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15 2. L’EROSION DES BERGES : Phénomènes, mécanismes… Après avoir étudié le rôle de la ripisylve nous allons nous intéresser à la partie du système fluvial qui enregistre les modifications géométriques d’un cours d’eau, en l’occurrence les berges. En effet, de par sa situation de zone tampon entre le milieu aquatique et le milieu terrestre la berge est soumise à de fortes sollicitations. Les épisodes de crue engendrent des processus d’érosion qui modèlent les paysages fluviaux et peuvent représenter une menace pour la pérennité des infrastructures riveraines. Le fonctionnement d’un cours d’eau s’appuie sur un équilibre relatif entre les flux solides et les flux liquides, le déséquilibre d’un de ces paramètres va entraîner un réajustement de la géométrie du cours d’eau. Ces ajustements morphologiques se caractérisent notamment par un enfoncement du lit de la rivière et/ou par le sapement des berges. Les hommes ont de tout temps cherché à contrôler la dynamique des hydrosystèmes pour de multiples raisons telles que l’extension des terres cultivables ou la protection contre le risque d’inondation. Ces aménagements sont en partie responsables de nombreux désordres sur les marges des espaces aquatiques. Parmi les moyens d’intervention le génie végétal représente une alternative à la gestion de ces milieux. Les techniques du génie végétal constituent une solution efficace pour résoudre les problèmes d’érosion latérale qui permettent non seulement de stabiliser les berges mais également de maintenir et de favoriser le développement des écosystèmes aquatiques. Figure n° 7 : Erosion d’une berge ( Rivière Dulais, Royaume-Uni)

2. L’EROSION DES BERGES : Phénomènes, … · 2013-11-13 · types de profils de cours d’eau en fonction de différentes variables. 19 ... (courbes des rivières, piles et culées

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2. L’EROSION DES BERGES : Phénomènes, mécanismes…

Après avoir étudié le rôle de la ripisylve nous allons nous intéresser à la partie du système fluvial qui enregistre les modifications géométriques d’un cours d’eau, en l’occurrence les berges. En effet, de par sa situation de zone tampon entre le milieu aquatique et le milieu terrestre la berge est soumise à de fortes sollicitations. Les épisodes de crue engendrent des processus d’érosion qui modèlent les paysages fluviaux et peuvent représenter une menace pour la pérennité des infrastructures riveraines. Le fonctionnement d’un cours d’eau s’appuie sur un équilibre relatif entre les flux solides et les flux liquides, le déséquilibre d’un de ces paramètres va entraîner un réajustement de la géométrie du cours d’eau. Ces ajustements morphologiques se caractérisent notamment par un enfoncement du lit de la rivière et/ou par le sapement des berges. Les hommes ont de tout temps cherché à contrôler la dynamique des hydrosystèmes pour de multiples raisons telles que l’extension des terres cultivables ou la protection contre le risque d’inondation. Ces aménagements sont en partie responsables de nombreux désordres sur les marges des espaces aquatiques. Parmi les moyens d’intervention le génie végétal représente une alternative à la gestion de ces milieux. Les techniques du génie végétal constituent une solution efficace pour résoudre les problèmes d’érosion latérale qui permettent non seulement de stabiliser les berges mais également de maintenir et de favoriser le développement des écosystèmes aquatiques.

Figure n° 7 : Erosion d’une berge ( Rivière Dulais, Royaume-Uni)

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Définie comme un écotone, puisqu’elle représente une zone de transition entre le milieu aquatique et le milieu terrestre, la berge est caractérisée par une grande richesse biologique et occupe tout un ensemble de fonctions paysagères et touristiques. Il sera question dans un premier temps d’évoquer les différentes fonctions assurées par la berge tant sur le plan écologique que social. Par la suite, nous tâcherons de présenter le fonctionnement morphologique des cours d’eau et les mécanismes qui conditionnent l’évolution de ces milieux.

• Eléments de définition et rôle de la berge :

La berge peut être abordée de différentes manières : d’un point de vue juridique, morphologique, biologique et paysager. Ces différents points ne sont pas classés selon leur importance, qui peut varier d'une situation à l'autre.

