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La Lettre de l’Immobilier Dossier Les partenariats public- privé immobiliers Le contrat de partenariat : une for- mule contractuelle intéressante pour l’immobilier public Focus Brève présentation du projet de loi relatif aux contrats de partenariat, par Christine Maugüé, conseiller d’Etat Interview Le traitement comptable et fiscal du titulaire d’un PPP La TVA dans les contrats de partenariat : un aspect à ne pas oublier Les contrats de partenariat et la fiscalité locale Le refinancement des titulaires de contrats : une réforme inutile ? Le contrat de partenariat : un schéma qui n’échappe pas à la problématique des ententes entre soumissionnaires La société de projet : utilité et gouvernance Actualité - France Profits de réévaluation libre d’actifs, profits immobiliers d’organismes à but non lucratif étran- gers : quelques précisions Droit de préemption sur les fonds de commerce : le décret était-il nécessaire ? Crédit-bail immobilier et TVA Dépollution d’un site industriel Éditorial e 1 er octobre 2007, le Président de la République a demandé au Premier ministre d’examiner un plan de stimulation des partenariats public-privé («PPP»), conçus comme un levier important de l’investissement public et de la réforme de l’Etat. L’expression «partenariats public-privé» ou «PPP» renvoie aux modèles anglo-saxon et communautaire des «public-private partnerships» au champ d’application notablement plus étendu. Ainsi, au niveau communautaire, les «PPP» couvrent, outre des formules contractuelles qui, en droit français, incluraient la délégation de service public (DSP), des formes organiques, comme les sociétés d’économie mixte ou les groupements d’intérêt public (dits partenariats public- privé «institutionnels» ou «PPPI»). En France, la pratique dénomme contrat de «partenariat public-privé» le nouveau type de contrat administratif créé par une ordonnance du 17 juin 2004 et intitulé – un peu maladroitement compte tenu de l’usage commun de ce terme – «contrat de partenariat». Mais sous ce vocable sont également visés certains montages précurseurs : les baux emphytéotiques administratifs et leurs déclinaisons, les baux emphytéotiques «hospitaliers», les baux spécifiques autorisés temporairement par les lois LOPSI-LOPJ dans les domaines de la justice, de la sécurité intérieure et de la défense. Ces différentes formes de PPP sont toutes des contrats administratifs globaux de longue durée, mettant à la charge d’un cocontractant le financement d’un investissement, sa réalisation et son fonctionnement technique. Le cocontractant est rémunéré par l’administration et non par l’usager du service public, à la différence de la plupart des DSP. Pour le Conseil constitutionnel, le contrat de partenariat est nécessairement un contrat «dérogatoire au droit commun de la commande publique» (Cons. const., 26 juin 2003), c’est ce qui explique qu’il ait été, à l’origine, réservé aux seules situations de complexité ou d’urgence. La réforme législative de l’ordonnance, en cours d’adoption, vise à desserrer cette contrainte, d’une part, par l’ajout d’une nouvelle possibilité (souvent désignée sous le terme de «troisième critère»), l’efficience démontrée du contrat de partenariat, d’autre part, en ouvrant la possibilité de recourir au contrat de partenariat dans un certain nombre de secteurs prioritaires pour lesquels le critère d’urgence est présumé rempli. Cette réforme vise également à améliorer sensiblement le dispositif existant, notamment en matière de fiscalité. L’ouverture prochaine des PPP à de nouveaux secteurs, la plupart dans le domaine de l’immobilier – universités, efficacité énergétique, accessibilité des handicapés, développement durable, rénovation urbaine, etc. – mérite qu’un point de l’existant soit réalisé et que les conséquences de la réforme soient anticipées. François Tenailleau, avocat, Jean-Luc Tixier, avocat associé Supplément du numéro 986 du 23 juin 2008 23 juin 2008 L Les partenariats public-privé immobiliers

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La Lettre de l’Immobilier

DossierLes partenariats public-privé immobiliers• Le contrat de partenariat : une for-mule contractuelle intéressante pourl’immobilier public

Focus• Brève présentation du projet de loirelatif aux contrats de partenariat, parChristine Maugüé, conseiller d’Etat

Interview• Le traitement comptable et fiscal du titulaire d’un PPP

• La TVA dans les contrats de partenariat : un aspect à ne pas oublier• Les contrats de partenariat et la fiscalité locale• Le refinancement des titulaires decontrats : une réforme inutile ?• Le contrat de partenariat : un schéma qui n’échappe pas à la problématique des ententes entresoumissionnaires• La société de projet : utilité et gouvernance

Actualité - France• Profits de réévaluation libre d’actifs, profits immobiliers d’organismes à but non lucratif étran-gers : quelques précisions

• Droit de préemption sur les fonds decommerce : le décret était-il nécessaire ?• Crédit-bail immobilier et TVA• Dépollution d’un site industriel

Éditorial

e 1er octobre 2007, lePrésident de la Républiquea demandé au Premierministre d’examiner un

plan de stimulation des partenariatspublic-privé («PPP»), conçus comme unlevier important de l’investissement publicet de la réforme de l’Etat.L’expression «partenariats public-privé» ou«PPP» renvoie aux modèles anglo-saxonet communautaire des «public-privatepartnerships» au champ d’applicationnotablement plus étendu. Ainsi, au niveaucommunautaire, les «PPP» couvrent, outredes formules contractuelles qui, en droitfrançais, incluraient la délégation deservice public (DSP), des formesorganiques, comme les sociétésd’économie mixte ou les groupementsd’intérêt public (dits partenariats public-privé «institutionnels» ou «PPPI»).En France, la pratique dénomme contratde «partenariat public-privé» le nouveautype de contrat administratif créé par uneordonnance du 17 juin 2004 et intitulé –un peu maladroitement compte tenu del’usage commun de ce terme – «contrat departenariat». Mais sous ce vocable sontégalement visés certains montagesprécurseurs : les baux emphytéotiquesadministratifs et leurs déclinaisons, lesbaux emphytéotiques «hospitaliers», lesbaux spécifiques autorisés temporairementpar les lois LOPSI-LOPJ dans les domainesde la justice, de la sécurité intérieure et dela défense. Ces différentes formes de PPPsont toutes des contrats administratifsglobaux de longue durée, mettant à lacharge d’un cocontractant le financementd’un investissement, sa réalisation et son

fonctionnement technique. Lecocontractant est rémunéré parl’administration et non par l’usager duservice public, à la différence de la plupartdes DSP.Pour le Conseil constitutionnel, lecontrat de partenariat estnécessairement un contrat «dérogatoireau droit commun de la commandepublique» (Cons. const., 26 juin 2003), c’est ce qui explique qu’ilait été, à l’origine, réservé aux seulessituations de complexité ou d’urgence.La réforme législative de l’ordonnance,en cours d’adoption, vise à desserrercette contrainte, d’une part, par l’ajoutd’une nouvelle possibilité (souventdésignée sous le terme de «troisièmecritère»), l’efficience démontrée ducontrat de partenariat, d’autre part, enouvrant la possibilité de recourir aucontrat de partenariat dans un certainnombre de secteurs prioritaires pourlesquels le critère d’urgence est présumérempli. Cette réforme vise également àaméliorer sensiblement le dispositifexistant, notamment en matière defiscalité.L’ouverture prochaine des PPP à denouveaux secteurs, la plupart dans ledomaine de l’immobilier – universités,efficacité énergétique, accessibilité deshandicapés, développement durable,rénovation urbaine, etc. – mérite qu’unpoint de l’existant soit réalisé et que lesconséquences de la réforme soientanticipées. ■

François Tenailleau, avocat, Jean-Luc Tixier, avocat associé

Supplément du numéro 986 du 23 juin 2008

23 juin 2008

LLes partenariats public-privé immobiliers

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armi toutes les formes dePPP, le contrat de partenariatconstitue la formule la plusaboutie. Il est vrai qu’il

existe d’autres formes de PPP à objetspécifiquement immobilier : bauxemphytéotiques administratifs («BEA»),baux emphytéotiques administratifs«hospitaliers» («BEH»), autorisationsd’occupation temporaire du domainepublic combinées avec une location avecoption d’achat («AOT-LOA» : bauxspécifiques autorisés par les lois LOPSI-LOPJ dans le domaine de la justice, de lasécurité intérieure et de la défense). Cesformules ne sont toutefois utilisables quedans le seul domaine de la construction etde la gestion de bâtiments, sans adjonctionpossible d’autres prestations. Le contrat departenariat, qui bénéficie des atouts quel’on peut attendre de ces formules déjàpoussées d’externalisation immobilière,présente bien d’autres avantages qu’ilconvient de présenter.

