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IL ÉTAIT UNE FOIS… PERRAULT ET AUTRES CONTES DE JADIS COLLECTION PARCOURS D’UNE ŒUVRE SOUS LA DIRECTION DE MICHEL LAURIN CHENELIÈRE ÉDUCATION Complément pédagogique Paul-G. Croteau

(3030-M) Perrault:Layout 1 - cheneliere.info · Le vocabulaire négatif fait ressortir la tristesse, le malheur, la misère et la pauvreté, au ... Le début de la quatrième strophe

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IL ÉTAIT UNE FOIS… PERRAULTET AUTRES CONTES DE JADIS

COLLECTIONPARCOURS D’UNE ŒUVRESOUS LA DIRECTION DE MICHEL LAURIN

CHENELIÈRE ÉDUCATION

Complément pédagogiquePaul-G. Croteau

© 2010 Chenelière Éducation inc.

Il était une fois… Perrault et autres contes de jadis Complément pédagogique Étude des œuvres Par Paul-G. Croteau, enseignant au cégep de Trois-Rivières Collection « Parcours d’une œuvre » Sous la direction de Michel Laurin © 2010 Chenelière Éducation inc. Édition : Sophie Gagnon et Johanne O’Grady Coordination : Valérie Côté et Johanne Lessard Correction d’épreuves : Christine Langevin ISBN 978 2 7616 5457 9

Tous droits réservés. Toute reproduction, en tout ou en partie, sous quelque forme et par quelque procédé que ce soit, est interdite sans l’autorisation écrite préalable de l’Éditeur. Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIÉ) pour nos activités d’édition. Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC. Tableau de la couverture : Sans titre. Œuvre d’Eva Frantová, illustratrice tchèque contemporaine.

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IL ÉTAIT UNE FOIS PERRAULT… ET AUTRES CONTES DE JADIS

Complément pédagogique

QUESTIONS SUR LES CONTES

LES SOUHAITS RIDICULES (P. 4-9) Questions globales sur le texte 1. Résumez ce conte en vers en vous assurant d’indiquer clairement les personnages, leurs actions et les lieux où elles prennent place. Personnages extradiégétiques : aux vers 1 à 20, le narrateur (je) ou Perrault (l’auteur) s’adresse à un destinataire (vous, probablement à Mademoiselle de La C***, ou encore au lecteur), pour le prévenir du contenu du conte (vers 21-154). Apparaissent ensuite les personnages du conte comme tel : « un pauvre bûcheron » (v. 21) nommé Blaise (v. 64), son épouse, Fanchon (v. 56) et Jupiter (v. 30), « du monde entier […] le souverain maître » (v. 40). Trois lieux seulement sont mentionnés : la forêt (« le bois », v. 29), la chaumière du bûcheron et l’extérieur de cette maison (« sous l’orme », v. 97). RÉSUMÉ : Travaillant en forêt, Blaise se plaint de sa pénible vie : il ne trouvera le repos qu’à la mort (v. 21-29). Un jour, Jupiter lui apparaît et lui accorde trois souhaits (v. 30-46). Le bûcheron retourne chez lui, se promettant bien de ne « rien faire à la légère » (v. 52), ce avec quoi son épouse est bien d’accord (v. 47-70). Tout bascule à partir du vers 71, quand Blaise goûte la douceur du repos… et du vin. Par inadvertance, il souhaite une aune de boudin (premier souhait). Fanchon l’injurie et l’envoie cuver son vin dehors, « sous l’orme » (v. 71-97). Une fois seul à l’extérieur, Blaise songe à souhaiter être veuf, mais se ravise et souhaite que le boudin « pend[e] au bout du nez » (v. 105) de sa pécore d’épouse (deuxième souhait). Suit un épisode où l’époux se demande s’il doit employer son troisième et dernier souhait pour se faire roi (et elle, reine) ou pour redonner à Fanchon son apparence première, puis se résout à cette solution (v. 110-149). Le conte se termine par une courte strophe, la morale, où l’auteur montre que les « hommes misérables » sont incapables « [d]e bien user des dons que le Ciel leur a faits » (v. 150-154).

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2. Quel est le sujet de conversation préféré des « précieuses », selon ce conte? Pour étoffer votre réponse, référez-vous à la « Présentation de l’œuvre », en particulier aux sections portant sur les arts, la langue et les salons. « […] une précieuse, / Qui, toujours tendre et sérieuse, / Ne veut ouïr parler que d’affaires de cœur » (v. 8-10). Les mots « tendre » et « affaires de cœur » indiquent que le sujet de prédilection des précieuses de cette époque est l’amour, sujet qu’elles prennent très au sérieux. L’étudiant pourra relire les sections suivantes de la « Présentation de l’œuvre » : « La langue » (p. 129), « Les salons, la langue et la théorie classique » (p. 132-134) et « L’exploration de quelques pistes thématiques » (p. 157-159). L’enseignant pourra également distribuer toute autre documentation sur les précieuses et leur rôle dans la société de l’époque. 3. La dernière strophe (v. 150-154) constitue la morale. Expliquez le sens de ces cinq vers (au besoin, récrivez-les en langage clair) et cherchez ce qui, dans le conte, concorde avec cette moralité. Reformulation : il est donc bien vrai qu’il n’appartient pas aux hommes misérables de faire des souhaits (car ils sont aveugles, imprudents, inquiets et changeants), et que peu d’entre eux sont capables de bien employer les dons que Dieu leur a faits. Perrault reprend une idée répandue à son époque, selon laquelle les gens des classes sociales inférieures sont un peu simples, pour ne pas dire primitifs, ce qui explique leur condition misérable. Un souhait donné à une telle personne est un souhait perdu, comme le démontre le conte. En sous-entendu, Perrault semble défendre l’idée corollaire : les gens « de qualité » sont nobles et appartiennent à la classe dirigeante : eux sauraient quoi faire de tels vœux. Compréhension 1. Qui apparaît au bûcheron dans la forêt? Cherchez dans le dictionnaire des renseignements sur ce personnage. Jupiter, père et roi des dieux dans la mythologie de la Rome antique, semblable au Zeus des Grecs, qui dispense les biens et les maux aux mortels. Comme le Dieu unique des chrétiens, il semble tout-puissant. On s’étonne de le voir s’occuper d’affaires aussi triviales que le bonheur d’un bûcheron, car on le voit plutôt arbitrer de grands conflits entre les hommes ou les dieux de l’Olympe. 2. Quelle est la première réaction du bûcheron face à cette apparition? Expliquez-la brièvement. La peur : « À lui, la foudre en main, Jupiter s’apparut. / On aurait peine à bien dépeindre / La peur que le bonhomme en eut » (v. 30-32). Deux causes expliquent peut-être la crainte du bûcheron : la foudre que le dieu tient en main, instrument de guerre qui lui a valu sa victoire sur les dieux primordiaux, et le sentiment d’avoir dérangé un personnage trop puissant. 3. Quelle mise en garde ce personnage adresse-t-il au bûcheron? De bien réfléchir avant de formuler ses vœux : « Songes-y bien avant que de les faire » (v. 46). 4. Quels noms portent le bûcheron et son épouse? Blaise (v. 64) et Fanchon (v. 56).

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5. Quelle résolution prennent d’abord les époux concernant la décision à prendre? Attendre au lendemain, prendre du repos avant la décision finale : « […] consultons notre chevet » (v. 69). Le chevet est l’oreiller placé à la tête du lit, ou la tête du lit elle-même. Les termes de mise en garde et de prudence abondent dans cette séquence : « rien faire à la légère », « le cas est important », « prendre avis », « considérant l’importance / De s’y conduire avec prudence », « Ne gâtons rien par notre impatience », « Examinons bien » et « Ce qu’il faut faire ». 6. Expliquez les trois souhaits formulés par les deux personnages, en précisant qui les fait et quelles en sont les conséquences immédiates. Premier souhait : Blaise souhaite une aune de boudin, ce qui provoque la colère de l’épouse. Deuxième souhait : Pendant qu’il est seul sous l’orme, fâché contre son épouse, il souhaite que le nez de cette dernière soit remplacé par le boudin en question. Troisième souhait : Blaise ou Fanchon, c’est incertain, préfère garder l’apparence normale de la femme qui, tout bien considéré, est assez jolie : ce serait une reine laide avec son nez en boudin! Conséquence finale : ils perdent tout, ou plutôt reviennent à leur état premier (rien n’est changé dans leur vie, sauf peut-être les reproches qu’ils s’adresseront l’un à l’autre jusqu’à la mort). 7. Résumez les arguments exposés dans le conte pour décider si Fanchon doit ou non conserver un nez en forme de boudin. Arguments pour lui enlever le boudin : « Fanchon était jolie » (v. 111) : le boudin défaisait son beau visage. Au cas où son troisième souhait serait de devenir roi, il la rendrait malheureuse de devoir monter sur un trône avec un visage ainsi déformé (v. 123-129). Arguments pour qu’elle le conserve : « Il l’empêchait de parler aisément. / Pour un époux merveilleux avantage » (v. 116-117). Au cas où son troisième souhait la ferait reine, « quand on est couronnée, / On a toujours le nez bien fait » (v. 139-140). Blaise remet la décision finale à l’épouse : « […] qu’elle-même elle soit la maîtresse / De devenir une grande princesse / En conservant l’horrible nez qu’elle a, / Ou de demeurer bûcheronne / Avec un nez comme une autre personne » (v. 131-135). « Elle aima mieux garder son bavolet » (v. 142). Est-ce elle qui formule le troisième souhait, ou demande-t-elle à son époux de prendre cette décision en sa faveur? Style 1. Dans les 20 premiers vers, à qui renvoient les pronoms « je » et « vous »? Je = le narrateur ou l’auteur. Vous = le lecteur, ou le destinataire particulier (Mademoiselle de La C*** qui apparaît dans la dédicace). Note : on peut faire le même exercice pour les 20 premiers vers de Peau d’Âne.

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2. La deuxième strophe (v. 21-28) résume la vie du bûcheron dans la situation initiale du conte. Relevez les termes et expressions qui traduisent le mieux cette situation. Qu’observez-vous? « [P]auvre bûcheron », « las », « pénible vie », « Avait, disait-il, grande envie / De s’aller reposer aux bords de l’Achéron » (envie de mourir), « douleur profonde », « jamais […] un seul de ses souhaits ». Le vocabulaire négatif fait ressortir la tristesse, le malheur, la misère et la pauvreté, au point que le bonhomme songe que le seul moment où il pourra se reposer, c’est quand il aura atteint le séjour des morts (Achéron). 3. Le début de la quatrième strophe (v. 47-58) décrit une situation tout à l’opposé de celle décrite dans la deuxième (question précédente). Relevez et expliquez les termes qu’emploie l’auteur pour décrire cette nouvelle situation. « [G]ai bûcheron », « embrassant sa falourde » (sens propre : baiser; sens figuré : prendre dans ses bras, accepter, car sa charge lui paraît moins lourde), « Cette charge jamais ne lui parut moins lourde », « trottant », « Çà » (interjection d’encouragement, traduisant ici une certaine joie), « Faisons […] grand feu » (contraire de petit feu, sens propre et figuré), « grand chère » (notez la répétition de l’adjectif), « riches à jamais ». L’auteur insiste en employant un vocabulaire positif qui traduit la joie du personnage, son optimisme, l’abondance qu’il imagine « à jamais » (pour toujours), ce qui cause sa jubilation. Il est prêt à de grandes dépenses (grand feu = beaucoup de bois; grand chère = nourriture abondante). 4. Relevez les injures que les époux s’adressent l’un à l’autre. Quand Blaise arrive au foyer, l’harmonie règne entre les deux époux, ils sont heureux, ils sont d’accord sur la marche à suivre, etc. Dès que celui-ci formule un souhait naïf et idiot, les injures se mettent à pleuvoir. Ce que Fanchon dit de son mari : « par bêtise toute pure », « homme imprudent », « Il n’est point de pouille et d’injure [… qu’elle] ne dît au pauvre époux » (notez qu’il est déjà revenu à son état premier de pauvreté), « attendez-moi sous l’orme » (allez réfléchir dehors), « il faut être bien bœuf » (bête). Blaise ne prononce qu’une seule injure au sujet de son épouse : « maudite pécore », bien que le mot « boudin » répété (v. 103) suggère une insulte (voir question suivante). En son for intérieur, il considère qu’il y a un avantage au boudin : il empêche l’épouse trop bavarde, trop geignarde de parler (il la considère « chialeuse »). 5. Cherchez dans le dictionnaire les diverses significations du mot « boudin » et recopiez celles qui s’appliquent aux personnes. Quelle connotation ressort de l’emploi de ce terme? Le Larousse ne donne aucun exemple d’emploi négatif désignant une personne, sauf, et encore!, « tourner en eau de boudin », c’est-à-dire finir par un échec. Le Robert donne comme familier le mot boudin désignant une fille mal faite, petite, grosse et sans grâce. Bien que ces qualificatifs ne conviennent pas à Fanchon, qui est plutôt jolie (v. 111), ces deux exemples montrent que le mot peut être employé de manière péjorative. Blaise est fâché, il dit tout le négatif qui lui passe par la tête pour désigner son épouse.

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Débat 1. Êtes-vous d’accord avec Perrault lorsqu’il affirme, au sujet des gens misérables, « que peu d’entre eux sont capables / De bien user des dons que le Ciel leur a faits » (v. 153-154)? Les gens ordinaires sont-ils vraiment condamnés à la misère? Qu’est-ce qui peut être fait pour leur éviter ce sombre destin? Il n’y a ni bonne ni mauvaise réponse ici. Il importe surtout de trouver des arguments qui corroborent ou infirment la position de Perrault. Le fait est, cependant, que la misère s’accompagne souvent de peu d’instruction : quand on n’a pas de quoi se mettre dans le ventre, ce qu’on peut se mettre dans la tête passe au second rang. La discussion pourrait être orientée de manière à faire comprendre que ce « destin » n’est pas inéluctable, qu’il peut être contourné et prévenu par l’instruction, la formation et même l’éducation.

EXTRAIT 1 (P. 4-9)

Sujet d’analyse 1. Prouvez que Perrault dépeint les paysans sous un jour négatif en leur attribuant surtout des défauts. La moralité (v. 150-154) donne plusieurs exemples de défauts attribués aux gens des classes inférieures : misérables, aveugles, imprudents, inquiets, variables, (in)capables. Ces qualificatifs peuvent servir de base à une analyse des aspects négatifs que l’auteur veut faire ressortir. Vers la dissertation 1. À la fin du conte, la situation du bûcheron et de son épouse est-elle pire ou meilleure qu’au début? Appuyez votre prise de position tant sur les idées que sur les choix stylistiques de l’auteur. En fait, on note un retour à la situation de départ, sauf en ce qui a trait aux reproches que l’un et l’autre ne manqueront pas de s’adresser jusqu’à la fin de leurs jours, selon toute probabilité.

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PEAU D’ÂNE (P. 11-31) Questions globales sur le texte 1. Dressez un portrait des deux aspects opposés de la fille du roi en relevant les passages descriptifs de son apparence de princesse et ceux de son apparence de gardienne de basse-cour. Belle princesse : « L’infante seule était plus belle / Et possédait certains tendres appas / Que la défunte n’avait pas » (v. 112-114); « […] la jeune princesse » (v. 151); « Elle se décrassait, puis ouvrait sa cassette, / Mettait proprement sa toilette, / Rangeait dessus ses petits pots. / Devant son grand miroir, contente et satisfaite, / De la lune tantôt la robe elle mettait, / Tantôt celle où le feu du soleil éclatait, / Tantôt la belle robe bleue / Que tout l’azur des cieux ne saurait égaler, / Avec ce chagrin seul que leur traînante queue / Sur le plancher trop court ne pouvait s’étaler. / Elle aimait à se voir jeune, vermeille et blanche / Et plus brave cent fois que nulle autre n’était; / Ce doux plaisir la sustentait » (v. 291-303); « Elle avait pris une riche parure / Et ses superbes vêtements / Qui, tissus de fin or et de gros diamants, / Égalaient du soleil la clarté la plus pure. / Le prince au gré de son désir / La contemple et ne peut qu’à peine, / En la voyant, reprendre haleine, / Tant il est comblé de plaisir. / Quels que soient les habits, la beauté du visage, / Son beau tour, sa vive blancheur, / Ses traits fins, sa jeune fraîcheur / Le touchent cent fois davantage; / Mais un certain air de grandeur, / Plus encore une sage et modeste pudeur, / Des beautés de son âme assuré témoignage » (v. 339-353); « Une petite main qui semblait de l’ivoire / Qu’un peu de pourpre a coloré » (v. 501-502); « Avec ses pompeux vêtements / Dont les riches beautés n’eurent jamais d’égales; / Que ses aimables cheveux blonds / Mêlés de diamants dont la vive lumière / En faisait autant de rayons, / Que ses yeux bleus, grands, doux et longs, / Qui pleins d’une majesté fière / Ne regardent jamais sans plaire et sans blesser, / Et que sa taille enfin si menue et si fine / Qu’avecque ses deux mains on eût pu l’embrasser, / Montrèrent leurs appas et leur grâce divine » (v. 516-526). Souillon gardienne de basse-cour : « “[…] La dépouille de l’âne est un masque admirable. / Cachez-vous bien dans cette peau, / On ne croira jamais, tant elle est effroyable, / Qu’elle renferme rien de beau.” / La princesse ainsi travestie » (v. 244-248); « Le visage couvert d’une vilaine crasse » (v. 267); « La voyant si maussade et si pleine d’ordure, / Ne voulaient écouter ni retirer chez eux / Une si sale créature » (v. 271-273); « D’une souillon, dont l’industrie / Allât jusqu’à savoir bien laver des torchons / Et nettoyer l’auge aux cochons » (v. 277-279); « Où les valets, insolente vermine, / Ne faisaient que la tirailler, / La contredire et la railler; / Ils ne savaient quelle pièce lui faire, / La harcelant à tout propos; / Elle était la butte ordinaire / De tous leurs quolibets et de tous leurs bons mots » (v. 281-287); « C’est, lui dit-on, Peau d’Âne, en rien nymphe ni belle / Et que Peau d’Âne l’on appelle, / À cause de la peau qu’elle met sur son cou; / De l’amour c’est le vrai remède, / La bête en un mot la plus laide, / Qu’on puisse voir après le loup » (v. 371-376); « Cette Peau d’Âne est une noire taupe / Plus vilaine encore et plus gaupe / Que le plus sale marmiton » (v. 389-391); « cette sale guenon » (v. 499). 2. Par quels aspects, surtout, le conte Peau d’Âne ressemble-t-il à Cendrillon? — Les deux jeunes filles sont méprisées de leur entourage et accomplissent des besognes humiliantes et pénibles.

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— Les deux sont remarquables par la taille minuscule d’une partie de leur corps (doigt, pied). — Elles ont une grande beauté, mais aussi des qualités morales que personne ne voit au premier coup d’œil. Il faut le hasard d’une rencontre amoureuse pour que ces qualités éclatent au grand jour. — La morale est similaire : il ne faut pas se fier uniquement aux apparences, car comme il se cache parfois un bijou, une pierre précieuse dans la boue et la crasse, il se cache parfois aussi une personne de grande valeur dans la misère et la pauvreté. 3. Résumez les morales qui se trouvent dans les quatre dernières strophes (v. 568-591). Précisez à quelles parties du conte chaque élément renvoie. — Malgré les épreuves, la vertu est toujours récompensée. C’est surtout le personnage de Peau d’Âne qui incarne cet aspect : elle doit endurer l’insupportable amour de son père, traverser de rudes épreuves, conserver son affreux déguisement jusqu’à la dernière minute avant de voir sa patience et sa vertu récompensées. — L’amour fou défie toute raison, aucune barrière ne peut arrêter un cœur amoureux. Deux amoureux représentent cette morale : le roi, père de la princesse, et le jeune prince. Les deux sont dévorés d’un amour incontrôlable et sont prêts à toutes les folies pour obtenir l’objet de leurs désirs. Au début du conte, pour satisfaire son incestueux appétit, le père offre à sa fille les robes les plus extravagantes et tue l’âne qui est la principale source de sa richesse. C’est le côté sombre de l’amour fou, qui conduit à des actes contre nature. Le prince quant à lui, persuadé que les autres n’ont pas décelé la beauté cachée chez la plus horrible souillon, défie son entourage, impose le respect de son désir, quitte à se laisser mourir de langueur s’il n’est pas satisfait. C’est un aspect plus éblouissant de l’amour fou : ne jamais abandonner si l’on est certain d’avoir raison, ne pas se fier uniquement aux apparences, etc. — Tout le monde, c’est naturel!, désire être beau, et cherche à l’être, même s’il faut pour cela faire des sacrifices (se contenter de peu, se nourrir uniquement de pain et d’eau). La séquence qui illustre le mieux ce sujet, c’est celle où l’on voit Peau d’Âne, derrière des portes closes, se vêtir et agir en princesse. Elle doit conserver son horrible déguisement de peur d’être reconnue et renvoyée dans le royaume de son père, où ne l’attend qu’un mariage incestueux. Mais dès qu’elle le peut, elle se consacre à sa beauté et à ses belles robes. — Le conte est difficile à croire, mais sa renommée est de toutes les époques. Aucune partie spécifique du conte ne correspond à cette morale. Il s’agit plutôt d’un argument pour le rendre plus convaincant, plus réaliste aux yeux des lecteurs-auditeurs. On voit de nombreux contes oraux se terminer ainsi, par une sorte de mise en garde contre ceux qui ne croiraient pas en la vérité de ce qui vient d’être raconté. Compréhension 1. Au début de ce conte, de combien de membres se compose la famille du roi? Précisez qui ils sont. Trois personnes : le roi, son épouse (la reine) et leur fille (la princesse qui sera plus tard connue sous le nom de Peau d’Âne).

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2. Quelle est la source de la richesse du roi? L’âne qui « ne faisait jamais d’ordure » (v. 54), mais des pièces d’or (« écus au soleil / Et louis de toute manière », v. 55-56) qu’on recueille sur sa litière chaque matin. 3. Quelle exigence la reine formule-t-elle au roi sur son lit de mort? Au fond d’elle-même, quel espoir secret entretient-elle en faisant cette demande? Qu’il pourra épouser uniquement une femme « plus belle, / Mieux faite et plus sage » qu’elle-même. Elle a tellement confiance en elle qu’elle croit qu’il lui sera impossible de trouver une femme supérieure à elle-même, et que donc le roi restera veuf et ne se remariera jamais. Elle est bien loin de se douter que cette exigence causera la perte de sa propre fille. 4. Quelle est la seule personne digne du serment fait par le roi à la reine mourante? L’infante, c’est-à-dire la propre fille du roi, est la seule à posséder toutes les qualités requises pour devenir son épouse, ce qui évidemment constitue un inceste (v. 112-120). 5. Quelles exigences impose la princesse, conseillée par la fée, avant d’accepter le mariage incestueux? Elle exige successivement trois robes puis, voyant que sa stratégie n’a pas jusqu’à ce moment fonctionné, elle demande la peau de l’âne magique. 6. Quelle menace profère le roi envers les tailleurs de son royaume? Il les fera pendre s’ils ne fabriquent une robe selon les exigences de la princesse (v. 154-157). Il menace le lapidaire, créateur de la dernière robe de le faire « mourir au milieu des tourments » (v. 193). 7. Retrouvez les mots employés par Perrault pour désigner les ouvriers qui fabriquent chacune des trois robes exigées par la princesse. Qu’est-ce que ces trois mots nous apprennent au sujet de la matière ou de la technique avec laquelle chacune est fabriquée? Tailleurs (v. 154), brodeur (v. 172) et lapidaire (v. 189). La première robe est de tissu; la seconde; de broderie; la dernière, ornée de pierres précieuses. 8. Combien de temps prend la fabrication de la première robe? de la seconde? et de la troisième? Deux jours, ou peut-être un peu moins pour la première robe (v. 158-159), quatre jours pour la seconde (v. 174-175), et moins d’une semaine pour la dernière (v. 196). 9. En vous fondant sur les descriptions de Perrault, dites de quelle couleur est chacune des trois robes. Bleue (v. 160), argent (v. 178) et d’or et de diamants (v. 191). 10. La fée est persuadée que le roi refusera de satisfaire le dernier vœu de sa fille, c’est-à-dire de tuer l’âne magique. Sur quel argument se fonde-t-elle? L’âne est la principale source de la richesse du roi (v. 206-214).

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11. Voyant que le subterfuge des requêtes exagérées ne fonctionne pas, quel conseil la marraine donne-t-elle à la princesse? De s’enfuir, d’aller vivre ailleurs, sous un déguisement : « […] qu’elle s’en aille en quelque État lointain » (v. 230). 12. Expliquez comment la princesse pourra transporter avec elle tous ses biens précieux. Faites la liste de ce qu’elle y a déposé. Une grande cassette qui la suivra « sous la terre cachée » (v. 239). Elle n’aura qu’à frapper la terre pour la voir apparaître avec tous ses biens. Habits, miroir, toilette, diamants et rubis (v. 233-235). 13. Ayant fui le royaume de son père, quel travail la princesse trouve-t-elle? Cherchez dans le dictionnaire le sens de ce mot pour vérifier s’il convient à la situation. Souillon (v. 277). Robert : 1. personne malpropre. 2. servante malpropre, sale. Larousse : personne malpropre. C’est donc parce qu’elle est malpropre qu’on l’engage, et non parce que le travail est salissant. On veut une personne malpropre qui ne rechignera pas à vivre parmi les cochons de la soue. 14. Comment les valets la traitent-ils? Bien que l’auteur qualifie les valets d’« insolente vermine », ces derniers semblent considérer Peau d’Âne comme une vermine d’un rang plus bas encore qu’eux. Ils la tiraillent, la contredisent, se raillent d’elle, lui jouent des tours et la harcèlent à tout propos, sans compter les moqueries de toutes sortes (v. 280-287). 15. À quoi la princesse passe-t-elle ses dimanches après-midi? Elle se plaît à redevenir la princesse qu’elle aurait pu être, si elle n’avait pas été victime d’un amour contre nature : « Elle entrait dans sa chambre et tenant son huis clos, / Elle se décrassait, puis ouvrait sa cassette, / Mettait proprement sa toilette, / Rangeait dessus ses petits pots. / Devant son grand miroir, contente et satisfaite, / De la lune tantôt la robe elle mettait, / Tantôt celle où le feu du soleil éclatait, / Tantôt la belle robe bleue / Que tout l’azur des cieux ne saurait égaler, / Avec ce chagrin seul que leur traînante queue / Sur le plancher trop court ne pouvait s’étaler. / Elle aimait à se voir jeune, vermeille et blanche / Et plus brave cent fois que nulle autre n’était » (v. 290-302). Au fond, Perrault dit à toutes les petites filles qui jouent à la princesse qu’elles en sont aussi, car leur rituel est en tout point semblable à celui de Peau d’Âne. 16. Le prince tombe par hasard sur Peau d’Âne. Par quel moyen l’observe-t-il à la dérobée? Il l’observe par le « trou de la serrure » (v. 337).

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17. Qu’est-ce qui empêche le prince d’enfoncer la porte quand il épie Peau d’Âne? Il voudrait bien le faire, son amour l’aiguillonne, mais il se retient : « […] croyant voir une divinité, / Trois fois par le respect son bras fut arrêté » (v. 357-358). Que craint-il, que « respecte »-t-il exactement? On ne sait trop si c’est la vengeance de cette divinité, ou encore s’il craint de passer pour un goujat auprès de la belle qu’il convoite. 18. Dans sa hâte, en faisant un gâteau pour le prince, quelle gaffe commet la princesse? « De son doigt par hasard il tomba dans la pâte / Un de ses anneaux de grand prix » (v. 408-409). 19. Quels moyens emploient certaines jeunes filles pour tenter de réduire la taille de leur annulaire? « L’une [...] / Comme une rave le ratisse » (v. 457-458) : avec un économe ou couteau à éplucher. « L’autre en coupe un petit morceau » (v. 459). « Une autre en le pressant […] l’apetisse » (v. 460) : elle le presse entre ses doigts, entre les mâchoires d’un outil, elle appuie fort dessus ou le place sous un objet pesant? « Et l’autre, avec de certaine eau, / Pour le rendre moins gros en fait tomber la peau » (v. 461-462) : elle emploie une sorte d’acide qui brûle la peau. Ces quatre moyens illustrent bien que les filles sont prêtes à tout pour atteindre le but d’épouser le prince charmant. Précédemment, le roi, amoureux de sa propre fille, avait agi avec une frénésie comparable. On pourrait lancer une belle discussion sur les extrémités auxquelles les humains sont prêts pour satisfaire une passion ou réaliser une ambition, si folle soit-elle. 20. Qui sont les premières jeunes filles à faire l’essai de l’anneau? Les jeunes filles nobles. Perrault les énumère en respectant la hiérarchie aristocratique : d’abord les princesses, puis les marquises et duchesses, ensuite les comtesses et baronnes, enfin « toutes les nobles personnes » (v. 466-471). 21. Quelles sont les deux surprises que Peau d’Âne provoque devant toute la cour? — L’anneau lui va à merveille (v. 503-505). — Elle change de vêtements et revient à la cour parée magnifiquement, affichant tous les attributs d’une vraie princesse : vêtements, coiffure, pierres précieuses, regard majestueux, port et finesse de la taille, etc. (v. 514-528). 22. Quels deux invités-surprises se présentent au mariage du prince et de Peau d’Âne? Le roi (le père de la princesse) et la fée marraine.

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Style 1. Dans la première strophe, Perrault donne son opinion sur l’art et la littérature. Résumez son point de vue et dites à quoi cet avis s’oppose. Quel procédé renforce cette opposition? Perrault dit qu’on peut parfois prendre plaisir à des choses simples (comme les « marionnettes » et les « agréables sornettes »). L’esprit peut se laisser bercer par « des contes d’ogre et de fée ». Ils ne sont pas réservés aux seuls enfants, puisque même « la raison la mieux sensée, / [est] Lasse souvent de trop veiller ». Plusieurs termes employés dans certains textes pour dévaloriser prennent ici une valeur positive. À l’opposé, des gens guindés voudraient que tout soit solennel et parfait. Cette idée est mise en évidence par un champ lexical de la grandeur ou de l’excellence : « pompeux », « sublime », « grave », « sérieux », « raison la mieux sensée ». Cette liste d’adjectifs met en évidence une certaine exagération : l’auteur semble manifester un certain mépris pour les gens qui voudraient que tout soit toujours parfait. 2. Après avoir relu les vers 21 à 46, dressez, en trois tableaux distincts, la liste des termes positifs employés pour décrire le roi, la reine et leur palais. Le vocabulaire appréciatif (surtout des adjectifs) fait ressortir les principales qualités de chacun. Le roi : « Le plus grand qui fût sur la terre », « Aimable en paix », « terrible en guerre », « Seul enfin comparable à soi » (incomparable), « Ses voisins le craignaient » (craint), « palmes » (honneurs militaires), il encourage « les vertus et les beaux arts », il est « heureux roi » et « heureux époux ». La reine : « aimable moitié », « compagne fidèle », « si charmante », « si belle », « esprit si commode et si doux ». La description de leur mariage et de leur vie de couple renforce les aspects positifs de la description des personnages : « tendre et chaste hyménée », « Plein de douceur et d’agrément », « tant de vertus ». Leur palais : leur environnement est le reflet de cette description positive : « vaste et riche palais », « magnificence », « fourmillait une vive abondance / De courtisans et de valets », les écuries sont remplies de « [g]rands et petits chevaux », « [c]ouverts de beaux caparaçons […] d’or et de broderie ». 3. Par quelle expression l’auteur fait-il comprendre que la princesse est fille unique? « [..] ils se consolaient aisément / De n’avoir pas de plus ample lignée » (v. 37-38). 4. Quels procédés stylistiques dominent dans la description de l’âne, entre les vers 47 et 58? Les hyperboles, les termes d’amplification, les superlatifs, les mots servant à mettre en valeur les aspects positifs : « ce qui surprenait tout le monde », « lieu le plus apparent », « Un maître âne », « grandes oreilles », « ses vertus nonpareilles », « l’honneur [ne fut pas] trop grand », « Tel et si net », « il ne faisait jamais d’ordure »,

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« bien beaux écus au soleil », « de toute manière », « Tous les matins ». Observons aussi la répétition (grand, tout). 5. Quelles expressions des vers 59 à 69 amènent le lecteur à pressentir la mort tragique de la reine? Dans cette même strophe, comment l’auteur décrit-il la maladie qui l’emporte? « […] le Ciel […] se lasse / De rendre les hommes contents, / […] toujours à ses biens mêle quelque disgrâce, / Ainsi que la pluie au beau temps ». Remarquons l’opposition entre « le Ciel et les hommes », « se lasse » et « contents », « biens » et « disgrâce », « pluie » et « beau temps », procédé qui met en évidence l’aspect négatif de la maladie qui approche. Jusqu’à présent, tout allait pour le mieux, le malheur approche. Au départ, c’est une simple attaque (v. 64), bien que la maladie soit âpre (v. 63). À la fin de la strophe, c’est un feu destructeur : « incendie », « fièvre », « allumait ». Cette progression est soulignée par l’auteur lui-même : « […] en s’augmentant toujours » (v. 69). 6. Expliquez le sens des vers 94 à 99 et observez-y les principaux procédés stylistiques. L’auteur met en évidence le fait que celui qui crie et pleure le plus fort n’est pas nécessairement celui qui a le plus de peine. Silence total en effet sur la douleur de la fille. L’hyperbole accompagne l’antiphrase dans ces vers : « jamais », « tant de vacarmes », « sangloter et les nuits et les jours » (v. 95-96), « son deuil ne lui durerait guère » (v. 97), et « homme pressé qui veut sortir d’affaires » (v. 99). 7. Entre les vers 112 et 118, cherchez les expressions employées par l’auteur pour prouver que l’amour rend déraisonnable. (Il s’agit bien des vers 112 à 118.) Après avoir insisté sur la beauté et les qualités exceptionnelles de la princesse, l’auteur décrit la réaction du roi, où sont mis en évidence les termes suivants : « brûlant », « amour extrême », « follement » (en antithèse avec « s’aviser » et « raison »). Ces expressions évidemment qualifient l’amour incestueux que le roi éprouve pour sa fille. 8. Relevez les termes importants de la description des trois robes exigées et reçues par la princesse. Première robe : « Une robe qui soit de la couleur du temps » (v. 147). Le roi répète mot pour mot la formule à ses tailleurs : « Une robe qui fût de la couleur du temps » (v. 156). Trois termes décrivent le bleu (« bleu », « empyrée », « azurée ») et au moins trois formules l’amplifient (« le plus », « gros », « plus ») : « Le plus beau bleu de l’empyrée / N’est pas, lorsqu’il est ceint de gros nuages d’or, / D’une couleur plus azurée » (v. 160-162). Deuxième robe : Voyant la première demande satisfaite, la marraine conseille à la princesse d’en demander une qui, « plus brillante et moins commune, / Soit de la couleur de la lune » (v. 168-169). La réponse du roi, instantanée, contient entre autres une périphrase (il ne répète pas mot à mot, tout en étant aussi autoritaire) : « Que l’astre de la nuit n’ait pas plus de splendeur / Et que dans quatre jours sans faute on me la rende » (v. 173-174). « Dans les cieux où la nuit a déployé ses voiles, / La lune est moins pompeuse en sa robe d’argent / Lors même qu’au milieu de son cours diligent / Sa plus vive clarté fait pâlir les étoiles » (v. 177-180). En plus d’une

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nouvelle périphrase (« en sa robe d’argent »), par deux fois, l’auteur oppose le « moins » au « plus ». Troisième robe : Cette fois, les mots « encore plus » visent une sorte de paroxysme de la beauté : « Je ne saurais être contente / Que je n’aie une robe encore plus brillante / Et de la couleur du soleil » (v. 185-187). Le roi se fait plus autoritaire encore : « […] lui commanda de la faire / D’un superbe tissu d’or et de diamants, / Disant que s’il manquait à le bien satisfaire, / Il le ferait mourir au milieu des tourments » (v. 190-193). La description aligne les hyperboles : « […] l’ouvrage précieux, / Si beau, si vif, si radieux, / Que le blond amant de Clymène, / Lorsque sur la voûte des cieux / Dans son char d’or il se promène, / D’un plus brillant éclat n’éblouit pas les yeux » (v. 197-202). Dans les trois cas, on observe la même séquence d’évènements : demande de la princesse sous les conseils de la marraine, requête royale et enfin description de l’ouvrage terminé. Ce sont principalement des hyperboles et des analogies avec le temps, la lune et le soleil qui créent une image amplifiée de la beauté de chacune des robes. 9. Entre les vers 254 et 265, l’auteur emploie à plusieurs reprises l’énumération. Relevez ces énumérations et expliquez-en l’effet. Endroits où l’on cherche la princesse sans la trouver : « Il n’est point de maison, de chemin, d’avenue » (v. 254) et « Qu’on ne parcoure promptement; / Mais on s’agite vainement, / On ne peut deviner ce qu’elle est devenue » (v. 255-257) (succession de phrases dont le sujet est « on »). Description de la tristesse qui se répand dans le royaume : « […] se répandit un triste et noir chagrin; / Plus de noces, plus de festin » (v. 258-259). Notez l’opposition entre les deux vers. Nourriture, ou plutôt absence de nourriture : « Plus de noces, plus de festin, / Plus de tarte, plus de dragées », « N’en dînèrent point la plupart » et « [le curé] déjeuna fort tard » (v. 259-264). Les trois énumérations accentuent la situation malheureuse qu’est la disparition de la princesse. 10. Relevez, entre les vers 275 et 314, les caractéristiques de la métairie où se réfugie la princesse. Quels procédés stylistiques dominent dans cette description? Perrault fait d’abord ressortir l’idée de saleté, de travail pénible : « souillon », « torchons », « nettoyer l’auge aux cochons », « Elle se décrassait ». Cette situation établie, l’auteur l’accentue par une strophe (v. 280-287) qui montre les valets, situés tout au bas de la hiérarchie sociale, qui se moquent de la princesse (ils ignorent évidemment son véritable statut). Dans cette strophe, on observe deux énumérations, l’une composée de verbes à l’infinitif (« tirailler », « contredire », « railler »), l’autre de noms (« pièce », « butte ordinaire », « quolibets », « bons mots »). Les hyperboles en augmentent l’effet (« un coin au fond de la cuisine », « Ne faisaient que », « à tout propos », « tous leurs quolibets », « tous leurs bons mots »).

