situation vôus pourroit don-.bers, .la responsabilité ’COmbjat’ dé-

Jvant natureilementretombersurïvouséo

’ Tous Ces ordres donnés, le vieux mi-

’ nistre ," toujours assis ’ sur l’affût, ap-

puyant ses deux bras sur la lumière ducanon, et son menton si"? ses bras,dans l’attitude de l’homme qui ajuste èt

pointe une pièce ,(Ic’ontinua en silence

et en repos ’à regarder le combat du

Roi , comme. ’un vieux loup qui rasa-”’sié de victimes et engourdi par Page,

l contempleJ dans [aplanie le [ravage duNéon sur un troupeauîde-büeufs qu’il

s’ii’oseroit attaquer; de It’einiîs eh’temps

’ s’en ’œil’se ranime, liod’eur’du sangilhi

adonne’d’e la joie, et, pour nienz’pas

le gant; ii’pdsse une languett- .- «denté Sur sa démantelée; .t .

Ce jour-làï’illfut lrèmarquè par ses

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rio l cinq-nuas.serviteurs (c’était à peu près tous ceux

havi rapprochoient) que, depuis sonp lever jusqu’à la nuit , il ne prit aucune

nourriture, et tendit tellement toutel’application de son âme sur événe-

mens nécessaires à conduire , qu’il

triompha-des douleurs de son corps ,et sembla les avoir détruites à force. de

les oublier. C’était cette puissance d’at-

Jtention ;et cette, présence continuelle.. de l’esprit qui le haussoient presquejusqu’au génie. Il l’aurait atteint s’il ne

lui eût manqué ’élévation native de.

’âme et la sensibilité généreuse du cœur.

Touts’aqcompiit sur le shamp. de ba-

; taille. comme il l’avoit voulu , [et sa for-

tune du Minet le suivit près du canon.à Louis XIII prit d’une main avide la vic-

I toire ,que lui faisoit son ministre ,. et y"ajouta seulement cette, part de, gran-

deurvque- labravouré d’un homme ap-

r. page dans; un triomphes ’

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Les, RÉCOMPENSES. 141

cananavoit cessé de frapper lors-que-les colonnes de l’infanterie furent A

rejetées brisées dans Perpignan ; lereste avoit eu le même sort , et l’on ne

I vit plus dans la plaine que les escadrons.e’tincelansdu Roi qui le suivoient en se

reformant.: .Il r revenoit au. pas et contemploitavec satisfaction le champ de bataille

gantièrement nettoyé d’ennemis ;.il passa à

fièrement sous le feu même des pièces

espagnoles qui, soit par maladresse ,sait par une secrète convention avec le

grainier ministre , soit par pudeur detuer un Roi de France, ne lui envoyè-

. reut que quelques boulets qui, passantà dix pieds. sur sa tête, vinrent expirerdevant les lignes du camp ct ajouter àsa juste réputation de bravoure.

Cependant à chaque pas qu’ilfaisoit

une! lavblltte où l’attendait Richelieu ,

Lâalpbgsianomie changeoit d’aspect I et

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1452 ’ cuva-mans;se décomposoit visiblement; ilïperdoit

cette rougeur du combat ,et la ’nob’le

sués; du. triomphe tarissoit "sur son’froht.*Amesure qu’il s’approcho’rt, sa

pâleur accoutumée s’emparoit de sés

traitslcomme ayant droit de siéger seule

sur une tête royale ; son regard perdoitses flammes passagères, et enfin, lors-qu’il l’eût j oint, une mélancolie profande

"avoit. entièrement glacé son visage. Ilretrouva le Cardinal comme-iiïl’av’oit

laissé ; remonté achevai , celui-ci , itou-jours froidement respectueux; s’imlina,

et ,- après quelques m’ots de compli-mens, se plaça près de EouisÂpoufisui-

vre les lignes et voir les résultats Beth rjournée”, tandis que les princes en lesgrands .. seigneurs, marchant déviait etderrière à quelque distance; farindentnuageautmirîd’érrz 1 VA

’L’habile ministreeut soin-de idem rien

dire a; de) nefaire ânons gestè-çkpût

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LES RÉCOMPENSES. 143

donner leisoupgon qu’il eût la moindre

part aux événemens de la- journée,

et il fin remarquable que de tous ceuxqui rendre compte, il n’y eneut pas un. qui n’e semblât deviner sapensée et ne sût éviter de compromettre

sa puissance occulte par une obéis-sauce démonstrative. Tout fut rapporté

au Roi; Le Cardinal traversa donc, àcôté de ce prince ’, la droite du camp

qu’il n’avait pas eue sans les yeux de la

hauteur où il s’était placé, et vit avec

Satisfaction que Schomberg , qui le con-naissoit bien , avoit agi précisémentComme le-maitre avoit écrit , ne cam-prpmettanthue quelques troupes légè-V

res et combattant assez pour’ne’pasencaurir de reproches d’inaction , et pas

assez pour obtenir un résultat quel-gconque. Cette conduite charma le mi-frisquet név’d’éplut point au Rai dont

l’amour-propre caressoitl’idée d’avoir

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144 CINQ-MARS.vaincu seul dans la journée. Il voulutmême se persuader et faire croire quetous les efforts de Schomberg avoientété infructueux, et lui dit qu’il ne lui

en vauloit pas , qu’il venoit d’éprouver

par lui-même qu’il avoit en face desennemis moins méprisables qu’on ne l’a-

vait cru d’abord.

--- Pour vus prouver que vous n’a-vez fait que gagnera nos yeux, ajouta-t-il, nous vous nommons chevalier (lenos ordres, et nous vous donnons lesgrandes et petites entrées près de notre

personne. .LejCardinal lui serra la main affec-v

tueusement en passant , et le max échal.étonné de ce déluge de faveurs , suivit:

leprince la tête baissée comme un cou-pable , ayant besoin pour s’en consoler ,I

de se rappeler toutes les actions d’é-clat qu’il avoit faites durant sa carrière.

etqui étoient demeurées dans l’oubli ,À

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ms fiscaliseras. "145Sigma:affri’biîtilntdiiéhtaléiilént”’ces ré-

«ïcoàapeiise’s est. itérais; puasse sans-

ï unes-nage assagissait ’J1 une étoit prétl à” rè’veiiir’sun’ses

pas, quand le and de’Beaufoi-t,’le ne:inventerait étatisé, s’écria il "jë a : a mais ,”Sire,’ "ai-lié encarta: en” en

tains ses sans; saïgas ’dèvénu foud’un coup agréoieirï’iunè semble (me

t’ je l 1mn sur ne bastion antidatais en’ habits rouges ’qui ressemblent furieuse-

t ment à ’vOs chevau-légers que nous’avons crus morts. ï. p "’ i ’ ï . ’ l

’ ’L’Le Cardinal’franéa le sourcil. I

- l- C’est impossible, Monsieur, dit--il , l’imprudence de M. de’Coislin a perdu

i les gens-d’armes de Sa Majesté et eux;

- c’est pourquoi j’osais dire au Rai tout à

"l’heure ’que .si l’on supprimoitces corps

inutiles, il poiJ’rroit’len ’ résulter de

i’gmnds avantages ,p militairement-par-

dans! -» t * ’ Il

le 7

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:46 .2ça a ’Y’lll’eiamœmæe«madames, septale fisc sweaters

mais je ne mesçameetaoiaesteaxairiJantes: hait. à. ses; QPËJPQPSSQPË de-

..Yantissx marmonnan- r. :.- sans! allant). dans même

«sont ’41.i..t,1.eaP»qi engueulant: ; si

zinguaisveiiaoa aises.Qsislisaz.i’en

aérerai. sacrikfislhltsuwn. *, . fientasses descendes Précaution.qque. les chevauxdu Roi et de . sa suite,lpassèrent àtravers le ’marais let les dé-

bris, mais avec un grand étonnementqu’on aperçut en haut) les deux compa-

gades rouges en bataille. comme en unHjour de parade. r

-:-Vive Dieu! cria Louis X111; je croisqu’il :n’en manque pas un. Eh bien!

. marquis ,- vous tenez parole , vous pre-nez des murailles acheval. l A

, - Jecroisflue ce point-a été malchoisi, dit Richelieu d’un air de dé-

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LESïtIÉWSES» ” 147

MM "n’ïnuwe" martin: h (Pris? de

Perpignan]; fila amariner du mandat.... (Ma. foi, iveusîïavez mon i, du le

.aloi.(adressant5p0mj’lapremièreIfOisàla

parole au Cardinal avec un air mainsdise, depuis l’entrevue suivit lar nantielle’de le? martèle la reine ,

grette le sang qu’il a fallu verser ici. x;-

v : a; Il; n’y- a eu , Sire, que deux de nos

jeunes gens blessés à cette attaque , ditle ’vieuzx Coislin, et nous y-avonsgagné

de nouveaux compagnons d’armes dans

les volontaires qui nous ont guidés.l ---’è lQui’sont-ils Edit-vle’ prince.

VA’TrOÎS’d’entne eux se sont retirés

modestement,8ire; mais le pinsljeuneque vans voyez’étaitlle premier à l’as-

saut , et m’en a damé l’idée. Les deux’

rcampagnes réclament l’honneur de leprésenter à’Votr’e’e’Majesté.’ .

Cinq-Mars ,1 à cheval derrière le vieuxV capitaine, ôtaison’chapeau,-et découvrit

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5143 v CINQ-fins."h jeûne a Pflkfiguœ a 88 grands yeuxnoirs et ses longs- cheveux. bruns. . ri

R -*-- Voilà des traits qui me rappellent; quelqu’un, dit le Rai; qu’en ditesevous,

Cardinal? a H’ » j ’ U1..i ,Celui-ci avoit déjà fiancé un coup

filent pénétrant sur le nouveau vfiçnu, *

et dit : l:7 u-Je me trompe fort, ou ce jeune

homme est ..... ’ I v--- Henri d’Effiat, .dit à haute voix

ile volontaire en s’inclinant.

..-- Comment donc! Sire, c’est lui-même que j’avais annoncé à Votre Ma-

. jesté’, et qui devoit lui être présenté de

ma’main; ’le second fils du maréchal.

-’- Ah! dit Louis XIII avec vivacité ,

, j’aime à le voir présentépar ce bastion.

r . Il y a bonnegrâce ,monenfant, à l’être

ainsi quand scalper-tesla nom de notrel vieil ami. ,Vous ,alleZLnous suivre au, camp, air-nous avons beaucoup à

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LES micanrensrs. 149roui dire. ’Mais que voi’suje ?vous ici,

monsieurde Thou? qui êtes-vous venu-

jugér? r * " v? A - A»- Je crois, Sire, (répandit Coislin,

qu’il a plutôt condamnéàmort quelques

Espagnols, car il est entré le second

dans la place. ’ , I-Je n’ai frappé personne, ’m-oné

sieur , interrompit de Thou en rougis-Ïsant’;’ce n’est point monmétier, et

l’évite partout; ici je n’ai aucun mérite,

j’accompagn’ois M; de CinqêMars, mon

ami. ’ i I a . ’--« Nous aimons votre modestie au;

tant que cette bravoure, et nous n’ou-blierons pas ce trait. Cardinal, n’y a-t-il

pas quelque présidence vacante?

illichelieu n’aimait pas de Thou, etcomme ses haines avoienttaujaurs unesaune mystérieuse , on en cherchoitlaî

cause vainement; "elle: Se dévoila parunmot cruel qui lui échappa. Ce motif:

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15!) uranium. .. . zd’lnlmltié gamme plasmine ses, au»

foires adul- président. dei.- Thauy père,

de celui-ci, où flétrit aux yequ delàpostérité ungraud-oncle du Cardinal,moine d’abord, puis apostat et souillé

de tous les vices humaines . ’Richelieu , se penchant a l’oreille-de,

Joseph , -.lni . dit: ’Tu. vois bien cetheaume, dessinai dont impers; amis.mon nom dans son ibistoiæet;.eh bien!jamettrair le. sien dans la mienueçEn. clin;fait il l’inmivit plus tardIaYec du sang-l

En ce moment, pour éviter de répara-p;

drei au-Rdi, il feignit de n’avoir. passu-

tendu sa question et .d’appuyensun lev.mérite de Cinq-Mars? et le désir qu’il

avoit de lavoir plaoéëà la.eour. -l q--,-Jeî vous rai promis d’avance de le

faire capifitainmdans,mesgardesi,.ditleIntime; faites-le nommer des demain. Je.

vous le connexitreidavantnge et je lui:résernevmieun que celapar. la suite: s’ils

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L125 nicoihnusts. 159nié iplàitfhlïètifonstrioùs ;’ lésant est!

céùdi’égkt nbÏiisSŒnnies l’oili’Jdë-no’tâëi

armée. Dites à mes deux bonnes conf»?pàgnîesi &e’ïioiîssifivrë." in; 173:) *”

T’tizeaminâsùë’;:afieés asianit’tùàw

cet ordre , donfiïP’ëut’isôinQië’flippiiï”

mer l’éloge, se mit à la droite du Roi ,

et toute l’escorte quitta le bastion con-

fié à la garde des Suisses pour retour-

ner au camp. .Les deux compagnies rouges défilè-

rent lentement’parifl’a trouée qu’elles

avoient faite avec tantvde promptitude;leur contenance étoit grave et silen-

cieuse. -Cinq-Mars s’approcha de son ami.

- VoiCi des héros bien mal récom-

pensés , lui. dit-il ; pas une faveur, pasune question flatteuse l

- En revanche , répondit le simpleI de Thou , moi qui vins ici un peu mal-

gré moi , je reçois des complimens.