Définition morphologique :

Gisèle Verniers (1995) définit la berge comme « une portion de terrain qui limite tout cours d’eau ». C’est effectivement une zone de séparation entre le milieu aquatique et le milieu terrestre. La berge peut être divisée en deux parties :

- le pied de talus « qui est la zone soumise à l’action quasi permanente du courant et qui se situe sous le niveau moyen des eaux »

- le talus qui se situe au dessus du niveau moyen des eaux.

Fig. n° 8 : La berge : zone de transition (G. Verniers, 1995)

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On peut également envisager de définir la berge comme l’élément de séparation entre le lit mineur et le lit majeur d’un cours d’eau. Dans ce cas de figure, le lit mineur est considéré comme « l’espace fluvial, formé d’un chenal unique ou de chenaux multiples et de bancs de galets recouvert par les eaux coulant à plein bord avant débordement » (S. Dufour, 2004).

Définition d’un point de vue biologique :

Les berges peuvent être définies comme des écotones, autrement dit la berge représente une zone de transition entre deux écosystèmes que sont le milieu aquatique et le milieu terrestre. Cette situation de transition offre une large palette de microhabitats qui favorisent la diversité et la densité des espèces animales et végétales (G. Verniers, 1995). Ce milieu riche d’un point de vue biologique représente une zone de refuge pour l’avifaune et les espèces aquatiques comme le martin pêcheur ou l’écrevisse. La berge assure également une fonction d’échange. Par le terme d’échange, on entend le déplacement d’énergie et de matière mis en mouvement par diverses forces : flux hydriques, flux biotiques (organismes vivants), flux de matières organiques et minérales (dissoutes et particulaires) (CETMEF, 2000). Il est possible d’évoquer ici les échanges hydrauliques qui s’effectuent entre le cours d’eau et la nappe d’accompagnement ou encore les échanges qui s’opèrent pour l’alimentation hydrique du système radiculaire des végétaux présents sur la berge. La fonction de support signifie que la berge offre un sol qui va permettre l’implantation et le développement d’une ripisylve. Celle-ci offre également une large palette d’habitats et assure tout un ensemble de fonctions écologiques et biologiques telles que la protection contre le rayonnement solaire. De par son ombrage la végétation régule la température de l’eau et réduit le risque d’eutrophisation du milieu. Les berges d’une rivière participent à l’auto épuration des cours d’eau en jouant un rôle de filtre vis à vis des polluants et améliorent ainsi leur qualité.

Définition d’un point de vue paysager :

Les cours d’eau sont associés à des valeurs de qualité et la berge est un élément sensible du paysage car c’est une zone de transition entre l’eau et la rive. Pour définir et évaluer la qualité paysagère d’une berge, Gisèle Verniers (1995) propose plusieurs critères :

- la hauteur de berge : une hauteur de berge réduite offre une plus grande qualité paysagère puisque le contact visuel et l’accessibilité à l’eau sont favorisés. Au-delà de deux mètres la relation directe avec l’eau s’amenuise,

- la pente de la berge : l’idée est identique à la précédente, il s’agit de définir un accès à

la rivière en fonction de la pente. Une pente faible permettra un accès plus facile et de ce fait un contact avec l’eau accru,

- le degré d’artificialisation, - la diversité longitudinale : on traite ici de la diversité des situations rencontrées le long

d’une berge ; variations de la hauteur et de la pente de la berge, sinuosité du tracé en plan, diversité des formations végétales … Plus les situations seront variées plus la valeur écologique et paysagère sera grande.

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• Les mécanismes d’érosion des berges :

Dans cette partie, il sera question d’expliquer les processus qui interviennent dans l’évolution morphologique des cours d’eau. Après avoir présenté le fonctionnement physique des espaces fluviaux nous verrons les facteurs qui favorisent les processus d’érosion à l’échelle du bassin versant et du chenal. Nous définirons l’érosion comme étant la déstructuration de surface par arrachement et déplacement des particules d'un sol ou d'une roche sous l'action d'un agent extérieur naturel (eau, air, froid, chaleur, hygrométrie, gel, sécheresse…). Le tracé en plan et le profil en long d’un cours d’eau sont définis par un jeu complexe de processus-réponses entre deux types de variables que sont les variables de contrôle et les variables de réponse. Variables de contrôle :

- majeures : débit liquide et débit solide, - secondaires : géométrie de la vallée.

