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Le tribunal accorde la rétroactivité à compter de 2005 où les revenus de monsieur ont augmenté de plus de 80 %. Il explique sa décision en ajoutant 234 : 115 En fait, il s’agît là de changements extrêmement impor- tants dans les moyens du débiteur. Il ne peut y avoir de doute qu’il s’agit de changements « susceptibles de modifier le mon- tant de la pension alimentaire versé pour l’enfant », pour reprendre les mots de la Cour suprême. 116 Or, monsieur n’a pas prévenu madame de ces changements extrêmement importants dans sa situation, encore moins de leur ampleur. Et cela, alors qu’il ne pouvait ignorer que les res- sources de madame étaient très limitées. 117 La Cour suprême juge que cela est « en soi répréhensible » et peut justifier de faire rétroagir l’ ordonnance alimentaire au- delà des trois ans, soit à la date à laquelle la pension aurait dû être majorée . (Nos soulignements) Toutefois, le tribunal échelonne la rétroactivité, qu’il établit à 16 000 $, à raison de 1 000 $ chaque mois à compter du 1 er mars 2012, jusqu’à parfait paiement. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’en matière de divorce, les tribunaux sont au même diapason en ce qui a trait aux principes qui doivent les guider en matière de rétroactivité. La démonstration, tant au plan du calcul que des principes applicables, qui est faite par le juge Senécal permet de conclure qu’en matière alimentaire, l’inter- prétation tant quant au concept des ressources disponibles que des principes applicables doit tendre à maximiser la satisfaction des besoins du créancier alimentaire. 7. L’OBLIGATION ALIMENTAIRE ET LES ENFANTS Inutile de rappeler que la seule application du barème ne sau- rait constituer une difficulté excessive 235 . 366 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL 234. Voir, Droit de la Famille – 10234, EYB 2010-169444 (C.A.), [2010] R.D.F. 19, [2010] R.J.Q. 464, [2010] QCCA 236, J.E. 2010-387. La Cour d’appel a dépassé la limite du trois ans quant à la rétroactivité considérant le comportement répré- hensible du débiteur. 235. Voir Droit de la famille – 114132, EYB 2011-200162, 2011 QCCS 6937 (C.S.) ; Droit de la famille – 12552 EYB 2012-204319, 2012 QCCS 1113 (C.S.).

7. L’OBLIGATION ALIMENTAIRE ET LES ENFANTS · mentaire en raison des coûts qu’entraîne la démarche judiciaire. À cejour,sixautresprovincescanadiennesdisposentd’untelservicede

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Le tribunal accorde la rétroactivité à compter de 2005 où lesrevenus de monsieur ont augmenté de plus de 80 %. Il explique sadécision en ajoutant234 :

115 En fait, il s’agît là de changements extrêmement impor-tants dans les moyens du débiteur. Il ne peut y avoir de doutequ’il s’agit de changements « susceptibles de modifier le mon-tant de la pension alimentaire versé pour l’enfant », pourreprendre les mots de la Cour suprême.

116 Or, monsieur n’a pas prévenu madame de ces changementsextrêmement importants dans sa situation, encore moins deleur ampleur. Et cela, alors qu’il ne pouvait ignorer que les res-sources de madame étaient très limitées.

117 La Cour suprême juge que cela est « en soi répréhensible » etpeut justifier de faire rétroagir l’ordonnance alimentaire au-delà des trois ans, soit à la date à laquelle la pension aurait dûêtre majorée. (Nos soulignements)

Toutefois, le tribunal échelonne la rétroactivité, qu’il établit à16 000 $, à raison de 1 000 $ chaque mois à compter du 1er mars 2012,jusqu’à parfait paiement.

Le moins que l’on puisse dire c’est qu’en matière de divorce, lestribunaux sont au même diapason en ce qui a trait aux principes quidoivent les guider en matière de rétroactivité. La démonstration, tantau plan du calcul que des principes applicables, qui est faite par lejuge Senécal permet de conclure qu’en matière alimentaire, l’inter-prétation tant quant au concept des ressources disponibles que desprincipes applicables doit tendre à maximiser la satisfaction desbesoins du créancier alimentaire.

7. L’OBLIGATION ALIMENTAIRE ET LES ENFANTS

Inutile de rappeler que la seule application du barème ne sau-rait constituer une difficulté excessive235.

366 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

234. Voir, Droit de la Famille – 10234, EYB 2010-169444 (C.A.), [2010] R.D.F. 19,[2010] R.J.Q. 464, [2010] QCCA 236, J.E. 2010-387. La Cour d’appel a dépassé lalimite du trois ans quant à la rétroactivité considérant le comportement répré-hensible du débiteur.

235. Voir Droit de la famille – 114132, EYB 2011-200162, 2011 QCCS 6937 (C.S.) ;Droit de la famille – 12552 EYB 2012-204319, 2012 QCCS 1113 (C.S.).

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7.1 La Loi favorisant l’accès à la justice en matièrefamiliale (projet de loi 64) : le rajustementadministratif de la pension pour enfant

Le législateur a adopté un élément important de législationquand il a décidé de concrétiser l’existence d’un service administratifde rajustement de pension alimentaire dans le but de réduire lescoûts de la démarche pour les justiciables et par voie de conséquencefavoriser l’accès à la justice.

Nous l’avons déjà indiqué, les familles se composent et se recom-posent à un rythme accéléré. L’existence d’une démarche facilitant lerajustement de la pension alimentaire pour enfants apparaît alorscomme un outil utile fort attendu.

Ce projet de rajustement administratif des pensions aura connuplusieurs formes depuis 1993 pour permettre aux justiciables, dansles cas simples, c’est-à-dire qui ne nécessitent pas d’appréciation judi-ciaire, de faire réviser la pension alimentaire sans avoir à débourserdes honoraires qui peuvent parfois être exorbitants en lien avec letravail objectif que le professionnel doit effectuer pour rajuster lapension. Depuis 2004, le Service administratif de rajustement despensions alimentaires pour enfants (SARPA) est plus présent dans lepaysage législatif québécois. Le 4 avril 2012, le ministre de la JusticeJean-Marc Fournier a déposé le projet de loi 64 intitulé Loi favorisantl’accès à la justice en matière familiale (la Loi)236. Nous en étudieronsles grandes lignes et les détails importants, là où se cache le diablerappelleront certains, tout en livrant nos commentaires sur les pro-positions qui s’y retrouvaient... et qui ne s’y retrouvent pas.

Selon les chiffres fournis lors des consultations particulières,mentionnons que plus de 265 000 parents paient ou reçoivent unepension alimentaire au Québec. En 2011, la Cour supérieure du Qué-bec a rendu environ 42 000 ordonnances en matière de pensions ali-mentaires au bénéfice d’enfants. Près de 15 000 de ces ordonnances,soit plus du tiers, concernent une révision de l’ordonnance anté-rieure, et, que les parents s’entendent ou pas, ils doivent entre-prendre des procédures judiciaires pour obtenir un nouveau juge-ment. Tous ces chiffres ne tiennent pas compte des parties qui n’osentpas entreprendre des procédures de rajustement de la pension ali-

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 367

236. L.Q. 2012, c. 20. Au moment de rédiger le présent article, le texte règlementairen’était pas disponible auprès de l’Éditeur officiel.

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mentaire en raison des coûts qu’entraîne la démarche judiciaire. Àce jour, six autres provinces canadiennes disposent d’un tel service derajustement annuel237.

7.1.1 La présentation du projet de loi

Le ministre de la Justice présentait ce projet de loi de la façonsuivante lors de son dépôt le 4 avril 2012238 :

M. Fournier : Merci, M. le Président. Ce projet de loi prévoitl’institution, au sein de la Commission des services juridiques,d’un service administratif chargé de procéder au rajustementdes pensions alimentaires pour enfants.

Le projet de loi modifie la Loi sur l’aide juridique et sur la presta-tion de certains autres services juridiques afin d’offrir, y com-pris aux personnes non financièrement admissibles à l’aidejuridique, les services professionnels d’un avocat pour l’obten-tion d’un jugement relatif à une entente présentée dans unedemande conjointe et portant règlement complet en matière degarde d’enfants ou d’obligations alimentaires.

Le projet de loi modifie le Code civil du Québec afin d’y prévoirune obligation d’échange de renseignements entre les parentsvisant à maintenir à jour la valeur des aliments dus à leurenfant et pour permettre que des aliments puissent être récla-més pour un enfant au-delà de l’année écoulée avant la demande.

Le projet de loi modifie le Code de procédure civile pour prévoirque le formulaire de fixation des pensions alimentaires ayantservi au tribunal pour fixer la pension alimentaire d’un enfantdoit être joint au jugement qui l’accorde.

Le projet de loi modifie la Loi facilitant le paiement des pensionsalimentaires pour habiliter le ministre du Revenu à remettre lasûreté fournie par un débiteur exempté, suivant cette loi, de laperception d’une pension alimentaire par Revenu Québec, lors-

368 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

237. Il s’agit des provinces suivantes : Terre-Neuve, Île-du-Prince-Édouard, Mani-toba, Alberta, Colombie-Britannique (projet pilote) et Nouvelle-Écosse (projetpilote).

238. Voir le Journal des débats : <http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-nationale/39-2/journal-debats/20120404/54855.html>.

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que ce dernier en est exempté depuis au moins deux ans, que lecréancier y consent et qu’aucuns arrérages ni frais ne sont dus.

Enfin, le projet de loi comporte des modifications de concor-dance et de nature transitoire. (Nos soulignements)

Comme ce projet de loi vise le rajustement des pensions alimen-taires, la première détermination devra avoir été faite par le tribunal.Pendant les deux journées qu’ont duré les consultations particuliè-res239, le ministre de la Justice a laissé peu de marge de manœuvreaux organismes qui ont décidé de faire une présentation qui renfer-mait la création d’un système parallèle à celui proposé par le projet deloi. On peut relever trois leitmotivs dans la démarche du ministre :

– La nécessité de maintenir des principes qui ont fait consensusauprès des groupes sociaux et des ordres professionnels impliquéset permettent de présenter un projet de loi qui a des chances d’êtreadopté.

– Limiter les coûts du système et, par voie de conséquence, en aug-menter l’accessibilité240. Le mandat d’administrer le SARPA estconfié à la Commission des services juridiques, l’organisme quichapeaute le réseau d’aide juridique. Or, lors de sa présentation,les représentants de la Commission ont admis ne s’être livrés àaucune étude quant à la clientèle potentielle et à la capacité de ladesservir, question qui a été soulevée par tous les organismes invi-tés aux consultations, incluant le ministre et la représentante del’opposition.

– Le désengorgement des tribunaux et des services judiciaires quioccupent une large partie de leur temps d’audition et de travail audroit de la famille.

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 369

239. Celles-ci ont eu lieu les 22 et 23 mai 2012. Voir, le Journal des débats non révisésà l’adresse suivante : <http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/ci-39-2/journal-debats/CI-120522.html#debut_journal>. Pour le22 mai 2012, voir le Journal des débats, vol. 42, no 91 : <http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/ci-39-2/journal-debats/CI-120522.html#debut_journal>.

240. Le ministre de la Justice a reçu plutôt fraîchement la proposition du Barreau decréer une procédure allégée : voir le mémoire du Barreau du 1er mai 2012, p. 2,sur le site de la Commission des institutions sur le site de l’Assemblée nationale.Il en a été de même de la possibilité de créer un réseau parallèle de rajustement,comme l’a proposé la Chambre des notaires dans son mémoire présenté le 23 mai2012, p. 9 et 10 : <http://www.cdnq.org/fr/laChambrePrendPosition/>.

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Le principe du projet de loi a été adopté le jeudi 31 mai 2012241

et envoyé en commission parlementaire pour étude détaillée. Il estimportant de souligner qu’au moment des consultations particuliè-res, le ou les projets de règlements n’avaient pas été produits, seul untexte intitulé « Document de travail » était disponible. Or, il y aurabeaucoup de plomberie, lire de formalités, à intégrer au texte régle-mentaire qui accompagnera la Loi.

Le projet de loi 64, qui est maintenant une loi, se divise doncessentiellement en trois volets :

1) la création du SARPA ;

2) la démarche simplifiée d’homologation pour certains types dedossiers ;

3) la récupération de la sûreté auprès de l’Agence du revenu duQuébec.

7.1.2 Les commentaires du ministre de la Justice lorsdu dépôt du projet de loi 64 aux fins d’adoption

Au moment de l’adoption du principe du projet de loi 64, leministre de la Justice indiquait notamment242 :

Force est de constater, suite aux consultations particulièresqui ont eu lieu, que ce projet reçoit un large appui des groupesentendus et qu’il s’agit d’un projet fort attendu. Comme je l’aidéjà dit lors de la présentation de ce projet, cette initiative s’ins-crit dans le cadre du Plan Accès Justice que j’ai lancé l’automnedernier pour améliorer l’accessibilité à la justice et accélérer lacadence des causes entendues et jugées par les tribunaux.

Sans régler tous les problèmes, le projet de loi no 64 proposecertainement des outils visant à faciliter la vie des familles.Il propose la mise en place de mesures simplifiées, plus rapides,moins coûteuses, visant à faciliter, d’une part, le rajustement

370 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

241. Journal des débats, jeudi 31 mai 2012, vol. 42, no 115 : <http://www.ass-nat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-nationale/39-2/journal-debats/20120531/60223.html>.