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153 s .LCINQ-rlênsh z A .vomies cours et havie; maîsile’wirai 1

juge est cubant; quesl’on danaïde"

P452. I» ’ Il, i’ v .1? I .l - .’ "1:- Cela [f6 nous. empêchera pas: de;

nous faire. marrdçmaüu’ü-le fane dit

lejreflne Oliviercen, rjqàthn h r prix a» .5- f)

. .. u ni, nylon.) l..lLÏ’.u’1u..’...- ... q

m ’ :lUlJCL. [:2 un; i un r L z n

J, 1 s-1.’x1 y ri; Je yI

’ -. Le, .ugnvp 0:) 1mm: i, six; i: 14.3];rl-Ç-u r’ imam 11”». EU

I .H HUE w W: W)!» Mill? ,"inîinf. .ll g." 78.

"mm". "* II’ "J. ’.:Ï’: Gumufl’v”) anal

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a 1-. V I:nantir-9.5:. 4H’!"’i’l;. i ili’ ;’. ’ 2 . 7 1.: h :l il 1) Il. J!)

J cnnprœnniwxn- w ’ w-t.;’ niî .’ ne influx) 1 -. m

fi LliÎ- 7’ a à. -j ï I -, j’ .iltes méprises. pIl, 5 I. lil

f, . i f , V7î Quand vint le tout (le SaintrGujlin .t ’ Iltjeta troîl’déa’ surla’table, i H

hi mimi LEnsqiteiliwgîxdqleliiablé; W: ilç’un.nirgt5ès:malin : A la

Il. Jouons duc cette vieille fa" me! Vau a" W si idûi’iie’îiâés’iléâiàùïa mimer

.21 il ’ fi ï "1L Jument. flattât.”

1; 7 à: ’io-er

2min! i’ I. w , , ’j

alan-q - ”..a ; Berrweâtre. devant le Roi ,.-Cînq:tillais mît- âté’iforCé de trimmerl le de;

de;1’ue:aleë.chmp-légers blessés

légers 233Y311ÉIP91’d." le raiera auPied, du rempart Pendant. l’espace .dç

sensass? me glissâmes la spath-des

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15.6 CINQ-nus. ïlui-mémé: relevoit M. le marqliis,penh,

dam la grande culbute. - 1 .- --’-’.Comment l tu es venu là , vieux;

fou? dit Cinq-Mars : ce n’est pas tonmétier ; je t’ai dit de rester au camp.

J -J- Oh l quanta ce qui est de resterau camp, c’est différent , je ne sais pas

rester la, et quand il se tire Un coupde mousquet, je serois malade si jen’entvoyois- pas la lumière. Pour mon

métier , c’est bien le mien d’avoir soin:

depuis: chevaux , et vous êtes dessus ,Monsieur. Croyezsvous que, si je l’avaispu ,’je n’aurois pas Sauvé Ales-jours de

cette; pauvre petite bête noire qui estlin-bas dans le fossé? Ah! comme je,tannois l: v Monsieur; ,, . un cheval qui a.

gagné trois prix (le course danssawiel-QuandÏj’y pense; (cette vis a. érétheaw

oOUp trop courte, pour peux qui sa-,-voient l’aimer: comme moi. Il [ne se.hissoit, donner l’avoine que par. son,

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j LES minimisas. 1571(Iran(litr’lianllp , et il me’caressoit avec

sa tête i; dans ce moment-là; et lapreuve,’c’est le’bout (le l’oreille gauche

qu’il m’a emporté un .jour , ce pauvre

ami! mais ce n’étOit pas qu’il voulût

faire du mal, au centrant-i Il fanoitVoir! ’C’Olïl’mèil il. HenniSS’oît de "colère

[quand’ un autre Fapp’rochoit ; il a cassé

laîjambe à Jean à cause: de cela,ï-ce bon

animal, je l’aimois’tantl Aussi quand

.il estatombé , ’Ïje le soutenois d’une

-ihain , et je soutenois M. de Locmaria«le l’autre. ÎJ’ai bien cru-d’abord que

f luiet ce Mensieur alloient se relever ,’ mais malheureusement il n’y en a qu’un

r quirsoit revenu en vie, et c’étoit celui

1 quevje cennoissois le moins. Vous avezl’air de rire de ce que je dis sun votre

(cheval , Monsieur , mais vous oubliez:.qu’en temps delguerrele cheval; estla l’âmedu’: cavalier , oui, Monsieur,.san

”âme;.car, qui est-ce r qui épouvante

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453 ÇINQ-MABS..«l’infanterie Psc’est le cheval l :Ce. n’est

certainement, pas l’homme qui , une.foislancé,, .n’y fait guère plus qu’une

botte de foin; qui est-ce qui faitbiendes actions qu’emadmire? c’est encore

,le i cheval! Et Quelquefois son 7 maître

voudroit être. bien lpim qu’il,se,trœ.weSmalgré Illî.’ I-vçictorieax et (mécomPeçnsé ,

«midis, que le pauvre; animal n’y gagne

ïque Edes-vcoupsriQuiÆst-ch qui gagne

des paris à la course? c’est le cheval,equi ne.sou’pe guère mieuxllqu’àl’ordi-

onyir’e,tàn’ilis:-que150n maître met l’or

a, dans sa poche et est envié de ses amisIefcomidéré detous les seigneurs comme

îas’il avoit couru lui-même.--Qui eSt-ce

qui chasme le chevreuil et qui n’en met

pas un-paùvre petit meneau sous sav «lent? C’est encores le chèVal! tandis

vqu’àl’arrive- quelquefois qu’on le mange

ulubmêriæe, ce pauvre animal; et dansaune;campagne avec M. le maréchal, il

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LES; ÆÉÜIâEs° "F59m’est arrivé"... Mais qu’aygzbvons donc,

l-Monsieur le marquis? Vous, ’ issez....

Serre-moi la jambe avec quelquechose ,Àun. mouchoir , .uneycourroie, oucague tu madras w en j’y sensass dos-

leùr brûlante. si? mais ce; quartât-Ï,i;:,î-;-’1thrsbdstfi,est, QPBPéewMPÛSÊÊnT’

1:çÏLËÊPPWÏÔÎËsbiçillêtïîelillwlqllfi balle .

..;ËPëiâ;,’9; Blflmârâfi; amide. Marmite. 7- z,

1:; ï cependant bien. mali! ;L. g-mAh! mai aime bien, mais: bien,trMoxnsieuïrsnahriz-le plomb! ;Î1,VM’VÎÀUÈ

.,pasidire,de mal dugplomb; quittastvee

,quizgnign, z. gr ,; î, , ....r ;Tout ’en sîoccupant de lier la jambe

I deCinq-Mars tau-dessous du genou , lebonhommealloit commencer. l’apologieqdu , plomb, , aussi sottement guîitravoit

fait celle du cheval , qnandIil fut forcé,-ainsi que-Alan: maître, de poéterql’o-

rreille. à une dispute vive etvbruyanteventre pknsieturs soldats suisses artistes

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Lido 5 ’ciit’c’zilifafiiif

’très-prês d’eui: après leldép’art’lde toutes

les troupes; se parloient en gesticu-lant beauc0up , «sembloient s’occu-Tper de deux hommes que l’on voyoitau milieu "de trente soldats environl’

D’Efliat ,’ tendant toujours son piedlarsen domestique èt’appuyé surllîselle

. dëbs’on’c’heval J chercha, catatonie;

attentiv’eiriéhfièa’ ébhipréddàëlêurs fiâ-

roles; mais il ignoroit absolument l’al-t lemand, et ne’put rien ’devi’ntéz” (le leur

amplerelléï; Granduhainf» ’tënoît’toujours

’ salienne, et’écoutofit aussi très-sérieu-

sement, et tout à coup se mit attire«le tout son coeur ,’5ë’tënantîles côtés,

ce qu’on ne lui avoit jamais vu faireàï’

én’;Ah! abri ahi! "Monsieur ,I voilà

,- deuxi sergents qui se disputent POING!!-

(voir bantou doit, pendre des deux- Espagnols qui sont. la :Hcarl’vbs carnea-

nrades rengaine seisoilt "pas donné la.peiner de le dire; runes ces Suisses

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LES menuisas. 161prétend que c’est7l’officier, l’autre as-

sure que c’est le seldat, et voilà un.troisième qui vient de les mettre d’ac-

cord. v ft ça- Et qu’a-vil dit?

ï -ll a Iditï de les pendre tous lesdeux.

I-Doucement, doucement, s’écria

Cinq-Mars en faisant des efforts, pourmarcher; mais il ne put s’appuyer Isur’

sa jambe. ’- Mets-moi à cheval, Grandchamlpiti

- Monsieur, vous n’y. pensez pas ,-

votre blessure... r IFais ce que je te dis, et montes-y

toi-même ensuite. , " - . 4 - ,Le vieux domestique , tout en gron- 7

dam, obéit et courut, d’après. un autre -

ordre? très absolu , arrêter les Suisses ,idéjà dans la plaine , prêts à suspendreai

leurs prisonniers àun’t arbre, ou plutôt ;

a. ’ 7.

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163». auge-mais: æales laisser; s’y, attacher; car lîoffioien, .

, avec le sang-froid de son énergique na.-

tion ,, avoit passé wifi-même. autour de:son cou le noeud coulant d’une corde ,.

et montoit, sans en être paie ,fà.unepetite échelle. appliquéerà l’arbregipour

y nouer l’autre bout. Le soldat, avec le,

mêmecalme insouciant, regardoit lessuisses. sedisputer autour de lui, et,tenoit l’éclielb. , V (V l A . . I i

Cinq-Mars arriva à temps pourjles.sauver,,,se nomma au bas - officiersuisse, et’pren’ant Grandchamp pour

interprète, ’ilit ique ces deux prison-niers étoient à lui, et qu’il alloit lesfaire’conduirelà sa tente, qu’il étoit

capitaine aux gardes, et s’en rendoitresponsableaL’ALlemand AbujOurs alis-cipliné,.n’osa répliquen; lb n’y’eutîde;

résistance que de la. partîduïprisoh.nier,. E9ffici’erg,.enqoneéeïq hmm de l’é-ï

chelle’ ,1 se retdurna -; et parlant » de! là»’

’s

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armures.am ia’üileiiêhiii’rèifdit’àç’êi: tanisa

gaïagüfiiuaëxiclilymfi un impur, u amati

Il -- Je. voudrois bien saiidirlce’ ’u’e’iu’

ses; me mettrai-aï: 11113:5 aime àviivlr’èpmlrh u il (me and! .éo’llfla il

4 Jenéa’emùeaae page; «nous:marris ,’.pei1 m’i niporte "ce l’ ’"v’ou’s’ ’de’J

viendrez: apré’s’ à je venir dansç’YreÎ une!

emmieller ana-am illui’*trté’lpfibît

iiij’ustè aussi?Taezwaùëaèssueeïëi

çiôlil-slvaülêizvl’l (:7 Jan ".1 .111 J du a

.. cette au J7 reprit Muguetfarouche ’, trimé pas; ,Ttoi.’ j’ai tu; d’

bordique’tu’ven’ois faiire’lé .

peut me ’fdrcer d’être; ’reconnoiSSant’,.

’56 (page ’aéteèfe; sa bienll’jé consens

à descendre; mais je te haïraiilantant’qu’à’và’ t ë’jiarce qué La: ’ès’iFranço’is’, je

remiserais: ei’j’e embrumaientpas ., ’ 41m tannique flaquera si.targuait siestantmêmè’qùrra en;pétasse bien ’a’etre’taexpa’r ce jeune

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.3soldai, (lambinerieseiwe’stilïajamais manqué un isard dans, les mon;

gagne? deiLéonî. ’. f- ifi-1’ ;;; ” »-

A, -,Soit,, dit : Cinqeltlars ;; descendez,Il entroit dans son’fcaractère ’

majeurs; au??? Mauves tel qu’ils. semontroient , dans . leurs relations avecluger cette rudesse le’rendit dé

* f.-Y9Îlà: fiergaillârd 2-,M9nsisas

dit Grandchàmr a? au": abîmerai:ruement M. le maréchal l’aurpit’Jailsse’

sur son échelle. Allons , Iguis,ïlïfljepne,Germain ,vene’zfl garder les, prisonniersdation-ms: et .163. céndlæîreævrilàrw

jolie aveüsitiwewrese faire? la! à?cela vous porte "bonbwzj’av me Mât?

étonner. .3 Il; un je.a a scuffraPtPR-qeglflltmëtveulentdesenrheval» semât, en???du: me. hautement»!!! me? se;assumâmes! à. rifla fleurit. si?teint la mienne dmmmsriemisïâ-

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i tanisasse 2165l lpignloient à .7 la suite) du lRoi ,l et son;

geoit in ge-Iqiiece, ppince pouvoit luivouloir dire. Un rayon d’espoir lui

A voir l’image de Marie delMantoue dans

lzélqigneinènt ,p V et il lent un. instant de

carme. dans les pensées, page!!!(avenir étoit dans ce seul rapt [aplatie auFM! se .mit.è.réflëçhîr à, fient. ce qu’il

ad’amer.’ A: 1p .