1. Une approche globale de la vie de l’immeuble et la possibilité d’externalisation de fonctions complémentairesLe «droit commun de la commandepublique», tel que le dessine la décision duConseil constitutionnel du 26 juin 2003,repose sur une maîtrise d’ouvrage et unfinancement publics (budgétaire ou paremprunt) et sur la séparation des fonctionsde conception, de construction et demaintenance des immeubles destinés àl’administration. Ces fonctions donnent lieuà des marchés publics séparés. Cetémiettement a été renforcé par le Code desmarchés publics adopté en 2006, qui fait dela division en lots des marchés le principe.

A la différence de cette solution demaîtrise d’ouvrage publique («MOP»), lecontrat de partenariat, comme les autresformules de PPP évoquées ci-dessus,permet de confier à un mêmecocontractant, sous sa maîtrise d’ouvrage :la conception (en tout ou partie), laconstruction, et l’entretien-maintenanced’un bien immobilier, ainsi que sonfinancement. Ce faisant, l’immeuble estconçu et réalisé par le cocontractant pourtenir compte de son entretien et de samaintenance. Les relations, parfoisconflictuelles, entre les acteursresponsables des différentes phases – les«interfaces» – sont internalisées :l’administration est face à un seulresponsable, le titulaire du contrat departenariat. Celui-ci est sanctionné en casde manquement par des pénalités deretard, de non-disponibilité ou de non-performance. Il est également sous lacontrainte des banques finançantl’investissement, qui vérifient en amont lacrédibilité du montage et sa solidité.L’efficacité et la qualité sur le long terme ygagnent indubitablement.La soumission des contrats de partenariat àune évaluation préalable obligatoirecontribue également à une améliorationglobale de la qualité des investissementspublics immobiliers sur le long terme. Eneffet, la passation d’un contrat departenariat donne lieu à la rédaction d’unrapport, qui doit notamment présenter uneanalyse comparative de différentes options(notamment la «MOP»), en termes de coûtglobal, de performance et de partage desrisques. Partant, ce qui est rarement le cassinon, l’administration est amenée àraisonner en coûts complets (constructionet maintenance), mais également à évaluerles coûts cachés (retard, interface…).

DOSSIER - Les partenariats public-privé immobiliers

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Le contrat de partenariat : une formule contractuelle intéressantepour l’immobilier public

PPar FRANCOIS TENAILLEAU,avocat. Il est en charge dudéveloppement des PPP etdes contrats publics au seinde CMS Bureau FrancisLefebvre.Il est membre du Centre d’expertise et d’observationdes partenariats public-privé(CEFO-PPP). Il est chargéd’enseignement au master IId’Ingénierie immobilière(Paris X – Nanterre). Il estl’auteur d’un fascicule aujurisclasseur (collectivités ter-ritoriales) sur les contrats departenariat public-privé[email protected]

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DOSSIER - Les partenariats public-privé immobiliers

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Le contrat de partenariat permet d’aller plusloin que les autres formules de PPPimmobiliers dans la logiqued’externalisation en donnant àl’administration la possibilité de serecentrer sur le cœur de ses fonctions.L’exemple des différents «lots» de prisonsréalisés en PPP est à cet égardparticulièrement significatif. Alors que lesdeux premiers lots, passés sous formesd’AOT-LOA, ont été limités à la fonctionimmobilière, le troisième lot a donné lieu àla conclusion d’un contrat de partenariat, le20 février 2008, portant également sur lesprestations de services suivantes : travaildes détenus, formation professionnelle,restauration des détenus, hôtellerie, cantine,transport, accueil des familles etrestauration du personnel. Certaines de cesprestations autorisent la perception derecettes tierces.

2. La possibilité de recettestierces pour le titulaire ducontrat de partenariatLe titulaire d’un contrat de partenariat esten principe rémunéré par l’administration :remboursement de l’investissement initial(généralement désigné comme la

composante «L1» dela rémunération),rémunérationcorrespondant à laréalisation du grosentretien etrenouvellement(«L2» : les sommesperçues alimentantun compte deprovision),rémunération del’entretien courant(«L3») et desdifférentesprestations de

services («L4», «L5», etc.). Mais le titulaired’un contrat de partenariat peut égalementse procurer des recettes «tierces» issues del’exploitation alternative de l’ouvragepublic ou de la valorisation du domainepublic ou privé : c’est un atout décisif.Dans sa version actuelle, l’ordonnance surles contrats de partenariat autorise

expressément le titulaire du contrat àpercevoir des recettes tirées del’exploitation des équipements à d’autresfins que la satisfaction des besoins de lacollectivité publique. Par exemple, si lecontrat de partenariat a pour objet laconstruction d’un grand ensemble sportif,des espaces peuvent être réservés à desentreprises, pour y réaliser des standsd’exposition de leurs produits. De même sile contrat a pour support un musée, lepartenaire privé peut être autorisé à louerles salles afin d’accueillir les manifestationsde prestige d’entreprises privées. Cesutilisations alternatives du bien permettentde dégager des recettes qui viennent endiminution de la rémunération versée parl’administration. On notera qu’une réponseministérielle estime que l’ordonnance nedonnant pas d’indication sur les partsrespectives de la rémunération versée par lecocontractant et des recettes propres, il n’ya pas de raison de considérer que la part derecettes propres ne peut excéder un seuildonné (rép. à quest. écrite n° 22017 de M. Bernard Piras : JO Sénat Q 8 mai 2006, p. 1385). La loi en cours d’adoptionréformant l’ordonnance du 17 juin 2004, parsouci de clarification, ajoute la possibilité depercevoir des recettes de valorisation dudomaine (baux qui peuvent aller au-delà dela durée du contrat de partenariat ou mêmecessions du domaine privé). Le nouveautexte sécurisera ainsi les montages reposantsur la valorisation des espaces annexes àl’équipement public, comme ce fut le cas duPPP portant sur le stade de Lille. Le fait quele titulaire puisse conclure des bauxemphytéotiques ou des baux à constructionpermettra notamment à certains typesd’investisseurs telles les sociétésimmobilières d’investissement cotées (SIIC)d’intervenir plus facilement. De même, lesopérations «à tiroirs» (cession de biens nerépondant plus aux besoins de la personnepublique en contrepartie de la réalisation denouveaux équipements) devraient êtrefacilitées. On peut en revanche resterdubitatif sur le développement du contrat departenariat dans la «rénovation urbaine»,pourtant présumé «secteur urgent», tant quele Code de l’urbanisme ne prendra pasexpressément en compte ce nouvelinstrument contractuel. ■

Le titulaire d’un contratde partenariat peut se procurer des recettes «tierces» issues de l’exploitation alternative de l’ouvrage public ou de la valorisation dudomaine public ou privé :c’est un atout décisif.”

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e projet de loi relatif auxcontrats de partenariat encours de discussion devantle Parlement au printemps2008 a pour objet, au vu de

l’expérience des premières annéesd’application de l’ordonnance du 17 juin2004 sur les contrats de partenariat, dedesserrer un peu les conditions de recoursau contrat de partenariat et d’améliorer uncertain nombre de dispositions applicablesaux contrats de partenariat (CP). Ce texteest né de la rencontre d’une réflexioninterne à la Mission d’appui aux contratsde partenariat et d’une réflexion decertains parlementaires.