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« On la mit dans un coin au fond de la cuisine Où les valets, insolente vermine,

Ne faisaient que la tirailler, La contredire et la railler;

Ils ne savaient quelle pièce lui faire, La harcelant à tout propos; Elle était la butte ordinaire

De tous leurs quolibets et de tous leurs bons mots. » Ensuite, Perrault crée un contraste très fort en décrivant les activités du dimanche, où la souillon redevient princesse derrière des portes closes (v. 288-304). Dans ce lieu, le pire endroit de la ferme, le lecteur découvre un trésor caché. Encore une fois dominent les énumérations (verbes à l’imparfait : « Mettait », « Rangeait », « mettait », « aimait », « sustentait », « menait ») et les hyperboles (« proprement », « le feu du soleil éclatait », « belle robe bleue / Que tout l’azur des cieux ne saurait égaler », « trop court », « plus brave cent fois que nulle autre »). Le contraste est relevé par des antithèses (« petits pots »/« grand miroir »; « la lune »/« le soleil »; « traînante queue »/« plancher trop court ») et des répétitions (« mettait », « tantôt », « robe »). Des qualificatifs appréciatifs décrivent la princesse : « contente et satisfaite », « jeune, vermeille et blanche », « brave ». Ici, tout est splendeur :

« Mettait proprement sa toilette, Rangeait dessus ses petits pots.

Devant son grand miroir, contente et satisfaite, De la lune tantôt la robe elle mettait, Tantôt celle où le feu du soleil éclatait,

Tantôt la belle robe bleue Que tout l’azur des cieux ne saurait égaler, Avec ce chagrin seul que leur traînante queue Sur le plancher trop court ne pouvait s’étaler. Elle aimait à se voir jeune, vermeille et blanche Et plus brave cent fois que nulle autre n’était;

Ce doux plaisir la sustentait Et la menait jusqu’à l’autre dimanche. »

Enfin, l’auteur, grâce à une énumération d’animaux rares ou exotiques, montre la splendeur de la métairie qui recèle le recoin malpropre où Peau d’Âne travaille : « […] poules de Barbarie, / Râles, pintades, cormorans, / Oisons musqués, canes petières, / Et mille autres oiseaux de bizarres manières » (v. 309-312). Soulignons que ces derniers « [r]emplissaient à l’envi dix cours tout entières » (v. 314), alors que la princesse est dans une basse-cour. 11. Comparez la description du roi au début du conte à celle du prince aux vers 315 à 321. Que pense la princesse de ce dernier?

« Il était une fois un roi, Le plus grand qui fût sur la terre, Aimable en paix, terrible en guerre, Seul enfin comparable à soi :

Ses voisins le craignaient, ses États étaient calmes, Et l’on voyait de toutes parts

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Fleurir, à l’ombre de ses palmes, Et les vertus et les beaux arts » (v. 21-28). « Dans son vaste et riche palais Ce n’était que magnificence;

Partout y fourmillait une vive abondance De courtisans et de valets; Il avait dans son écurie

Grands et petits chevaux de toutes les façons; Couverts de beaux caparaçons, Roides d’or et de broderie » (v. 39-46).

« Le fils du roi dans ce charmant séjour Venait souvent au retour de la chasse

Se reposer, boire à la glace Avec les seigneurs de sa cour. Tel ne fut point le beau Céphale :

Son air était royal, sa mine martiale, Propre à faire trembler les plus fiers bataillons » (v. 315-321). Les deux personnages sont décrits de manière très semblable et arborent des attributs éblouissants : richesse des lieux, animaux rares, allure militaire. Les procédés sont identiques (énumérations, hyperboles, vocabulaire appréciatif). De nombreux termes sont d’ailleurs semblables : « un roi, / Le plus grand qui fût sur la terre » et « Son air était royal »; « terrible en guerre » et « sa mine martiale »; « son vaste et riche palais / Ce n’était que magnificence » et « ce charmant séjour », etc. L’auteur cependant donne au prince une beauté hors du commun, caractéristique plutôt attribuée à la reine et à la princesse au début du conte. Dès la première fois qu’elle pose un regard sur celui-ci, la princesse est séduite, préfiguration de la suite du conte. Le vocabulaire de l’amour ne laisse en effet aucun doute : « tendresse », « le cœur d’une princesse », « aimable », « À qui son cœur est engagé », « D’une robe de rien s’il m’avait honorée, / Je m’en trouverais plus parée ». « Peau d’Âne de fort loin le vit avec tendresse,

Et reconnut par cette hardiesse Que sous sa crasse et ses haillons

Elle gardait encor le cœur d’une princesse.

“Qu’il a l’air grand, quoiqu’il l’ait négligé, Qu’il est aimable, disait-elle, Et que bienheureuse est la belle À qui son cœur est engagé!

D’une robe de rien s’il m’avait honorée, Je m’en trouverais plus parée Que de toutes celles que j’ai.”» (v. 322-332).

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12. Étudiez la description de la princesse entre les vers 338 et 354. Comparez-la avec la description faite de Peau d’Âne entre les vers 371 et 391. Les deux descriptions sont tout à fait contraires : pas surprenant, dans ces conditions, que le prince cause une telle surprise à la cour en voulant que cette souillon lui cuisine un gâteau. Ce qui surprend encore plus, c’est qu’il présente tous les signes de l’amour désespéré pour celle que tous voient comme la dernière des dernières, car lui seul en fait connaît la véritable apparence de Peau d’Âne. Description de la princesse (v. 338-354) : « une riche parure », « ses superbes vêtements », « tissus de fin or et de gros diamants », « Égalaient du soleil la clarté la plus pure », « les habits, la beauté du visage, / Son beau tour, sa vive blancheur, / Ses traits fins, sa jeune fraîcheur », « un certain air de grandeur », « une sage et modeste pudeur, / Des beautés de son âme assuré témoignage ». Description de Peau d’Âne (v. 371-391) : « en rien nymphe ni belle », « Peau d’Âne l’on appelle, / À cause de la peau qu’elle met sur son cou », « La bête en un mot la plus laide, / Qu’on puisse voir après le loup », « Cette Peau d’Âne est une noire taupe / Plus vilaine encore et plus gaupe / Que le plus sale marmiton ». Effets de l’amour sur le prince : « Le prince au gré de son désir / La contemple et ne peut qu’à peine, / En la voyant, reprendre haleine, / Tant il est comblé de plaisir » (v. 343-346), « Le touchent cent fois davantage » (v. 350), « S’emparèrent de tout son cœur » (v. 354) , « On a beau dire, il ne saurait le croire; / Les traits que l’amour a tracés / Toujours présents à sa mémoire / N’en seront jamais effacés » (v. 377-380), « Il gémit, il pleure, il soupire, / Il ne dit rien, si ce n’est qu’il désire » (v. 384-385). 13. Expliquez le sens de l’expression « De l’amour c’est le vrai remède » (v. 374). La cour considère Peau d’Âne si laide qu’elle guérirait tout homme qui en tomberait amoureux (référence à l’expression « la maladie d’amour »). Il s’agit évidemment d’un trait d’ironie pour se moquer de cette fille de rien, mais on peut y voir une certaine raillerie envers le prince, comme pour dire qu’il est un peu fou d’être tombé amoureux de cette « noire taupe » (v. 289), de cette « sale guenon » (v. 499). 14. Relevez les expressions liées à la langueur amoureuse du prince entre les vers 359 et 387. Le sujet a été abordé à la question 12, mais on découvre ici d’autres expressions : « pensif il se retire », « nuit et jour il soupire », « Il ne veut plus aller au bal », « Il hait la chasse, il hait la comédie, / Il n’a plus d’appétit, tout lui fait mal au cœur », « le fond de sa maladie / Est une triste et mortelle langueur », « On a beau dire, il ne saurait le croire; / Les traits que l’amour a tracés / Toujours présents à sa mémoire / N’en seront jamais effacés », « Il gémit, il pleure, il soupire, / Il ne dit rien, si ce n’est qu’il désire », « Et la mère ne sait ce que son fils veut dire ». 15. Reformulez les déclarations de Perrault sur la vue et la femme (v. 412-419). Perrault insère son opinion dans le texte en utilisant le pronom « je » représentant un narrateur externe à l’histoire. Il agit simplement comme un conteur devant public, qui arrête le cours de sa narration pour donner son opinion sur le sujet. Il semble dire que les femmes ont des yeux tout le tour de la tête, ou qu’elles ont une sorte d’instinct pour détecter les regards amoureux. Il va même jusqu’à comparer les femmes aux magiciens, dont la main, dit-on, est plus rapide que l’œil : « Sur ce point la femme est

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si drue / Et son œil va si promptement / Qu’on ne peut la voir un moment / Qu’elle ne sache qu’on l’a vue ». 16. Faites la liste des jeunes filles qui se présentent pour faire l’essai de l’anneau. Que constatez-vous? Elles sont énumérées en ordre décroissant de leur rang social, les plus hautes d’abord, les plus basses à la fin, entre les vers 466 et 490 : « les jeunes princesses, / Les marquises et les duchesses », « Les comtesses, et les baronnes, / Et toutes les nobles personnes », « Ensuite vinrent les grisettes », « Il fallut en venir enfin / Aux servantes, aux cuisinières, / Aux tortillons, aux dindonnières, / En un mot à tout le fretin » et « mainte fille ». À la fin, il ne reste que Peau d’Âne. Débat 1. Les moralités énoncées par Perrault sont-elles encore valides de nos jours? Sont-elles au contraire dépassées? Il n’y a ni bonne ni mauvaise réponse ici. Il importe surtout de trouver des arguments pour ou contre la position exprimée par Perrault. On peut cependant souhaiter voir ressortir des arguments qui indiqueront une certaine évolution de la condition féminine (en particulier en ce qui a trait aux vers 582 à 587). Pour le reste, on peut orienter la discussion vers l’amour, les sacrifices auxquels on est prêt ou non à consentir par amour, que l’on soit homme ou femme. 2. Dressez la liste des caractéristiques de la compagne ou du compagnon idéal avec qui vous aimeriez partager votre vie. Expliquez si vos attentes sont réalistes ou non. Comparez-les avec les qualités que Perrault attribue aux amoureux de ce conte. Encore ici, il n’y a ni bonne ni mauvaise réponse, car le but est de faire réfléchir sur le sens de l’amour véritable, sur l’apparence et le physique (aspect important ou tyrannie de la mode?), etc. 3. L’image de la femme belle, douce et gentille, obéissante et modeste vous semble-t-elle toujours d’actualité? Est-ce un comportement souhaitable pour trouver un compagnon de vie? La femme épanouie, qui s’affirme et se libère, risque-t-elle de rester seule? Voir les réponses aux questions précédentes.

EXTRAIT 2 (P. 22-26)

Sujet d’analyse 1. Analysez le coup de foudre qui frappe le prince aussi bien que Peau d’Âne, et faites ressortir les étapes ou les phases que tous deux traversent. Les questions suivantes vous aideront à déterminer les thèmes et les éléments de style qui les mettent en évidence. Le prince subit un coup de foudre (il tombe immédiatement amoureux) et, voyant son amour impossible, se laisse emporter par la langueur amoureuse. Il apparaît beaucoup

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plus romantique que Peau d’Âne; celle-ci, bien qu’attirée par le beau jeune homme, semble beaucoup plus calculatrice, considérant aussi le prince comme le moyen de sortir de sa condition misérable. Alors que le jeune homme présente tous les signes d’une maladie, elle agit avec subtilité et ruse de manière à atteindre son but. Elle joue, jusqu’au dernier moment, son rôle de souillon, cache jusqu’à la limite sa véritable identité. Lui cache bien son jeu à sa mère, en tout cas tente de le cacher, mais les médecins ne s’y trompent pas. Il dévoile un secret qu’il tient pour vérité, suscitant la moquerie des autres. Ils se moquent aussi de Peau d’Âne, jusqu’au dévoilement final. Les étapes qui les mènent au mariage sont en somme à peu près identiques (en dépit des quelques restrictions présentées ci-dessus) : l’un aperçoit l’autre sans être aperçu, le ou la trouve à sa convenance, imagine un stratagème pour atteindre l’union (le gâteau, l’anneau) et enfin dévoile le secret. Compréhension 1. Pourquoi le prince se rend-il parfois dans la ferme où travaille Peau d’Âne? Pour se reposer et boire à la glace avec ses amis, au retour de la chasse (v. 315-318). 2. Trouvez deux passages qui montrent que l’attirance de Peau d’Âne à l’égard du prince est partagée. L’étudiant pourra choisir parmi les nombreux passages suivants. Preuves que Peau d’Âne est attirée par le prince : « Peau d’Âne de fort loin le vit avec tendresse » (v. 322), « Qu’il est aimable » (digne d’être aimé) (v. 327), « D’une robe de rien s’il m’avait honorée, / Je m’en trouverais plus parée / Que de toutes celles que j’ai » (v. 330-332). Elle cuisine un gâteau pour le prince après s’être bien lavée « [p]our dignement faire l’ouvrage » (elle est soigneuse pour celui envers qui elle éprouve un sentiment amoureux) (v. 405) et « elle ne douta point que de son jeune amant / La bague ne fût bien reçue » (v. 421-422). Preuves que le prince est attiré par Peau d’Âne : Il « [l]a contemple et ne peut qu’à peine, / En la voyant, reprendre haleine, / Tant il est comblé de plaisir » (v. 343-346), « la beauté du visage, / Son beau tour, sa vive blancheur, / Ses traits fins, sa jeune fraîcheur / Le touchent » (v. 347-350), « une sage et modeste pudeur [...] / S’emparèrent de tout son cœur » (v. 352-354), « la chaleur du feu qui le transporte » (v. 355), il cesse de pratiquer ses activités habituelles (v. 361-364), « Et le fond de sa maladie / Est une triste et mortelle langueur » (v. 365-366) (langueur amoureuse, c’est-à-dire un dépérissement causé par l’amour), « Les traits que l’amour a tracés / Toujours présents à sa mémoire / N’en seront jamais effacés » (v. 378-380), « Qu’il était malade d’amour » (v. 436). 3. Faites la liste des divertissements habituels d’un prince, selon cet extrait. La chasse (v. 316), boire à la glace (v. 317), diverses activités militaires (v. 320-321), faire la fête (v. 338), le bal, le carnaval, la chasse, la comédie (v. 361-363). À cela, ajoutons les festins : la nourriture joue un rôle important dans l’extrait. 4. Quelles précautions prend Peau d’Âne avant de cuisiner la galette pour le prince? Elle choisit des ingrédients de la meilleure qualité (« sa farine / Qu’elle avait fait bluter exprès », v. 396-397). Elle se lave, soit par hygiène, soit par respect pour le

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rang du destinataire : « […] elle se décrassa / les mains, les bras et le visage » (v. 402-403). 5. Quel « ingrédient » incongru se retrouve dans la pâte? Selon le texte, y est-il tombé par hasard ou non? « […] il tomba dans la pâte / Un de ses anneaux de grand prix » (v. 408-409). Ces premiers vers laissent croire qu’il s’agit d’un hasard, mais les vers 410 à 422 laissent plutôt penser qu’elle a fait exprès de l’y déposer. 6. Quels défauts ou qualités propres aux femmes, selon l’auteur, sont nommés entre les vers 407 et 422? Perrault soutient que la femme (celle-ci en particulier, à l’image de la femme en général) est d’une grande perspicacité. Ce passage du particulier au général apparaît dans l’expression « la femme est si drue ». Dans le cas présent, elle perçoit le regard de celui qui l’épie, en devine la nature et agit en conséquence : « Elle s’en était aperçue » et « par elle exprès il [l’anneau] y fut mis ». Il ne s’agit pas seulement d’une grande acuité visuelle, mais surtout d’une grande sagacité, et même d’une sorte de clairvoyance pour deviner le fond d’une situation du premier coup. Ainsi, elle devine que l’espion est déjà « son jeune amant », alors même qu’ils ne se sont pas rencontrés, n’ont pas été formellement présentés l’un à l’autre. Ajoutons que l’auteur semble sous-entendre qu’elle montre le défaut de sa qualité, car l’action volontaire (« par elle exprès ») dénote un esprit rusé, une certaine fourberie (« la femme est si drue ») dans la volonté de séduire, et même une certaine dose d’hypocrisie. Il est vrai que la femme de cette époque ne peut agir aussi ouvertement et directement que celle d’aujourd’hui, et doit donc se résoudre à des artifices de séduction, comme pour se faire désirer. Enfin, « elle ne douta point », c’est-à-dire qu’elle agit avec conviction et confiance, certaine d’elle-même et du résultat de ses actions. 7. Quels aspects de l’anneau retiennent surtout l’attention du prince? L’émeraude admirable et l’étroitesse du jonc d’or (v. 427-428). Comme on le verra dans plusieurs contes, la richesse, l’or et les pierres précieuses excitent la convoitise autant que le beau physique, le tour de taille et la grâce. Les mariages se font sur l’argent autant que sur l’amour. En quelques mots, Perrault résume les deux aspects, car l’étroitesse du bijou l’informe en quelque sorte sur la finesse du doigt et du corps de la propriétaire. 8. Quel effet physique visible la maladie d’amour a-t-elle sur le prince? Il maigrit (v. 434). 9. Quel est le remède à la maladie d’amour, selon cet extrait? L’hymen, c’est-à-dire le mariage (v. 437-439). 10. Comment le prince voit-il ce remède? « Il s’en fit quelque temps prier » (v. 440) : il a l’air de temporiser, mais on comprend qu’il voudrait accepter au plus tôt. En fait, il cherche un moyen d’imposer son choix, Peau d’Âne, car il ne veut pas qu’on lui donne n’importe quelle princesse, comme c’était souvent le cas à l’époque (mariages d’intérêt).

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Style 1. Au début de l’extrait, l’auteur dépeint le prince. Relevez les termes qui le décrivent, puis précisez quels sont les procédés employés. « [L]e beau Céphale », « Son air était royal », « sa mine martiale », « Propre à faire trembler les plus fiers bataillons », « l’air grand », « il est aimable » et un bémol : « il [a l’air] négligé ». La première référence est mythologique, procédé habituel à l’époque : le comparer à un héros de la mythologie en fait un personnage de légende. Plusieurs adjectifs qualificatifs construisent des accumulations et ont une valeur méliorative. « [M]artiale » et « faire trembler les plus fiers bataillons » mettent en évidence l’apparence de militaire ou les qualités du soldat (bien des femmes sont attirées par l’uniforme). Ses vêtements princiers ou militaires rehaussent donc son allure et sa beauté. L’adjectif « négligé », ici, n’a pas de valeur péjorative (peu soigné).Voir la note 4, p. 22. 2. Quelle expression prouve que le prince est victime d’un coup de foudre? Quel procédé stylistique y trouve-t-on? Il « [l]a contemple et ne peut qu’à peine, / En la voyant, reprendre haleine, / Tant il est comblé de plaisir » (v. 344-346). Tout est hyperbole dans ces vers : il ne regarde pas, il contemple; il ne retient pas son souffle pour ne pas être entendu, il perd haleine; il ne se réjouit pas du spectacle, il est comblé de plaisir. Même procédé plus loin : « S’emparèrent de tout son cœur » (v. 354). 3. Relevez les passages où l’amour, dans cet extrait, est associé à une maladie. Il « ne peut qu’à peine, / En la voyant, reprendre haleine » (v. 344-345), il a du mal à respirer, comme s’il avait reçu un coup à la poitrine. « […] la chaleur du feu qui le transporte » (v. 355), comme s’il faisait de la fièvre. « […] il soupire » (v. 360), reprise de l’idée d’essoufflement. « Et le fond de sa maladie / Est une triste et mortelle langueur » (v. 365-366) : « état d’une personne dont les forces diminuent graduellement et lentement », selon le Robert. « De l’amour c’est le vrai remède, / La bête en un mot la plus laide » (v. 374-375) : la laideur guérit de la maladie causée par la beauté. « De déclarer son mal elle le presse en vain » (v. 383). « Il gémit, il pleure, il soupire, / Il ne dit rien » (v. 384-385) : c’est ce qu’on fait quand on est malade ou blessé. « Et son mal toujours augmentant, / Les médecins sages d’expérience, / En le voyant maigrir de jour en jour, / Jugèrent tous, par leur grande science, / Qu’il était malade d’amour » (v. 432-436). « […] l’hymen [...] / Est un remède exquis pour cette maladie » (v. 437-438) : l’autre remède, on l’a vu, est la laideur! Hyperboles, accumulations, gradations ainsi qu’oxymores dominent, mais on voit aussi des figures d’analogie (métaphores).

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4. Entre les vers 367 et 380, ainsi qu’entre les vers 388 et 391, le prince et son entourage font de Peau d’Âne une description diamétralement opposée. Relevez les termes qui renforcent les deux visions de ce personnage féminin. Le prince voit « cette nymphe admirable » qui lui est apparue plus haut (v. 339-354). Il « ne saurait […] croire » les descriptions négatives qu’on fait de Peau d’Âne, car « [l]es traits que l’amour a tracés / Toujours présents à sa mémoire / N’en seront jamais effacés » (v. 378-380). La cour et tout l’entourage du prince insistent sur la laideur, contredisent la vision du prince par une suite de termes négatifs : « en rien nymphe ni belle » (v. 371), « De l’amour c’est le vrai remède » (v. 374), « La bête en un mot la plus laide » (v. 375), « une noire taupe » (v. 389), « Plus vilaine encore et plus gaupe / Que le plus sale marmiton » (v. 390-391). 5. Relevez les passages qui mettent en évidence l’amour maternel de la reine envers le prince. « […] la reine sa mère / Qui n’a que lui d’enfant pleure et se désespère » (v. 381-382), « […] il le faut satisfaire / Et c’est à cela seul que nous devons songer » (v. 392-393), « Il aurait eu de l’or, tant l’aimait cette mère, / S’il en avait voulu manger » (v. 394-395). 6. Montrez que le gâteau fait par Peau d’Âne est exceptionnel. D’abord, la farine est exceptionnelle, car Peau d’Âne l’a « fait bluter exprès / Pour rendre sa pâte plus fine ». Les œufs sont frais, et peut-être même le sel et le beurre (v. 399). Tous les termes sont accompagnés d’un possessif (son, sa, ses), ce qui renforce le caractère exceptionnel des ingrédients. En outre, elle « [s]’enferme seule en sa chambrette », pour fabriquer elle-même la « galette », sans aide, sans magie : une princesse cuisinière? Il s’agit là sans nul doute d’un évènement exceptionnel. Enfin, le gâteau compte un ingrédient unique : l’anneau d’or serti d’une émeraude (v. 409, 422, 426-428). Perrault termine en disant qu’« [o]n ne pétrit jamais un si friand morceau » (v. 423), expression qui confirme l’idée. Un mot de plus pour souligner que gâteau (v. 386) et galette (v. 400 et 424) semblent synonymes. Plusieurs Québécois seront surpris de la définition du Robert : « gâteau rond et plat, à base de farine ou de féculents, cuit au four ou à la poêle ».

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LA BELLE AU BOIS DORMANT (P. 33-42) Questions globales sur le texte 1. L’une des deux moralités proposées (l. 279-293) par Perrault pour le conte La Belle au bois dormant vous semble-t-elle plus appropriée que l’autre? Afin de prendre une décision éclairée, trouvez dans le texte des passages qui confirment l’une ou l’autre de ces deux moralités. La première concerne plutôt la première séquence (la princesse qui dort 100 ans). Elle s’applique aussi à la patience de la pauvre reine qui voit disparaître ses enfants et se voit elle-même, ainsi que ses fidèles serviteurs, victime de la barbarie de sa belle-mère : ayez confiance, vous serez sauvés (troisième séquence). La seconde morale fait quelque peu référence à la scène où les deux amoureux se découvrent l’un l’autre, mais elle semble surtout « extradiégétique », externe à l’histoire, peut-être se référant à l’expérience personnelle de l’auteur ou d’un fait qu’il a observé. 2. Imaginez un conte où un élément de La Belle au bois dormant est modifié. Par exemple, un beau prince endormi durant 100 ans réveillé par une princesse (plusieurs autres modifications peuvent être proposées). Quelles conséquences amène cette modification à la trame dramatique et à la morale? Autre exemple : imaginez un rôle plus important à la vieille dame qui file au fuseau dans un galetas du château. Quelles sont ses motivations pour défier ainsi l’interdit royal? Avait-elle l’intention de tuer la princesse? Que devient-elle après son forfait? (L’enseignant peut accepter diverses réponses.) Compréhension 1. Voyant qu’ils ont de la difficulté à avoir un enfant, quels moyens prennent le roi et la reine pour que celle-ci tombe enceinte? Ils vont aux eaux (stations thermales) et font des prières (vœux, pèlerinages, dévotions). La médecine du temps était impuissante devant ces difficultés. On espérait donc un « miracle ». 2. Pourquoi donne-t-on des fées comme marraines à la petite princesse qui vient de naître? Afin que « la princesse eût par ce moyen toutes les perfections imaginables » (l. 8-9). On le verra plus loin, ces « perfections » sont des « dons », des habiletés sociales prisées dans la société aristocratique (beauté, esprit, grâce, danse, chant, musique…). 3. Décrivez le cadeau fait à chaque fée. « […] il y avait un grand festin pour les fées. On mit devant chacune d’elles un couvert magnifique, avec un étui d’or massif, où il y avait une cuiller, une fourchette, et un couteau de fin or, garni de diamants et de rubis » (l. 11-14). 4. Pourquoi la dernière fée n’a-t-elle pas été invitée aux cérémonies du baptême? « […] parce qu’il y avait plus de cinquante ans qu’elle n’était sortie d’une tour et qu’on la croyait morte, ou enchantée » (l. 15-17).

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5. Pourquoi la vieille fée se sent-elle méprisée? « Le roi lui fit donner un couvert, mais il n’y eut pas moyen de lui donner un étui d’or massif, comme aux autres, parce que l’on n’en avait fait faire que sept pour les sept fées » (l. 17-19). Cela semble bien plus un prétexte qu’une raison. Doit-on comprendre que la vieille fée est de nature acariâtre, de caractère acerbe? Que de toute façon elle détestait le monde ou aurait pris ombrage de la beauté de la jeune princesse? Peut-être même s’agit-il d’une rivalité entre elle et les autres fées. 6. Comment réagit une des jeunes fées, après avoir entendu les menaces grommelées par la vieille? « […] jugeant qu’elle pourrait donner quelque fâcheux don à la petite princesse, [elle] alla, dès qu’on fut sorti de table, se cacher derrière la tapisserie, afin de parler la dernière, et de pouvoir réparer autant qu’il lui serait possible le mal que la vieille aurait fait » (l. 22-25). La méfiance même de cette jeune fée renforce l’explication donnée à la question précédente, à l’effet que la vieille ne serait venue que pour exercer une vengeance ou une sanction. 7. Énumérez les dons des six premières fées à la petite princesse. « La plus jeune lui donna pour don qu’elle serait la plus belle du monde, celle d’après qu’elle aurait de l’esprit comme un ange, la troisième qu’elle aurait une grâce admirable à tout ce qu’elle ferait, la quatrième qu’elle danserait parfaitement bien, la cinquième qu’elle chanterait comme un rossignol, et la sixième qu’elle jouerait de toutes sortes d’instruments à la perfection » (l. 27-32). Notez les hyperboles et les comparaisons. Beauté, esprit, grâce, qualité de danseuse, chanteuse et musicienne : ce sont des qualités « galantes » valorisées dans les salons, par les gens de la haute société. Remarquez qu’on ne la dit pas travaillante, ni astucieuse, ni curieuse des mystères scientifiques... Bref, ce ne sont pas des dons prisés sur le marché du travail de nos jours. 8. Comment réagit aussitôt le roi à la menace proférée par la vieille fée? « Le roi, pour tâcher d’éviter le malheur annoncé par la vieille, fit publier aussitôt un édit, par lequel il défendait à toutes personnes de filer au fuseau, ni d’avoir des fuseaux chez soi […] » (l. 43-45). Pour renforcer cet interdit, il l’assortit d’une peine de mort. Réaction exagérée? Précaution inutile? Le sort en est jeté, ainsi en ont décidé les cieux, rien ne peut plus arrêter l’inéluctable marche des évènements. 9. Dans quel lieu la princesse rencontre-t-elle la vieille qui file au fuseau? Dans un petit galetas situé tout au haut d’un donjon (l. 49). 10. Énumérez les actions entreprises pour tenter de réveiller la princesse qui s’est piquée avec un fuseau. « […] on jette de l’eau au visage de la princesse, on la délace, on lui frappe dans les mains, on lui frotte les tempes avec de l’eau de la reine de Hongrie […] » (l. 61-63).

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11. Où se trouve la bonne fée au moment où la princesse s’endort? Qui la prévient de ce drame? Par quel moyen de transport et en combien de temps accourt-elle au chevet de la princesse? Elle est « dans le royaume de Mataquin, à douze mille lieues de là » (l. 75-76). Ce royaume est aussi imaginaire que le Cantalabutte qu’on voit plus loin. « […] elle en fut avertie en un instant par un petit nain [notez la redondance], qui avait des bottes de sept lieues […] » (l. 76-77) (notez l’opposition entre petit et rapide grâce aux bottes magiques). « […] on la vit au bout d’une heure arriver dans un chariot tout de feu, traîné par des dragons » (l. 79-80). 12. Quel est le nom de la petite chienne de la princesse? Pouffe (l. 90). 13. En dehors de la princesse, qui sont endormis d’un coup de baguette magique de la fée? Qui ne le sont pas? Tous ceux qui devront la servir à son réveil (l. 93-94) sont endormis, même la nourriture qui est au feu, et le feu lui-même. Le roi et la reine ne le sont pas : « […] le roi et la reine, après avoir baisé leur chère enfant sans qu’elle s’éveillât, sortirent du château, et firent publier des défenses à qui que ce soit d’en approcher » (l. 97-99). On peut s’interroger sur ce fait : pourquoi quittent-ils leur royaume? Où vont-ils? Qu’adviendra-t-il d’eux? On dirait plus une mort qu’un exil : comme les parents défunts, on ne les verra plus, on n’en entendra plus parler. 14. Pourquoi l’interdit du roi d’approcher la princesse est-il inutile? Parce que la fée la protège en faisant croître en un quart d’heure une forêt impénétrable autour du château (l. 100-103). 15. Nommez trois fausses rumeurs qui circulent au sujet du château de la Belle au bois dormant. — « […] un vieux château où il revenait des esprits » (l. 111-112), — « tous les sorciers de la contrée y faisaient leur sabbat » (l. 112-113), — « un ogre y demeurait, et que là il emportait tous les enfants qu’il pouvait attraper, pour pouvoir les manger à son aise » (l. 113-115). Esprits (ou revenants), sorciers et ogres sont présentés en ordre croissant de la crainte qu’ils inspirent aux enfants spectateurs. On imagine le parti qu’en tirent les bons conteurs oraux. 16. À quel signe le prince voit-il que les personnes étendues dans la cour ne sont pas mortes mais simplement endormies? « Il reconnut pourtant bien au nez bourgeonné et à la face vermeille des suisses qu’ils n’étaient qu’endormis, et leurs tasses, où il y avait encore quelques gouttes de vin, montraient assez qu’ils s’étaient endormis en buvant » (l. 135-138). Les deux preuves sont donc les nez bourgeonnés et les tasses à moitié vides.

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17. Après avoir passé une première nuit auprès de la princesse, le prince retrouve ses parents à la ville. Quelle explication donne-t-il de cette nuit d’absence? Quel comportement du prince suscite la méfiance de sa mère? Observons d’abord la rapidité avec laquelle les deux amants se trouvent mariés et au lit. Bien sûr, les convenances sont sauves, en raison du mariage, mais on notera tout de même que cette princesse « couche » au premier rendez-vous! « Le prince lui dit qu’en chassant il s’était perdu dans la forêt, et qu’il avait couché dans la hutte d’un charbonnier, qui lui avait fait manger du pain noir et du fromage » (l. 179-181). Ses absences multipliées suscitent le scepticisme de la reine : « […] voyant qu’il allait presque tous les jours à la chasse, et qu’il avait toujours une raison pour s’excuser, quand il avait couché deux ou trois nuits dehors, elle ne douta plus qu’il n’eût quelque amourette […] » (l. 182-185). 18. Quels noms portent les deux enfants du prince et de la princesse? Aurore et Jour (l. 187-188). Il s’agit manifestement d’un clin d’œil au Roi-Soleil, Louis XIV, puisque c’est le soleil qui engendre l’aurore et le jour. 19. Quelle raison le prince a-t-il de se méfier de sa mère? « […] il la craignait quoiqu’il l’aimât, car elle était de race ogresse […] » (l. 191). 20. À quelle occasion le prince annonce-t-il qu’il est marié? Peu après la mort du roi, son père, quand « il se vit le maître ». 21. Pour quelle raison le jeune roi confie-t-il la régence de son royaume à sa mère? Parce qu’il va « faire la guerre à l’empereur Cantalabutte son voisin. [...] il devait être à la guerre tout l’été » (l. 201-204). 22. Qui sauve les enfants que la reine veut manger et comment? Le maître d’hôtel et sa femme cachent les enfants dans un logement au fond de la basse-cour. Cela rappelle Peau d’Âne. 23. Après avoir mangé les deux enfants de son fils, que veut la reine-mère? L’épouse de son fils, c’est-à-dire la Belle au bois dormant. 24. Résumez ce qui se passe dans la chambre de la jeune reine quand le maître d’hôtel vient lui annoncer qu’elle va mourir. Il tente d’abord de se mettre dans l’état d’esprit qui convient quand on veut poignarder quelqu’un, mais il le fait toujours dans le respect de la hiérarchie sociale : « […] il s’excitait à la fureur, et entra le poignard à la main dans la chambre de la jeune reine. Il ne voulut pourtant point la surprendre, et il lui dit avec beaucoup de respect l’ordre qu’il avait reçu de la reine-mère » (l. 239-242). Ayant perdu espoir de revoir ses enfants chéris, la reine accepte de bon gré sa propre mort : « “Faites votre devoir, lui dit-elle, en lui tendant le col; exécutez l’ordre qu’on vous a donné; j’irai revoir mes enfants, mes pauvres enfants que j’ai tant aimés.” Car elle les croyait morts depuis qu’on les avait enlevés sans rien lui dire » (l. 243-247). Le vieil homme trouve un moyen de l’épargner elle aussi : « Non, non, Madame, lui répondit le pauvre maître

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d’hôtel tout attendri, vous ne mourrez point, et vous ne laisserez pas d’aller revoir vos chers enfants, mais ce sera chez moi où je les ai cachés […] » (l. 248-250). 25. Comment la reine-mère découvre-t-elle que les trois personnes qu’elle croyait avoir mangées sont encore vivantes? « Un soir qu’elle rôdait comme d’habitude dans les cours et basses-cours du château pour y halener quelque viande fraîche, elle entendit dans une salle basse le petit Jour qui pleurait, parce que la reine sa mère le voulait faire fouetter, à cause qu’il avait été méchant, et elle entendit aussi la petite Aurore qui demandait pardon pour son frère. L’ogresse reconnut la voix de la reine et de ses enfants, et [devint] furieuse […] » (l. 259-265). 26. Après cette découverte, de quelle manière l’ogresse veut-elle faire mourir ses trois victimes? « […] elle commande dès le lendemain au matin, avec une voix épouvantable qui faisait trembler tout le monde, qu’on apportât au milieu de la cour une grande cuve, qu’elle fit remplir de crapauds, de vipères, de couleuvres et de serpents, pour y faire jeter la reine et ses enfants, le maître d’hôtel, sa femme et sa servante : elle avait donné ordre de les amener les mains liées derrière le dos. Ils étaient là, et les bourreaux se préparaient à les jeter dans la cuve […] » (l. 265-271). 27. Décrivez la mort de la reine-mère. « […] l’ogresse, enragée de voir ce qu’elle voyait, se jeta elle-même la tête la première dans la cuve, et fut dévorée en un instant par les vilaines bêtes qu’elle y avait fait mettre » (l. 274-277). Style 1. Aux lignes 15 à 45, relevez les caractéristiques physiques et morales de la méchante fée. Elle est « vieille » (l. 15, 32, 43), « il y [a] plus de cinquante ans qu’elle n’[est] sortie d’une tour » (l. 15-16), car « on la croyait morte, ou enchantée » (l. 16-17). Elle croit « qu’on la mépris[e] » (l. 20), elle est menaçante (« grommela quelques menaces », l. 20), elle est revancharde (« elle pourrait donner quelque fâcheux don », l. 22; « le mal que la vieille aurait fait », l. 25). En outre, elle est d’un caractère irascible: « […] en branlant la tête, encore plus de dépit que de vieillesse […] » (l. 33). Enfin, la jeune fée emploie l’adjectif « ancienne » (l. 39). C’est sur son âge que l’auteur insiste (au moins cinq mentions), mais aussi sur les traits de caractère qui, souvent, viennent ou se développent avec la vieillesse (elle ne sort plus, devient misanthrope et a mauvais caractère). L’unique trait physique mentionné est le fait qu’elle branle la tête. 2. Énumérez les qualités physiques et morales de la princesse dans les deux extraits suivants : lignes 52 à 73 et 142 à 162. En contraste avec cette liste, Perrault mentionne timidement deux traits moins élogieux au sujet de la princesse, au moment où elle se pique. Expliquez cette divergence. « [B]elle enfant » (l. 53), « On eût dit d’un ange » (l. 67), « belle » (l. 68), « les couleurs vives de son teint » (l. 68-69), « ses joues étaient incarnates, et ses lèvres comme du corail; elle avait seulement les yeux fermés, mais on l’entendait respirer doucement, ce qui faisait voir qu’elle n’était pas morte » (l. 69-71).