.1. ,.: LEU: ,3 -Â.n:. ïIl En ce momient Iilajjlit.arr’ver,I,s;ou,anlii

. l - I .- !I 0 a ’ q Q y aLe T11°F9°b muet des? quad-eau;sestéaezlvarrière a «le flemmardasse

fallu.plaine , et accouroit pour le secourir

. Il a? en? gramme la inuit si»:proche; vous vousêtes arrêté bien long-

temps ,.j’ai craint pour vous. (Qui. ame-

-p y , l V l j 4 si. ’1nez - vous donc PWPOurqupi, vppsétes;vous arrêté? Le roi vaguons demander

bientôt ’,, ,, v ’ .. z ïlqI j Telles étoientJ les gri;esti9ns,rapiçleç

àmeunç museliez (anilimulfêwè?

j IH*f” v

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au; ramdams-Iavoit? faitî ’ s’értii’. de ’son’ câlriiè’ ’actitifil

ce que n’avoir puri’ai’r’ë lë coni-

batun î» ., au m l. l.w:il)’1ÏÜ»1(.*-.I

.l.f.. 7., r,;..: "fr; warï-vhrfil’""’;-Il’ét015 urf eu’bl’essé’ ’aniène un

. 7] . . ,.un Il!l’prisonniërâ’ët je’sdnèeoîs’ au fiât. ne

salienne voulsiïrmôh àiiai”?duë’fàiiÊ-

ill’ fairé’ls’il’ veut’m’apprôcher

irritaient plaire! litât-tamisé, vos ne-vouerai-je, je suis tenté de fuirÏ’e’t fies;

pèi-e qùéjel massifiamomentumde manierai; meuvetijàë bémol:est bouif-liant Fobéir né régi ’ assenait.

Un soldat s’expose a’riio’iirir, et toril Bibi

dit: Mais que de souplesse”, dé’biiCri’Ï-

floes ’dë’éon caràciéré,’ ’q’ù’è de cbmpo-

and un -- .1:in 3s m7". envmuons avec sa commence , que de déi-"grada’ti’oiis’ de si pensée i dansc laZ été.

’tiuée’d’i’fn’ êàiïëiîs’idïxfift Thbiil

bomber dansa tr feulasse fias si:pour la cour, je le sens, quoiqiiïâ’jfe ne

est; tu; assagirais stagneasteeeiitvrge aniseras assa-Mais

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O

usinerons. r63l’éducation n’a poli qu’âlaslirfficef’De’

loin, je me suis cru ’propre’a vivre dans;

ce monde noirtàpüïs’santg je l’ai’rnémei

S’Ouhait’é ,’ guidé par un. projet bien

chéri de Îmon cœur; mais» recule airpremier pas; la vue au Cardinal’m’â fait

le souvenirllu ’dernier ’deise’s’

crim’esauquel j’ass’iâtois m’a empêché.

de lui parler; il me fait horreur; je nele pourrai jamaisrLa faveur du Roi a’aussi je ne sais qu’oiiqui’ m’épouvante,

comme: si nielle devoit .m’étré fu-

neste.;-’ ”I -Je suis’beureux de vous voir cet

effroi»: :I il vousisera salutaire peut-être;

reprit! de Thou en cheminant. 1Vous!allez entier en contacta en commerce)avec-lia puissance, vous ne lamentiezpas , vous allez la toucher; vousïverrezï

- ce: qu’elle est ’, îlet«p’ar quelle mairla

fo’udœïest. portée. n Hélas! fasse lel ciel?

qu’elle ne vous brûle pas! .1Vousuassiv1

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n33 ,exemnsu îtuez. muette À ses conseilaa.où’ serègle la destinée, nations; vous ver-Vrez,- vous ferez maître ces caprices d’où

sortent les guerres .sajnglantes, lescon-.quêtesetles traités 5-vous tiendrezvotre main la goutte d’eau qui enfante,les torrens. c’est d’en haut que l’on ap-Ï

précie bien les choses humaines , mon’ami;’il faut avoir passé sur les points,

élevés pour connoître la petitesse de

celles que nous-voyons grandes. i-À- Eh! si j’en étois la, j’ygagnerois

du moins cette leçon dont vous parlez,mon ami; mais ce Cardinal, cet hommeauquel, il me faut avoir une obligation,cet homme que je cannois trop par soncœuvre, que serait-il pour moi?4-Un amiaun protecteur sans doute,-.

répondit dei’l’hou; -’ Ç s .. , V.

A -Plutôt’ lamait; mille fois que sonamitié! j’ai ’tout’son être, et jusqu’à

son-nom même, en haine;-il verse’le

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LES MÉPRISBS. :69sang des hommes avec la croix du Ré-

dempteur. Â i’-Quelles horreurs dites-vous, moncher l vous vous perdrez, si vous mon-trez au Roi ces sent-imens pour le Cari

dinal.’ * ’ l.x -- N’importe; au milieu de ces sen-ï

tiers tortueux, j’en veux prendre’nnl

nouveau , la ligne «droites Ma»entière, la pensée de l’homme juste’

se dévoilera aux regards du Roi ixième,

s’il l’interroge, dût -- elle me *cdûter

la tête. Je l’ai v’u enfin’ce Roi, que

l’on m’avoit peint si foible; je l’aiîvu,

et son aspect m’a touché le coeur mal-i

gré moi; certes, il est bien malheu-reux , mais il ne peut être cruel; il en»tendroit la vérité... ’ ’

- Oui, mais il n’oseroit la faire itriom» I

pher, répondit le sage de Thou. Garan-

tissez-vous de cettelchaleur du cœur;qui vous entraîne souvent par des mou-

s. I

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r70 miro-mas.menisfibits et bien dangereux. N’at-

. taquez pasun colosse tel que Richelieusans l’avoir meSuré. - a .V.,.-«,Vo.us voilà comme mon gouver-

neur, FabbéQuillet; mon cher etpru-dent ami, vous ne me connaissez ni d’un

nizl’autre,;vousf ne savez: pas. combien

je.suis,l,ss,de moirmét’pe , et jusqu’où,

m regards. lime l’ammoniacQllalïlolllill’rîml’Î i » i l ,. v i

! déjà? ambitieux l s’écria deThou aveci rune, extrême surprise.nfiqngpiginclimslaitête Sur ses mains,

enàbaqdonpaat les rênes de son che-v4,.et.aia4iép9ndit pas. : - Î ’nmflQupiïlqîeettewégoiste passion de

l’âge çmjir siestemparée de Vous, à vingt

ans , Henri l L’ambition est. la y plus

triste ides-espérances; . 1’ .1 --nain .cmnidæn elles me poâaèdesà-

présentatputaatler. 5. je. Devis. «que par ’

61.18... . tout mon, minet; pénétré;

5’. .2

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membrues. P11,x.:;.--Aur. maganais, je ne voua ire-ï

connaisipiuslique vous étièzidifféreut-

autrefois! Je ne vous le cache pas ,-vousame semblezbien déchu; dans «ces

promenades de notre enfancefoù la vieet surtout la mort- de Socrate faisoientcouler de nos yeux des larmes d’admiJration etd’envie, lorsque, nous élevant

jusqu’à l’idéal de la plus haute vertu ,

nous désirions pour nous dans l’avenir

ces malheurs illustres, ces infortunessublimes qui font les grands hommes;quand nous composions pour nous des,

occasions imaginaires de sacrifices etde dévouement; si la voix d’un homme

eût prononcé entre nous deux, tout à

coup, le mot seul d’ambition, nous ana

rions cru toucher un serpent...De ’I’hou parloit avec la chaleur de

l’enthousiasme et du reproche. Cinq-

Mars continuoit à marcher sans rienrépondre, et la tète dans ses mains;

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la: (nm-auna.api-651111 instant de silence, Mes enet laissa voir des yeux pleinsdeLgénég.

ganses larmes; il serra fortement la;naïade son ami, et lui dit avec un-ac-,ont pénétrant :.

- -Monsieur de Thou , vans m’avez,rappelé les plus belles pensées (1eme.

première jeunesse; croyez que je nesuis pas déchu, mais un secreLespoirme dévore que je ne puis Confier à vous-

même; je méprise autant que vous l’am-

bition qui paroîtra me posséder , laterre entière le croira , mais que m’im-.

porte la terre! Pour vous, ;noble ami ,j

promettez: moi que vous ne cesserezpas de m’estimer, quelque chose que

vous me voyiez faire. Je jure par ce.Ciel que mes pensées sont pures comme

lui. I ’ A A- Eh bien! dit de Thou , je jure par.lui que je vous en crois aveuglément; -vous me rendez la vie!

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’ LES IÉPRISES. 173

v. Ils se serroient encore la main aveczeffusion de cœur, lbrsqu’ils s’aperçument

qu’ils étoient arrivés presque devant la

"sente du Roi.in. 1.Le jour étoit entièrement tombé,

mais onlauroit pu croire qu’un jou-plus doux 5e levoit, car la lune sortoitde la mer dans toute sa splendeur; le.ciel transparent du midi ne se chargeoit .d’aucun. nuage, et sembloit un. voile

d’un bleu pâle semé de paillettes argen-

tées; l’air encore enflammé n’étoit agité

que par le rare passage de quelquesbrises de la Méditerranée, et tous lesbruits, avoient cessé sur la terre. L’ar-

mée fatiguée reposoit sous les tentes

dont les feux marquoient la ligne , etla ville aSsiégée sembloit accablée du

même sommeil; on ne voyoit sur sesremparts que le bout des armes dessentinelles qui brilloient aux clartés de

la lune, ou le feu errant des rondes de

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r74 CINQ-MARS.nuit; on n’entendoitqu’e quelques cris

sombres et prolongésde ses gaudes quiVs’avertiSsoient de ne; pas dormiranî 4x

C’étoit seulement autoursâlulioiqule

tout veilloit, mais à annelasses grandedistance de lui. Ce prinœiawoitfaieéloi-

Jgner toute sa ,suiteç, il; se promenaitseul devant sa hante, etzslarrêtant quel°quefoisi à n contempler? la bonifié du M,

«paroissoit l plOngé dans I une mélancoli-

-que méditation. Personne n’othÆinp

terrompre, et ce qui restoit de «.885-aneurs dans le quartier royal sïétoitap-.proché du Cardinal qui , à vingt pas du

Roi, étoit assis sur un petit tertre degazon façonné en banc: parles? soldats;

la, il essuyoit. son front pâle;- fatigué«des soucis du jour et du. pOids: inaCcou-

tumé d’une armure, il? congédioit par

quelques-mots précipités, maisïtoujours

attentifs et polis, ceux qui venoient le’Salucr en se retirant ;" il n’avait déjà

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LES minarets. 1176plus" près de lui? qneÉJosephgzquizcaub

soit» aveohauhardemont. Le 011*325aniregardoit duncôtéidu Roi, si endeuilla

4mn, ce? prince ne? lui parleroitcpas,lorsque le bruit des chevauxxde Ging-

«Mats sa fit zentendreoslies gardes du Can-

dinal le questionnèrent et le laisseraits’avancer sanstsuiteayet’ swle’r’nentiaxvdl:

de Thou; g. ,.I:" , ’- .; L--- vouslêtes arrivéitroP tard, jeune

4 homme; pour parler au Roi, ’dit’d’une.

voix aigre iles Cardinal-Duc; ’on ne fait

pas attendre Sa Majesté. I i A 2Les deux amis alloient se retirer- lors-

liquela voix. même de Louis XIII se fit

entendre. Ce prince étoit en ce mo-ment dans une de. ces fausses positionsqui firent le malheur de sa vie entière.Irrité profondément contre Vso’n- mi-

nistre ,imais; ne nsedissimulantapas qu’illui devoit le succès de; la Ijo’nrnéen ayant

d’ailleurs besoin de? lui. annoncer Bon

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Ü”? ’

T176 anodins.intention de quitter l’armée et de sus-

pendre le siège de Perpignan, il étoitcombattu entre le désir de lui parler etla crainte de foiblir dans son mécon-tentement; de son côté le ministre n’o-

sait adresser la parole le premier, in-certain sur les pensées qui rouloientdans la tête de son maître , et craignant

de mal prendre son temps, mais nepouvant non plus se décider à se reti-

Vrer ; tous deux se trouvoient précisé--

ment dans la situation de deux amansI brouillés qui voudroient avoir une expli-

cation , lorsque le Roi saisit avec joie lapremière occasion d’en sortir. Le hasard

fut fatal au ministre; voilà à quoitiennent ces destinées qu’on appelle

grandes..---.N’est.ce pas M. de Cinq-Mars?

dit le Roi d’une voix haute; qu’ilvienne, je l’attends.u» Lejeune d’Effiat s’approcha à cheval,

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LES MËPRISES. 177et à quelques pas du Roi voulut mettrepied à terre; mais à peine sa jambe eut-

elle touché le gazon, qu’il tomba à ge-

noux. I- Pardon , Sire, dit-il, je crois queje suis blessé. Et le sang sortit violem-

ment de sa botte. ’De Thou l’avoit vu tomber et s’était

approché pour le soutenir; Richelieusaisit cette occasion de s’avancer aussiavec un empressementsimulé.

-- Otez ce spectacle des yeux duRoi, s’écria-t-il; vous voyez bien’ que

ce jeune homme se meurt. t ,- Point du tout, dit Louis le soute-

nant lui-même , un Roi de France saitvoir mourir, et n’a point peur du sang

qui coule pour lui; ce jeune hommem’intéresse , qu’on le fasse porter près

deîma tente, et qu’il ait auprès de lui mes

médecins; si sa blessure n’est pas grave,

il viendra avec moi à Paris, car le siège

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.178 .CINQ-MAMest suspendu,’Mbnsieur le Cardinal;j’en ai: vuiassez ,’ d’autres affaires m’ap-

pellent au centre du royaume ; je vouslaisserai ici commander en mon ah-sencegc’e’st ce ’ ’queflje voulois vous

dire. . ’ i ’A ces mots le Roi rentra brusque.-

ment dans ’sa..tente, précédé par ’ses

pages et, ses officiers Itenant des flama-

"beaux. . T T I .Le pavillon royal étoit fermé , Cinq)-

Mars: emporté par de Thou et ses gens,que’le’duc devRichelieu, immobile et

n stupéfait, regardoit’encore la place où

cette scène s’était passée; il sembloit

frappé de la foudre , etiucapable devoirou dïentendrc ceuxïqui l’observoiént.