Variables de réponse :

- pente, - largeur,

- profondeur,

- granulométrie,

- sinuosité,

- vitesse du courant …

En fonction de l’équilibre entre les variables de contrôle et les variables de réponse, le tracé en plan d’un cours d’eau va évoluer. Une forte charge de fond va favoriser un tracé plutôt rectiligne composé de chenaux multiples. Ce style fluvial appelé tressage tend à disparaître au profit de lits fluviaux méandriformes qui caractérisent des apports sédimentaires faibles et une pente faible.

Figure n° 9 : La classification de Rust (1978) donne les types de profils de cours

d’eau en fonction de différentes variables.

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Les types et facteurs d’érosion

On peut recenser cinq types d’érosion : - l'érosion pluviale, - l'érosion fluviale, - l'érosion maritime, - l'érosion éolienne, - les érosions anthropiques. Les berges peuvent donc subir jusqu’à quatre types d’érosion, pluviale, fluviale ou maritime, éolienne et anthropique. Bien que chacun de ces types d’érosion puisse exercer des contraintes importantes sur les berges, celles ayant généralement l’action la plus importante restent les érosions fluviale ou maritime. Les problèmes d'érosion fluviale concernent à la fois, avec des sollicitations sensiblement différentes, les voies navigables et les cours d'eau naturels, ainsi que les plans d’eau.

- L’érosion fluviale : Dans le cas des cours d'eau naturels, l'érosion des berges est due : - au courant naturel, - aux variations du niveau d'eau (crue-décrue), - aux vagues de vent, - à des interventions humaines (dragage, calibrage, endigage, rescindement de méandre…). La présence de points singuliers (courbes des rivières, piles et culées de ponts, seuils et barrages, ...) est susceptible d'accentuer ces phénomènes.

Vagues

Batillage

Marées

Marnage

Courants

Jet d’hélice

EA

U

SO

L

Texture Composition

chimique Structure

Eta

t de

surf

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Couvert végétal Matière

organique

Taux

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couv

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re

Section

Pente

G

éom

étri

e

M

odifi

catio

n de

rug

osité

Vitesse

Turbulences

EROSION

Figure n° 10 : Cycle de l’érosion fluviale et maritime

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Dans le cas des voies navigables, la circulation des bateaux à travers les phénomènes : - d'abaissement instantané du plan d'eau, - de création de vagues, - de création d'un courant de retour, sollicite principalement les berges dans des zones localisées de part et d'autre du plan d'eau. Dans le cas des cours d'eau navigués, les phénomènes se superposent. Sur les plans d’eau, qu’il s’agisse de retenues artificielles, de lacs ou d’étangs, l’érosion est essentiellement due : - au marnage, - aux vagues de vent, - au batillage généré par la pratique des sports nautiques motorisés. Les techniques de lutte contre l’érosion fluviale doivent s’attacher à améliorer ou modifier ces éléments pour limiter l’action de l’eau. Le choix d'un type de protection de berges est en premier lieu conditionné par la fonction à remplir par le dispositif et l'intensité des sollicitations développées plus avant. On retient habituellement trois principales fonctions : - protection contre l'érosion et soutènement, - protection contre l'érosion et étanchéité, - protection contre l'érosion uniquement. - OBJET DU GUIDE Pour assurer ces fonctions, il existe une multitude de systèmes à base de géotextiles coco ou jute, de géomats ou géogrilles tridimensionnelles, de bionattes, de rideaux de palplanches, d'enrochements libres ou liaisonnés, de blocs de béton, de matelas de gabions, de systèmes bitumineux, de conteneurs textiles,... remplissant tout ou partie des différentes fonctions.

- L’érosion maritime : L’érosion maritime concerne le littoral naturel et aménagé. L’ attention du lecteur est attirée sur l’interaction forte qui existe entre les ouvrages portuaires et les parties de littoral naturel qui les entourent, ainsi que sur la nécessité d’intégrer les composantes spatiale et temporelle de l’érosion dans l’étude et la conception de ces ouvrages. En plus de la détermination des sollicitations hydrodynamiques et des reconnaissances géotechniques, elles nécessitent notamment la réalisation de relevés bathymétriques et topographiques généraux et de détails saisonniers des petits fonds et de l’estran, voire la réalisation d’études spécifiques sur modèles numériques ou physiques. La conception des ouvrages intègre généralement la mise en place de dispositifs anti-affouillement. Le littoral que nous considérerons est donc un milieu naturel, éventuellement protégé, assurant la transition entre des espaces terrestres et marins. Cette particularité fait que les facteurs naturels de l'érosion du littoral sont principalement les actions d’origines continentale et marine, et accessoirement les actions chimiques et biologiques. S’y ajoutent le cas échéant les effets des interventions ou actions humaines.