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« […] le plus beau spectacle qu’il eût jamais vu : une princesse qui paraissait avoir quinze ou seize ans, et dont l’éclat resplendissant avait quelque chose de lumineux et de divin. Il s’approcha en tremblant et en admirant, et se mit à genoux auprès d’elle » (l. 144-147). « […] avec des yeux plus tendres qu’une première vue ne semblait le permettre […] » (l. 149-150). Notons que la princesse semble plus délurée que le prince. « […] charmé de ces paroles, et plus encore de la manière dont elles étaient dites […] » (l. 153-154) : elle a de l’esprit, c’est-à-dire qu’elle sait parler, en vertu du don accordé par la deuxième fée. « Il était plus embarrassé qu’elle […] » (l. 157). « Enfin il y avait quatre heures qu’ils se parlaient, et ils ne s’étaient pas encore dit la moitié des choses qu’ils avaient à se dire » (l. 161-162). En somme, on décèle au moins deux ou trois des dons accordés par les fées. Les deux traits un peu moins élogieux sont « fort vive, un peu étourdie » (l. 57-58), qui caractérisent la jeunesse, l’adolescence : elle n’a pas encore atteint le degré de retenue et de réserve d’une adulte. 3. Examinez le rôle des énumérations et autres figures d’insistance (hyperboles, répétitions, etc.) dans le paragraphe qui raconte la réaction des habitants du palais après l’évanouissement de la princesse (l. 60-73). « […] on vient de tous côtés, on jette de l’eau au visage de la princesse, on la délace, on lui frappe dans les mains, on lui frotte les tempes avec de l’eau de la reine de Hongrie; mais rien ne la faisait revenir. » On trouve entre autres l’accumulation, notamment des phrases construites avec « on » et un verbe à l’indicatif présent, l’énumération des parties du corps (visage, mains, tempes) et l’opposition entre « tous » et « rien ». « […] le plus bel appartement du palais, sur un lit en broderie d’or et d’argent » : hyperboles. « On eût dit d’un ange, tant elle était belle […] » : hyperbole, métaphore. « […] son évanouissement n’avait pas ôté les couleurs vives de son teint : ses joues étaient incarnates, et ses lèvres comme du corail; elle avait seulement les yeux fermés, mais on l’entendait respirer doucement, ce qui faisait voir qu’elle n’était pas morte » : énumération, opposition vie/mort. 4. Comparez les deux descriptions de la forêt magique qui encercle le château de la princesse, aux lignes 100 à 104 et aux lignes 109 à 116. Les éléments stylistiques employés par l’auteur sont-ils semblables dans les deux cas? Dans le premier extrait, soulignons entre autres la présence d’hyperboles (« dans un quart d’heure », « grande quantité », « grands arbres », « que bête ni homme n’y aurait pu passer », « de bien loin », « rien à craindre »,…), d’accumulations (plantes), de juxtapositions (« de grands arbres et de petits », « de ronces et d’épines », « les unes dans les autres », « bête ni homme ») et d’antithèses. Le second extrait contient aussi des hyperboles (« ces tours qu’il voyait au-dessus d’un grand bois fort épais », « un vieux château où il revenait des esprits », « tous les enfants qu’il pouvait attraper ») et des figures d’opposition.

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Dans les deux extraits, le mot « grand » est répété. La différence tient surtout dans le sujet de la description. Le premier extrait traite principalement de la forêt elle-même, des plantes et dangers qu’elle comporte en réalité. Le second est construit sur des conjonctures, ce qui alimente l’imagination de créatures irréelles (esprits, revenants, sorciers, ogres) et multiplie les dangers (château hanté, malédictions de sorciers, carnage des ogres). 5. Après le discours du vieux paysan concernant la princesse endormie dans le château, quelle expression signifie que le prince est immédiatement amoureux d’elle? Quelle expression emploie-t-on de nos jours pour signifier cela? Quelle expression est employée un peu plus bas pour indiquer que la princesse aussi est amoureuse au premier regard? « Le jeune prince […] se sentit tout de feu […] » (l. 122). Coup de foudre. « […] le regardant avec des yeux plus tendres qu’une première vue […] » (l. 149-150) (comparer avec l’expression anglaise « love at first sight » : l’amour au premier coup d’œil). 6. Étudiez la manière dont s’y prend l’auteur pour exprimer à la fois la tendresse et l’inutilité des paroles prononcées par les deux jeunes amoureux entre les lignes 153 et 162. « Le prince, charmé de ces paroles, et plus encore de la manière dont elles étaient dites, ne savait comment lui témoigner sa joie et sa reconnaissance […] » : on voit que la princesse possède vraiment le don de la parole et a de l’esprit (voir les dons des fées). Le prince n’est pas idiot, car il reconnaît l’importance des mots bien choisis pour exprimer une idée de manière efficace. Lui-même semble beaucoup moins habile, en tout cas plus direct : « […] il l’assura qu’il l’aimait plus que lui-même. Ses discours furent mal rangés, ils en plurent davantage : peu d’éloquence, beaucoup d’amour. » L’auteur apporte à cette différence une explication qui paraît de prime abord assez logique, mais qui ne tient pas, considérant l’intérêt des femmes du temps pour les questions amoureuses : « Il était plus embarrassé qu’elle, et l’on ne doit pas s’en étonner; elle avait eu le temps de songer à ce qu’elle aurait à lui dire, car il y a apparence (l’histoire n’en dit pourtant rien) que la bonne fée, pendant un si long sommeil, lui avait procuré le plaisir des songes agréables. » Cela n’empêche pas leur conversation de s’éterniser : « Enfin il y avait quatre heures qu’ils se parlaient, et ils ne s’étaient pas encore dit la moitié des choses qu’ils avaient à se dire. » Si, dans un premier temps, parler est nécessaire, il faut bien en venir au fait, même exprimé dans un euphémisme délicieux, probablement pour ne pas heurter de jeunes oreilles : « […] ils dormirent peu, la princesse n’en avait pas grand besoin […] » (l. 176). À cette étape, les paroles sont superflues pour traduire l’amour et, en plus, le sommeil est inutile, comme la nourriture un peu plus haut (l. 164-166), chacun se nourrissant des paroles de l’autre!

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7. Quelle métonymie signifie que tout le monde se réveille en même temps que la princesse? « Cependant tout le palais s’était réveillé avec la princesse […] » (l. 163) : « tout le palais » signifie les habitants du palais, la masse des domestiques et des défenseurs au service de la princesse. 8. Quelles expressions signifient que la princesse et son entourage sont démodés? « […] elle était habillée comme ma mère-grand, et [...] elle avait un collet monté […] » (l. 168-169). Les musiciens « jouèrent de vieilles pièces, mais excellentes, quoiqu’il y eût près de cent ans qu’on ne les jouât plus » (l. 173-174). 9. Trouvez un passage où l’auteur différencie clairement le caractère du roi de celui de la reine ogresse. « Le roi son père, qui était bon homme, le crut, mais sa mère n’en fut pas bien persuadée, et voyant qu’il allait presque tous les jours à la chasse, et qu’il avait toujours une raison pour s’excuser, quand il avait couché deux ou trois nuits dehors, elle ne douta plus qu’il n’eût quelque amourette […] » (l. 181-185). Le prince « la craignait quoiqu’il l’aimât, car elle était de race ogresse, et le roi ne l’avait épousée qu’à cause de ses grands biens; on disait même tout bas à la cour qu’elle avait les inclinations des ogres, et qu’en voyant passer de petits enfants, elle avait toutes les peines du monde à se retenir de se jeter sur eux; ainsi le prince ne voulut jamais rien dire » (l. 191-196). L’auteur distingue clairement l’ogresse des deux autres (le roi et le prince). Le roi est « bon homme » et crédule, à tout le moins il fait confiance à son fils. Le prince, poli, respectueux, aime sa mère, mais il la craint et prend bien soin de ne pas trop lui en dire (peut-être a-t-il lui-même éprouvé ou deviné la gloutonnerie de sa mère quand il était enfant). La reine, elle, est soupçonneuse, ténébreuse et elle dissimule ses honteuses inclinations. Les premiers n’ont que des qualités, elle n’a que des défauts. 10. Relevez les endroits où, dans ce conte, on décrit les caractéristiques « ogresses » de la reine-mère et précisez quels procédés sont employés. Le prince « n’osa jamais se fier à elle de son secret; il la craignait quoiqu’il l’aimât, car elle était de race ogresse, et le roi ne l’avait épousée qu’à cause de ses grands biens; on disait même tout bas à la cour qu’elle avait les inclinations des ogres, et qu’en voyant passer de petits enfants, elle avait toutes les peines du monde à se retenir de se jeter sur eux » (l. 190-195). Les phrases sont très courtes, souvent juxtaposées ou coordonnées. Les deux seules actions du prince et du roi sont exprimées par la négative (« n’osa jamais » et « le roi ne l’avait épousée qu’à cause »). La reine est décrite de manière à amplifier ses caractéristiques (« grands biens, « tout bas », « toutes les peines du monde »). « […] la reine-mère envoya sa bru et ses enfants à une maison de campagne dans les bois, pour pouvoir plus aisément assouvir son horrible envie » (l. 204-206). Plutôt que de dire « pour les manger », Perrault force la note : « […] pour pouvoir plus aisément assouvir son horrible envie. » « Je veux manger demain à mon dîner la petite Aurore. […] Je le veux, dit la reine (et elle le dit d’un ton d’ogresse qui a envie de manger de la chair fraîche), et je la veux

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manger à la sauce-robert » (l. 208-212). Il y a encore des figures d’insistance (répétition de « je veux manger », qu’on verra encore aux lignes 223 et 232, et périphrase pour indiquer une voix despotique : « […] d’un ton d’ogresse qui a envie de manger de la chair fraîche […] »). « Ce pauvre homme, voyant bien qu’il ne fallait pas se jouer à une ogresse, prit son grand couteau, et monta à la chambre de la petite Aurore […] » (l. 213-215) : un terme anodin, « jouer », bien connu des enfants, traduit une cruauté rendue plus évidente par le « grand couteau ». « Elle était bien contente de sa cruauté, et elle se préparait à dire au roi, à son retour, que les loups enragés avaient mangé la reine sa femme et ses deux enfants » (l. 256-258). Non seulement elle est cruelle, mais fière de l’être, tout en reportant la faute sur des animaux effrayants. « […] elle rôdait comme d’habitude dans les cours et basses-cours du château pour y halener quelque viande fraîche […] » (l. 259-260) : elle adopte le comportement des animaux qu’elle accuse (« rôder », « halener quelque viande fraîche »). Elle se déshumanise, tout en « animalisant » les personnes qu’elle prend comme proies. « […] furieuse d’avoir été trompée, elle commande dès le lendemain au matin, avec une voix épouvantable qui faisait trembler tout le monde, qu’on apportât au milieu de la cour une grande cuve, qu’elle fit remplir de crapauds, de vipères, de couleuvres et de serpents, pour y faire jeter la reine et ses enfants, le maître d’hôtel, sa femme et sa servante […] » (l. 265-269). On constate le réemploi de la voix de stentor et de l’adjectif « grand » évoqués plus haut. Deux autres figures d’amplification apparaissent : l’énumération des animaux répugnants et celle des victimes qu’elle immole. « […] l’ogresse, enragée de voir ce qu’elle voyait, se jeta elle-même la tête la première dans la cuve, et fut dévorée en un instant par les vilaines bêtes qu’elle y avait fait mettre » (l. 274-277). Constatant sa défaite, elle ne voit d’autre solution que de se donner la mort, soit de dépit, soit de honte. Hyperboles et répétitions dominent. 11. Expliquez l’effet produit par la répétition de la même recette utilisée pour apprêter les enfants et leur mère. Cela rend leur mort encore plus horrible, car ils sont apprêtés de manière « gastronomique ». Comme on l’a vu plus haut (réponse à la question 10, l. 259-260), cela les déshumanise ou les « animalise ». 12. Dans les passages où le maître d’hôtel est en présence des victimes que la reine-mère lui commande de tuer, il manifeste beaucoup d’émotion. Précisez les émotions ressenties et trouvez-en la preuve dans le texte. « Ah! Madame, dit le maître d’hôtel » (l. 209). L’exclamation seule, sans autre forme de précision, traduit toutes les émotions (contrariété, dégoût, chagrin, répugnance, etc.) qu’on verra plus précisément dans la suite. « Ce pauvre homme […] prit son grand couteau, et monta à la chambre de la petite Aurore : elle avait pour lors quatre ans, et vint en sautant et en riant se jeter à son col, et lui demander du bonbon. Il se mit à pleurer, le couteau lui tomba des mains […] »

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(l. 213-217). Il est incapable d’accomplir son horrible devoir. La compassion du « pauvre homme » est mise en évidence par les oppositions : le couteau est grand, la victime petite; il vient la tuer, elle lui demande du bonbon; elle rit, il pleure. « […] il alla chercher le petit Jour, et le trouva avec un petit fleuret à la main, dont il faisait des armes avec un gros singe; il n’avait pourtant que trois ans. Il le porta à sa femme qui le cacha avec la petite Aurore […] » (l. 224-227). Rappel du « grand couteau » en l’opposant au « petit fleuret » et de l’âge (« trois ans »), qui mettent en évidence une pitié contenue, que le conteur en tout cas veut faire éprouver à son public. « Ce fut alors que le pauvre maître d’hôtel désespéra de la pouvoir encore tromper. La jeune reine avait vingt ans passés, sans compter les cent ans qu’elle avait dormi : sa peau était un peu dure, quoique belle et blanche; et le moyen de trouver dans la ménagerie une bête aussi dure que cela? Il prit la résolution, pour sauver sa vie, de couper la gorge à la reine, et monta dans sa chambre, dans l’intention de n’en pas faire à deux fois; il s’excitait à la fureur, et entra le poignard à la main dans la chambre de la jeune reine. Il ne voulut pourtant point la surprendre, et il lui dit avec beaucoup de respect l’ordre qu’il avait reçu de la reine-mère. — Faites votre devoir, lui dit-elle, en lui tendant le col; exécutez l’ordre qu’on vous a donné; j’irai revoir mes enfants, mes pauvres enfants que j’ai tant aimés. Car elle les croyait morts depuis qu’on les avait enlevés sans rien lui dire. — Non, non, Madame, lui répondit le pauvre maître d’hôtel tout attendri, vous ne mourrez point, et vous ne laisserez pas d’aller revoir vos chers enfants, mais ce sera chez moi où je les ai cachés, et je tromperai encore la reine […] » (l. 233-251). L’adjectif « pauvre » revient, pour bien souligner le désespoir, de même que l’âge de la victime : vingt ans, c’est encore bien jeune! Mais cette fois, il apparaît résolu, bien décidé à accomplir l’impensable, car il s’agit bien d’un régicide, ce qui explique peut-être l’emploi du « poignard » plutôt qu’un simple couteau, instrument de boucherie. Comme pour les deux précédentes tentatives de meurtre, il se laisse attendrir, au risque de sa vie. 13. Repérez au moins deux énumérations dans le paragraphe précédant la moralité du conte. Les deux énumérations les plus évidentes sont celles des bêtes sacrificielles et des victimes : « de crapauds, de vipères, de couleuvres et de serpents » et « la reine et ses enfants, le maître d’hôtel, sa femme et sa servante ». Ailleurs dans le paragraphe, la répétition de « elle entendit » permet de constater le parallélisme des phrases — sujet (elle), verbe d’action, complétive : « elle rôdait […] dans les cours et basses-cours […] pour y halener », « elle entendit dans une salle basse le petit Jour qui pleurait », « elle entendit aussi la petite Aurore qui demandait pardon », « elle commande […] qu’on apportât », « une grande cuve, qu’elle fit remplir […] pour y faire jeter ».

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Débat 1. Il y a en fait deux ou même trois histoires dans ce conte : résumez-les en faisant ressortir les principales étapes. Quel évènement marque la coupure? Pour chaque séquence, énoncez une morale ou un enseignement différent. Pour diviser en deux, on pourrait prendre l’histoire de la princesse avant et après son mariage. En trois : 1. L’histoire de la princesse, de la naissance à la malédiction. 2. La rupture de la malédiction et le coup de foudre entre le prince et la Belle. 3. Le danger que représente l’ogresse et la victoire sur celle-ci. Dans les trois cas, c’est une « mort » qui met fin à la séquence: la « mort » ou l’enchantement de la princesse qui s’est piquée avec un fuseau, la mort du roi, père du prince charmant, évènement qui laisse le champ libre à la reine-mère, et la mort de l’ogresse qui se précipite dans le chaudron rempli de bêtes mortelles. On pourrait considérer les deux premières séquences comme une seule, à tout le moins comme essentielles l’une à l’autre. La séquence 1 propose une morale liée à l’inutilité de défier le destin (peu importent les édits du roi, le destin de sa fille va s’accomplir) ou à la curiosité (une indiscrétion peut avoir des conséquences néfastes). La séquence 2 traite d’amour : il faut être prêt à affronter les dangers pour gagner l’amour, ou encore : l’amour peut se passer de belles paroles. La séquence 3 juge inutile la cruauté et en montre la défaite. Vers la dissertation 1. Comparez le coup de foudre entre le prince et la princesse dans le présent conte (l. 143-176) et dans Peau d’Âne (v. 355-446). (L’enseignant peut accepter diverses réponses.)

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LE PETIT CHAPERON ROUGE (P. 43-45) Questions globales sur le texte 1. Divisez ce conte en quatre séquences, excluant la moralité, et donnez un titre à chacune. Indiquez clairement l’endroit où vous proposez une division et expliquez-en brièvement la raison. 1. À la maison (l. 1-7) : introduction, origine du nom Petit Chaperon rouge et mission donnée par la mère. 2. Sur la route (l. 8-20) : itinéraire, rencontre du loup, qui retarde la fillette. 3. Le loup chez la mère-grand (l. 21-38) : le loup se dépêche d’arriver avant le Petit Chaperon rouge et dévore la mère-grand. 4. Le loup prend la place de la mère-grand (l. 39-64) : arrivée du Chaperon rouge, subterfuge du loup, interrogations de la fillette, qui est dévorée à son tour. 2. Relevez les principales différences entre la présente version du conte et celle donnée par les frères Grimm. La différence marquante est dans la finale. Chez Perrault, la mère-grand et la fillette sont dévorées, d’où la morale de se méfier des prédateurs. Chez les frères Grimm, elles sont dévorées, puis sauvées par un chasseur qui, par magie, les récupère vivantes de l’estomac du carnivore. Les frères allemands ajoutent même une seconde finale alternative (« une autre fois »), où le Chaperon rouge arrive chez la grand-mère avant le loup, mais ces dernières bernent le loup et le noient. Autres différences :

Perrault

Grimm

Le chaperon est rouge (tissu indéfini).

Le chaperon est en velours rouge.

La fillette apporte une galette et un pot de beurre à la grand-mère.

La fillette apporte un morceau de galette et une bouteille de vin à la grand-mère.

Pas de recommandations de la mère avant le départ.

La mère exhorte la fillette à être sage, prudente et polie et à ne pas être trop curieuse.

La grand-mère habite un village voisin, de l’autre côté d’un bois.

La grand-mère habite dans la forêt.

Le loup ne mange pas la fillette dès leur rencontre « à cause de quelques bûcherons qui étaient dans la forêt ».

Pas de mention des bûcherons, mais la fillette « ne savait pas que c’était une si méchante bête et elle n’avait pas peur ».

Itinéraire : « […] par-delà le moulin que vous voyez tout là-bas, là-bas, à la première maison du village. »

Itinéraire : « […] à un quart d’heure d’ici; c’est sous les trois grands chênes, et juste en dessous, il y a des noisetiers […] »

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Itinéraire : le loup choisit quel chemin chacun empruntera, puis il court chez la mère-grand.

Itinéraire : le loup incite la fillette à cueillir des fleurs, puis court chez la grand-mère.

La fillette cueille des noisettes, court après des papillons et fait des bouquets de petites fleurs.

Le Chaperon rouge cueille un bouquet si gros qu’elle a peine à le porter. (Les noisettes et les papillons ne sont pas mentionnés).

« Tire la chevillette, la bobinette cherra. »

« Tu n’as qu’à tirer le loquet […] »

À l’arrivée du Chaperon rouge, le loup répète la même formule.

À l’arrivée du Chaperon rouge, la porte de la maison est ouverte, ce qui l’étonne.

Déguisé en mère-grand, le loup demande à la fillette de venir se coucher auprès de lui. Pour ce faire, elle se déshabille.

Aucune mention du fait que la fillette se couche avec le loup ni qu’elle se déshabille.

Anatomie du loup : bras, jambes, oreilles, yeux, dents.

Anatomie du loup : oreilles, yeux, mains, bouche et dents.

Compréhension 1. Qui a fabriqué un chaperon rouge à la fillette de ce conte? « Cette bonne femme » (l. 2-3), c’est-à-dire la grand-mère. 2. Quelles victuailles la petite fille apporte-t-elle à sa grand-mère? Une galette et un petit pot de beurre. 3. Qu’est-ce qui empêche le loup de manger le Petit Chaperon rouge sur-le-champ, dès leur première rencontre? « […] quelques bûcherons qui étaient dans la forêt » (l. 11). C’est peut-être cela qui a inspiré le bûcheron ou le chasseur salvateur qu’on trouve dans d’autres versions. 4. Quels repères géographiques la fillette donne-t-elle au loup pour reconnaître la maison de sa grand-mère? « […] c’est par-delà le moulin que vous voyez tout là-bas, là bas, à la première maison du village » (l. 17-18). 5. Après sa rencontre avec le loup, par quoi est retardée l’héroïne en chemin vers la maison de la grand-mère? La fillette passe « par le chemin le plus long, s’amusant à cueillir des noisettes, à courir après des papillons, et à faire des bouquets des petites fleurs qu’elle rencontrait » (l. 22-24). 6. Par quelle phrase célèbre la grand-mère invite-t-elle le loup à entrer, croyant qu’il s’agit de sa petite-fille? « Tire la chevillette, la bobinette cherra » (l. 33).

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7. Le Petit Chaperon rouge a peur en entendant une grosse voix prononcer cette phrase même. Quelle explication se donne-t-elle pour surmonter sa crainte? Elle croit sa grand-mère enrhumée. 8. Quelle étrange demande le loup fait-il à la fillette après qu’elle a rangé les provisions sur la huche? Expliquez brièvement le rapport de cette demande avec la moralité. Viens te coucher avec moi, déshabille-toi. En fait, la demande du loup n’est pas explicite sous ce dernier rapport, mais le Petit Chaperon rouge semble trouver normal et naturel de se déshabiller pour se mettre au lit. Style 1. Par quels procédés stylistiques l’auteur décrit-il la fillette et la réaction qu’elle suscite dans son entourage? Par des superlatifs et des hyperboles : « la plus jolie », « en était folle », « plus folle encore », « qui lui seyait si bien ». 2. La première conversation de la petite fille avec le loup, avant d’arriver chez la grand-mère, est marquée par les figures d’amplification. Repérez-les et expliquez leur rôle. « [B]ien loin », « Oh! », « par-delà », « tout là-bas, là-bas », « ce chemin ici » (court), « ce chemin-là » (long), « qui plus tôt y sera ». Ces hyperboles renforcent la perception d’éloignement des enfants (le loup représente l’adulte). On peut voir le moulin, mais pour la fillette, il est « tout là-bas, là-bas » (notez la répétition). L’insistance représentée par la répétition du mot « chemin » cache une opposition entre les deux itinéraires, et donc entre les deux personnages. On observe un renforcement des hyperboles dans la séquence narrative qui suit immédiatement ce dialogue : « courir de toute sa force » (alors que la fillette « s’en alla », sans idée de vitesse), « le plus court », « le chemin le plus long », ainsi que par l’énumération des actions qui retardent la fillette : « […] s’en alla par le chemin le plus long, s’amusant à cueillir des noisettes, à courir après des papillons, et à faire des bouquets des petites fleurs qu’elle rencontrait. » 3. Dressez la liste des éléments répétés dans ce conte. Expliquez l’insistance de l’auteur sur ces éléments. Les noms des personnages (la mère, le Petit Chaperon rouge, la mère-grand, le loup) sont répétés : rien là de remarquable considérant l’obligation narrative. Évidemment, la formule invitant à entrer est digne de mention : « Tire la chevillette, la bobinette cherra » (l. 33 et 45) et l’action qui suit : « […] tira la chevillette, et la porte s’ouvrit » (l. 34 et 46), mais aussi la réponse à la question « Qui est là? » : « C’est votre fille le Petit Chaperon rouge […] » (l. 28 et 42). Plusieurs termes répétés ont une valeur positive, car ils sont liés à la sécurité, au bien-être ou encore à l’admiration. La mère et la grand-mère sont folles de la jeune fille. Elles habitent une maison à la porte solide, dans un village, mangent de la galette et du beurre. « [F]olle » (l. 2), « galette » (l. 5, 7, 14, 29, 43 et 48), « pot de beurre »

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(l. 7, 15, 29, 43 et 48), « village » (l. 9, 18), « chemin » (l. 20, 21 et 22), « porte » (l. 34, 36, 38 et 46) et « maison » (l. 18, 25 et 78). Les mots « enfant » (l. 12, 56, 58, 60 et 66) et « fille » (l. 1, 22, 28, 42, 54 et 67) représentent le trésor à protéger. Plusieurs verbes sont liés au danger, à l’idée de mise en garde, car il faut protéger les enfants, surtout les filles, des mauvaises rencontres. Les prédateurs pourraient courir après elles, leur demander de coucher avec elles, et même les manger, sinon les dévorer. Les verbes « rencontrer » (l. 10 et 24), « manger » (l. 10, 36, 62, 64 et 71) (ainsi que « dévora », l. 35), « coucher » (l. 36 et 49), « courir » (l. 21, 23 et 56), « écouter » (l. 13 et 58), « voir » (l. 2, 6, 14, 18, 19, 47, 60 et 66), « heurter » (l. 26 et 38), ainsi que l’onomatopée « Toc, toc » (l. 26 et 38) et l’adjectif « dangereux » (l. 13 et 80) comptent parmi les répétitions. D’autres termes peuvent être identifiés comme répétitions : « envoyer », « aller », « grand », « jeter », « jeunes », « porter », « voix » et « apporter », mais leur importance significative est moindre. 4. Les anaphores de la dernière séquence (l. 53-62) ont-elles la même fonction que les éléments répétés (voir question précédente)? Elles visent surtout à ralentir l’action, à susciter le suspense, à provoquer chez l’auditeur ou le lecteur un sentiment d’attente, de progression inéluctable. Cette impression est renforcée par l’ordre des éléments : en passant des parties les plus éloignées de la tête (bras et jambes), pour s’approcher progressivement de l’endroit vraiment dangereux (oreilles, yeux et, finalement, dents), l’auteur renforce l’expectative. 5. Commentez la fin brutale et funeste du conte. L’auteur achève son conte en une seule phrase, avant de se diriger vers la moralité. C’est une phrase composée, constituée de deux actions juxtaposées (se jeter, manger), dont le sujet (« ce méchant loup ») est le même, ainsi que le complément direct (« le Petit Chaperon rouge », « la »). Un complément de phrase (« en disant ces mots ») s’ajoute pour intensifier l’idée de précipitation. Difficile d’imaginer fin plus abrupte (18 mots)! 6. Quels éléments stylistiques dominent dans la moralité? Le texte est en vers, contrairement au conte, en prose, mais cela vaut pour toutes les moralités des contes de Perrault. On remarque la présence de répétitions des mots « jeunes » et « loup », ce qui met clairement en opposition les jeunes filles aux loups qui les pourchassent. Ces répétitions s’accompagnent d’accumulations grâce auxquelles l’auteur insiste sur le caractère naïf des unes et débauché en même temps que suave des autres : « jeunes enfants », « jeunes filles », « Belles, bien faites, et gentilles » d’une part, et « humeur accorte, / Sans bruit, sans fiel et sans courroux », « privés, complaisants et doux » d’autre part. L’auteur se veut donc particulièrement insistant en appuyant si lourdement pour dénoncer ces charmants prédateurs qui « [s]uivent les jeunes demoiselles / Jusque dans les maisons, jusque dans les ruelles ». Les deux dernières rimes mettent en évidence leur double visage : « doucereux » et « dangereux », grâce à une certaines paronymie des deux adjectifs.

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Débat 1. Commentez la moralité de manière à expliquer que le conte ne s’adresse pas uniquement aux très petites filles (ni même aux très petits garçons), mais également aux adolescentes et aux jeunes femmes. D’apparence anodine (l’histoire d’une fille qui livre des victuailles à sa grand-mère), ce conte ne s’adresse aux enfants qu’au premier degré : les tout-petits comprennent que le danger est de ne pas écouter maman et d’écouter les « loups ». Si ce résumé est parfaitement exact, le message, lui, est clairement défini dans la morale, où l’on voit que « tous les loups / Ne sont pas de la même sorte ». Quelles sortes de loups y a-t-il? Ceux qui, « d’une humeur accorte », abordent les jeunes filles et les suivent « jusque dans les ruelles ». En relisant le conte, on perçoit alors un autre résumé : un beau et gentil loup cherche à obtenir l’adresse d’une jolie fille (ou son numéro de téléphone, ou son adresse courriel…) pour se rendre dans sa chambre, dans son lit afin que « le Petit Chaperon rouge se déshabille ». 2. Pourquoi, selon vous, Perrault propose-t-il une fin tragique pour l’héroïne à sa version du conte, alors que les frères Grimm et Ferron choisissent au contraire de punir le « méchant »? (L’enseignant peut accepter diverses réponses.) 3. Des trois versions du Petit Chaperon rouge proposées dans ce recueil (Perrault, Grimm, Ferron), laquelle vous paraît le plus réussie? Étayez votre point de vue en donnant des preuves de réussite tirées du conte que vous préférez et des passages moins bien réussis, selon vous, dans les deux autres. (L’enseignant peut accepter diverses réponses.)

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LA BARBE BLEUE (P. 47-52) Questions globales sur le texte 1. La curiosité est-elle plutôt un défaut ou une qualité? Trouvez dans votre quotidien des exemples de curiosité malsaine et de curiosité justifiée. À partir des exemples que trouvent les étudiants dans la vie courante, on dresse deux listes et on s’interroge sur les cas où le défaut mérite punition, sur la sévérité de la punition, sur qui on doit exercer le châtiment, etc. On discute également des récompenses de la curiosité, du savoir, de la recherche de vérités, etc. 2. L’épouse avait-elle des raisons valables d’être curieuse ou, au contraire, se devait-elle de respecter l’autorité de son mari? Dans la vie en général, vaut-il mieux tout faire pour satisfaire sa curiosité ou, au contraire, doit-on plutôt respecter les règles et les interdictions? Les réponses données à la question précédente peuvent alimenter la discussion. Les réponses peuvent varier. L’enseignant peut orienter la discussion par des questions ou des exemples ciblés. S’il est vrai que la curiosité, en général, est souhaitable, il y a une curiosité malsaine, qui brime la liberté des gens (celle des célébrités, par exemple). On peut ainsi se demander en quoi s’opposent le droit du public à l’information et le droit du citoyen à la vie privée. Ou encore s’il vaut mieux respecter l’interdit pour éviter un danger ou passer outre à une défense dans l’espoir d’une découverte, etc. On pourra rappeler l’importance de la religion à l’époque de Perrault. On trouve en effet dans la Bible de nombreux exemples de vengeance divine pour des raisons pas plus sérieuses que celle donnée par la Barbe bleue. Ainsi, Adam et Ève sont chassés du paradis terrestre pour avoir mangé le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal (une pomme, selon la croyance populaire)! 3. Expliquez le sens de la citation suivante, extraite de la moralité, par des exemples tirés de votre propre expérience de vie : la curiosité, « [c]’est, n’en déplaise au sexe, un plaisir bien léger; / Dès qu’on le prend, il cesse d’être. / Et toujours il [ce plaisir] coûte trop cher » (l. 168-170). D’abord, Perrault semble attribuer le défaut de la curiosité au « sexe », c’est-à-dire aux femmes, comme si la curiosité en tant que qualité était une vertu masculine! Il va sans dire qu’une telle affirmation choque les idées actuelles. On peut tout de même lancer le débat à savoir si cette forme de curiosité est liée au sexe en demandant des exemples aux étudiants. Retenons tout de même qu’une curiosité malsaine peut en effet, dans certains cas, coûter cher. Attardons-nous plutôt à l’idée que « [c]’est […] un plaisir bien léger; / Dès qu’on le prend, il cesse d’être. » En apparence bénigne, cette phrase sous-tend une vision du monde, une philosophie : le plaisir cesse dès que la curiosité est satisfaite (ou plus précisément, dès qu’est obtenu le plaisir attendu de l’objet convoité). Les stoïciens, les bouddhistes, au fond, ne disent pas autre chose : à quoi bon chercher les plaisirs, puisque leur satisfaction n’amène pas le bonheur? On peut engager la discussion sur la satisfaction du désir et le bonheur, les biens matériels, le jovialisme publicitaire qui laisse entendre que le bonheur est de posséder, etc. Ici encore, on voit que le message de l’auteur est plus profond que le simple résumé de l’anecdote.

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Compréhension 1. Quelles sont les deux principales raisons qui rendent dégoûtant le personnage éponyme du conte? La barbe bleue du personnage le rend « laid » et « terrible » (l. 4) sur le plan physique; c’est elle « qui leur [aux femmes] faisait peur » (l. 42). Mais aussi on chuchote sur son passé, la rumeur sur ses précédents mariages et sur le sort de ses épouses, toutes disparues, « les dégoûtait » (l. 10). 2. Par quel moyen la Barbe bleue tente-t-il de séduire l’une des deux jeunes filles? Il les invite en compagnie de leur mère et de quelques amis (garçons et filles) à passer huit jours dans une de ses maisons de campagne. Il fait étalage de sa richesse, de sa munificence. 3. Quelles sont les principales activités des personnes rassemblées par la Barbe bleue dans sa maison de campagne? « [P]romenades », « parties de chasse et de pêche », « danses et festins », « collations », « on passait toute la nuit à se faire des malices » (l. 16-18). 4. Peu après le mariage, l’époux terrible annonce à sa femme qu’il doit faire un voyage en province. Quel est le but de ce voyage et quelle en est la durée prévue? Le voyage de « six semaines au moins » vise à régler « une affaire de conséquence », c’est-à-dire importante (l. 23-24). 5. Quelle interdiction formule l’époux avant son départ? Quelle menace accompagne cette interdiction? Une seule pièce lui est interdite d’accès, un petit cabinet « au bout de la grande galerie de l’appartement bas » (l. 31-32). Notez l’antithèse. « […] s’il vous arrive de l’ouvrir, il n’y a rien que vous ne deviez attendre de ma colère » (l. 34-35). En clair, je serai si fâché que rien ne saura m’arrêter dans ma colère. 6. Que découvre la jeune épouse dans le cabinet interdit? Une mare de sang caillé où se mirent « les corps de plusieurs femmes mortes et attachées le long des murs » (l. 64-65), les épouses précédentes de la Barbe bleue. 7. Qu’est-ce qui trahit la jeune épouse, révélant qu’elle a pénétré dans le cabinet maudit? Il est impossible d’enlever le sang de la clé, car elle est magique. Mais le lecteur le comprend aussi par l’attitude de l’épouse : « Sa femme fit tout ce qu’elle put pour lui témoigner qu’elle était ravie de son prompt retour » (l. 80-81); « […] elle les [les clés] lui donna, mais d’une main si tremblante qu’il devina sans peine tout ce qui s’était passé » (l. 82-83). 8. Quelle punition la Barbe bleue décrète-t-il pour la curiosité de son épouse? La mort : « Il faut mourir, Madame, lui dit-il, et tout à l’heure » (l. 101).