7 Laubardemont , enhareeffrayé de samauvaise réception de l’a-veille , n’osoit

lui dire un mot, et Joseph avoit peineà reconnoître enlui son ancien maître;il sentit un montent le regret de s’être

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V"- i 4-44: -r- 4179donné à lui, et crut que son étoile pââ

lissoit; spîngœnttflp’g ’toit haï de

tous les hommes-et h’avhil e ressour-

ces qu’en Richelieu , il le saisit par lebras, et, le secduântiortement, lui dità demi-voix , mais avec rudesse :

4 w Allons donc", Monseigneur ; vous,êtes une poule mouillée; venez avecnous Et, comme s’il l’eût soutenu-par

de ’ço’ud’e’Lmais en effet, .l’eutraînant

malgré-lui, aidé de Lauhardemont, il

le fit rentrer dans sa tente comme. unmaître d’école fait coucher un écolier

pour lequel il redoute le brouillard du,soir. Ce vieillard prématuré suivit len-

tement les volontés de: ses deux. aco-

lytest-eti la; pourpre du pavillon re-

tomba sur lui. ’

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un l !;.lantivirus: in;’iaoai

Lavallée.

Etl’enfant (maispourquoitroublerces cœurs novicelpr)

Se rappelle en tremblant ces récits fabuleux;Qu’au: lueurs de la lampe , au vague cirroi propices

Le soir, près des foyers , racontent les nourrices.

Le Roi du Julian, a. a: LAI-orang.

A peine le Cardinal fut-il dans sastente, qu’il tomba , encore armé et’ cuirassé , dans un grand fauteuil, et là,

portant son mouchoir sur sa boucheet le regard fixe , il demeura dans cetteattitude, laissant ses deux noirs con-fidens chercher si la méditation ou l’a-

néantissement ly retenoient. Il étoit

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LA vannés. 181.mortellement pâle, et une sueur froideruisseloit sur son front. En l’essuyant

aveczlun mouvement brusque, il jetaen arrière sa calotte rouge , seul signeecclésiastique qui -lui restât, et regtomba la bouche sur ses mains. Le ca-pucin d’un côté, le sombre magistrat.de l’autre , le’considéroient en silence ,j

et sembloient, avec leurs habits noirset bruns, le prêtre et le notaire, d’unmourant.7 Le religieux, tirant du fond de sa:

poitrine une, voix qui sembloit plus:propre à dire l’office des morts qu’à

donner des consolations, parla cepen-.

dant le premier: M. - Si Monseigneur veut se souvenir

de mes conseils donnés à Narbonne, il.

conviendra que j’avais un juste prés?

sentiment des chagrins que lui cause-À

roit un jour ce jeune homme. ,-.- Le maître des requêtes reprit:

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les mite-1ms ----.?J’ai-su, par le vieilÏabbësbuËii qui;

étoit à dîner chez lla maréchale d’EHiatï,

et quia tout entehdu ,zque icel’jeu’nek

Cinq-Mars montroit plus d’énergiequ’on ne l’imaginoit,’ et qu’il tenta de

délivrer le maréchal de - Bassompieire.’

J’ai encore le rapport détaillé du sourd ,

quia très-bien joué son rôle; l’éminen-

tissime’Cardinal doitlen être assez sa-

tisfait. ’ V ’ ’-J’ai dit à Monseigneur,-recom-’

mença Joseph, car ces deux séides fa-

rouches . alternoient s leurs discourscomme les pasteurs de Virgile; j’ai dit .

qu’il seroit bon de se défaire de cepetit d’Effiat, et que je m’envcharge-

rois, si tel étoit son bon plaisir; il se-roit facile de le perdre dans l’esprit dusa. j 4 » » u . ’’ ’ -- Il seroit plus de le faire

. mourir de sa blessure , reprit Lamar- -ricanait , si Son- Éminence: avoit la

x

--(v.------ » ,

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LA «7311.1422. 185bonté de m’en donner l’ordre ;»’je con-

nois intimement le médecin enlsecondqui m’a guéri d’un coup au front, et

qui le soigne. C’est un homme’prudent,

tout dévoué à monseigneur le Cardinal-

Duc, et dont le brelan a un peu dérangé

les affaires. I *-- Je crois, repartîtuloseph avec unair de modestie méléd’m) peud’aigreur, ,

que si Son Excellence fioit quelqu’un

à employer à ce pîojet utile, ce seroitplutôt son négociateur-habituel , qui a.en quelques succès autrefois.

- Je crois pouvoir en énumérerquelques-1ms assez marquans , repritLaubardemont, et trèsmouveaux , dontla difficulté étoit grande.

’ --- Ah! sans doute , dit le père avec

un demiasalut et un air de considéra-tion et de politeSse, votre mission laplus hardie et la plus habile fut le ju-gement d’Urbain Grandier, leumagicien.

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184 CINQ-MARS.Mais, avec l’aide de Dieu, on peut faired’aussi bonnes et fortes choses. Il n’est

pas sans quelque mérite , par exemple,

ajouta-HI en baissant les yeux commeune jeune fille , d’extirper vigoureu-sement une branche royale de Bour-bon. ’, -ll n’était pas bien difficile , re-

prit avec amertume le maître des re-quêtes , de choisir un soldat aux gardespour tuer le comte de Soissons; maisprésider, juger... 1

- Et exécuter soi-même, interrom-pit le capucin échauffé , est moins dif-

ficile certainement que (l’élever unhomme; dès l’enfance , dans la. pensée.

d’accomplir de grandes choses avecdiscrétion , et de supporter, s’il le fal-

loit , toutes les tortures pour l’amour du

Ciel, plutôt que de révéler le nom de

ceux qui l’ont armé de leur justice, ou

de mourir courageusement Sur le-corps

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1.4 VEILLIÏE. 185de celui qu’on a frappé, comme-l’afait

Celui que j’en’voyai; il ne pas-uncri au coup d’épée de Riquemout, 1’6-

cuyer ’ du prince; il finit comme unsaint, c’étoit mon élève.

--Autre chose est d’ordonner ou du:

Courir des dangers.--- Etrn’en ai-je pas couru au siège

de La Rochelle?--- D’être noyé dans un égout , sans

doute? dit Laubardemont.Et vous, dit Joseph, vos périls ont-ils

été de vous prendre les doigts dans les

instrumens de torture? et tout celaparce que l’abbesse des Ursulines estvotre nièce.

-- C’était bon pour vos deSaint-François qui tenoient les mar-teaux; mais moi, je fus frappé au frontpar ce même Cinq-Mars qui guidoit une

populace’effrénée. l- En êtes-vous bien sûr? s’écria Io-

a. 3.

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r86 . euro-mus.ise’phchzrmé; Osa-t-il bien aller ainsicontre histordre’s du Roi? La joie qu’il

avoit de cetteïdécouv’erte lui laçant ou-

blier sa colère. w I a I- Impertinens! s’écria le Cardinal

trompant tout à coup le silence , et ôtant

de ses lèvres son mouchoir taché de

sang, je punirois votre sanglante dis-pute, si elle ne m’avait appris bien desSecrets’d’infia’mie de votre part." On a

dépassé. mes ordres; je ne voulois point

de tenure , Laubardemont; c’est votresectmde faute; vous me ferez’ha’ir pour

rien ,Ïc’éioi’t’inutile. Mais vous, Joseph,

ne négligez pas les détails de cetteémeute où fut Cinq-Mars; cela peut ser-

vir par la suite. ’ A l-’ J’ai tous les noms et signalemens,

dit avec empressement le juge secret’,

inclinant jusqu’au fauteuii- sa grandetaille et son visage olivâtre et maigre,que sillonnoit un rire servile.”

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m vernir. 11,87--C’e8tbun,-c’est-bon, ditile ministre,

le repoussant; il. ne s’agit. pas aeIn’core

de cela. V0115 , Joseph , soyez à Paris

avant ce jeune présomptueux qui Avaêtre favori, j’en suis certainydevenez

son ami, tirez-en parti pour .m’oi, ou Vperdez-le; qu’il me serve ou qu’il tombe.

Mais surtout envoyez-moi des vgenssûrs,

et tous les jours, pour merendre commeverbalement; jamais d’écrits à l’avenir.

Je suis très-mécontent de vous, Joseph;

quel misérable courrier. avec: -;vouschoisi pour venir de Cologne? Hue m’a

pas su comprendre, il a. vu le Roi tropt tôt, et. nous voilà encore avecune dis-grâce. à, combattre; Vous avez manqué

me perdre entièrement. Vousallez avoirce qu’ouvaefaire à Paris, on netarderapas à’ yafaire une conjuratiorl coutre

moi , mais ce sera la dernière. Je. resteici pour les laisser. tous plus libres d’a-

gir. I sortez tous deux , et envoyezamoi

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168 V ennoblirais.men valet de chambre dans deux heuresseulement: je veux être seul.

On entendoit encore le pas de ces«deux hommes , et Richelieu , les yeuxentachés sur l’entrée de sa tente, sem-

bloit les poursuivre de ses regards ir-rites.

- Misérables l s’écria-t-il lorsqu’il

fut seul, allez encore accomplir quel-ques œuvres secrètes, et ensuite je vousbriserai vous-mêmes , ressorts impursde mon pouvoir. Bientôt le Roi suc-

’combera sous la lente maladie qui le*eonsume ; je serai-régentulors, je serair roi de France moi-même, je n’aurai plus

’à redouter les caprices de sa faiblesse;

je détruirai sans retour les races or-gueilleuses de ce pays; j’y passerai un

niveau terriblelet la baguetteide Tar-’ quia , je serai seul sur en: tous, l’Eu-

*rope tremblera, je.....Ici le goût du sang qui remplissoit de

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LA vernir. 189nouveau sa bouche le força d’y porter

son mouchoir.-- Ah! que dis-je! malheureux que A

je suis! Me voilà frappé à mont; je me

dissous, mon. sang s’écoule, et mon es-

prit veut travailler-encore! Pourquoi?pour qui? est-ce pour la gloire? c’estun mot vide. Est-ce pour les hommes?je les méprise. Pourqui donc, puisque

je vais mourir avant deux, avant troisans peut-être? Est-ce pour Dieu P quelnom je n’ai pas marché avec lui,il a tout vu...

Ici il laissa tomber sa tête sur sapoitrine , et ses yeux y rencontrèrentla grande croix d’or qu’il portoit au cou;

I il ne put s’empêcher de se jeter en ar-rière jusqu’au fond du fauteuil, mais

elle le suivoit; il la prit, et la considé-rant avec des regards fixes et dévorans:

Signe terrible l» dit-il tout bas , tu mepoursuis! Vous. retrouverai-je encore

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L90 Cinq-mans.ameutai... divinité et... supplice? quesuis-je? qu’ai-je fait l...

Pour la première fois uneterreur sin-guli’ère et inconnue le pénétra; il trem-

bla,:glac*é et brûlé par un frisson in-

vincible , .ilÏ n’osait lever les yeux de

crainte de’rencontrer quelque visioneffroyable; il n’osoit appeler de peurd’entendre le sen de sa propre voix 3 il

demeura profondément enfoncé dansla méditation de l’éternité si terrible

pour lui, et il murmura cette sorte deprière :

- Grand Dieul si tu m’entends ,juge-moi donc , mais ne m’isole paspoursuite juger. Regarde-moi entourédes: hommes d’e mon. siècle, regardel’ouvrage immense; que j’avois entre-»pivis;:falloit’-il moins qu’un énorme Ie-

rvier peurinernuer Ïces masses? et si œlevier écraseïen tombant quelques mi-sérablesiinutiles , suis-je bienÎcmrpabh?

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LA maronne. r91Je semblerai méchant aux hommes;mais toi, juge suprême, me verras-tuainsi? Non ,tu sais que c’est le pouvoir

sans bornes qui rend la créature cou-pable envers la créature, ce n’est pas

Armand de Richelieu qui fait périr,c’est le premier ministre. Ce n’est pas

pour ’ ses injures personnelles , c’est

pour suivront) système..... , mais unsystème... qu’est-æ que ce mot? M’é-

toit-il permis de jouer ainsi avec leshommes , et de les regarder commedes nombres pour accomplir une pen-séeüfaus’se permétre? Je renverse l’en-

tourage du trône. Si sans-le savoir jesapois ses fondemens et hâtoissa chute!Qui, monïnpOuvoirïd’emprunt m’a sé-

duit. O dédale! ôfoiîblesse de la pensée

humaine semple fait pourquoi ai-jequitté. ta voie 91... spo’urquoi ne suis-je

pas seulementunsimpleprêà’eil Sij’0sois

rompre avec l’hommeetîmei donner à ’

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.192 . orna-nuas.Dieu! l’échelle de Jacob descendroit

encore dans mes songes.En ce moment son’oreille fut frappée

d’un grand bruit qui Se faisoit au de-.hars; des rires de soldats, des huéesféroces et des juremens se mêloient aux

paroles assez long -temps soutenuesI d’uuevaix faible et claire; on eût dit le

chant d’un ange entrecoupé par des

riresde démons. Il se leva et ouvritune sorte de fenêtre en toile, pratiquéesur un des côtés de sa tente carrée. Un

singulier spectacle se présentoit à savue; il resta quelques instans à le con.Itempler , attentif aux discours quise

tenoient. . .-Ècoute, écoute, La Valeur, disoitun soldat à un autre, la voilà qui re,commence à parler et chanter; fais:la placer au milieudu cercle, entrenousetlefeuc . ’ A ” 1. --.Tu ne sais pas, tu ne sais pas?