1. Des critères d’admission redéfinisLe projet procède à la réécriture complètede l’article 2 de l’ordonnance. Deux pointsparticuliers ressortent de cette réécriture.En premier lieu, le projet rajoute un3e critère de recours au contrat departenariat, aux côtés de l’urgence et de lacomplexité du projet. Ce critère, que l’onpeut analyser comme un critèred’efficience économique, est directementinspiré de la jurisprudence du Conseilconstitutionnel (cf. décision n° 2003-473DC du 26 juin 2003). Il reflète l’idée que lerecours à un contrat de partenariat peut,dans certains cas, être justifié parce qu’ilpermet une meilleure utilisation desdeniers publics (raisonnement en termes decoût global actualisé) ou une commandepublique plus efficace (raisonnement entermes de performance attendue).En deuxième lieu, le projet ouvre, à titretransitoire, une nouvelle voie d’accèssectorielle aux contrats de partenariat.Jusqu’au 31 décembre 2012, les besoins decertains secteurs sont présumés répondre àla condition d’urgence autorisant le

recours au contrat de partenariat. Il s’agit :– dans l’enseignement supérieur, desinvestissements permettant uneamélioration des conditions d’étude et devie étudiante (réhabilitation des campusuniversitaires) ainsi que de la structurationet de la qualité de la recherche ;– des besoins de l’enseignement français àl’étranger et qui conduisent à répondreaux demandes de scolarisation des élèvesfrançais et étrangers ou à améliorer leursconditions d’étude ;– dans le secteur de la sécurité et de lajustice, des investissements relevant duchamp de la loi LOPSI et de la loi LOPJ ;– dans le secteur de la police et de lagendarmerie nationale, des investissementsnécessaires à la mise en place desnouvelles technologies ;– des opérations rendues nécessaires par laréorganisation des implantations duministère de la Défense ;– des investissements nécessaires auxbesoins de la santé ;– des infrastructures de transports’inscrivant dans un projet dedéveloppement durable, des opérations derénovation urbaine et des opérationsd’amélioration de l’efficacité énergétiquedes bâtiments publics.La présomption d’urgence n’est toutefoispas irréfragable puisqu’elle tombe dès lorsque les résultats de l’évaluation globale duprojet seraient «manifestementdéfavorables».Le projet procède ce faisant à unélargissement sensible des domaines parrapport à ceux éligibles aujourd’hui auxcontrats complexes, comme en témoignel’intégration de l’enseignement supérieur,de la recherche, des transports, de larénovation urbaine, de l’amélioration del’efficacité énergétique des bâtimentspublics. Il maintient une différence entre

LPar CHRISTINE MAUGÜÉ,conseiller d’Etat. Elle est conseiller juridiquede la MAPPP (Mission d’appui à la réalisation des contrats de partenariat).

FocusBrève présentation du projet de loi relatif aux contrats de partenariat

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DOSSIER - Les partenariats public-privé immobiliers

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l’Etat et les collectivités locales, comptetenu de leurs compétences respectives :pour les collectivités locales, seules fontpartie des investissements autorisés deplein droit les opérations renduesnécessaires par la réorganisation desimplantations du ministère de la Défenseet les infrastructures de transport ouopérations de rénovation urbaine ou visantà l’amélioration de l’efficacité énergétiquedes bâtiments publics. Compte tenu ducaractère expérimental de ce dispositif, unbilan sera dressé, au 31 décembre 2012,des contrats ainsi conclus. Cela n’exclutpas qu’il y ait, alors, une pérennisation dumécanisme ou une reconduite del’expérimentation pour une périodedonnée.

2. Divers aménagements fiscaux et financiersIl s’agit de questions en pratiqueimportantes et qui ont souvent emportéla décision en défaveur du contrat departenariat.Les points saillants du projet de loi, surces questions, sont au nombre dequatre.Le projet introduit d’abord uneneutralité fiscale améliorée du contratde partenariat par rapport aux autresmodes de réalisation des projets publics,en particulier à travers le recours à desmarchés publics (articles 26 à 28).Ainsi, dans le domaine des taxesd’urbanisme, le projet procède à uneextension de l’exonération de versementpour dépassement du plafond légal dedensité (article L. 122-2 du Code del’urbanisme) et de la redevance pourcréation de bureaux ou de locaux derecherche en région Ile-de-France(article L. 520-7 du Code del’urbanisme). Dans la même veine, ilunifie le régime d’imposition en cas deconstitution d’un droit réel immobiliersur le domaine public (insertion d’unarticle 1048 ter dans le CGI qui soumetà un droit fixe de 125 euros la

publication au fichier immobilier desautorisations d’occupation temporaire dudomaine public constitutives de droitsréels).Le projet recherche ensuite une neutralitéen matière d’assurance (article 30). Ilprocède pour cela à une extension del’exonération d’obligation d’assurancedommage ouvrage pour les personnespubliques qui font réaliser des travaux deconstruction pour un usage autre quel’habitation, par le biais d’un CP. Jusque-là, cette exonération ne jouait que si lespersonnes publiques effectuaient cestravaux comme maîtres d’ouvrage.Le projet procède par ailleurs à uneréécriture de l’article L. 313-29-1 du Codemonétaire et financier relatif au régimedes cessions de créances, afin de faciliterces dernières (article 29). Le mécanismede cession mis en place par l’ordonnancedu 17 juin 2004 s’est en effet traduit parun relatif insuccès car seuls deux contratsde partenariat ont donné lieu à sa miseen œuvre, en tout ou en partie. Lesaméliorations apportées concernentl’assiette servant de base à la cession, quise trouve précisée (inclusion des fraisfinanciers intercalaires, des coûts d’étudeet de conception, des coûts annexes à laconstruction), le fait que le caractèredéfinitif de la créance est conditionné à laréalisation des investissementsconformément aux prescriptionscontractuelles, enfin le fait que lecessionnaire est garanti du paiement desa créance, même en cas d’annulation, derésolution ou de résiliation du contrat.Le projet apporte enfin des précisions surles recettes annexes perçues par letitulaire d’un contrat de partenariat. Il ditexplicitement que les recettes annexespeuvent provenir de l’exploitation dudomaine, des ouvrages et deséquipements dont le cocontractant a lacharge. Il mentionne par ailleurs lapossibilité pour le titulaire d’encaisserauprès des usagers finals des prestationsrevenant à la personne publique. ■

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DOSSIER - Les partenariats public-privé immobiliers

es PPP impliquent laréalisation d’uninvestissement, sonfinancement et son

exploitation technique. Letraitement comptable et fiscal de cesdifférentes opérations soulève denombreuses questions, dont l’impactfinancier sur le projet peut êtremajeur.

1. Quelles sont les règlesapplicables au plan comptable etfiscal aux structures juridiquestitulaires d’un contrat departenariat public-privé ?

Wilfrid Aoustin : Il n’y aactuellement pas de règlescomptables françaises particulièrespour les PPP.Les règles qui sont retenuess’appuient sur les principescomptables applicables pourl’établissement des comptes sociauxet issus du plan comptable général,des règlements du Comité de la

réglementation comptable et desavis du Conseil national de lacomptabilité (CNC).D’autre part, la récenteréglementation sur la définition etl’évaluation des actifs exclut de sonchamp la famille des contrats departenariat public-privé ainsi queles contrats de gestion déléguée.Enfin, le groupe de travail duConseil national de la comptabilitédédié à l’étude de la question n’apas encore conclu, ses travaux sontsuspendus. Tout reste à faire.En conséquence, le traitement desPPP est inspiré du traitementcomptable d’opérations qui s’enapprochent : concessions, contrats àlong terme, etc.