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9. Quelle expression prouve que la Barbe bleue reste insensible aux supplications de son épouse? Il a « le cœur plus dur qu’un rocher » (l. 100). Perrault a pris soin de dire auparavant que le profond repentir de l’épouse « aurait attendri un rocher » (l. 99). 10. Quelle faveur demande l’épouse avant l’exécution de la sentence? « […] donnez-moi un peu de temps pour prier Dieu » (l. 103). C’est la prière du condamné, sa dernière requête. 11. Qui surveille les alentours pour informer la condamnée de l’arrivée des secours? De qui l’épouse attend-elle ces secours? Sa sœur Anne surveille l’arrivée de leurs deux frères, dont l’un est dragon et l’autre, mousquetaire. Curieusement, on connaît le nom de la sœur et le métier exact des frères, qui ne sont que des personnages secondaires, alors que les principaux personnages sont anonymes et qu’on ignore leur profession : quel est le nom de l’épouse? Grâce à quelle activité la Barbe bleue est-il devenu si riche? 12. Comment la Barbe bleue entend-il mettre à mort son épouse? En lui tranchant la gorge avec « un grand coutelas » (l. 116), probablement le même qui lui a servi à égorger ses précédentes épouses. 13. Où et comment la Barbe bleue meurt-il? Avant d’atteindre le perron (donc au seuil de sa maison, mais à l’intérieur), transpercé d’au moins deux coups d’épée (un de chacun des deux frères?) : « Ils lui passèrent leur épée au travers du corps […] » (l. 154). 14. Que fait l’héritière des biens légués par son vilain époux? Trois éléments de réponse : 1. Elle marie sa sœur à un jeune gentilhomme. 2. Elle achète des charges à ses deux frères. 3. Elle trouve pour elle-même un fort honnête homme, qui lui fit oublier son vilain époux (l. 158-162). 15. L’auteur rédige deux moralités pour accompagner son conte, l’une pour condamner un défaut, l’autre pour décrire une différence entre autrefois et aujourd’hui. Dites quel est ce défaut et quelle est cette différence entre le passé et le présent. La curiosité. Il n’y a plus d’époux aussi terribles; on a peine à juger si c’est l’époux ou l’épouse qui est maître (égalité des sexes). Style 1. Quels moyens stylistiques l’auteur emploie-t-il, dans les deux premiers paragraphes du texte (l. 1-12), pour rendre le personnage de la Barbe bleue à la fois repoussant et attirant? Repoussant : antithèse servant à accentuer le contraste entre, d’une part, les deux jeunes filles (« parfaitement belles ») et, d’autre part, la Barbe bleue (« si laid et si

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terrible »), répétition de « si », hyperbole (« il n’était ni femme ni fille qui ne s’enfuît de devant lui ») et mots augmentatifs : « encore », « plusieurs », « ces ». Attirant : accumulation des biens (énumération), champ lexical de la richesse, hyperboles (« tout dorés »), vocabulaire appréciatif pour la description des biens matériels. 2. Dressez le champ lexical de la richesse. « […] de belles maisons à la ville et à la campagne, de la vaisselle d’or et d’argent, des meubles en broderie, et des carrosses tout dorés » (l. 1-3), « une de ses maisons de campagne » (l. 15), « danses et festins, […] collations » (l. 17), « bonne chère » (l. 26), « deux grands garde-meubles » (l. 27), « de la vaisselle d’or et d’argent » (l. 28), « mes coffres-forts où est mon or et mon argent » (l. 29), « des cassettes où sont mes pierreries » (l. 30), « toutes les richesses de sa maison » (l. 41), « les chambres, les cabinets, les garde-robes, toutes plus belles et plus riches les unes que les autres » (l. 43-44), « le nombre et la beauté des tapisseries, des lits, des sofas, des cabinets, des guéridons, des tables et des miroirs où l’on se voyait depuis les pieds jusqu’à la tête, et dont les bordures, les unes de glace, les autres d’argent et de vermeil doré, étaient les plus belles et les plus magnifiques qu’on eût jamais vues » (l. 46-50), « toutes ces richesses » (l. 52), « tous ses biens » (l. 158), etc. Au début, on voit ces richesses dans les paragraphes impairs (1, 3, 5, 7), ce qui contribue à la création d’un contraste, d’une antithèse qui perdure tout au long du conte. 3. Entre les lignes 13 et 61, relevez les mots et expressions qui traduisent l’idée du temps. Attardez-vous aussi bien aux adverbes et aux conjonctions qu’aux locutions et aux formules plus développées. Que constatez-vous? « […] huit jours entiers » (l. 15-16), « on ne dormait point » (l. 17), « on passait toute la nuit » (l. 18), « Dès qu’ » (l. 21), « Au bout d’un mois » (l. 22), « faire un voyage » (l. 23), « six semaines au moins » (l. 23), « pendant son absence » (l. 24-25), « tous les jours » (l. 28), « part pour son voyage » (l. 38), « n’attendirent pas » (l. 39), « la jeune mariée » (depuis peu, l. 40), « impatience » (l. 40 et 52), « pendant que le mari y était » (l. 41-42), « aussitôt » (l. 43), « pressée » (l. 54), « avec tant de précipitation » (l. 56), « Étant arrivée » (l. 57) et « quelque temps » (l. 58). On voit immédiatement que l’épouse et ses amis vivent dans la rapidité, l’urgence et l’empressement : ils sont jeunes et sont pressés de découvrir les richesses et les plaisirs somptueux que recèle cette maison, ils perdent leur temps en coquineries et en fêtes. Les mots associés à une durée plus longue concernent plutôt la Barbe bleue : c’est lui qui fait durer la fête huit jours, attendant que la belle voisine soit bien mûre avant de la demander en mariage. Un mois après le mariage, il part pour six semaines. Il semble patient, voire même un peu débonnaire, mais le lecteur sait bien qu’il cache son jeu, qu’il attend le bon moment pour frapper le grand coup, un peu comme un chasseur ou un animal dissimulé pour capturer sa proie. 4. Étudiez le rôle des énumérations, accumulations et gradations dans les premiers paragraphes de ce conte (du début jusqu’à la ligne 61). La plupart touchent la richesse de la Barbe bleue : « de belles maisons à la ville et à la campagne, de la vaisselle d’or et d’argent, des meubles en broderie, et des carrosses

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tout dorés », « les mena avec leur mère et trois ou quatre de leurs meilleures amies, et quelques jeunes gens du voisinage, à une de ses maisons de campagne », « que promenades, que parties de chasse et de pêche, que danses et festins, que collations : on ne dormait point, et on passait toute la nuit à se faire des malices les uns aux autres; enfin tout alla si bien », « dit à sa femme qu’il était obligé de faire un voyage en province, de six semaines au moins, pour une affaire de conséquence; qu’il la priait de se bien divertir pendant son absence; qu’elle fit venir ses bonnes amies, qu’elle les menât à la campagne, si elle voulait, que partout elle fît bonne chère », « Voilà, lui dit-il, les clefs des deux grands garde-meubles, voilà celles de la vaisselle d’or et d’argent qui ne sert pas tous les jours, voilà celles de mes coffres-forts où est mon or et mon argent, celles des cassettes où sont mes pierreries, et voilà le passe-partout de tous les appartements. Pour cette petite clef-ci, c’est la clef du cabinet au bout de la grande galerie de l’appartement bas », « les chambres, les cabinets, les garde-robes, toutes plus belles et plus riches les unes que les autres », « admirer le nombre et la beauté des tapisseries, des lits, des sofas, des cabinets, des guéridons, des tables et des miroirs où l’on se voyait depuis les pieds jusqu’à la tête, et dont les bordures, les unes de glace, les autres d’argent et de vermeil doré, étaient les plus belles et les plus magnifiques qu’on eût jamais vues ». Remarquons que certaines de ces figures sont construites grâce à un parallélisme révélé par un mot répété : « que promenades, que parties de chasse et de pêche, que danses et festins, que collations », « Voilà […] les clefs […], voilà celles de la vaisselle d’or et d’argent […], voilà celles de mes coffres-forts […], celles des cassettes où sont mes pierreries, et voilà le passe-partout ». 5. Ce conte est fondé sur des oppositions, c’est-à-dire des affirmations contredites un peu plus loin par des affirmations contraires. Donnez au moins cinq exemples qui corroborent ce fait. • La Barbe bleue est riche, mais la couleur de sa barbe le rend « laid », « terrible »

et dégoûtant. • Il est laid, mais sa richesse le rend moins « malhonnête » (il devient présentable). • Il annonce qu’il fera un voyage de six semaines, mais revient le soir même. • L’épouse peut entrer dans toutes les pièces de la maison, sauf dans le cabinet

maudit. • La Barbe bleue donne toutes les clés à son épouse, mais il est défendu de se servir

de l’une d’entre elles. • En entrant dans la pièce, elle ne voit rien d’abord, puis elle commence à voir. • Elle a beau nettoyer la clé tachée de sang, elle reste maculée. • Elle remet toutes les clés, sauf la clé dénonciatrice. • Elle se jette au pied de son mari, avec toutes les marques du vrai repentir, elle

aurait attendri un rocher, « mais la Barbe bleue avait le cœur plus dur qu’un rocher ».

• La sœur guette le retour des frères, mais elle ne voit rien venir. • « Descend vite, ou je monterai là haut » (2 fois). • La Barbe bleue menace sa femme de mort, mais c’est lui qui est tué, etc.

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6. Étudiez le jeu des questions et expressions répétées concernant l’arrivée des deux frères. Comparez avec les expressions répétées dans Le Petit Chaperon rouge de Perrault : « Qui est là? — C’est votre fille le Petit Chaperon rouge. [...] — Tire la chevillette, la bobinette cherra. » Plus loin : « Ma mère-grand, que vous avez [...] — C’est pour mieux [...] » Le rôle en est identique : créer l’attente, ralentir l’arrivée du dénouement, susciter le suspense, créer un faux répit stylistique qui amplifie la hâte du dénouement. Cela permet au conteur « oral » de « dramatiser » son sketch, d’imiter la voix de stentor de la Barbe bleue, de créer un effet pour apeurer les petits auditeurs. Il peut jouer un autre rôle en changeant sa voix : la voix forte de la Barbe bleue, la voix tremblotante de la victime, la petite voix éloignée de la sœur… 7. La répétition des ordres et des menaces de la Barbe bleue, entre les lignes 101 et 147, joue-t-elle le même rôle? « Il faut mourir » (l. 101, 102 et 141) et l’ordre de descendre, plus ou moins dans les mêmes termes : « Descends vite, ou je monterai là-haut » (l. 118), « Descends donc vite, criait la Barbe bleue, ou je monterai là-haut » (l. 123-124), « Ne veux-tu pas descendre? » (l. 131). Ici, il s’agit de rendre chaque fois plus effrayant le meurtrier. Le caractère terrible du mari est relevé par d’autres répétitions et redondances qui, elles, par contraste, montrent la frayeur de l’épouse, ou encore sa piété : « donnez-moi un peu de temps pour prier Dieu », « Je vous donne un demi-quart d’heure » (l. 103-104), « sur le haut de la tour » (l. 107-108 et 111), « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir? » (l. 113, 120, 125-126 et 133), « Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l’herbe qui verdoie » (l. 115 et 122). En somme, l’auteur construit une sorte de longue gradation qui se termine par le quasi-meurtre : « […] la prenant d’une main par les cheveux, et de l’autre levant le coutelas en l’air […] » (l. 142-143). Tout concourt à mettre le lecteur en haleine, d’autant plus que plusieurs expressions laissent entendre qu’elle sera effectivement tuée comme les autres épouses. 8. Retracez dans ce conte les endroits où il est question de la mort et dégagez les sous-thèmes qui y sont liés. Au début du conte, il n’en est pas vraiment question, on ne parle que de mystérieuses disparitions : « […] qu’il avait déjà épousé plusieurs femmes, et qu’on ne savait ce que ces femmes étaient devenues » (l. 11-12). De ce point jusqu’à la ligne 56, tout semble aller pour le mieux quand elle se précipite « avec tant de précipitation qu’elle pensa se rompre le cou deux ou trois fois » (l. 56-57). L’auteur précise bien « qu’il pourrait lui arriver malheur d’avoir été désobéissante » (l. 59-60), phrase annonciatrice de la morale. Le premier signe tangible de la mort vient avec « le plancher […] tout couvert de sang caillé » (l. 63-64) et la découverte des « corps de plusieurs femmes mortes et attachées le long des murs » (l. 64-65). Si auparavant l’auteur cherchait à créer un climat de peur, ici c’est l’horreur qu’il instille. Le verbe « avait égorgées » amplifie l’idée de boucherie : les personnages monstrueux des contes de Perrault traitent souvent leurs victimes comme des animaux de boucherie, mais on voit ici seulement le résultat du dépeçage. À partir de ce point, la peur ne semble plus quitter le personnage de l’épouse, à l’image du sang qui ne quitte plus la clé. La mort elle-même réapparaît avec la menace de la Barbe bleue : « Eh bien, Madame, vous y entrerez, et irez prendre votre place auprès des dames que vous y avez vues »

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(l. 94-96), plus clairement encore à la ligne 101 : « Il faut mourir, Madame […] ». La menace se concrétise : « […] la Barbe bleue, tenant un grand coutelas à sa main […] » (l. 116). Il ne confie pas la tâche de tuer à un subalterne, il l’accomplit lui-même, comme s’il y prenait plaisir. Comme d’ailleurs il semble prendre plaisir à créer un climat de crainte croissant en menaçant chaque fois plus fort. La mort ne restera que menace jusqu’à ce que les deux frères vengent leur sœur : « Ils lui passèrent leur épée au travers du corps, et le laissèrent mort » (l. 154-155). 9. Trouvez dans le texte des citations et des situations portant sur la curiosité ou incitant à la curiosité. Expliquez le message de l’auteur sur le sujet. La morale précise que la curiosité est un vilain défaut, mais le message de l’auteur est tout de même ambivalent, car la curieuse, ainsi que sa famille, tire profit de son défaut. Les interprétations peuvent donc être variées. « Elle fut si pressée de sa curiosité, que sans considérer qu’il était malhonnête de quitter sa compagnie […] » (l. 54-55) : la curiosité est plus forte que la courtoisie, elle abandonne ses invités pour satisfaire sa curiosité. Qui plus est, le danger est annoncé en sous-entendu : « […] avec tant de précipitation qu’elle pensa se rompre le cou […] ». Notez la redondance « pressée », « précipitation ». « La curiosité, malgré tous ses attraits, / Coûte souvent bien des regrets; / [...] n’en déplaise au sexe […] » (l. 165-168). Perrault semble accuser les femmes plutôt que les hommes de curiosité malsaine. Bizarrement, certains évènements qui devraient susciter la curiosité et l’approfondissement laissent les personnages aussi bien que le lecteur dans l’ignorance : « […] il avait déjà épousé plusieurs femmes, et [...] on ne savait ce que ces femmes étaient devenues » (l. 11-12). Personne ne les recherche, pas même leurs familles? Curieux, non? « […] ouvrez tout, allez partout, mais, pour ce petit cabinet, je vous défends d’y entrer, et je vous le défends de telle sorte que, s’il vous arrive de l’ouvrir, il n’y a rien que vous ne deviez attendre de ma colère » (l. 32-35). Le lecteur pense qu’elle ira prendre quelque pierre précieuse, ou une autre richesse, dans les coffres. L’interdit, cependant, est un puissant motif pour attiser la curiosité. On peut y voir un acte délibéré de la part de la Barbe bleue, qui y trouvera un prétexte à satisfaire son horrible convoitise de meurtre et de viande humaine. « Les voisines et les bonnes amies n’attendirent pas qu’on les envoyât quérir pour aller chez la jeune mariée, tant elles avaient d’impatience de voir toutes les richesses de sa maison […] » (l. 39-41). Le mot « curiosité » n’est pas employé ici, plutôt une sorte d’euphémisme : « impatience ». Ce mot est repris, dans le même sens, un peu plus bas : « […] leur amie, qui cependant ne se divertissait point à voir toutes ces richesses, à cause de l’impatience qu’elle avait d’aller ouvrir le cabinet de l’appartement bas » (l. 51-53). La curiosité, intéressée il est vrai dans le cas présent, se manifeste dans la question répétée : « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir? » Autant que le lecteur, elle veut savoir si elle sera sauvée.

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« […] on heurta si fort à la porte que la Barbe bleue s’arrêta tout court […] » (l. 148-149). La Barbe bleue se demande qui peut bien lui rendre visite en un moment si crucial. Ici encore, il s’agit d’une curiosité des plus normales. Débat 1. On doit se méfier des apparences. Discutez de ce sujet en prenant des exemples à la fois dans les contes et dans la vie courante. Une personne peut être laide mais attirante, ou encore belle mais dotée d’un caractère acrimonieux; on ne doit pas se laisser berner par son apparence, il faut tenter de connaître la véritable personne. En contrepartie, une personne peut être gentille et courtoise dans le simple but de camoufler un défaut. Dans les Contes, on trouve de nombreux exemples de ces situations contre lesquelles l’auteur nous met en garde. Le loup dans Le Petit Chaperon rouge cache sa voracité derrière son amabilité. La Barbe bleue fait oublier sa laideur grâce à sa richesse, Riquet à la houppe, grâce à son esprit. En apparence, le fils du meunier a fait un bien piètre héritage en la personne du Chat botté, mais des trois fils, c’est lui qui réussira le mieux, allant jusqu’à devenir le gendre du roi. La bonne sœur du conte Les Fées donne à boire à une « pauvre femme » qui lui donnera le don de créer des richesses. Cendrillon et le petit Poucet ne sont pas en reste : mine de rien, ils atteignent le sommet. Dans une certaine mesure, c’est le principal message de nombreux contes, jusque chez Andersen, comme en fait foi Le Vilain Petit Canard. En somme, il faut chercher les trésors cachés. 2. Que pensez-vous de la façon dont la Barbe bleue est puni : méritait-il la mort? N’aurait-on pas dû lui faire un procès plutôt que de l’abattre sur place? Ce conte est-il une incitation à la vengeance plutôt qu’à la justice? Y a-t-il des ressemblances avec la façon dont sont punis les méchants dans d’autres contes? (L’enseignant peut accepter diverses réponses.)

EXTRAIT 3 (P. 47-52) Sujet d’analyse 1. Aucun des personnages de ce conte n’est totalement innocent ni coupable, car on peut reprocher quelque chose à chacun, mais on peut aussi trouver de bonnes raisons à leur conduite. Expliquez cette affirmation. On peut relever des preuves de cette ambivalence pour chacun des personnages : la Barbe bleue, la jeune épouse, la mère de la jeune fille et ses frères. La Barbe bleue est cruel, mais il avait prévenu sa femme des conséquences si elle enfreignait son interdit. L’épouse est curieuse, mais à sa défense on doit concéder qu’elle, comme les précédentes épouses, est attirée par l’envie de transgresser l’interdit. La mère, aveuglée par la richesse, pousse sa fille dans les bras d’un homme riche et cruel, et probablement aussi bien plus âgé que la jeune femme (il a été marié plusieurs fois). Quant aux frères, ils ont bien raison de vouloir sauver leur sœur des mains d’un mari abusif, mais fallait-il aller jusqu’à tuer? Auraient-ils dû ou pu le livrer à la justice?

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LE MAÎTRE CHAT OU LE CHAT BOTTÉ (P. 53-58) Questions globales sur le texte 1. Le chat agit de façon machiavélique. Donnez-en au moins un exemple. L’occasion est belle de vérifier les connaissances des étudiants sur le machiavélisme ou de parler de Machiavel et de son livre, Le Prince, où il donne ses conseils pour prendre et garder le pouvoir. Selon ce penseur, le prince doit avant tout songer à ses propres intérêts, à sa sécurité ainsi qu’à sa puissance et à sa gloire. Les moyens importent peu, seul compte le but, l’objectif, même si, sur le plan moral, le prince devrait défendre les faibles et les humbles, jamais il ne doit le faire à son détriment. On peut donner à lire un article d’encyclopédie ou demander une recherche sur cette œuvre et son auteur. Ainsi, le chat menace les paysans qui, apeurés, agissent selon ses volontés et clament que les terres de l’ogre appartiennent en fait au Marquis de Carabas. Le chat atteint le but recherché, c’est-à-dire montrer que le fils du meunier est en fait un grand seigneur. Autre exemple : le chat parvient à berner le roi. Ce dernier agit comme quelqu’un qui ne connaît pas son royaume, car il ne vérifie pas la propriété du marquis sur les terres et le château. Cela prouve la supériorité (au sens machiavélique) du chat qui, pour défendre les intérêts de son maître, va jusqu’à mentir et à voler autrui. Le chat réussit même à tromper l’ogre. Par définition, dans les contes, les ogres sont les plus dangereux adversaires, en raison de leur force, de leur voracité, etc. Ici, le chat botté réussit à le rendre vulnérable en le complimentant sur ses pouvoirs et en lui lançant un défi. On pourrait songer aux fanfaronnades d’enfants : « Je te gage que tu ne peux pas... que tu n’oserais pas... » 2. En y réfléchissant bien, quel message l’auteur envoie-t-il sur la noblesse et ceux qui bénéficient des privilèges du pouvoir et de la richesse? Comparez l’attitude du chat à celle du seigneur de la fable Le Jardinier et son seigneur de La Fontaine. On pourrait résumer en disant que le pouvoir corrompt. Dans ce conte, le chat et son maître sont prêts à tout pour arriver à leurs fins (bassesses, mensonges, meurtre même). Dans la fable de La Fontaine, un jardinier est aux prises avec un lièvre qui ruine son jardin en mangeant sa récolte. Comme seuls les nobles ont le droit de chasser, il demande au seigneur de le débarrasser de ce lièvre vorace. Le seigneur accepte et vient à la chasse avec ses amis : les chevaux piétinent le jardin, la troupe vide son garde-manger et les hommes courtisent même sa fille. La morale est qu’il faut se méfier des grands, que la solution cause parfois plus de mal que l’inconvénient de départ. Ici, on pourra s’interroger sur le sort du propriétaire du chat : réussira-t-il longtemps à tromper le roi et sa fille? Il est parfois périlleux de s’allier à plus fort que soi. Compréhension 1. Comment les trois fils se partagent-ils l’héritage que leur laisse leur père? L’aîné eut le moulin, le second eut l’âne et le plus jeune, le chat.

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2. Le troisième fils songe qu’il ne pourrait faire que deux choses de son héritage : quelles sont-elles? Le manger et s’en fabriquer un manchon avec la fourrure. 3. Quels sont les deux objets grâce auxquels le chat pense assurer le succès de son maître? Un sac et des bottes. 4. Par quels « tours de souplesse » (l. 18) le chat a-t-il maintes fois montré son habileté à attraper rats et souris? Il se pendait par les pieds ou se cachait dans la farine pour faire le mort. 5. Que capture le chat dans la garenne? et dans un champ de blé? Garenne : un jeune lapin peu instruit encore des ruses de ce monde. Champ de blé : deux perdrix. 6. Sous quel nom le chat présente-t-il son maître au roi? Pourquoi a-t-il choisi ce nom? « […] Monsieur le Marquis de Carabas (c’était le nom qu’il lui prit en gré de donner à son maître) […] » (l. 34-35). 7. Quel « conseil » insolite le chat donne-t-il à son maître, ayant appris que le roi part en promenade? Qu’il aille se baigner dans la rivière. 8. Qu’est-il arrivé en réalité aux habits censés avoir été emportés par des voleurs? Le chat les a cachés sous une pierre. 9. Comment réagit la princesse devant le fils du meunier vêtu d’habits royaux? Elle « le trouva fort à son gré » (l. 68) et « en devint amoureuse à la folie » (l. 70). 10. Quelle menace le chat profère-t-il à l’endroit des paysans et des moissonneurs qu’il rencontre sur sa route? « […] vous serez tous hachés menu comme chair à pâté » (l. 76-77 et 88-89). 11. Quel est le pouvoir de l’ogre de ce conte? Donnez-en deux exemples. Il peut se « changer en toutes sortes d’animaux » (l. 105). Il se transforme d’abord en lion, ce qui cause la fuite du chat effrayé, puis en souris, que le chat dévore aussitôt. 12. Expliquez la présence d’une collation dans une grande salle du château visité par le roi, sa fille et le marquis. En entrant dans la grande salle, « ils trouvèrent une magnifique collation que l’ogre avait fait préparer pour ses amis qui le devaient venir voir ce même jour-là » (l. 131-133).

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Style 1. Quel verbe du premier paragraphe indique que les hommes de loi sont voraces? Dans le paragraphe suivant, le troisième fils utilise le même verbe : a-t-il dans les deux cas le même sens? « Manger » : « Ils [notaire et procureur] auraient eu bientôt mangé tout le pauvre patrimoine » et « lorsque j’aurai mangé mon chat ». Dans le premier cas, c’est le sens figuré : dépenser, dilapider. Manger son capital. Manger de l’argent. (Robert, « manger » II, 5), et le sens propre dans le second cas. Il est intéressant de constater que de nombreux termes liés à l’argent et aux dépenses proviennent du vocabulaire de l’alimentation. On trouve des expressions formées avec le verbe manger, mais aussi avec de nombreux synonymes, pour parler du domaine des finances, comme bouffer (par exemple, son prochain), dévorer (un héritage), avaler (un concurrent). Citons aussi vorace/voracité, gagner son pain, le pain et le beurre (l’essentiel), faire son beurre de quelque chose (profiter), consommer, etc. Au Québec, une « dépense » est aussi un lieu où l’on entrepose des victuailles. Quant aux personnes associées aux dépenses ou aux profits excessifs, ce sont souvent des êtres reconnus pour manger avec voracité : des requins, des rapaces, des vautours, des loups, voire des charognards! 2. Quels adjectifs l’auteur emploie-t-il pour désigner le chat et pour désigner le troisième fils du meunier dans ce conte? Chat : « un air posé et sérieux » (l. 12), « glorieux de sa proie » (l. 31), « Le chat fut si effrayé » (l. 109) et « devint grand seigneur » (l. 142). Avec un petit nombre d’adjectifs, l’auteur trace un portrait d’un chat très humain : il parle, chasse, menace, et cela n’étonne personne. En une seule occasion, on le voit effrayé, défaut bien vite rattrapé par la capture de l’ogre. Ajoutons que les circonstances mettent en évidence ce caractère humain : « il se botta bravement » (l. 22), « comme s’il eût été mort » (l. 26), « le maître chat » (l. 29, 85, 96), « suivre mon conseil » (l. 49) et « le drôle » (l. 63). Par contraste avec ses victimes, on le voit en outre très rusé : « jeune lapin, peu instruit encore des ruses de ce monde » (l. 26-27) et « un jeune étourdi de lapin » (l. 29), sous-entendant par là que lui, le chat, connaît les ruses du monde et n’est certainement pas étourdi. Troisième fils : « le pauvre marquis » (l. 60), « sa bonne mine (car il était beau, et bien fait de sa personne) » (l. 67-68), « deux ou trois regards fort respectueux, et un peu tendres » (l. 69-70) et « des bonnes qualités de Monsieur le Marquis » (l. 134-135). Le fils du meunier ne parle pas (il « pense » en une occasion), n’agit pas, se laisse mener par son chat et par les circonstances, « sans savoir à quoi cela [est] bon » (l. 52-53). En une seule occasion, l’auteur lui prête autre chose qu’une belle apparence : « le maître du chat » (l. 17), et encore est-ce peut-être plus par ironie qu’autre chose. Deux aspects sont mis en évidence : sa pauvreté compensée par la beauté physique. 3. Dressez le champ lexical de la richesse et celui de la pauvreté. Richesse : « biens » (l. 1), « gagner leur vie honnêtement » (l. 7), « vous n’êtes pas si mal partagé » (l. 15), « fortune » (l. 49), « un bel héritage » (l. 82), « rapporter

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abondamment » (l. 84), « grands biens » (l. 95), « le plus riche » (l. 97) et « grands biens » (l. 136). Pauvreté : « le pauvre patrimoine » (l. 4), « un si pauvre lot » (l. 6), « que je meure de faim » (l. 9-10) et « la misère » (l. 21). Attention à l’expression « le pauvre marquis » (l. 60), qui indique non son manque d’argent mais sa situation désespérée (sens propre/figuré du mot « pauvre »). 4. Trouvez les hyperboles ou exagérations qui traduisent les idées suivantes : a) l’héritage du troisième fils; « […] un si pauvre lot […] » (l. 6). b) le lieu où le chat chasse le lapin; « […] une garenne où il y avait un grand nombre de lapins » (l. 24-25). c) la brièveté de l’attente lors de la chasse; « À peine fut-il couché, qu’il eut contentement […] » (l. 28-29). d) la beauté de la princesse; « […] la plus belle princesse du monde […] » (l. 47). e) l’attitude du roi face au prétendu marquis; « Le roi lui fit mille caresses […] » (l. 65-66). f) la beauté du prétendu marquis; « […] les beaux habits qu’on venait de lui donner relevaient sa bonne mine (car il était beau, et bien fait de sa personne) […] » (l. 66-68). g) l’attitude de la princesse face au prétendu marquis; « […] elle en devint amoureuse à la folie » (l. 70) et « […] sa fille [...] en était folle […] » (l. 135-136). h) la menace du chat à l’endroit des paysans et des moissonneurs. « […] vous serez tous hachés menu comme chair à pâté » (l. 76-77 et 88-89). 5. Ce texte se fonde, entre autres procédés, sur l’opposition entre le grand et le petit, le riche et le pauvre, le beau et le laid. Trouvez au moins deux exemples de chacune de ces trois oppositions. Grand et petit : • « L’aîné »/« le plus jeune » • « Le chat qui entendait »/« Ne vous affligez point, mon maître » • Le roi/le chat • Le roi/le marquis • Le roi/sa fille • Les « faucheux » et les « moissonneurs » = grandes personnes par rapport au

chat/seront « hachés menu » = petit • L’ogre/le chat • « […] vous transformer en lion, en éléphant » (grand)/« […] vous changer en un

rat, en une souris » (petit). • L’ogre se transforme en lion (grand), puis en souris (petit)

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• L’ogre/« [l]es plus petits animaux »

Note : deux expressions très voisines, « le maître du chat » (l. 17) et « le maître chat » (titre et l. 29, 85 et 96), donnent une image opposée du chat, petit dans le premier cas, car il est le serviteur de son maître, grand dans le second, car il semble devenu le maître, ce que ne manque pas de prouver la suite du conte. Riche et pauvre : • « son moulin, son âne » = grand, riche héritage/« et son chat » = petit, pauvre

héritage • « Mes frères […] pourront gagner leur vie honnêtement »/« pauvre patrimoine »,

« si pauvre lot » • « Mes frères […] pourront gagner leur vie honnêtement »/« il faudra que je meure

de faim » • « Le pauvre marquis » (Attention à l’expression « le pauvre marquis » (l. 60), qui indique non son manque d’argent mais sa situation désespérée (sens propre/figuré du mot « pauvre »). • « des voleurs [...] avaient emporté ses habits » (il avait de riches habits, ceux d’un

marquis; il est maintenant nu) • « rapporter abondamment » • « des grands biens de Monsieur le Marquis » (il était pauvre plus haut) • « un ogre, le plus riche qu’on ait jamais vu » • Château = richesse/le meunier vivait dans un moulin • « une magnifique collation » = richesse/le fils du meunier croyait n’avoir rien

d’autre à manger que son chat • « les grands biens qu’il possédait » Beau et laid : • « la plus belle princesse du monde » • « un de ses plus beaux habits »/les habits que portait le supposé marquis

auparavant (à placer aussi dans Riche et pauvre) • « les beaux habits qu’on venait de lui donner » • « sa bonne mine (car il était beau, et bien fait de sa personne) » • « un beau château » (à placer aussi dans Riche et pauvre) • « le beau château [beau] de l’ogre [laid] » 6. Outre le segment de phrase « vous serez tous hachés menu comme chair à pâté » (l. 76-77 et l. 88-89), trouvez deux exemples de répétitions et expliquez-en brièvement le rôle. Évidemment, il ne faut pas tenir compte de la répétition du nom des personnages, qui sont nécessaires dans la narration : le chat, le fils du meunier, le Marquis de Carabas, le roi, la princesse (notion de répétition stylistique). « […] il me fait plaisir » (l. 37-38) et « Le roi reçut encore avec plaisir […] » (l. 42) : dès le début du texte, le roi manifeste une certaine capacité au plaisir, qu’on voit apparaître plus loin, en particulier quand on le voit « charmé des bonnes qualités de Monsieur le Marquis » (l. 134-135) et boire « cinq ou six coups » (l. 137) en festoyant de la collation préparée par l’ogre.

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Le « sac » (l. 14, 23, 25, 27, 29, 40, etc.) et les « cordons » (l. 23, 30, 40) représentent l’idée d’emprisonnement des victimes du chat. D’ailleurs, pour ces dernières, l’auteur ne se gêne pas pour les qualifier négativement, les faisant passer pour des imbéciles : « jeune lapin, peu instruit encore des ruses de ce monde » (l. 26-27) et « un jeune étourdi de lapin » (l. 29). Sous ce rapport, les paysans ne sont pas en reste, eux qui ont peur des menaces d’un tout petit chat, ni l’ogre, qui ne comprend pas que sa transformation en souris le rend vulnérable au petit félin. En somme, même ceux qui bénéficient des ruses du chat sont moins intelligents que lui. Les « habits » (l. 62, 65, 66 et 155) traduisent la classe sociale, du moins l’apparence d’appartenir à telle classe sociale. L’avancement du marquis est assuré, une fois celui-ci vêtu des habits donnés par le roi. Le tout se termine d’ailleurs par un mariage avec le meilleur parti possible, la princesse. Le « carrosse » (l. 60-61, 71, 94 et 123) a d’ailleurs la même fonction de traduire l’appartenance à la classe dirigeante. La beauté est essentielle dans ce monde des apparences : « la plus belle princesse du monde » (l. 47), « il était beau, et bien fait de sa personne » (l. 67-68), ce qui fait que la princesse en tombe immédiatement amoureuse. D’ailleurs, même les habits et le château doivent aussi être beaux. La « promenade » (l. 46 et 71-72) traduit quant à elle les activités et les loisirs dont jouit la classe aisée. Tout pour eux ne semble que bals et soirées galantes, promenades et collations, chasse et sport. Le « pré » (l. 73, 75, 78 et 83), de même que le blé, le champ, la culture, etc., sont au contraire des indices du travail et de la vie pénible de la classe laborieuse. Les nobles, à l’image du chat, n’ont qu’à se pencher pour en recueillir les fruits ou, mieux encore, à ordonner aux paysans de les leur tendre! Le « bel héritage » de la ligne 82 et le « riche héritage » de la morale contrastent avec les pauvres biens du début, surtout le pauvre lot du troisième fils. On ne peut s’empêcher de penser que l’auteur a sciemment mis ces paroles dans la bouche du roi, par ironie. 7. Quel mot est employé pour désigner le chat aux lignes 57 à 63? Expliquez-en la connotation. « [L]e drôle » (l. 63) : ici, le mot ne signifie pas qu’il est comique ou qu’il fait rire, mais plutôt que le chat joue des tours, voire de mauvais tours, qu’il est espiègle et futé. 8. En général, les personnages respectent les conventions en ce qui a trait au civisme, au comportement social et à la bienséance. Mais en une occasion au moins, le roi se comporte de manière un peu commune, pour ne pas dire effrontée. Expliquez cette situation et trouvez l’expression employée par l’auteur pour l’exprimer. « […] après avoir bu cinq ou six coups » (l. 136-137), sous-entendant qu’il est ivre ou, à tout le moins, quelque peu éméché. Notons que ce n’est qu’à ce moment qu’il offre sa fille en mariage : il a bien sûr été impressionné des richesses du « marquis », mais il doit boire un peu avant de faire le pas décisif.