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a

a; vernir. - .195L disoit un autre, voici Grandfe’rré qui

dit qu’il la connaît! . a i” - -- Oui,’je te dis que je la cannois ,

s - et, par Saint-Pierre de Loudun, je ju-. remis que je l’ai vue dans mon village’ quand j’étais enf congé, et c’était à» une

affaire où il faisoit chaud, maistonr:- Ian ne parle pas, surtout à un cardina.

A liste comme toi. . .-- Eh! pourquoi n’en parle-bon. pas,

grand nigaud? reprit un vieux soldat- en relevant sa’moustache.

- On n’en parle pas parce que cela.4 brûlela langue, entends-tu cela?

.- -’- bien , je ne l’entends pas;

- Eh bien! ni mai non plus ,’ mais:ce sont des bourgeois qui me l’ont dit.

- . Ici un éclat de rirelgénéral l’inter-

-rompit. V l1. Ü ; ir: I -- Ah! ablest-il bête lldisoit’vl’nn ; il

écoute ce que disent les:bourgeois-.Tu: -- Ab’bien! situ les écoutesbavar-

a. 9

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r 594 , Wagram.dentu asdu temps à perdre, reprenoit

un autre. *.- ...Tu ne. sais donc pas, ce (me disoit.uja ,mère , blanc-bec? reprenoit grave-ment le plus vieux, enhais’sant les yeux

d’un air farouche etsolennel pour se

faire écouter. .«Eh! comment veux-tuque je le

sache , La Pipe? ta mère devoit être.monte de vieillesse avant que mongrande-père ne fût au monde". u

Eh bien ! blâma-bec, je vais te le dire:

1T1] sauras d’abord que ma mél-crêtoit

une respectable. Bohémiemie , aussiat-tachée. au: régiment des carabins de La

Roque, que mon chiai: Canon quemilà;. elle portoit l’eau-de-vie à’ son cou dans

»nn:baril,.etla; buvoit mm: que le pre-mier de chez nous; elle avoinai; qua-

: tomiépoux ,4 un: mütaües, et taons

sur. ha bafllm» mÎXëvüàœqui sïappéfieninïfemme!

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sur munie. e 0195”intérfompirént les ’sotdats pleiïis de

respect. - - I ï l: , Il à Et jamais de sa vie elleïn’e parla

3 à unpboÀu’rgeois , si ce nïe’st peul; lui dire,

en arrivant afix lbgemens : Allume-moi-m chandelle , et finis «Chauffé. ma.

(soupe, z f. A» H.r «à. Eh bienlqu’est-Ce qu’elle disait

la mère? dit. Grandfeèré. "- Si tù es si pressé, tu ne le saluas

«pas, blanc-bec; dle’disoit habituelle-

r’ment dans Sa ccnvetsation : Humide:Ivan! mieux qu’un’cliien , ’maie aire aldin

www mieux qu’à): margeais. 2 ’

- Bravo! bravo! c’est bien dit, criè-rent- les soldats pleins ’Æehbhousiasme

ià ces belles paroles. - eEt ça n’empêchepas, dit Grandîerxé,

ï que les bourgeois qui in’o’nt que ça

brûloit Inflangue’ amien’t raison; d’ail-

’«eieuœce n’éto’it’p’asv toptdfifât Ries-hotus

i.geoisi; enrôle rioient-des épées, et fla

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Î 196 y CINQ-MARS., tâtoient fâchés de ce qu’on brûloit un

curé, et moi aussi. af --Eh! qu’est-ce’que cela te faisoit

qu’on brûlât ton curé, grand innocent

(reprit un sergent de bataille appuyé. sur la fourche de son arquebuse)? après

lui un autre; tu aurois pu prendre à"sa :placè un de nos généraux, qui sonttous curés à présent; moi qÎii suis roya-

liste, je le dis franchement.« ’-- Taisez-vons donc , cria La Pipe;

laissez parler cette fille. Ce sont tous,ces cliens de royalistes qui viennentnous. déranger, quand nous nous amu-

- sons. ’ ’e - Qu’est-ce que tu dis? repriteGrand-

ferré ; sais-tu seulement ce qne c’est

que d’être royaliste,

- oui, [dit La Pipe, je vous cannois.’bien tous; allez, vous êtes pour les an-

. dans ysoiadiiSantiprinces de la paix,.avec

les croqhans, contre le Cardinal "et la

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LA vannés. 197,gabelle; là! ai-je raison ou non?

-- Eh bien , non l vieux bas-rouge; aun royaliste est celui qui est pour unroi; voilà ce que c’est. Et comme mon 1

père étoit valet des émerillons du Roi, -

-je-suis pour le Roi; voilà. Et je n’aime r

pas les bas-rouges, c’est tout simple. x--- Ah! tu m’appelles bas-ronge! re- a

prit le vieux soldat; tu m’en feras rai- ’

son demain matin. Si tu avois fait la.guerre dans la Valteline, tu ne parle- ’ lrois pas comme ’ça; et si tu avois vu V

l’Éminence se promener sur sa diguede La Rochelle, avec le vieux marquis l’de Spinola , pendant qu’on lui "envoyoit L

des volées de canon, tu ne dirois rien ”

des bas-rouges: entends-tu. l- Allons, amusons-nous, au. lieu de -

nous quereller, dirent les autres sol-Î

dats. ,’Les braves qui discouroient ainsiétoient debout autour d’un grand [feu 1

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mai , minas -quibxéclairoitx plus que la lune, mais;bellequ’ellé étoit; ahan. milieu d’eux

se.troruw;itle sujet de leur attroupes.-mat et.de,leurs cris: Le Cardinal dis- -tingua une jeune femme vêtue de no’m

et.converte l’unJong voile blanc; sespieds. étoient nus ;’une cor-de grOssière

serroitsa taille’élégante,’ un long ro-

saire tomboit de son-Cou presque jus-qu’aux? pieds, zses mains délicates, et .

’ blanches comme l’ivoire en agitoient

les grains. atèles; faisoient tourner tapirdement sous ses doigtsÎ Les soldats,avec. une joie barbare , js’amusoieutv àPréparer de! petits. charmes sur son

chemin pour. brûler. ses pieds nus; 1erplus vieux prit la. mèche fumantehde;son arquebuse, et , rapprochant dubas desa robe; lui (litjd’une vois tau-Ü

que: .-- . Allons ,, folle , recpirunepce-nons

ton .histoire , ou bien jade. remplirai de:

i)

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LA venus, 199ipoudre, et je te ferai sauter commeune mine; prends-y garde, parce que,j’ai déjà jeué ce tour-là à d’autres que

toi dans les vieilles guerres des Hugue-nots; allons , chante.

La jeune femme les regardant avecgravité ne répondit rien , et baissa son

voile. n u r-- Tu t’y prends mal, dit Grandferré-

avec un rire sbachiqnertu vas la» faire ipleurer, tu nesais’pas lebeau langage de *

la cour; je vais lui parler, moi, et lui »prenant le menton:

-Mou petit cœur,.lui dit-il, si tu.voulois , ma mignonne, recommencerla jolie petite historiette que tu ra-contois tout à l’heure à ces Messieurs ,

je te prierois de voyager avec moi sur-le fleuve de Tendre, comme disent les lgrandes dames de Paris, et;de.prendreun. verred’eawde-vie avec ton chevalier

ifidèle, qui) t’a rencontrée autrefois a)

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200- ch-nuns;Loudun quand tu jouois la comédiepour faire brûler un pauvre diable

La jeune femme croisa ses bras, et , .regardant autour d’elle d’un air impé- :

rieux , s’écria: ’ e--Retirez-vous, au nom du Dieu

des armées; retirez-vous, hommes im- -.

purs; il n’y a rien de commun entre -nous. Je n’entends pas votre langue, etvous nÎentendriez pas la mienne. Allez -.

vendre votre sang aux princes dé laJerre à tant d’obolesrparjour; et lais-

sez-moi accomplir ma mission. Cloner(luisez-moi vers le Cardinal...

Un rire grossier l’interrompit.

. -Crois-tu, ditun carabin de Mau-revert; que Son Éminence le géné-

ralissime te reçoive chez lui avec tespieds nus? vales laver!

--Le Seigneur a dit: Jérusalem, -lève ta robe et passeles fleuves , réponr z

dit-elle les bras toujours en croix, Que

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La, valentin. 201 ;l’on me, conduise filiez le Cardinal. -

Richelieu criad’une voix forte:-- -Qu’on m’amène cette femme, et

qu’on la laisse en repos. » ,.-ITout se tut; on la conduisit au mi-

nistre. Pourquoi, dit-elle en le voyant,m’amener. devant un homme armé? On ;

la laissa seule devant lui, sans répondre. ï

Le Cardinal avoit l’air soupçonneux

en la regardant.-Madame , dit-il, que faites-vous -;

au camp à cette heure, et, si ,yqtreesprit n’est pas égaré ,tpourquoi- ces ,

pieds. nus P» -- C’est un men, c’est un vœu , ré-

pondit la jeune religieuse avec un air ,d’impatience , en s’asseyant près de lui

brusquement; j’ai fait aussi celui de ne.

pas manger que je n’aie rencontré.

l’homme que je cherche. , ,-Ma sœur, dit le Cardinal étonnéet

radouci, en s’approchant pour l’obserrz

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202 CINQ-MAlts.’ ’

ver, Dieu n’exige pas de telles rigueurs

dans un corpsifoible , et surtout à votreâge, car vous me seniblez fort jeune.

-Jeune? oh Mini, j’étois bien’jeune 4

ily a peu de jours encore; mais depuisj’ai passé deux existences au moins,tant j’ai’pensé et souffert :”regardez V

man’visage. l ’ ’Et elle découvrit une figure parfai-

tement belle , des yeux très-régu-liers y donnoient la vie, mais sanseeuxon ’àuroit cru que ces traits étoient ’ceux d’un fantôme ,’ tantelle étoit pâle; ’

ses lèvres étoient violettes et trem-bloient, un grand’frisson faisoit en;tendre’lie’choc de aes’dents. ’ ’

êVbus êtes malade, ma sœur, .ditle ministre Nému , en lui prenant la imain qu’il sentit: brûlante. Une sorte

d’habitude d’interroger sa santé et ’

celle des autres lui fit mucher le pouls

sur son bras amaigri, il sentit les ar-

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LA unau; 205..tètes sommées- par les rbattemetisïd’une

fièvfiexeffrayante. ’ - .Î-- Mais , continua-tél avec plus d’inà 5.

tétât, vous vous êtes tuée: me des ri- x

gueule plus grandes que les forces hu- àmaines; je les aitaujouns blâmées, et .surtout dans un â’ge’tendr’e. Qui a donc -

pu vous y porter-9 estëcexpourm’e le.confier que ,r vous: êtes venue? Parlezavec, calme, et soyez v sûre 1 d’être - secou- z

rue. a. ï.’I --.Se confier aux hommes! rlepritla

jeune femme, oh! non," jamais. lis lm’bnt tons trompée, je ne me confie-

rois à personne, pas mémé à M. de

Cinq-Mars y qui cependant doitwbientôt A

mourir. a v , . I- Comment ?.dit Richelieu en fron-çant le sourcil, maisavecam rive amer, ’

comment, vous cannoisSez ce .jeune *homme ?vast»ce lui qui a fait vos mal-’

heurt? tu p ’ -

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204 1 entonnas. v---0hlnon,il estbien bon, etildéteste »

les méchans, c’est ce qui le perdra. .D’ailleurs , dit-elle en prenant mut à

coup un air dur et sauvage , les hommes.sont foibles , et il y a des chosesque les ,femmes doivent accomplir. Quand il

g ne s’est plus. trouvé de vaillans dans

Israël, Débora s’est levée. v-- Eh! comment savez-vous toutes

ces belles choses? continua le Cardinal,en lui tenant toujours la main.

--0h! cela, je ne puis vous l’ex-pliquer, reprit, avec un air de naïveté Q

touchante et une voix très-douce , lajeune religieuse [vous ne me compren- -driez pas , c’est ledémon qui m’a tout

appris , et qui m’a perdue. V l ’-- Eh! mon enfant, c’est toujours

lui qui nous perd; mais il nous ins-.trait du mal, dit Richelieu avec un airde protection paternelle et d’une pitié-

croissante. Quelles ont été vos fau-

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LA vanner. ’1205fies? dites-lesèmoi, je p’eux’ beaucoup.

’ -- Ah ! dit-elle d’un air de doute ,

vous pôuvez beaucoup sur des guer-. riers , sur des hommes braves et géné-

reux ; sous votre cuirasse , doit battrer un noble cœur; vous étesnn vieux gé-

néral qui ne savez rien des’ruses du

crime. ’ .Richelieu sourit, cette mépriSe leV flattoit.

- Je vous ai entendu demanderleCardinal; que lui vdulez-v’ouswenfin?Qu’étes-vous venue chercher?

Lareligieuse se recueillit, et mit undoigt’sur.son front. I ’

-- Je ne m’en souviens plus , dit-elle,

tuons m’avez trop. parlé... J’ai perdu

cette idée, ’c’étoit pourtant une grande

idée... C’est pour elle que’je me suis

condamnée à la faim qui me me, ilfaut

que je l’acComplîsse , ou je vais mourir

avant. Ah! dit-elle en portant la main

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i 206 ’ * CMQ’rIIm.

. soussarObe, dans son sein, parut

. prendre” quelque chose, la Voilà, cette

- idée... ’ ,Elle rougit’tout à coup , et ses yeux

s’ouvrirent extraordinairement ;- elle’ continua euse penchant à l’oreille du

Cardinal. l I r- Je vais vous la dire, écoutez: Ur-

bain Grandier, mon amant Urbain ,m’a dit, cette nuit , que c’était Biche-

lieu qui l’avait fait périr; j’ai pris un

couteau dans une auberge, et je viensici pour le tuer, dites-moi-où il cet.