Philippe Grousset : Au plan fiscal,il faut, en premier lieu, préciser queles entreprises doivent respecter lesdéfinitions du plan comptablegénéral, sous réserve que celles-cine soient pas incompatibles avec lesrègles applicables pour l’assiette de

l’impôt (article 38 quater annexe IIIau CGI).Par ailleurs, l’application duprincipe de convergence ou deconnexité de la fiscalité avec lacomptabilité est aujourd’hui uneréalité. C’est ce principe qui doitêtre adopté pour résoudre lesdifficultés d’interprétation de lanorme fiscale.Cela étant, comme vient de lerappeler Wilfrid, tout reste à faireau plan comptable en matière dePPP et rien n’a encore été fait enmatière d’impôt sur les sociétés.Pour la détermination du résultatfiscal des entités ad hoc, nous nouslimitons donc, le plus souvent, àconstater que les règles retenues auplan comptable, selon les différentsschémas en cause, ne sont pasincompatibles avec des dispositionsparticulières du CGI.Dans certaines situations, il fauttoutefois noter que c’est la règlecomptable qui suit la règle fiscale etnon l’inverse : tel est par exemple le

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InterviewLe traitement comptable et fiscal du titulaire d’un PPP

PHILIPPE GROUSSET, avocat associé, spécialiste en fiscalité directe. Il intervient plusparticulièrement en matière de fiscalité desentreprises, fiscalité immobilière et financière, etfiscalité des sociétés d’économie mixte et descollectivités locales. Il est l’auteur de «La pratique de la vérification de comptabilité» (Editions Francis Lefebvre, 1997)[email protected]

WILFRID AOUSTIN, directeur encharge de l’activité Conseil enfinancement de projets – partenariats public-privé, chez Grant Thornton. [email protected]

L

Entretien avec Wilfried Aoustin et Philippe Grousset

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DOSSIER - Les partenariats public-privé immobiliers

cas des dispositions de l’article 39 Cdu CGI qui autorisent l’amortissementfinancier des biens donnés en crédit-bail ou en location avec optiond’achat.

2. Quels sont en pratique le oules traitements retenus le plussouvent ?

WA : Il convient de préciser que lecritère de la propriété juridique del’actif prime à défaut d’une analyse«en substance» où la notion decontrôle effectif de l’actif serait lecritère.Le modèle comptable le plus souventappliqué est le modèle dit «corporel»où la société de projet titulaire ducontrat de PPP enregistrel’investissement à l’actif de son bilanpuis procède à son amortissement enmode linéaire sur la durée du contrat.Une analyse juridique, économique etfinancière du (projet de) contrat peutconduire au choix de règlessensiblement différentes.Par exemple, en présence d’unmécanisme de paiement proche decelui de la concession de servicepublic, un amortissement de caducitéa pu être envisagé. La rémunérationdu titulaire du contrat de PPP devaitprovenir des utilisateurs desinstallations techniques,l’amortissement de caducité traduisaitla disparition progressive des moyensde financement des immobilisationsplutôt que la diminution de valeur debiens remis à la personne publique auterme du contrat.Autre exemple, une société de projetqui doit faire l’objet d’uneintégration globale dans le périmètred’un établissement financier – laditesociété, titulaire d’un contrat de PPPdont l’analyse a montré qu’il étaitassimilable à un contrat de location– a pu pratiquer l’amortissementfinancier de l’investissement oùl’actif est amorti au rythme ducapital emprunté sur la durée ducontrat.

PHG : Le modèle dit «corporel» estcelui qui, en l’état des dispositionslégales, me paraît présenter, au planfiscal, les meilleures garanties.Je voudrais toutefois évoquer deuxdifficultés rencontrées en pratique.La première a trait aux conséquencesde la cession de la créancereprésentative des loyers futurs etaux modalités d’imposition duproduit correspondant. Ce produitdoit-il ou non être imposéimmédiatement ?La position de l’administration surcette question est a priori deconsidérer qu’à défaut de dispositionparticulière le produit doit êtreimmédiatement imposé ce qui, aumoins sur le plan économique, ne vapas de soi.C’est la raison pour laquelle, dans lecadre de l’examen du projet de loirelative au PPP actuellement endiscussion, un amendement a étédéposé en première lecture devantl’Assemblée nationale, visant à«clarifier» le statut des cessions decréance et à traiter le produit commeune avance sur loyer. A la demandede Madame Christine Lagarde, cetamendement a toutefois été retiré etle gouvernement a pris l’engagementde proposer un système de provisionspéciale.Cette technique de provision présentecependant, à mon sens, deuxinconvénients : elle confirme acontrario que le produit est, enapplication des principes généraux,imposable et elle crée un nouveau casde divergence entre la comptabilité etla fiscalité.La deuxième difficulté concerne letraitement de la redevance verséepour le renouvellementd’immobilisations. Son sort, au planfiscal, est étroitement lié à celuiretenu au plan comptable.Or, dans ce domaine également, il mesemble que les règles du jeu ne sontpas clairement établies, notamment àpropos de la comptabilisation descomposants, alors que ces derniers

ont une incidence directe sur ladéduction ou non de la redevance.

3. Quelles sont vos attentes enmatière de comptabilité et defiscalité de PPP ?

WA : On peut espérer que lestravaux du groupe de travail du CNCdéjà évoqué reprennent et seconcluent rapidement. La normeIFRIC 12 établie par l’IASB pourraitêtre le socle de cette réglementation.On peut espérer que le traitementdes PPP dans les comptes publicssoit arrêté aussi, qu’il y aitcompatibilité et complémentarité desrègles retenues pour les référentielscomptables privés et publics. A cetégard, l’IPSAS (pour Internationalpublic sector accounting standardsboard) a publié en mars 2008 undocument d’étude qui propose lecritère de contrôle de l’actif dans lechoix entre consolidation etdéconsolidation dans les comptespublics des investissements réaliséspar voie de PPP. Un dernier mot, surle recours au PPP en tant quetechnique d’endettement déguisé.Sur le large échantillon d’opérationsque nous avons étudié dans nosmissions d’évaluation préalable,aucun de nos clients publics n’a misen avant cet objectif. C’est dans tousles cas, la démonstration del’efficience technique et économiquedu PPP qui ont motivé le recours auPPP.

PHG : Il faut impérativement que lesinterrogations sur le traitement de cesopérations soient levées. Les impôtslocaux ont, dès l’origine, étéappréhendés par le législateur.Il reste maintenant à aborder la partieimpôt sur les sociétés en liaison avecle groupe de travail du CNC. En toutétat de cause, si le modèle «financier»devait être adopté il faudrait, mesemble-t-il, que le Code général desimpôts soit complété par de nouvellesdispositions. ■

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DOSSIER - Les partenariats public-privé immobiliers

es deux principaux aspects ducontrat de partenariat sont lataxation ou non de larémunération à la TVA et, le

cas échéant, l’éligibilité au FCTVA de larémunération versée au partenaire privé.

1. La taxation de la rémunération dans les contratsde partenariatIl s’agit là d’un point essentiel puisque durégime de TVA applicable au contrat dépendrala possibilité de récupérer la TVA grevant lecoût de l’opération.Compte tenu de l’individualisation deséléments de la rémunération entre la partiefinancement, investissement etfonctionnement, la question d’un traitementfiscal différencié de ces différentescomposantes avait été évoquée par certainspour tenter d’exonérer la part financière.C’était dénaturer le caractère global du contratde partenariat.Dans une note adressée en septembre 2006 auprésident de la Mission d’appui à la réalisationdes contrats de partenariat (MAPPP), ladirection de la législation fiscale a confirmécette analyse considérant que le contrat departenariat constitue une prestation globalepassible, sauf exonération particulière, de laTVA dans son ensemble. Le même régime deTVA s’applique donc à l’ensemble descomposantes du loyer à l’exception toutefoisdes prestations annexes qui seraientdissociables de l’objet même du contrat et quidoivent suivre le régime qui leur est propre.Ainsi pour les contrats de partenariat relatifsau financement d’un investissementimmobilier, il y a lieu de rechercher si leslocaux sont à usage d’habitation (exonérationde TVA sauf régime de la para-hôtellerie), àusage professionnel ou administratif(exonération de TVA sauf option s’ils sont misà disposition sans équipement et taxation deplein droit lorsqu’ils sont équipés). Lorsque lamise à disposition porte sur des équipementsrelevant de régimes de TVA différents, il y a

lieu de procéder à une ventilation du loyer(pour chacune de ces composantes) afind’appliquer à chaque investissement les règlesde taxation qui leur sont propres.La détermination du régime de TVA supposedonc un examen au cas par cas de chaqueprojet de financement afin de déterminerl’affectation des locaux, leur consistance(équipés ou non), la nature des prestationsfournies à l’occasion de la maintenance et/ougestion de l’équipement immobilier.