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Débat 1. L’un des personnages suivants aurait-il dû réagir aux affirmations mensongères du chat : le fils du meunier, le roi, les paysans et les moissonneurs? Expliquez votre point de vue. On s’étonne en effet que personne ne réagisse de manière sensée, adulte. En honnête homme, le fils du meunier aurait dû révéler sa véritable identité, mais l’appât du gain le retient de se dévoiler. Le roi aurait dû vérifier dans les registres de propriété les prétentions du chat. Et d’ailleurs, il ne manifeste aucune surprise de voir le chat lui livrer des victuailles au nom d’un marquis que l’animal vient tout juste d’inventer. On ignore tout des motivations des paysans et des moissonneurs effrayés des paroles d’un tout petit chat : il faut croire qu’ils sont si habitués à plier l’échine que leur peur est prévisible. On pourrait multiplier les exemples. 2. Est-il souhaitable de prendre tous les moyens pour parvenir à ses objectifs? Quelles limites ne devrait-on jamais franchir, le cas échéant? Ici, la discussion porte en fait sur le succès et les écueils qui parsèment la route pour y parvenir, sur la moralité et l’éthique. Réponses variées. Voir aussi la question suivante. 3. Trouvez des exemples de personnes ou d’entreprises qui se sont enrichies en dépouillant les plus pauvres ou en profitant de la naïveté des autres. Trouvez-vous que cela est justifié et que « la fin justifie les moyens »? L’enseignant peut accepter diverses réponses. Mais on ne peut s’empêcher de songer aux divers cas d’entreprises qui, au cours des récentes années, se sont fait prendre « la main dans le sac » : Enron, Norbourg et Vincent Lacroix, etc. 4. L’habit fait-il le moine? Commentez cet adage à partir du film Arrête-moi si tu peux, mettant en vedette Tom Hanks et Leonardo DiCaprio, en comparant ces derniers avec les personnages du conte, en particulier le fils du meunier, alias le Marquis de Carabas. DiCaprio joue le rôle d’un jeune homme qui parvient à tromper tout le monde en se faisant passer pour un pilote d’avion, un avocat, un médecin, etc., grâce à son habileté exceptionnelle à fabriquer de faux documents (diplômes, cartes d’identité, fausse monnaie, etc.). Il berne tant de gens qu’un agent du gouvernement fait en sorte de le libérer à condition qu’il accepte de travailler à l’identification de faux-monnayeurs. En somme, il atteint lui aussi le sommet de la société (et même de la bonne société) en dupant tout le monde. On peut multiplier les exemples où « l’habit fait le moine » : les employés de magasins sont identifiables à leur costume, et même un vendeur débutant prendra son rôle au sérieux en répondant de manière experte, autant que cela est possible, aux questions des clients. Donnez un habit militaire ou un costume de super-héros à un enfant et observez-le se transformer en ce personnage. Pourquoi les adultes agiraient-ils autrement? Évidemment, ce n’est que le premier pas, encore faut-il tenir le coup suffisamment longtemps et que la supercherie dure…

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EXTRAIT 4 (P. 53-58)

Sujet d’analyse 1. Démontrez que, à l’exception du chat, tous les personnages de ce conte sont des naïfs. Grâce aux « débats », les étudiants ont pu constater que le chat est vraiment le maître de ce conte, et que les autres personnages ne sont que des jouets pour lui. On pourrait par exemple rédiger un paragraphe sur chacun des personnages pour montrer à quel point ils se font berner par le chat ou en sont complices : le fils du meunier, le roi, la princesse, les paysans et les moissonneurs.

LES FÉES (P. 59-61) Questions globales sur le texte 1. Quelles ressemblances voyez-vous entre les contes Les Fées et Cendrillon? Les deux contes contiennent plusieurs points semblables : une jeune fille orpheline d’un de ses parents, à qui elle ressemble beaucoup tant par la beauté que par la vertu, est vilipendée par l’autre parent et sa sœur (ses demi-sœurs). Elle accepte de bon gré de faire les tâches les plus ingrates et finit par être récompensée en mariant un prince, alors que la vilaine est punie (les deux vilaines dans Cendrillon). 2. Trouvez des liens entre les romans de la série Harry Potter et le conte Les Fées. Quelles que soient ses actions, Harry Potter est toujours maltraité et méprisé par les Dursley, sa famille adoptive : son oncle, sa tante et son cousin Dudley. À l’opposé, ce dernier ne reçoit que douceur et bienveillance de ses parents malgré son mauvais caractère. Il en va de même de la cadette jolie et gentille du présent conte. Dans le monde des « moldus », Harry Potter est un moins que rien, relégué aux oubliettes (il dort sous un escalier). Il doit se rendre à Poudlard pour déployer son véritable potentiel et en recevoir la gratification. Ainsi, la cadette ne semble appréciée à sa juste valeur que dans l’univers du fils du roi, dans la haute société qui estime les dons qu’elle possède. À cet effet, comme dans Harry Potter, le lecteur se demande bien pourquoi le héros ou l’héroïne n’est pas mieux perçu dans son entourage : après tout, les gens pourraient profiter de leurs dons et pouvoirs magiques (les richesses, dans le présent cas). Comme dans Harry Potter, la cadette bénéficie de la protection d’un personnage puissant, qui châtie aussi les « méchants ». Ici, c’est la fée qui prend l’apparence d’une vieille femme ou d’une belle et jolie dame. Pour Harry, c’est principalement Hagrid et Dumbledore qui jouent le rôle de protecteurs, mais aussi d’autres enseignants de Poudlard. De nombreux autres éléments pourraient être énumérés.

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Compréhension 1. Décrivez brièvement les deux filles de la veuve dans ce conte, en précisant à qui chacune ressemble. « […] l’aînée lui ressemblait si fort et d’humeur et de visage que qui la voyait voyait la mère. Elles étaient toutes deux si désagréables et si orgueilleuses qu’on ne pouvait vivre avec elles. La cadette, qui était le vrai portrait de son père pour la douceur et pour l’honnêteté, était avec cela une des plus belles filles qu’on eût su voir » (l. 1-6). Pour l’aînée, on a surtout un portrait moral, bien que le mot « désagréable » puisse aussi désigner l’apparence physique de la mère et de la fille. Plus loin, on la décrit : « brutale » (l. 40 et 58), « grondant » (l. 42), « brutale orgueilleuse » (l. 48), « guère honnête » (l. 52) et « si peu obligeante » (l. 53). Évidemment, la cadette se voit décrite entièrement par ses qualités physiques et morales. La pauvre femme rencontrée à la fontaine ajoute : « Vous êtes si belle, si bonne et si honnête […] » (l. 18). Le prince est frappé par sa beauté (« la voyant si belle », l. 64), mais aussi par son don merveilleux : « Le fils du roi en devint amoureux et, considérant qu’un tel don valait mieux que tout ce qu’on pouvait donner en mariage à une autre […] » (l. 69-71). En gros, l’auteur crée un contraste marqué entre les deux filles, lequel est le reflet de la dissimilitude entre le mari et son épouse. 2. À quelle distance de la maison se trouve la fontaine? À « une grande demi-lieue » (l. 11), ce qui correspond à environ deux kilomètres, selon le Robert. 3. Qu’est-ce qui prouve la malveillance de la mère envers sa fille cadette? La mère « avait une aversion effroyable pour la cadette. Elle la faisait manger à la cuisine et travailler sans cesse. Il fallait, entre autres choses, que cette pauvre enfant allât deux fois le jour puiser de l’eau […] » (l. 8-11). Elle est traitée non comme une fille à part entière de la famille mais comme une domestique. En clair, la mère la dévalorise, en lui confiant des tâches normalement dévolues à des personnes de rang inférieur, de manière à revaloriser son autre fille. 4. Décrivez la personne qui demande de l’eau à la cadette et celle qui en demande à l’aînée. Femme rencontrée par la cadette : « une pauvre femme » (l. 13). On peut discuter la connotation à donner à cet adjectif, considérant qu’il est employé quelques lignes plus haut pour décrire la jeune fille : « cette pauvre enfant » (l. 10). Plus loin, on précise que « c’était une fée qui avait pris la forme d’une pauvre femme de village, pour voir jusqu’où irait l’honnêteté de cette jeune fille » (l. 19-21). On voit l’association pauvre/honnêteté. Femme rencontrée par l’aînée : « […] une dame magnifiquement vêtue qui vint lui demander à boire : c’était la même fée qui avait apparu à sa sœur, mais qui avait pris l’air et les habits d’une princesse, pour voir jusqu’où irait la malhonnêteté de cette fille » (l. 44-47).

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Notez l’antithèse honnêteté/malhonnêteté, renforcée par celle entre « pauvre femme de village » et « dame magnifiquement vêtue ». 5. Quel est le nom de la fille aînée? Fanchon. Curieusement, comme dans La Barbe bleue, on a le nom d’un personnage plutôt secondaire, mais pas celui de l’héroïne. Ici, on pourrait expliquer cette curiosité grâce à la bienveillance de la mère pour sa fille aînée : elle nomme celle qu’elle préfère et tait le nom de celle qu’elle méprise. 6. Comment réagit la mère en voyant ce qui sort de la bouche de sa fille cadette? et en voyant ce qui sort de la bouche de sa fille aînée? Cadette : elle envoie l’autre fille puiser de l’eau et lui dit d’en donner si une vieille femme lui en demande. Aînée : elle court après la plus jeune, l’accusant d’être la cause des déboires de l’aînée. 7. Comment réagit l’aînée quand la mère lui demande d’aller puiser de l’eau à la fontaine, ajoutant d’en offrir gentiment si une vieille dame lui demande à boire? Quelle expression traduit son attitude? Elle est récalcitrante, rebelle, elle oppose son refus : « Il me ferait beau voir [...] aller à la fontaine » (l. 40). 8. Qui prend pitié de la cadette qui s’est réfugiée dans la forêt après avoir été chassée de la maison par sa mère? Le fils du roi. L’aînée, évidemment, ne bénéficiera pas d’un traitement aussi généreux. On peut encore cette fois s’étonner de la cruauté frappante des châtiments accordés aux méchants dans les contes : aucun pardon, aucun regret, aucun rachat ni soulagement. 9. Quel est le sort finalement réservé à la fille aînée? « […] elle se fit tant haïr que sa propre mère la chassa de chez elle; et la malheureuse, après avoir bien couru sans trouver personne qui voulût la recevoir, alla mourir au coin d’un bois » (l. 72-74). 10. Selon la morale, qu’est-ce qui a plus de prix que l’argent et les pierres précieuses? Les douces paroles. Style 1. Par quels moyens stylistiques l’auteur accentue-t-il la différence entre les deux sœurs? Par des figures d’opposition et par un vocabulaire appréciatif dans un cas, et dépréciatif dans l’autre, moyens renforcés par la répétition. Antithèses : « était folle de sa fille aînée »/ « avait une aversion effroyable pour la cadette » (l. 7-8); puise l’eau avec une « cruche » (l. 16)/avec « le plus beau flacon d’argent qui fût dans le logis » (l. 42-43); honnêteté/malhonnêteté (voir ci-dessous); la

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cadette « puisa de l’eau au plus bel endroit de la fontaine et la lui présenta, soutenant toujours la cruche afin qu’elle bût plus aisément » (l. 15-17)/l’aînée dit : « […] j’ai apporté un flacon d’argent tout exprès pour donner à boire à madame! J’en suis d’avis : buvez à même si vous voulez » (l. 49-51); il sort de la bouche de la cadette « ou une fleur, ou une pierre précieuse » (l. 22-23), roses, perles et diamants (l. 28-29 et 31)/de la bouche de l’aînée « ou un serpent ou un crapaud » (l. 54-55), vipères et crapauds (l. 59); la cadette « raconta naïvement » (l. 33)/l’aînée parle « en grondant » (l. 42). Termes appréciatifs pour la cadette : « le vrai portrait de son père pour la douceur et pour l’honnêteté, était avec cela une des plus belles filles » (l. 4-6), « cette belle fille » (l. 14 et 24), « si belle, si bonne et si honnête » (l. 18), « l’honnêteté de cette jeune fille » (l. 20-21) et « si belle » (l. 64). Termes dépréciatifs pour l’aînée : « si désagréables et si orgueilleuses qu’on ne pouvait vivre avec elles » (l. 3-4), « la brutale » (l. 40 et 58), « grondant » (preuve de mauvais caractère, l. 42), « la malhonnêteté de cette fille » (l. 47), « cette brutale orgueilleuse » (l. 48), « Vous n’êtes guère honnête » (l. 52), « si peu obligeante » (l. 53) et « se fit tant haïr » (par ses défauts, l. 72). Notons en outre que l’aînée a un nom, Fanchon, alors qu’on ignore celui de la cadette. Cela met en évidence l’amour de la mère pour son aînée ainsi que sa haine pour la cadette, qu’elle ne daigne pas nommer. Elle ne la désigne pas même en employant le mot fille, sauf en une occasion (l. 31-32). Juste un peu plus loin, la mère déclare : « […] il faut que j’y envoie ma fille » (l. 35), comme si elle n’en avait qu’une seule! 2. Perrault associe clairement le caractère à l’apparence physique : trouvez-en des preuves grâce au vocabulaire employé par l’auteur dans ce conte. La fille belle est bonne, la laide, méchante. La belle est gentille, honnête : elle sert la vieille femme avec bienveillance, elle répond doucement à sa mère qui lui pose des questions sur son aventure. La brutale est tout à l’opposé : elle refuse de servir la belle princesse (la fée), elle répond à sa mère avec brutalité, sans décrire son aventure clairement, en contrefaisant les airs et les paroles de sa génitrice. Les actions reçoivent une récompense équivalente : une bonne action est récompensée, une mauvaise, punie. 3. Pourquoi l’auteur écrit-il qu’il sort précisément « deux roses, deux perles et deux gros diamants » (l. 28-29) de la bouche de la cadette et exactement « deux vipères et deux crapauds » (l. 58-59) de la bouche de l’aînée? La fée a stipulé à la cadette qu’« à chaque parole [...] sortira de la bouche ou une fleur, ou une pierre précieuse ». Elle a prononcé six mots (« Je vous demande pardon, ma mère »), on voit six objets précieux sortir de sa bouche. De même, de la bouche de l’aînée sortira « ou un serpent ou un crapaud ». Ils sont au nombre de quatre en raison de la réponse en quatre mots : « Eh bien! ma mère! » 4. Quel procédé stylistique accentue la ressemblance entre la mère et la fille aînée dans le premier paragraphe ainsi que dans la dernière conversation qu’elles ont l’une avec l’autre, tout près de la fin? Répétition : « […] qui la voyait voyait la mère » (l. 2). Répétition et parallélisme : « Eh bien! ma fille! »/« Eh bien! ma mère! »

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Débat 1. Dans la morale, l’auteur écrit au sujet de l’honnêteté que « tôt ou tard elle a sa récompense » (l. 83). Pourtant, la mère, loin de récompenser sa fille honnête, la maltraite. Comment expliquez-vous ce fait? La récompense ne peut venir du bourreau : quels que soient les efforts de la cadette, sa bonté, ses qualités, sa beauté, jamais la mère ne les reconnaîtra. À moins d’un coup de baguette magique, le méchant ou la méchante reste un tortionnaire, car il ou elle voit la victime comme un souffre-douleur. La meilleure preuve en est que la mère, malgré ce que rapporte la fille cadette en or et en pierres précieuses, chasse cette corne d’abondance sans ménagement et sans regret : elle préfère rester pauvre plutôt que de devoir reconnaître les qualités de cette enfant. Vers la dissertation 1. Montrez que, aussi bien par l’apparence que par le caractère, les sœurs dans les contes Cendrillon et Les Fées ont de nombreuses similitudes. Traitez des « bonnes » ainsi que des « méchantes ». (L’enseignant peut accepter diverses réponses.)

CENDRILLON OU LA PETITE PANTOUFLE DE VERRE (P. 63-69) Questions globales sur le texte 1. Quelle est la qualité la plus importante de Cendrillon? Expliquez votre point de vue en vous référant à un passage précis du texte. Il n’y a pas de bonnes ni de mauvaises réponses à cette question. Voici quelques pistes (d’autres peuvent être données). Bien sûr, la beauté en frappera plusieurs, mais peut-on dire qu’il s’agit d’une qualité, au sens moral? Il est vrai que beauté et bonté sont intimement liées dans ce conte. La patience, la persévérance dans l’adversité : elle persévère dans l’accomplissement de ses tâches, malgré la méchanceté de sa belle-mère et de ses demi-sœurs. On ne sait pas exactement depuis combien de temps ces mauvais traitements durent, mais on peut raisonnablement supposer qu’ils ne sont pas récents. La douceur, l’humanité : contrairement à plusieurs autres personnages, elle n’est pas seulement un type figé, elle a des émotions (elle pleure), elle aide ses sœurs malgré leurs mauvais traitements, elle a des sentiments altruistes, peut-être même désintéressés envers elles (n’oublions pas qu’à la fin, elle leur trouve de bons partis à marier). Même les animaux (souris, rats, lézards), elle les traite avec bonté. Le pardon : elle blanchit ses sœurs (et peut-être même sa belle-mère), la preuve étant qu’elle leur trouve un bon mari. L’acceptation : elle accepte son misérable sort, mais pour autant elle ne reste pas oisive. Elle veut s’en sortir, ne serait-ce que par la prière et les souhaits.

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Le respect, la modestie : même les pires traitements ne peuvent l’amener à avoir un comportement déplacé, une parole acrimonieuse ou un geste de menace. Elle est polie avec sa mère et ses sœurs, autant qu’on puisse en juger par ses agissements. Ce n’est pas une plaignarde, une pleurnicharde, car elle ne se réfugie pas dans les bras de son père, même si, encore une fois, les autres la traitent comme une domestique. Elle adopte un comportement modeste face à ses sœurs, mais elle ne semble pas hautaine, même quand elle devient princesse. Elle a l’air à l’aise dans toutes les situations, avec toutes les personnes, quels que soient le rang ou la classe sociale. Elle est habile de ses mains : elle sait faire la lessive, nettoyer la maison, coiffer et habiller ses sœurs, attraper de petits animaux grâce à des pièges, etc. Elle a du goût, car elle sait conseiller ses sœurs sur ce qu’il faut porter, sur la manière de se coiffer, etc. 2. Comparez le rôle de la fée marraine dans le présent conte et dans Peau d’Âne. La principale ressemblance vient du fait que la marraine est fée dans les deux contes et accorde un indéfectible soutien à la jeune fille qui requiert son aide. À ce titre, chacune fait profiter sa filleule de ses dons. L’une donne à Peau d’Âne une baguette magique qui lui permet d’avoir accès à ses beaux costumes de princesse, ce qui sera bien utile le moment venu. L’autre donne à Cendrillon de beaux vêtements et, surtout, des pantoufles de verre, qui lui serviront à prouver son identité. Les vêtements, les apparences sont si importants qu’ils jouent le rôle d’une carte de visite, plus même : ils sont une preuve d’identité, pour ne pas dire l’identité elle-même du noble (plusieurs contes en font foi). La marraine n’est pas infaillible pour autant, elle a des limites. Celle de Peau d’Âne croit que le roi s’avouera vaincu dès la première demande, la première robe; les choses ne se passent pas comme elle le souhaite, on s’en souvient. Celle de Cendrillon ne peut (ou ne veut?) rendre permanente la transformation des vêtements et des animaux : la belle princesse doit redevenir Cendrillon avant minuit, quitte à rentrer sans son attelage princier. Ayant joué un rôle important dans la mise en place du conte, puis étant disparues un moment, les deux marraines réapparaissent à la toute fin : « Dans ce moment la marraine arriva / Qui raconta toute l’histoire, / Et par son récit acheva / De combler Peau d’Âne de gloire » (v. 564-567); « Là-dessus arriva la marraine qui, ayant donné un coup de baguette sur les habits de Cendrillon, les fit devenir encore plus magnifiques que tous les autres » (l. 187-189). Compréhension 1. Comment s’explique la différence dans le traitement accordé aux trois jeunes filles de ce conte? Le père s’est remarié, et la belle-mère accorde plus d’attention à ses propres filles qu’à celle de son nouvel époux. Les deux filles de cette seconde épouse « ressembl[ent] en toutes choses » à leur mère, alors que Cendrillon est « d’une douceur et d’une bonté sans exemple ». Elles sont traitées différemment par la mère parce que, fondamentalement, elles sont différentes. On peut comparer avec les deux filles des Fées.

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2. Énumérez les « viles occupations de la maison » (l. 9-10) confiées à Cendrillon. Elle « nettoyait la vaisselle et les montées, [...] frottait la chambre de madame et celles de mesdemoiselles ses filles » (l. 10-11). Plus loin, on la voit qui « repassait le linge de ses sœurs et qui godronnait leurs manchettes » (l. 28-29) et même les coiffait (l. 39-40), « parfaitement bien » (l. 48) qui plus est. Pour salaire de son labeur, « [e]lle couchait tout au haut de la maison, dans un grenier, sur une méchante paillasse, pendant que ses sœurs étaient dans des chambres parquetées, où elles avaient des lits des plus à la mode, et des miroirs où elles se voyaient depuis les pieds jusqu’à la tête » (l. 11-15) et portait de « méchants habits » (l. 22). « Lorsqu’elle avait fait son ouvrage, elle s’allait mettre au coin de la cheminée, et s’asseoir dans les cendres » (l. 18-19), peut-être pour se tenir au chaud, mais plus probablement pour s’éloigner de ses demi-sœurs et de leurs railleries. 3. Quel autre nom méprisant donne-t-on à Cendrillon? Cucendron, c’est-à-dire le cul dans les cendres ou recouvert de cendres. 4. Quel évènement déclenche dans la maisonnée un affolement au sujet du choix de vêtements, de coiffures et de bijoux? Le fils du roi donne un bal. 5. Que répond Cendrillon quand ses deux demi-sœurs lui demandent si elle aimerait, elle aussi, aller au bal? « Hélas, mesdemoiselles, vous vous moquez de moi, ce n’est pas là ce qu’il me faut » (l. 43-44). Au premier degré, le lecteur comprend qu’elle garde son rang : en tant que servante, ce n’est pas sa place. Elle feint, à son habitude, la modestie et la sagesse, bien que, au fond d’elle-même, elle ait une furieuse envie d’y aller aussi. 6. À quel moment Cendrillon se met-elle à pleurer? Cendrillon, voyant ses sœurs partir pour le bal « les suivit des yeux le plus longtemps qu’elle put; lorsqu’elle ne les vit plus, elle se mit à pleurer » (l. 52-54). On constate qu’elle ne leur donne pas le plaisir de la voir pleurer et souffrir. Devant elles, Cendrillon feint la sympathie, la gentillesse, la servilité. Elle se retient le plus longtemps possible. La retenue, la modération, la feinte (dissimulation avec une connotation positive) sont des « qualités » appréciées dans la haute société de cette époque, en particulier chez les femmes. 7. Décrivez brièvement comment Cendrillon obtient un carrosse, six chevaux, un cocher et six laquais. Carrosse : « Cendrillon alla aussitôt cueillir la plus belle qu’elle put trouver, et la porta à sa marraine, ne pouvant deviner comment cette citrouille la pourrait faire aller au bal. Sa marraine la creusa, et n’ayant laissé que l’écorce, la frappa de sa baguette, et la citrouille fut aussitôt changée en un beau carrosse tout doré » (l. 64-68). Six chevaux : « […] elle alla regarder dans sa souricière, où elle trouva six souris toutes en vie; elle dit à Cendrillon de lever un peu la trappe de la souricière, et à chaque souris qui sortait, elle lui donnait un coup de sa baguette, et la souris était aussitôt changée en un beau cheval […] » (l. 68-72).

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Un cocher : « Cendrillon lui apporta la ratière, où il y avait trois gros rats. La fée en prit un d’entre les trois, à cause de sa maîtresse barbe, et l’ayant touché, il fut changé en un gros cocher, qui avait une des plus belles moustaches qu’on ait jamais vues » (l. 78-81). Note : jusqu’au XVIIe siècle, la distinction barbe/moustache n’était pas aussi claire que de nos jours, l’on voyait souvent l’un ou l’autre mot employé indifféremment. Six laquais : « “Va dans le jardin, tu y trouveras six lézards derrière l’arrosoir, apporte-les moi.” Elle ne les eut pas plus tôt apportés que sa marraine les changea en six laquais […] » (l. 82-85). 8. Expliquez la provenance des beaux habits et des pantoufles de verre de Cendrillon. Les « vilains habits » de travail sont transformés en magnifiques vêtements de bal d’un simple coup de baguette. À ce sujet, on peut légitimement se demander pourquoi la fée a besoin d’objets courants à transformer en extraordinaires (citrouille en carrosse, souris en chevaux, lézards en laquais, etc.). Ne pourrait-elle pas simplement, elle qui est dotée de pouvoirs magiques, faire apparaître les objets dont a besoin Cendrillon? En effet, les pantoufles de verre, c’est un détail capital, lui sont données par sa marraine, ce qui explique qu’ils gardent leur forme (ne redeviennent pas de vilains souliers) plus tard. 9. Quel avertissement la fée sert-elle à Cendrillon avant son départ pour le bal? « […] sa marraine lui recommanda sur toutes choses de ne pas passer minuit, l’avertissant que si elle demeurait au bal un moment davantage, son carrosse redeviendrait citrouille, ses chevaux des souris, ses laquais des lézards, et que ses beaux habits reprendraient leur première forme » (l. 94-98). 10. Quelles réactions l’arrivée de Cendrillon au bal déclenche-t-elle? Elles sont de plusieurs ordres, chacun réagissant différemment selon son rang et ses propres intérêts. D’abord le prince et ses serviteurs : « […] il venait d’arriver une grande princesse qu’on ne connaissait point, [le fils du roi] courut la recevoir; il lui donna la main à la descente du carrosse, et la mena dans la salle où était la compagnie » (l. 100-103). Plus tard, il lui donne la place d’honneur et danse avec elle : « Le fils du roi la mit à la place la plus honorable, et ensuite la prit pour la mener danser » (l. 113-114). Ensuite la foule des invités et autres personnes présentes dans la salle de bal : « Il se fit alors un grand silence; on cessa de danser, et les violons ne jouèrent plus, tant on était attentif à contempler les grandes beautés de cette inconnue. On n’entendait qu’un bruit confus : — Ah! qu’elle est belle! » (l. 103-107). Ils sont, eux aussi, séduits par sa beauté, mais leur réaction est plutôt l’étonnement et l’ébahissement : ils ne bougent plus, ne parlent plus, alors que le prince a agi pour l’accueillir. Curieusement, Cendrillon, à ce moment, ne semble rien manifester, ni joie ni crainte. Puis le roi et la reine : « Le roi même, tout vieux qu’il était, ne laissait pas de la regarder, et de dire tout bas à la reine qu’il y avait longtemps qu’il n’avait vu une si belle et si aimable personne » (l. 108-110). Comme dans plusieurs contes, les parents

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sont ravis que leur fils princier s’intéresse enfin à une belle, afin d’assurer la succession… Enfin, les dames à la mode : « Toutes les dames étaient attentives à considérer sa coiffure et ses habits, pour en avoir, dès le lendemain, de semblables, pourvu qu’il se trouvât des étoffes assez belles, et des ouvriers assez habiles » (l. 110-113). Pour elles, la personnalité de la belle se manifeste par ses vêtements, son originalité, choses que l’on peut imiter, contrairement à la beauté, l’intelligence ou la grâce. 11. Outre sa beauté, qu’admire-t-on chez cette princesse inconnue qu’est Cendrillon? Sa grâce et sa manière de danser (l. 114-115). Rappelons que les habiletés sociales, la bienséance et autres formes de politesse sont valorisées dans l’univers de la noblesse. On pourrait aussi accepter comme réponse sa coiffure et ses habits (voir réponse précédente). 12. Que partage Cendrillon avec ses sœurs, qui ignorent la véritable identité de la belle princesse? Des oranges et des citrons. 13. Revenue du bal, Cendrillon demande une nouvelle faveur à sa marraine. Laquelle? Retourner au bal le lendemain, car « le fils du roi l’en avait priée » (l. 125). 14. Quel geste inattendu fait Cendrillon en allant ouvrir la porte à ses sœurs qui reviennent du bal? Elle bâille, se frotte les yeux, s’étire comme si elle venait de se réveiller (l. 128-130), bref, elle feint d’avoir passé la soirée à dormir. Le lecteur peut être surpris de cette petite hypocrisie, connaissant l’honnêteté de l’héroïne. Mais on s’en fait complice, on se dit qu’il s’agit d’un bien petit mensonge pour éviter les railleries de ses sœurs. Plus loin, Cendrillon « ne se sen[t] pas de joie » (l. 136) en apprenant qu’elles ne l’ont pas reconnue, puis « [est] bien aise » (l. 146) que Javotte refuse de lui prêter sa robe jaune, prouvant une fois de plus sa capacité à dissimuler ses véritables sentiments. Puis, on constatera de nouveau son habileté à feindre et à jouer (encore une vertu prisée dans le monde des nobles) quand vient le moment d’essayer la pantoufle révélatrice : « Cendrillon qui les regardait, et qui reconnut sa pantoufle, dit en riant : — Que je voie si elle ne me serait pas bonne! Ses sœurs se mirent à rire et à se moquer d’elle » (l. 177-180). 15. On précise le nom d’une des demi-sœurs de Cendrillon. Quel est-il? Javotte. Selon le dictionnaire en ligne le-dictionnaire.com, ce mot désignait « dans une forge, le bloc de fer dans lequel est placé l’enclume ». On pourrait y voir l’image d’une sœur qui sert d’enclume et l’autre, de marteau pour frapper Cendrillon. Voir, au sujet de l’absence ou de la présence d’un prénom, les contes Les Fées, où la méchante porte aussi un nom, mais pas la bonne, La Belle au bois dormant, où l’on connaît le nom des enfants, mais pas celui de la mère, La Barbe bleue, où l’on connaît le nom de la sœur de la mariée, mais pas celui de l’épouse, etc. Il semble y avoir là une convention, car l’héroïne de plusieurs contes porte soit un nom descriptif plutôt qu’un véritable prénom (Peau d’Âne, Cendrillon), soit ne porte pas de nom du tout.

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Ce n’est en tout cas pas une règle : Blaise et Fanchon dans Les Souhaits ridicules, Riquet et Poucet dans les contes éponymes, bien que ces noms puissent être perçus comme des descriptifs. 16. Le deuxième soir, dans quel état Cendrillon revient-elle du bal? « Cendrillon arriva chez elle bien essoufflée, sans carrosse, sans laquais, et avec ses méchants habits, rien ne lui étant resté de sa magnificence qu’une de ses petites pantoufles, la pareille de celle qu’elle avait laissé tomber » (l. 157-160). 17. Après le départ précipité de la belle princesse, à quoi s’occupe le prince tout le reste du bal? Tout le reste du bal, il ne fait que regarder la pantoufle de verre qu’elle a laissé tomber en s’enfuyant. 18. Quelles sont les deux preuves que Cendrillon est bien la princesse dont le prince est tombé amoureux au bal? Le pied de Cendrillon « était juste comme de cire » (l. 185) dans la pantoufle de verre détenue par le gentilhomme qui en faisait l’essai aux jeunes filles du royaume. Cendrillon possédait l’autre chaussure de la paire. 19. Une fois fiancée avec son prince, que fait Cendrillon pour ses deux demi-sœurs? Elle les installe au palais et les marie chacune à un grand seigneur. Notez la différence de traitement des deux méchantes sœurs entre la présente version et celle des Grimm. 20. Selon la morale, quel don vaut mieux que la beauté? « La bonne grâce est le vrai don des fées […] » (l. 210). Le sens exact de l’expression est assez difficile à cerner, car il peut aussi bien s’agir d’un bienfait accordé que de la disposition d’une personne à accorder une faveur, de la bonté de Dieu que de celle d’un prince à accorder son pardon (par exemple à un criminel), de la reconnaissance d’un bienfait accordé (rendre grâce) que de la dispense de rendre ce qui est dû (faire grâce). Le sens III du Robert semble le plus approprié : ce qui est agréable chez quelqu’un. Malgré tout, il reste vague, puisqu’il peut désigner à la fois l’apparence physique, les ornements, les manières (élégance) et des qualités morales (amabilité, gentillesse, etc.). L’emploi au pluriel (les bonnes grâces) ou au singulier (la bonne ou la mauvaise grâce) semble s’ajouter à ces nuances presque infinies. Style 1. Dans le premier paragraphe, l’auteur emploie des superlatifs et des hyperboles qui accentuent les différences entre Cendrillon, d’une part, et la mère et ses deux autres filles, d’autre part. Relevez quelques exemples de ces exagérations et fournissez une brève explication quant à leur emploi. Cendrillon : « d’une douceur et d’une bonté sans exemple », « la meilleure personne du monde », « les bonnes qualités de cette jeune enfant », « des plus viles occupations

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de la maison », « Elle couchait tout au haut de la maison, dans un grenier », « sur une méchante paillasse », « La pauvre fille souffrait tout avec patience », « ses méchants habits », « cent fois plus belle que ses sœurs ». La mère et ses deux filles : « la plus hautaine et la plus fière qu’on eût jamais vue », « qui lui ressemblaient en toutes choses », « que la belle-mère fit éclater sa mauvaise humeur », « ses filles encore plus haïssables », « dans des chambres parquetées », « des lits des plus à la mode », « des miroirs où elles se voyaient depuis les pieds jusqu’à la tête », « sa femme le gouvernait entièrement », « La cadette, qui n’était pas si malhonnête que son aînée », « vêtues très magnifiquement ». On voit que la mère donne tout ce qu’il y a de mieux à ses propres filles. En même temps, elle fait tout pour rabaisser et humilier Cendrillon. Mais plus elle dévalorise l’héroïne, plus cela attire la sympathie du lecteur, sympathie multipliée par le contraste entre ses qualités inaltérables dans la déchéance et la mauvaise foi des trois autres. 2. Dressez le champ lexical des vêtements ainsi que celui de l’habitation entre les lignes 1 et 51. Que constatez-vous? Vêtements : « méchants habits », « vêtues très magnifiquement », « habits », « repassait le linge », « godronnait leurs manchettes », « habillerait », « habit de velours rouge », « garniture d’Angleterre », « jupe ordinaire », « manteau à fleurs d’or », « barrière de diamants », « cornettes à deux rangs », « mouches », « lacets », « serrer pour rendre leur taille plus menue ». Habitation : « vaisselle », « montées », « chambre », « maison », « grenier », « méchante paillasse », « chambres parquetées », « lits des plus à la mode », « au coin de la cheminée », « cendres », « logis ». Ces termes accentuent le contraste entre Cendrillon et ses sœurs : l’héroïne porte de vilains vêtements et habite les lieux les moins prisés du foyer, les deux vilaines se voient offrir le meilleur et le plus beau, comme en compensation de leur méchanceté (voir la réponse à la question précédente). 3. Dans le même passage, on parle beaucoup de coiffure. Que révèle la répétition du verbe « coiffer » et des mots de la même famille? « [C]oiffures », « coiffeuse », « coiffer », « coiffant », « coiffées », « coiffa ». On constate d’abord à quel point les deux vilaines sont superficielles, uniquement occupées de leur apparence et de leur physionomie, ce que révèlent bien les derniers mots du passage : « […] elles étaient toujours devant leur miroir » (l. 51). Pour Cendrillon aussi, l’aspect importe beaucoup, mais l’auteur attire l’attention sur son bon goût (l. 39), sur le fait qu’elle « les conseill[e] le mieux du monde » malgré le traitement qu’elles lui font subir : elle ne les coiffe pas « de travers » (l. 47), bien au contraire. Un point à signaler : pourquoi des demoiselles aussi riches se laissent-elles coiffer par leur demi-sœur plutôt que par une coiffeuse professionnelle? Bien sûr, celle-ci a bon goût, mais quel but poursuit Perrault? Veut-il uniquement appuyer de nouveau sur le

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contraste entre la bonne et les méchantes? En effet, elles profitent de la situation pour humilier encore une fois celle qui leur rend tellement service. Mais ne pourrait-il laisser entendre qu’elles sont un peu radines, ou même avares? Sans qu’il leur en coûte un sou, elles sont coiffées « parfaitement bien », « le mieux du monde ». 4. Avant la ligne 64, l’auteur n’emploie qu’une seule fois l’adjectif « belle » (l. 23), puis à partir de ce point et jusqu’à l’arrivée de la princesse inconnue au bal (à la ligne 107), cet adjectif foisonne. Relevez les répétitions de cet adjectif et indiquez à quel mot il se rapporte dans chaque cas. « […] cueillir la plus belle [citrouille] » (l. 64), « un beau carrosse » (l. 68), « un beau cheval » (l. 72), « un bel attelage » (l. 72), « un beau gris » (l. 73), « une des plus belles moustaches » (l. 80-81), « ses beaux habits » (l. 97) et « Ah, qu’elle est belle! » (l. 107). Ajoutons le nom « les grandes beautés de cette inconnue » (l. 105) et le synonyme « les plus jolies du monde » (l. 93). Plus loin : « une si belle et si aimable personne » (l. 109-110), « des étoffes assez belles » (l. 112), « une fort belle collation » (l. 115), etc. La magnificence ne peut provenir que de la seule beauté de Cendrillon, ses sœurs n’auraient pu y résister, se seraient inclinées devant cette perfection intrinsèque. Pour être efficiente, la beauté doit être encadrée, enveloppée de belles choses. Chaque détail doit augmenter la beauté de la princesse, sinon cette beauté est invisible, à l’image de Cendrillon avant qu’elle s’épanouisse et soit révélée par l’amour du prince. 5. Relevez les passages où il est question du prince et précisez les qualités qui lui sont attribuées. « […] le fils du roi donna un bal » (l. 24), « Le fils du roi, qu’on alla avertir qu’il venait d’arriver une grande princesse qu’on ne connaissait point, courut la recevoir » (l. 100-101), « Le fils du roi la mit à la place la plus honorable » (l. 113), « le jeune prince ne mangea point » (l. 116), « des oranges et des citrons que le prince lui avait donnés » (l. 118-119), « le fils du roi l’en avait priée » (l. 125), « le fils du roi en était fort en peine » (l. 138), « Le fils du roi fut toujours auprès d’elle » (l. 150-151), « Le prince la suivit, mais il ne put l’attraper » (l. 155-156), « une de ses pantoufles de verre, que le prince ramassa bien soigneusement » (l. 156-157), « le fils du roi l’avait ramassée » (l. 169), « le fils du roi fit publier à son de trompe qu’il épouserait celle dont le pied serait bien juste à la pantoufle » (l. 172-174) et « le jeune prince » (l. 195). Aucune! Sauf l’adjectif « jeune », à la toute fin du texte, nulle part ne le décrit-on charmant, beau ou amoureux. Seuls ses gestes et ses actes confirment une impression que l’auteur ne consolide par aucun terme précis. 6. Les hommes jouent un rôle très effacé dans ce conte. Que sait-on du père de Cendrillon et du roi? Père de Cendrillon : il n’apparaît que dans le premier paragraphe du texte. C’est un « gentilhomme », à ses « secondes noces », un « mari » que « sa femme […] gouvernait entièrement », un « père qui l’aurait grondée » si sa fille « osait s’en plaindre ». On ne le voit assister ni au bal, ni à la révélation de l’identité de la mystérieuse princesse grâce à la pantoufle de verre, ni au mariage de sa fille avec le prince, ce qui est tout de même curieux.

