33 - Gabriel Delanne - Tome 2 - Les Apparitions Materialisees Des Vivants Et Des Morts – Fr

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    LES APPARITIONS MATRIALISES

    DES VIVANTS ET DES MORTS

    DEUXIME PARTIE

    SPIRITISME

    CHAPITRE I

    LES APPARITIONS DE DFUNTS PLUS OU MOINS LONGTEMPS APRS LAMORT

    Sommaire. Continuit des manifestations extra-corporelles des vivants et des morts. Elles sont identiques. Comment distinguer une hallucination d'une apparition

    vritable ?numration des caractres qui prouvent l'objectivit d'un fantme de mort. Explication par l'hypothse de la tlpathie retarde. Exemple d'une vision quin'est pas suffisamment objective. Apparitions vritablement objectives. Celles qui

    prsentent des signes particuliers, ignors des vivants, mais exacts. Le fantme a unegratignure la joue. Un autre se montre ruisselant, aprs s'tre noy. Le fantmeest identifi parce qu'il lui manque un doigt. L'apparition d'un officier indique songenre de mort. Un fantme reconnu sur une photographie. Hantise locale ; lavieille femme couche. Le docteur qui revient. Apparition de l'ancienne

    propritaire de l'htel.Le fantme dit son nom et converse par signes. Le cas de

    Mme de Marteville. Le fantme donne un ordre qui sauve le navire.L'apparitionproteste contre une accusation injuste. L'apparition veille sur ses petits enfants. Lecas de Sylvain Marchal. Discussion sur l'objectivit des fantmes vuscollectivement. Photographies d'apparitions de morts, invisibles pour les yeuxordinaires. Les expriences de MM. Beattie, Thompson, Wagner, Wallace, etc. Identit des esprits de Mme Bonner, la petite Pauline, Mabel Warren et Lizzie Benson.

    Action physique exerce par le fantme invisible. Apparitions de morts vuscollectivement ou successivement par plusieurs tmoins.L'apparition de la grand-mre.

    Le fianc est vu par deux personnes. La mre dfunte se montre trois tmoins. Manifestations lumineuses. Divers exemples. Une mre qui veille sur ses enfants.

    Les esprits continuent de nous aimer. Apparitions multiples du mme fantme. Cas Lister. Celui de Mme Coote. Cas Tweedale. Un portrait posthume. Une

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    apparition persistante. Manifestations objectives au lit de mort. Trois cas citsd'aprs M. Bozzano. Trois cas du mme auteur o l'apparition est, vue collectivement

    par des humains ou des animaux. Rsume rappelant les analogies parfaites desapparitions de vivants ou de morts.

    CONTINUIT DES MANIFESTATIONS EXTRA-CORPORELLESDES VIVANTS ET DES MORTS

    Il est certain, aujourd'hui, que tous les raisonnements philosophiques, pour ou contrel'immortalit de l'me, ont t employs tour tour par les penseurs et les savants les plusminents de tous les temps, sans qu'aucune thorie ait eu assez de puissance pourtrancher dfinitivement la question, en s'imposant d'une manire indiscutable. Est-cedonc que le problme soit insoluble pour nous ? Pas le moins du monde ; mais il faut le

    placer sur son vritable terrain : celui de la recherche exprimentale. Au lieu de s'puiser

    en de vaines et striles querelles d'cole, il est plus simple, plus pratique d'aborderdirectement la question de fait. Possde-t-on, oui ou non, des preuves que l'me existeencore aprs la dsagrgation du corps ? Je n'hsite pas rpondre affirmativement, et enm'appuyant d'abord sur les faits rassembls par les savants de la Socit anglaise derecherches psychiques, je crois que la dmonstration de la survivance de l'me pourraconvaincre les plus incrdules.

    Dj les phnomnes d'extriorisation de l'me humaine, pendant la vie, nous faisaientsupposer logiquement qu'un principe qui peut sortir du corps, s'en dtacher pourmanifester ses pouvoirs, sans avoir besoin du cerveau matriel, devait en tre

    indpendant ; mais ce n'tait l, aprs tout, qu'une induction, lgitime il est vrai, maisencore insuffisante pour dterminer une conviction complte. Arrivons donc ladmonstration directe. Lorsque la vie a cess, que l'organisme charnel est dcompos,qu'il ne reste rien de ses organes, l'intelligence qui l'animait est-elle anantie, ou bien a-t-elle persist de manire donner des preuves objectives de son existence ? Telle est laquestion que je vais tudier maintenant.

    On entend dire quelquefois, d'un ton sentencieux, que : quand on est mort, c'est pourlongtemps , et il est de bon ton de railler les nafs qui croient l'existence des revenants. Ceux, dit Kant, qui se donnent bon march le nom et le relief de savants se moquent

    de tout ce qui, inexplicable pour le savant comme pour l'ignorant, les place tous les deuxau mme niveau. C'est ce qui fait que les histoires de revenants sont toujours coutes etbien accueillies dans l'intimit, mais impitoyablement dsavoues devant le public. Oui, de tout temps, des personnes senses, en parfaite sant, ont affirm avoir eu desvisions de dfunts, et dans tous les pays il existe des lieux, dits hants , o se

    produisent des manifestations anormales, dont les agents semblent ne pas appartenir l'humanit terrestre. Maintenant que les recherches psychiques ont fait faire un grand pas l'opinion des hommes de science, beaucoup admettent qu'un tmoin n'est pasncessairement un menteur, ou qu'il n'est pas utile de supposer qu'il tait ivre ou malade,

    lorsqu'il dclare avoir vu un fantme reproduisant les traits d'un dcd. Mais, pour leplus grand nombre des critiques, cette vision n'est pas autre chose qu'une hallucination,une perception fausse et, par consquent, ne prouve rien quant la survie. Il s'agit donc

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    pour nous de savoir comme pour les fantmes de vivants si l'on peut arriver dmontrer que cette explication est insuffisante, et afin que la recherche soit faitesrieusement, c'est encore les Proceedings que je mettrai le plus volontiers contribution, pour la plupart des faits d'observation qui seront cits ici.

    Je rappelle, pour mmoire, que la S. P. R. constitue un vritable aropage de savants,car beaucoup de ses membres appartiennent toutes les branches de l'activit

    scientifique, dans lesquelles ils ont conquis les premires places. On y rencontre, ctde psychologues mrites, des naturalistes de premier ordre, des physiciens ou deschimistes dont le renom est universel, des ingnieurs, des astronomes, des hommesd'tat, etc. ; en un mot, les intelligences les plus diverses et les esprits les mieux prpars

    pour une discussion de cette nature. Suivons-les donc avec confiance, car on ne pourraittrouver de meilleurs guides dans celte recherche, qui a pour nous un si grand intrt.

    Lorsque les savants anglais commencrent leur enqute, ils n'avaient aucune ideprconue, et leur mthode critique s'appliqua indistinctement tous les cas. Cependant,le premier ouvrage qu'ils publirent : les Fantmes de vivants, sous la signature de MM.

    Gurney, Myers et Podmore, tait loin de relater tous les faits parvenus leurconnaissance ; ce n'est qu'accidentellement que le volume mentionnait des apparitions demorts. Les Proceedings contiennent, en revanche, un nombre assez considrable derelations dans lesquelles l'agent n'existe plus au moment o se produit la visiontlpathique du percipient. C'est donc bien une apparition de mort qui a eu lieu, et cequ'il importe ds maintenant de remarquer, c'est que les manifestations visuelles,auditives, etc., de ces morts ont exactement les mmes caractres que les manifestations

    produites par les vivants, d'o il faut en infrer une identit de la cause. Cette conclusionme semble d'autant plus exacte, que c'est celle qui se dgage directement de l'examen des

    circonstances qui accompagnent ces phnomnes. Si l'on tudie attentivement tous lesexemples rapports, on voit qu'on peut les classer dans une srie continue, partant, descas o l'agent est bien vivant, qui se continue par ceux o il est sur le point de mourir,

    pour aboutir enfin aux derniers, o il est dcd depuis plus ou moins longtemps.

    D'autre part, si rellement les visions de personnes mortes sont analogues celles depersonnes vivantes loignes, nous devons trouver des sries parallles de phnomneso l'action post-mortem se traduira : 1 par une hallucination tlpathique, proprementdite ; 2 par une apparition clairvoyante ; 3 par des photographies ; 4 par une visioncollective. C'est effectivement ce qui a lieu, comme nous allons le constater.

    COMMENT DISTINGUER UNE APPARITION VRITABLE D'UNEHALLUCINATION

    Ds maintenant, il est ncessaire de signaler une difficult qui se produit au sujet desapparitions de morts, et qui n'existait pas pour celles des vivants.

    La thorie de la tlpathie a t fonde sur la concidence que l'on remarque entrel'apparition et l'existence de certaines conditions critiques dans lesquelles se trouvaient, ce moment, les personnes qui semblaient se manifester. On pouvait vrifier, en effet, quefrquemment, pendant la crise, l'agent avait pens au percipient et l'on admet que c'est

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    l'action de cette pense que le phnomne tlpathique est attribuable, puisque dansl'immense majorit des cas jamais, ni avant ni aprs, le percipient n'a eu d'autrehallucination. Parfois aussi, l'agent raconte qu'il se souvient de s'tre extrioris, d'avoirt trouver le percipient, et dclare qu'ils se sont vus rciproquement. Ces faits,rapprochs de ceux de la tlpathie exprimentale, permettent d'attribuer certainement une cause extrieure au voyant les phnomnes d'apparition de vivants ; mais il est clair

    que cette enqute ne peut plus tre faite quand il s'agit des morts, de sorte qu'il devienturgent de rechercher quelles conditions doit runir une apparition de dfunt, pour treconsidre comme vridique.