2. L’éligibilité au FCTVA de laTVA grevant une part de la rému-nération perçue par le partenaireAfin de faciliter la mise en œuvre des contratsde partenariats, l’ordonnance du 17 juin 2004a prévu leur éligibilité au FCTVA lorsque laTVA sur l’investissement n’est pas récupérablepar la voie fiscale (immeubles non affectés àune activité taxable).A la suite d’une proposition de loi du 20 décembre 2007, il est envisagé de rendreégalement éligibles au FCTVA les bauxemphytéotiques administratifs et lesautorisations d’occupation du domaine publicconstitutives de droits réels.Sur la nature des dépenses actuellementéligibles, l’article L. 1615-12 du Code généraldes collectivités territoriales (CGCT) prévoitque les collectivités territoriales ou leursétablissements publics bénéficient du FCTVAsur la part de la rémunération correspondantà l’investissement, réalisé par le partenaireprivé, pour les besoins de leur activitén’ouvrant pas droit à récupération. Il n’étaitpas donné de définition des coûtsd’investissement, mais dans le projet de loi surles contrats de partenariat, l’article 23 préciseque les coûts d’investissement comprennenten particulier les coûts d’étude et deconception, les coûts annexes à laconstruction et les frais financiersintercalaires. Une fois cette loi définitivementadoptée, ces dépenses, distinctes du coût deconstruction proprement dit, seront donc, sansdiscussion, éligibles au FCTVA. ■

La TVA dans les contrats de partenariat :un aspect à ne pas oublier

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Par GWENAËL GAUTHIER,avocat membre de l’équipe TVAde CMS Bureau FrancisLefebvre, elle dispose d’uneexpertise particulière sur lesproblématiques de TVA appliquées au contrat de partenariat public-privé[email protected]

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La déterminationdu régime deTVA suppose un examen aucas par cas de chaque projet de financement.”

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DOSSIER - Les partenariats public-privé immobiliers

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’expérience acquise depuisl’adoption de l’ordonnance de2004 a permis de cernerquelques caractéristiques

propres aux contrats de partenariat et enparticulier au regard de la fiscalité locale (horstaxes d’urbanisme, pour lesquelles lesdifficultés rencontrées sont traitées dans lecadre de la réforme, cf. l’article de ChristineMaugüé p. 4-5).

1. Taxes foncières et taxe sur lesordures ménagèresAux termes de l’article 1415 du CGI, la taxefoncière sur les propriétés non bâties et la taxefoncière sur les propriétés bâties (TFPB) sontétablies pour l’année entière d’après les faitsexistants au 1er janvier de l’année d’imposition.La TFPB s’applique aux propriétés bâties etbiens assimilés à l’exception de celles qui ensont exonérées par une disposition spéciale.En application de l’article 1382, 1 bis du Codegénéral des impôts, les immeubles construitsdans le cadre des contrats de partenariat sontexonérés de taxe foncière sous réserve durespect des conditions suivantes :– l’immeuble doit à l’issue du contrat departenariat être incorporé au domaine de lapersonne publique ;– l’immeuble doit être affecté à un servicepublic ou d’utilité générale ; et– l’immeuble doit être non productif derevenus.Les contrats déjà mis en place répondentgénéralement aux conditions précitéespermettant d’envisager sereinementl’exonération de taxe foncière.Les commentaires formulés par la Direction dela législation fiscale (DLF) au MAPPPconfirment la volonté de limiter la portée del’exonération de taxe foncière aux seulesparties des immeubles dont la personnepublique a l’usage exclusif. Ainsi, touteutilisation privative par le partenaire d’unepartie des immeubles justifierait uneimposition dans les conditions de droitcommun.

Il reste que l’analyse de la DLF concernantl’absence d’exonération des immeubles à lataxe d’enlèvement des ordures ménagères,nous semble contestable.La taxe sur les ordures ménagères (TEOM) quifigure également sur les avis de taxe foncièreest applicable aux contrats de partenariat etson coût est proportionnel à la base de la taxefoncière.En tout état de cause la TEOM ne s’appliquepas aux immeubles loués par les communes.

2. Taxe professionnelleDans le cadre des contrats de partenariat, lamise à disposition d’un ensemble immobiliers’accompagne de plusieurs types de prestationspouvant être identifiées comme donnant lieu àl’application de la taxe professionnelle au sensde l’article 1447 du Code général des impôts.Généralement, il y a lieu de considérer que lasociété de projet ne doit pas être imposable surla valeur locative foncière de l’immeuble, saufpour la part dont elle se réserve l’usage. Ellepeut en revanche être imposable sur lesmatériels qu’elle donne en location à lapersonne publique (sauf à pouvoir qualifier lecontrat de contrat soit de partenariat au sensde l’article 26 de l’ordonnance, soit en uncrédit-bail).Comme tous les contribuables de la taxeprofessionnelle, la taxe doit être encadrée enfonction de la valeur ajoutée produite au coursde l’année d’imposition.La taxe professionnelle à partir d’unefourchette comprise entre :– un maxima, le plafonnement à la valeurajoutée fixé à 3,5 % de celle-ci ;– un minima, la cotisation minimale sur lavaleur ajoutée fixée à 1,5 % applicableseulement aux entreprises ayant un chiffred’affaires HT supérieur à 7,6 millions d’euros.Si la taxe foncière ne grève généralement pasles projets de PPP, il convient d’êtreparticulièrement vigilant sur l’importance quepeut représenter la taxe professionnelle pour lasociété de projet si du mobilier est financé et sides prestations de services sont dispensées. ■

Les contrats de partenariat et la fiscalité locale

Par LAURENT CHATEL,avocat associé en fiscalité,responsable du service impôts locaux du cabinetCMS Bureau Francis [email protected]

L

La sociétéde projet peutêtre imposablesur les matérielsqu’elle donne en location à la personne publique.”

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a possibilité, pour uneentreprise titulaire d’uncontrat de partenariat, de serefinancer en cédant les

créances détenues sur la personne publique aune influence décisive sur l’économie mêmedu dispositif. Plus grandes seront les facilitésde refinancement et plus le coût global del’opération pourra s’en trouver réduit ; cedont la collectivité publique bénéficieranécessairement dans le cadre de la mise enconcurrence.Aussi comprend-on que, dès l’origine, c’est-à-dire à l’occasion de l’ordonnance du17 juin 2004, les promoteurs du texte sesoient préoccupés de faciliter cerefinancement. Mais ils l’ont fait dans desconditions telles que la pratique s’est très vitedétournée du dispositif spécifique inscrit àl’article L. 313-29-1 du Code monétaire etfinancier pour recourir au mécanisme«classique» de la cession de créances Dailly.Ni les entreprises privées, ni les gestionnairespublics n’ont trouvé un intérêt à se saisir dela possibilité, offerte par le texte, d’assouplirles modalités d’acceptation de la cession(cette acceptation peut intervenir dans lecontrat de partenariat lui-même) sous réserved’en limiter le montant à «une fraction ducoût des investissements».Face à ce constat d’échec, deux voies étaientenvisageables à l’occasion de la refonte du

dispositif. Soitentériner cettesituation, doncsupprimer purementet simplement le textespécial ; ce qui futproposé encommission lors de lapremière lecture du

texte au Sénat. Soit essayer de corriger ledispositif en l’amendant de ses principauxinconvénients, ce que tentait de faire leprojet de loi et ce que le ministre del’Economie a cherché à faire en réécrivant –et donc en maintenant – le dispositifspécifique de l’article L. 313-29-1. C’est ce