242. Journal des débats, jeudi 31 mai 2012, vol. 42, no 115 : <http://www.ass-nat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/assemblee-nationale/39-2/journal-debats/20120531/60223.html>.

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des pensions alimentaires pour enfants et, d’autre part, la révi-sion des jugements en matière familiale. Il facilite aussi la récu-pération de la sûreté déposée à l’Agence du revenu.

Le projet de loi propose d’instituer, au sein de la Commissiondes services juridiques, que nous connaissons plus, dans chacunde nos territoires que nous servons, comme le bureau d’aide juri-dique, un service administratif de rajustement des pensions ali-mentaires pour enfants. Il permettrait de rajuster de façonadministrative, donc non judiciaire, le montant de la pensionalimentaire pour enfants fixé par une ordonnance judiciaire à lasuite d’une augmentation ou d’une diminution de revenus. Lecalcul serait évidemment conforme aux règles de fixation despensions alimentaires pour enfants édictées en application duCode de procédure civile. Les parents pourraient faire ensembleune demande de rajustement du montant de la pension. Unparent pourrait aussi faire cette demande seul. La mise à jourdu montant de la pension fixée par l’ordonnance alimentaire sefait alors de façon administrative, mais le nouveau montantsera réputé être le montant fixé par la décision judiciaire.

Les cas donnant ouverture au SARPA, c’est ainsi qu’on l’ap-pelle, seront précisés par règlement, et le service serait limitéaux cas où aucune appréciation judiciaire n’est nécessaire. Ceciexclut, par exemple, les cas où les lignes directrices de fixationprévoient l’exercice de la discrétion, par exemple lorsque lerevenu disponible des parents est supérieur à 200 000 $. Par ail-leurs, il ne serait pas possible de bénéficier du rajustementlorsqu’un parent accepte volontairement une diminution derevenus pour des raisons telles qu’un retour aux études ou uncongé sabbatique. Dans ces cas, s’il y a consentement entre lesparties, elles peuvent avoir recours au service d’aide à l’homolo-gation.

Le projet de loi propose aussi de modifier la Loi sur l’aide juri-dique et sur la prestation de certains autres services juridiquesafin d’offrir aux parents qui s’entendent sur un changement àapporter à la garde des enfants ou à la pension alimentaire,dans les cas non prévus par le SARPA, le service administratif,les services professionnels d’un avocat pour l’homologation deleur entente. Dans ce cas-ci, nous sommes plus dans un cas decaractère judiciaire, Mme la Présidente. Ces services serontofferts tant aux parents financièrement admissibles à l’aide

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 371

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juridique qu’à ceux qui ne le seraient pas. Les bureaux d’aidejuridique, Mme la Présidente, vont donc ainsi ouvrir leurs por-tes à une toute nouvelle clientèle : tous les Québécois. On leuroffrirait le soutien juridique nécessaire à la préparation des pro-cédures pour faciliter l’homologation de l’entente par un greffierspécial afin de rendre cette entente exécutoire.

Je vous donne un exemple : un parent avait la garde exclusivede l’enfant, mais la situation a changé, et c’est plutôt la gardepartagée qui est pratiquée. Ce service d’aide permettrait auxparents qui s’entendent sur ce changement relatif à la garde deleur enfant d’obtenir l’homologation de leur entente. Ce serviced’aide coûterait environ 262 $ à chaque parent qui serait,par ailleurs, non admissible à l’aide juridique, étant entenduque, pour ceux qui sont admissibles à l’aide juridique, cesfrais seraient couverts par l’aide juridique. Mais comme nousouvrons le service même à ceux qui n’ont pas accès d’habitude àl’aide juridique, le coût est donc de 262 $ par parent [...].

Parlons maintenant de la sûreté fournie à Revenu Québec parun débiteur dans le cas d’exemption du système de perceptionautomatique. Le projet de loi propose un moyen plus simple, etplus rapide, et sans frais pour récupérer cette sûreté. Sous lalégislation actuelle, il faut obtenir un jugement annulant lapension alimentaire pour que Revenu Québec puisse remettrela sûreté au débiteur. Cela a pour conséquence que plusieursparents renoncent à récupérer la sûreté plutôt que d’assumerles coûts associés à l’obtention d’un nouveau jugement. Le coûtdes procédures est généralement plus élevé que le montant àrécupérer. Le résultat, Mme la Présidente, c’est qu’en ce momentil y a 14 millions d’argent des Québécois qui dort dans les coffresde l’Agence du revenu, attendant que nous puissions développerun système moins onéreux pour aller chercher l’argent quiappartient aux Québécois.

[...]

Enfin, le projet de loi facilitant l’accès à la justice en matièrefamiliale prévoit les autres mesures suivantes : d’abord, lamodification du Code civil afin d’y prévoir la possibilité de récla-mer des aliments pour un enfant au-delà de l’année écouléeavant la demande en justice, et ce, sans avoir approuvé l’impos-sibilité d’agir ; deuxièmement, la modification de ce même code

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afin d’y prévoir une obligation d’échange d’information entre lesparents relativement à leurs revenus et les sanctions en cas demanquement à cette obligation ; troisièmement, la modificationdu Code de procédure civile afin d’y prévoir que le formulaire defixation des pensions alimentaires pour enfants ayant servi autribunal pour fixer la pension alimentaire d’un enfant sera jointau jugement qui l’accorde. (Nos soulignements)

Puis, au moment de l’adoption de la Loi, le 13 juin 2012243, leministre indiquait ce qui suit :

Le projet poursuit plus particulièrement trois grands objectifs.D’une part, le rajustement administratif, le SARPA – rajuste-ment administratif des pensions alimentaires pour enfants ;d’autre part, la révision de jugement en matière familiale parconsentement ou homologation ; et enfin la remise des sûretésfournies par le débiteur alimentaire à Revenu Québec, pour êtreexempté des perceptions automatiques de la pension alimen-taire.

En ce qui concerne le SARPA, le projet de loi a été bonifié notam-ment, premièrement, pour prévoir que seuls les renseignementset documents nécessaires au rajustement devront être fournisau SARPA, s’assurer qu’on ait l’information, qu’on y ait accès,mais que cela ne déborde pas la protection à la confidentialité.

[...]

Deuxièmement, que le SARPA devra s’assurer que le parent quin’a pas fait la demande a bien reçu cette demande de rensei-gnements et de documents avant d’établir son revenu annuelconformément aux règles qui sont prescrites par règlement.

Troisièmement, qu’une demande de rajustement pourra fairel’objet d’un réexamen administratif interne suite à un refus duSARPA de traiter la demande. Parce qu’encore faut-il préciserque le SARPA, c’est une catégorie bien, bien particulière de révi-sion des pensions alimentaires pour enfants, où il n’y a d’inter-vention de juge nécessaire. Alors, si jamais, dans le traitementqui en est fait, on s’aperçoit que cela n’aurait pas été un casapproprié pour le SARPA, la Commission des services juridi-

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 373

243. Journal des débats, vol. 42, no 121.

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ques, le bureau d’aide juridique devra le refuser. Et là des par-ties pourraient dire : Bien, est-ce que c’était vraiment une bonnedécision de dire que ce n’était pas dans le SARPA ? D’où ceréexamen administratif.

Quatrièmement, que les règles permettant au SARPA de rajus-ter la pension à une date antérieure à celle de la demande soientprévues dans la loi ; que les membres du personnel du SARPAainsi que les employés d’un centre régional qui agissent dans lecadre de ces fonctions du SARPA ne pourront être poursuivis enjustice en raison d’un acte accompli de bonne foi dans l’exercicede leurs fonctions ; que le montant des amendes versées seraporté au crédit du Fonds Accès Justice.

[...]

Et, septièmement, que le SARPA sera assujetti à la compétencedu Protecteur du citoyen, qui était demandé par la Protectrice etque je crois approprié de faire.

Enfin, à ce sujet, l’une des préoccupations soulevées lors de l’é-tude du projet de loi fut la question de l’appréciation judiciaire,qui, comme l’a souligné ma collègue de Joliette, se trouve aucœur des décisions que devra prendre le service administratifSARPA. Le projet de loi bonifié contient certainement des bali-ses qui permettront de guider davantage le SARPA dans lesprises de ses décisions.

De plus, en ce qui concerne l’autre volet, les services juridiques àl’homologation, quelques amendements ont été apportés notam-ment pour prévoir dans la loi les cas où les services juridiquesd’aide à l’homologation seront fournis.

En terminant, en ce qui concerne les autres mesures jugéesnécessaires en matière familiale, un amendement a été apportéafin d’encadrer la possibilité de réclamer pour un enfant des ali-ments pour des besoins existant avant la demande en justice.

Nous procéderons maintenant à l’analyse des principes et à uneétude des articles importants de cette nouvelle loi tout en livrant noscommentaires.

374 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

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7.1.3 La Loi favorisant l’accès à la justice en matièrefamiliale

Les principes à la base du Règlement sur la fixation des pen-sions alimentaires pour enfants244 (les Lignes directrices québécoi-ses) peuvent se résumer comme suit :

– Affirmer la commune responsabilité des parents à l’égard de leursenfants conformément au Code civil, notamment les articles 585,587 et 599 C.c.Q.

– Assurer aux enfants la satisfaction de leurs besoins en fonction dela capacité de payer des parents (pension fixée en fonction desbesoins de l’enfant et des revenus des parents).

– Partager entre les deux parents (et non seulement le parent nongardien) la responsabilité du soutien financier des enfants en pro-portion de leur revenu respectif.

– Considérer comme prioritaire l’obligation alimentaire du parentpar rapport aux dépenses qui excèdent ses propres besoins essen-tiels.

– Reconnaître, autant que possible, l’égalité de traitement de tousles enfants issus de différentes unions en ce qui a trait à leur droit àdes aliments.

– Maintenir, autant que possible, l’incitation des parents à faiblesrevenus à remplir leurs obligations alimentaires à l’égard de leursenfants.

Ces principes expriment clairement la nécessité de considérerla coresponsabilité des parents à l’égard de leurs enfants (art. 10).

C’est à la lumière de ces principes qu’on doit interpréter la nou-velle loi, qui applique les Lignes directrices québécoises.

A. Le service créé et l’organisme dispensateur

L’article 1 de la Loi crée un service administratif de rajustementdes pensions alimentaires pour enfants, désigné sous le nom deSARPA, qui sera administré par la Commission des services juridi-

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 375

244. D. 484-97, (1997) 129 G.O. II, 2117 [c. C-25, r. 1.2].

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ques en collaboration avec les centres régionaux (art. 16 à 23). Lemême article précise que le SARPA est chargé de procéder au rajuste-ment des pensions alimentaires pour enfants et d’examiner avec dili-gence toute demande qui lui est présentée (art. 3). Sur cette question,le Protecteur du citoyen a proposé245 qu’il y ait un délai imparti detraitement de la demande. Le ministère de la Justice a expliquéqu’aucun délai précis n’a été fixé puisque « l’officier SARPA » (déno-mination utilisée pendant les consultations particulières) sera dansl’attente préalable d’informations devant provenir des parents, d’au-tres personnes ou d’organismes. Le Protecteur du citoyen est plutôtd’avis qu’il y aurait lieu de prévoir un délai maximal à l’intérieurduquel l’examen d’une demande de rajustement devrait être com-plété une fois les informations requises obtenues. Soulignons qu’àl’article 4, al. 3246 du projet de loi, le législateur prévoyait un délai de25 jours pour qu’une réponse soit donnée à la demande d’informationde l’« officier » SARPA, mais rien n’est prévu en ce qui a trait à lapériode qui précède. Or, la nouvelle pension rétroagit à la date de lademande, d’où la nécessité de limiter les délais.

Le ministre de la Justice est chargé de l’application de la Loi(art. 27).

7.1.4 Le premier volet : la médiation, le rajustementet la démarche préliminaire

A. La médiation

La Loi maintient la possibilité pour les parties d’avoir recours àla médiation comme le prévoit le Code de procédure civile aux articles814.3 et suivants, mais elle n’en fait pas une obligation247. Toutefois,

376 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

245. Mémoire du Protecteur du citoyen présenté à la Commission des institutionsdans le cadre des consultations particulières et auditions publiques sur le projetde loi no 64, Loi favorisant l’accès à la justice en matière familiale, 22 mai 2012CI – 007M, C.P. – P.L. 64, p. 10, <http://www.protecteurducitoyen.qc.ca/fileadmin/medias/pdf/Memoire_projet_de_loi/2012/2012-05-22_Memoire__PL__64.pdf>.