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De manière générale, les principaux points à considérer sont : les actions continentales ou météoriques : Ces actions sont surtout effectives sur les littoraux constitués de falaises de roches meubles ou de sols sableux. Elles déplacent les matériaux ou modifient leurs caractéristiques physiques ou géotechniques. - les apports fluviaux : Les fleuves côtiers alimentent par leurs débits solides le littoral en sédiments, principalement lors des crues. Ces apports solides influent sur le transport littoral et conditionnent la position des embouchures. - les eaux de ruissellement : Leur rôle est particulièrement important dans les formations sensibles à l’eau, telles les argiles et les sables fins. Des apports concentrés au niveau d’exutoires pluviaux ou de dispositifs de drainage sous-dimensionnés ou inadaptés contribuent à une augmentation des pressions interstitielles défavorables à la stabilité des ouvrages de protection contre l’érosion. - les eaux d'infiltration : L'écoulement des eaux d'infiltration favorise l'élargissement des fissures qu'elles parcourent et concoure à une augmentation de la piézométrie. - les effets thermiques : Seuls ou conjugués à des phénomènes de ruissellement ou d’infiltration, le gel, la chaleur, l’alternance de phases climatiques sèches et humides modifient le comportement de certaines roches tendres, fissurées ou poreuses (argiles, marnes, calcaires,...). Il en résulte des gonflements ou des éclatements de ces matériaux qui deviennent d’autant moins résistants à l’action des facteurs érosifs. - le vent : L'importance des formations dunaires sur le littoral souligne le rôle du vent dans les transports de matériaux sableux (voir les parties sur l’érosion éolienne). Le vent transporte le sable sur l’estran et déplace ou bâtit les dunes. Il peut également pousser le sable à la mer ou dans les lagunes. Les actions marines : - l'action des vagues : Les vagues de houle sont l'agent d'érosion le plus important. Sur le littoral meuble, elles provoquent un remaniement constant des fonds et du rivage en générant des mouvements

Figure n° 11 : Les mécanismes de l’érosion littorale

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des sédiments perpendiculaires au rivage (mouvements dans le profil de plage) et des mouvements sensiblement parallèles à celui-ci (transit littoral). Sur les côtes à falaises, elles provoquent la désagrégation des roches par des chocs mécaniques et dispersent les éboulis qui assuraient la protection des pieds de falaises.

- l'action des courants : Les courants, principalement ceux de houle et avec une importance moindre les courants généraux, ont surtout une action sur les petits fonds et sur l'estran. Ils déplacent les matériaux par charriage ou saltation. - les variations du niveau marin : Qu’elles soient liées à la marée ou à des phénomènes venteux persistants ou dépressionnaires marqués, les variations de niveau déplacent et étendent la zone d’action des houles, des courants et du vent. Elles modifient alors les paramètres et conditions de dimensionnement des ouvrages. Elles génèrent des phénomènes de circulation interne d’eau dans l’estran et à l’arrière des ouvrages de protection. Elles accentuent lors des tempêtes les risques littoraux d’érosion, de submersion et de choc mécanique sur les terrains, bâtiments et infrastructures proches du rivage. Les actions chimiques : Elles sont essentiellement des phénomènes de dissolution dans les roches calcaires dues aux eaux atmosphériques (sur les falaises) et marines (sur les platiers). Les actions biologiques : Elles sont dues aux actions des végétaux (surtout les algues) et des animaux (patelles, balanes, pholades). Les actions biologiques sont les plus importantes sur le platier rocheux. Les techniques de lutte contre l'érosion maritime doivent s'attacher à connaître, déplacer ou modifier ces éléments pour limiter leurs actions. En outre, très tôt, l’homme a senti le besoin de maîtriser les cours d’eau non seulement pour se protéger des risques potentiels engendrés par la dynamique des rivières mais également pour gagner du terrain et favoriser le développement des activités socio-économiques. Toutefois, il ne faut pas pour autant négliger les éventuelles problématiques causées par des