    J'ai rsum dans un tableau les causes qui produisent de fausses perceptions, tellesque : les illusions, les hallucinations provenant d'tats pathologiques, les suggestions, lesautosuggestions, etc. ; il est donc vident que l'on doit liminer d'abord tous les cas oces facteurs pourraient tre invoqus. Celte slection opre, il reste encore un nombreconsidrable de rcits dans lesquels on constate que des personnes de tout ge, de toutrang, sans distinction de sexe, de croyance ou de pays, affirment avoir vu des parents ou

    des amis dcds. Comment savoir si ces apparitions sont relles ?A mon avis, il faut procder ici comme on le fait pour les communications spirites,

    c'est--dire qu'il est indispensable, si le percipient est seul, que l'apparition prsente ensoi des preuves de son existence objective. Celles-ci peuvent tre de diffrentes sortes et

    prendre place dans les catgories suivantes :

    1 Le fantme, s'il est connu du percipient, montre par des signes particuliers, ignoresnormalement du voyant, qu'il tait ainsi de son vivant ( blessures, cicatrices, vtementspcial, etc.) ;

    2 L'apparition est celle d'une personne que le sujet n'avait jamais vue auparavant ;cependant, la description qu'il en fait est suffisamment prcise pour en tablir l'identit ;

    3 L'apparition donne un renseignement dont l'exactitude est reconnue ultrieurement,ou elle relate un fait rel totalement inconnu du percipient ;

    4 On a pu obtenir : accidentellement ou volontairement, des photographies de cesfantmes ;

    5 Plusieurs tmoins ont t simultanment, ou successivement, affects par lamanifestation de l'tre matrialis ;

    6 Des animaux et des hommes ont peru collectivement l'apparition.A cause de la multiplicit des sujets que je dois traiter et de l'abondance des documents

    qui s'y rattachent, je citerai quelques rcits seulement de chacune des catgoriesnumres plus haut, en indiquant les rfrences ncessaires. La plupart des exemplessont emprunts au mmoire lu par M. Gurney la Socit de recherches psychiquesanglaise, dans la sance du 28 fvrier 1888 (Voir aussi le mmoire de Mme Sidgwick surles Apparitions de morts. M. Sage, dans son livre : la Zone frontire, en a traduitquelques cas, chap. VII, p. 198 et suiv.). Ce travail fut complt plus tard par F. W. H.Myers. Indpendamment des causes d'exclusion signales plus haut (illusions,

    hallucinations, etc.), M. Gurney, pour diminuer encore les chances d'erreurs possibles,s'est astreint ne retenir que les cas o le percipient ignorait la mort de l'agent, ce quisupprime radicalement la possibilit d'une auto-suggestion quelconque. Cependant, il

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    reste encore une autre hypothse tudier : celle de la tlpathie retarde. Voyons enquoi elle consiste.

    LA TLPATHIE RETARDE

    Dans leur livre sur les Fantmes de vivants, les auteurs ont imagin une thorie pourexpliquer comment, sans avoir recours l'hypothse de la survivance, une apparition

    pourrait se produire trs peu de temps aprs la mort. Ils ont suppos que la transmissiontlpathique de l'agent se ferait aussitt avant, ou au moment mme de la mort, mais quel'impression dormirait l'tat latent dans l'esprit, du sujet, pour ne se rveiller que plustard, sous forme de vision pendant la veille, ou d'apparition dans le rve, ou enfin d'uneautre faon quelconque. C'est ce que l'on a nomm la priode latente ou la tlpathieretarde. Cette thorie peut s'appuyer sur quelques exemples exprimentaux, danslesquels les impressions transmises restent inconnues pendant un certain temps avant que

    le sujet en ait conscience. Il est bon d'observer aussi, pour justifier cette interprtationdes faits, que, dans un grand nombre de cas, l'intervalle de temps pendant lequell'impression reste latente, correspondait une priode d'activit du sensitif, dont l'espritet les sens taient fortement sollicits par d'autres objets. Il est tout naturel de supposerque, dans ces circonstances, les productions tlpathiques ne peuvent dpasser le seuil dela conscience que lorsqu'il survient un moment de silence ou de recueillement.

    Il ne faudrait pas donner celte hypothse plus d'importance que ne lui en attribuentses auteurs. Certains critiques ont t jusqu' vouloir expliquer tous les cas de cettefaon. Pour juger combien cette manire de procder est exagre, voici l'apprciation de

    M. Gurney sur ce point :Quoique les raisons d'admettre la thorie de la priode latente fussent srieuses, mes

    collgues et moi avions profondment cur de ne pas tre considrs comme voulantprsenter titre de dogme ce qui aujourd'hui peut tout au plus tre admis commehypothse, transitoire. C'est surtout dans les recherches psychiques qu'il est de la plushaute importance d'viter de telles erreurs et de tenir toujours l'esprit ouvert denouvelles interprtations des faits. Dans la question que nous tudions, il y a un certainnombre d'objections trs srieuses qui se prsentent, naturellement, contre cettehypothse qu'une impression tlpathique provenant d'un mourant peut ne venir la

    surface qu'aprs tre reste latente pendant un certain nombre d'heures. Les faitsexprimentaux que j'ai prsents comme analogues sont rares et mal dtermins ( C'estmoi qui souligne dans toute la citation. ), en outre la priode d'inconscience n'a t quede quelques secondes ou quelques minutes, et non des heures entires. Quoique, ainsique je l'ai signal, il y ait quelques exemples dans lesquels l'intervalle entre la mort et le

    phnomne peut tre expliqu par ce fait que l'esprit ou les sens du sujet taient absorbspar d'autres occupations qui ne laissaient aucune place la manifestation, il y a biend'autres cas ou il n'en est pas ainsi et o l'on ne rencontre AUCUNEPOSSIBILIT de faireconcider ce dlai avec un tat spcial du percipient. En somme, on peut considrer

    comme absolument srieuse l'hypothse que l'agent psychique ou physique n'entrerellement en action qu'un certain temps aprs la mort, et que le sujet reoit l'impressionau moment mme o il en a conscience, et non auparavant.

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    J'ai parl plus haut de cas dans lesquels l'intervalle entre la mort et les manifestationstait assez faible pour rendre acceptable la thorie de la priode latente. La rgle adoptedans les Fantmes des vivants tait que cet intervalle ne devait pas dpasser 12 heures.Cependant il s'y trouve un certain nombre de cas dans lesquels cet intervalle a t

    beaucoup plus considrable ; cependant au moment de la manifestation, le fait de la morttait encore inconnu du percipient. On ne peut rationnellement appliquer la thorie de la

    priode latente des cas o des semaines et mme des mois sparent le phnomne, quelqu'il soit, du moment de la mort, ce moment tant le dernier terme d'o on puisseadmettre que part l'impression tlpathique ordinaire qui frappe l'esprit du percipient (

    Nous donnons le nom d'ordinaires la classe tudie et reconnue dans les Fantmes desVivants. Mais si on admet que les dcds survivent, la possibilit de transmission de

    pense entre eux et ceux qui sont demeurs sur terre est une hypothse parfaitementacceptable. Comme notre thorie est purement psychique, et ne s'occupe en rien du

    physique, elle peut parfaitement s'appliquer ( quoique le nom ne soit peut-tre plus bienappropri ) aux conditions d'existence des dsincarns. Fantmes. vol. I, p. 512.).

    L'existence de cas de ce genre, en tant qu'elle est de nature prouver la ralitobjective des apparitions des morts, diminue la difficult que l'on prouve admettre queles apparitions et autres phnomnes qui suivent de fort prs la mort, ont une originediffrente de ceux qui ont concid avec elle ou l'ont immdiatement prcde. Nousn'aurons pas crer une classe toute nouvelle pour ces derniers cas ; il nous suffira de lesfaire passer d'une classe dans une autre ; classe, il est vrai, plus restreinte et moins biendlimite, mais suffisamment caractrise dj pour la lgitimer en attendant denouvelles preuves.

    L'hypothse de la priode latente ne peut donc lgitimement s'appliquer qu'aux cas

    dans lesquels l'apparition a suivi de trs prs la mort de l'agent. On doit observer encorequ'elle n'est rationnelle que lorsque le percipient a connu l'agent, car sans le rapportncessaire, on ne conoit plus du tout comment l'impression tlpathique pourrait agirsur un cerveau quelconque. Nous verrons, assez souvent, que l'apparition tait totalementtrangre au percipient, ce qui, dans ce cas, dtruit radicalement la supposition d'uneaction latente quelconque. Ceci dit, arrivons l'examen des faits.

    HALLUCINATION PROBABLEMENT VRIDIQUE

    Pour montrer quel genre d'apparition je nglige volontairement, comme ne portant pasen soi des caractres suffisamment nets pour tablir l'action d'une cause extrieure, jereproduis le rcit suivant, emprunt aux Proceedings ( Les exemples suivants sont puissdans la traduction franaise du travail de M. Gurney, complt par F. W. II. Myers,intitul : Mmoire sur les apparitions survenant peu de temps aprs la mort, paru dans lesannes 1900-1901 et 1901-1902, de la Revue scientifique et morale du Spiritisme,traduction que je dois l'obligeance de M. le docteur Dusart, auquel j'exprime toute magratitude pour son prcieux concours. ) :

    III. La communication du cas suivant est due l'obligeance de Miss Porter. Il estarriv une dame qui dsire garder l'anonyme.

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    8 aot 1885.

    Le 2 novembre 1876, je me rendis chez mon frre. Le voyage dura longtemps, de 8heures du matin 8 heures du soir, et je restai fort tard causer avec ma belle-sur. Iltait minuit quand je gagnai ma chambre. Je passai encore quelque temps ranger meseffets. Je m'aperus que j'avais laiss dans le vestibule un objet dont j'avais besoin et, nevoulant pas attendre jusqu'au lendemain pour rparer cet oubli, je descendis. La maison

    est grande et les couloirs sont longs. Comme ma chambre tait au troisime tage et quej'avais me rendre prs de l'entre, cela me prit un certain temps. A mon retour, aumoment o j'arrivais dans le corridor sur lequel s'ouvrait ma chambre, je vis une formequi se tenait au-del de ma chambre. Elle paraissait si vaporeuse que si une lumire avaitt place derrire elle, je l'aurais vue travers. Cette forme vaporeuse ressemblaitabsolument un de nos amis que nous savions tre parti pour l'Australie. Je m'arrtai etla regardai bien. Je me passai la main sur les yeux et, regardant de nouveau, je la visencore. Bientt elle sembla se dissiper, je ne sais comment. Je m'avanai alors et rentraidans ma chambre. Je fis la rflexion que j'tais trop fatigue et je me jetai sur mon lit

    pour me reposer.Le lendemain je racontai ma belle-sur ce que j'avais vu et elle se moqua de mon

    fantme.

    Trois semaines plus tard je rentrai chez moi. En arrivant, ma mre me montra dans unjournal un rcit disant que le corps de notre pauvre ami avait t rejet sur le rivage Orford-ness, et enterr comme cadavre inconnu, au moment mme o je vis son fantme.

    Nous tions ses seuls amis en Angleterre, mais je ne m'explique pas pourquoi il seprsenta moi. Une telle aventure ne charme personne. Ce que je puis vous assurer, c'estque je n'avais pas pens lui et que je n'en avais pas parl.

    Voici ce que m'critdit M. Gurney,le desservant de la paroisse de Orford, prs deWickham, Suffolk :

    23 janvier 1886.

    Monsieur, en rponse votre demande, je vous envoie la copie de l'inscriptionfunraire :

    A la mmoire de Frdric Gluyas Le Maistre, 2e officier de la barque Gauntlet, deLondres, n Jersey, Channel Islands, g de 24 ans et 6 mois, dont le corps fut trouv

    prs du port d'Orford-ness, le 22 octobre 1876. Sa mort est due une chute par-dessus lebord de la barque sus-nomme, dans les Dunes, le 27 septembre de la mme anne.

    JAMESLING.

    J'ai caus avec la percipiente, le 21 janvier 1886, et elle m'a dit qu'elle n'a jamais eud'autre hallucination que ce soit. C'est une personne calme et de sens pratique. E.GURNEY.