246. Cet article se lisait comme suit :« Lorsque le parent refuse ou néglige de fournir, dans les 25 jours suivant celuioù il a reçu une demande faite par le SARPA à cette fin, un renseignement ou undocument permettant d’établir son revenu annuel, ce revenu est alors établi,pour l’application de la présente loi, conformément aux règles prescrites parrèglement du gouvernement. »

247. La Chambre des notaires, dans son mémoire, voulait en faire un préalable pouraccéder au SARPA. Le ministre de la Justice a reçu plutôt fraîchement la propo-sition du Barreau de créer une procédure allégée : voir le mémoire du Barreau du

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si les parties ne sont pas allées en médiation, l’expérience démontreque l’« officier SARPA » devra dans plusieurs cas rédiger l’entente entout ou en partie pour que ce texte soit susceptible d’exécution. Si lesparties sont allées en médiation, l’officier devra aussi, dans certainscas, reformuler certaines clauses de l’entente pour les rendre exécu-toires et même les rendre conformes aux Lignes directrices québé-coises. Dans tous les cas, le SARPA devra vérifier si l’entente estadéquate, si elle préserve suffisamment l’intérêt des enfants ou si leconsentement des parties a été donné sans contrainte (art. 45, al. 2C.p.c.)248. Ensuite, en vertu des articles 11 et 15, al. 1 :

– il y a transmission par le SARPA d’une copie de l’avis de rajuste-ment au greffe du tribunal du district où a été rendue la dernièredécision et dès que le rajustement prend effet, soit 30 jours aprèsl’envoi de l’avis de rajustement aux parties (art.14) ;

– dès que le rajustement prend effet, soit 30 jours après l’envoi de l’a-vis de rajustement aux parties (art.15) le SARPA transmet unecopie de l’avis au ministre du Revenu du Québec pour fins de per-ception.

Cela nous amène à penser que le travail de « l’officier SARPA »ne se fera pas toujours aussi rapidement qu’on le voudrait bien selonle volume de dossiers.

Le SARPA pourra être complémentaire à la médiation, c’est-à-dire que lorsque les gens auront obtenu leur entente en médiation, ilspourront utiliser ce service pour entreprendre les procédures judi-ciaires afin d’obtenir l’homologation de leur entente aux conditionsprévues par la Loi dans le second volet. Nous reviendrons sur cettequestion (art. 29 et 33).

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 377

1er mai 2012, p. 2, sur le site de la Commission des institutions, sur le site del’Assemblée nationale. Il en a été de même de la possibilité de créer un réseauparallèle de rajustement, comme l’a proposé la Chambre des notaires dans sonmémoire présenté le 23 mai 2012, p. 9 et 10 : <http://www.cdnq.org/fr/laCham-brePrendPosition/>, p. 7 et 8.

248. Cet article se lit comme suit :« 45. Le greffier ou le greffier adjoint peut déférer au juge ou au tribunal touteaffaire qui lui est soumise, s’il estime que l’intérêt de la justice le requiert.Dans le cas d’une demande visée au deuxième alinéa de l’article 44.1, le greffierspécial défère la demande au juge ou au tribunal s’il estime que l’entente desparties ne préserve pas suffisamment l’intérêt des enfants ou que le consente-ment de celles-ci a été donné sous la contrainte. Il peut, pour apprécier l’ententeou le consentement des parties, convoquer et entendre celles-ci, même séparé-ment, en présence de leurs procureurs le cas échéant. » (nos soulignements)

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B. Le rajustement

Plusieurs circonstances peuvent justifier une demande de modi-fication du jugement initial. Par exemple, l’augmentation ou ladiminution de revenus d’une ou des parties peut donner lieu à unchangement et motiver la révision du jugement. Il en est de même deschangements relatifs au temps de garde de l’enfant ou au change-ment de garde proprement dit, lesquels peuvent survenir à plusieursoccasions. Faut-il tout de même qu’il y ait un changement au sens del’article 17 de la Loi sur le divorce249 ou des articles 594 et 612 C.c.Q. ?On peut donc s’interroger sur la possibilité pour l’« officier SARPA »de refuser une demande de rajustement s’il n’y a aucun changement.S’agit-il d’un cas d’exercice de discrétion judiciaire au sens de l’article9 de la Loi ?

Nous croyons que dès lors qu’une vérification prima facie faitepar l’« officier SARPA » permet de conclure que l’utilisation des infor-mations prescrites par le règlement et la loi mènera à un rajuste-ment, l’« officier SARPA » devrait valablement pouvoir considérer lademande de rajustement. D’ailleurs, lors de l’étude article par article,le ministre de la Justice indiquait que les dispositions de la loi rela-tive au rajustement ne font pas référence au concept de changementsignificatif au sens des arrêts Willick250 et L.M.P. c. L.S.251 de la Coursuprême. Le ministre de la Justice indiquait lors de l’étude article pararticle que le besoin relève du barème et qu’il s’agit là du point dedépart de l’évaluation du changement.

C. La démarche préliminaire

La demande de rajustement peut, dans les cas prescrits parrèglement du gouvernement, être présentée au SARPA par les deuxparents d’un enfant ou par un seul d’entre eux. Le règlement d’appli-cation prévoira les modalités de la demande et prescrira la forme dela demande (art. 2, al.1 et 4 de la Loi) de même que le coût du service.Selon ce qui a été indiqué lors des consultations, ce coût s’élèverait à275 $252. Le règlement prévoit les renseignements, les formulaires et

378 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

249. L.R.C. (1985), c. 3 (2e suppl.).250. EYB 1994-67936, J.E. 94-1704 (C.S.)251. EYB 2011-199870, 2011 CSC 64, J.E. 2012-18 (C.S.).252. Le Barreau a fait une suggestion intéressante, à savoir que ce montant soit

assumé en proportion des facultés des parties, comme c’est le cas en vertu del’annexe I lors du calcul de la contribution parentale de base et autres frais.

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les documents requis et qui sont nécessaires pour qu’il soit procédé aurajustement253.

Soulignons que le tiers qui s’est vu confier la garde d’un enfantne pourrait bénéficier du service de la SARPA, car il n’est pas unparent. On exclut donc le parent psychologique qui pourrait acquérirdes droits sur cette question en certaines circonstances en vertu duProjet de loi 81254 qui vient d’être déposé. Il y aura lieu de procéderaux corrélations qui s’imposent en temps opportun.

Or, comme on le sait, les parents psychologiques et les membresde la famille prennent une place de plus en plus grande dans la vie desenfants, et se voient parfois confier la garde d’un enfant, soit que lesparents ne sont pas en mesure de le prendre en charge ou, encore,parce qu’ils sont décédés. Au même effet, on notera que l’article 2 de laLoi ne traite pas de la demande alimentaire faite par l’enfant majeur,ce qui nous apparaît être une lacune. Certes, le tribunal n’est pas con-traint d’utiliser les Lignes directrices québécoises255 pour établir lapension de l’enfant majeur. Toutefois, rien n’empêcherait les partiesen cause, incluant l’enfant majeur, de consentir à leur application, cequi se fait en pratique, tant pour le rajustement selon les mêmesmodalités que pour l’enfant mineur, que pour mettre un terme aupaiement de la pension alimentaire. Dans ce dernier cas, la mêmeméthode que celle qui s’applique pour récupérer la sûreté, dont noustraiterons plus loin aurait pu être envisagée dans les cas évidents oùil n’y a plus d’obligation alimentaire. Lors de la commission parle-mentaire, un responsable du ministère a indiqué qu’en ce qui a trait àl’enfant majeur qui n’est plus à charge, une trousse juridique seraitdisponible sous peu.

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 379

253. Le législateur a voulu faire le lien avec l’article 64 de la Loi sur l’accès aux docu-ments des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels,L.R.Q., c. A-2.1. Ce concept de documents pertinents prendra toute son impor-tance notamment à l’article 4.

254. Loi modifiant le Code civil et d’autres dispositions législatives en matière d’adop-tion et d’autorité parentale. Ce projet a été déposé le 13 juin 2012.

255. Le Règlement sur la fixation des pensions alimentaires pour enfants, à son arti-cle 2, prévoit ce qui suit :2. Le tribunal peut fixer la pension alimentaire payable pour un enfant majeur àune valeur différente de celle qui serait exigible en application des présentesrègles, s’il l’estime approprié compte tenu de l’ensemble des circonstances danslesquelles l’enfant se trouve, notamment son âge, son état de santé, son niveaude scolarité ou la nature de ses études, son état civil et son lieu de résidence,de même que son degré d’autonomie et, s’il y a lieu, le temps nécessaire pour luipermettre d’acquérir une autonomie suffisante.

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La demande peut être retirée si les parents ou celui d’entre euxqui l’a déposée le réclament tant que le SARPA n’a pas rajusté la pen-sion alimentaire (art. 2, al. 2). Comme l’ont souligné plusieurs inter-venants, il sera difficile d’éviter toute pression ou toute forme deviolence de la part d’une partie, alors la vigilance est de rigueur. Rap-pelons qu’à l’occasion de la signature des conventions de non-assujet-tissement au patrimoine familial en 1989 et 1990, des situations peuédifiantes ont été soumises aux tribunaux relativement à l’annula-tion de telles conventions à cause de pressions, de violence, de mena-ces ou d’ignorance de la nature des documents signés.

Sur cette dernière question, la majorité des organismes enten-dus, sinon tous, ont fait part de leur inquiétude quant à la probléma-tique de l’influence indue, voire de la violence, que pourrait subir unparent à une quelconque étape de la démarche ou même préalable-ment à la demande. Il est clair que ce problème ne peut être éradiquétotalement, mais la présence d’un juriste peut limiter ces situations.

7.1.5 L’obtention des renseignements pour établirle rajustement

Le SARPA examine avec diligence toute demande qui lui estfaite (art. 3). La Loi et le règlement ne prévoient pas de délai de traite-ment.

Comme nous l’avons déjà mentionné, à l’article 4256 du projet deloi, le législateur prévoyait un délai de 25 jours pour qu’une réponsesoit donnée à la demande d’information de l’« officier SARPA », maisrien n’est prévu quant à la période qui précède le rajustement. Or, lanouvelle pension rétroagit à la date de la demande, d’où la nécessitéde limiter les délais. Nous y reviendrons.

Il n’est pas possible actuellement d’avoir une idée de la natureou de l’ampleur des renseignements exigibles, le règlement n’ayantpas été diffusé (art. 2, al. 1). On peut présumer que les documentsvisés actuellement par l’Annexe I seraient exigibles des deux parentsmême si l’article 4 renvoie uniquement au parent qui ne fait pas la

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256. Qui se lit comme suit :« Lorsque le parent refuse ou néglige de fournir, dans les 25 jours suivant celuioù il a reçu une demande faite par le SARPA à cette fin, un renseignement ou undocument permettant d’établir son revenu annuel, ce revenu est alors établi,pour l’application de la présente loi, conformément aux règles prescrites parrèglement du gouvernement. »

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demande. On s’imagine mal un « officier SARPA » ne pouvant vérifierles véritables ressources financières du parent qui produit seul unedemande, mais il y aurait eu lieu de le préciser pour éviter des débats.

L’article 4 de la Loi a fait l’objet de nombreux débats lors desconsultations particulières et en commission parlementaire. Il pré-voit que lorsque la demande est faite par un seul des parents, l’« offi-cier SARPA » peut demander des informations pertinentes pour lafixation de la pension alimentaire à l’autre parent, ces informationssont celles prévues par le règlement et sont nécessaires au rajuste-ment, telle est la prémisse. Tous les intervenants convenaient qu’ilfallait protéger le droit à la vie privée mais qu’il fallait trouver unjuste équilibre entre ce droit fondamental et le droit de l’enfant à desaliments. Cette demande est notifiée à l’autre parent par tout moyenpermettant de prouver la date d’envoi. Si le mode utilisé est le « cour-rier ordinaire », la mise à la poste est réputée être la date d’envoi (art.4, al. 2). Si la notification est faite par huissier, la date de significationest réputée être la date où la demande a été reçue (art. 5, al. 2).

On notera toutefois que le législateur ne renvoie pas à unedemande d’information faite à un tiers (art. 4, al. 2), sauf la Commis-sion des services juridiques (art. 22) – l’employeur d’un parent parexemple – ni que ce tiers sera obligé de transmettre, dans un délaidonné, une information requise par le SARPA, ni qu’il serait suscep-tible d’une sanction. Il y aurait eu lieu d’ajouter des dents à ce pou-voir, le législateur semble plutôt avoir voulu se rabattre sur lepouvoir de fixation de la pension de l’article 5. Est également prévuun pouvoir de vérification des renseignements fournis auprès de per-sonnes, ministères ou organismes déterminés par règlement (art.8).Ce pouvoir de vérification n’est toutefois pas assorti d’un délai deréponse pour la personne, le ministère ou l’organisme. De plus,aucune conséquence n’est prévue pour le contrevenant.

Cette obligation de répondre dans le délai de 25 jours prévudans le projet de loi a fait l’objet d’âpres discussions. S’agit-il d’undélai de déchéance ? Que faire si le parent qui a reçu cet avis est dansl’impossibilité ou l’incapacité d’agir ou s’il refuse de fournir l’informa-tion requise ? Le processus de la SARPA doit-il s’arrêter et le créan-cier alimentaire doit-il engager des frais supérieurs à ceux prévus parle programme de la SARPA257 ? Sur la question du délai, le Protecteur

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257. Voir le mémoire du Barreau du 1er mai 2012, p. 2, sur le site de la Commissiondes institutions, sur le site de l’Assemblée nationale : <http://www.cdnq.org/fr/laChambrePrendPosition/>.