Figure n° 12 : Les différents types de vague et la répartition des contraintes sur la pente

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érosions « naturelles » bien qu’aujourd’hui l’impact de l’homme soit tel qu’il est généralement lié de près ou de loin à l’activité érosive des cours d’eau. On peut distinguer deux grands types d’interventions : celles opérées à l’échelle du bassin versant et les aménagements effectués à l’échelle du chenal d’écoulement. Parmi les interventions à l’échelle du bassin versant on recense :

- les travaux effectués dans le cadre de la politique de Restauration des Terrains de Montagnes (RTM) sur de nombreux bassins versants montagneux,

- le reboisement spontané lié à la déprise rurale, - les changements hydrologiques.

A l’échelle du cours d’eau les principaux facteurs intervenant sont :

- mise en place d’ouvrages transversaux, - extraction de granulats, - endiguement, - réduction du lit majeur, - batillage. • Les apports des techniques végétales (génie végétal et bio-ingénierie) :

Le génie végétal ou la bio-ingénierie font appel à l'utilisation des végétaux de strates et espèces très diversifiées avec pour objectif de réparer les désordres. La bio-ingénierie s'inspire des processus naturels de colonisation des milieux par la végétation. Le génie végétal recourt aussi aux apports de la société moderne : géotextiles, géofilets coco, fascines et géonattes pré-végétalisées, engins de terrassement ou de battage … Le génie végétal apparaît comme une solution aux problèmes d'érosion des berges à la fois rapide (par exemple par l’utilisation de boudins de coco pré-végétalisés immédiatement opérationnels), faciles à mettre en œuvre, économique (pas ou peu d’entretien nécessaire), durables (stabilisation assurée par le système racinaire des plantes) et efficace. Quelles que soient les techniques envisagées et afin de répondre au mieux à la problématique de tel ou tel site, il est indispensable de se poser les questions suivantes :

- quelles sont les causes de l'érosion ? - l'érosion est-elle réellement dommageable ?

- quel est l’objectif à atteindre ?

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- quelles sont les contraintes du site?

Figures n° 14 a et b : Erosion menaçant un chemin piéton

Figures n° 13 a et b : Erosion et dépôt dus à l’activité d’un cours d’eau en zone de prairie, Angleterre

Il faut dans ce cas se poser la question de la nécessité de l’intervention. L’érosion n’entraînant pas de danger apparent, il peut être judicieux de laisser le cours d’eau dissiper son énergie dans ces zones.

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Dans le cas précédent, les érosions menacent directement le chemin piéton et présentent un risque pour les promeneurs. Bien que le recul sur le talus soit restreint, il est possible par l’utilisation de techniques végétales adaptées d’agir sur le pied de berge mais aussi sur le talus.

- quelles actions permettent de résoudre ou atténuer les dommages ?

- quelles sont les techniques les plus bénéfiques pour le milieu ? - le coût des actions est-il à la hauteur des enjeux ?

- quelles conséquences auront les ouvrages sur le fonctionnement global du cours

d'eau ?

Choisir des techniques végétales, ou des techniques mixtes (génie civil et génie végétal collaborant à un même but) c'est avant tout être persuadé de l'intérêt de la présence de végétation sur les berges des cours d'eau.

Figure n° 15 : Protection par mise en place de boudins coco végétalisés en pied de berge et de géonattes végétalisées sur le talus

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Répondant à des problèmes techniques, le génie végétal apporte des réponses qui vont au-delà des questions posées par les érosions puisque ce sont des zones stratégiques qui sont recréées :

• régulation des écoulements • stabilisation des sols • contribution à l'amélioration de la qualité de l'eau • préservation de la ressource en eau • restauration de milieux naturels, biotopes • maintien ou restauration des paysages • stockage de CO2 • embellissement des abords • production de bois • ouvrages vivants