    La percipiente est, d'aprs M. Gurney, une femme sense, qui n'a jamais eu d'autrehallucination, et celle-ci se rapporte un ami dont elle ignorait la mort. Il existe

    probablement ici autre chose qu'un simple hasard entre cette vision, qui est unique, et le

    fait qu'elle se rapportait l'ami dcd au loin. Mais, rigoureusement, il se peut quel'hallucination ne soit due qu' une concidence accidentelle dtermine, par exemple, par

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    l'tat de fatigue de la percipiente, puisque l'apparition ne porte aucun signecaractristique de son dcs. Il faudra donc, dans les rcits suivants, chercher des

    preuves plus positives, pour nous assurer que l'action hallucinatoire est produite par unecause extrieure.

    Je pense que les narrations qui vont tre rapportes maintenant ne laisseront aucundoute cet gard. Ayant un trs grand nombre de faits citer pour toutes les classes de

    phnomnes, je suis oblig, mon grand regret, de me limiter dans le choix des exemplesqui se rfrent chaque catgorie ; mais on pourra vrifier, en se reportant auxrfrences indiques, que ces phnomnes sont assez frquents pour que nous ayons ledevoir d'en tenir le plus grand compte, d'autant mieux que chacun d'eux resteinexplicable, si l'on n'admet pas l'action persistante de l'esprit dsincarn de l'agent.D'ailleurs, je laisse la parole aux faits, ils ont une loquence significative.

    1 ET 2 - APPARITIONS PRSENTANT DES SIGNES PARTICULIERS,

    IGNORS DU VOYANT, MAIS EXACTS.

    Je rappelle que, dans la plupart des rcits qui suivent, la mort de la personne dontl'apparition reproduit les traits est ignore du percipient. Pour les rares exemples o levoyant connaissait la mort, des dtails spciaux permettent d'affirmer que le fantmen'est pas un pur produit de son imagination. Tel est l'exemple suivant, que je rsume( Proceedings, Partie XV, pp. 17 et 18. ) :

    L'APPARITION PORTE UNE GRATIGNURE A LA JOUE

    Un Mr G. D. Boston, demeurant en ce moment Saint-Louis, se trouvait dans soncabinet de travail, lorsqu'il vit le fantme de sa sur unique, morte depuis neuf ans.C'tait au milieu du jour, pendant qu'il crivait ; elle tait auprs de lui avec une telleapparence de vie, qu'il crut que c'tait rellement sa sur et l'appela par son nom.

    M. Boston avait pu scruter chaque dtail de son habillement et de sa figure, remarquerparticulirement une ligne ou gratignure d'un rouge brillant, sur le ct droit de lafigure. Cette vision l'avait impressionn ce point qu'il prit le premier train pour allerchez son pre et sa mre et leur dire ce qu'il avait vu. Son pre fut tent de tourner enridicule sa croyance quoi que ce soit de surnaturel, mais, en entendant mentionnerl'gratignure, la mre faillit s'vanouir, et lui dit les larmes aux yeux : C'est moi qui,aprs sa mort, ai fait par maladresse cette gratignure au visage, de ma trs chre fille,gratignure que j'avais soigneusement cache avec de la poudre ; n'ayant confi ce dtail me qui vive, personne ne pouvait le savoir.

    On ne peut attribuer une simple hallucination la vision du fantme par le frre de ladcde, prcisment cause de l'gratignure. Ce stigmate n'tait connu que de la mre,et une phrase du rapport semble indiquer que l'on ne croyait gure dans la famille unesurvie possible, puisque le pre raille son fils lorsque celui-ci lui raconte qu'il a vu unfantme. Il est donc impossible de supposer que la mre soit l'agent qui aurait, aprs neuf

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    ans, produit involontairement et inconsciemment celte hallucination si relle, si vivanteet si caractristique. Je pense qu'il est plus logique de supposer que c'est l'actiontlpathique de l'me de la jeune fille qu'il faut attribuer la vision, portant le signedistinctif qui devait servir son identification auprs de ses parents incrdules.

    Pourquoi cette apparition unique au bout de neuf annes ? La mre y vit l'annonce desa mort prochaine, qui survint, en effet, quelques semaines plus tard. Il existe d'autres

    cas, nous le constaterons, o la cause agissante tmoigne d'une intention biendtermine, ce qui enlve au phnomne jusqu' l'apparence d'tre purement fortuit.

    Dans d'autres exemples, le fantme, de diffrentes manires, indique quel a t songenre de mort. Nous en avons vu dj un exemple relatif au frre de M. Colt, tu l'assaut de Sbastopol (voir vol. I, p. 128). Je l'ai plac parmi les ddoublements devivants, parce que l'heure de la mort n'a pu tre connue avec certitude. Mais dans lesrcits qui suivent, ce sont bien des morts qui se manifestent, car il semble quel'hypothse de la priode latente n'ait pas intervenir, pour le premier, cause de larptition du phnomne, qui parat indiquer une action volontaire, persistante de l'agent,

    dsirant se faire reconnatre-

    LE FANTME TAIT RUISSELANT

    XXXVIII. (189) (Les Hall. Tlp. p. 130.) L'vque de Carlisle. (ContemporaryReview, janvier 1884.)

    Mon correspondant, un tudiant de Cambridge, avait arrt, il y a quelques annes,

    avec un de ses camarades d'tudes, le projet de se rencontrer Cambridge une certainepoque, pour travailler ensemble. Peu de temps avant l'poque de ce rendez-vous, moncorrespondant se trouvait dans le sud de l'Angleterre. Se rveillant une nuit, il voit ou ilcrut voir son ami assis au pied de son lit ; il fut surpris de ce spectacle, d'autant plus queson ami tait ruisselant d'eau. Il parla, mais l'apparition (car il semble que c'en ait tune) se contenta de secouer la tte et disparut. Cette apparition revint deux fois durant lanuit. Bientt aprs vint la nouvelle que peu de temps avant le moment o l'apparitionavait t vue par le jeune tudiant, son ami s'tait noy en se baignant.

    Ayant appris, disent les auteurs, que le correspondant de l'voque tait l'archidiacre

    Farler, nous nous adressmes ce dernier, qui nous crivit le 9 janvier 1884 :Pampisford Vicarage, Cambridge.

    La vision fut raconte le matin suivant djeuner, plusieurs jours avant de recevoir lanouvelle de la mort de mon ami. Je la racontai mon professeur John Kempe, safemme, sa famille. M. et Mme Kempe sont morts maintenant, mais il est probable queleur famille se souvient de la chose, bien que les enfants fussent jeunes ce moment-l.Je demeurais Long Ashton dans le comt de Somerset ; mon ami mourut dans le comtde Kent (C'est un lapsus : dans une autre lettre l'archidiacre Farler indique un village ducomt d'Essex comme l'endroit o son ami est mort. (Note des auteurs anglais) : comme

    je n'tais nullement effray de cette vision ce moment-l, j'en ai plutt parl commed'un rve singulier que comme d'une apparition.

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    Ma vision est du 2 ou 3 septembre 1878 (C'est une erreur. M. Farler avait d'abord crit1888, et en corrigeant il admis un 7 au lieu d'un 6. (Note des auteurs anglais), mais je n'ai

    pas ici mon mmorandum pour m'en assurer d'une manire absolue. Je revis encore lavision le 17 du mme mois. C'est la seule apparition que j'aie jamais vue, je n'ai jamaiseu aucune espce d'hallucination sensitive.

    G.P. FARLER.

    M. W. J. F. Kempe nous crit que l'archidiacre Farler lui a certainement parl de ce fait; mais il ne se rappelle pas exactement l'poque. Nous trouvons dans le registre des dcsque l'ami du narrateur s'est noy dans la rivire Crouch, le 2 septembre 1868.

    La supposition qu'une personne vivante quelconque aurait t l'agent est inadmissibledans ce cas. L'hypothse que l'me du jeune homme est venue avertir son ami,symboliquement, de son genre de mort, est celle qui parat la plus logique, carl'insistance mise par le fantme se montrer deux fois semble carter l'explication par la

    priode latente ; celle-ci pouvant tre admise la rigueur pour la premire vision, devient

    superflue pour la seconde.Voici deux autres faits, dans lesquels l'hallucination retarde ne peut plus tre mmesouponne, car, pour le premier exemple, le fantme tait totalement inconnu de lavoyante, qui ne l'a identifie que par suite d'une remarque curieuse sur la main del'apparition. Le voici :

    IL MANQUE UN DOIGT A L'APPARITION

    XXIV. De Miss Jessie Walker, Botanic View, Smithdown Lane, Liverpool (Revuescientifique et morale du Spiritisme, fvrier 1902, p. 489.)

    1884.

    Il y environ trois ans, j'avais, avec une de mes amies, lou un appartement dans lamaison d'une dame veuve. Nous y tions depuis huit mois, lorsque survint l'incidentsuivant :

    Un soir, nous tions restes lire beaucoup plus tard qu' l'ordinaire et ne nous tionsleves pour nous retirer que quelques minutes avant minuit. Nous montmes ensemble et

    j'tais de quelques marches en arrire de mon amie, lorsqu'en arrivant sur le palier dupremier tage, je sentis tout coup glisser derrire moi quelque chose qui venait d'unechambre inoccupe, situe sur la gauche de l'escalier. Pensant que cela pouvait tre uneffet de mon imagination, car la maison ne contenait en dehors de nous que la veuve etsa servante, qui occupaient un autre tage, je ne dis rien a mon amie, qui se dirigea verssa chambre situe droite, tandis que je me prcipitais dans la mienne, qui faisait face l'escalier.

    II me semblait sentir encore comme un grand fantme qui me suivait en se penchantau-dessus de moi. J'ouvris le bec de gaz, j'enflammai une allumette et me disposais

    l'approcher du bec, lorsque je sentis sur mon bras l'treinte puissante d'une main privede son doigt mdius. Sur cela, je poussai un grand cri qui attira mon amie, ainsi que la

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    veuve et sa jeune servante, qui vinrent s'enqurir de la cause de ma frayeur, et ces deuxdernires devinrent toutes ples en entendant mon rcit. La maison fut fouille de fonden comble, mais il fut impossible de dcouvrir quoi que ce ft.

    Quelques semaines s'coulrent et l'motion cause par cet incident s'tait dissipe,lorsque me trouvant par hasard une aprs-midi avec quelques amis, je leur en lis le rcit.Un gentleman de la socit me demanda si je n'avais jamais entendu faire la description

    ou vu le portrait-carte du dfunt mari de mon htesse. Sur ma rponse ngative, il fit laremarque assez curieuse que ce Monsieur tait de haute taille, lgrement courb et quilavait perdu le doigt mdian de la main droite. En rentrant, je demandai la bonne quitait dans la famille depuis son enfance, si ces dtails taient exacts. Elle me rponditque c'tait la vrit et qu'elle-mme, couchant une nuit dans cette mme chambre, s'taitsubitement veille en sentant que l'on pressait sur ses genoux. Ouvrant les yeux, elleavait reconnu son dfunt matre prs de son lit et s'tait vanouie cette vue. Depuis lors,elle n'osait plus entrer dans cette chambre une fois la nuit tombe.