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du citoyen a proposé ce qui suit lors des consultations particuliè-res258 :

Mme Saint-Germain (Raymonde) : ...on retourne aux recoursjudiciaires. Il peut oublier les 25 jours. Ce sera beaucoup pluslong et beaucoup plus coûteux. C’est une question que nous noussommes effectivement posée, parce qu’elle est pertinente. D’unepart, pour nous, les délais qui sont imputables au SARPAdevraient commencer à courir à partir du moment où le SARPAreçoit tous les documents requis. Ça, c’est... je pense que c’est labase au point de départ. L’autre élément, il nous semble que,compte tenu du caractère qui peut être rétroactif du réajuste-ment, un délai de 30 jours, donc ce qui correspond à un mois,devrait être pour nous la règle générale avec un maximum d’unautre délai de 30 jours, donc un deuxième mois dans les cas où ilpeut y avoir une nécessité, là, de poser des questions ou d’avoircertains compléments d’information. Donc, il nous apparaît quele délai d’un mois, ou de 30 jours, serait un délai raisonnable. Undélai de 60 jours serait un délai vraiment maximal.

M. Fournier : J’essaie de comprendre. Alors, 30 jours pourrépondre ? On veut avoir vos informations. 30 jours pour lesfournir, 31e jour, ce n’est pas obtenu encore, il y a relance pouraller chercher l’information à nouveau et au bout de 60 jours, là,les mécanismes prévus de revenu réputé prendraient leur place.C’est exact ?

Mme Saint-Germain (Raymonde) : Devraient. Effectivement,M. le Président, c’est comme ça que nous envisageons les choses.Maintenant, mieux vaut au début prévoir ce type de délai,quitte éventuellement à être en mesure de les resserrer, maisc’est important de voir que déjà, avec ces délais-là, on peut pen-ser... Il y a quand même un volume qui devrait être important.On peut penser que le SARPA nécessitera quand même des res-sources en conséquence, surtout au début. Vous savez, vousavez noté sans doute que j’ai parlé de l’importance des transi-tions. Au tout début, il y aura du rodage et ce sera vraiment

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258. Journal des débats, vol. 42, no 91, 15 :54. Celles-ci ont eu lieu les 22 et 23 mai2012. Voir, le Journal des débats non révisés à l’adresse suivante : <http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/ci-39-2/journal-debats/CI-120522.html#debut_journal>. Pour le 22 mai 2012, voir le Journal desdébats, vol. 42, no 91 : <http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/ci-39-2/journal-debats/CI-120522.html#debut_journal>.

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important que les ressources humaines soient en nombre perti-nent.

M. Fournier : Juste pour essayer d’avoir le plus de précisionspossible, parce que là, vous allez partir, là, puis à un momentdonné, nous autres, on va s’asseoir ensemble jusqu’au tempsqu’on ait le maximum d’information. Est-ce que vous me dites :On pourrait, plutôt que d’avoir un système basé sur 25 jours,comme vous dites fatal, ou un système que je comprenais, quiétait 30 plus 30. Il pourrait y avoir une autre version, qui seraitun 25 où, dans le 25, quand il y a un avis à l’effet que les docu-ments arriveront plus tard, il y aura un 25 plus un délai, disons,d’un plus 25 ou d’un plus 30. Mais une fois qu’on a déjà annoncé,dans le premier 25 jours que, oui, on voudrait répondre, on vou-drait collaborer, là, je suis pris avec différentes avenues. Quelleest l’avenue que vous considérez la meilleure ? Parce qu’envous écoutant, j’avais l’impression que vous me disiez : M. leministre, 30 plus 30, je trouve que je vous en donne pas mal desdélais, puis je n’en veux pas trop, mais en même temps, si c’estpour commencer comme il faut, donnons-nous plus de délais audébut, quitte à revenir plus tard. Là, je vous le dis, là, vu quevous demandez à ce qu’on mette tout dans la loi, là, il va falloirfaire un changement à la loi et non pas au règlement, mais bon,peu importe, c’est un détail, là... pas tant que ça, mais quandmême. Alors, est-ce que c’est votre formule que vous préférez ?

Mme Saint-Germain (Raymonde) : Alors, il y a trois élémentsdans... C’est une dimension très importante, il y a trois élé-ments. Premier élément, au-delà de la personne qui refuseraitou négligerait de fournir des règlements, pour ce qui est du délaide décision du SARPA, nous, on est d’avis que ça devrait êtreà l’intérieur de 30 jours à partir du moment où le SARPA areçu l’ensemble des documents pertinents et sollicités et undeuxième délai de 30 jours pour des situations particulières etplus complexes. Le deuxième volet réfère plus à la négligence ouau refus de l’un des ex parents, on peut présumer que ce seraittrès souvent le débiteur, de fournir les renseignements requis.Je pense qu’ici, le SARPA devrait avoir une possibilité, je veuxbien mesurer le mot, d’appréciation administrative. Je souligne« administrative » trois fois. Il peut y avoir de bonnes raisons...

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Mme Saint-Germain (Raymonde) : ...de fournir les rensei-gnements requis. Je pense qu’ici, le SARPA devrait avoir unepossibilité – je veux bien mesurer le mot – d’appréciation admi-nistrative. Je souligne « administrative » trois fois. Il peut yavoir de bonnes raisons. On parlait justement de l’exemple qui aété donné précédemment, un citoyen qui est dans le GrandNord, puis il y aurait eu communication tardive. Je pense qu’ilfaudrait que le SARPA là-dessus puisse avoir quand même unemarge de manœuvre et, dans le cas du troisième élément que jeveux vraiment aborder, qui est important, qu’est-ce qui doit êtredans une loi plutôt que dans un règlement ? Effectivement, onchange moins souvent ou plus facilement un projet de règlementqu’on peut changer une loi. Mais il est certain que ce qui est fon-damental, ce qui est lié à la stabilité de la mise en œuvre d’unprogramme doit être dans la loi et nous croyons au point dedépart que les critères qui devraient permettre l’appréciationadministrative pourraient être dans un règlement, mais qu’uncertain nombre de critères fondamentaux sur l’admissibilité,sur des délais de base dans lesquels le SARPA... à l’intérieurdesquels le SARPA devrait agir pourraient être ceux-là dans laloi. Je ne sais pas si j’ai clarifié. (nos soulignements)

Soulignons que le Protecteur du citoyen est le seul intervenantqui a proposé une réponse structurée à la « fameuse » question dudélai de 25 jours. Cette proposition a notamment comme avantage dene pas amener les parties devant la Cour supérieure. Reste à savoircomment sera balisée la discrétion de « l’officier SARPA » quant à cequi doit advenir pendant ce second délai.

Le projet de loi, comme il a été soumis, et le document de travailsur le règlement prévoient qu’à la fin du délai de 25 jours, « l’officierSARPA » attribuera un revenu présumé au parent récalcitrant selondes paramètres qui seront établis dans le règlement.

L’autre recours du parent qui a fait la demande et ne peut béné-ficier de l’information nécessaire résiderait dans le nouvel article596.1 C.c.Q., qui se lit comme suit (introduit par l’article 44 de la Loi) :

596.1. Afin de maintenir à jour la valeur des aliments dus à leurenfant, les parents doivent, à la demande de l’un d’eux et au plusune fois l’an, ou selon les modalités fixées par le tribunal, setenir mutuellement informés de l’état de leurs revenus respec-

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tifs et fournir, à cette fin, les documents prescrits par les règlesde fixation des pensions alimentaires pour enfants édictées enapplication du Code de procédure civile (c. C-25).

L’inexécution de cette obligation par l’un des parents confère àl’autre le droit de demander, outre l’exécution en nature et lesdépens, des dommages intérêts en réparation du préjudice qu’ila subi, notamment pour compenser les honoraires et déboursextrajudiciaires qu’il a engagés. (Nos soulignements)

Les parents doivent donc se tenir informés de l’état de leursrevenus respectifs en appuyant cette information des documents pré-vus par le Règlement sur la fixation des pensions alimentaires.

Cette obligation d’information fait l’objet d’une sanction. Nouscroyons que le test applicable pour obtenir les sommes prévues ausecond alinéa de l’article 596.1 C.c.Q. n’est pas celui des articles 54.1et suivants C.p.c., le test de l’article 596.1 est moins exigeant. Il seraimportant pour les tribunaux d’envoyer un message clair au parentrécalcitrant, et ce, peu de temps après l’entrée en vigueur du projet deloi. Soulignons en passant que la possibilité de réclamer des domma-ges-intérêts ne raccourcira pas nécessairement la durée des procès, lestress des parties, etc.

Les délais retenus aux fins de la demande d’information

Le législateur a finalement choisi un double délai à l’article 5,al.1 qui se lit comme suit :

5. Lorsque le parent fait défaut de fournir, dans les 30 jours sui-vant la date de l’envoi de la demande visée au deuxième alinéade l’article 4, les renseignements ou les documents permettantd’établir son revenu annuel, le SARPA notifie à nouveau sademande au parent par courrier recommandé ou certifié ou partout autre moyen susceptible de lui permettre de constituer unepreuve de la date de la réception de la demande. Lorsque leSARPA détient cette preuve et que le parent ne fournit pas cesrenseignements ou ces documents dans les 10 jours suivant ladate de la réception de la demande, le revenu annuel de ceparent est alors établi, pour l’application de la présente loi,conformément aux règles prescrites par règlement du gouver-nement. [...] (Nos soulignements)

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En vertu de l’article 6, le SARPA cesse l’examen d’une demandede rajustement dans les situations suivantes :

6. Le SARPA cesse l’examen d’une demande de rajustement s’ilest notifié d’une demande en justice entre les parties susceptibled’avoir une incidence sur la pension alimentaire dont le rajuste-ment est demandé. Il n’en reprend l’examen que si un désiste-ment de la demande en justice lui est notifié au plus tard dansl’année suivant le jour où il a été notifié de cette demande.

Le SARPA cesse également l’examen d’une demande de rajuste-ment si le parent qui a fait cette demande ou, dans le cas où lademande a été faite par les deux parents, l’un de ceux-ci l’avisequ’il a entrepris une médiation familiale susceptible d’avoir uneincidence sur la pension alimentaire dont le rajustement estdemandé. Il n’en reprend l’examen que si l’un de ces parents lelui demande au plus tard dans les trois mois suivant le jour où ila été avisé de la médiation entreprise.

Le parent qui fait l’objet d’une demande d’information de la partde l’« officier SARPA » doit fournir les renseignements et les docu-ments demandés dans les 30 jours suivant la date de la demande faiteen vertu de l’article 4, al. 2 dans le but d’établir son revenu annuel.Nous verrons plus loin, lors de l’étude des articles 5 et 9, que le prin-cipe de l’annualisation des revenus n’est peut-être pas aussi clair quele prévoient les Lignes directrices. Le parent qui fait défaut de four-nir l’information et les documents requis dans le premier délai de30 jours se verra à nouveau notifier une demande d’information ou deproduction de documents à la fin de ce premier délai et il bénéficieradès lors d’un délai supplémentaire de 10 jours pour faire suite à lademande de l’« officier SARPA ». À la fin de ce délai, lorsque l’« officierSARPA » détient la preuve de ces notifications et que le parent faittoujours défaut, l’officier établit le revenu annuel de ce parent envertu du règlement.

Le règlement d’application prévoit qu’à la fin du délai l’« officierSARPA » présumera un revenu au parent récalcitrant selon des para-mètres qui se retrouveront dans ce même règlement. Force est d’ad-mettre que la question du revenu présumé (art. 825.12 C.p.c.) aoccupé les tribunaux depuis l’entrée en vigueur des Lignes directricesen mai 1997 et qu’il est encore hasardeux aujourd’hui de tenter d’endresser des balises. Nous comprenons que la solution adoptée par lefutur règlement utilise un mécanisme uniquement mathématique,

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pour prévoir une hausse des revenus de ce parent, et non pas unebaisse. Selon le document de travail, une indexation de 15 % durevenu brut par exemple, certaines provinces utilisent aussi ce méca-nisme mais ont aussi des programmes progressifs259.

7.1.6 Le dessaisissement du SARPA

Le législateur prévoit à l’article 6 de la Loi que le SARPA cessel’examen d’une demande de rajustement dans les situations suivan-tes :

– Il reçoit notification d’une demande en justice susceptible d’avoirune incidence sur la pension alimentaire dont le rajustement estdemandé. Il n’en reprend l’examen que s’il est informé d’un désis-tement de la demande en justice au plus tard dans l’année suivantle jour où il a été notifié de cette demande. Cette règle vient élimi-ner la possibilité pour le SARPA de se saisir d’une demande ali-

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259. Dans certaines provinces c’est le mécanisme utilisé lorsqu’il n’est pas donnésuite à la demande d’information de l’« officier SARPA » par exemple :i) Au Manitoba : le Règlement du « Child Support Recalculations » édicte ce quisuit :Pourcentage applicable24.8(1.2) Pour l’application de l’alinéa (1.1)b), le pourcentage applicable est éta-bli en fonction du délai écoulé depuis la dernière détermination visée à l’alinéa(1.1)a), comme suit :a) délai de moins de 2 ans, 10 % ;b) délai d’au moins 2 ans mais de moins de 5 ans, 15 % ;c) délai d’au moins 5 ans mais de moins de 5 ans 20 % ;d) délai d’au moins 10 ans, 30 %.ii) En Alberta : le Child Support Recalculation Program Regulation, Alta Reg287/2009(3) For the purpose of subsection (2)(b), the applicable percentage shall be deter-mined based on the amount of time that has elapsed since the payor’s or reci-pient’s income was last determined in accordance with subsection (2)(a), asfollows :(a) where less than 1 year has elapsed, 10 % ;(b) where a year or more but less than 2 years has elapsed, 13 % ;(c) where 2 years or more but less than 3 years has elapsed, 16 % ;(d) where 3 years or more but less than 4 years has elapsed, 19 % ;(e) where 4 years or more but less than 5 years has elapsed, 22 % ;(f) where 5 years or more has elapsed, 25 %.iii) en Colombie-britannique le « Child Support Recalculation Pilot Project Regu-lation », BC Reg 129/20066 If a party does not provide information under section 3 (1) within the timeperiod required by section 3 (2), the service may, for the purposes of section 93.3(7) of the Act, recalculate the amount of child support by applying a 10 %increase to the income of the party used to determine the current child support.Les 22 et 23 mai 2012. Voir, le Journal des débats de l’Assemblée nationale.