Le-Cardinal , effrayé et surpris, re-cula d’horreur. Il ’n’osoit appeler ses

gardes , craignant les cris de cettefemme et-ses accusations ;et’cependant

un emportement- de cette "folie puniroit

lui devenir fatal.” l «’ f ’ l ICette histoire al’frense me pour-

enivra donc * parmi s’écria-nil. en. la

, regardant fixement, cherchantdals

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La, vermis. . 207son esprit le parti qu’il devoit prendre.

Ils demeurèrent en silence l’un enface de l’autre dans la même attitude ,

comme deux lutteurs qui se contem-’-plent avant de s’attaquer, ou comme

le chien d’arrêt et sa victime , pétrifiés

par la puissance du regard.Cependant Laubardemont et ’Joseph

étoient sortis ensemble, et, avant de seséparer, se parlèrent un moment. de-vant la tente du Cardinal, parce qu’ils

.avoient besoin de se trompermutuel-lement; leur haine venoit de prendredes forces dans leur. querelle, et cha-lcun avoitwrésolu de perdre son rivalprès du maître. Le juge commença le

dialogue, que chacun d’eux avoit pré-.

(paré en se prenant le bras, commed’un seul et même mouvement:

- Ah! révérendpère! que vous m’a-

vez affligé, en ayant l’air de prendre

en mauvaise part. quelques légères

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"208 ânonnas.plaisanteries que je vous .ai faites tout

’ à l’heure! V -"-Eh! mon Dieu, non! chéri sei-

V gneur, je suis bien loin de là. La cha-’rité, où seroit la charité? J’ai quel-

ï quefois une Sainte chaleur dans le pro-pos, pour be qui est du bien de l’État ’

let de Monseigneur, à qui je suis tout’ dénoué. -* -Ah! qui le sait mieux que moi,révérend pèi-ePVmalis irons me fendez

l ’îustice, vous savez aussi combien je le’suis à l’éminentissime Cardinal-Duc

’auquel je dois tout. Hélas ! I je n’ài mis

que trop de zèle à le servir, puisqu’il

’ me le reprOche. i’ i -RaSsurez-vous , dit Joseph, il ne

Vous en veut pas, je le connais bien,il conçoit qu’on faSsquuelque chose

"pont sa’ famille, il est fort bon’ parent

’aussixi l V " ’i l - Oui, c’est Cela, mimi-Laubarde-

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74m.... -VK

LA YEILLÉE. 2029mont, voilà mon affaire à moi; ma nièce

étoit perdue tout-à-fait avec son cou- .vent, si Urbain eût triomphé, vous Ksentez cela comme moi, d’autant plusqu’elle ne nous avoit pas bien compris,et qu’elle a fait l’enfant quand il a fallu

paraître.

-- Est-il possible P En pleine au-dience! Ce que vous me dites la mefâche véritablement pour vous! Quecela dut être pénible!

-- Plus que vous ne l’imaginezl Elle -

oublioit tout ce qu’on lui disoit dans lapossession , faisoit mille fautes de latin 4

que nous avons raccommodées commenous avons pu, et même elle a été cause

d’une scène désagréable le jour du pro-

cès; fort désagréable pour moi et pour

les juges; un évanouissement, des cris.Ah ! je vous jure que je l’aurois bien.chapitrée , si je n’eusse été forcé de

quitter précipitamment cette petite

I. 9.

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ne. canonnas. avilleàde Imùduu. Mais), «voyeiévous, il

est. tout simple-que. j’y tienne,- c’est ma

plusproche parente; car man fils amal tourné, on.ne’sait ce qu’il est de-

venu depuislquatre ans. La pauvre pe-tite Jeanne de .Iielfiel! je ne l’avais faite l

religieuse, et puis abbesse que pour ïconserver tout à ce mauvais sujet-là. Sij’avais prévu saccondnite , je rl’aurois -

réservée pour le monde. ----0n la dit d’une fort grande beauté,

repritJaseph ; c’est un don très- -cieux pour unefamille; on aurait pu.»lar présenter à la cour, et le Roi... Ah!ahi... M"° de La Fayette... Ehl... eh l...M"° d’Hautefort.... vous entendez... ilseroitmêmeposs’ibleencored’ypenser.... L

-- Ah! que je vous reconnais bienla.... Menseigneur , car nous savonsqu’on vous a nommé au cardinalat;que vous êtes bon de vous souvenir du iplus dévoué devon amis 1....

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LA VEILBËEJ 21 v1- Laubardemont parloit; encore à Jo-

seph, lorsqu’ils’se trouvèrent au bout

de la rue du camp qui conduisoit auquartier des ivolontaires. .

--Que Dieu vouslprotége etsa-sainte’

Mère , pendant mon absence, dit Jo-I*seph s’arrêtant; je vaispartir demain 1

pour Paris, et comme j’aurai affaireplus d’une foisà ce petit Cinq-Mars , je

vais le voir d’avance et savoir des nou-

velles de sa blessure.- Si l’on m’avait écouté ,’ dit Lau-

bardemont , à l’heure qu’il est vous

n’auriez pas cette peine. ’ ’

à Hélas! vous avez bien raison! ré-

pondit Joseph avec un soupir profondet levant les yeux auciel; mais le Car-dinal n’estqplus le même homme , iln’aceueillenpas les bonnes idées , ilnous perdra s’il se conduit ainsi."

Et, faisant une profonde révérence

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212 ClNQsMARS. .au juge, lecapucin entra dans le che-min qu’il lui avoit montré. .

Laubardemont le suivit ’quelque ’

temps des yeux, et, quand il fut bien ’sur de la route qu’il avoit prise ,- il re-

vint, ou plutôt courut jusqu’à la tentedu ministre : le Cardinal l’éloigne, s’é-

tait-il dit , donc il s’en dégoûte; je sais p

des secrets qui peuvent le perdre. J’a-jjouterai qu’il est allé faire sa cour ans

futur favori ,s je remplacerai ce moine ’

dans la faveur du ministre. L’instantest propice , il est minuit; il doit encore 4rester seul pendant une heure et demie. kuCourons.

Il arrive à la tente des gardes’qui

précède le pavillon. . i - x, Ë- Monseigneur.- reçoit quelqu’un :, »

dit le capitaine hésitant, mon ne pour

pas entrer. ’ a ’ v ’’ - N’impOrte, vous m’avez v’aILsortir

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LA vantais. 213il y aune heure; il se passe des chosesdont je dois rendre compte.

--Entrez, Laubardemont, eria le mi- .nistre, entrez vite et seul. Il entra. LeCardinal, toujours assis ,ptenoit les .deux mains d’une religieuse dans unedes siennes, et de l’autre fit signe de vgarde! le silence à son agent stupéfait,

qui resta sans mouvement, ne voyantpas encore le visage de cette femme;elle parloit avec volubilité, et les cho-ses étranges qu’elle disoit contrastoient I

horriblement. avec la’ douceur de savoix; Richelieu sembloit ému.

-- Oui, je le frapperai avec un cou-teau; c’est un couteau que le démon IBéhérith m’a donné à l’auberge; mais -

c’est le clou de Sisara. Il a un manche -d’ivoire, voyez-vous, et j’ai beaucoup

pleuré dessus. N’est-ce pas singulier,

mon bon-général Je le retournerai .dans la gorge de celui qui a tué mon

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:14 . entonnas.ami, comme il m’a dit lui-même de le

faire, et ensuite je brûleraile corps,c’est la peine du talion, la peine queDieu a permise à Adam... Vous avezl’air étonné , mon brave général... mais

vous le seriez bien plus si je vous di-sois sa chanson... la chanson qu’il m’a

chantée encore hier au soir, quand il iest venu me voir à l’heure du bûcher, -

vous savez bien il... l’heure où il pleut ,

l’heure où mes mains commencent àbrûler comme à présent, il m’a dit r

Ils sont bien trompés les magistrats,les magistrats rouges... j’ai onze dé-

mons à mesa ordres, et je reviens tevoir quand la cloche sonne... sous un

dais de velours pourpré , avec des toi»

ches , des torches de résine qui nouséclairent, ah! c’est de toute beauté!

voilà, voilà ce qu’ichhante; et surfair-

du De profundis ,.,elle chanta elle--même :

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v LA. uranie! 2H5.Je vais un prince d’Enfer ,

Mou sceptre est un marteau de fer ,’ Ce sapin brûlant est mon trône,

Et me robe est de soufre jaune ;Mais je veux t’éponser demain ,

Viens, Jeanne , donne-mai la main.

N’est-ce pas singulier, mon bon géné-

ral? et moi je lui réponds tous les soirs;écoutez bien ceci, oh! écoutez bien....

Le juge a parlé dans la nuit,

. Et dans la tombe ou me conduit;Pourtant j’étais ta fiancée ,

Vietnam. la pluie est longue et glacée,

Mais tu ne dormiras pas seul,Je te prêterai mon linceul.

Ensuite il parle, et parle comme lesesprits et comme les prophètes. Il dit :Malheur! malheur à celui qui a versé

le sang! Les juges de la terre sont-ils.des dieux? Non, ce sont des hommesqui vieillissent et souffrent, et cepen-dant ils asent-dire abaque voir : Faites

mourir cet homme! --- La peine de

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216 a maronnas.- -mort! la peine-de mort! Qui a donnéà l’homme le droit de l’exercer sur

l’homme? Est-ce le nombre deux?....

Un seul seroit assassin, vois-tu! Maiscompte bien, un , deux, trois.... Voilàqu’ils sont sages et justes , ces scélérats

graves et stipendiés! O crime! L’hor-

reur du Ciel! Si tu les voyois d’en haut,

comme moi , Jeanne, combien tu se-rois plus pâle encore! La chair détruire

la chair! elle qui vit de sang faire cou-ler le sang! froidement et sans colère!comme Dieu qui a créé !

Les cris que jetoit la malheureusefille en disant rapidement ces paroles ,épouvantèrent Richelieu et Laubarde-

mont au point de les tenir immobiles.long-temps encore. Cependant le délireet la fièvre l’emportoient toujours.

.- Les juges ont-ils frémi? m’a dit,Urbain ;Grandier, frémissent-ils de se ,

tromperPLOn agite la mort du juste.- .

a

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’ LA’VEXLL’ÉE. 921,7

’ -La question! - On serre sesmembresavec des cordes pour le faire parler, sa

peau se Coupe, s’arrache et se déroule

comme un parchemin; ’ses’nerfs sent à

.nu,’ rouges et luisans’, ses os crient , la

-moelle en jaillit... Mais les juges dor-ment. Ils. rêvent de fleurs et de prin-temps. Que la grand’salle est chaude!’dit l’un en s’éveillant , cet homme n’a

point voulu parler! Est-ce queïla tor--ture est finie P! Et miséricordieux enfin ,

r-il accorde la mort. La mort! la seulecrainte des vivans l la mort! le mondeinconnu! il y jette. avant lui’une âmefurieuse qui l’attendra. Oh! ne l’a-t-il.

jamais vu le tableau vengeur? Ne l’a-

t-il jamais vu avant son sommeil, leprévaricateur écorché i’

affaibli par la . fièvre, la . fatigueet le chagrin , le Cardinal ,’ saisi d’hor-

rreur et de pitié, s’écria: v-« - Ah! pour rameur de, Dieu! finis-

a. 1°

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M8 ."ŒKQWAlanus cette agrwsevscènè; emmené:natte femme, elle est folle! . -. r -

’ Lîinsensée selxetourna, et jetant-tout

à coup de grands cris:- .- Ah! le juge, le juge, le juge...;.

dit-elle, en [remnnoissant Laubarde-

. mW- » * ’ , I ’Cglni-d ,. joignant les maiu’ et s’ha-

mjlignt «leva-n; Je ministre, dise?! mec

» ”-- Hélas lMomeigne’ur, pardon

1m01, c’èstima niècequi a perdulærdi-

ion; j’igùôroisce hidheublà , samq11oi -

site seroit ehfermée depuis longtempé.Jeanne, lama"; aucuns ,1 Madamé , ’à

genoux; dégrafiez-[Sidon àgulpütIeŒdinal-Elc...rv ’

- C’est mania»! criaètæileagq45656th 50mm eütièraméüupa-«figurants jeûne ct .1thbeauté; la rougimf’qui" 351703anedîahoi’dwfit phœzàme Mlhçâleur,

0 .

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n. Il.”semais à un. silence imbibsesme-sgarde égarés à. une fixitéxcffmyablaeide

un grands yeux qui ; suivoient comamant le: ministnezattristé; 4 r1

u--.Einmenez site cettemallnenircuseenflant, du icelui-roi thons de. lui-môme;elletestl «n’entame et moi aussi: ;. liant

d’honnean me poursuivent depuisloflte

communion; 13:1:le vrais-queml’enfer sedébhàînbcaùtrbmàz . v; . y

r Il)! se lem eapqlædaknme derBeh-En]; toujourss’ilenéiense et lstupéfnâœg,

les yeux hasardas-la baudælodmteï,Infime penchée la] avantuétoêt restée

sous le coup de sa double surpriseqiüsembloit avoir éteint le reste de sa rui-son et (le ses forces. Au mouvement duCardinal elle frémi-tacle se voir entre lui

et Laubardemont, regarda tour à toutl’un et l’autre, laissa échapper de sa

main le couteau qu’elle tenoit, et seretira- lentement vers la sortie de la

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en. . .CWIAII:tente, se éouvmnt toute entière de senvoile , et tournant avec terreur ses yeux;égarés derrière elle, sa son oncle qui

la suivoit, comme une brebis épouo.vantée qui sent déjà sur son dos l’ha.

laine brûlante du. loup puât à la saisir.