    C'est tout ce que j'ai vu. Je dois ajouter que je ne suis nullement impressionnable ni

    superstitieuse : que je n'avais rien lu qui ft capable d'exciter mon imagination et que maseule proccupation, tandis que je montais l'escalier, tait de savoir si j'avais laiss maclef de montre au rez-de-chausse ou si elle tait au premier tage. Il y avait huit moisque je couchais dans cette chambre et je, n'avais, jusqu' ce jour, jamais rien prouvd'analogue,

    J. WALKER.

    Miss Walker ajoute, pour rpondre quelques questions :

    Je n'ai entendu parler du doigt absent du mari de mon htesse que quelque temps

    aprs l'incident et aprs avoir, ce moment, signal que la main que j'avais sentiemanquait d'un doigt. J'ai crit mon amie en la priant de vous faire part de ses souvenirssur cette affaire. Elle vint dans ma chambre quand je poussai un cri : elle tait prsentelorsque ce Monsieur dclara que le mari de notre htesse tait grand et qu'il avait perduun doigt. Elle entendit galement la servante confirmer cette particularit et raconter laterreur qu'elle avait prouve dans la mme chambre. Aussi je pense qu'elle pourraconfirmer toutes les circonstances signales dans mon rcit.

    Je n'ai jamais rien prouv de semblable, ni avant ni depuis. Je n'ai aucune tendance la superstition.

    La bonne s'est marie il y a deux ans et elle est partie. Il ne me serait donc pluspossible de rien obtenir de ce ct. Je n'aimerais gure interroger notre htesse et je nepense pas qu'elle consentirait raconter ce qui m'arriva. C'est une personne trs ge, quia t profondment impressionne au rcit que je fis : aussi je n'y ai plus fait aucuneallusion aprs ce premier soir. Vous devez suffisamment comprendre qu'il en soit ainsi.

    J.W.

    Dans les conditions ordinaires, dit M. Gurney, il ne doit pas tre trs facile dedistinguer si la main qui vous presse le bras est prive du doigt mdian. Cependant, dans

    le cas actuel, nous avons affaire une hallucination. Si l'on admet que cette hallucinationest provoque d'une faon quelconque par le dfunt, la sensation de l'absence d'un doigt

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    devra faire, pour ainsi dire, partie essentielle de l'impression hallucinatoire produite. Jedois ajouter que la date du dcs du mari de l'htesse reste inconnue, mais Miss Walkerm'en parle comme si cette mort devait remonter d plus d'une anne (En tous cas, la mortremontait au moins plus de huit mois, puisque les deux amies taient depuis ce temps

    pensionnaires dans cette maison, dont la propritaire tait dj veuve. (G. D.).

    J'ajoute ici un rcit spar de Miss Clara A. Spinck, Park Gte, Rotherham.

    28 mars 1884.

    Autant que je puis me le rappeler, voici ce qui se produisit : II y a trois ans, MissWalker et moi nous tions loges chez une dame veuve. Le soir en question, nous nousretirions pour nous coucher vers minuit et nous montions les escaliers dans l'obscurit.Miss Walker me prcdait immdiatement. Sa chambre tait en face de l'escalier ; il y enavait une gauche et j'occupais celle de droite. Comme elle passait devant la porte degauche entre-baille, elle dclara avoir la sensation d'une forme de haute taille, seglissant par la porte ouverte, la suivant de prs et se penchant vers elle de telle sorte

    qu'elle percevait nettement sa respiration. Son premier mouvement fut de se prcipiter dans sa chambre pour faire de lalumire, et tandis qu'elle trottait une allumette, elle sentit une main, laquelle manquaitle doigt mdian, saisir son bras avec une telle force, que, lorsqu'elle fut revenue de sonvanouissement, elle regarda si cette pression n'avait pas laiss de traces. En entendantses cris, je me prcipitai dans sa chambre et la trouvai tendue sur le parquet, en proie une crise de nerfs. Bientt les autres personnes de la maison arrivrent ; nous fmes

    profondment troubles et quoique je n'eusse rien vu ni ressenti, ce ne fut dsormaisqu'avec une vive apprhension que nous passions devant cette porte.

    Un fait trange noter, c'est que ce n'tait pas la premire fois qu'une pareille scned'effroi se produisait dans cette chambre, quoique notre htesse part se railler de cetteaffirmation.

    Peu de temps aprs cet incident, nous passions la soire chez un ami : au cours de laconversation, on vint raconter ce fait, et quand le rcit en fut termin, ce Monsieur fit laremarque que le mari dcd de notre htesse n'avait que trois doigts l'une de sesmains. Je vous laisse penser quelles furent notre consternation et notre horreur : pourmoi, je renonce vous en donner mme une faible ide. J'ai souvent manifest le dsird'avoir la clef de ce mystre et vous serais fort oblige si vous vouliez bien me donner

    votre opinion sur ce point, ds que cela vous sera possible. Je ne doute pas que mon amievous ait dit quel point elle en fut secoue : en ralit elle en resta souffrante de longsmois.

    Je mets ce cas parmi ceux o une seule personne a vu l'apparition, bien que la servanteait eu aussi une vision de son patron dcd, parce que, pour elle, on peut supposer unehallucination ordinaire, sans cause extrieure. Mais il va de soi qu'il n'en est plus demme pour miss Walker qui ne connaissait pas le dfunt ce qui supprime l'hypothsed'une action tlpathique retarde et qui a eu la sensation si nette de sa main mutile.videmment, le second fait est de nature faire admettre que la premire apparition

    pouvait tre relle, et nous avons l un exemple des apparitions dites locales, c'est--direde celles qui paraissent avoir une relation avec les lieux o le fantme a rsid de son

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    vivant. Dans ce cas, des personnes tout fait trangres, pourvu qu'elles soientaccessibles l'influence tlpathique, peuvent faire une description exacte del'apparition. Nous en verrons plus loin des exemples.

    La grande taille du fantme, le doigt du milieu qui manque, sont des dtailssignificatifs ; et comme ils reproduisent des particularits du dfunt patron, dans ce casencore, il est logique de supposer que c'est lui qui est l'auteur de l'hallucination vridique

    de miss Walker, puisque l'htesse ou la servante semblaient aussi tonnes que lapercipiente elle-mme.

    Terminons l'expos des types de cette classe par le rcit du colonel H., dans lequell'accumulation des dtails exacts ne laisse aucun doute sur la ralit de l'agent, qui ne

    peut tre que l'me de son ami.

    LE FANTME DE L'OFFICIER INDIQUE SON GENRE DE MORT

    IV. Du Colonel H. (personnellement connu de E. Gurney.)

    13 fvrier 1886.

    Je ne crois pas plus aux fantmes qu'aux manifestations spirites ou l'sotrismebouddhique. J'ai eu souvent l'occasion, que je recherchais toujours avec ardeur, decoucher dans les chambres bien connues ou du moins bien considres comme hantes.J'ai tout fait pour rencontrer des fantmes, des esprits, ou, si vous le prterez, des tres del'autre monde, mais, comme tant d'autres bonnes choses que l'on recherche dans la vie, cefut toujours en vain. Cependant, au moment o je m'y attendais le moins, j'ai reu une

    visite si remarquable par ses circonstances, si relle par sa nature, concordant si bienavec les vnements, que sur la demande de mes amis, je crois de mon devoir d'en fairele rcit par crit.

    Le narrateur raconte ensuite comment, il y a environ 23 ans, il fut amen contracterune troite amiti avec deux compagnons d'armes, G. P. et J. S. infrieurs en grade, etcomment ses relations avec G. P. continurent priodiquement jusqu' l'poque de la

    premire guerre du Transvaal, o G. P. fut envoy dans l'tat-Major. J. S. tait dj sur lethtre des hostilits. Tous deux taient monts en grade. Quant au narrateur, il avaitquitt le service depuis quelques annes.

    Le matin o il devait quitter Londres et s'embarquer pour le Cap, G. P. invita le colonel djeuner avec lui au club, et finalement ils se sparrent la porte du club.

    Adieu, mon vieil ami, lui dis-je, j'espre que nous nous reverrons.

    Oui, dit-il, nous nous reverrons .

    Je le vois encore devant moi, lgant et droit, avec ses yeux noirs et vifs, fixsprofondment sur les miens. Une poigne de main, au moment o le cab l'emportait, et ildisparut.

    La guerre du Transvaal tait dans son plein. Une nuit, aprs avoir lu dans labibliothque du club, je me retirai assez tard. Je restai encore environ une heure avant deme mettre au lit. Il y avait environ trois heures que je dormais, lorsque je m'veillai en

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    sursaut. Les premires lueurs de l'aurore se glissaient par les fentres et venaient tombernettement sur la cantine contenant mes effets militaires et qui m'avait suivi partout dansle cours de mon service. Entre ce coffre et mon lit je vis, debout, une forme que malgrson costume inusit, du moins pour moi, et une paisse barbe noire, je reconnusimmdiatement pour celle de mon vieux compagnon d'armes. Il portait le costume khakien usage pour les officiers servant en Orient. Une courroie de cuir brun qui avait d

    porter son verre de service en campagne, passait en bandoulire sur sa poitrine. Unceinturon de cuir, galement brun, supportait gauche son pe et droite l'tui de sonrevolver. Sur la tte, il portait le casque en moelle. Je remarquai instantanment toutesces particularits, au moment o je fus arrach de mon sommeil, et je me mis sur monsant en le regardant. Sa figure tait ple, mais ses yeux noirs avaient autant d'clat quedix-huit mois auparavant ; ils me regardaient avec la mme expression qui m'avaitfrapp, lorsqu'il me dit adieu en montant en voiture.

    Profondment troubl, je crus d'abord que nous tions encore camps ensemble C...,en Irlande ou tout autre part, et pensant que j'tais dans ma chambre la caserne, je lui

    dis ; Allons, P..., suis-je en retard pour la parade ? P... me regarda fixement et me dit :

    Je suis tu !

    Toi ! m'criai-je, Bon Dieu ! Quand et comment ?

    A travers les poumons rpliqua P... et en disant cela, il leva lentement sa maindroite vers sa poitrine jusqu' ce que ses doigts fussent arrivs au niveau du poumondroit, o il s'arrta.

    Que faisiez-vous donc ? lui demandai-je.

    Le Gnral me commanda de marcher , rpondit-il. La main droite, quittant alors lapoitrine, s'leva au niveau du front, montrant la fentre au-dessus de ma tte etinstantanment tout disparut. Je me frottai les yeux. pour m'assurer que je ne rvais pas etsautai bas de mon lit. Il tait alors 4 h. 10 du matin la pendule place sur machemine.