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mentaire qui fait déjà l’objet d’une instance. Pour que le SARPApuisse être utilisé, la pension doit avoir été déterminée par le tri-bunal de façon définitive (il n’y a pas eu d’appel du jugement finalou l’appel a tranché la question alimentaire), le concept de « pre-mière détermination » renvoie donc à la situation où un jugementfinal est intervenu.

– Le parent qui a fait cette demande, ou un des parents dans le casd’une demande conjointe, l’avise qu’il a entrepris une médiationfamiliale susceptible d’avoir une incidence sur la pension alimen-taire dont le rajustement est demandé. Le SARPA ne reprendl’examen que si le parent le lui demande au plus tard dans lestrois mois suivant le jour où il est avisé de la médiation entreprise.Dans le même ordre d’idées, pour s’assurer de la validité du proces-sus quant à l’information détenue par « l’officier SARPA », lesparents sont tenus d’informer promptement ce dernier de toutchangement dans leur situation ou celle de leur enfant susceptibled’avoir une incidence sur le rajustement demandé (art. 7). On peutcependant se demander si, lorsque le législateur traite d’un chan-gement « dans celle de leur enfant », seules les modalités de gardesont visées ou si les ressources de ce dernier le sont également.Nous en doutons, l’enfant mineur, sauf en de très rares circonstan-ces, n’a pas à assumer son entretien. Vise-t-on l’enfant majeur quia confié le mandat au parent qui en a la charge de former lademande (art. 586 C.c.Q. et art. 2 LD) ? La réponse est « non », l’en-fant majeur n’est pas visé par la Loi. Il y aurait vraisemblablementeu lieu de préciser la signification de cette expression pour éviterune « avalanche » de demandes de comptabiliser les revenus acces-soires que réalise un enfant mineur aux études. L’autre effet seraitde contraindre le SARPA à se dessaisir de la demande qui nécessi-terait une appréciation judiciaire.

L’article 9 : l’appréciation judiciaire

L’article 9 aux alinéas premier et second se lit comme suit :

9. Le SARPA ne peut rajuster la pension alimentaire d’unenfant s’il constate, après avoir examiné les renseignementset les documents qui lui ont été fournis, que le rajustementdemandé nécessite l’exercice d’une appréciation judiciaire, saufs’il y a une entente entre les parents dans les cas et suivant lesmodalités prévus par règlement du gouvernement.

388 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

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Lorsqu’il ne peut rajuster la pension, le SARPA en avise parécrit tout parent qui a fait la demande de rajustement. Lorsquela demande de rajustement a été faite par un seul des parents, leSARPA transmet également une copie de l’avis à l’autre parentlorsqu’une demande de renseignements ou de documents lui aété notifiée suivant l’article 4. [...] (Nos soulignements)

Il ressort des commentaires du ministre de la Justice lors de l’é-tude du projet de loi et du texte même de la Loi que le SARPA prenden charge les cas clairs de modifications de la pension alimentairepour enfant, notamment :

– un changement au revenu à la hausse ou à la baisse, excluant lessituations où le débiteur alimentaire tente d’éluder ses obliga-tions ;

– la modification du pourcentage de temps de garde ;

– la modification du nombre d’enfants à charge ;

– la modification des frais prévus au formulaire qui n’ont plus depertinence, notamment ;

– les frais particuliers tels les traitements d’orthodontie, les frais degarde, la fréquentation d’une institution d’enseignement privéequi ne sont plus pertinents.

L’article 9260 est un article fondamental pour le SARPA, car ilexclut d’emblée ce que ne vise pas le service, à savoir les dossiers quinécessitent l’exercice d’une appréciation judiciaire et, par voie deconséquence, prévoit des situations où le SARPA ne peut rajuster lapension :

– Si l’« officier SARPA » constate, après avoir examiné les renseigne-ments et les documents fournis, que le rajustement demandénécessite l’exercice d’une appréciation judiciaire, il doit alors en

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 389

260. Qui se lit comme suit :8. Le SARPA ne peut rajuster la pension alimentaire d’un enfant s’il constate,après avoir examiné les renseignements et les documents qui lui ont été fournis,que le rajustement demandé nécessite l’exercice d’une appréciation judiciaire.Il en avise alors les parents par écrit.

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aviser les parents par écrit. Par exemple, il peut notamment yavoir mésentente :

– sur les revenus de l’une ou l’autre des parties ou des deux ;

– sur la question des frais de garde ;

– au sujet des frais d’études postsecondaires ;

– quant aux frais particuliers ;

– quant à la présence de difficultés excessives ou simples pour unparent.

On devrait aussi en déduire que toute situation qui met en causel’article 587.3 C.c.Q. relatif aux ententes entre les parties seraitexclue de la « juridiction » de l’« officier SARPA ». Cet article se litcomme suit :

587.3. Les parents peuvent, à l’égard de leur enfant, convenird’aliments d’une valeur différente de celle qui serait exigibleen application des règles de fixation des pensions alimentairespour enfants, sauf au tribunal à vérifier que ces aliments pour-voient suffisamment aux besoins de l’enfant. (Nos souligne-ments)

Toutefois, le premier alinéa de l’article permet à l’« officierSARPA » de rester saisi du dossier : « sauf s’il y a une entente entre lesparents dans les cas et suivant les modalités prévus par règlement dugouvernement. » La teneur des modalités prévues par règlement per-mettra de constater s’il y a contradiction. Est-il possible pour lesparents de s’entendre ou de déposer un document qui exclurait l’exer-cice d’une discrétion judiciaire ? Quelle serait alors la marge de man-œuvre (lire la discrétion) de l’« officier SARPA » ?

Le réexamen administratif

La solution qui a été retenue par le législateur de ce qu’il advientdu dossier s’il n’est pas visé par le service, à savoir que le SARPAavise les parents de ce fait, permet à l’un des parents de demander leréexamen de cette décision (art.9 al. 3) par la Commission des servi-ces juridiques.

390 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

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Personne n’est parfait, pas même l’« officier SARPA », et le légis-lateur a cru bon de prévoir un recours administratif à l’article 9, al. 3 :

Le parent qui a fait la demande de rajustement ou, dans le casoù la demande a été faite par les deux parents, l’un de ceux-cipeut demander par écrit le réexamen de la demande, lorsqu’ilest avisé que le SARPA ne peut rajuster la pension alimentaire.Le réexamen de la demande est alors effectué avec diligence parle président de la Commission des services juridiques ou par lapersonne qu’il désigne à cette fin.

On notera qu’aucun délai n’est prévu pour rendre la décision enréexamen. La demande se fait par écrit selon des modalités (formu-laires, délais) qui seront, nous l’espérons, prévues par règlement. Leréexamen ne vise que les situations où le SARPA a avisé les parentsqu’il ne peut rajuster la pension alimentaire. Encore ici, on doit s’in-terroger sur la latitude qui sera laissée au réviseur.

Mais qu’arrive-t-il ensuite si la demande de réexamen est rejetée ?Le dossier peut-il être confié à la Cour supérieure comme cela se faitaux petites créances ? Le cas échéant, selon quelles modalités et àquels coûts ? Le justiciable doit connaître les options qui s’offrent à luiet qui vont dans le sens d’une plus grande accessibilité à la justice. LaLoi n’en dit mot, l’option sera donc de saisir le tribunal de la demandede révision de la pension.

7.1.7 Le calcul du rajustement et la rétroactivité

En vertu de l’article 10 de la Loi, le SARPA rajuste la pensionalimentaire d’un enfant conformément aux règles de fixation des pen-sions alimentaires édictées en application du Code de procédurecivile. Il rajuste la pension à la date de la demande de rajustement ou,suivant les cas et dans la mesure prévus par règlement du gouverne-ment, à une date qui ne peut être antérieure à plus d’un an de celle dela demande. Le règlement d’application doit baliser les situations oùcette rétroactivité pourra dépasser la date de la demande. Cet articlese lit comme suit :

10. Le SARPA rajuste la pension alimentaire d’un enfant con-formément aux règles de fixation des pensions alimentairespour enfants édictées en application du Code de procédure civileet suivant les modalités prévues par règlement du gouverne-ment.

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Il rajuste la pension à la date de la demande de rajustement entenant compte des variations du revenu de l’un ou l’autre desparents ayant servi à établir la pension dont le rajustement estdemandé. Toutefois, si ce revenu a augmenté avant la date de lademande, il la rajuste à une date qui ne peut être antérieure àplus d’un an de celle de la demande ; qu’il y ait eu une ou plu-sieurs augmentations, il la rajuste pour chacune des périodes aucours desquelles ce revenu a augmenté, et ce, en ne tenantcompte que de l’augmentation relative à chaque période. (Nossoulignements)

Pour reprendre l’expression utilisée pendant l’étude article pararticle, le second alinéa de l’article 10 permet de « saucissonner » lesrevenus d’une partie, donc le montant de pension alimentaire dans lasituation visée. En effet, la période peut couvrir une partie d’année.Comme nous le mentionnions, la pension ne résultera pas toujoursd’un revenu annualisé (une moyenne annuelle) si le revenu a aug-menté avant la période de la demande en débutant par la premièreaugmentation dans l’année qui a précédé la demande. De toute évi-dence, si le principe demeure qu’une pension est payable à compter dela demande, le principe voulant que les aliments ne s’arréragent pasn’a plus la force contraignante qu’on lui a longtemps donnée, ce queconfirme le nouvel article 595 C.c.Q. Rappelons en terminant quedans la situation visée par le second alinéa, ce « saucissonnage » nepeut viser que des augmentations et non pas une diminution desrevenus.

La rétroactivité pour une période qui excède l’année de la demande

L’article 43 de la Loi modifie l’article 595 C.c.Q., lequel se litdésormais comme suit, pour prévoir une rétroactivité qui peut dépas-ser l’année :

595. On peut réclamer, pour un enfant, des aliments pour desbesoins existant avant la demande ; on ne peut cependant lesexiger au-delà de trois ans, sauf si le parent débiteur a eu uncomportement répréhensible envers l’autre parent ou l’enfant.

En outre, lorsque les aliments ne sont pas réclamés pour unenfant, ceux-ci peuvent l’être pour des besoins existant avant lademande sans néanmoins pouvoir les exiger au-delà de l’annéeécoulée ; le créancier doit alors prouver qu’il s’est trouvé en faitdans l’impossibilité d’agir plus tôt, à moins qu’il n’ait mis le

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débiteur en demeure dans l’année écoulée, auquel cas les ali-ments sont accordés à compter de la demeure. (Nos souligne-ments)

Les enseignements de la Cour suprême dans la quadrilogie261 etles arrêts récents de la Cour d’appel auront connu un écho, si on peutconsidérer qu’il y a arrimage avec les règles en matière de divorce etque le tribunal bénéficie désormais d’une discrétion en vertu du Codecivil pour étendre la période de rétroactivité. Le législateur a doncchoisi d’établir une balise de trois ans, sauf l’exception du comporte-ment répréhensible. Les tribunaux sont donc invités à suivre lesparamètres offerts par la quadrilogie et déjà appliqués en vertu duCode civil du Québec262. Quant au concept de comportement répré-hensible envers l’autre parent ou l’enfant, nous présumons que lelégislateur fait référence au même concept que celui défini par laCour suprême et qu’il s’agit bien d’un comportement répréhensiblerelatif à l’absence ou à l’inexactitude de l’information financièrefournie à l’autre parent et utiles à la détermination de la pension ali-mentaire, et non pas à des mauvais traitements ou à une conduiteodieuse. Nous réitérons que la faute ne devrait pas tenir une grandeplace en matière alimentaire.

7.1.8 L’avis de rajustement et sa correction

L’article 11 de la Loi263 prévoit que le SARPA avise par écrit lesparents du rajustement de la pension alimentaire auquel il a procédéet transmet une copie de cet avis au greffe du tribunal du district où aété rendue la dernière ordonnance alimentaire concernant l’enfant.On reprend ici le concept de l’article 70.1 C.p.c. Cet ajustement prendeffet à l’expiration d’un délai de 30 jours suivant la date de l’avis derajustement (art. 14).

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 393

261. D.B.S. c. S.R.G. ; L.J.W. c. T.A.R. ; Henry c. Henry ; Hiemstra c. Hiemstra, EYB2006-108061, J.E. 2006-1543 (C.S.).

262. Pour une revue des principes actuels, voir : Michel TÉTRAULT, « Commentairesur la décision G. (A.) c. V. (L.) – La rétroactivité en matière alimentaire : lesprincipes d’application, mais il y a plus... », dans Repères, mai 2012, La référenceDroit civil, EYB2012REP1168.