Les services rendus sont donc d'ordre technique, environnemental et économique. Par ailleurs, ces techniques apportent un plus social car elles font appel à une main-d'œuvre souvent peu qualifiée, en quantité parfois importante puisqu'elle peut représenter la moitié du coût des aménagements. L’entretien des cours d’eau et des espaces naturels devient un des enjeux majeurs de notre environnement. Utilisant des matériaux vivants, la bio-ingénierie s'inscrit parfaitement dans la logique du développement durable. Le taux et l'amplitude de cette érosion hydrique dépendent donc des facteurs suivants : L'intensité des précipitations et le ruissellement : L'impact des gouttes de pluie ou battance peut briser les agrégats et disperser les particules de sol. Les particules les plus fines, comme les sables fins, limons, argiles et la matière organique, peuvent facilement être emportées lors de l'éclaboussement des gouttes (« effet splash ») et par le ruissellement; des gouttes de pluie plus fortes (dissipant plus d'énergie) et un plus grand ruissellement seront nécessaires pour déplacer les plus grosses particules de sable et gravier.

Figure n° 16 : Le mécanisme de l’érosion pluviale

27

Ce phénomène est habituellement le plus fort lors d'orages de courte durée et de grande intensité. Même si l'érosion causée par des pluies de faible intensité et de longue durée n'est pas aussi spectaculaire ni aussi visible que celle produite par les orages, la perte de sol occasionnée peut être significative après un certain temps. Le ruissellement se produit lorsque l'eau sur une pente ne peut pas s'infiltrer assez vite dans le sol ou être interceptée par des obstacles naturels. Le taux de ruissellement est souvent accru si l'infiltration est diminuée par la compaction, la formation d'une croûte ou le gel. Le ruissellement sur les terres agricoles est à son maximum au printemps, alors que les sols sont souvent saturés, que la neige fond et que le couvert végétal est à son minimum.

La susceptibilité à l'érosion : La susceptibilité à l'érosion est une estimation de la capacité de chaque sol à résister à l'érosion, basée sur ses caractéristiques physiques. Les sables, loams et autres sols loameux tendent à s'éroder moins que les limons, sables très fins et certains sols argileux. Le travail du sol et les façons culturales qui tendent à abaisser la teneur du sol en matière organique, à dégrader la structure du sol et à le compacter, contribuent à augmenter la susceptibilité du sol à l'érosion.

battance

ruissellement

PLUIE

texture

composition chimique

structure

matière organique

inclinaison

longueur

intensité et vent

durée, fréquence

E

tat d

e su

rfac

e

C

ouve

rt

végé

tal

To

pogr

aphi

e

Clim

at

Erodabilité

Erosivité

EROSION

Figure n° 17 : Le cycle de l’érosion pluviale

28

Une couche de sol compactée peut aussi réduire l'infiltration et augmenter le ruissellement. La réduction de l'infiltration peut aussi être causée par la formation d'une croûte qui tend à sceller la surface. L'érosion antérieure a aussi un effet sur la susceptibilité à l'érosion, et cela pour plusieurs raisons. Le sol exposé sur des sites érodés tend à être plus facilement dégradable que le sol originale, à cause de sa structure détériorée et de sa teneur en matière organique réduite. Le sous-sol, ayant une fertilité amoindrie, est souvent la cause de rendements inférieurs donc d'un couvert végétal moins dense, ce qui conduit à une surface moins bien protégée. Bien que tout projet d’ingénierie nécessite une étude géotechnique qui définira précisément les caractéristiques du sol, on peut retenir à titre indicatif quelques paramètres généraux :

Vitesses critiques d’érosion sur sol humide

Granulométrie Cohésion

Angle de frottement interne

Module d’Young Perméabilité

sol nu sol engazonné

Argile compacte d < 2�m 15 à 25 kPa 20 à 25° 7 à 18 Mpa < 10 –9 m/s 1.2 m/s 2.5 m/s

Silt 2�m<d<0. 2�m 0 34° 7 à 18 Mpa < 10-7 m/s 0.6 m/s 1.5 m/s Sable fin 0.02�m<d<0.22�m 0 30 à 40° 7 à 20 Mpa ~ 10-5 m/s 0.3 m/s 0.3 m/s

Sable grossier 0.2mm<d<20mm 0 30 à 38° 10 à 25 Mpa 1.10-5 m/s à

1.10-4 m/s 0.45 m/s 1.7 m/s

Gravier 2mm<d<20mm 0 40° 50 à 100 Mpa 1.10-3 m/s à 0.1 m/s 0.7 m/s -

Cailloux 20mm<d<200mm 0 45° 100 à 200 Mpa 1.10-2 m/s à 1m/s 1.2 m/s -

Enroche- ments

200mm<d 0 > 45° 100 à 200 Mpa >0.1 m/s > 1.2 m/s -

Les valeurs à affecter à ces paramètres ne seront pas identiques selon que le sol sera saturé ou non.