    Je restai convaincu que mon vieil ami n'tait plus (Remarquons que le colonel H...,comme tous les incrdules, niait la possibilit des apparitions ; mais aussitt qu'il en voitune, il ne discute pas si c'est une hallucination, tout de suite le sentiment de la ralit le

    pntre et il avoue qu'il est rest convaincu que son vieil ami n'tait plus : (G. D.), etque je venais de voir une apparition. Mais comment m'expliquer la voix que j'avaisentendue, ainsi que les rponses nettes et prcises ? Ce qui est incontestable, c'est que jevenais de voir un esprit, un tre, qui n'avait ni chair, ni sang et que j'ai caus avec lui.Mais comment coordonner des impossibilits aussi videntes ? Cette pense metourmentait et j'avais hte devoir arriver l'heure o le club serait ouvert et o j'auraisquelque chance d'apprendre par les journaux, quelques nouvelles arrivant du thtre de laguerre au Transvaal. Je passai ainsi quelques heures en pleine fivre. Ce matin-l,

    j'arrivai le premier au club et me jetai avidement sur les journaux. Mais nulle part lamoindre nouvelle de la guerre !

    Je restai agit toute la journe et racontai le fait avec toutes ses circonstances unancien compagnon d'armes, le colonel W***. Il fut aussi frapp que moi par le rcit de

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    cette apparition. Le lendemain matin j'arrivai encore le premier au club et je parcourusfivreusement la premier journal que je trouvai sous ma main. Cette fois, mon inquitecuriosit fut tout fait satisfaite. Mes yeux tombrent en effet tout d'abord sur un courtrcit de la bataille de Lang's Neck et sur la liste des tus, en tte desquels je trouvai lenom de mon pauvre ami G. P... Je remarquai l'heure laquelle la bataille avait eu lieu, jela comparai avec l'heure laquelle j'avais t veill par l'apparition et je trouvai une

    concidence presque complte. Je suis donc autoris, par ce simple fait, conclure que lemoment o le fantme m'apparut Londres tait peu prs celui o la balle avaitaccompli son uvre au Transvaal.

    Deux questions se posaient maintenant devant mon esprit : Premirement, le pauvreP**" portait-il cet uniforme particulier, au moment de sa mort, et avait-il toute sa barbeque je ne lui avais jamais connue ? Secondement, trouva-t-il la mort comme l'apparitionl'indiqua, c'est--dire par une balle travers le poumon droit ? Six mois plus tard, j'eusl'occasion de mettre les premiers faits hors de doute, grce un officier qui assistait la

    bataille de Lang's Neck, et qui avait t renvoy en convalescence. Il confirma chaque

    dtail.Le second fait, non moins exceptionnel, me fut confirm par J. S. lui-mme, plus d'un

    an aprs les vnements, lorsqu'il revint du Cap aprs la fin de la guerre. Lorsque je luidemandai s'il savait en quelle partie du corps notre pauvre camarade P*** avait tfrapp, il me rpondit : exactement ici , et sa main traversa sa poitrine, juste commel'avait fait celle de l'apparition, et se fixa tout fait au mme point du poumon droit.

    Je vous envoie tout ceci, sans aucun commentaire ni arrangement, exactement commechaque chose se prsenta.

    ( Nous avons lu dans la Gazette de Londres, que la bataille dans laquelle le major P***fut tu, commena (d'aprs la dpche du gnral Elley) 9 h. 30 du matin, le 28 janvier1881. Le major P*** fut probablement tu entre 11 et 12 heures du matin, ce quicorrespond 9 ou 10 heures Londres, la diffrence de temps entre les deux points tantd'environ deux heures. J'appelai l'attention du colonel H*** sur ce point, et surl'impossibilit que laurore comment 4 heures cette poque de l'anne, et voici cequ'il me rpondit ) :

    20 fvrier 1886.

    Ce doit tre 7 h. 10 et non 4 h. 10. Aujourd'hui que j'cris aprs plusieurs annes, mon

    souvenir me donnait 4 heures, mais je puis me tromper.Tout ce que je sais, c'est qu' ce moment je comparai l'heure avec celle laquelle la

    bataille avait t livre, et que j'acquis la conviction que ces heures correspondaientpratiquement.

    C'tait un matin d'hiver. Tous les stores taient baisss aux fentres. En cette saison,l'aurore frappant les stores 7 heures du matin, n'est pas plus claire qu' 4 heures dansles mois d't.

    C'est peut-tre l la cause de mon erreur. Peut-tre aussi la pendule tait-elle arrte 4

    heures depuis un ou deux jours, sans que je l'aie remarqu.La premire mention de la bataille de Lang's Neck parut dans le Tmes, le Telegraph et

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    le Daily News du samedi 29 janvier 1881. On n'y trouve aucune liste de dcs. Lapremire annonce de la mort du major Poole, se trouve dans une dpche partie duTransvaal le 28 janvier, et reue par le secrtaire d'Etat la Guerre, Londres, le 29. Tu, le major Poole, de l'artillerie royale . Elle fut publie dans lObserver du dimanche30 janvier, et dans les trois journaux cits plus haut, le lundi 31. (E. G.)

    Il semble impossible de fixer d'une faon rigoureuse la date de l'apparition, mais M.

    Gurney qui discuta la question avec le colonel H***, en conclut qu'elle se produisitvraisemblablement aprs la mort, et dans tous les cas avant que la mort ft connue enAngleterre. F. W. H. M.

    Si l'on compare le rcit du colonel H... et les dates fournies par la note de E. Gurney,on voit que le colonel ne connut la liste des tus que le lendemain de l'apparition. Or, le

    premier journal qui publia cette liste, fut lObserver du dimanche 3o. La vision eut donclieu le samedi matin, tandis que la bataille fut livre le vendredi 28, c'est--dire au moinsvingt heures avant l'apparition. C'est donc bien rellement un mort qui produitl'apparition. La concordance absolue des dtails concernant la blessure, le costume, le

    port de la barbe, exclue l'hypothse que l'imagination du colonel aurait cre cettehallucination, qui ne peut non plus tre attribue l'action tlpathique d'aucune

    personne vivante.

    Des faits de cette nature sont absolument inexplicables par toute thorie qui ne feraitpas intervenir l'me elle-mme comme cause du phnomne. Le fantme parle ; ilindique le point de la poitrine o l'a atteint le coup mortel. Une image tlpathique,mme relle, serait inerte, elle ne rpondrait pas aux interrogations du colonel. Que celteconversation ait lieu, comme la vision, au moyen d'une action mentale exerce parl'esprit survivant, il n'en est pas moins vrai que la prsence de celui-ci est indispensable,

    car nul tre humain ne pourrait le remplacer. C'est une preuve de la survie et elle estd'une valeur de premier ordre, le tmoignage manant d'un homme froid, sens, qui necroyait nullement la possibilit d'une action supra terrestre quelconque.

    Les cas que nous venons de citer ne peuvent videmment pas se comprendre par lathorie de l'hallucination pure et simple : parce que les voyants sont dans un tat normal ;qu'ils n'ont jamais eu d'autre vision et que les dtails de costume, de stigmates, de

    blessures, etc., sont conformes ce qui a exist sur le corps matriel de l'individu quiapparat, alors qu'il tait encore vivant. L'hypothse de la priode latente nes'appliquerait qu' un seul cas, celui de l'archidiacre Farler, mais comme elle est fausse

    pour les autres exemples cits, il me parat plus logique d'attribuer le fait larapparition de l'me, puisqu'elle se manifeste diffrentes reprises, avec des apparencesvariables. Nous verrons d'autres exemples de cette action ritre du moi dsincarn,montrant qu'il s'intresse encore aux tres et aux choses d'ici-bas, jouant parfois un rletutlaire, ce qui tablit que l'apparition n'est pas une image inerte, dpourvue de toutcontenu intellectuel. Une autre consquence qui rsulte fatalement des manifestations del'me, des annes aprs qu'elle a quitt la terre, telle que l'apparition de la sur de M.Boston, c'est qu'elle continue de vivre, contrairement aux affirmations de Dassier ( VoirDassier, l'Humanit posthume. ) et de certains auteurs qui n'ont voulu voir dans ces

    manifestations posthumes que les derniers efforts d'une personnalit fluidique en voie dedissolution (MAETERLINCK, le Problme de l'Immortalit, dansla revue belge Ante.)

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    Il ne faudrait pas dduire des remarques prcdentes qu'une apparition est toujours unsigne providentiel qui doit avoir pour le voyant des consquences personnelles. Ce seraitune erreur, car fort souvent le fantme est inconnu du percipient, ne se rattache ni de prsni de loin la vie de celui-ci, et son identit ne peut tre tablie que plus tard, par des

    personnes qui l'ont frquent de son vivant. Il semble parfois que le dcd est attach,en quelque manire, aux lieux o il a vcu jadis, et il parait indiffrent aux incidents

    actuels de la vie terrestre, poursuivant une espce d'existence somnambulique, sans butapprciable. Cette apparence d'automatisme a fait supposer des critiques qu'on n'auraitpas affaire une personnalit survivante, mais qu'il s'agirait d'une sorte de tableaufluidique, une manire de clich astral reproduisant une scne passe, et perceptibleseulement pour des individus capables d'tre impressionns par ces vibrations

    particulires.

    Nous allons tudier ces faits et rechercher jusqu' quel point ces hypothses sontacceptables. En tout cas, nous ne sommes plus en prsence d'hallucinations, car il estinvraisemblable que le hasard suscite un sujet une cration mentale purement

    imaginaire, qui serait, malgr cela, la reproduction fidle du portrait d'un homme ayantvcu au mme endroit. Quelle que soit la cause suppose, elle est relle ; elle correspond quelque chose d'effectif. C'est ce qui va ressortir des exemples suivants.

    3 L'APPARITION EST INCONNUE DU VOYANT, IL EN FAIT CEPENDANTUNE DESCRIPTION QUI PERMET DE L'IDENTIFIER.

    LE FANTME EST RECONNU SUR UNE PHOTOGRAPHIE

    V. De M. John E. Husbands, de Melbourne House, Town Hall Square, Grimsby.

    Cher Monsieur, voici tout simplement les faits. Je dormais dans un htel de Madre, enjanvier 1885. Il faisait un brillant clair de lune. Les fentres taient ouvertes et les storesrelevs. J'eus la sensation que quelqu'un tait dans ma chambre. J'ouvris les yeux et je visun jeune homme de 25 ans environ, vtu de flanelle, se tenant debout prs de mon lit, etmontrant, avec l'index de la main droite, l'endroit o j'tais couch.

    Je fus quelques secondes avant d'tre bien convaincu que quelqu'un tait rellement l.

    Je me mis alors sur mon sant et je fixai mes regards sur lui. Je distinguai si bien tous sestraits, que je le reconnus dans une photographie que l'on me montra quelques jours plustard.

    Je lui demandai ce qu'il voulait ; il ne me rpondit pas, mais ses yeux et ses gestesm'indiquaient que j'occupais sa place.