Ils sortirent tous deux ainsi,et, àpeine en plein air, le juge furieux sesaisit des-mains de sa victime, les liapar un mouchoir, et l’entraîne facile»

ment , ca elle ne poussa pas un cri,pas un soupir, mais le suivit, la tête thu-

jours baissée sur son. sein, et nomméplongée dans un pmfond somnambmlierne.

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L

churent.- Xm. i’.

,r.4

meL’espagnol.

ÎQu’un ami véritable est une douce chose! t

Il plier-elle nos besoins au fond de notre lcœut

Il nous épargne la pudeur’De les lui découvrir nous-mêmes.

l ’ Il IORI’ÀIIIn

, Cependant une scène d’une autre na.

turc se passoit sous la’ tente de Cinq.-

Mars ; les paroles du Roi , premierbaume de ses blessures, avoient étésuivies des soins empressés des chirur-

gitans, de laceur; une balle morte faci-lement extraite ayoit causé seule son

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m r cwmsmvm -accident : le voyage lui étoit permis ,

tout Lemalade avoxt reçu Jusqu’à minuit des

visites amicales et intéressées; dansles premières furent celles du petitGondi et de Fontrailles, qui se dispo-soient aussi êfltiifiù’l’àpignan pour

Paris; l’ancien page Olivier d’Entrai-

gues s’étoit joint à eux pour compli-

menter l’heureux. valantaimqueile Roi

sembloit airain distingué :9 la froideurhabituelle dulprinceexiversltoqt ce quil’entonnoit ayant fait regarder, à tous

ceux qui en furent instruits, le peu demots qu’il avoit dits comme des signesassurés d’une haute ferreur; «insistoient

venus lexféllcitem.’ -- n 1le t- . 1* 9-5

ilïtétoit: seul-,s’sur sondât! (le

camp;ide-Thoul,:1prèsede lui, tehoitivsamain, et’Grandcbampfài ses! pieds;glandois: encore ide Miesaesïrasituqui fioient: fatigué son Maître blessêl,

x

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L ksi-setters. 923»et prêt à partir pour un long voyage.nous Cinq-Mars , il goûtoit enfin unde ces instants de calme et d’espoirquii viennent en quelque sorte raft-niaehir l’âme en même temps que le sang;

lanmain qu’il ne’donnoit-pas à son ami:

pressoit en secret la Croix d’or attachée

sur son cœur, en attendant: la main;adorée qui l’avoit donnée, et qu’il alloitbientôt ipre’sSer ellesm’ême: Il ’n’écoutolfl

qu’avecle regard et legsourire les Cou-Jseils du jeune magistrtlt, et’crê’voitlau’

but de son voyage, qui étoitl’aussile but.É

de sa vie-Legrave de Thou’lui disditid’une voix calmeletidouc’e: ’. a Je vous) suivrai bientôt à Paris, Je

suis heureux plus que vous-même devoirie Roi vous y mener areclui; dest-un commencement. d’amitié qu’il’faut’

ménager, vous avez raison. J’ai réfléchi

hiœipmfondèment aux causes secrètes-

de votre ambition parjurois avoinée»

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13.4; CINQÆAJIS.viné votre cœur. Oui, ce sentimentsd’amour pour la France , qui le faisoit?

battre dans votre première jeunesseya dû y prendre des forces plus grandes;vous voulez approcher le Roi pour ser-vir votre pays , pour mettre en actionces. songes dorés de nos premiers ans;Certes, la pensée est vaste etdigne devous! Je vous admire, je m’incline!Aborder le monarque avec le dévoue-ment chevaleresque de nos pères , avecun cœur plein de candeur, et prêt àtous les sacrifices, recevoir les confi-’

dences de son âme , verser dans lasienne celles de ses sujets, adoucir leschagrins du Roi en lui apprenant laconfiance de son peuple en lui, fermerles plaies du peuple en les découvrant?à sons-maître, et. par l’entremise de

votre faveur, rétablir ainsi ce commerced’amour du père aux enfans , quizfut

interrompu pendant dix-huit ans par

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L’rsraçzton, 2:15,un homme au cœur de marbre; s’expœ r

ser pour cette noble entreprise à tontes2les horreurs-devisa vengeance, et bienplus encore braver lescalomnies per-Îfides quipoursuivent le favori jusquesur les marches du. trône: ce songeétoit digne de vous. Poursuivez , mon,ami, ne soyez jamais découragé, parlez

hautement au Roi du mérite et desmalheurs de ses plus illustres amis, quel’on écrase; dites-lui sans crainte que

sa vieille i noblesse. n’a jamais conspiré

contre lui; et que , depuis le jeuneMontmorency jusqu’à cet aimable-comte de Soissons; tous avoient com-battu le ministre, et jamais le monar-ique; dites-lui que leslvieilles races de.France sont nées. avec race, qu’en,les frappant il remue toute la nation ,et que, s’il les éteint, la sienne ensouffrira, qu’elle demeurera seule ex-posée ausouffle du temps et des évè-

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ne use-min. ilnemensvi, comme”un vieux chêne fris-l

sonne et s’ébranle aux, vents de laplaine, ilor’squel’on a renversé’la ferêr

qui l’entame et le ’s’o’m’îénr -’ ont,

S’écrià ide Thou en ’s’animant, ce flint;

est trépied ne g marchez dans” votreroute rd’uii’"pas illéii’ranlàble ,t Ïclia’sSez

même; cette" honte secrète-cette pudéur

qu’une âme noble éprouve avant de sedécider à; flatter, Maire; aerqn’e le monde

appelle sa bâtir. Hélasl’lesl roisl’SOnt ac;

coutumes â ces paroles continuelles defausse. admiration pour eux ;I éohsidé.

refiles comme une langue nouvellequ?il’ faut apprendre , "langue bienétrangère à’lvos’lèvres jusqu’ici, niais

querl’on peuvparlernoblement, croya-

moi, et qui sauroienvexprimer de bélieS’

et généreuses pensées; Ü i" h". ’ l- i Ï

Pendant le Ë discours enflamfnéïléiSon

ami, ÏCinunars ne purined’unenrougeur, subite; et armures

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finasseries. des;visage sur l’oreiller; destiné de 1&thwdelïnaniières .àun’el pas être un: : DE!

MOI dmêta:â’ial.. A’.’i Io 379 . .l

i (gemmons, Henciâivousane’mprépondez pas ;’ meiseroiæjetrompé Pr -’ 7

’ v ’GinqbltiarsIsoupiraipmfonjdémentaet

sabutëlâneorewi En L 4 .. [a «c.. *Ïl-JVotre Coeur ïnx’pstwil’ plus ému de

ces! idées que je croyois devoir lehm

Tangara-r, t H m , ; ,. i.- t" lie blesseregagrtla son ami avec Moinsde trdubleàet-luiditz’ï :Qî’zg Il xi x

’ 4- Je croyois , cher. démina ,1unvous ne denier plus; mlint’orrogergqtque vous voulie’z avoir une aveugle

confiance-en moi; Quel mauvais génievous pomme denciàvenloi’rsonder ainsi

mon âme? Te ne suis-’pàs-êtranger me;

idées qui vous possédént; Qui vous dit"que je neile’s aie’pas cdrrçuesilQui vous

fifille je n’aie pas-fomentent; réaiScinder: delesipouàs’er pissement;

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:28 mamans;l’action que vous n’osez hilaire mente

dans les paroles il L’amouridïe la France,

la haine vertueuse de l’ambitieux cruelqui l’oppritne, et brise «ses antiques

mœurs avec la hache du bourreau , laferme croyance que la vertu peutêtreaussi habile que le crime ’t voilàlmes

dieux, les mêmes que les vôtres. Mais,quand-vous voyez une homme à genoux

dans une église, lui demandez: vousI quel saint en que] ange protège étre-çoit sa prière ?* Quenvous importe,pourvu qu’il priezau pied des autelsque vous adorez, pourvu qu’il y tombe

martyr s’il le faut? Eh! lorsque nospères s’acheminoieut pieds nus vers le

saintSépulcreun. bourdon à la main,s’informoitqon du vœu secret. qui les

Conduisoit à la Terre-Sainte? Ils frapepaient, ils mouroient, et les, hommeset Dieu, même peut-être n’en demane

40km marelles-31,1: riens capitaine nui

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manucurera; figles ; guidoit: ne! faisoit point dépouiller

leurs corps. pour .voirasi la croixiougeet le cilice ne cachoient pas quelqueautre signe’mystérieux; et), dans-Je Ciel

sans. doute , ils nïétoient pæjugés avec

plus de rigueur pour avoir aidé la force

de leurs résolutions sur la terre parquelque: espoir permis au chrétien-g,quelque seconde et secrète pensée,humaine etlpluSïprbche du cœur mor-

tel. - î . V’ . De Thou soumet rougit légèrement

en baissant-les! yeux. ’- ..-- Mon-ami, reprit-ilnavlamgravité ,

cette agitation peut vous faire mal; necontinuonspas sur.»œ sujet, ne mé-lons pas Dieu et ’le Ciel dansinos’âisa-

oburs, parce quercela n’est’pas bien;

et mettez vosidra’ps usurtvotre épauie’,

pàrcequ’ilu fait froidicètteunuit. lavons

promets yàjouta-at-il en ramonant; sonjeune malade ’ arec unzsoiumatemeh,

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a. Maje mprotndsj (rempli. mutaien uiùb’prirnesoonœîlsçim; ’

èr’Ahl sïécria Cibq-Mars magné in

défense de parler, moi, je vous jurepar cette Croix d’or que vous voyez ,v et

par sainte Marie , de mourir plutôt quede renoncer à ce plan même que vousavez tracé le premier; vous serez peut-être un jour forcé de me prier de m’arà

rêter; mais il ne sera plus temps.- C’est bon , c’est bon , dormez , ré,

péta le conseiller; si Vous ne vous !ar-rétez pas , alors je continuerai avecvous , quelque part que cela me «con-

(luise. . 4 ’ i a .Et prenant dans. sa. poche unxilivred’Heures., il se [un le liresattentigveé

ment; un instant après regarda Cinq-Mars qui rie-dormoit, pas; encore; ilfitsigneà’ Graudohaimp dezchongorgla

lampadophore pour Infimequ M348,mais ce soin, nouveau». ne . pâmoit, x95!

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flamencos. .25»::mianxçvœluî’ci a IGSLWRX toujours-iou-

.wergs,,.s’agitoit.sur sa couche étroites,

, 43- Allons; vous nz’êtesgpas- calme.à; de WThpu en souriant, je vais faire

quelque lecture pieuse qui vous re-mette l’esprit en repos. Azh! mon ami,

I. c’est là qu’ilestle repos véritable! c’est

Mue livre consolateur; car ouvrez-:le ou vous voudrez, et, toujourslyousy verrezk d’un [côté .l’hqmmefidaus le

son]. état qui convienne à sa faiblesse,la prière et l’incertitude (le sa destinée,

et de l’autre Dieu lui parlant; lui;même, de ses infirmités. . Quel ,niaguifir

amict :Ôéleste . Spectacle le que] su;hume SWQ luxoielet la terre !.la,vîe,gagner: enlièremité sont glà’: ouvre-file

beQSÙ’di’ p .’ i ; w; .... Ah! guignoit Cipquars ,r se le.

wçpmezggec une vivacité quiavyoitquelque choserdieqfiintin ,i le yen;bien» fissezçruoi Tl’ouyrîrgqvqiss sapez

Q

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’23: CINQ-nuas;la vieille superstition- deÎ notre pays!quand on ouvre un livre de messe avesune épée,- la première page que l’on

trouve à gauche est la’destinée ’de ce-

lui qui la lit, ’et le premier qui entrequand ilafini doit influer puissammentsur l’avenir du lecteur; ’ a" A -- Quel enfantillage l’Mais je le veux

bien. Voici votre épée; prenez la

pointe... voyons... h» -ï Laissez-moi lire moi-même ,I dit

Cinq-Mars, prenant du bord de sonlin côté du livre;.le vieux Grand-’cliam p avança gravement sa figure ba-

sanée et ses cheveuï gris sur le pied dulitpdur écouter. Son maître lut ,... s’in-

terrompit à, la première phrase, mais,

avec un sourire un peu forcé peut- iêtre , poursuivit jusqu’au bout:5 rI. Or c’étoit 8ans la cité de Medîog

lanum qu’ils comparurent. A. :H ’ÏI.’ Le ’grand4prêtr’e ileixr dit :I me

.

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fumeron. 255dinez- vous , et adorez ’ les "dieux.

III. Et le peuple étoit silencieux ," re-

gardant leurs visages, qui. parurentcomme les visages des anges. i ’

1V. Mais Gervais , prenant la mainde Protais , s’écria, levant les yeux au

ciel, ettout rempli du Saint-Esprit:V. O mon frère! je vois le Fils de

l’Homme qui nous sourit; laisse-moimourir le premier, a

VI. Car si je voyois ton sang, je crain.cirois de verSer des larmes indignes du

Seigneur notre Dieu. aVIL Or Protais lui répondit ces pas

roles: a ’ 1«. VIH. Mon frère , il est juste que jepérisse après toi, car j’ai plus d’an-

nées et’des forces plus grandes pour

te. voir souffrir. "J 1X; Mais les sénateurs et le peuplegrinçoient des dents contre eux. . l

LE: les soldats les ayant frappés,

I. Io.

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.554 euro-miss;leurs têtes tombèrentrensenble sonda

mêmîpiaUÉAÎ il yl i:j:l.v.l,:4- X]. Or, c’est en ce lieu, ménisque

le bien heureux; saint Ambroise trouvala cendredes- deux martyrs qui renditla.vueàun aveugle. ï - i a ’-*

:--.- Eh bien! dit Cinana’rs,3 en Ted-gardant son ami , lorsqu’il eut ïfini, que

répondez-vomzàacelail fia v

- La volonté de Dieu. soitifahe,mais nous ne devons pas la sondera

- Ni reculer dans nos desseins pourun jeu d’enfant-,.reprit: d’SBffiat avec

impatience, et s’envebppant d’unm’an-

teau jeté sur lui. Souvenez-vous desvers que nous-récitio- autrefois :Jus-

un et tenacem proposai virantmots de fer se sont imprimésrdansmatête. Oui, que l’univers s’écroule lui

son: de moi, ses débris m’emporterOnt

inébranlable. . r r - ’ r ’17 «» - Ne comparons lespenséet de

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L-’EsPÀG’NoÏJ. 1 235

racismes celles du en] et soumet-tons-nous , dinde Thou gravement.