263. Qui se lit comme suit :« 11. Le SARPA avise par écrit les parents du rajustement de la pension alimen-taire auquel il a procédé et transmet une copie de cet avis au greffe du tribunaldu district où a été rendue la dernière ordonnance alimentaire concernantl’enfant.Un règlement du gouvernement prévoit la forme de l’avis de rajustement ainsique les documents qui doivent y être joints. »

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La forme de cet avis sera prévue par le règlement d’application.On constate que la « judiciarisation » est minimaliste, ce qui estconforme à l’esprit qui anime le législateur sur le plan de l’accessibi-lité.

Par ailleurs, si une rectification s’impose parce que l’avis derajustement contient une erreur d’écriture ou de calcul, le SARPApeut l’effectuer, et ce, tant que le rajustement n’a pas pris effet(art. 12). Ce pouvoir de révision en cas d’erreur d’écriture rejoint leprincipe de l’article 475 C.p.c. Dès lors, un nouvel avis sera produitaux mêmes conditions et indiquera les rectifications apportées.

Si un des parents apprend que l’information sur laquelle estfondé le rajustement n’est pas complète ou qu’il a été induit en erreur,nous sommes d’avis que le recours approprié sera de saisir le tribu-nal. Les principes qui servent de fondements au pouvoir du SARPAse rattachent en effet aux cas simples, à savoir l’application dubarème. De toute évidence, l’absence de transparence d’un ou desdeux parents ne doit pas pénaliser l’enfant. Nous croyons qu’il appar-tient au tribunal de trancher la question.

La prise d’effet du rajustement

Dans un premier temps, le législateur précise à l’article 13 qu’a-vant même sa prise d’effet, l’avis de rajustement peut constituer unecirconstance qui justifie la révision de la dernière ordonnance ali-mentaire concernant l’enfant. Ce rajustement pourrait donc consti-tuer un changement si une des parties souhaite saisir le tribunal dela question du rajustement de la pension alimentaire, ce qui allèged’autant son fardeau de preuve.

L’article 14 prévoit que le rajustement de la pension alimentaireprend effet à l’expiration d’un délai de 30 jours suivant la date de l’a-vis de rajustement ou, dans le cas où un nouvel avis de rajustementfaisant état de rectifications ayant une incidence sur la pension ali-mentaire a été transmis, à l’expiration d’un délai de 30 jours suivantla date de ce nouvel avis. La pension alimentaire rajustée est alorspayable et réputée, à toutes fins utiles, être celle fixée au titre de ladernière ordonnance alimentaire.

La Loi n’interdit pas à un parent de saisir le tribunal de la ques-tion de la pension alimentaire pour un enfant. Dans une telle situa-tion, soit lorsque le SARPA est notifié, dans le délai de 30 jours, d’une

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demande en justice instruite entre les parties et susceptible d’avoirune incidence sur la pension alimentaire faisant l’objet de l’avis derajustement, la prise d’effet du rajustement n’aura lieu que si leSARPA est notifié d’un désistement de cette demande en justice. S’a-git-il d’une possible tentation pour un parent de retarder l’entrée envigueur du rajustement en saisissant le tribunal ? Considérant lesnouvelles règles du jeu quant à la rétroactivité de la pension alimen-taire pour enfants et la possibilité d’une condamnation à des domma-ges et intérêts, une discrétion judicieusement exercée devrait limiterces situations.

Dès que le rajustement prend effet (art. 13), le SARPA transmetune copie de l’avis de rajustement au ministre du Revenu264. Si leparent qui reçoit la pension alimentaire reçoit des prestations de der-nier recours, le SARPA en transmet également une copie au ministreresponsable de l’application d’un programme d’aide financière dedernier recours prévu par la Loi sur l’aide aux personnes et aux famil-les265 (LAPF) si un des parents de l’enfant ou les deux sont prestatai-res d’un tel programme ou ont reçu, au cours de la période visée par lerajustement, des prestations en vertu d’un tel programme. Cette obli-gation qui incombait au bénéficiaire d’informer les autorités compé-tentes d’un changement dans le montant d’une pension alimentairepasse donc au SARPA.

Les frais exigibles

Dans le but de préciser que les personnes financièrement admis-sibles à l’aide juridique sont exemptées du paiement des frais et quecelles admissibles moyennant le versement d’une contribution neseront tenues au paiement de ceux-ci qu’à concurrence du montant dela contribution qui leur serait exigible en vertu de la LAPF, le législa-teur édicte aux articles 16 et suivants la marche à suivre pour bénéfi-cier d’une dispense de paiement (art.17) et les modalités de recouvre-ment de ces coûts (art.18). Les modalités de remboursement de ceux-ci seront prévues par règlement (art. 19).

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 395

264. Rappelons que c’est l’Agence du revenu du Québec qui est responsable del’application de la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Voir laLoi sur l’Agence du revenu du Québec, L.R.Q., c. A-7.003, art. 5 : « L’Agence estplacée sous la responsabilité du ministre. »

265. L.R.Q., c. A-13.1.1.

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7.1.9 Le pouvoir de réglementation

Le législateur bénéficie d’un large pouvoir réglementaire (art.35 à 41). Il faudra vérifier la teneur des dispositions du règlementd’application.

7.1.10 Les dispositions pénales : la vérité, juste la vérité

Les articles 24 à 26 de la Loi prévoient des dispositions pénalesqui interdisent les fausses déclarations :

24. Commet une infraction et est passible d’une amende d’aumoins 500 $ et d’au plus 5 000 $, quiconque, dans le cadre de laprésente loi ou de ses règlements :

1o fait une déclaration qu’il sait fausse ou trompeuse ouaurait dû le savoir ;

2o transmet un document sachant que celui-ci contient unrenseignement faux ou trompeur ou aurait dû le savoir.

25. Commet une infraction et est passible de la même peine quecelle prévue à l’article 24, quiconque, par un acte ou une omis-sion, aide ou, par un encouragement, un conseil, un consente-ment, une autorisation ou un ordre, amène une autre personneà commettre une infraction visée par la présente loi.

26. En cas de récidive, les minima et maxima des amendes pré-vues par la présente loi sont portés au double.

Soulignons que l’avocat fait l’objet des mêmes interdictions envertu de son Code de déontologie266.

396 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

266. R.R.Q., c. B-1, r. 3 : 4.02.01. En outre des actes dérogatoires mentionnés aux arti-cles 57, 58, 59.1 et ceux qui peuvent être déterminés en application du deuxièmealinéa de l’article 152 du Code des professions (L.R.Q., c. C-26), est dérogatoire àla dignité de la profession le fait pour un avocat :[...]d) de faire ou d’aider le client à faire une déclaration en droit ou en fait la sachantfausse ;e) de participer à la confection ou à la conservation d’une preuve, qu’il sait êtrefausse ou qui est manifestement fausse ;f) de cacher ou d’omettre sciemment de divulguer ce que la loi l’oblige à révéler oud’aider le client à cacher ou omettre de divulguer ce que la loi oblige ce dernier àrévéler ;g) d’aider ou, par un encouragement ou un conseil, d’amener le client à poser unacte qu’il sait illégal ou frauduleux ;[...].

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L’article 51 prévoit que le montant des amendes perçues envertu des articles 24 à 26 est versé au Fonds Accès Justice, qui est ins-titué en vertu de la Loi sur le ministère de la Justice267.

7.1.11 La protection de la vie privée

Les pouvoirs du SARPA de demander de l’information ontinquiété, à juste titre, plusieurs intervenants en raison de la protec-tion de la vie privée. L’article 8 de La loi prévoit ce qui suit :

8. Le SARPA peut, sans le consentement du parent, vérifierauprès des personnes, ministères et organismes déterminés parrèglement du gouvernement l’exactitude des renseignementsou des documents que ce parent lui a fournis pour procéder aurajustement demandé.

Cet article a fait couler beaucoup d’encre et l’encrier n’est pasvide... Il permet au SARPA, sans le consentement du parent, de véri-fier auprès des personnes, ministères et organismes déterminés parrèglement du gouvernement l’exactitude des renseignements ou desdocuments que ce parent lui a fournis pour procéder au rajustementdemandé. Et la vie privée, ont répondu les organismes profession-nels ? L’« officier SARPA » a-t-il plus de pouvoir que le tribunal ?Plusieurs intervenants s’entendaient sur le fait que les besoins ali-mentaires de l’enfant devraient permettre de passer outre à certainesréticences. Le Protecteur du citoyen, quant à lui, indiquait ce qui suitdans son intervention268 :

Mme Saint-Germain (Raymonde) : Il est important de consi-dérer le fonctionnement interne déjà de l’administration et com-bien le respect de la vie privée s’inscrit au cœur du fonction-nement de la perception des pensions alimentaires, s’inscritd’ailleurs au cœur du fonctionnement de façon générale de tou-tes les pratiques en matière de politique familiale, et j’insistepour dire qu’il y a présentement beaucoup d’ententes qui sontautorisées par la Commission d’accès à l’information qui sont

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 397

267. L.R.Q., c. M-19.268. Journal des débats, 22 mai 2012, 42, no 91, Celles-ci ont eu lieu les 22 et 23 mai

2012. Voir, le Journal des débats non révisés à l’adresse suivante : <http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/ci-39-2/journal-debats/CI-120522.html#debut_journal>. Pour le 22 mai 2012, voir le Journal desdébats, vol. 42, no 91 : <http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/ci-39-2/journal-debats/CI-120522.html#debut_journal>.

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rendues possibles par la Loi sur l’accès à l’information et qui ontpour but justement de protéger le traitement confidentiel derenseignements nécessaires et utiles à l’administration pourbien administrer les programmes. Alors, je vais vous donner,par exemple, pour l’administration du Régime québécois d’assu-rance parentale, il y a un certain nombre d’échanges de ren-seignements qui sont faits entre Revenu Québec et entre leministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale, déjà ce sont desrenseignements protégés. Il y a différents renseignements quisont faits entre... qui sont échangés par suite d’ententes entre leministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale et Revenu Qué-bec au niveau des bénéficiaires d’aide de dernier recours pours’assurer vraiment qu’on a accès aux bonnes données et quel’aide est fixée selon les bons critères, dans le respect de la loi.

Alors, à mon avis, ce serait la même chose pour le cas de l’exer-cice du SARPA, et je vois plutôt comme étant une balise et unegarantie de respect de cette confidentialité, tout en permettantl’accès aux renseignements nécessaires, pour que le SARPA tra-vaille avec diligence et rigueur que l’est... de telles ententespuissent être signées. Alors, moi, je ne vois pas de problème, dedifficulté de protéger la vie privée. Je vois, au contraire, lanécessité pour le SARPA, dans l’intérêt souvent des ex-conjointset certainement des enfants au bénéfice desquels la pension ali-mentaire est versée, à ce que l’information exacte soit acces-sible. Par ailleurs, qu’elle soit bien sûr protégée pour respecterla vie privée.

M. Fournier : Donc, lorsque le Barreau vient nous dire que lamarge de manœuvre du SARPA d’aller chercher de l’informa-tion est trop grande, vous nous dites : Si elle est bien encadré, envertu d’ententes qui protègent... donc d’ententes entre la Com-mission des services juridiques et les différents intervenantschez qui on peut aller chercher de l’information, cela, pour laProtectrice du citoyen, n’est pas un argument recevable ? Je neveux pas mettre des mots trop forts, là, mais...

Mme Saint-Germain (Raymonde) : En fait, les garantiesqu’offrent les ententes qui seraient à intervenir en vertu de laLoi sur l’accès à l’information qui seraient soumises à l’approba-tion de la Commission d’accès à l’information, donc les ententesque la Commission des services juridiques pour le SARPAauraient besoin de conclure notamment avec Revenu Québec,

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notamment avec le ministère de l’Emploi et de la Solidaritésociale, m’apparaissent, au contraire, essentielles, sources deprotection de la vie privée et nécessaires pour que le SARPAagisse avec diligence et pour que les ex-conjoints, en tout cascertainement le conjoint... l’ex-conjoint qui est créancier et lesenfants puissent être traités justement et que les pensionssoient révisées à la hauteur juste qui doit être celle à considérer.(Nos soulignements)

Dans le même ordre d’idées, une autre question à réévaluerconcerne l’application de l’article 22, qui se lit comme suit :

22. La Commission des services juridiques peut, dans l’applica-tion de la présente loi, communiquer à un parent un renseigne-ment concernant l’autre parent, sans le consentement de cedernier, lorsqu’il s’agit d’un renseignement sur la base duquel lapension alimentaire peut être rajustée. (Nos soulignements)

Les renseignements dont dispose la Commission des servi-ces juridiques proviennent des demandes d’aide juridique. Or, cesdemandes sont visées par le devoir de confidentialité :

91. Toutes communications faites par un requérant ou un béné-ficiaire à l’un des membres de la Commission ou d’un centre, audirecteur général ou à l’un quelconque de leurs préposés, a lemême caractère confidentiel qu’une communication entre clientet avocat, et toutes ces personnes qui reçoivent telles communi-cations sont tenues au secret professionnel.269

Rappelons que la Cour suprême dans l’arrêt Descôteaux c.Mierzwinsky270 a interprété le contenu de cette disposition commesuit :

13 À mon avis, c’est avec raison qu’il a été décidé qu’on ne doivepas nécessairement attendre la tenue du procès ou de l’enquêtepréliminaire où la communication est offerte ou sollicitée enpreuve pour faire valoir la confidentialité de celle-ci. Avec res-pect pour l’opinion contraire, j’estime cependant que, en prin-cipe, les renseignements ayant trait à l’état financier ainsi que

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269. Loi sur l’aide juridique et sur la prestation de certains autres services juridiques,L.R.Q., c. A-14.