Tableau n° 1 : Paramètres usuels des différents types de sols

Figures n° 18 a et b : Exemples

d’érosion d’un talus et d’une

berge

29

Le gradient et la longueur de la pente : Plus la pente est raide, plus l'eau érodera le sol. L'érosion hydrique augmente aussi avec la longueur de la pente à cause de l'augmentation du ruissellement. La fusion de petits champs pour en faire de plus grands a généralement comme conséquence d'allonger les pentes, d'augmenter les risques d'érosion par l'augmentation de la vitesse de l'eau, occasionnant un plus grand lessivage (capacité de transport des sédiments). Présence de végétation : Le risque d'érosion augmente lorsque le sol n'a qu'un faible couvert végétal. Les résidus et la végétation qui protègent le sol de l'impact des gouttes de pluie et de l’éclaboussement, tendent à ralentir la vitesse de l'eau de ruissellement et permettent une meilleure infiltration. L'efficacité du couvert de végétation à réduire l'érosion dépend du type, de l'étendue et de la densité du couvert végétal. La végétation et les résidus combinés, couvrant complètement le sol, interceptent la pluie et sont le moyen le plus efficace pour réduire les pertes de sol (forêts et pâturages permanents). Les résidus partiellement incorporés et leurs racines ont aussi leur importance, parce qu'ils facilitent l'infiltration. La capacité à maîtriser l'érosion de toute culture, de façon culturale ou par couvert végétal dépend aussi de la protection disponible à diverses périodes de l'année en relation avec la quantité de précipitation à caractère érosif durant ces périodes. A cet égard, les plantes qui assurent un bon couvert végétal durant la majeure partie de l'année (luzerne et cultures hivernales), maîtrisent mieux l'érosion que les cultures qui laissent le sol nu durant une longue période (cultures en rangs), particulièrement pendant les périodes de précipitations très érosives (printemps et début de l'été). Toutefois, la majeure partie de l'érosion sur les cultures annuelles en rangs peut être atténuée en laissant un couvert de résidus d'au moins 30 % après la récolte et pendant les mois d'hiver, ou en semant une plante fourragère (trèfle rouge). Les opérations culturales ont un effet sur les risques d'érosion du sol. Ceci comprend la profondeur, la direction et la période de labour, le type d'équipement utilisé et le nombre de passages. Généralement, on considère que le travail du sol limite l'érosion s'il dérange le moins possible la végétation ou les résidus de surface. En résumé on peut dire que l’érosion est étroitement liée à la nature même des matériaux constituant la berge, leur granulométrie, leur cohésion, leur homogénéité, ainsi qu’aux caractéristiques physiques du talus, et aux conditions du site (intensité et occurrence des précipitations, exposition aux courants, aux vents, pratiques culturales…). On peut dès lors distinguer plusieurs mécanismes d’érosion des berges, selon la nature de celle-ci, son inclinaison… Les croquis ci-après récapitulent pour des sols cohésifs ou non cohésifs, les modes de rupture, types de glissements, mécanismes de chute des blocs…

30

A1 : Glissement superficiel A2 : Plan de rupture B1 : Petite zone de rupture et de rotation des matériaux B2 : Grande zone de rupture et de rotation

des matériaux C1 : Chute de blocs C2: Rupture et glissement des matériaux D1 et D2 : Rupture dans le talus composé de matériaux non homogènes

A

B

D

1 2

1 2

1 2

C

1 2

Figure n° 19 : Modèles et caractéristiques des ruptures de berge dues à l’érosion

31

Figure n° 15 : Mécanismes érosifs selon les matériaux constitutifs du talus

Figure n° 16 : Variation du niveau d’eau et érosion de la berge

Figure n° 20 : Mécanismes érosifs selon les matériaux constitutifs du talus

Figure n° 21 : Variation du niveau d’eau et érosion de la berge