    Comme il ne rpondait pas, je lui lanai un coup de poing tandis que j'tais assis, maisje ne l'atteignis pas.

    Tandis que je me disposais sauter bas du lit, il disparut doucement par la porte,

    reste ferme, en tenant constamment ses yeux fixs sur moi.Je m'informai et l'on m'apprit que ce jeune homme qui m'tait apparu tait mort dans la

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    chambre que j'occupais.

    Si vous dsirez de plus amples dtails, je serai heureux de vous les fournir, dans le caso cela vous intresserait.

    JOHN E. HUSBANDS.

    Les lettres suivantes sont de Miss Falkner, de Church-Terrace-Wisbech, qui rsidait

    l'htel lorsque se passrent les faits ci-dessus.8 octobre 1886.

    Le fantme que vit M. Husbands pendant son sjour Madre, tait celui d'un jeunehomme qui mourut subitement quelques mois auparavant dans la chambre occupeensuite par M. Husbands. Ce qui mrite d'tre signal, c'est que Husbands n'avait jamaisentendu parler de lui ni de sa mort. Il me raconta la scne, le matin mme o il vitl'apparition, et je reconnus ce jeune homme la description qu'il en fit. Je fus vivementfrappe de ce fait, mais je n'en tmoignais rien, ni lui ni d'autres. J'attendis que M.Husbands et fait le mme rcit mon frre. Nous le quittmes alors en disant tousdeux : II a vu M. D...

    II n'en fut plus question de quelque temps jusqu' ce que je prsentasse unephotographie M. Husbands.

    II dit aussitt : C'est le jeune homme qui m'est apparu l'autre nuit, mais il tait vtuautrement. Il dcrivit alors le costume qu'il portait ordinairement et qui tait la tenue decrochet ou de tennis, ferme au cou par un nud marin. Je dois ajouter que M. Husbandsest un homme froid et le dernier que l'on pourrait souponner de voir des esprits.

    K.FALKNER.

    26 octobre 1886.

    Je vous adresse la photographie et un extrait d'une lettre de ma belle-sur, que j'aireue ce matin et qui confirme mon rcit. C'est le 3 ou le 4 fvrier 1883 que M. Husbandsvit l'apparition.

    Les autres personnes qui ont occup la chambre, n'ont jamais fait mention d'aucuneapparition, d'o je crois pouvoir conclure que personne autre n'en a vu.

    K. FALKNER.

    Voici la copie du passage envoy par Mr. Falkner : Vous verrez au dos de laphotographie de M. du F..., la date de son dcs, 29 janvier 1884 (C'est donc un an aprssa mort, que le fantme du jeune homme s'est montr, vivant et agissant, M. Husbands.(G. D.) ; je vous rappellerai que le Motta Marques occupa cette chambre de fvrier maiou juin de la mme anne, et le major Money jusqu'au commencement de la saison de1885. M. Husbands a d prendre cette chambre le 2 fvrier 1885.

    Tout ceci est bien prsent dans ma mmoire et je me rappelle fort bien qu'il m'aracont l'incident, lorsqu'il vint voir mon baby.

    J'ai reu de M. Husbands et de M. Falkner, dit M. Gurney, un rcit complet fait de vive

    voix. Tous deux sont d'un esprit essentiellement positif et aussi loign que possible detoute tendance vers l'amour du merveilleux. Il n'y avait, ni dans cette varit de faits, ni

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    dans aucune autre catgorie de faits anormaux, rien qui ft de nature les intresser.Autant que j'ai pu en juger, la faon de voir de M. Husbands est absolument correcte et ilserait bien la dernire personne que je puisse souponner de disposition exagrer ou altrer la valeur de tout ce qui peut lui arriver. Comme on a pu le voir, le rcit qu'il fit desa vision prcda toute notion de sa part au sujet de la mort qui avait eu lieu dans sachambre. A aucune autre poque il neut d'hallucination des sens.

    Il parat vident, dans ce cas, que l'on n'est pas en prsence d'une simple image, carl'apparition dsigne le lit du doigt, elle se dplace, et comme la porte tait ferme, on ne

    peut supposer que quelqu'un s'est introduit dans la chambre de M. Husbands. Cependantsa vision est si nette que, malgr le costume diffrent, il reconnat le fantme qu'il a vu.Pas non plus d'autosuggestion, puisqu'il ignorait le dcs du jeune homme remontantdj plus d'une anne. Qui donc, dans ces conditions, parmi les vivants, aurait tl'agent tlpathique ?

    Le cas suivant est du type de ceux o une influence locale s'exerce et dont j'ai parlplus haut ; il est remarquable par les nombreuses rptitions des phnomnes observs

    par le percipient. Il est spcialement dconcertant. Il suggre bien moins l'ide dequelque chose se rapportant la croyance populaire sur des maisons hantes ou l'affection persistante d'une personne dcde pour un lieu spcial, que celle d'une simpleimage imprime, nous ne savons comment ni en quelle partie de l'organisme physiqued'une personne ou de la chambre, et se rvlant de temps autre ceux qui sont dousd'une forme de sensibilit qui les prdispose subir cette impression.

    LA VIEILLE FEMME COUCHE

    VI. De M. D. M. Tyre, 137, Saint-Andrew's Road, Pollokshields, Glasgow.

    9 octobre 1885.

    Dans le cours de l't de 1874, ma sur et moi, nous allmes demeurer pendant nosjours de vacances, avec un jardinier et sa femme, dans une maison btie tout au hautd'une colline d'o l'on jouissait d'une des plus belles vues sur le Dumbartonshire, juste la limite des Highlands. C'tait vraiment un dlicieux sjour, loign de toute granderoute. Nous n'prouvions jamais le moindre ennui et nous fmes si enchants de notre

    choix que nous nous dcidmes louer la maison pour trois ans. C'est ici que jecommence mon rcit. Comme nous avions des occupations en ville, nous ne pouvionsnous rendre tous la fois Glen M... Mes deux surs et moi nous fmes donc envoysau mois de mai, pour prparer la maison, arranger le jardin, etc., etc., en vue des

    prochaines vacances, afin que nous puissions alors nous y rendre tous. Nous avionsbeaucoup de besogne, et comme le village le plus proche tait distant d'au moins cinqmilles, et nos plus proches voisins, les habitants du port, plus d'un mille, nous tions

    parfaitement, tranquilles et tout fait rduits nos seules ressources.

    Un jour, ma sur ane dut aller au village pour une course quelconque. Comme le soir

    arrivait, je me rendis sa rencontre, laissant ma jeune sur L... toute seule. Nousrevenions vers six heures du soir, lorsque nous rencontrmes au pied de la colline notresur L..., en proie une vive motion. Elle nous dit qu'une vieille femme s'tait installe

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    dans la cuisine et qu'elle s'tait couche dans le lit. Nous lui demandmes si elle savaitquelle tait cette vieille. Elle nous dit que non et qu'elle tait tendue tout habille sur lelit, que c'tait sans doute une bohmienne et qu'elle n'oserait pas rentrer sans nous. Nousrentrmes la maison avec L... Cette jeune sur, ds qu'elle fut entre, nous dit, en

    pntrant dans la cuisine et en nous montrant le lit : La voici ! Elle attendait que noustirions cette trangre de son sommeil, pour lui demander ce qu'elle voulait. Ma sur et

    moi, nous regardons dans le lit ; les couvertures sont plates et vides, et lorsque nous luidisons qu'il n'y a rien l, elle manifeste la plus profonde surprise en reprenant : Maisvoyez donc! Pourquoi cette vieille femme est-elle couche toute vtue et la tte, tourne,vers la fentre ? Pour nous, nous ne voyons toujours rien. Alors seulement ellecommence souponner qu'elle voit quelque chose qui n'est pas naturel pour les autres ;elle s'effraye et nous l'entranons dans une autre chambre pour essayer de la calmer, carelle tremble de tous ses membres. Que ce fut un fantme, aucun de nous n'en eut l'ideun seul instant, et l'on se hta de couper du bois et de faire du feu pour prparer le repasdu soir. L'ide que quelqu'un avait pu se trouver dans le lit nous paraissait ridicule ; aussifut-elle attribue un cart d'imagination, et le train de vie ordinaire reprit pendant deux

    jours dans la maison.

    Le troisime jour, dans l'aprs-midi, comme il faisait froid et que le temps taitpluvieux, nous tions assis dans la cuisine autour du feu. Tout coup L... s'meut ens'criant : Voil de nouveau la vieille femme et elle est couche comme la premirefois. L... nous sembla beaucoup moins effraye cette fois et, sur notre demande, ellenous fit le portrait dtaill de l'apparition. Tenant les yeux fixs vers le lit et dessinant dugeste tout ce qu'elle dcrivait, elle nous expliqua que la vieille n'tait pas couche dans lelit, mais tendue tout habille au-dessus des couvertures et les jambes replies, comme sielle avait froid. Sa figure tait tourne vers le mur et elle portait ce que dans lesHighlands on appelle son backet mutch, c'est--dire un bonnet blanc comme les vieillesfemmes seules en portent encore. Elle portait une ruche autour du front et se prsentaitcomme ceci : ( Ici se trouve un dessin de profil ). Elle portait une jaquette en drap decouleur sombre et un chle tait enroul autour de ses paules. Telle est la descriptionqu'elle nous en fit : elle ne pouvait apercevoir ses traits, mais la main droite serranttroitement le bras gauche, elle put constater que cette main tait jaune et maigre, ridecomme les mains des vieillards qui ont toujours pein pendant leur vie.

    Nous restmes longtemps les yeux fixs sur le lit, demandant des explicationscomplmentaires L..., qui tait seule la voir.

    Elle reparut trs souvent, tel point que l'on s'y habitua et que nous en parlions entrenous, en la dsignant sous le nom de la vieille femme de L...

    Le milieu de l't tant arriv, tout le reste de la famille vint de la ville et c'est alorsseulement que nous entrmes en relations suivies avec nos voisins et deux ou troisfamilles du port. Un jour ma sur ane entama ce sujet devant une dame P..., notre plus

    proche voisine, et lorsqu'elle eut fait une description dtaille de l'apparition, Mme P...,fut prs de s'vanouir et nous dit que ce fait rpondait une chose qui n'tait que troprelle. La description tait exactement celle de la premire femme de l'homme qui avait

    habit la maison avant nous et qui avait agi vis--vis d'elle avec une vritable cruaut, ce point que la malheureuse ne s'tait pas releve des dernires brutalits qu'il lui avait

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    fait subir. Voici en deux mots le rsum de l'histoire que nous conta Mme P...