270. EYB 1982-149037, J.E. 82-659 (C.S.).

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ceux concernant le fondement du droit et tous autres requis parla corporation ou par règlement (Loi sur l’aide juridique, art. 64)qu’un requérant d’aide juridique doit fournir pour obtenir lesservices d’un avocat sont, sauf les cas d’exception dont je traiteplus loin, privilégiés [...]. (nos soulignements)

Il ne s’agit pas d’obtenir d’un employeur ou d’un organisme gou-vernemental de l’information sur une personne, mais bien d’aller àl’encontre du devoir de confidentialité, qui est une valeur fondamen-tale de notre droit. L’équation est donc la suivante : un avocat qui aévalué l’admissibilité d’une personne et qui est lié par le devoir deconfidentialité pourrait voir son employeur le contraindre à divul-guer de l’information protégée. À notre humble avis, il y a un os, ontraite du devoir de confidentialité.

L’article 23 prévoit que sur demande, la Commission des servi-ces juridiques doit fournir au ministre les statistiques, rapports ouautres renseignements qu’il requiert relativement au SARPA et quine sont pas nominatifs.

7.1.12 L’entraide internationale

En vertu de l’article 28 de la Loi, le ministre de la Justice peutconclure une entente avec un gouvernement autre que celui du Qué-bec, l’un de ses ministères, une organisation internationale ou unorganisme de ce gouvernement ou de cette organisation en vue defaciliter le rajustement des pensions alimentaires pour enfants. Ondevrait lire cette disposition en conjonction avec la Loi concernantl’obtention et l’exécution réciproque des décisions en matières alimen-taires271.

7.1.13 Les modifications à la Loi sur l’aide juridique et surla prestation de certains autres services juridiques :le dossier conjoint comportant un consentementcomplet des parties ou le second volet

Les modifications apportées à la Loi sur l’aide juridique et sur laprestation de certains autres services juridiques272 visent essentielle-ment à permettre, dans les cas prévus par règlement, que des person-

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271. L.Q. 2005, c. 12. Cette loi, qui n’est pas encore en vigueur, s’inspire de la Conven-tion de La Haye sur le recouvrement international des aliments destinés auxenfants et à d’autres membres de la famille, <www.hcch.net>.

272. L.R.Q., c. A-14.

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nes « non financièrement admissibles à l’aide juridique puissentbénéficier des services professionnels d’un avocat pour l’obtentiond’un jugement relatif à une entente présentée dans une demandeconjointe et portant règlement complet en matière de garde d’enfantsou d’obligations alimentaires ». Ces services seraient accessiblesmoyennant le paiement des honoraires d’un avocat et des frais juridi-ques exigibles en vertu du tarif applicable en matière civile, et ce,dans la proportion et selon les modalités prévues par règlement.

Ainsi, les articles 29 à 41 de la Loi créent une nouvelle catégoriede « dossiers » permettant aux parties de bénéficier des services d’unavocat, soit pour obtenir un jugement relatif à une demande conjointeet portant règlement complet en matière de garde d’enfants ou d’obli-gations alimentaires pour un coût à être déterminé par règlement. Lelégislateur est peu disert dans la loi quant à l’étendue possible de cesdossiers qui viseront des questions touchant à la garde et la pensionpour l’enfant... Nous présumons que le règlement d’application nousinformera du coût de ces services (honoraires et déboursés) pour lesparties.

Soulignons que le fait que le dossier doive être constitué « con-jointement » restreint le champ d’application de la loi. Devrait-onélargir cette catégorie de services couverts à tout dossier qui com-porte une entente en matière de garde ou d’aliments, peu importe lafaçon dont il a débuté ?

Lors des consultations particulières273, le ministre de la Justicea été interrogé à savoir si une demande qui, à l’origine, n’est pasconjointe pourrait tout de même être visée par les articles 29 à 41 dela Loi :

M. Fournier : Me Verdon et M. le bâtonnier, vous avez abordéla question de l’ouverture de ce que vous appelez le « fast track »,l’ouverture de ce processus accéléré, non seulement lorsque lademande est conjointe mais lorsqu’au fur et à mesure de l’évolu-tion d’un dossier, le consentement puisse émerger et qu’une

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273. Journal des débats, mardi 22 mai 2012, vol. 42, no 91, Celles-ci ont eu lieu les 22et 23 mai 2012. Voir, le Journal des débats non révisés à l’adresse suivante :<http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/ci-39-2/jour-nal-debats/CI-120522.html#debut_journal>. Pour le 22 mai 2012, voir le Jour-nal des débats, vol. 42, no 91 : <http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/ci-39-2/journal-debats/CI-120522.html#debut_journal>.

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demande originellement contestée devenait conjointe. Je mepermets seulement de faire un commentaire. L’objectif étaitd’en prendre un peu moins large, quoiqu’en ce moment, déjà, lecode de procédures permettrait de le faire, mais à propos duSARPA et de ce qui est inclus, l’objectif était d’en prendre un peumoins large, justement pour que son adhésion ou que son accep-tabilité sociale ou juridique, devrais-je dire, soit la plus largepossible. Donc, en essayant d’en limiter la portée, nous nousdisions que les gens qui font œuvre dans le domaine juridiqueallaient y voir moins de transformations majeures. Ceci étant,on me rappelle, et je voudrais avoir vos commentaires là-dessus,que le code de procédures permet d’aller vers une procédurecomme celle-ci. Peut-être que les habitudes ne sont pas à ce ren-dez-vous là en ce moment, tant et si bien que même les habitu-des de district en district sont différentes les unes des autres.Mais quel est votre avis sur le fait qu’il existe en ce moment unecapacité de voir émerger du dossier contesté, le dossier deconsentement, et pour qu’il puisse avoir, donc, une procéduredite de « fast track » ?

M. Masson (Louis) : Bien, c’était justement l’une de nos préoc-cupations. Peut-être que notre lecture du projet cadre divergeun peu et que nous sommes dans les nuages. Je sais queMe Verdon a examiné cette question-là de façon plus précise et jevais lui laisser la parole, avec votre permission bien sûr.

M. Verdon (Jocelyn) : Alors, pour répondre à votre question,on est tout à fait conscients qu’à l’article 814, il y a une possibi-lité de fonctionner comme ça. Nous, notre préoccupation, c’estsimplement la suivante : on est d’accord avec les propositionsformulées, sauf qu’on voulait juste éviter qu’on ait deux systè-mes, c’est tout ce qu’on disait, nous. Alors, si on accepte, dans lecadre du SARPA, de fonctionner selon un système, on devraitl’ouvrir mais, en plus de 814, parce qu’on pourrait vous répondreque le système de fast track, vous n’avez pas non plus à le modi-fier, 814 le prévoit déjà. Alors, nous, ce qu’on dit, c’est : à chaquefois que vous arrivez avec une innovation, nous on vous répond :D’accord, mais ouvrez-le, laissez la concurrence agir, laissezle libre marché agir, laissez le plus de ressources possibleatteindre cet objectif de déjudiciariser. Mais, si vous avez unservice qui offre, pour 275 $, ou on ne sait pas encore les coûts,là, bien, laissons le Barreau avoir également, s’il y a des clientsqui sont déjà... vous êtes en région éloignée, par exemple, puis, il

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n’y a pas beaucoup d’avocats. Notre préoccupation, c’est : com-ment va-t-on s’y prendre s’il y a des conflits ? Alors, à cemoment-là, s’il y a des modes parallèles où il y a des ententes,bien, de prévoir dans la loi, ou dans un règlement, tout ce quevous accordez est possible aussi par un organisme parallèle.

M. Fournier : Peut-être qu’il est important de revenir sur... jepense que ça a été abordé à un moment donné, à savoir les avo-cats du privé, je pense que vous l’aviez soulevé. Peut-être que cen’était pas suffisamment clair – pourtant ce l’était très bien lorsde la présentation, ce l’était très bien lors des échanges avec leBarreau, encore une fois, on regardera les libellés – mais il estbien évident que l’aide juridique peut donner un mandat à unavocat du privé pour – comme ça se fait, là, en plein d’autrescas – pour l’application de celle-ci. Alors, réglons cette inquié-tude-là, qui est un peu du type de celle du ticket modérateur detantôt, là, des inquiétudes réglées.

Revenons sur le concept. Tantôt, je disais « en prendre trop largeou pas assez ». 814.1 existe, donc il est permis. Il ne connaît pasla mécanique de la Commission des services juridiques. Il n’estpas de cet ordre-là. Évidemment, vous comprendrez que, lors-qu’on lance un système comme celui-là, on doit d’abord s’assurerqu’il va fonctionner avec une vitesse de croisière. Moi, je ne dispas, à terme : est-ce qu’il y aura lieu qu’il y ait un seul chemin oudeux chemins ? Ce n’est pas la première fois où il y a une multi-plicité de chemins offerts à l’homme ou la femme de droit, maisje ne suis pas fermé à l’idée qu’à un moment donné, si on peut lessimplifier encore davantage, on pourra le faire. Mais le cheminque vous me conseillez aujourd’hui dans le projet de loi m’in-quiète parce qu’en termes de mise en place, d’application, on vase trouver à élargir beaucoup plus grand que ce qui est visé et onveut s’assurer justement que la mise en place se fasse de façongraduelle, se fasse correctement. C’est un nouveau mécanisme,là, duquel d’ailleurs... après lequel on court depuis les plus...

M. Fournier : ...on va se trouver à élargir beaucoup plus grandque ce qui est visé, et on veut s’assurer justement que la mise enplace se fasse de façon graduelle, se fasse correctement. C’est unnouveau mécanisme, là, duquel d’ailleurs... après lequel oncourt depuis plus des 10 dernières années, pour des bonnes rai-sons que soulevait le Barreau, sur la question de la défense desintérêts juridiques des gens, prévoir où on pouvait trouver le

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réceptacle à faire ces choses-là, et je pense qu’en trouvant lesbureaux d’aide juridique qui sont un peu partout sur les territoi-res, on permettait de favoriser l’accès, on permettait d’avoir desjuristes qui sont impliqués dans le coup, de protéger, donc, l’in-térêt des gens. On avait même recours aux avocats privés qui,sur mandat d’aide juridique, pouvaient exercer. Donc, même ladimension en région que vous soulignez me semble couverte parles deux volets. Ceci étant, si vous voulez, vous pouvez me contreargumenter, mais je voulais juste vous expliquer que ce qui,sous l’aspect d’un système unifié, peut paraître intéressant sousl’aspect de la mise en œuvre, de l’application au jour un, pouvaitreprésenter un nombre de dossiers non encore évalués, là, pourl’instant.

M. Verdon (Jocelyn) : D’où la proposition du Barreau. C’estque si vous avez trop de volume, le fait de permettre dans la loi,simplement, de dire si le Barreau adhère aux règles que vousallez émettre, puis ... soit critiqué ou quoi que ce soit, puis offreles mêmes services, bien vous pourriez, à ce moment-là, avoirune sous-traitance ou un système parallèle qui désengorge.L’exemple de ça, c’est le percepteur des pensions.

M. Fournier : À part votre sous-traitance, là, à la Commissiondes services juridiques, il ne fait plus le travail qui est prévu ici ?

M. Verdon (Jocelyn) : Bien, ça pourrait être carrément un sys-tème parallèle qui répond aux mêmes exigences puis qui neserait plus au privé. C’est ce que nous, on soulève. C’est ce qu’onpropose.

M. Fournier : Pourquoi on devrait faire ça ?

M. Verdon (Jocelyn) : Parce que si vous avez un système quidit qu’on peut aller à la commission des affaires juridiques pourtel prix, si le Barreau se joint puis il dit : Nous, on est prêts àoffrir les mêmes services que ceux offerts, mais au privé, lesmêmes, identiques. Alors, vous allez me dire : On peut passerpar 814.1. Oui, tout à fait. Vous avez raison. Si ça clôt pour vousle problème, à ce moment-là...

M. Fournier : Bien, je ne le sais pas, là. 814.1, ça ne règle pas leproblème pour vous ?

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M. Verdon (Jocelyn) : Bien, c’est parce que nous, on s’est dit :Pourquoi, à ce moment-là, modifier la loi, si 814.1, il peut êtreutilisé par tous ? C’est ça que je veux...

M. Fournier : Parce que là, ça mettait en place un système quipermettait de vérifier dès le départ les droits des uns et desautres, dans quel système on peut se... peut-on valablement êtredans un SARPA ? Est-ce qu’on est plutôt dans une homologa-tion ? Il y avait tout cet aspect d’analyse. On ne peut pas allerjuste à 814.1. En fait, si on n’avait plus 814.1, vous seriez devantmoi pour me dire d’autres choses, je pense. Mais si on a fait unsystème qui permettait aux parties de s’entendre, là... bienvoyez-vous, en fait, je pense qu’on...