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Roi : le père du prince ne tient pas un rôle plus développé. Il n’apparaît guère que dans l’expression « le fils du roi ». Une seule phrase le concerne directement : « Le roi même, tout vieux qu’il était, ne laissait pas de la regarder, et de dire tout bas à la reine qu’il y avait longtemps qu’il n’avait vu une si belle et si aimable personne » (l. 108-110). 7. L’auteur consacre un seul paragraphe à la seconde soirée de bal. Quels détails nouveaux y apprend-on? Quelle expression est employée par euphémisme pour dire que le prince amoureux se déclare? Entre les lignes 149 et 160, on découvre que Cendrillon est « encore plus parée que la première fois » et que « [l]e fils du roi fut toujours auprès d’elle, et ne cessa de lui conter des douceurs », ce qui fait « qu’elle entendit sonner le premier coup de minuit » quand elle croyait qu’il n’était que onze heures. « […] elle se leva et s’enfuit » et « laissa tomber une de ses pantoufles de verre ». « Cendrillon arriva chez elle bien essoufflée, sans carrosse, sans laquais, et avec ses méchants habits », avec seulement « une de ses petites pantoufles ». L’euphémisme est : « [… il] ne cessa de lui conter des douceurs […] » (l. 151). Débat 1. Aux filles : aimeriez-vous avoir l’occasion de porter des vêtements semblables à ceux décrits dans ce conte? Aux garçons : souhaiteriez-vous avoir l’occasion de vous montrer aux bras d’une fille vêtue comme les belles dames de ce conte? Expliquez votre choix. Réponses libres, mais encourager la réflexion (ne pas penser uniquement au soir du bal des finissants) sur l’importance ou non de l’apparence physique, de la mode, des vêtements. On peut également parler des divers groupes sociaux identifiables grâce aux vêtements : certains peuples (les Écossais à leur kilt, les Japonaises à leur kimono, les Inuit à leurs vêtements de fourrure…), mais aussi des regroupements de personnes (les hommes et femmes d’affaires, les motards, les « skins », etc.) ou encore des travailleurs (ouvriers, mécaniciens, cuisiniers, par exemple). Comment verrait-on le fait que l’un porte les vêtements de l’autre (le Québécois de souche blanche, des vêtements africains; le médecin, ceux d’un policier; le cuisinier, la tenue d’un mécanicien; et, pourquoi pas, l’homme, la robe de la femme)? 2. On différencie assez facilement le beau du laid, mais comment discerner qu’on accorde assez ou trop d’importance à l’extérieur, à l’apparence? Bien paraître est important, mais comment ne pas laisser la beauté prendre le pas sur le reste, c’est-à-dire sur l’intelligence, la bonté, l’éducation, etc.? Réponse libre. Habituellement, la réflexion s’oriente sur la situation (on porte, par convention, tel type de vêtements dans telle situation). Le vêtement permet de porter un premier jugement, mais pas définitif, on s’entend, sur le goût ou l’intelligence d’une personne : si elle sait choisir une tenue adaptée à la situation, la personne prouve qu’elle comprend son rôle, son rang, etc. Inversement, si elle ne sait pas choisir, elle démontre un manque d’intelligence ou de sens critique (disons, par exemple, porter un maillot de bain en classe). 3. La mode est-elle une source inépuisable de renouvellement ou un délire de gaspillage inutile? (L’enseignant peut accepter diverses réponses.)

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4. Trouvez une illustration ou une photo montrant la tenue vestimentaire d’une période donnée du passé, par exemple en fouillant dans l’album de photos de vos parents ou de vos grands-parents. Apportez-la en classe (une photocopie ou un fichier numérisé fera très bien l’affaire) et discutez de ce qui n’est plus à la mode depuis cette époque et de ce qui pourrait se porter encore de nos jours. Attardez-vous à plusieurs aspects, pas seulement aux vêtements : bijoux, coiffures, postures, décor et arrière-plan, etc. L’exercice est assez amusant si les étudiants participent de manière enthousiaste. On peut aussi apporter des illustrations cocasses des vêtements portés dans les siècles passés et s’amuser des réactions et commentaires tout en favorisant la réflexion.

RIQUET À LA HOUPPE (P. 70-77) Questions globales sur le texte 1. Comme dans de nombreux contes, l’auteur nous incite à ne pas nous fier uniquement aux apparences. Repérez un passage ou rapportez une situation du texte qui traduit bien cette idée. « […] un fils si laid et si mal fait qu’on douta longtemps s’il avait forme humaine. Une fée qui se trouva à sa naissance assura qu’il ne laisserait pas d’être aimable, parce qu’il aurait beaucoup d’esprit. […] Tout cela consola un peu la pauvre reine, qui était bien affligée d’avoir mis au monde un si vilain marmot » (l. 1-8). « […] la reine d’un royaume voisin accoucha de deux filles. La première qui vint au monde était plus belle que le jour : la reine en fut si aise qu’on appréhenda que la trop grande joie qu’elle en avait ne lui fît mal. La même fée qui avait assisté à la naissance du petit Riquet à la houppe était présente, et pour modérer la joie de la reine, elle lui déclara que cette petite princesse n’aurait point d’esprit, et qu’elle serait aussi stupide qu’elle était belle. Cela mortifia beaucoup la reine; mais elle eut, quelques moments après, un bien plus grand chagrin, car la seconde fille dont elle accoucha se trouva extrêmement laide. — Ne vous affligez point tant, Madame, lui dit la fée; votre fille sera récompensée d’ailleurs, et elle aura tant d’esprit qu’on ne s’apercevra presque pas qu’il lui manque de la beauté. » (l. 14-26). « […] leurs perfections crûrent aussi avec elles, et on ne parlait partout que de la beauté de l’aînée et de l’esprit de la cadette. Il est vrai aussi que leurs défauts augmentèrent beaucoup avec l’âge. La cadette enlaidissait à vue d’œil, et l’aînée devenait plus stupide de jour en jour. Ou elle ne répondait rien à ce qu’on lui demandait, ou elle disait une sottise. Elle était avec cela si maladroite qu’elle n’eût pu ranger quatre porcelaines sur le bord d’une cheminée sans en casser une, ni boire un verre d’eau sans en répandre la moitié sur ses habits. Quoique la beauté soit un grand avantage chez une jeune femme, cependant la cadette l’emportait presque toujours sur son aînée dans toutes les compagnies. D’abord on allait du côté de la plus belle pour la voir et pour l’admirer, mais bientôt après, on allait à celle qui avait le plus d’esprit, pour lui entendre dire mille choses agréables; et on était étonné qu’en moins d’un quart d’heure l’aînée n’avait plus personne auprès d’elle, et que tout le monde s’était rangé autour de la cadette » (l. 33-48).

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« […] elle vit venir à elle un petit homme fort laid et fort désagréable, mais vêtu très magnifiquement. C’était le jeune prince Riquet à la houppe qui, étant devenu amoureux d’elle sur ses portraits qui couraient par tout le monde, avait quitté le royaume de son père pour avoir le plaisir de la voir et de lui parler » (l. 54-58). « — La beauté, reprit Riquet à la houppe, est un si grand avantage qu’il doit tenir lieu de tout le reste; et quand on le possède, je ne vois pas qu’il y ait rien qui puisse nous affliger beaucoup. — J’aimerais mieux, dit la princesse, être aussi laide que vous et avoir de l’esprit, que d’avoir de la beauté comme j’en ai, et être bête autant que je le suis » (l. 69-74). « […] elle se sentit tout autre qu’elle n’était auparavant; elle se trouva une facilité incroyable à dire tout ce qui lui plaisait, et à le dire d’une manière fine, aisée et naturelle. Elle commença dès ce moment une conversation galante et soutenue avec Riquet à la houppe, où elle brilla d’une telle force que Riquet à la houppe crut lui avoir donné plus d’esprit qu’il ne s’en était réservé pour lui-même » (l. 96-101). « Toute la cour en eut une joie qui ne se peut imaginer; il n’y eut que sa cadette qui n’en fut pas bien aise, parce que n’ayant plus sur son aînée l’avantage de l’esprit, elle ne paraissait plus auprès d’elle qu’une guenon fort désagréable » (l. 105-109). « […] à la réserve de ma laideur, y a-t-il quelque chose en moi qui vous déplaise? Êtes-vous mal contente de ma naissance, de mon esprit, de mon humeur, et de mes manières? — Nullement, répondit la princesse, j’aime en vous tout ce que vous venez de me dire. — Si cela est ainsi, reprit Riquet à la houppe, je vais être heureux, puisque vous pouvez me rendre le plus aimable de tous les hommes. » (l. 178-184). « […] la même fée qui au jour de ma naissance me fit le don de pouvoir rendre spirituelle la personne qu’il me plairait, vous a aussi fait le don de pouvoir rendre beau celui que vous aimerez, et à qui vous voudrez bien faire cette faveur » (l. 188-191). « […] que la princesse ayant fait réflexion sur la persévérance de son amant, sur sa discrétion, et sur toutes les bonnes qualités de son âme et de son esprit, ne vit plus la difformité de son corps, ni la laideur de son visage, que sa bosse ne lui sembla plus que le bon air d’un homme qui fait le gros dos, et qu’au lieu que jusqu’alors elle l’avait vu boiter effroyablement, elle ne lui trouva plus qu’un certain air penché qui la charmait; ils disent encore que ses yeux, qui étaient louches, ne lui en parurent que plus brillants, que leur dérèglement passa dans son esprit pour la marque d’un violent excès d’amour, et qu’enfin son gros nez rouge eut pour elle quelque chose de martial et d’héroïque » (l. 200-209). 2. La beauté seule ne suffit pas : citez un extrait du présent conte qui le confirme. Trouvez un exemple dans les potins artistiques ou les reportages sur le jet-set d’aujourd’hui. « […] la reine d’un royaume voisin accoucha de deux filles. La première qui vint au monde était plus belle que le jour : la reine en fut si aise qu’on appréhenda que la trop grande joie qu’elle en avait ne lui fît mal. La même fée qui avait assisté à la naissance du petit Riquet à la houppe était présente, et pour modérer la joie de la reine, elle lui

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déclara que cette petite princesse n’aurait point d’esprit, et qu’elle serait aussi stupide qu’elle était belle. Cela mortifia beaucoup la reine […] » (l. 14-21). « […] l’aînée devenait plus stupide de jour en jour. Ou elle ne répondait rien à ce qu’on lui demandait, ou elle disait une sottise. Elle était avec cela si maladroite qu’elle n’eût pu ranger quatre porcelaines sur le bord d’une cheminée sans en casser une, ni boire un verre d’eau sans en répandre la moitié sur ses habits. Quoique la beauté soit un grand avantage chez une jeune femme, cependant la cadette l’emportait presque toujours sur son aînée dans toutes les compagnies. D’abord on allait du côté de la plus belle pour la voir et pour l’admirer, mais bientôt après, on allait à celle qui avait le plus d’esprit, pour lui entendre dire mille choses agréables; et on était étonné qu’en moins d’un quart d’heure l’aînée n’avait plus personne auprès d’elle, et que tout le monde s’était rangé autour de la cadette » (l. 37-48). « — La beauté, reprit Riquet à la houppe, est un si grand avantage qu’il doit tenir lieu de tout le reste; et quand on le possède, je ne vois pas qu’il y ait rien qui puisse nous affliger beaucoup. — J’aimerais mieux, dit la princesse, être aussi laide que vous et avoir de l’esprit, que d’avoir de la beauté comme j’en ai, et être bête autant que je le suis. — Il n’y a rien, Madame, qui marque davantage qu’on a de l’esprit, que de croire n’en pas avoir, et il est de la nature de ce bien-là, que plus on en a, plus on croit en manquer. — Je ne sais pas cela, dit la princesse, mais je sais bien que je suis fort bête, et c’est de là que vient le chagrin qui me tue » (l. 69-79). « […] il en vint un si puissant, si riche, si spirituel et si bien fait, qu’elle ne put s’empêcher d’avoir de la bonne volonté pour lui. Son père, s’en étant aperçu, lui dit qu’il la faisait la maîtresse sur le choix d’un époux, et qu’elle n’avait qu’à se déclarer. Comme plus on a d’esprit et plus on a de peine à prendre une ferme résolution sur cette affaire, elle demanda, après avoir remercié son père, qu’il lui donnât du temps pour y penser » (l. 115-121). Compréhension 1. Quelles sont les deux qualités et quel est le don que manifestera Riquet à la houppe, selon une fée présente à sa naissance? Qualités : amabilité et beaucoup d’esprit. Sur ce dernier mot, on peut donner diverses interprétations, par exemple, le sens IV, 4e du mot « esprit » au Robert : intelligence, pensée, raison, ou V, 1e, 2e et 3e : vivacité intellectuelle, sens de l’humour, capacité à faire de bons mots, etc. Don : « […] donner autant d’esprit qu’il en aurait à celle qu’il aimerait le mieux. » 2. Décrivez les deux princesses qui voient le jour dans un royaume voisin, sept ou huit ans après la naissance de Riquet. Aînée : « La première qui vint au monde était plus belle que le jour : la reine en fut si aise qu’on appréhenda que la trop grande joie qu’elle en avait ne lui fît mal. La même fée qui avait assisté à la naissance du petit Riquet à la houppe était présente, et pour modérer la joie de la reine, elle lui déclara que cette petite princesse n’aurait point d’esprit, et qu’elle serait aussi stupide qu’elle était belle » (l. 15-20).

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Cadette : « […] la seconde fille dont elle accoucha se trouva extrêmement laide. — Ne vous affligez point tant, Madame, lui dit la fée; votre fille sera récompensée d’ailleurs, et elle aura tant d’esprit qu’on ne s’apercevra presque pas qu’il lui manque de la beauté. » (l. 22-26). 3. Quel don la fée accorde-t-elle à la cadette de ces deux princesses? « […] elle aura tant d’esprit qu’on ne s’apercevra presque pas qu’il lui manque de la beauté » (l. 25-26). 4. Qu’arrive-t-il aux deux princesses, au fur et à mesure qu’elles grandissent? « […] leurs perfections crûrent aussi avec elles […] » (l. 33-34). « […] leurs défauts augmentèrent beaucoup avec l’âge. La cadette enlaidissait à vue d’œil, et l’aînée devenait plus stupide de jour en jour » (l. 35-37). 5. Donnez deux exemples qui prouvent la stupidité de l’aînée et deux exemples de sa maladresse. « Ou elle ne répondait rien à ce qu’on lui demandait, ou elle disait une sottise » (l. 37-38). « […] elle n’eût pu ranger quatre porcelaines sur le bord d’une cheminée sans en casser une, ni boire un verre d’eau sans en répandre la moitié sur ses habits » (l. 39-41). 6. Laquelle des deux sœurs attire le plus de gens autour d’elle? Expliquez brièvement pourquoi. « […] on allait à celle qui avait le plus d’esprit, pour lui entendre dire mille choses agréables; et on était étonné qu’en moins d’un quart d’heure l’aînée n’avait plus personne auprès d’elle, et que tout le monde s’était rangé autour de la cadette » (l. 45-48). On se lasse rapidement de la beauté si elle est vide, alors que l’intelligence, la vivacité d’esprit et le sens de l’humour réussissent à faire oublier l’aspect extérieur. À cet effet, soulignons que de nombreux humoristes se sont aussi signalés par un physique ingrat, ce qui n’est évidemment pas le cas de tous. 7. Comment Riquet est-il devenu amoureux de l’aînée des deux princesses? Grâce à des portraits d’elle. 8. Selon Riquet, qu’est-ce qui indique par-dessus tout qu’une personne a vraiment de l’esprit? Croire qu’on n’en a pas, qu’on en manque : « […] il est de la nature de ce bien-là, que plus on en a, plus on croit en manquer » (l. 76-77). 9. Quelle condition impose Riquet à la princesse avant de lui « donner de l’esprit autant qu’on en saurait avoir » (l. 83-84)? Qu’elle l’épouse, mais il lui « donne un an tout entier pour [s’]y résoudre », c’est-à-dire pour y réfléchir, se décider.

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10. Que fait la princesse aussitôt après que Riquet lui a accordé le don d’avoir de l’esprit? « […] elle se trouva une facilité incroyable à dire tout ce qui lui plaisait, et à le dire d’une manière fine, aisée et naturelle. Elle commença dès ce moment une conversation galante et soutenue avec Riquet à la houppe, où elle brilla d’une telle force que Riquet à la houppe crut lui avoir donné plus d’esprit qu’il ne s’en était réservé pour lui-même » (l. 97-101). 11. Quelle est la seule personne qui ne soit pas contente de voir la princesse avoir soudain de l’esprit? Donnez une brève explication. « […] il n’y eut que sa cadette qui n’en fut pas bien aise, parce que n’ayant plus sur son aînée l’avantage de l’esprit, elle ne paraissait plus auprès d’elle qu’une guenon fort désagréable » (l. 106-109). On a vu que, confrontés au choix entre beauté et laideur, les gens ont fini par aller du côté de la laide qui a de l’esprit. Comme ils ont désormais le choix entre l’esprit d’une laide et l’esprit enrobé de la beauté, ils se tournent vers la personne qui présente les deux qualités. 12. Comment réagit la princesse quand de nombreux princes des royaumes voisins la demandent en mariage? Elle est dédaigneuse et refuse leur offre, car « elle n’en trouvait point qui eût assez d’esprit » (l. 113-114). 13. Un an après sa première visite dans la forêt, la princesse y retourne et entend quelque chose de bizarre sous ses pieds. De quoi s’agit-il? Elle entend d’abord « un bruit sourd […], comme de plusieurs gens qui vont et viennent et qui agissent » (l. 125-126). Puis elle entend plus clairement les paroles de personnes parlant de marmite, de chaudière et de bois dans le feu. Il se passe alors une chose étrange : « La terre s’ouvrit dans le même temps, et elle vit sous ses pieds comme une grande cuisine pleine de cuisiniers, de marmitons et de toutes sortes d’officiers nécessaires pour faire un festin magnifique. Il en sortit une bande de vingt ou trente rôtisseurs, qui allèrent se camper dans une allée du bois autour d’une table fort longue, et qui tous, la lardoire à la main, et la queue-de-renard sur l’oreille, se mirent à travailler en cadence au son d’une chanson harmonieuse » (l. 133-139). Outre l’esprit et le don d’en donner à une autre, on voit que Riquet semble posséder des pouvoirs magiques, à tout le moins de dominer le monde souterrain pour y cacher sa suite. On peut aussi y voir le pouvoir de la fée. 14. Quelle explication est donnée dans le texte sur le fait que la princesse avait oublié sa promesse d’épouser Riquet? « Ce qui faisait qu’elle ne s’en souvenait pas, c’est que, quand elle fit cette promesse, elle était bête, et qu’en prenant le nouvel esprit que le prince lui avait donné, elle avait oublié toutes ses sottises » (l. 146-148). « Vous savez que, quand je n’étais qu’une bête, je ne pouvais néanmoins me résoudre à vous épouser; comment voulez-vous qu’ayant l’esprit que vous m’avez donné, qui me rend encore plus difficile en gens que je n’étais, je prenne aujourd’hui une résolution que je n’ai pu prendre dans ce temps-là? » (l. 164-168).

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15. Selon Riquet, quel don a fait une fée à la princesse? « […] sachez que la même fée qui au jour de ma naissance me fit le don de pouvoir rendre spirituelle la personne qu’il me plairait, vous a aussi fait le don de pouvoir rendre beau celui que vous aimerez, et à qui vous voudrez bien faire cette faveur » (l. 188-191). Cette princesse semble ignorer le don qui lui fut donné à sa naissance : « […] je vais lui donner pour don de pouvoir rendre beau qui lui plaira » (l. 31-32). 16. Ayant appris qu’elle possède ce don, que fait la princesse? « […] je souhaite de tout mon cœur que vous deveniez le prince du monde le plus beau et le plus aimable; et je vous en fais le don autant qu’il est en moi » (l. 192-194). 17. Selon les qu’en-dira-t-on, quelle est la véritable source de la transformation de Riquet? « […] l’amour seul fit cette métamorphose » (l. 199). Style 1. Cherchez le mot « esprit » dans le dictionnaire et déterminez les divers sens et connotations du mot dans les phrases suivantes. Ensuite, relevez dans le texte le passage qui traduit le mieux, selon vous, le sens du mot « esprit » dans ce conte. a) « […] il ne laisserait pas d’être aimable, parce qu’il aurait beaucoup

d’esprit […] » (l. 3-4). b) « Comme plus on a d’esprit et plus on a de peine à prendre une ferme résolution

sur cette affaire, elle demanda, après avoir remercié son père, qu’il lui donnât du temps pour y penser » (l. 119-121).

c) « Ce qui faisait qu’elle ne s’en souvenait pas, c’est que, quand elle fit cette promesse, elle était bête, et qu’en prenant le nouvel esprit que le prince lui avait donné, elle avait oublié toutes ses sottises » (l. 146-148).

d) « […] si j’avais affaire à un brutal, à un homme sans esprit, je me trouverais bien embarrassée » (l. 159-160).

e) « Ils disent que la princesse ayant fait réflexion sur la persévérance de son amant, sur sa discrétion, et sur toutes les bonnes qualités de son âme et de son esprit […] » (l. 199-202).

f) « […] leur dérèglement passa dans son esprit pour la marque d’un violent excès d’amour […] » (l. 207-208).

Autres exemples : • « on allait à celle qui avait le plus d’esprit, pour lui entendre dire mille choses

agréables » (l. 45-46). • « elle se trouva une facilité incroyable à dire tout ce qui lui plaisait, et à le dire

d’une manière fine, aisée et naturelle. Elle commença dès ce moment une conversation galante et soutenue avec Riquet à la houppe, où elle brilla d’une telle force que Riquet à la houppe crut lui avoir donné plus d’esprit qu’il ne s’en était réservé pour lui-même » (l. 97-101).

Il s’agit d’un exercice pour comprendre les notions de polysémie et de connotation. Le Larousse donne cinq sens au mot « esprit », ainsi que des nuances pour chacun. Ce sont principalement les sens II, 2, II, 3 et II, 4 qui s’appliquent à Riquet et à la princesse : I, 1, principe immatériel vital, âme. I, 2, être incorporel ou imaginaire (revenant, fantôme, âme d’un mort). II, 1, principe de la pensée, activité intellectuelle,

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intelligence. II, 2, manière de penser, comportement, intention définie. II, 3, humour, ironie. II, 4, personne considérée sur le plan de son activité intellectuelle (les grands esprits se rencontrent). III, caractère essentiel, idée directrice, sens (l’esprit d’une époque, de la loi). IV, Anc. Partie la plus volatile des corps soumis à la distillation, alcool (esprit de bois, de vin). V, Ling. En grec, signe qui marque l’aspiration d’une voyelle (esprit rude), par opposition à l’esprit doux. Le Robert est beaucoup plus détaillé; nous tentons de résumer. Ce sont principalement les sens IV, V et VI, 1 que semblent manifester les deux personnages. I, effet d’un souffle, d’une inspiration. I, A, force d’origine irrationnelle. I, A, 1, souffle de Dieu (Saint-Esprit). I, A, 2, inspiration venant de Dieu. I, A, 3, principe de la vie psychique de l’homme, âme. I, B, en phonétique, mode d’articulation de l’initiale vocalique en grec ancien; signe au-dessus de la voyelle qui la note. II, émanation des corps. II, 1, anc. (plur., les esprits) corps légers et subtils, émanations que l’on considérait comme le principe de la vie et du sentiment. II, 2, anc., chim. Produit liquide volatil, ou gaz dégageant une forte odeur, produit d’une distillation, essence, vapeur. III, être immatériel, sans corps. III, 1, ange, démon, diable (Dieu est un pur esprit). III, 2, être imaginaire des mythologies qui est supposé se manifester sur la terre (elfe, farfadet, fée, génie, gnome, lutin, etc.). III, 3, âme d’un défunt, dans l’occultisme (fantôme, mânes, revenant, spectre). IV, la réalité pensante. IV, 1, le principe pensant en général, pensée (opposé à la matière). IV, 2, principe de la vie psychique, tant affective qu’intellectuelle, chez un individu (âme, conscience, moi). IV, 3, ensemble des dispositions, des facultés d’agir habituelles (caractère, humeur). IV, 4, principe de la vie intellectuelle (opposé à la sensibilité), entendement, intellect, intelligence, pensée, raison, cerveau, cervelle, tête, génie, talent. IV, 5, personne caractérisée par une certaine intelligence ou psychologie (un esprit brillant). V, aptitude intellectuelle. V, 1, aptitude, disposition particulière de l’intelligence, don, disposition. V, 2, qualité, valeur intellectuelle (intelligence, talent). V, 3, vivacité piquante de l’esprit, ingéniosité dans la façon de concevoir et d’exposer qqch (finesse, malice, humour). VI, ce qui détermine ou oriente l’action. VI, 1, attitude générale qui détermine ou oriente l’action (intention, volonté, point de vue). VI, 2, fonds d’idées, de sentiments qui oriente l’action d’une collectivité concrète ou abstraite, génie, solidarité (l’esprit d’une société, d’équipe). VI, 3, le sens profond d’un texte, l’essentiel de la pensée d’un auteur. On pourrait faire le même exercice avec le mot « spirituel », l’adjectif de la famille du nom « esprit » : • « […] cet enfant ne commença pas plus tôt à parler qu’il dit mille jolies choses, et

qu’il avait dans toutes ses actions je ne sais quoi de si spirituel qu’on en était charmé » (l. 8-10).

• « […] autant qu’on lui avait ouï dire d’impertinences auparavant, autant lui entendait-on dire des choses bien sensées et infiniment spirituelles » (l. 103-105).

• « […] il en vint un si puissant, si riche, si spirituel et si bien fait, qu’elle ne put s’empêcher d’avoir de la bonne volonté pour lui » (l. 115-117).

• « […] la même fée qui au jour de ma naissance me fit le don de pouvoir rendre spirituelle la personne qu’il me plairait, vous a aussi fait le don de pouvoir rendre beau celui que vous aimerez […] » (l. 188-190).

• « […] Riquet à la houppe, qu’il connaissait d’ailleurs pour un prince très spirituel et très sage, [le roi] le reçut avec plaisir pour son gendre » (l. 212-214).

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2. Dressez le champ lexical de la beauté et celui de la laideur. Beauté : « plus belle que le jour » (l. 15-16), « aussi stupide qu’elle était belle » (l. 20), « l’aînée qui est si belle » (l. 28), « je puis tout du côté de la beauté » (l. 30), « don de pouvoir rendre beau qui lui plaira » (l. 31-32), « la beauté de l’aînée » (l. 34-35), « la beauté [est] un grand avantage chez une jeune femme » (l. 41-42), « la plus belle » (l. 44), « toute sa beauté » (l. 49), « vêtu très magnifiquement » (l. 55), « une personne aussi belle que vous l’êtes » (l. 62-63), « une infinité de belles personnes » (l. 64-65), « dont la beauté approche de la vôtre » (l. 65-66), « la beauté […] est un si grand avantage » (l. 69), « avoir de la beauté comme j’en ai » (l. 73), « si bien fait » (l. 116), « brave, magnifique, et comme un prince qui va se marier » (l. 150-151), « le plus aimable de tous les hommes » (l. 184), « le don de pouvoir rendre beau celui que vous aimerez » (l. 190), « le prince du monde le plus beau et le plus aimable » (l. 193-194), « l’homme du monde le plus beau, le mieux fait, et le plus aimable qu’elle eût jamais vu » (l. 196-197), « quelque chose de martial et d’héroïque » (l. 209). Laideur : « un fils si laid et si mal fait » (l. 1), « un si vilain marmot » (l. 7-8), « la seconde fille dont elle accoucha se trouva extrêmement laide » (l. 22-23), « il lui manque la beauté » (l. 26), « La cadette enlaidissait à vue d’œil » (l. 36), « un petit homme fort laid et fort désagréable » (l. 54-55), « j’aimerais mieux […] être aussi laide que vous » (l. 72), « elle ne paraissait plus auprès d’elle qu’une guenon fort désagréable » (l. 108-109), « à la réserve de ma laideur » (l. 178), « la difformité de son corps » (l. 202), « la laideur de son visage » (l. 202-203), « bosse » (l. 203), « boiter effroyablement » (l. 204-205), « un certain air penché » (l. 205), « ses yeux, qui étaient louches » (l. 206), « leur dérèglement » (l. 207), « son gros nez rouge » (l. 208-209). On voit que pour un texte qui entend montrer la supériorité de l’esprit sur l’apparence, l’idée de beauté et de laideur occupe une place considérable. Qui plus est, non seulement l’auteur ne montre pas que la beauté est sans importance mais qu’on trouve toujours de la beauté aux choses et aux personnes que l’on aime : malgré tout, la beauté est importante! 3. Comparez la description de la laideur de Riquet à la houppe dans le premier paragraphe du conte (l. 1-13) et dans l’avant-dernier paragraphe avant la moralité (l. 198-209). Que constatez-vous? Trouvez au moins un autre passage où l’on donne des détails sur l’apparence physique de Riquet. « […] un fils si laid et si mal fait qu’on douta longtemps s’il avait forme humaine », « un si vilain marmot », « il vint au monde avec une petite houppe de cheveux sur la tête, ce qui fit qu’on le nomma Riquet à la houppe, car Riquet était le nom de la famille ». Elle « ne vit plus la difformité de son corps, ni la laideur de son visage », « sa bosse ne lui sembla plus que le bon air d’un homme qui fait le gros dos », « elle l’avait vu boiter effroyablement, elle ne lui trouva plus qu’un certain air penché qui la charmait », « ses yeux, qui étaient louches, ne lui en parurent que plus brillants, que leur dérèglement passa dans son esprit pour la marque d’un violent excès d’amour », « son gros nez rouge eut pour elle quelque chose de martial et d’héroïque ».

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Voir aussi : « […] un petit homme fort laid et fort désagréable, mais vêtu très magnifiquement » (l. 54-55). Au départ, la laideur est un concept vague, qu’on ne perçoit que par les adverbes d’intensité (« si ») et la redondance (« laid », « vilain »). Dans la dernière partie, la description de la laideur se fonde sur des éléments corporels précis : « difformité de son corps », « laideur de son visage », « bosse », « gros dos », « boiter », « air penché », « yeux […] louches », « gros nez rouge ». Bien qu’on observe encore la présence d’adverbes d’intensité et de superlatifs, ce sont les oppositions qui dominent, où l’on voit que ce qui paraît laid aux autres semble beau aux yeux de la princesse. On note aussi la présence de termes appréciatifs qui accentuent la perception de la princesse. 4. Faites la liste des expressions et des termes employés par l’auteur pour décrire la tristesse de la princesse aînée. • « […] elle eût donné sans regret toute sa beauté pour avoir la moitié de l’esprit de

sa sœur » (l. 49-50). • « […] ce qui pensa faire mourir de douleur cette pauvre princesse » (l. 51-52). • « […] elle s’était retirée dans un bois pour y plaindre son malheur […] » (l. 53-

54). • « […] elle était fort mélancolique […] » (l. 61). • « […] aussi triste que vous le paraissez […] » (l. 63). • « […] je suis fort bête, et c’est de là que vient le chagrin qui me tue » (l. 78-79). • « […] votre douleur […] » (l. 81). • « […] cette proposition vous fait de la peine […] » (l. 89-90), avec la réserve

indiquée dans la note 2, p. 72.

5. Que signifie l’expression « il la faisait la maîtresse sur le choix d’un époux » (l. 117-118)? À partir de vos connaissances sur cette époque, expliquez pourquoi cela est étonnant. Avec quel passage du dernier paragraphe avant la moralité (l. 210-216) cette expression est-elle en contradiction? Les filles devaient souvent prendre pour époux celui que leur père, que leur famille choisissait, en fonction des intérêts communs, et non en fonction de leur propre goût ou de leur propre désir (mariage d’intérêt, d’argent, de raison ou de convenance, mariage arrangé ou forcé, par opposition au mariage d’amour). Par exemple, on mariait une fille au voisin qui possédait un terrain contigu pour agrandir le patrimoine familial. Les exemples sont innombrables dans la littérature, en particulier chez Molière. Quant aux filles immariables ou qui refusaient d’épouser celui que le père avait choisi, elles aboutissaient fréquemment au couvent. Il est donc étonnant de voir le père accorder cette liberté à sa fille, d’autant plus que ce père est roi, et que les rois, peut-être plus encore que les autres pères, utilisent leurs filles pour renforcer des alliances. Vers la fin, on voit réapparaître la convention sociale de l’époque : « […] la princesse lui promit sur-le-champ de l’épouser, pourvu qu’il en obtint le consentement du roi son père » (l. 210-211). Elle revient aux bons sentiments qu’on attendait à cette époque d’une fille obéissante, ce qui est d’autant plus surprenant qu’elle possède désormais de l’esprit autant qu’un homme, autant que Riquet en tout cas : « […]

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Riquet à la houppe crut lui avoir donné plus d’esprit qu’il ne s’en était réservé pour lui-même » (l. 100-101). 6. Quel terme de mépris est employé pour désigner la princesse cadette, après la transformation de l’aînée? Donnez les deux sens de ce mot selon le dictionnaire. Guenon : 1, singe femelle; 2, femme très laide (Robert et Larousse, qui donnent aussi le sens vieilli de cercopithèque, mâle ou femelle). 7. Peu de temps après sa transformation en personne intelligente, la princesse voit se multiplier les demandes en mariage. Quel euphémisme l’auteur emploie-t-il pour dire que l’un des princes en question l’attire plus que les autres? « […] elle ne put s’empêcher d’avoir de la bonne volonté pour lui » (l. 116-117). 8. Quel sens faut-il donner au verbe « rêver », employé deux fois entre les lignes 122 et 127? Il ne s’agit évidemment pas du sens de l’activité psychique qui vient en dormant (images oniriques). On peut aussi écarter le sens de délirer ou divaguer. On voit plutôt la princesse laisser aller son imagination, être absorbée par une réflexion qui lui fait plus ou moins perdre contact avec la réalité. 9. Quels évènements magiques se produisent tout juste avant la deuxième rencontre entre la princesse et Riquet? « […] elle entendit un bruit sourd sous ses pieds, comme de plusieurs gens qui vont et viennent et qui agissent » (l. 125-126). « La terre s’ouvrit dans le même temps, et elle vit sous ses pieds comme une grande cuisine […] » (l. 133-134). Les bruits souterrains et l’ouverture de la terre sont des éléments magiques qui ne peuvent signifier que deux choses : 1. que Riquet est protégé par une fée ou un magicien dont l’auteur n’a pas parlé, ou encore que la fée du début vit en cet endroit; 2. ou bien que Riquet possède lui-même des pouvoirs magiques, outre celui de donner de l’esprit à celle qu’il aime. 10. Quels passages du texte laissent planer le doute sur le fait que Riquet ait vraiment été transformé en beau prince? « […] Riquet à la houppe parut à ses yeux l’homme du monde le plus beau, le mieux fait, et le plus aimable qu’elle eût jamais vu » (l. 195-197). « Quelques-uns assurent que ce ne furent point les charmes de la fée qui opérèrent, mais que l’amour seul fit cette métamorphose » (l. 198-199). « […] ne vit plus la difformité de son corps, ni la laideur de son visage, que sa bosse ne lui sembla plus que le bon air d’un homme qui fait le gros dos, et qu’au lieu que jusqu’alors elle l’avait vu boiter effroyablement, elle ne lui trouva plus qu’un certain air penché qui la charmait; ils disent encore que ses yeux, qui étaient louches, ne lui en parurent que plus brillants, que leur dérèglement passa dans son esprit pour la marque d’un violent excès d’amour, et qu’enfin son gros nez rouge eut pour elle quelque chose de martial et d’héroïque » (l. 202-209).