    Malcom, l'habitant en question, et sa femme Kate ( la vieille femme de L...) vivaientcomme chien et chat. Elle travaillait rudement et lui s'enivrait chaque fois qu'il le

    pouvait. Un jour, ils se rendirent au march avec de la volaille et des porcs. En revenantil acheta un demi-gallon de whisky. Il le porta un certain temps, puis se trouvant fatigu,il le lui imposa. Comme il s'arrtait souvent en route, il fut facile la femme d'arriver

    avant lui et lorsqu'il rentra plus tard, il l'accusa d'avoir bu le contenu du flacon. Il la battitavec une telle violence, qu'il s'en effraya bientt et vint chez Mme P... en lui disant quesa femme tait trs malade. Mme P... se rendit chez eux et trouva Kate tendue sur le lit,exactement dans le costume et la position dcrits par L..., tenant la figure tourne vers lemur afin qu'on ne pt pas voir les traces des coups qu'elle avait reus de son mari.

    Le rcit ci-dessus est un rsum aussi exact que possible des faits qu'avec le secours dema sur J... j'ai pu me rappeler.

    Ma sur L... est morte, mais nous tions souvent revenus dans cette maison, qui nous

    attirait par le charme des souvenirs qu'elle rveillait en nous.D. M. TYRE.

    Les faits de psychomtrie, c'est--dire la description de scnes passes faite par unsensitif au moyen d'un objet quelconque ayant t contemporain de l'vnement, sontaujourd'hui assez nombreux pour que l'on tienne compte de l'hypothse que, d'unemanire encore inconnue, le tableau d'un vnement antrieur soit conserv par le milieuambiant. Il n'est donc pas impossible que ce ft la scne de la dernire heure de la vieillefemme que Mlle L... percevait, le jour o elle tait dans une disposition physiologiquefavorable la rception de ces impressions.

    D'autre part, nous savons par les communications spirites que l'esprit des tres encorepeu volus reste longtemps dans le trouble aprs la mort, et que les dernires pensespeuvent donner lieu un tat de monodisme persistant, de sorte que la jeune fille auraitperu non un clich astral , mais la pense de la vieille femme, restant fixe sur letableau de ses derniers instants terrestres. Aucun document ne nous permet de nous

    prononcer d'une manire dfinitive entre ces deux hypothses, qui sont galementvraisemblables ( Pour l'tude du monodisme, voir l'ouvrage du baron Carl du Prel : laMagie, science naturelle, o cette question est fort bien traite.).

    Voici un cas qui nous ramne aux visions ordinaires, mais que sa longueur m'obliged'abrger, en donnant simplement les passages essentiels,

    LE DOCTEUR QUI REVIENT

    Mme Bacchus, demeurant Sherbourne Villa, Leamington, crit en aot 1886 laSocit qu'avec son mari ils avaient lou le samedi 18, ou plutt le 24 octobre 1868, pourquelque jours, un appartement dans une maison meuble, York-Terrace Cheltenham,afin de se trouver prs de M. Georges Copeland, beau-frre du mari de Mme Bacchus.

    Une madame R..., demeurant dans la mme maison de York-Terrace, avec sa fille, tait

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    malade, mais on dit Mme Bacchus que son indisposition n'tait pas srieuse et nemettait pas sa vie en danger. Dans le cours de la soire, en causant avec M. Copeland,celui-ci dit qu'il savait qui tait Mme R... C'tait la veuve d'un mdecin qui avait exerc Cheltenham. Le dimanche matin, le mari de Mme Bacchus lui apprit que Mme R... taitmorte cette nuit-l dans un fauteuil, ce qui effraya Mme Bacchus, qui voulut s'en aller ;mais, sur les observations de son mari qui lui fit remarquer que ce ne serait ni convenable

    ni bienveillant de dmnager, il fut dcid qu'ils resteraient. Voici maintenant le rcit deMme B... :

    Je passai ma journe avec mon beau-frre et mes nices, et ne rentrai que juste pourme coucher. Je m'endormis rapidement selon mon habitude, et je m'veillai vers le milieude la nuit, autant que je pus m'en rendre compte, sans avoir t effraye par aucun bruit,ni par une cause quelconque. Je vis distinctement, au pied du lit, un vieux monsieur, lafigure ronde et rubiconde, souriant, le chapeau la main, vtu d'une veste, en drap bleude forme ancienne avec des boutons de cuivre, un gilet de couleur claire et des culottes.Plus je le considrais, plus chaque dtail de ses traits et de ses vtements devenait net et

    prcis. Je n'prouvai aucune crainte et fermai les yeux pendant quelques instants.Lorsque je les rouvris, le vieux monsieur avait disparu. Au bout d'un certain temps, jeparvins me rendormir et, le matin, tandis que je m'habillais, je pris la rsolution de nerien dire personne avant d'avoir vu une de mes nices, et de lui avoir demand si ladescription du vieux monsieur ne rpondait pas au portrait du docteur R..., quoique cetteide pt paratre absurde.

    Je rencontrai ma nice, Marie Copeland, ( aujourd'hui Mme Brandling ), au moment oelle sortait du temple et je lui dis : Est-ce que le docteur R... tait un vieux gentlemande telle et telle sorte ? et je lui dcrivis ce que j'avais vu. Elle s'arrta net, en

    manifestant son tonnement : Qui donc a pu vous dire tout cela, ma tante ? Nous avonstoujours dit qu'il ressemblait bien plus un fermier de province qu' un docteur, et qu'onne pouvait comprendre comment un homme si commun pouvait avoir des filles aussigentilles.

    Tel est le rcit exact de ce que j'ai vu. Je suis absolument certaine que j'aurais reconnuce vieux monsieur si je l'avais revu, car ses traits sont encore aussi prsents mammoire, lorsque je pense lui, que lorsque j'crivis aussitt aprs Mlle de Lys rentreen France et que je lui fis un rcit dtaill. Quelques annes plus tard, je lui racontai cesmmes faits de vive voix et elle me dit que mon rcit reproduisait exactement tous les

    dtails de ma lettre, sans la moindre variation. Mes deux nices vivent encore et peuventrpter tout ce que je leur dis alors. II m'est impossible d'y rien comprendre : la vieilledame morte tait dans la chambre situe exactement au-dessous de celle o j'taiscouche. Ce qui m'a le plus tonne dans tout cela, c'est que j'ai t si peu effraye, que

    j'ai pu me rendormir immdiatement aprs et je n'ai voulu troubler personne. M.Bacchus crit de son ct :

    Leamington, 27 septembre 1886.

    J'ai lu le rcit fait par ma femme de ce qui s'est pass Cheltenham, lorsque nous yavons sjourn en octobre 1868. C'est exactement ce qu'elle me raconta sur le moment

    mme ; je me rappelle parfaitement tous ces faits et ce qu'elle dit ma nice dans lamatine.

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    HENRIBACCHUS.

    Jamais Mme Bacchus n'a eu d'autre vision. Elle n'avait jamais vu de portrait de cedocteur. Les Proceedings renferment deux lettres. crites par les nices de Mme B...,Mme Catherine Berkeley et Mary E. Brandling. filles de M. Copeland, qui confirment

    qu'elles ont entendu le rcit de l'apparition fait par Mme Bacchus, et que c'est elles qui,par la description du fantme, ont reconnu l'apparition du docteur B... Celui-ci tait morttrois ans auparavant, comme une notice du Times a permis de l'tablir.

    Dans ce cas, on peut supposer assez justement que l'me du docteur est venue proposde la mort de sa femme et que c'est occasionnellement qu'il a t visible pour MmeBacchus. La description exacte de son costume excentrique et de sa figure originale nelaisse planer aucun soupon sur son identit. Cette apparition parat aussi vivante que la

    prcdente semblait inanime. Ce sont des contrastes qu'il ne faut pas perdre de vue,lorsque l'on veut tablir une thorie gnrale.

    Le rapport suivant nous fait assister encore la vision d'un fantme, que la descriptionde la percipiente a permis ensuite de reconnatre.

    APPARITION DE L'ANCIENNE PROPRITAIRE DE L'HTEL

    Cas XXV (Revue scientifique et morale du Spiritisme, fvrier 1902, p. 492. ).De MmeClerke, 68, Redcliffe-Square, S. W.

    1884.

    A l'automne de 1872, j'tais Sorrente avec mes deux filles et je m'tais installe pourplusieurs mois l'htel Columella, situ sur la grande route un demi-mille de la ville.Les diverses pices de mon appartement consistaient en un grand salon, une antichambreet trois chambres coucher, disposes en forme d'U, dont les deux extrmits s'ouvraientsur une grande terrasse. L'htel tait tenu par deux hommes, Raffaelle et Angelo, et leservice des chambres tait fait par leurs femmes ; cette organisation donnait toutesatisfaction aux pensionnaires.

    Le soir en question, nous avions quitt la salle manger, pousses par le besoin de

    respirer l'air frais et de jouir de la vue magnifique aprs une journe de chaleuraccablante.

    Au bout de quelques instants, je retournai dans ma chambre coucher pour y chercherun bougeoir et un chle, et je m'y rendais d'autant plus contre-cur, qu'aprs avoirannonc mon intention de le faire, je m'attardais sans aucune raison mettre ce projet excution. Je passai par l'antichambre, puis je traversai le grand salon dont les garnituresen porcelaine rpercutaient avec une grande sonorit chacun de mes pas et j'arrivai la

    porte de ma chambre coucher. Un des battants de cette porte tait ouvert, car c'tait ceque les Franais appellent une porte deux battants, et je dcidai de le laisser ouvert, car

    je voyais que tout avait t prpar en vue de la nuit.Je pris mon chle et mon bougeoir et je me disposais retourner, lorsque, me dirigeant

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    vers la porte, je la vis barre par la forme d'une vieille femme. Elle tait debout,immobile et silencieuse, encadre par la porte, et ses traits avaient l'expression la plusdsespre que j'aie jamais vue.

    Je ne sais pourquoi je sentis la peur me saisir, mais l'ide que j'avais devant moiquelque pauvre idiote ou folle me traversa l'esprit, et dans un mouvement de terreur

    panique, je me dtournai de la porte du salon et regagnai la terrasse, en passant par les

    chambres coucher.Ma fille, apprenant mon effroi, retourna dans l'appartement, mais elle retrouva tout

    dans son tat normal et elle ne put rien rencontrer.

    Le lendemain matin, je parlai aux deux femmes de la vieille qui tait venue dans monappartement et que je supposais tre une habitue un titre quelconque de l'htel, maismon rcit les troubla fort, et elles me dirent que ma description ne rpondait aucune des

    personnes de l'tablissement. Je m'aperus que mon rcit leur causait une vritableconsternation, mais cependant, sur le moment, je n'y prtai qu'une attention distraite.

    Quinze jours plus tard, nous remes la visite du prtre qui desservait la paroisse et quitait l'ami et le guide spirituel de nos htes.

    Pendant une suspension de la conversation, je vins lui parler de la visite que j'avaisreue huit heures, l'heure des morts.

    Le padre m'couta avec la plus srieuse attention et, aprs un certain temps de silence,me dit :

    Madame, vous venez de dcrire dans ses moindres dtails la vieille matresse de cettemaison, morte six mois avant votre arrive,dans la chambre situe au-dessus de celle que

    vous occupez. Les propritaires actuels m'ont fait part de ce fait et ils avaient la crainte laplus vive de vous voir partir, car ils avaient reconnu celle qu'ils appelaient la vieillepatronne.