- Amen, dit le vieux Grandchamp;donttles yeux s’étoient remplis de lar-mes qu’il essuyoit brusquement! » H

- De quoi te mêles-tu , vieux sol-idati’ tu pleures? dit son maître.

J- Amen , dit à la porte" de la tente

une voix nasillarde. a i»-é-’Parbleu, monsieur, faites plutôt

cette question à l’Éminence griSe qui

vient chez vous, répondit le fidèle ser-viteur , en montrant JoSeph quis’avamçoit les bras croisés , en saluant d’un air

caressant. I- -- Ah! ce sera dodeluî! murmura

Cinq-Mars. il i l I VJe viens peut-étre-mal’à-propos,’ dit

Joseph doucement; i ’ i v i t ’ r. --: Fort à propos, I peut-être , dit

Henri d’Elflat en souriant avec un rez

me à dsAThou: ’Qui «mosane:

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:56 calo-manner ici, mon. père, à une heure dumatin? ce doit être quelque bonne œu-I

vre. J ’ .h ’Joseplise vit mal accueilli, et, comme

il ne marchoit jamais sans. avoir aufond de l’âme cinq ou six reproches à

se faire visa-vis des gens qu’il abor-doit , et autant de ressources dans l’es-

prit pour se tirer d’affaire, il crut icique l’on avoit découvert le but de savisite, et sentit que ce n’étoit pas le

moment de la mauvaise humeur qu’ilfalloit prendre pour préparer l’amitié,-

S’asseyant donc assez froidement près

du lit : -l --., Je viens , ditail , Monsieur, vousparler de la part du Cardinal généralis-

sime, des deux prisonniers espagnolsque vous avez faits; il désire avoir des

renseignemens sur en; le plus promp-tement possible; je dois les voir et les

Manager, je, ne meîqîs. W

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tarama. :57:vous, trouver maillant encore; je vou-lois A seulement les recevoir de vosgens;

Après un échange de politesses con-.

traintes , on fit entrer dans latente lesdeux prisonniers que Cinq-Mars avoit»presque A oubliés. Ils parurent , l’un

jeune et montrant à découvert une;physionomie vive et un peu sauvage,c’étoit le soldat; l’autre,; cachant sa taille

sous un manteau brun, .et ses traitsA sombres, mais ambigus dansleur ex-.

pression , sous l’ombre de son chapeauà larges bords qu’il n’ôta’pas, e’étoit

l’officier ; il parla seul et le premier:

-. 4-- Pourquoi me faites-vous quitterma paille et mon sommeil? est-ce pour.me délivrer ou me pendre?

- Ni l’un ni l’autre . dit Joseph;

. -- Qu’ai-je à faire avec toi; hommeà longuebarbeî’je ne. t’ai pas vu à la

brèche. * ’ W

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58 cinq-final” Il fallut ’quelqueïtemp’s,’ d’après ou:

ex’O’rde’Àairnable, pour Paire compren-

dre à l’étranger les droits qu’avait un.

capucin à l’interrbger; «---l Eh l bien !-’ dit-il”, enfin que

vengeur? . - aa --- Je veux savoir votre nom et vo-l

tre pays: V ’ l l .v ---’Je’ne dis pas mon nom , et, quant

à mon pays, j’ai- l’air-n d’un Espagnol",

mais je ne le suis peut-être pas ; ï car un

Espagnol ne l’est jamais. n iLe père Joseph, se retournant vers

les deux amis,nditï: Je suis bien trompé,

ou j”ai entendu ce son de vous quelque

part: .Cet homme parle français sansaccent;mais il me semble’qu’il’veut

nous donner des énigmes comme dans

l’Orient. - r ’ - I ”-- L’Orient? [c’est cela, dit là prî-

sonnier, un Espagnol est-un homme;de l’Orient, c’est un Turc catholiques

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fissmcxon 259béni ding ’ languirai: bouillonne, il est

pariassent "ou-n iufatigable; r lîindolehce

la Tendiçsélavelfill’utdeur cruel; immœ

bile ’dansnsèu) ignofianœ , ingénieux

dans tsài superstition -, il ne veut: qu’un

livrereligieux,qu’unmaître tyrannique;ü obéit à la loi du’bûcber, il commande

par celledu-poignard , etsïendort le soirdams sa misère sanglante, cuva nt lelfana-tismeitel: rêvant Je crime. Qui est-ce là , ’

Messieurs? Est-ce l’Espagnol ou le Turc?

devinez. Ah! ah! vous avez l’air detrouver que j’ai de l’esprit, parce que

je liencontre un rapport; Vraiment ,messieurs, vous me Faiteshien de l’hono

heur , etircependant l’idée pourroit se

pousser plus loin , si l’on iouloit; si jepassois à l’ordre physique ,Ïpar exem-

ple,.ne pourroisje pas yous dire: Cetmais a les riait: gravies et alangés;l’œil, noir campé enramande, les sont».

.(iüsdnrs, lai-bouche :triste

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440 CINQ-uns.les, jolies basanées ,5: maigres e; : ridées a

saztêle.’ est. rasée, et il la couvre d’un;

mouchoir noué .etiitu’rhan 5351 passe un

jour entier couché ou debout sous unsoleil brûlant ,Vsans mouvement, sansparole, fumants un tabac qui l’enivre’?

Bât-ce un Turc ou un Espagnol? Ètesa

vous contens, Messieurs? Vraimentvous en. avez l’air, vomiriez, et dequoi riez-vous? Moi qui vous ai pré-senté cette seule idée, je n’aipas ri;voyez , mon viSage est triste. Ah! c’est

peut-être parce que le sombre prison-nier est devenutout-à-Àcoup bavards, etparle vite? Ah! ce n?est rien, ce n’estrien , je. pourrois’vous en dire d’autres;

, et Vous rendre quelques Services, mesbraves amis. si je me jetois dans lesanecdotes; par exemple , si jeïvous di-sois. que je cannois un prêtre. quiavoitordonné la. mont. de quelques. [héréti- -

quesavant de dire, lai-messe, et qui»,

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i L’nsrscnon. a ilfurieux d’être interrompu à l’autel du-

rant le sainbsacrifice, cria àcèux quilui demandoient ses ordres : Tuez tout,tuez tout; ririez-vous bien tous , Mes-sieurs? Non , pas tous. Monsieur quevoilà , par exemple , mordroit sa lèvreet sa barbe. 0h! il est vrai qu’il pour-roit répondre qu’il a fait sagement, etqu’on avoit tort d’interrompre sa pureprière. Mais si j’ajoutois qu’il s’est caché

pendantuneheurederrièrelatoiledevootre tente, Monsieur de Cinq-Mars, pourvous écouter parler, et qu’il est venu

pour vous faire quelque perfidie , etnon pour moi, que diroit-il P... Mainte-nant , Messieurs, êtes-vous contens?Puis - je me retirer après cette pa

rade P vLe prisonnier avoit débité tout ceciavec la rapidité d’un vendeur d’arriè-

tau, et avec une voix si haute que. ’10-

"’seph en fut teuf Il se leva-in-

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falia I ciao-usas.digne àrla fin . et s’adressant à Cinq-

Mars: --- cumulent souffrez - vous , Mon-, sieur, lui dit-il, qu’un prisonnier, qui. devoit être pendu , vous parle ainsi?

l L’Espagnol, sans daigner s’occuper

de lui davantage, se pencha vers d’Ef-fiat, et lui, dit à. l’oreille :

--Je ne vous importe guère, donnez-mOi ma liberté; j’ai déjà pu la prendre,

..mais je ne l’ai pas voulu sans votre con-

sentement; donnez-lai-moi, ou faites-moi tuer.’

-- Partez si vous le pouvez, lui ré-.pondit Cinq-Mars, je vous jure quej’en serai fort aise. Et il fit dire à ses

gens de se retirer avec le soldat qu’ilvoulut garder à son service.

Cefut l’affaire d’un moment, il ne

. plus dans la tente que les deuxaguis, Joseph décontenancé, et l’Espa-

81191,.lorsqne celui-ci, ôtant son cha-

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VFLÏHHGIOL. . .145Lpeaumontra unefigure-fiançsise,zmaisféroce; [il rioit ,ret (sembloit respirerplus d’air dans sa largerpoitrine.

t--«Oui, jesuis Français, ditnil ailo-

seph, mais je hais la France, parceÏ qu’elle a donné le jourà mon père

est un monture , et à moi qui le suis de-- venu, et qui l’ai frappé une fois; je

hais ses habitans parce qu’ils m’ont

volé tome ma fortune au jeu, et que jeles ai volés et tués depuis; j’ai été deux

ans Espagnol pour fairemourir plus deFrançais , mais, à présent, je hais en-core plus l’Espagne; on ne saura jamais

pourquoi. Adieu , je vais vivre sansnanan désormais, tous les hommessont mes ennemis. Continue, Joseph,et tu metvaudras bientôt; oui, tu m’as

vu autrefiois, continua-tél en le pous-

sant violemment par la poitrine , et leInverseur... ,’ je’ suis ,Jaequès’ de .Lau-

i bedonnant, fils deten digne ami.

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.144 . CINQ-Han.A cesmots , sortant brusquement de

latente, il disparut Commenne ap-parition s’évanouiroit. De Thon et les

laquais , accourus à l’entrée, le virent

s’élancer en deux bonds par-dessus un

soldat surpris et désarmé , et courir- vers les montagnes avec la vitesse d’un

cerf, malgré plusieurs coups de mous-quet inutiles. Joseph profita du dé-sordre pour s’évader , en balbutiant

quelques mots de politesse , et laissales deux amis riant de son aventure-et

v de ison désappointement, comme deux’écoliers riroient d’avoir vu tomber les

lunettes de leur pédagogue et s’apprê-

ï tant enfin à chercher un sommeilïdont

ils avoient besoin l’un et l’autre, etqu’ils trouvèrent bientôt, le blessé dans

n son lit, et le jeune conseiller dans son

fauteuil. h . v v - I -Pour le capucin , il S’achenlinoit vers

sa tente , méditant. comment il tireroit

, v;fg3

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" L’ESPAGNOL. i245

parti de tout ceci, pour la meilleurevengeance possible, lorsqu’il rencontra

haubardemont traînant par ses mainsliées la jeune insensée. Ils se racontè-

rent leurs mutuelles et horribles aven-turcs.

Joseph n’eut pas peu de plaisir à re-

tourner le poignard dans la plaie de soncœur, en lui apprenant le sort de sonfils: l

--- Vous n’êtes pas précisément heu-

reux dans votre intérieur , ajouta-t-il 3

je vous. conseille de faire enfermervotre nièce , et pendre votre héritier,si par bonheur vous le retrouvez. - ,’ hubardemont rit affreusement: -

Quant à cette petite imbécile que voilà,

je vais la donner à un ancien juge se-cret , à présent contrebandier dans les

Pyrénées, à Oloron; il la fera ce qu’il

voudra, servante dans sa posada, parexemple; je m’en soucie’peu , pourvu

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v

4:46 CINQ-nus.que Monseigneur. ne puisse jamais en

l entendre parler.Jeanne de Belfiel,- la tête baisséeune

. donna aucun signe d’intelligence 5 toute

.lueur de raison étoit éteinte en elle, un

seul mot lui étoit resté sur les lèvres,

elle prononçoit continuellement: Lejuge! dit-elle tout bas ; et elle sent.

Son oncle et Joseph la chargèrent , à, peu près comme un sac de blé, sur un

des chevaux qu’amenèrent deux domes-

tiques; Laubardemont en monta un ,et se disposa à sortir du , voulants’enfoncer dans les montagnes avant le

jour. vI - Bon voyage! ditvil à Joseph , faites. bien. vos affaires .à Paris, je vous ré-

comtnande Oreste et Pylade.«fg-Bon voyage! répondit celui-ci. Je

vous recommande Cassandre et-.-0h! il n’a ni tué son opère, ni

épousé,sà mère...

i

x

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L’Esncnon. 247-- Mais il est en bon chemin pour

ces gentillesses.- Adieu , mon révérend père!

- Adieu , mon vénérable ami!

Dirent-ils tout haut; mais tout bas:-Adieu , assassin à robe grise! je

retrouverai l’oreille du Cardinal en ton

absence.- Adieu , scélérat à robe rouge: va

détruire toi-même ta famille maudite;

achève de répandre ton sang dans lesautres, ce qui en restera en toi, je m’encharge... Je pars à présent. Voilà une

nuit bien remplie!

un DU DEUXIÈME VOLUME.

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CINQ-MmeV A me gonflemîàïlon

sons Loursmmg I

PAR LE CWTK’

41.11.21) rififi-vzèanjsraïï

muattièmr ÏAvenants D’UNE ménager on:

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CHARLES GOSSELIN ’,i LIBRAIRE.

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l il 1829.e on fluctuassent; ne magnums". Ï

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