texte qui est actuellement en discussion àl’Assemblée nationale.Quelles en sont les principales dispositions ?En premier lieu, afin, aux dires du ministre,que le partenaire privé soit maintenu ensituation de risque et puisse se voir imposerdes pénalités s’il n’atteint pas ses objectifs,a été maintenu le principe selon lequell’intégralité de la créance ne peut êtrecédée. Simplement, pour remédier auxhésitations existant aujourd’hui, un seuilprécis est fixé dans le texte en discussion :seule peut être transmise par bordereauDailly une «fraction n’excédant pas 70 % dela rémunération due par la personnepublique».En second lieu, et là encore la clarificationest bienvenue, le texte précise l’assiette dela fraction susceptible d’être cédée : sontconcernés d’une part les coûtsd’investissement proprement dits(comprenant «notamment les coûts d’étudeet de conception, les coûts annexes à laconstruction et les frais financiersintercalaires») et, d’autre part, les coûts definancement de l’investissement.Au résultat, le dispositif en ressortiraitincontestablement amélioré, mais aussisingulièrement compliqué. Surtout, il reposela question de savoir si, en lieu et place del’article L. 313-29-1, les parties peuventdécider d’avoir recours aux dispositions dedroit commun des articles L. 313-28 etL. 313-29, soit pour l’ensemble des créancesnées du contrat, soit pour la partie descréances hors investissements. La rédactiondu texte, non modifié sur ce point («lecontrat de partenariat… peut prévoir qu’unefraction»), devrait conduire à répondrepositivement, malgré le souhait manifestedu ministre d’encadrer la pratiquecontractuelle. Il convient donc, sans doute,d’en déduire si le texte est adopté en l’état,qu’il sera également possible de mettre enplace une cession acceptée sur le fondementdes articles L. 515-15 et L. 515-21 du mêmeCode, au profit d’une société de créditfoncier. ■

Le refinancement des titulaires de contrats :une réforme inutile ?

LPar ARNAUD REYGROBELLET,professeur à l’université Paris X, et Of [email protected]

et ELISABETH FLAICHER-MANEVAL, avocat. Au sein del’équipe de doctrine juridique,ils suivent les questions d’actualité du droit des [email protected]

Le dispositif spécifique decession de créances seraitamélioré, mais aussi singulièrement compliqué.”“

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Le contrat de partenariat : un schéma qui n’échappe pas à la problématique des ententes entre soumissionnaires

e «marché» des PPP secaractérise par une très forteconcentration, tant au niveaude la demande (le nombre de

contrats de partenariat destinés à être conclupar l’Etat ou les collectivités locales étantnécessairement limité), que du côté de l’offrepuisque les grands groupes portentmajoritairement de tels projets enrassemblant autour d’eux les différentsintervenants nécessaires à la présentationd’une offre.Ces données de marché invitent à prêter uneattention particulière à ce que certainscomportements ne tombent pas dans lechamp de l’incrimination d’ententeanticoncurrentielle, prohibée par lesdispositions des articles 81 du traité CE etL. 420-1 du Code de commerce. En effet,outre les sanctions pécuniaires qui pourraientêtre directement infligées par le Conseil de laconcurrence aux entreprises coupables detelles pratiques, les comportementsanticoncurrentiels font peser une menace surla procédure de passation ainsi que sur lecontrat lui-même qui pourraient faire l’objetd’une annulation par la juridictionadministrative et ouvrir droit à une actionindemnitaire de la part de la collectivitépublique victime de ces pratiques.A cet égard, les principes posés par leConseil de la concurrence en matière demarchés publics et délégations de servicepublic sont en tous points transposables auxcontrats de partenariats.Les pratiques les plus fréquemmentconstatées et les plus lourdementsanctionnées sont celles dans lesquelles, àl’occasion d’une procédure de mise enconcurrence donnée ou à une échelle plusglobale de certains types de contrats passéspar un pouvoir adjudicateur, les entreprisessusceptibles de se porter candidatess’entendent sur le choix de celle quiprésentera l’offre la mieux-disante, les autres

déposant des offres dont elles savent paravance qu’elles ne seront pas retenues. Cettepratique dite des «offres couverture»s’accompagne généralement d’accords plusglobaux de répartition de marchés dans lecadre desquels les marchés perdus sontcompensés par l’octroi, par le titulaire ducontrat, de travaux en sous-traitance à sesconcurrents.Plus généralement, tout comportementd’entreprise qui, sans nécessairement allerjusqu’à organiser une répartition globaledes marchés, va porter atteinte àl’indépendance des offres et réduirel’incertitude de chacun des candidats sur lastratégie de ses concurrents est à proscrire.C’est ainsi que la participation d’une mêmeentreprise, en qualité de membre d’ungroupement, d’associé d’une société deprojet ou de sous-traitant, à plusieurs offresconcurrentes, si elle n’est pas interdite ensoi, est susceptible de poser des difficultésen droit de la concurrence, s’il est établique, par ce biais, les entreprises ont puéchanger des informations sur lacomposition des offres. De la mêmemanière, la constitution même dugroupement ou de la société de projet nedoit pas être le moyen d’assécher laconcurrence en rassemblant toutes lesentreprises susceptibles de se portercandidates. Enfin, le dépôt, par plusieursfiliales d’un même groupe, d’offresconcurrentes est également susceptible deprésenter certaines difficultés. A cet égard,le Conseil de la concurrence recommandeque, dans tous les cas, le pouvoiradjudicateur soit informé des lienscapitalistiques existant entre les différentesentités. En outre, le dépôt d’offresconcurrentes n’est licite que si ces offres ontété établies de manière totalementindépendante, ce qui suppose que les entitésen question disposent d’une autonomiecommerciale suffisante pour ce faire. ■

LPar CLAIRE VANNINI, [email protected]

Tout comportementd’entreprise quiva porteratteinte à l’indépendancedes offres etréduire l’incertitude dechacun des candidats sur lastratégie de sesconcurrents està proscrire.”

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DOSSIER - Les partenariats public-privé immobiliers

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ans le cadre des PPP, la miseen place d’une société deprojet est fréquente. En effet,tant le financement que la

réalisation du projet entraîne la participationde divers intervenants (financiers, architectes,constructeurs, mainteneurs, etc.) pouvantjustifier de l’opportunité de la mise en placed’une société dédiée prenant en charge cesdifférentes compétences. La société de projetdevient alors l’interlocuteur unique de lacollectivité publique.

1. Intérêt de la société de projetLa société de projet fait appel à différentessources de financement que ce soit auprèsdes banques, sous forme notamment decrédits syndiqués, mais aussi «en equity»auprès de partenaires financiers qui apportentdes fonds propres ou quasi-fonds propres. Cedernier type de financement a notammentpour objet de permettre d’absorber certainsrisques transférés au titulaire du contrat (lasociété de projet) que celle-ci ne peuttransférer, en tout ou partie, dans les sous-contrats conclus avec les intervenants (trèssouvent dans les PPP immobiliers, en premierrang : un contrat de promotion immobilièrepour la phase conception-construction, uncontrat de maintenance pour la phased’exploitation).La création d’une société de projet présenteradonc de l’intérêt dans le cadre de schémasrelativement complexes, lourds et où existentdes risques de «process» (par exempledomaine hospitalier ou environnemental).En revanche, dans les projets immobiliersfaisant notamment appel à une maintenanceimmobilière classique – en matière debureaux par exemple – d’autres montages,tels que ceux où intervient un investisseur detype crédit-bailleur, peuvent s’avérer plusadaptés. Quoi qu’il en soit, dès le stade del’avis d’appel à candidatures ou dans lerèglement de la consultation, l’Etat peut êtreconduit à préciser qu’il souhaite que lesassociés de la société de projet soient ceuxqui font partie du groupement candidat. Dèslors, il sera essentiel de bien distinguer ceuxqui auront vocation à faire partie de

l’actionnariat de la société de projet et ceuxqui demeureront de simples prestatairesextérieurs.