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Débat 1. En vous référant à la fin du texte et à la moralité, discutez du rôle de la magie, de l’illusion et de l’amour dans ce conte. Réponse libre, mais il n’est pas nécessaire d’être un bien grand philosophe pour être d’accord avec Perrault sur le fait que « [t]out est beau dans ce que l’on aime, / Tout ce qu’on aime a de l’esprit » (l. 220-221). Ne dit-on pas aussi que l’amour rend aveugle? 2. Pour assurer la réussite sociale, la beauté est un atout aussi important, sinon plus, que l’intelligence. Débattez du sujet en donnant des exemples de personnalités qui ont réussi grâce à leur belle apparence, du moins en partie. On peut trouver des personnalités connues qui, hommes ou femmes, doivent leur succès principalement à leur beauté. Le monde du spectacle et du cinéma regorge de belles personnes, dont on dit que plusieurs doivent leur succès principalement à leurs attraits physiques. Mais est-il possible de tromper longtemps un public si nombreux? Ces personnes doivent posséder au minimum un talent, un don, une aptitude qui plaît aux spectateurs… On peut s’interroger sur le fait que certaines préfèrent passer pour plus stupides qu’elles ne sont, car cela les arrange d’une manière ou d’une autre. 3. À votre avis, ce conte est-il destiné plutôt à des enfants ou à des adultes? On peut argumenter que ce conte prépare les tout-petits aux complexités du monde adulte et de l’univers amoureux. Mais que comprennent vraiment les jeunes enfants à ces questions? Riquet à la houppe suscite certainement plus d’intérêt chez les personnes qui connaissent, un tant soit peu, les relations amoureuses.

LE PETIT POUCET (P. 78-87) Questions globales sur le texte 1. Vous avez certainement lu ou entendu ce conte dans votre enfance. Quelles variantes, quelles différences voyez-vous entre la présente version et l’histoire dont vous vous souvenez? Les réponses varient. La même question peut être posée pour les autres contes. 2. Quel message l’auteur envoie-t-il concernant les personnes de petite taille? Trouvez un proverbe ou un dicton qui résume sa pensée. Jean de La Fontaine, dans les premiers vers de la fable intitulée Le Lion et le Rat, traduit certainement le mieux le sens du présent conte : « Il faut, autant qu’on peut, obliger tout le monde : / On a souvent besoin d’un plus petit que soi. » Il rejoint Perrault qui, dans la morale affirme : « Quelquefois cependant c’est ce petit marmot / Qui fera le bonheur de toute la famille » (l. 310-311). On trouvera facilement d’autres proverbes ou dictons qui vont dans le même sens. En voici quelques exemples : « Dans les petits pots les meilleurs onguents », « Les petits ruisseaux font les grandes rivières », « Petite étincelle engendre grand feu ». De manière générale, ces maximes traduisent le fait qu’une personne ou une chose en apparence insignifiante peut produire des effets inattendus, inespérés. On y trouve souvent l’antithèse petit/grand.

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3. Quelles sont les principales qualités du personnage principal? Ruse, intelligence : « […] le plus jeune était fort délicat et ne disait mot : prenant pour bêtise ce qui était une marque de la bonté de son esprit » (l. 7-9). Dès les premières lignes, l’auteur montre que le petit héros cache des qualités insoupçonnées, comme on le voit un peu plus bas : « Cependant il était le plus fin, et le plus avisé de tous ses frères, et s’il parlait peu, il écoutait beaucoup » (l. 12-14). Par la suite, le petit Poucet donne plusieurs preuves de son ingéniosité et de sa débrouillardise (stratagème des cailloux et des miettes de pain, permutation des couronnes et des bonnets, vol des bottes de sept lieues et de la fortune de l’ogre…). Persévérance : « Il alla se recoucher et ne dormit point du reste de la nuit […] » (l. 32-33). À plusieurs reprises, on constate qu’il n’abandonne pas, qu’il fait preuve d’une opiniâtreté (on dirait peut-être, de nos jours, d’une résilience) hors du commun. Altruisme : « […] le petit Poucet ne découvrit rien de tout ce qu’il savait à ses frères » (l. 37-38). Il ne veut pas les effrayer inutilement, il cherche au contraire à les rassurer. Prudence : « Le petit Poucet, qui vit un rocher creux proche le lieu où ils étaient, y fit cacher ses six frères, et s’y fourra aussi, regardant toujours ce que l’ogre deviendrait » (l. 243-245). En toutes circonstances, on le voit agir avec circonspection, en prenant tous les soins nécessaires, de manière à ne pas se jeter tête baissée dans la gueule du loup. Sa première conversation avec la femme de l’ogre en est un exemple (l. 122-141). Courage : « […] les pauvres enfants n’eurent pas moins de peur que quand il tenait son grand couteau pour leur couper la gorge. Le petit Poucet en eut moins de peur […] » (l. 251-253). Plus que les autres, il garde la tête froide dans les situations de danger. Générosité, sens du partage : « Il mit toute sa famille à son aise. Il acheta des offices de nouvelle création pour son père et pour ses frères; et par là il les établit tous […] » (l. 300-302). Compréhension 1. Quel métier exercent les parents de Poucet? Ils sont bûcherons. 2. Combien d’enfants ont-ils? Quel âge ont-ils? « […] sept enfants tous garçons. L’aîné n’avait que dix ans, et le plus jeune n’en avait que sept. On s’étonnera que le bûcheron ait eu tant d’enfants en si peu de temps; mais c’est que sa femme allait vite en besogne, et n’en faisait pas moins que deux à la fois » (l. 1-5). Il y a donc des jumeaux, peut-être même des triplés... ou plus! 3. D’où vient le nom Poucet? « […] quand il vint au monde, il n’était guère plus gros que le pouce […] » (l. 10). 4. À quelle résolution la famine force-t-elle les parents? À « les mener perdre demain au bois » (l. 21).

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5. Où est caché le petit Poucet quand il entend ses parents prendre cette décision? « […] sous l’escabelle [tabouret] de son père […] » (l. 32). 6. Grâce à quel stratagème le petit Poucet retrouve-t-il le chemin de la maison? « […] il avait laissé tomber le long du chemin les petits cailloux blancs qu’il avait dans ses poches » (l. 45-47). 7. Quelle bonne nouvelle apprennent les parents en revenant chez eux? « […] le seigneur du village leur envoya dix écus qu’il leur devait il y avait longtemps […] » (l. 55-56). 8. Que font les parents de la somme inattendue qui leur est remise? « Le bûcheron envoya sur l’heure sa femme à la boucherie. Comme il y avait longtemps qu’elle n’avait mangé, elle acheta trois fois plus de viande qu’il n’en fallait pour le souper de deux personnes » (l. 57-60). 9. Quel reproche l’épouse fait-elle au mari après le souper? « […] c’est toi qui les as voulu perdre. J’avais bien dit que nous nous en repentirions. Que font-ils maintenant dans cette forêt? Hélas! mon Dieu, les loups les ont peut-être déjà mangés! Tu es bien inhumain d’avoir perdu ainsi tes enfants! » (l. 63-67). 10. Quel prénom porte le père? Et quel est le prénom du fils aîné? Guillaume. Pierrot. Ce sont les deux seuls noms que l’on connaît. Voir à ce sujet Les Fées, La Barbe bleue, Cendrillon, etc. 11. Pour quelle raison le fils aîné est-il le préféré de la mère? Comme elle, il est un peu roux. 12. La deuxième fois où les parents vont perdre en forêt leurs enfants, Poucet ne peut se procurer des cailloux blancs. Qu’est-ce qui l’en empêche? Que prend-il à la place? La porte de la maison est fermée à double tour. Il émiette le pain de son déjeuner. 13. Pourquoi le petit Poucet ne peut-il trouver le chemin de la maison la seconde fois où les enfants sont perdus en forêt? Les oiseaux ont mangé les miettes de pain. 14. Comment les enfants repèrent-ils la maison de l’ogre? « Le petit Poucet grimpa au haut d’un arbre pour voir s’il ne découvrirait rien; ayant tourné la tête de tous côtés, il vit une petite lueur comme d’une chandelle, mais qui était bien loin par-delà la forêt » (l. 116-119).

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15. Pourquoi la femme qui les accueille à la porte se met-elle à pleurer en voyant les pauvres enfants? Parce qu’ils sont arrivés à la maison d’un ogre qui dévore les enfants. 16. Expliquez pourquoi l’ogre ne tue pas sur-le-champ les enfants. « Mais vous avez encore là tant de viande, reprit sa femme, voilà un veau, deux moutons et la moitié d’un cochon! » (l. 170-171). Il a déjà beaucoup de viande. Comme les moyens de conservation modernes leur font défaut, il est préférable de les garder vivants jusqu’au moment de les « habiller » et de les consommer. 17. Après avoir été mis au lit avec ses frères, comment le petit Poucet réussit-il à berner l’ogre? Craignant que l’ogre vint les égorger pendant leur sommeil, il prit « les bonnets de ses frères et le sien, il alla tout doucement les mettre sur la tête des sept filles de l’ogre, après leur avoir ôté leurs couronnes d’or, qu’il mit sur la tête de ses frères et sur la sienne, afin que l’ogre les prît pour ses filles, et ses filles pour les garçons qu’il voulait égorger » (l. 195-199). 18. Quelle est la première chose que fait la femme de l’ogre en voyant ses filles égorgées et baignant dans leur sang? Elle s’évanouit. 19. Alors qu’il talonne Poucet et ses frères, pourquoi l’ogre doit-il cesser sa poursuite et se reposer? « L’ogre, qui se trouvait fort las du long chemin qu’il avait fait inutilement (car les bottes de sept lieues fatiguent fort leur homme), voulut se reposer [...] Comme il n’en pouvait plus de fatigue, il s’endormit après s’être reposé quelque temps, et vint à ronfler […] » (l. 246-250). 20. Comment le petit Poucet berne-t-il la femme de l’ogre et la force-t-il à lui donner leur fortune? Il vole les bottes de sept lieues de l’ogre endormi et se rend chez l’ogre où il raconte à la femme que son mari est prisonnier de voleurs qui réclament une rançon qu’elle doit remettre à Poucet, qui se fait passer pour l’émissaire de l’ogre. 21. Quelle preuve de la véracité de ses dires Poucet offre-t-il à la femme de l’ogre? Il dit que l’ogre lui a permis de prendre les bottes de sept lieues pour aller plus vite et pour qu’elle le croie. 22. Énumérez quelques missions remplies par le petit Poucet grâce à ses bottes de sept lieues. Il rapporte au roi des nouvelles de son armée : « […] il s’en alla à la cour, où il savait qu’on était fort en peine d’une armée qui était à deux cents lieues de là, et du succès d’une bataille qu’on avait donnée. Il alla, disent-ils, trouver le roi, et lui dit que s’il le souhaitait, il lui rapporterait des nouvelles de l’armée avant la fin du jour. Le roi lui promit une grosse somme d’argent s’il en venait à bout. Le petit Poucet rapporta des nouvelles dès le soir même […] » (l. 284-290).

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Il porte les ordres du roi à l’armée : « […] le roi le payait parfaitement bien pour porter ses ordres à l’armée […] » (l. 292). Il porte des messages des dames à leurs amants qui sont soldats : « […] une infinité de dames lui donnaient tout ce qu’il voulait pour avoir des nouvelles de leurs amants, et ce fut là son plus grand gain » (l. 293-294). Il porte des messages des épouses à leurs maris qui sont probablement soldats aussi : « Il se trouvait quelques femmes qui le chargeaient de lettres pour leurs maris, mais elles le payaient si mal, et cela allait à si peu de chose, qu’il ne daignait mettre en ligne de compte ce qu’il gagnait de ce côté-là » (l. 294-297). Il est courrier de manière générale : « Après avoir fait pendant quelque temps le métier de courrier, et y avoir amassé beaucoup de bien […] » (l. 298-299). Style 1. Combien d’années a-t-il fallu aux parents pour avoir leurs sept enfants? Précisez comment on peut faire le calcul et quelle phrase renforce cette rapidité. Puisque « [l]’aîné n’avait que dix ans, et le plus jeune n’en avait que sept » (l. 2-3), on peut compter trois ans d’écart. « […] sa femme allait vite en besogne, et n’en faisait pas moins que deux à la fois » (l. 4-5). 2. Dans les premiers paragraphes, comment l’auteur appuie-t-il l’idée de pauvreté? Surtout par la répétition des mots « pauvre » et « pauvreté », répétition renforcée par la présence d’adverbes d’intensité (« fort », « si »). On constate aussi la répétition de l’expression « les voir mourir de faim ». « Ils étaient fort pauvres », « aucun d’eux ne pouvait encore gagner sa vie », « la famine fut si grande », « ces pauvres gens », « nous ne pouvons plus nourrir nos enfants », « les voir mourir de faim », « perdre tes enfants », « leur grande pauvreté », « elle était pauvre », « les voir mourir de faim ». 3. Quels euphémismes sont employés au début du conte pour traduire les deux idées suivantes : « la pauvreté fut encore plus grande cette année-là » et « abandonner les enfants »? « […] une année très fâcheuse » et « se défaire de leurs enfants ». Voir aussi l’euphémisme « perdre » (question suivante). 4. Cherchez dans le dictionnaire les divers sens du mot « perdre ». Déterminez lesquels s’appliquent à l’expression « perdre [les] enfants » (l. 25). Selon le Robert, les principaux sens du verbe « perdre » sont : I, 1. Ne plus avoir ce qu’on possédait auparavant (un bien). 2. Être séparé de qqn par la mort. 3. Cesser d’avoir (une partie de soi, un caractère inhérent) : Perdre un bras, ses poils, ses feuilles, du poids, etc. 4. Ne plus avoir en sa possession pour avoir égaré. 5. Laisser échapper : Perdre son sang. 6. Cesser de percevoir : Perdre de vue, oublier. 7. Ne plus pouvoir suivre, contrôler : Perdre son chemin, le nord, le fil, l’équilibre. 8. Ne

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pas profiter de qqch, en faire mauvais usage : Perdre une occasion, du temps; dissiper, gaspiller. 9. Ne pas obtenir ou ne pas garder (un avantage) : Perdre l’avantage, la guerre, être perdant. II, 1. Ruiner totalement (vx). 2. Priver de sa réputation, de son crédit. 3. Corrompre, rendre mauvais (vx). 4. Mettre hors du bon chemin pour se débarrasser, égarer. La polysémie du mot permet plusieurs interprétations, allant jusqu’à la mort, car en vertu de II, 1 et 2, « perdre quelqu’un » signifie aussi le faire condamner, le condamner, voire le tuer. Il est employé en tant qu’euphémisme signifiant « abandonner », mais aussi « laisser mourir » : « je suis résolu de les mener perdre demain au bois » (l. 20-21), « c’est toi qui les as voulu perdre » (l. 63-64), « Tu es bien inhumain d’avoir perdu ainsi tes enfants! » (l. 66-67), etc. 5. Expliquez le sens du passage suivant : « […] il était de l’humeur de beaucoup d’autres gens, qui aiment fort les femmes qui disent bien, mais qui trouvent très importunes celles qui ont toujours bien dit » (l. 72-74). L’expression « les femmes qui disent bien » concerne celles qui savent utiliser la parole à bon escient, qui sont maîtresses de leur langage. Par contre, l’expression « celles qui ont toujours bien dit » a un sens beaucoup plus péjoratif : ces femmes ont la langue bien pendue, elles parlent trop ou répètent à satiété. À rapprocher de l’expression « je te l’avais bien dit ». 6. À l’aide d’un dictionnaire, donnez le sens propre et le sens figuré du mot « faux-fuyant » (l. 103-104). 1. (vx) Chemin détourné, sentier dans les bois. 2. Moyen détourné par lequel on évite de s’expliquer : échappatoire, excuse, prétexte, subterfuge (dictionnaire Le Robert.) 7. Entre les lignes 102 et 121, quels mots et expressions font de la forêt un endroit effrayant pour les enfants? « […] l’endroit de la forêt le plus épais et le plus obscur », « plus ils marchaient, plus ils s’égaraient et s’enfonçaient dans la forêt », « La nuit vint », « il s’éleva un grand vent qui leur faisait des peurs épouvantables », « Ils croyaient n’entendre de tous côtés que les hurlements de loups qui venaient à eux pour les manger », « Ils n’osaient presque se parler ni tourner la tête », « Il survint une grosse pluie qui les perça jusqu’aux os; ils glissaient à chaque pas et tombaient dans la boue, d’où ils se relevaient tout crottés, ne sachant que faire de leurs mains », « il vit une petite lueur comme d’une chandelle, mais qui était bien loin par-delà la forêt », « lorsqu’il fut à terre, il ne vit plus rien; cela le désola ». Il y a des dangers réels (l’éloignement, les loups, la pluie…), mais aussi des dangers appréhendés, c’est-à-dire qui font peur aux enfants (la noirceur, la saleté, l’impossibilité de bouger à cause de l’effroi…). Comme en d’autres circonstances, il s’agit d’une occasion pour le conteur oral de tirer partie de la situation pour effrayer ses jeunes spectateurs. 8. Relevez les mots et expressions qui, entre les lignes 130 à 173, rendent l’ogre effrayant. « […] un ogre qui mange les petits enfants? »

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« […] nous aimons mieux que ce soit monsieur qui nous mange; peut-être qu’il aura pitié de nous, si vous voulez bien l’en prier. » Ce « peut-être » est bien dubitatif : Poucet tente sa chance, mais au fond il sait que le danger est aussi grand dans cette maison que dans la forêt. « La femme de l’ogre, qui crut qu’elle pourrait les cacher à son mari jusqu’au lendemain matin […] » Même la femme craint le mari : elle sera peut-être punie d’aider les petits. « […] il y avait un mouton tout entier à la broche pour le souper de l’ogre. » Les enfants appréhendent le même sort pour eux-mêmes. « […] ils entendirent heurter trois ou quatre grands coups à la porte : c’était l’ogre qui revenait. Aussitôt sa femme les fit cacher sous le lit et alla ouvrir la porte. L’ogre demanda d’abord si le souper était prêt, et si on avait tiré du vin, et aussitôt se mit à table. Le mouton était encore tout sanglant, mais il ne lui en sembla que meilleur. Il fleurait à droite et à gauche, disant qu’il sentait la chair fraîche. […] — Je sens la chair fraîche, te dis-je encore une fois, reprit l’ogre, en regardant sa femme de travers, et il y a ici quelque chose que je n’entends pas. » Tout est brutalité dans le comportement de l’ogre : il frappe de grands coups à la porte, ne salue pas son épouse, mais demande immédiatement à manger, il mange sa viande presque crue et, comme un animal, hume l’air et flaire la viande fraîche, c’est-à-dire les enfants. « […] il se leva de table, et alla droit au lit. » Sans prévenir, il fonce droit vers la cachette des enfants. « […] tu veux me tromper, maudite femme! Je ne sais à quoi il tient que je ne te mange aussi; bien t’en prend d’être une vieille bête. » Il insulte sa femme, qui pourtant est bien à son service. « Voilà du gibier qui me vient bien à propos pour traiter trois ogres de mes amis qui doivent me venir voir ces jours ici. » Pour lui, les enfants sont du gibier, de la viande, non des personnes. « Il les tira de dessous le lit l’un après l’autre. Ces pauvres enfants se mirent à genoux en lui demandant pardon; mais ils avaient affaire au plus cruel de tous les ogres, qui bien loin d’avoir de la pitié les dévorait déjà des yeux, et disait à sa femme que ce seraient là de friands morceaux lorsqu’elle leur aurait fait une bonne sauce. Il alla prendre un grand couteau, et en approchant de ces pauvres enfants, il l’aiguisait sur une longue pierre qu’il tenait à sa main gauche. Il en avait déjà empoigné un […] » Sans commentaire! « […] ils en seront plus mortifiés. » Il faut « laisser vieillir » la viande pour qu’elle soit plus délicieuse et tendre, paraît-il. Évidemment, Perrault joue sur les deux sens du mot : faisander la viande et faire souffrir cruellement une personne. « Mais vous avez encore là tant de viande, reprit sa femme, voilà un veau, deux moutons et la moitié d’un cochon! » Encore ici, les enfants se voient pendus en compagnie des autres pièces de viande.

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« Tu as raison, dit l’ogre; donne-leur bien à souper, afin qu’ils ne maigrissent pas, et va les mener coucher. » Il veut les garder bien gras. Ce qui semble d’une part générosité est en fait d’un parfait égoïsme. 9. Dans le même passage (l. 130-173), relevez les termes appartenant au champ lexical de la nourriture. « [M]ange », « manger », « mange », « mouton tout entier à la broche », « souper », « souper », « vin », « se mit à table », « Le mouton était encore tout sanglant », « la chair fraîche », « ce veau que je viens d’habiller », « la chair fraîche », « mange », « gibier », « dévorait déjà des yeux », « friands morceaux », « une bonne sauce », « viande », « un veau », « deux moutons », « la moitié d’un cochon », « souper ». 10. Quelle confusion crée le verbe « habiller » employé aux lignes 148-149, 219, 223 et 225? Double sens, car « habiller » signifie « apprêter, préparer », en plus du sens plus courant : « couvrir de vêtements, protéger à l’aide de vêtements ». « Il faut, lui dit sa femme, que ce soit ce veau que je viens d’habiller que vous sentez » (l. 148-149). « […] il réveilla ses frères et leur dit de s’habiller promptement […] » (l. 218-219). « Va-t’en là-haut habiller ces petits drôles d’hier au soir » (l. 223). « […] ne se doutant point de la manière qu’il entendait qu’elle les habillât […] » (l. 224-225). On voit que Perrault est conscient qu’il joue sur les deux sens du terme. 11. Décrivez les filles de l’ogre en faisant ressortir les aspects positifs et négatifs que leur prête l’auteur. Au départ, l’auteur les présente comme des enfants plutôt jolies. Mais immédiatement après, il leur attribue des caractéristiques ogresses qui les rendent effrayantes. Puis, il montre qu’elles sont traitées comme des princesses par leurs parents, car elles portent des couronnes : « L’ogre avait sept filles qui n’étaient encore que des enfants. Ces petites ogresses avaient toutes le teint fort beau, parce qu’elles mangeaient de la chair fraîche comme leur père; mais elles avaient de petits yeux gris et tout ronds, le nez crochu et une fort grande bouche avec de longues dents fort aiguës et fort éloignées l’une de l’autre. Elles n’étaient pas encore très méchantes; mais elles promettaient beaucoup, car elles mordaient déjà les petits enfants pour en sucer le sang. On les avait fait coucher de bonne heure, et elles étaient toutes sept dans un grand lit, ayant chacune une couronne d’or sur la tête » (l. 179-188). Cette dernière caractéristique peut laisser sceptique : Perrault critique-t-il la société de son époque en présentant les nobles comme des sortes de vampires qui sucent le sang du peuple et l’égorgent? En effet, ces princesses ogresses rappellent que cette race a su s’immiscer parmi les hommes, comme on l’a vu dans La Belle au bois dormant. 12. Quelle expression signifie que les sept frères sont tout près de leur demeure? Ils « n’étaient plus qu’à cent pas du logis de leur père » (l. 241).

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13. Faites la liste des termes liés à l’argent dans la dernière partie du récit (l. 264-304). « […] tout son or et tout son argent », « tout ce qu’il a vaillant », « tout ce qu’elle avait », « toutes les richesses », « une grosse somme d’argent », « il gagnait tout ce qu’il voulait », « le payait parfaitement bien », « tout ce qu’il voulait », « son plus grand gain », « elles le payaient si mal », « ce qu’il gagnait de ce côté-là », « avoir amassé beaucoup de bien », « acheta ». Notons la variété du vocabulaire employé, presque toujours accompagné d’un mot amplificateur (« tout », « gros », « parfaitement bien », « plus grand », « si »), sauf pour les femmes qui écrivent des lettres à leur mari, ce qui rapporte très peu. Voilà encore un commentaire qui montre que les contes s’adressent « par-dessus la tête des enfants », comme dit Bettelheim, aux adultes. Débat 1. Le petit Poucet vous semble-t-il une personne honnête? Précisez par quels aspect il l’est ou ne l’est pas, selon le cas. Perrault s’efforce de présenter son personnage sous un jour positif, en lui attribuant autant de qualités que possible. Cependant, on le voit pratiquer des activités dignes des criminels : en échangeant les couronnes et les bonnets, il signe l’arrêt de mort de sept filles; en dépouillant l’ogre de ses bottes, il commet un vol; et même s’il ne s’empare pas de la fortune de l’ogre, même si « bien des gens […] ne demeurent pas d’accord [sur] cette dernière circonstance » (l. 278-279), il ne répugne pas à gagner de l’argent en encourageant les femmes qui trompent leur mari! Bien sûr, cet argent lui permet de faire le bien autour de lui : « Il mit toute sa famille à son aise » (l. 300-301). Mais l’argent du crime qui sert à faire le bien reste tout de même l’argent du crime… Ici comme ailleurs, on trouve des traces de machiavélisme chez un personnage de Perrault. 2. Le conte ne présente que deux femmes : celle du bûcheron et celle de l’ogre. Quelle image de la femme ressort de ces deux personnages? Elles sont toutes deux humaines et compatissantes, mais aussi opposées aux volontés du mari : la femme du bûcheron l’assaille de reproches parce qu’il a « perdu » les enfants, la femme de l’ogre cache les enfants et l’arrête dans sa première tentative de les égorger. Mais les deux finissent par se soumettre, en bonnes épouses obéissantes. Souvenons-nous qu’au XVIIe siècle, le mari, le père était le souverain chez lui. 3. Comme chez d’autres personnages de contes, le petit Poucet possède des caractéristiques et des attributs qui montrent que les apparences sont souvent trompeuses. Relevez ces caractéristiques et rapprochez-les de celles propres à d’autres personnages. Il est petit, mais plus intelligent qu’il n’y paraît : « Ce qui les chagrinait encore, c’est que le plus jeune était fort délicat et ne disait mot : prenant pour bêtise ce qui était une marque de la bonté de son esprit. […] Cependant il était le plus fin, et le plus avisé de tous ses frères, et s’il parlait peu, il écoutait beaucoup » (l. 7-14). C’est d’ailleurs lui qui, contre toute attente, assurera la richesse de toute la famille : « Après avoir fait pendant quelque temps le métier de courrier, et y avoir amassé beaucoup de bien, il revint chez son père, où il n’est pas possible d’imaginer la joie qu’on eut de le revoir.

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Il mit toute sa famille à son aise. Il acheta des offices de nouvelle création pour son père et pour ses frères; et par là il les établit tous […] » (l. 298-302). Sa petite taille le fait paraître faible, mais il a une force de caractère que les autres n’ont pas : « Lorsque ces enfants se virent seuls, ils se mirent à crier et à pleurer de toute leur force. Le petit Poucet les laissait crier, sachant bien par où il reviendrait à la maison; car en marchant il avait laissé tomber le long du chemin les petits cailloux blancs qu’il avait dans ses poches » (l. 43-47). Il sait dissimuler sa crainte au besoin : « […] il [l’ogre] s’endormit après s’être reposé quelque temps, et vint à ronfler si effroyablement que les pauvres enfants n’eurent pas moins de peur que quand il tenait son grand couteau pour leur couper la gorge. Le petit Poucet en eut moins de peur […] » (l. 249-253). Malgré son intelligence, il ne prévoit pas tout : « […] il songea qu’il pourrait se servir de son pain au lieu de cailloux en le jetant par miettes le long des chemins où ils passeraient […] il croyait retrouver aisément son chemin par le moyen de son pain qu’il avait semé partout où il avait passé; mais il fut bien surpris lorsqu’il ne put en retrouver une seule miette : les oiseaux étaient venus qui avaient tout mangé » (l. 99-108). Bien qu’il soit le plus petit, il prend la tête de la troupe. Aussi effrayé que les autres, il n’oublie cependant pas son rôle, par exemple dans sa conversation avec la femme de l’ogre : « Hélas! Madame, lui répondit le petit Poucet, qui tremblait de toute sa force aussi bien que ses frères, que ferons-nous? » (l. 132-133). Il peut se « déguiser » s’il le faut, pour éviter un triste sort : « […] prenant les bonnets de ses frères et le sien, il alla tout doucement les mettre sur la tête des sept filles de l’ogre, après leur avoir ôté leurs couronnes d’or, qu’il mit sur la tête de ses frères et sur la sienne, afin que l’ogre les prît pour ses filles, et ses filles pour les garçons qu’il voulait égorger. La chose réussit comme il l’avait pensé […] » (l. 195-200). Comme il est conscient alors que les autres dorment, il a cette fois une réaction bien humaine de crainte, mais pas ses frères : « […] le petit Poucet, qui eut bien peur lorsqu’il sentit la main de l’ogre qui lui tâtait la tête, comme il avait tâté celles de tous ses frères » (l. 206-208). Il sait tirer profit des situations, quitte à mentir : « Votre mari, lui dit le petit Poucet, est en grand danger, car il a été pris par une troupe de voleurs qui ont juré de le tuer s’il ne leur donne tout son or et tout son argent. Dans le moment qu’ils lui tenaient le poignard sur la gorge, il m’a aperçu et m’a prié de vous venir avertir de l’état où il est, et de vous dire de me donner tout ce qu’il a vaillant sans en rien retenir, parce qu’autrement ils le tueront sans miséricorde. Comme la chose presse beaucoup, il a voulu que je prisse ses bottes de sept lieues que voilà pour faire diligence, et aussi afin que vous ne croyiez pas que je sois un affronteur » (l. 264-272). Contrairement à d’autres personnages, ce n’est pas, chez lui, l’habit qui fait le moine, sauf peut-être en ce qui a trait à la permutation des couronnes et des bonnets ainsi qu’au vol des bottes. Ce sont ses qualités morales et psychologiques, qui ne peuvent se voir que par ses actions, ne le font pas paraître ce qu’il est en réalité, alors que les autres personnages paraissent ce qu’ils ne sont pas en réalité.

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Vers la dissertation 1. Comparez le petit Poucet à d’autres personnages de contes qui se sont enrichis, aux dépens des méchants ou non, et établissez les similitudes et les différences. Pour la générosité finale envers sa famille, on peut le comparer à la femme de la Barbe bleue et à Cendrillon, qui est bonne même pour ses méchantes sœurs. Pour la ruse, on peut le rapprocher du Chat botté, même si c’est le fils du meunier qui profite de cette ruse, car les deux trompent un ogre. Contrairement aux bûcherons des Souhaits ridicules, les parents du petit Poucet se sortent finalement de leur misérable condition. À l’inverse du Petit Chaperon rouge, il n’est pas dévoré. On pourra trouver de nombreuses autres ressemblances et différences.

LE PETIT CHAPERON ROUGE (GRIMM, P. 90-94) Questions globales sur le texte 1. Les deux finales proposées par les frères Grimm changent tout le sens du conte de Perrault. Justifiez ce point de vue en proposant une ou deux moralités à la version des Grimm. Perrault fait clairement allusion aux dangers que courent les jeunes filles qui se laissent berner par les paroles doucereuses des jeunes loups. Il les prévient contre les avances sexuelles de ces derniers. Chez les Grimm, à peu près aucune allusion sexuelle, sauf peut être ceci : « Que portes-tu sous ton tablier, dis-moi? » (l. 25). Chez Perrault, le loup demande à la fillette de venir se coucher près de lui, ce qu’elle fait après s’être déshabillée. Les auteurs proposent clairement une morale : « Mais pour ce qui est du Petit Chaperon rouge, elle se jura : “Jamais plus de ta vie tu ne quitteras le chemin pour courir dans les bois, quand ta mère te l’a défendu.” » (l. 108-110). En clair, une bonne fille doit obéir à sa mère, plutôt que d’écouter les étrangers (le loup l’a incitée à sortir du chemin pour cueillir des fleurs). Le danger qu’elle court n’est pas de nature sexuelle, mais bien le risque de mourir. La seconde finale propose quant à elle une morale que les auteurs semblent hésiter à formuler : la fillette et sa grand-mère n’ont pas besoin du chasseur pour se débarrasser du loup, elles peuvent très bien y arriver sans lui. Elles sont intelligentes, elles ont suffisamment d’imagination pour inventer un stratagème en vue de noyer le loup. Elles n’ont même pas besoin d’une arme « masculine », le fusil, seulement des ustensiles ordinaires dont se servent les femmes au foyer : eau, restes de nourriture, casseroles, feu... Elles attirent le loup « par le ventre », pour reprendre un adage populaire, et parviennent à le noyer. Le seul instinct évoqué ici est l’odorat, c’est-à-dire que l’animal est attiré par la nourriture qu’il sent, qu’il hume.

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Compréhension 1. De quel tissu est fabriqué le chaperon de la fillette? De velours. 2. Quelles victuailles le Petit Chaperon rouge doit-elle apporter à sa grand-mère, dans cette version du conte? Un morceau de galette et une bouteille de vin. 3. Avant le départ, la mère fait cinq recommandations à sa fille. Quelles sont-elles? • Vas-y tout de suite, avant qu’il ne fasse trop chaud • sois bien sage en chemin • ne saute pas à droite ou à gauche pour aller tomber et me casser la bouteille • dis bien bonjour en entrant • ne regarde pas d’abord dans tous les coins 4. Où habite la grand-mère dans cette version? Au cœur de la forêt, à une bonne demi-heure du village. 5. Quelle phrase remplace le célèbre « Tire la chevillette, la bobinette cherra » dans la présente version du Petit Chaperon rouge? « Tu n’as qu’à tirer le loquet […] » (l. 57). 6. Qu’est-ce qui étonne la fillette quand elle arrive chez sa grand-mère, avant même de pénétrer dans la maison? « La porte était ouverte […] » (l. 66). 7. Quelles parties du corps de sa supposée grand-mère déconcertent le Petit Chaperon rouge? Oreilles, yeux, mains, bouche et dents. 8. Qu’est-ce qui attire l’attention d’un chasseur qui passait devant la maison de la grand-mère? Ce sont les ronflements : « Sa voracité satisfaite, le loup retourna se coucher dans le lit et s’endormit bientôt, ronflant plus fort que fort. Le chasseur, qui passait devant la maison, l’entendit […] » (l. 85-87). 9. Plutôt que de tuer le loup d’un coup de fusil, comment le chasseur procède-t-il? Avec des ciseaux, il coupe le ventre du loup, délivrant du même coup la fillette et la grand-mère. 10. Comment le loup meurt-il? « Le Petit Chaperon rouge courut chercher de grosses pierres qu’ils fourrèrent dans le ventre du loup; et quand il se réveilla et voulut bondir, les pierres pesaient si lourd qu’il s’affala et resta mort sur le coup » (l. 101-104). Dans certaines versions orales, les humains le lancent à la rivière, où il se noie.

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11. Quel nom porte le loup qui apparaît dans la dernière partie du conte? Tête-Grise. 12. Comment la fillette et sa grand-mère réussissent-elles à tuer ce deuxième loup? Comme il est monté sur le toit pour attendre la sortie du Petit Chaperon rouge, la fillette emplit une auge qui est près de l’entrée avec l’eau de cuisson des saucisses que la grand-mère avait fait cuire la veille. Le loup est attiré par l’odeur et se noie en tombant dans l’auge remplie à ras bord. Style 1. Examinez les temps et modes verbaux dans le deuxième paragraphe du conte, soit les lignes 8 à 14, et expliquez leur rôle. Futur simple, futur proche et surtout impératif présent traduisent les recommandations de la mère à sa fille : « tu iras », « elle va bien se régaler », « Vas-y tout de suite », « sois bien sage », « ne saute pas », « dis bien bonjour », « ne regarde pas d’abord dans tous les coins ». Ces temps verbaux prennent plus de force grâce aux adverbes (« bien », « tout de suite ») et les défenses, par la négation. 2. Le lecteur averti, à l’instar de la mère, voit dans la forêt un lieu dangereux, mais le loup fait en sorte que la fillette en perçoive surtout les côtés positifs. Comment s’y prend-il? Il fait ressortir les beautés de la forêt et attire l’attention de l’héroïne vers autre chose que sa mission principale : « “Toutes ces jolies fleurs dans le sous-bois, comment se fait-il que tu ne les regardes même pas, Petit Chaperon rouge? Et les oiseaux, on dirait que tu ne les entends pas chanter! Tu marches droit devant toi comme si tu allais à l’école, mais c’est pourtant rudement joli, la forêt!” Le Petit Chaperon rouge donna un coup d’œil alentour et vit danser les rayons du soleil entre les arbres, et puis partout, partout des fleurs qui brillaient. “Si j’en faisais un bouquet pour grand-mère, se dit-elle, cela lui ferait plaisir aussi; il est tôt et j’ai bien le temps d’en cueillir.” Sans attendre, elle quitta le chemin pour entrer dans le sous-bois et cueillir des fleurs : une ici, l’autre là, mais la plus belle était toujours un peu plus loin, et encore plus loin dans l’intérieur de la forêt » (l. 40-51). Plusieurs termes sont jolis en soi (« fleurs », « oiseaux », les rayons de soleil qui dansent, « bouquet »), mais ils sont renforcés par des adjectifs appréciatifs (joli, beau) et la répétition (joli, fleur, forêt…). 3. « […] tu reconnaîtras forcément » (l. 32-33) : comment interprétez-vous ces curieuses paroles du Chaperon rouge au loup? En prononçant cette phrase, elle semble inciter le loup à aller chez la grand-mère (sens du verbe au futur simple). Elle n’emploie pas le conditionnel (tu reconnaîtrais si tu y allais), mais bien l’indicatif, comme pour lui indiquer le chemin.