    Je m'expliquai alors tous les cadeaux de fruits qu'ils m'avaient faits et toutes lesattentions dont ils m'avaient entoure depuis ce jour. Aucun incident ne se produisitensuite et je ne vis plus d'apparition. Dans nos promenades, nous regardions s'il ne serencontrerait pas quelque costume rappelant celui dans lequel la vieille femme m'taitapparue, mais ce tut inutilement. Quelque fugitive qu'ait t cette apparition, j'aurais puretracer exactement ses traits, si j'avais su dessiner. Elle tait ple, de cette pleur mate

    qui caractrise la vieillesse ; ses yeux taient gris et durs, son nez mince ; des bandeauxpais de cheveux grisonnants s'appliquaient sur son front. Elle portait un bonnet dedentelles avec des bords troits piqus tout autour. Un fichu blanc se croisait sur sa

    poitrine et elle avait un long tablier blanc. Ses traits sans expression taient fixes etternes. Je ne pense pas qu'elle se rendt compte du lieu o elle tait ni de la personne quise trouvait devant elle, et cette visite tait certainement la plus dnue d'un motif capabled'expliquer pourquoi elle avait franchi les bornes du monde invisible ( Souvent les

    personnes qui sont tmoins d'une apparition se demandent, comme Mme Clerke,pourquoi ce sont elles, plutt que d'autres, qui voient le fantme, alors que la personnequ'il reprsente ne leur tait pas connue de son vivant. On peut supposer, maintenant quenous connaissons les faits de clairvoyance, que l'esprit n'a pas agi volontairement, nimme peut-tre consciemment : qu'il n'a pas choisi cette personne plutt que telle autre

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    pour tre vu, mais que, ce jour-l, la disposition physiologique du percipient tait telle,que le rayonnement de l'esprit a produit chez lui l'action tlpathique qui l'a rendumomentanment clairvoyant, et que l'influence des lieux, l'ambiance dans laquelle a vcule fantme, favorise videmment ce genre de manifestation. Inutile, dans ce cas, desupposer que le dfunt a franchi les bornes du monde invisible . C'est plutt le voyantqui a pu y pntrer un instant. (G. DELANNE.).

    Je dois faire remarquer que j'ignorais absolument qu'aucune personne de ce genre etvcu dans l'htel, avant que son image se ft prsente la porte de ma chambre coucher.

    KATE M. CLERKE.

    Madame Clerke nous crivit plus tard :

    68, Redcliffe-Square S. W. 29 juillet 1884.

    Je ne puis prciser davantage la date qu'en disant que ce fut en juillet 1872.Je crois pouvoir assurer nettement qu'aprs mon dpart de Sorrente, qui eut lieu deux

    ou trois mois aprs l'apparition de la vieille, personne ne l'a plus revue dans l'htel. Toustaient dans l'apprhension et la terreur, et on parlait le moins possible de ce sujet. Aprsles premires recommandations que je fis aux femmes qui faisaient le service, au sujetdes trangers qui pouvaient pntrer dans ma chambre, je n'y fis plus aucune allusion,mais nous avons su que celle qui se chargeait de faire ma chambre n'y entra plus jamaisseule et eut toujours soin de se faire accompagner par sa petite fille.

    Jamais aucun autre moment je n'ai vu ou cru voir aucun fantme ; je n'ai pas entendu

    de voix et je ne crois pas aux revenants. Je n'ai jamais eu de rves remarquables, et mmeaprs l'apparition de Sorrente, je serais plutt porte croire que je me suis trouve en

    prsence de quelque pauvre insense que l'on avait squestre (Hypothse insoutenable,qui ne s'accorde pas avec le tmoignage du cur. (G. D.)

    Ce qu'il y a de singulier dans cette circonstance, c'est que j'ai fait une descriptionrigoureusement exacte d'une personne, que je n'avais jamais vue et dont j'ignoraisl'existence. Chacun fut stupfait de lexactitude du portrait, surtout cette dame qui avaitconnu la vieille patronne.

    KATE M. CLERKE.

    M. Podmore ajoute les notes suivantes, rsultant d'une entrevue avec Mme Clerke :

    18 aot 1884.

    J'ai rendu visite aujourd'hui Mme Clerke. Elle me dit qu'autrefois elle ne croyaitnullement aux revenants et que maintenant encore elle n'y croit gure, en dehors de son

    propre cas. Elle est absolument certaine que la description qu'elle fit de l'apparition taitassez dtaille pour la faire reconnatre. Spcialement, le costume qu'elle vit, quoique

    port alors par la vieille patronne, n'tait pas du tout en usage dans ce district ; elle n'en apas vu un seul autre dans toute l'Italie. Lorsqu'elle vit cette apparition, ce qui la frappa

    dans ce costume, c'est qu'il ressemblait celui de sa vieille nourrice irlandaise ; elle en fitla remarque sa fille ds qu'elle l'eut rejointe, en ajoutant cependant que les traits de la

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    figure taient tout diffrents de ceux de la nourrice. Miss Clerke confirma les paroles desa mre.

    Mme Clerke dit que l'on pourrait admettre la rigueur que l'apparition qu'elle vit nefut pas autre chose qu'une vieille femme rellement vivante qui se serait chappe. Maiselle reste absolument convaincue, pour sa part, qu'elle a vu un revenant ; d'une part cause de la ressemblance et ensuite cause de la terreur irrflchie dont elle fut saisie au

    moment o elle vit cette forme, car elle n'est nullement impressionnable en tempsordinaire .

    Pendant tout le reste de son sjour dans cet htel, il ne se produisit ni bruit nitroubles quelconques.

    E. P.

    Avec la narration qui suit, nous revenons aux apparitions qui ont toutes les apparencesd'un tre vivant, bien que le fantme soit visible seulement pour une seule personne, cequi nous rappelle les apparitions clairvoyantes des fantmes de vivants.

    L'APPARITION DIT SON NOM ET CONVERSE PAR SIGNES

    Ici, la percipiente n'a pas toujours entendu les paroles du fantme, mais celui-ci, pardes signes de tte, a fini par se faire comprendre, ce qui indique que ce n'tait pas unesimple image, un clich astral , comme dirait un occultiste.

    Dans la matine du vendredi 1er mars 1901 ( Voir Revue scientifique et morale duSpiritisme, juin 1902, p. 717. Le rcit de premire main a t recueilli par M. lecommandant Mantin, qui connat intimement le docteur Blackwell et sa femme. Le nomest un pseudonyme.), la belle-mre de ma femme de chambre mourut d'un cancer, l'hpital. Je n'avais jamais vu la vieille femme, n'avais aucune ide de non apparence etn'avais jamais entendu prononcer son nom de baptme : ma femme de chambre, en

    parlant d'elle, l'appelait toujours ma belle-mre .

    L'enterrement eut lieu le lendemain, samedi, dans l'aprs-midi. Vers six heures du soir,ce mme samedi, je lisais dans ma chambre, et j'tais pour ainsi dire seule dans lamaison, car mon mari tait sorti et les domestiques taient tous dans le sous-sol, deuxtages plus bas. Pendant plus d'une demi-heure, j'entendis, plusieurs reprises, des coupstrs forts, tantt un seul, tantt plusieurs, se succdant rapidement, et divers bruitsd'objets trans dans la chambre mme, si bien que je levais chaque instant la tte,m'attendant chaque fois voir quelqu'un, bien que je sois habitue l'audition de bruitsde ce genre. Plusieurs fois, aussi, j'entendis des pas dans le corridor, comme si quelqu'unentrait dans le cabinet de toilette attenant ma chambre, puis en sortait de nouveau.Deux fois je me prcipitai la porte et l'ouvris vivement : il n'y avait absolument

    personne ni dans les vestibules, ni sur le palier, ni dans les escaliers ; la porte du cabinetde toilette donnant dans le corridor tait ferme. Il n'y avait personne nulle part. Aprscela je ne m'en occupai plus, et bientt les bruits cessrent. Mon petit terrier ne paraissait

    pas entendre les bruits qui se produisaient dans la chambre, mais tait trs agit par ceuxdu corridor.

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  • 8/14/2019 33 - Gabriel Delanne - Tome 2 - Les Apparitions Materialisees Des Vivants Et Des Morts Fr.

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    Aprs dner, pendant que mon mari et moi tions au salon, ma femme de chambre vintm'annoncer son retour : elle avait t absente toute l'aprs-midi. Elle me dit quel'enterrement s'tait trs bien pass, que les surs de l'hpital avaient t trs bonnes,qu'elles avaient mis un oreiller dans le cercueil et enseveli le corps dans un beau drap.Elle sortit du salon sans ajouter d'autres dtails et quelques instants aprs, une amie, une

    jeune fille, vint passer la soire avec nous. Un peu aprs 9 heures et demie, je vis tout

    coup une forme vague, quelque distance, de l'autre ct du salon. J'attiraiimmdiatement sur elle l'attention de mon mari et de mon amie, mais ils ne virent rien.

    Peu peu, les contours de cette forme se prcisrent et bientt je les vis clairement,distinctement, et si opaques que les meubles derrire eux en taient cachs, absolumentcomme par un corps vraiment matriel.

    La forme paraissait tre celle d'une vieille femme aux yeux trs brillants, trs perants,au nez assez pointu, aux cheveux gris, plus foncs sur le front. Tout d'abord sa robesemblait tre noire, mais bientt je m'aperus qu'elle devenait bleu fonc. Sur la tte elle

    portait un foulard, apparemment en soie, carreaux mlangs de rouge. Son premier

    mouvement fut de porter sa main sa tte, de rejeter son foulard en arrire, le laissanttomber sur son cou o il resta comme un fichu ngligemment attach.

    Mon mari et moi lui parlmes en anglais, mais elle ne parut pas nous comprendre, bienque son regard semblt nous interroger anxieusement. Nous lui parlmes alors enfranais. Cette fois elle devint tout fait excite et rpondit videmment avec volubilit,ce que je vis parfaitement, mais sans pouvoir distinguer ses paroles. Bien qu'invisible

    pour les deux autres tmoins de cette scne elle semblait les voir et les entendre. Monamie se sentit fortement impressionne par une sensation d'oppression ou de suffocation,comme par une prsence dsagrable. Je m'adressai la forme, mais sans pouvoir

    entendre sa rponse, ce qui parut l'irriter. Enfin, mon amie suggra que ce pouvait treMme M..., la belle-mre de ma femme de chambre. Elle fit vivement oui de la tte. Je

    pus alors distinguer quelques sons, et enfin je compris le mot Clmence Est-ce votrenom ? lui demandai-je. Oui , fit-elle, d'un signe de tte. Alors dit mon amie, ce ne

    peut tre madame M..., car j'ai vu son nom sur la liste des dcs, dans le journal, et cenom tait