2. Précautions à prendre : choixd’une structure sociale adaptéeC’est très souvent la forme de SAS qui seraretenue en raison des atouts majeurs qu’elleprésente et liés principalement à sa souplesse defonctionnement qui relève, pour une large part,de la seule volonté de ses membres fondateurs.Ceux-ci peuvent ainsi se libérer des contrainteset du formalisme de la SA ou de la pesanteur,en matière de responsabilité, de la SNC.Cette souplesse permet aussi une plus grandeadaptation des statuts aux exigences requises, lecas échéant, par la collectivité publique et auxvolontés exprimées par les membres partenairespour préserver un fort intuitu personae à lasociété de projet.De nombreuses clauses peuvent être inséréesdans ses statuts notamment en matière :– d’entrée et de sortie du capital (et notammentassurer la maîtrise des incidences liées à ladéfaillance d’une entreprise associée),d’inaliénabilité, de droit de veto (de lacollectivité publique par exemple) ;– de management de la structure (Président,organe collégial) ;– de contrôle de la gestion (mise en place d’unconseil de surveillance, présence d’uncommissaire aux comptes) ;– de gouvernance de l’entreprise (droitd’information, de communication, de vote, etc.).Tout comme dans les SA, des actions depréférence pourront être créées pour octroyercertains avantages pécuniaires à certainsassociés si les partenaires le désirent. De même,des obligations pourront être émises par la SASdans le cadre du financement du projet. Laseule restriction par rapport à la SA restel’interdiction faite à une SAS de faire appelpublic à l’épargne.Si des partenaires étrangers sont membres de lasociété de projet, il convient de s’assurer que lesclauses statutaires ne sont pas contraires auxrègles d’ordre public international des pays danslesquels ces clauses seraient susceptibles d’êtrecontestées notamment à l’occasion d’unedemande d’exequatur. ■

La société de projet : utilité et gouvernance

Par CHANTAL JORDAN,[email protected]

La sociétéde projetdevient alorsl’interlocuteurunique de la collectivitépublique. ”

D

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ACTUALITÉ - France

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L’administration fiscale s’estrécemment prononcée (déci-sion de rescrit 29 janvier 2008

n° 2008/3) dans le cadre du régime pro-rogé jusqu’au 31 décembre 2009 de l’ar-ticle 238 bis JA du CGI qui prévoit queles plus-values nettes dégagées lorsd’une réévaluation libre d’immeubles oude titres de sociétés à prépondéranceimmobilière réalisée entre le 1er janvier2004 et le 31 décembre 2007 sont sou-mises à une taxation à l’impôt sur lessociétés au taux de 16,5 % sous réservede la souscription d’un engagement deconservation des actifs concernés pen-dant une durée minimale de cinq ans,sur les modalités d’imputation, dans unetelle situation, des déficits fiscaux del’entreprise.L’administration a indiqué que l’écart deréévaluation peut être compensé avec ledéficit subi au titre de l’exercice deréévaluation ou avec les déficits fiscauxdes exercices antérieurs demeurantreportables, que la compensation doitalors être opérée euro pour euro, qu’elleest facultative et peut ainsi ne porterque sur une partie seulement du déficitdudit exercice ou des déficits fiscauxreportables.C’est alors le solde net de l’écart deréévaluation qui est soumis à l’impôt surles sociétés au taux de 16,5 %.Par ailleurs, les organismes sans butlucratif de droit français qui relèvent del’article 206-5 du CGI ne sont pas impo-sés sur leurs gains en capital, et notam-ment sur leurs gains immobiliers ou decession de titres de sociétés à prépondé-rance immobilière.L’administration considère, sur le fonde-ment des dispositions de l’article 244 bisA du CGI, que les mêmes organismes àbut non lucratif non résidents sont enrevanche soumis au prélèvement dutiers à raison des mêmes plus-values decession de titres à prépondérance immo-bilière.

La cour administrative d’appel de Parisen a jugé différemment dans un arrêt du6 décembre 2007 (n° 06-3370, 5e ch. A,«Min. c/ Fondation Stichting UnileverPensioenfonds Progress») à propos d’unefondation hollandaise, sur le doublefondement de la clause de non-discrimi-nation contenue dans l’article 25 de laconvention franco-néerlandaise du16 mars 1973, et de la jurisprudencecommunautaire (CJCE 14 septembre2006 aff. 386/04), en considérant que lafondation en question, gérant un régimede retraite et de prévoyance dont l’objetsocial est ainsi à but non lucratif, et quiavait cédé les droits sociaux qu’elledétenait dans une société française àprépondérance immobilière, ne pouvaitêtre soumise à uneimposition autre ou pluslourde que celle àlaquelle aurait été assu-jettie une institutionfrançaise gérant unrégime de retraite et deprévoyance qui auraitréalisé la même opéra-tion imposable, sansque la différence detraitement ainsi consta-tée puisse être justifiéepar une raison impé-rieuse d’intérêt général ou concerner dessituations qui ne sont pas objectivementcomparables.La cour a ainsi jugé que la fondation dedroit néerlandais en question était pla-cée dans une situation objectivementcomparable à celle des institutions fran-çaises gérant un régime de retraite et deprévoyance et que le fait que de tellesinstitutions assurent une mission de ser-vice public ne suffisait pas à établir la«raison impérieuse d’intérêt général»permettant de déroger au principe delibre circulation des capitaux instituépar l’article 56 du traité desCommunautés européennes. ■

Profits de réévaluation libre d’actifs, profitsimmobiliers d’organismes à but non lucratifétranger : quelques précisions

Par RICHARD FOISSAC, avocat asso-cié, spécialisé en fiscalité. Il traitenotamment des dossiers d’acquisitionet de restructuration de groupesimmobiliers cotés et non cotés, et lesconseille sur leurs opé[email protected]

La cour a ainsi considéréque la fondation hollandaise ne pouvait être imposée en France à raison des plus-values immobilières réalisées. ”

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ACTUALITÉ - France

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Le décret précisant les modali-tés d’usage du droit depréemption sur les fonds de

commerce, les fonds artisanaux et lesbaux commerciaux a finalement étéadopté le 26 décembre 2007, puis com-plété par un arrêté du 29 février 2008(journal officiel du 1er avril), publiant leformulaire de déclaration d’intentiond’aliéner ad hoc.Entre-temps, certaines collectivités,séduites par ce nouvel outil, et encoura-gées par une interprétation favorabledu ministère, avaient mis en œuvre ledroit de préemption des fonds de com-merce.Le débat sur la possibilité d’utiliser cedroit de préemption restait toutefois vif.Le tribunal administratif de Paris avaitbien annulé une partiedu plan local d’urba-nisme de Paris, proté-geant les rez-de-chaussée commerciauxet artisanaux, mais cedispositif était assezéloigné de celui prévuen matière de préem-ption des fonds decommerce (jugementdu 2 août 2007, préfetde région d’Ile-de-France, préfet de Parisc/ville de Paris). Cejugement n’avait doncpas été considéré comme une positionde principe.Il est revenu au Conseil d’Etat de seprononcer sur l’applicabilité de la loiavant l’adoption de son décret d’appli-cation. Dans un arrêt Société Megaron,il tranche le débat en considérant que«si l’application des dispositions de l’ar-ticle L. 214-1 du Code de l’urbanismen’était pas manifestement impossible,en l’absence du décret prévu à l’articleL. 214-3, en tant qu’elles permettent auconseil municipal de délimiter un péri-mètre de sauvegarde du commerce et del’artisanat de proximité, à l’intérieur

duquel les cessions de fonds artisanaux,de fonds de commerce ou de baux com-merciaux pourront être soumises audroit de préemption, il en va différem-ment des autres dispositions […] relati-ves à l’exercice du droit de préemptionet au droit de rétrocession qui en estinséparable, dès lors que ce dispositifentièrement nouveau […] ne peut êtremis en œuvre sans qu’aient été adoptéespar voie réglementaire les précisionsnécessaires à son application» (CE,21 mars 2008, Société Megaron,n° 310173).Compte tenu de cette jurisprudence, quidistingue parmi les dispositions législa-tives nouvelles, était-il possible pour lescommunes d’instaurer par délibérationun périmètre de préemption des fonds

de commerce ? Malgrécertaines positionsconcluant positive-ment, il est permisd’hésiter sur ce pointdès lors que le décret acréé une formalité deprocédure nouvellenécessaire à la créa-tion de ce périmètreconsistant en laconsultation de laChambre de commerceet d’industrie et de laChambre des métierset de l’artisanat.