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4. Relevez les phrases qui informent le lecteur du fait que le loup mange la grand-mère et le Chaperon rouge. Que constatez-vous? Comparez avec les mêmes scènes chez Perrault. Il s’avança « tout droit, sans dire un mot, jusqu’au lit de la grand-mère, qu’il avala » (l. 59-60) et « C’est pour mieux te manger, dit le loup, qui fit un bond hors du lit et avala le pauvre Petit Chaperon rouge d’un seul coup » (l. 83-84). L’auteur met l’accent sur la rapidité d’exécution, comme chez Perrault d’ailleurs, ce qui renforce l’idée du loup prédateur : « Il se jeta sur la bonne femme, et la dévora en moins de rien; car il y avait plus de trois jours qu’il n’avait mangé » (l. 34-36) et « “C’est pour te manger.” Et en disant ces mots, ce méchant loup se jeta sur le Petit Chaperon rouge, et la mangea » (l. 62-64). Débat 1. Quelles sont les principales différences entre le personnage du Petit Chaperon rouge de Perrault et celui des Grimm? Comparez vos réponses avec d’autres lecteurs. Nous avons déjà établi les différences générales entre les deux contes (voir Perrault, Le Petit Chaperon rouge, question globale n° 2). Il s’agit ici de s’intéresser au personnage lui-même. Pour ce qui est de la beauté, les deux fillettes sont assez semblables, bien que les frères Grimm le soulignent avec plus de détails. Le fait que la mère insiste tant à donner ses recommandations à sa fille vient peut-être du fait que celle-ci est plus dissipée, moins polie que l’autre. Cette indocilité ressort assez bien dans le fait qu’elle écoute le loup et non pas sa mère. Celle de Perrault aussi écoute le loup, mais pour une seule chose : le choix du chemin. Si les deux fillettes cueillent des fleurs, celle des frères Grimm pousse la recherche à l’excès, car elle peut à peine porter son bouquet, alors que Perrault affirme qu’elle fait « des bouquets des petites fleurs qu’elle rencontrait » (l. 24). L’une semble aller dans toutes les directions, l’autre les cueillir au passage. Cela concorde avec le caractère plus dissipé du Chaperon des frères Grimm. La seconde finale change un peu la donne, car la fillette est obéissante, elle accomplit tout ce que sa grand-mère commande. Plus même, cette finale met en évidence sa débrouillardise, à tout le moins sa compréhension de la ruse que met au point la grand-mère.

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LE PETIT CHAPERON ROUGE (FERRON, P. 95-98) Questions globales sur le texte 1. Relevez les indices du fait que le conte de Ferron est typiquement québécois. C’est surtout le vocabulaire employé qui en est la preuve, en particulier des indices géographiques : « un petit bungalow à l’Abord-à-Plouffe » (l. 4, aussi l. 62), « le commis voyageur avait rapporté d’Ontario une caisse de bonne margarine » (l. 37-38), « Prends le chemin du Parc Belmont » (l. 51-52), « Néveurmagne » (l. 73), peut-être une allusion au Survenant, de Germaine Guèvremont, où l’on peut lire plusieurs fois cette expression. 2. Dans la version de Ferron, le petit Chaperon Rouge est nettement plus délurée (ou déniaisée) que chez les autres auteurs. Qu’est-ce qui le prouve? L’auteur place son héroïne dans des situations ambiguës, du moins décrit son comportement de manière suggestive : « “De belles lèvres! — Pour mieux ouvrir la bouche […]” » (l. 21), « la vieille dame qui mignardait, cajolait l’enfant étonnée de tant d’amour » (l. 22-23), deux verbes repris à la ligne 109. Elle « se dandinait pour montrer qu’elle ne l’était plus [une enfant]. La capeline trop courte accusait le jeu de ses braves petites hanches » (l. 46-48), « nous nous retrouverons en arrière du hangar » (l. 52-53), lieu où parfois l’on se cachait des regards indiscrets, pour s’embrasser… ou plus! Les voyous et le vieux coquin ne sont pas dupes : « Il flaire la viande fraîche et aperçoit le petit Chaperon Rouge » (l. 56-57). Ce n’est pas un ogre, ce n’est pas pour la manger qu’il la considère comme de la viande fraîche! Compréhension 1. Où vit la grand-mère du conte de Ferron? À l’Abord-à-Plouffe. 2. Quel est le seul défaut de la grand-mère? Elle a peur des chiens. 3. Quelles parties du corps de la fillette la grand-mère trouve-t-elle belles? Les joues et les lèvres. 4. Que remarque la grand-mère au sujet de sa petite-fille, la première fois qu’elle vient en compagnie du chien, attaché derrière le hangar? « Tu sens drôle, petite » (l. 31), expression reprise aux lignes 107-108. 5. Quel emploi occupe le père du petit Chaperon Rouge? Il est commis voyageur. Fait intéressant, c’est une autre manière de dire qu’il s’agit d’un père absent, car dans les deux autres versions du conte, le père n’est pas mentionné. 6. Que doit-elle porter à sa grand-mère, selon Ferron? Un pot de margarine ramené de l’Ontario par le père.

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7. Quels sont les deux dangers qui la guettent en chemin? « Les voyous des rues » (l. 43) et « un vieux coquin, vrai gibier de potence » (l. 55). Notez l’inversion du sens du mot « gibier », plutôt que prédateur, dans cette dernière expression, car ailleurs, c’est le Chaperon qui est le gibier. 8. Quelle est la réaction inhabituelle du chien, alors que lui et le petit Chaperon Rouge sont en route? Il dit au petit Chaperon Rouge : « “Prends le chemin du Parc Belmont; moi, j’enfile la rue du pont, nous nous retrouverons en arrière du hangar.” […] laissant la fillette sans protection » (l. 51-54). En fait il est épris de liberté, ne veut pas passer l’après-midi attaché derrière le hangar. Pourtant, il se rend bien au rendez-vous fixé et, à sa manière, protège l’enfant du prédateur. 9. Comment le vieux coquin arrive-t-il chez la grand-mère avant le petit Chaperon Rouge? Il prend un grand taxi noir. 10. Que fait le chien en arrivant chez la grand-mère? Il déniche le coquin qui s’est mis au lit pour attendre sa proie et lui court après. 11. Alors qu’elle pleure dans l’ombre de la maison, qu’entend la fillette? La voix de sa grand-mère qui appelle au secours. 12. Où la grand-mère est-elle enfermée? Dans un placard : « […] il enferme la vieille dans un placard […] » (l. 74) et « “Grand-mère, où êtes-vous? — Dans le placard. Tire la chevillette, la bobinette cherra.”» (l. 102-103). Style 1. Quelle connotation Ferron donne-t-il au mot « chaperon » dès la première phrase de son récit? « Une vieille dame, qu’on avait beaucoup chaperonnée en sa jeunesse […] » (l. 1). Elle a été chaperonnée, surprotégée, ce qui donne quand même un peu le ton, car la jeune fille est entourée de personnages qui la protègent (sa mère, sa grand-mère, son père, son chien). 2. Interprétez la répétition de l’expression « que la solitude, loin de guérir, avait approfondi(e) » (l. 11-12 et l. 35-36). Il y a évidemment insistance de la part de l’auteur, donc pour souligner la solitude de la grand-mère, son cœur brisé, l’affection de ses enfants qui lui fait défaut ou qu’elle a refusé de leur donner. Ferron établit tout de même une certaine nuance. La première fois qu’il emploie l’expression, c’est pour souligner que le « cœur quelque peu sec » de la grand-mère porte une « crevasse », tandis que la seconde fois, il ne semble plus rester qu’une « petite gerçure », comme si la visite de sa petite-fille apportait un peu de baume sur la plaie. Cela peut être dû au fait que la fillette est à ses yeux « différente, unique et irremplaçable » (l. 34-35).

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3. Repérez les phrases empruntées du Petit Chaperon rouge de Perrault, mais que Ferron détourne subtilement de leur sens originel. « Une de ses petites-filles était sa préférée : elle la chérissait mais ne la connaissait guère » (l. 6-8). Plusieurs fois dans le texte l’auteur fait allusion au désir sexuel que suscite le petit Chaperon Rouge, autour d’elle et même chez la grand-mère, donnant au mot « chérissait » un sens particulier. « Ces joues, ces lèvres étaient effleurées du doigt de la vieille dame qui mignardait, cajolait l’enfant étonnée de tant d’amour, un peu agacée aussi, car cela n’en finissait plus » (l. 22-24). « Elles se mignardaient, cajolaient avec une passion nouvelle » (l. 109-110). « “Que tu as de [...] — C’est pour mieux [...]” » (l. 19-20). Ici c’est la grand-mère qui s’étonne de la beauté de sa petite-fille, contrairement à Perrault, où la fillette s’étonne de la laideur et de la grandeur des parties du corps qu’elle croit être celui de sa grand-mère. « […] son petit pot de margarine » plutôt qu’un « petit pot de beurre ». Que doit-on en conclure : que la fillette vient d’une famille trop pauvre pour acheter du beurre? Est-ce une allusion à la couleur de la margarine, différente dans les deux provinces? Suggère-t-on un autre usage que la tartinade, disons comme dans le film Le Dernier Tango à Paris, dont une scène reste célèbre par l’emploi que l’on fait de matière grasse? D’ailleurs, comment interpréter la phrase suivante : « Ne t’amuse pas en chemin, la margarine fondrait » (l. 41-42)? La mère fait-elle référence à la chaleur du jour, comme chez les frères Grimm, ou bien le verbe « amuser » prend-il ici un sens particulier? De même pour « pincée » (l. 45), quelques lignes plus bas : est-elle prétentieuse, ou encore a-t-elle été pincée au derrière par quelque voyou? Les allusions sexuelles sont si nombreuses qu’il faut renoncer à en faire une liste exhaustive... « “Où allez-vous ainsi, ma belle enfant? — Je m’en vais chez ma grand-mère […]” » (l. 61-62). Plutôt qu’une question indirecte, comme chez Perrault, Ferron propose un dialogue direct entre les deux protagonistes. Et il emploie « grand-mère », plutôt que « mère-grand ». Comme chez les Grimm, le coquin laisse la porte entrouverte, mais non chez Perrault. De même, le bonnet et la robe sont présents chez les Grimm, et absents chez Perrault. « Tire la chevillette, la bobinette cherra » (l. 102-103). C’est bien la grand-mère qui prononce ces paroles, non pour permettre à la fillette d’entrer dans la maison, mais pour que celle-ci la délivre du placard où elle est enfermée. 4. Relevez les traces de l’ironie et de l’humour de Ferron et précisez quels procédés y sont associés. Évitons de reprendre les exemples donnés dans la réponse précédente. En plusieurs endroits du conte, on trouvera des paraphrases, antiphrases, détournements de sens, jeux de mots, etc., qui montrent l’humour pince-sans-rire de Ferron. Nous avons parlé plus haut du jeu de mots sur « chaperon » et « chaperonné ». On pourrait ici noter le verbe « mignarder », absent du Robert. Il faut donc se rabattre sur « mignard, arde » et « mignardise » pour en comprendre le sens. On pense immédiatement à « mignon », et il est vrai que le mot porte ce sens. Mais il a aussi une nuance mièvre, affectée, précieuse. Comment, en outre, ne pas penser à Henri II et à ses « mignons »?

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« […] elle avait épousé un homme autoritaire dont elle était veuve, Dieu merci, [et] achevait ses jours sans surveillance, libre et heureuse […] » (l. 2-4). La grand-mère fait figure de féministe, avant l’heure?, délivrée d’une présence masculine embarrassante. Quant à la fillette qui se déhanche dans sa jupe trop courte, elle n’est pas sans rappeler certaines héritières actuelles du féminisme qui, sous prétexte de liberté, retombent dans les ornières d’une féminité oppressante dont les femmes d’autrefois ont voulu se libérer. « […] la peur des chiens » (l. 6) : comment ne pas associer cette peur au fait que « [l]e chien et le coquin ne formaient qu’un loup. Ce loup restait entre elles » (l. 108-109)? Perrault a insisté sur le fait que le loup représente les mâles trop insistants auprès des jeunes filles. Que penser du chien de Ferron, qui est à la fois le protecteur du Chaperon Rouge, qui chasse le prédateur, et le loup, représentation même du prédateur? Détail plus amusant encore : « […] le chien qui lui mord les fesses » (l. 91). Est-ce ainsi qu’on ne forme qu’un? On pourrait donner de nombreux autres exemples. 5. Ferron remplace le traditionnel pot de beurre par de la margarine. Quel effet crée ce changement? À première vue, on associe la margarine à la pauvreté, à la misère. Mais tout de même, le père est commis voyageur, ce qui n’est pas l’emploi le moins rémunérateur. Par ailleurs, cette margarine provient de l’Ontario, province riche. Il serait donc surprenant que Ferron veuille mettre en évidence l’indigence de la famille du petit Chaperon Rouge. Est-ce simplement à cause du fait que, mieux que le beurre, elle se transporte facilement dans son « pot » de plastique à couvercle refermable? Ou, comme nous l’avons dit plus haut, parce qu’elle ne sert pas uniquement à tartiner? 6. Dressez la liste des parties du corps du petit Chaperon Rouge énumérées dans ce conte et comparez avec la version de Perrault. Ferron : « joues » (l. 20 et 22), « lèvres » (l. 21 et 22), « bouche » (l. 21), « ses braves petites hanches » (l. 47-48), « Ce qu’il voit en arrière » (les fesses?, l. 57), « être vue par devant » (les seins?, l. 58), « bouche » (l. 92), « son cœur » (l. 95), « ses oreilles » (l. 101) et « les bras » (l. 104). Ce sont toutes des parties plutôt sensuelles ou charnues du corps de la fillette. Perrault, lui, ne mentionne expressément aucune partie du corps, sinon de manière indirecte par les verbes voir, rencontrer, écouter et cueillir. Ce ne sont pas les parties du corps de la fillette qu’il énumère, mais celles du loup déguisé en mère-grand. 7. Quels adjectifs désignant le chien dans l’avant-dernier paragraphe rappellent la situation de la grand-mère au début du conte? « […] seul et libre » (l. 83), comme la grand-mère est veuve, sans surveillance, libre, mais solitaire (premier paragraphe). Malgré leurs différences, malgré l’aversion de la femme pour les chiens, ces deux personnages présentent donc des similitudes, ce qui accentue leur rivalité dans le cœur de la fillette.

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8. Quel mot, employé précédemment par Ferron pour décrire le méchant, est repris à la fin du conte pour désigner le petit Chaperon Rouge? « [C]oquin » (l. 55, 65 et 75) et « Coquine » (l. 107). Cela tient au fait que le mot a à la fois le sens d’une injure (bandit, criminel) et celui d’espiègle, de malicieux, de polisson, surtout pour désigner les enfants. Ferron joue donc sur les deux sens. Débat 1. Les allusions à la pédophilie et au sexe jettent-elles un éclairage particulier sur les versions de Perrault et des Grimm? Réponses variées, mais certainement éclairantes quant à la morale du conte de Perrault. 2. Ce conte-ci est-il destiné à des enfants? Pourquoi? En général, les étudiants répondent qu’il est plutôt destiné aux adultes, car les allusions sensuelles et sexuelles sont plus claires. Le Chaperon Rouge elle-même est consciente du fait qu’elle n’est plus une enfant : « “Ma mère me prend pour une enfant”, et se dandinait pour montrer qu’elle ne l’était plus » (l. 45-47). Certains y voient simplement une variation plus explicite sur la morale du conte de Perrault.

CENDRILLON (GRIMM, P. 99-105) Questions globales sur le texte 1. Tracez le portrait de Cendrillon dans ce conte des frères Grimm et différenciez son caractère du même personnage chez Perrault. En général, la Cendrillon de Perrault semble plus délurée, moins plaignarde ou larmoyante que celle des frères Grimm : « […] chaque jour elle pleurait […] » (l. 7). C’est avant tout une petite fille « pieuse et bonne » (l. 8), à l’image de l’idéal du XIXe siècle romantique et préromantique. Sans être directement responsable de la cécité de ses deux sœurs, Cendrillon est moins miséricordieuse chez les Grimm que chez Perrault. Chez ce dernier, en effet, elle installe ses deux sœurs au palais et leur trouve des époux. Ici, elle laisse faire les oiseaux, ses amis, qui accomplissent une cruelle vengeance en crevant les yeux des deux filles. Elle paraît insensible, alors qu’on la voyait d’une sensibilité exacerbée après la mort de sa mère. En somme, comme les enfants en bas âge, elle est à la fois plus mignonne et plus cruelle, car peut-être moins consciente. 2. Qu’est-ce qui rend la fin de ce conte plus cruelle que la finale proposée par Perrault? Le traitement des deux sœurs.

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Compréhension 1. Qui meurt au début de ce conte? La mère de Cendrillon. 2. Faites la liste des travaux que doit exécuter Cendrillon. « Alors elle dut travailler dur du matin jusqu’au soir, se lever tôt, tirer de l’eau, allumer le feu, faire la cuisine et la vaisselle, la lessive et tous les gros travaux. Les deux sœurs, au surplus, […] lui jetaient les pois ou les lentilles dans la cendre pour qu’elle eût à rester là encore à les trier une fois de plus » (l. 21-26). 3. Alors que les deux vilaines sœurs désirent des robes et des bijoux, que demande Cendrillon à son père à son retour de la foire? « La première branche qui cinglera votre chapeau en cours de route, père, coupez-la pour moi […] » (l. 35-36). Cette branche est celle d’un noisetier : ce choix n’est pas anodin, car c’est de ce bois qu’est souvent fabriqué la baguette du sourcier (autre nom du noisetier : coudrier), donc il existe un certain lien avec la magie. En outre, la tradition populaire prête souvent au bois de cet arbre des vertus curatives; on en fabrique des bijoux ou des objets à porter sur soi pour guérir ou soulager certaines maladies. Il est aussi utilisé en vannerie (fabrication des paniers). Rappelons enfin qu’en touchant du bois, on conjure le sort pour attirer la chance ou éloigner le malheur. 4. Que fait Cendrillon du cadeau rapporté par son père? Elle « alla planter la petite branche sur la tombe de sa mère; elle pleurait si fort que ses larmes mouillèrent et arrosèrent le rameau, qui prit racine, poussa et devint un fort bel arbre » (l. 43-45). 5. Quel ami Cendrillon se fait-elle en allant pleurer sur la tombe de sa mère? « […] un petit oiseau blanc venait s’y poser [sur l’arbre]; et si elle formulait un souhait, le petit oiseau de l’arbre lui jetait aussitôt ce qu’elle avait souhaité » (l. 47-49). 6. À qui Cendrillon demande-t-elle la permission d’aller au bal donné au palais? À sa belle-mère, qui évidemment refuse, puis change d’avis, comme on le voit par la réponse à la question suivante. On se demande pourquoi elle n’en a pas demandé la permission à son père, qui aurait certainement accepté. 7. Quelles tâches doit accomplir Cendrillon, qui cherche à obtenir la permission de sa belle-mère d’aller au bal? Qui l’aide à les accomplir avec succès? « […] tu pourras venir si, en deux heures de temps, tu réussis à ramasser et à trier le pot de lentilles que je vais renverser dans les cendres » (l. 63-65). Voyant qu’elle a réussi cette première épreuve, la belle-mère lui en donne une plus difficile : « Si tu me tries deux pleins pots de lentilles dans la cendre en une heure de temps, alors tu pourras venir » (l. 84-85). Elle appelle à son secours les pigeons, les tourterelles et tous les oiseaux du ciel.

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8. Comment Cendrillon obtient-elle de beaux vêtements? Grâce à l’oiseau magique qui se trouve dans l’arbre qu’elle a planté sur la tombe de sa mère. 9. Le premier soir, après le bal, le prince insiste pour reconduire Cendrillon chez elle, mais, au dernier moment, elle lui échappe. Comment y parvient-elle? « […] au dernier moment elle lui échappa et sauta dans le pigeonnier. Le prince attendit que revînt le père et lui dit que la jeune inconnue avait sauté dans le pigeonnier » (l. 127-129). 10. Comment lui échappe-t-elle une nouvelle fois le lendemain? Elle « sauta dans le jardin derrière la maison. Il y avait là un grand bel arbre tout chargé de magnifiques poires, et elle grimpa si prestement entre ses branches, vive comme un écureuil, que le prince ne sut pas où elle avait bien pu passer » (l. 151-154). 11. Quelle ruse le prince emploie-t-il pour empêcher Cendrillon de fuir, le troisième soir du bal? Il fait enduire les marches du perron de poix (une matière visqueuse) : Cendrillon glisse, mais un de ses escarpins y reste collé. 12. Que fait l’aînée, sur le conseil de sa mère, en voyant que son pied n’entre pas dans la chaussure d’or? Que doit faire sa sœur? La première se coupe un orteil, la seconde, le talon. 13. Qu’arrive-t-il aux deux méchantes sœurs à la cérémonie de mariage de Cendrillon et du prince? Des oiseaux viennent piquer leurs yeux, de sorte qu’elles deviennent aveugles. Style 1. Quelle figure d’opposition décrit le caractère des deux filles de la belle-mère? Une antithèse : « […] ses deux filles, qui étaient jolies et blanches de visage, mais vilaines et noires de cœur » (l. 11-12). On pourrait aussi parler du sens figuré des adjectifs « blanc » et « noir ». 2. Relevez les allusions à la religion dans ce conte des frères Grimm. « […] pieuse » (l. 3 et 8), « bon Dieu » (l. 4), « du haut du ciel » (l. 4-5), « priant » (l. 46) et « église » (l. 242). Ajoutons «le petit oiseau blanc» (l. 47) et les « deux pigeons blancs » (l. 71 et 94), qui rappellent la colombe blanche représentant l’esprit saint pour les catholiques. 3. Quels termes méprisants sont employés par les deux sœurs et la belle-mère pour décrire Cendrillon? « [D]inde idiote » (l. 15), « fille de cuisine » (l. 17), « la fière princesse, qu’elle est bien attifée » (par ironie, l. 20-21), « Sale et dégoûtante comme tu l’es » (l. 59-60), « ce pauvre souillon » (l. 216), « trop sale pour se laisser voir » (l. 221). Remarquez qu’on la traite d’oiseau (dinde) et que ceux-ci sont ses meilleurs amis.

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Débat 1. La Cendrillon des Grimm a-t-elle une attitude plus moderne ou moins misérabiliste que celle de Perrault? Évidemment, la réponse à cette question est nuancée, car sous certains rapports la Cendrillon des frères Grimm est plus mièvre et plus conventionnelle que celle de Perrault. Par exemple, sa religiosité, ses promesses de rester bonne fille après la mort de sa mère et ses flots de larmes sur la tombe de celle-ci, si abondantes qu’elles permettent la croissance d’un noisetier, font de la Cendrillon des Grimm un personnage empreint de romantisme, presque victorienne dans sa vision édulcorée du monde. Par contre, elle est plus proactive, elle prend en main son destin : elle n’a pas de fée marraine, mais compte sur une amitié qu’elle a construite de longue date avec les oiseaux (ce n’est pas plus réaliste que la magie d’une fée, mais cela montre qu’elle veille à entretenir de bonnes relations); c’est par un acte de volonté qu’elle échappe au prince après les trois soirées de bal, et non simplement parce que quelqu’un d’autre a décrété que l’heure est venue; elle fait attendre le prince au moment de l’essayage de la chaussure, car elle veut un moment pour se débarbouiller le visage, ce qui prouve tout de même une certaine audace, un certain sans-gêne! Pour Perrault, Cendrillon doit rester dans les limites du bon goût et des convenances propres au siècle classique. Jamais ses manières ne doivent dénoter une fille de rien : bien que traitée comme une servante par sa belle-mère et ses demi-sœurs, elle a toujours une attitude magnanime et des actions désintéressées. Chez elle, pas de vengeance spectaculaire comme chez les Grimm. La façade et les apparences comptent plus que tout : elle pourrait les coiffer de travers, mais ne s’abaisse pas à chercher réparation, elle pourrait se dévoiler au bal et humilier publiquement les deux pécores, elle leur offre plutôt des agrumes dans l’anonymat, etc. Au contraire, la Cendrillon des Grimm extériorise ses sentiments : tristesse, déplaisir et même une certaine satisfaction de voir ses sœurs pâlir de rage. On peut trouver de nombreux exemples pour confirmer ou infirmer la thèse proposée dans le débat. 2. Dans beaucoup de contes, les méchants sont punis de leurs mauvaises actions. Trouvez-vous la punition des deux sœurs exagérée ou pire que celle d’autres méchants présentés dans d’autres contes? Réponse libre, mais la punition est souvent considérée comme cruauté exagérée. Certains croient qu’elles méritent bien leur punition.

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LE VILAIN PETIT CANARD (ANDERSEN, P. 106-113) Questions globales sur le texte 1. Dans le style de Perrault, mais pas nécessairement en vers, écrivez une moralité convenant à ce conte d’Andersen. (L’enseignant peut accepter diverses réponses.) 2. Quels rapports peut-on établir entre ce conte d’Andersen et Peau d’Âne de Perrault? (L’enseignant peut accepter diverses réponses.) Compréhension 1. Décrivez brièvement le lieu où la cane couve ses œufs. Au pied d’un château, à la campagne, au milieu des bardanes, une mauvaise herbe des terrains à l’abandon et dont les fruits (connus au Québec sous le nom populaire de « pipiques ») s’accrochent au pelage des animaux et aux vêtements. 2. Quelle est la première réflexion des canetons au sortir de l’œuf? « Comme le monde est grand […] » (l. 21). 3. Quelles sont les particularités du dernier œuf? Il est plus grand que les autres et ne s’est pas encore brisé (il met plus longtemps que les autres à se briser). 4. Selon une vieille cane, de quelle sorte d’œuf s’agit-il? D’un œuf de dinde. 5. Décrivez le dernier caneton. Il est plus grand que les autres, laid (l. 47) et gris (l. 55). 6. La cane déclare que le petit n’est pas un dindonneau. Qu’est-ce qui lui permet de l’affirmer? « […] il sait se servir de ses pattes » (l. 59), donc il sait nager. 7. Relevez les caractéristiques de la vieille cane qui occupe le plus haut rang à la cour des canards. « Elle est de sang espagnol », « grosse » (l. 71) et porte « un chiffon rouge à la patte, c’est la plus haute distinction pour un canard » (l. 72-73). 8. Que fait une cane de la cour au vilain canard qu’elle trouve « trop grand et mal venu » (l. 83)? Elle le mord au cou. 9. À force d’être taquiné, mordu et bousculé par les autres, le vilain canard s’enfuit. Quel est le premier endroit où il passe la nuit? Le « grand marais où vivaient les canards sauvages » (l. 112-113).

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10. Quelles sont les deux espèces d’oiseaux qu’il rencontre dans cet endroit? Des canards et des « oies sauvages, deux jars plutôt » (ou oies migratrices, l. 123). 11. « Au même instant, il entendit Pif! Paf! […] » (l. 131). Quelle est l’explication de cette pétarade? Ce sont des chasseurs qui tuent les oies et les canards. 12. Comment l’auteur décrit-il le chien qui approche du vilain canard? « […] un immense chien terrifiant, la langue pendante, les yeux étincelants. Son museau, ses dents pointues étaient déjà prêts à le saisir quand — Klap! — il partit sans le toucher » (l. 139-142). 13. Quelle explication le vilain canard donne-t-il au fait qu’il est épargné? « […] je suis si laid que même le chien ne veut pas me mordre » (l. 143-144). 14. Dans sa fuite, quel est le second endroit qu’atteint le pauvre caneton? Qui y habite? « […] une pauvre masure paysanne, si misérable qu’elle ne savait pas elle-même de quel côté elle avait envie de tomber […] » (l. 151-152). « Une vieille paysanne habitait là, avec son chat et sa poule » (l.158). 15. Le vilain canard aurait bien envie de faire quelque chose, mais les deux autres animaux tentent de le décourager. De quoi s’agit-il? « […] glisser sur l’eau » (nager, l. 183 et 187). 16. Quelle expression la poule emploie-t-elle pour dire qu’on doit se satisfaire de ce qu’on a? « En voilà un plaisir, dit la poule. Tu es complètement fou » (l. 189). 17. À l’automne, le vilain canard voit passer dans le ciel de grands oiseaux blancs qu’il trouve très beaux. De quels oiseaux s’agit-il? Des cygnes, mais « [i]l ne savait pas le nom de ces oiseaux, ni où ils s’envolaient » (l. 224-225). 18. Que doit faire le vilain canard pour ne pas geler? « Il lui fallait nager constamment pour empêcher l’eau de geler autour de lui. Mais, chaque nuit, le trou où il nageait devenait de plus en plus petit. La glace craquait, il avait beau remuer ses pattes, à la fin, épuisé, il resta pris dans la glace » (l. 228-232). 19. Qui finalement le sauve et l’empêche de mourir gelé? Un paysan qui « brisa la glace de son sabot et porta le caneton à la maison où sa femme le ranima » (l. 233-234). 20. Après un rude hiver, quels sont les premiers animaux que le vilain canard croise? « […] trois superbes cygnes blancs […] » (l. 251).

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21. Quelle triste pensée traverse alors son esprit? « Je vais voler jusqu’à eux et ils me battront à mort, moi si laid, d’avoir l’audace de les approcher! Mais tant pis, plutôt mourir par eux que pincé par les canards, piqué par les poules ou par les coups de pied des filles de basse-cour! » (l. 255-258). 22. Que constate le vilain canard en se mirant dans l’eau? « C’était sa propre image, non plus comme un vilain gros oiseau gris et lourdaud… il était devenu un cygne! » (l. 265-266). 23. Que lui crient les enfants qui le voient nager parmi les cygnes? « Le plus petit s’écria : “Oh! il y en a un nouveau.” Et tous les enfants de s’exclamer et de battre des mains et de danser en appelant père et mère. On lança du pain et des gâteaux dans l’eau. Tous disaient : “Le nouveau est le plus beau, si jeune et si gracieux.” » (l. 272-277). Style 1. Personnages : dressez la liste des personnages de ce conte en précisant leur rapport avec le personnage principal, c’est-à-dire le vilain petit canard. • « […] une cigogne marchait sur ses jambes rouges, si fines et si longues et

claquait du bec en égyptien […] » (l. 3-4). • « […] une cane s’était installée pour couver » (l. 11-12) et qui était « leur mère »

(l. 23). • « […] les petits se dégageaient de la coquille et regardaient de tous côtés sous les

feuilles vertes. La mère les laissait ouvrir leurs yeux très grands […] » (l. 18-20). • « […] une vieille cane qui venait enfin rendre visite » (l. 30-31). • « “Pip, pip, dit le petit en roulant dehors.” Il était si grand et si laid […] » (l. 46-

47). C’est la première apparition du personnage principal autrement que sous la forme d’un œuf.

• « […] la vieille cane, là-bas, elle est la plus importante de nous tous. Elle est de sang espagnol, c’est pourquoi elle est si grosse » (l. 70 -71).

• « Une cane se précipita sur lui et le mordit au cou » (l. 81). • « Le dindon — né avec des éperons — et qui se croyait un empereur, gonflait ses

plumes comme des voiles. Il se précipitait sur lui en poussant des glouglous de colère » (l. 99-102).

• « […] les canards sauvages » (l. 112-113). • « […] deux oies sauvages, deux jars plutôt, car c’étaient des mâles […] » (l. 123-

124). • « Des chasseurs passaient […] » (l. 134). • « […] un immense chien terrifiant […] » (l. 139-140). • « Une vieille paysanne […] » (l. 158). • Un « chat » et une « poule » (l. 158). • « […] un grand vol d’oiseaux […] » (l. 214), qui sont en fait des cygnes. • « […] un paysan qui passait […] » (l. 233), « [l]es enfants […] » (l. 235) et « [l]a

paysanne […] » (l. 239). • « […] trois superbes cygnes blancs […] » (l. 251). • « Quelques enfants » (l. 272), parmi lesquels « [l]e plus petit » (l. 272) : on ne sait

s’il s’agit des mêmes que plus haut.

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2. Lieux : nommez les différents lieux où se déroule l’action de ce conte. • La « campagne » (l. 1) et « les prairies » (l. 3). • « Au-delà, des champs et des prairies s’étendaient, puis la forêt aux grands arbres,

aux lacs profonds » (l. 6-7). • « […] un vieux château s’élevait entouré de fossés […] » (l. 8) : « L’endroit était

aussi sauvage qu’une épaisse forêt […] » (l. 11). • Un « fossé » (l. 53) où la famille va nager. • « […] la cour des canards » (l. 62), qui semble synonyme de « l’étang des

canards » (l. 64). • Le « grand marais où vivaient les canards sauvages » (l. 112-113), lesquels sont

tués par les chasseurs. • « […] une pauvre masure paysanne, si misérable […] » (l. 151). • « Il nagea sur l’eau, il plongea […] » (l. 207) : il semble avoir trouvé un lac ou un

marais, où il passe l’hiver. • « […] un paysan […] porta le caneton à la maison où sa femme le ranima »

(l. 233-234). • « […] dans un grand jardin plein de pommiers en fleurs » (l. 247-248). • Un dernier étang : « Il s’élança dans l’eau et nagea vers ces cygnes pleins de

noblesse » (l. 259).

3. Temps : en vous servant des principaux indicateurs temporels, tracez la ligne du temps pour ce conte. L’action se déroule sur une année complète ou presque, de l’été au printemps suivant. « C’était l’été. Les blés étaient dorés, l’avoine verte, les foins coupés […] » (l. 1-2). Cela semble indiquer la fin de l’été, presque le moment des récoltes. « Enfin, un œuf après l’autre craqua » (l. 16), mais il faut attendre encore un temps avant l’apparition du dernier poussin : « Enfin, l’œuf se brisa » (l. 45). Il y a près de 30 lignes entre les deux naissances… « Le lendemain […] » (l. 52) indique un jour indéterminé dans cette fin d’été, de même que « Au matin […] » (l. 115), après sa fuite. « Le vent sifflait si fort qu’il fallait au caneton s’asseoir sur sa queue pour lui résister » (l. 153-154), probablement le premier signe de l’automne. « L’automne vint, les feuilles dans la forêt passèrent du jaune au brun, le vent les faisait voler de tous côtés. L’air était froid, les nuages lourds de grêle et de neige, dans les haies nues les corbeaux croassaient kré! kru! krà! oui, il y avait de quoi grelotter » (l. 209-212). « Un soir, au soleil couchant, un grand vol d’oiseaux sortit des buissons. […] Ils ouvraient leurs larges ailes et s’envolaient loin des contrées glacées vers le midi, vers les pays plus chauds, vers la mer ouverte » (l. 214-218). C’est le moment de la migration. « L’hiver fut froid, terriblement froid » (l. 228). « Au matin […] » (l. 233) d’un jour indéterminé de cet hiver.

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« […] un jour enfin, le soleil se leva, déjà chaud, et se mit à briller. C’était le printemps » (l. 244-245). Plus loin : « Comme la douceur du printemps lui était agréable! » (l. 250). Débat 1. Pourquoi est-il si difficile d’accepter les gens tels qu’ils sont? Trouvez des liens entre ce conte et le rejet dans la société d’aujourd’hui. Cela tient probablement au degré de tolérance face à la différence, ou encore au degré de différence que l’on peut personnellement ou socialement accepter. Prenons l’exemple de l’immigration : il est clair qu’il est plus facile pour un immigrant de s’intégrer (et corollairement plus facile à la société d’accueil d’intégrer l’immigrant) si celui-ci possède des affinités avec sa nouvelle collectivité. Plus il y a de similitudes, plus l’intégration sera facile. Et plus il y a de divergences, plus l’intégration sera difficile. Couleur, langue, religion, valeurs, traditions, alimentation, comportements… ne sont que quelques exemples. Ainsi, le vilain canard est un « immigrant » dans la société des canards. Il peut jusqu’à un certain point en faire partie, parce que, comme eux, il nage. Mais il ne peut non plus totalement être accepté, en raison de ses différences : il est trop grand, n’a pas la bonne couleur, se sent exclu et est même malmené par ses congénères. À la fin, il n’en peut plus et fuit ce monde où il se sent opprimé. La situation aurait été pire s’il avait été dinde plutôt que cygne. En effet, les dindes ne nagent pas comme les canards et les cygnes. La vieille cane en visite conseille même à la couveuse d’abandonner l’œuf à son triste sort, c’est-à-dire à une mort certaine. Par ailleurs, la situation du vilain canard est meilleure parce qu’il est mâle, car son apparence a moins d’importance : comme le souligne la mère aux lignes 93 et 94. Pourtant, on peut tirer profit de la différence de l’autre. À la fin, quand les enfants découvrent ce qu’est devenu le vilain canard après le rude hiver, ils se réjouissent de la beauté du cygne blanc, cela leur apporte du bonheur. Comme dans d’autres contes, le message de l’auteur est de ne pas se fier uniquement aux apparences, de gratter sous la surface pour découvrir les beautés cachées. Pour reprendre la comparaison avec l’immigrant, il faut tenter de découvrir ce qu’il apporte de bien et de bon à la société. Le Québec est une terre d’accueil qui a vu venir des gens de partout, et ces personnes ont apporté de la nouveauté à une société qui était plutôt monolithique il n’y a pas si longtemps. Pourquoi est-il si difficile d’accepter les gens tels qu’ils sont? Parce qu’il serait plus facile qu’ils soient exactement ce que nous sommes…