Si la collectivité avait été amenée àdécider de préempter un fonds avantl’adoption du décret, cette décision doitêtre considérée comme illégale car leseul fondement législatif ne permettaitpas l’exercice du droit de préemption.Dans un tel contexte, la prudencerecommande de prendre à nouveau ladélibération instaurant un périmètre desauvegarde du commerce et de l’artisa-nat de proximité, d’une part, et d’étu-dier au cas par cas les conséquences ducaractère illégal des décisions depréemption éventuellement prises sur leseul fondement de la loi, d’autre part. ■

Droit de préemption sur les fonds de commerce : le décret était-il nécessaire ?

Par PAUL ELFASSI, avocat, spécialisteen droit [email protected]

et HÉLÈNE CHALMETON, docteur endroit public, chargée de [email protected]

Ce dispositif entièrement nouveaune peut être mis en

œuvre sans qu’aientété adoptées par voie

réglementaire les précisions

nécessaires à sonapplication.”

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ACTUALITÉ - France

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Un arrêt de la Cour de justicedes Communautés européen-nes en date du 6 mars 2008,

relatif au crédit-bail immobilier, pourraitavoir des conséquences fâcheuses sur lesdroits à déduction, en matière de TVA,des sociétés de crédit-bail immobilier.La question examinée était celle desavoir si la notion de «biens d’investisse-ment», dont la cession est exclue du cal-cul du prorata de TVA (coefficient detaxation), inclut des véhicules qu’uneentreprise de crédit-bail acquiert en vuede les louer puis de les vendre à l’expira-tion des contrats de location-vente.La Cour note qu’en adoptant les disposi-tions de l’article 19, paragraphe 2, de lasixième directive, le législateur commu-nautaire a entendu exclure du calcul duprorata le chiffre d’affai-res afférent à la vente debiens, lorsque cettevente revêt un caractèreinhabituel par rapport àl’activité courante del’assujetti concerné et nenécessite donc pas uneutilisation des biens oudes services à usagemixte d’une manière quisoit proportionnelle auchiffre d’affaires qu’ellegénère.Dans ces conditions, lanotion de «biens d’investissement utiliséspar l’assujetti dans son entreprise» ausens de l’article 19, paragraphe 2, de lasixième directive ne saurait inclure ceuxdont la vente revêt, pour l’assujetticoncerné, le caractère d’une activité éco-nomique habituelle. En effet, pour l’inté-ressé, l’acquisition, puis la vente de telsbiens nécessitent l’utilisation courantedes biens et des services à usage mixte.Il en résulte que cette vente relevant desactivités habituelles et taxées de l’assu-jetti, le chiffre d’affaires y afférent doitêtre pris en compte dans le calcul duprorata de déduction pour que celui-cireflète au mieux la part d’utilisation,pour ces activités, des biens et des servi-

ces affectés à un usage mixte, sauf àméconnaître l’objectif de neutralité dusystème commun de TVA.Dès lors, selon la Cour, si la vente, à l’ex-piration des contrats de crédit-bail, desvéhicules présente le caractère d’uneactivité courante pour l’assujetticoncerné qui y procède de manière pro-fessionnelle et systématique, il seraitcontraire audit objectif de neutralité quecet assujetti ne soit pas effectivementdéchargé de la part de TVA grevant lesfrais généraux ayant servi à la réalisa-tion de cette vente, et donc à l’exercicede l’activité économique habituelletaxée.Il en résulte que le chiffre d’affaires affé-rent à une telle vente ne peut pas êtreconsidéré comme portant sur des «biens

d’investissement utili-sés par l’assujetti dansson entreprise» au sensde l’article 19, paragra-phe 2, de la sixièmedirective.La Cour de justice desCommunautés euro-péennes en conclut quela notion de «biensd’investissement utili-sés par l’assujetti dansson entreprise» n’inclutpas des véhiculesqu’une entreprise de

crédit-bail acquiert en vue, comme dansl’affaire au principal, de les louer puis deles vendre à l’expiration des contrats delocation-vente, dès lors que la vente des-dits véhicules au terme de ces contratsfait partie intégrante des activités écono-miques habituelles de cette entreprise.Il résulte donc de cette jurisprudence queles cessions de biens loués en crédit-baildoivent être incluses dans le prorata.Ceci a un effet bénéfique sur le proratas’agissant des biens à caractère mobilierpuisque leur vente est assujettie à laTVA, et ceci a un effet défavorables’agissant des immeubles, puisque leurcession plus de cinq ans après leur achè-vement est exonérée de TVA. ■

Crédit-bail immobilier et TVA

Par PHILIPPE TOURNES,avocat associé, spécialisé dans les questions de TVA notamment liéesà l’[email protected]

Selon la jurisprudence,

les cessions d’immeubles

donnés en crédit-bail sont à

inclure dans le prorata.”

lettre immo. n°9 16/06/08 18:06 Page 15

ACTUALITÉ - France

16

Si vous souhaitez contacter les auteurs de cette lettre, vous pouvez vous adresser à la rédaction qui transmettra aux personnes concernées. Vous pouvez égalementvous adresser à :

1-3, villa Emile Bergerat 92522 Neuilly sur Seine Cedex Tél. 01 47 38 55 00/Fax 01 47 38 55 55

Me Laurent Chatel, [email protected] Paul Elfassi, [email protected] Elisabeth Flaicher-Maneval, [email protected] Richard Foissac, [email protected] Gwenaël Gauthier, [email protected] Philippe Grousset, [email protected] Chantal Jordan, [email protected] Reygrobellet, [email protected] François Tenailleau, [email protected] Jean-Luc Tixier, [email protected] Philippe Tournes, [email protected] Claire Vannini, [email protected]

Supplément du numéro 986 du 23 juin 2008 Option Finance - 91 bis, rue du Cherche-Midi 75006 Paris - Tél. 01 53 63 55 55

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Après avoir financé les travauxde dépollution du siteaccueillant les bâtiments dans

lesquels il avait exploité pendant plusieursannées une usine de produits chimiques,l’ancien locataire des lieux en avaitréclamé le remboursement au bailleur.Fort de ce qu’il était établique le terrain litigieux étaitdéjà pollué lors de sonentrée en jouissance, il esti-mait être titulaire, en sa qua-lité de simple preneur, d’unecréance de remboursementdes frais de dépollutionenvers le bailleur, bénéfi-ciaire de l’améliorationapportée au bien dépollué.Les juges du fond ayantrejeté sa demande au motif qu’une tellecréance n’aurait pu procéder que d’uneconvention entre bailleur et preneur, ilavait alors invoqué la violation de l’article1erdu premier protocole additionnel à laConvention des droits de l’homme (pro-

tection du droit de propriété).Argument écarté par la Cour de cassationpour laquelle la charge de la dépollutiond’un site industriel incombe, aux termesde la loi du 19 juillet 1976, au dernierexploitant et non au propriétaire du bien.La cour d’appel, qui n’avait pas violé l’ar-

ticle 1er précité, en avaitdéduit à bon droit quela remise en état dusite résultant d’uneobligation légale parti-culière dont la finalitéest la protection del’environnement et dela santé publique étaità la charge du loca-taire (arrêt du02/04/2008).

Reste alors la possibilité pour l’intéresséd’agir en dédommagement contre sonprédécesseur dans les lieux exploitéspour manquement de celui-ci à sa propreobligation de dépollution après cessationd’activité. ■

La charge de la dépollution

incombe nécessairement au

locataire. ”

Dépollution d’un site industriel

Par ARNAUD REYGROBELLET,professeur à l’université Paris X,Of Counsel. [email protected] ELISABETH FLAICHER-MANEVAL,avocat. Au sein de l’équipe de doctrine juridique, ils suivent lesquestions d’actualité du droit des [email protected]

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