M. Verdon (Jocelyn) : Non, en fait, vos préoccupations, nous,tout ce qu’on dit, c’est que si c’était ouvert au privé, en parallèle,nous, on pense que ça réglerait bien des cas, mais si pour vous814.1 règle le problème, à ce moment-là...

La création du système parallèle réclamé par le Barreau a reçule même accueil que le réseau de réviseurs que la Chambre des notai-res souhaitait mettre en place. Le mot d’ordre est « Let’s keep itsimple ! » dans l’attente des résultats de la mise en place de ces nou-veaux mécanismes.

Les articles 814.1 et 44.1 C.p.c. dont il est question dans lesextraits reproduits ci-dessus se lisent comme suit :

814.1. Les demandes qui, en vertu du deuxième alinéa de l’ar-ticle 44.1, sont de la compétence du greffier spécial lui sont pré-sentées directement et ne requièrent pas d’audition.

44.1. Le greffier spécial statue notamment sur :

1. toute demande, contestée ou non, pour réunion d’actions,cautionnement, assignation d’un témoin en vertu de l’ar-ticle 282, communication, production ou rejet de pièces, exa-men médical, précisions, amendement, modification d’uneentente en vertu de l’article 151.2, substitution de pro-cureur, nomination d’un praticien et pour être relevé dudéfaut ou pour cesser d’occuper ; et sur

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2. toute autre procédure interlocutoire ou incidente, noncontestée ou contestée mais, dans ce dernier cas, avec l’ac-cord des parties.

Le greffier spécial peut, lorsqu’il s’agit de demandes relati-ves à la garde d’enfants ou à des obligations alimentaires,homologuer toute entente entre les parties portant règle-ment complet de ces questions. L’entente homologuée a lemême effet et la même force exécutoire qu’un jugement de laCour supérieure.

Le ministre de la Justice rappelle par ailleurs certains princi-pes, à savoir la gratuité des services pour la clientèle admissible,incluant le maintien du volet contributif (art. 29), et le maintien de lamixité (privé et permanent). Certes, des personnes non admissiblesfinancièrement auront tout de même accès aux services de l’aide juri-dique, mais devront supporter certains coûts qu’indiquera le règle-ment d’application. C’est pourquoi l’article 3.1 de la Loi sur l’aidejuridique et sur la prestation de certains autres services juridiques (laLoi sur l’aide juridique) est modifié par la suppression du mot « finan-cièrement » (art. 29). Il en est de même de la modification de l’article3.2 (art. 30), de celle de l’article 4 (art. 31), de l’article 22 (art. 36) et del’article 32.1 (art. 37).

Cependant, selon l’article 32 de la Loi, cette admissibilité « par-ticulière » vise les services prévus par l’article 4.7 de la Loi sur l’aidejuridique :

32. L’article 4.7 de cette loi est modifié :

1o par l’ajout, à la fin du paragraphe 1o, de ce qui suit : « , sousréserve du paragraphe 1.1o » ;

2o par l’insertion, après le paragraphe 1o, du suivant :

1.1o lorsqu’il s’agit, dans les cas prévus par règlement,de fournir à des parties les services professionnels d’unavocat pour l’obtention d’un jugement relatif à uneentente présentée dans une demande conjointe et por-tant règlement complet en matière de garde d’enfantsou d’obligations alimentaires ; » (nos soulignements)

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L’article 4.11, tel qu’il est modifié par l’article 33 de la Loi, pré-voit les conséquences d’une mésentente postérieure au dépôt d’unedemande conjointe :

33. Cette loi est modifiée par l’insertion, après l’article 4.11, dusuivant :

4.11.1. L’aide juridique accordée pour les services juridi-ques prévus au paragraphe 1.1o de l’article 4.7 peut êtreretirée lorsqu’il est constaté par l’avocat qu’il n’est plus pos-sible pour les parties de s’entendre.

Le cas échéant, l’avocat qui n’est pas à l’emploi d’un centreou de la commission a droit au paiement des honoraires éta-blis par application de l’article 83.21 et les parties ont droitau remboursement du montant déterminé par règlementlorsque le retrait leur est notifié. (nos soulignements)

Par ailleurs, l’article 35 de la Loi limite les honoraires et lesdéboursés pour la personne qui n’est pas financièrement admissible :

35. Cette loi est modifiée par l’insertion, après l’article 5, du sui-vant :

5.1. La personne admissible suivant le deuxième alinéa del’article 4 à qui l’aide juridique est accordée n’est tenue aupaiement que des honoraires d’un avocat pour les servicesjuridiques prévus au paragraphe 1.1o de l’article 4.7 et desfrais judiciaires exigibles en vertu du tarif applicable enmatière civile, et ce, uniquement dans la proportion et selonles modalités prévues par règlement.

Les honoraires visés au premier alinéa sont ceux établis parapplication de l’article 83.21.

Le nouvel article 62 (art. 38) prévoit les modalités d’obtention del’aide juridique pour les services juridiques prévus au paragraphe1.1o de l’article 4.7. Le dernier alinéa de ce nouvel article se lit commesuit :

Sauf pour les services juridiques prévus au paragraphe 1.1o del’article 4.7, la personne qui demande l’aide juridique est tenued’acquitter, pour l’étude de sa demande, les frais au montant

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fixé par règlement, à moins qu’elle ne reçoive une prestation,autre qu’une prestation spéciale, en vertu d’un programmed’aide financière de dernier recours prévu à la Loi sur l’aide auxpersonnes et aux familles (c. A-13.1.1) ou qu’elle y soit admis-sible. (nos soulignements)

Est-ce que nous subodorons le ticket modérateur ? L’article 62,dans sa forme actuelle, se lit comme suit :

62. Une personne qui demande l’aide juridique doit, conformé-ment aux règlements, en faire la demande au centre local accré-dité en vertu de la présente loi ou au bureau le plus proche dulieu de sa résidence.

Cette personne est tenue d’acquitter, pour l’étude de sa demande,les frais au montant fixé par règlement, à moins qu’elle nereçoive une prestation, autre qu’une prestation spéciale, envertu d’un programme d’aide financière de dernier recoursprévu à la Loi sur l’aide aux personnes et aux familles (c. A-13.1.1) ou qu’elle y soit admissible.

Or, le Règlement sur l’aide juridique ne prévoit pas de telsfrais274... du moins pas encore. Il s’agirait là d’une entorse sérieuse auprincipe de la gratuité. Toutefois, lors des consultations particuliè-res275, le ministre de la Justice a émis le commentaire suivant :

M. Fournier : Merci beaucoup. Alors, peut-être commencer parla dernière intervention de Me Kirouac, en même temps que... jel’avais pris en note et je vais faire un x dessus, comme ça je vaisavoir couvert le sujet. Ce n’est pas ça que dit l’article, c’est pournotre interprétation, mais on va le relire évidemment pours’assurer qu’il soit écrit correctement, mais il n’est pas questionque ceux qui sont admissibles à l’aide juridique paient pour êtreadmissibles à l’aide juridique, ce n’est pas... ce n’est absolumentpas ce qui est visé par la loi, mais on va relire quand même lelibellé pour s’assurer qu’il... des fois on les réécrit, hein, il n’y a

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274. R.R.Q., c. A-14, r. 2.275. Journal des débats, mardi 22 mai 2012, vol. 42, no 91. Celles-ci ont eu lieu les 22

et 23 mai 2012. Voir, le Journal des débats non révisés à l’adresse suivante :<http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/commissions/ci-39-2/journal-debats/CI-120522.html#debut_journal>. Pour le 22 mai 2012, voir le Jour-nal des débats, vol. 42, no 91 : <http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux- parlemen-taires/commissions/ci-39-2/journal-debats/CI-120522.html#debut_ journal>.

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pas de problèmes, pour s’assurer qu’il dise ce qu’il a à dire, maisce n’est vraiment pas l’objectif qui est visé, au contraire l’objectifde toute la loi... d’ailleurs j’ai noté que, dans la fin de la présenta-tion de M. le bâtonnier, vous dites que le Barreau appuyait leprincipe du projet de loi, eh bien le principe du projet de loi c’estjustement de favoriser l’accès à la justice en matière familiale,ce n’est pas de le rendre plus difficile, ce qui serait une des consé-quence de l’interprétation que vous avez, ce n’est vraiment pasle cas, ce n’est pas non plus ce qu’on voit dans le texte mais on vale regarder à nouveau. Alors ça, ça me semble important de lepréciser. (nos soulignements)

L’article 39 de la Loi modifie également l’article 64 pour prévoirce qui suit :

Le requérant doit, conformément aux règlements, exposer sasituation financière et, selon le cas, celle de sa famille, à moinsqu’il soit admissible suivant le deuxième alinéa de l’article 4 etqu’il déclare, de la manière prévue par règlement, ne pas êtrefinancièrement admissible.

Le requérant doit également établir les faits sur lesquels sefonde sa demande conformément aux règlements.

Quant à l’article 40 de la Loi, il modifie l’article 66 afin qu’il selise comme suit :

Le directeur général délivre une attestation d’admissibilité àchaque personne à laquelle l’aide juridique est accordée.

Toutefois, il délivre une seule attestation pour les parties à uneentente auxquelles l’aide juridique est accordée pour les servi-ces juridiques prévus au paragraphe 1.1o de l’article 4.7.

La forme et le contenu de l’attestation sont déterminés parrèglement.

L’attestation doit être remise par le bénéficiaire, sans délai, àson avocat ou à son notaire qui la dépose au dossier de la cour ou,selon le cas, au bureau de la publicité des droits.

L’attestation n’est valide que pour la période, le litige, la pour-suite ou le service juridique que le directeur général détermine.

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Rappelons que les services juridiques prévus au paragraphe1.1o de l’article 4.7 font référence à la demande conjointe de garde etde pension alimentaire.

Enfin, l’article 41 de la Loi confère au législateur un pouvoirréglementaire quant à la fixation des frais exigibles dans les cas viséspar la demande conjointe.

7.1.14 Le Code civil du Québec

La Loi, à son article 42, modifie l’article 594 C.c.Q. Cette disposi-tion se lit actuellement comme suit :

594. Le jugement qui accorde des aliments, que ceux-ci soientindexés ou non, est sujet à révision chaque fois que les circons-tances le justifient.

Toutefois, s’il ordonne le paiement d’une somme forfaitaire, il nepeut être révisé que s’il n’a pas été exécuté.

Le nouvel article se lirait plutôt comme suit :

594. Le jugement qui accorde des aliments, que ceux-ci soient ounon indexés ou rajustés, est sujet à révision chaque fois que lescirconstances le justifient.

Toutefois, s’il ordonne le paiement d’une somme forfaitaire, il nepeut être révisé que s’il n’a pas été exécuté. (nos soulignements)

Le législateur prévoit également qu’en vertu du nouvel article595 C.c.Q., la rétroactivité en matière d’aliments pour les autrescréanciers se limitera à un an. Le lecteur pourra consulter nos com-mentaires à ce sujet dans la section portant sur la rétroactivité.

7.1.15 Le calcul du rajustement et la rétroactivité

La loi ajoute l’article 596.1 C.c.Q. (art. 44), qui vise à maintenirl’échange d’informations financières entre les parents. Il se lit commesuit :

596.1. Afin de maintenir à jour la valeur des aliments dus à leurenfant, les parents doivent, à la demande de l’un d’eux et au plusune fois l’an, ou selon les modalités fixées par le tribunal, se

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tenir mutuellement informés de l’état de leurs revenus respec-tifs et fournir, à cette fin, les documents prescrits par les règlesde fixation des pensions alimentaires pour enfants édictées enapplication du Code de procédure civile (c. C-25).

L’inexécution de cette obligation par l’un des parents confère àl’autre le droit de demander, outre l’exécution en nature et lesdépens, des dommages intérêts en réparation du préjudice qu’ila subi, notamment pour compenser les honoraires et déboursextrajudiciaires qu’il a engagés.

En terminant sur cette question, soulignons que dans ses repré-sentations lors des consultations particulières, la Chambre des notai-res a demandé à ce que les recours visés dans le second volet fassentdésormais partie des matières non contentieuses pour que ses mem-bres puissent représenter les parties après avoir préparé l’entente.La suggestion n’a pas été relevée. Il en a été de même de la demandefaite dans le cadre du premier volet (le rajustement), visant à ce quel’avis préparé par le notaire, que l’on considérerait comme un acteauthentique, n’ait pas à faire l’objet d’une « homologation » auprès dugreffier.

7.1.16 La Loi sur l’aide aux personnes et aux familles

L’article 93 de la Loi sur l’aide aux personnes et aux familles276

est modifié pour que l’on considère un nouveau calcul des prestationssi la pension alimentaire est rajustée pour cette période.

7.1.17 Le Code de procédure civile

L’article 331.9 C.p.c. (art. 46) est modifié par le remplacementdu dernier alinéa. Cette disposition se lit actuellement comme suit :

331.9. Les parties doivent reprendre possession des piècesqu’elles ont produites, une fois l’instance terminée. À défaut, legreffier les détruit un an après la date du jugement ou de l’actemettant fin à l’instance, à moins que le juge en chef n’en décideautrement.

Lorsqu’une partie, par quelque moyen que ce soit, se pourvoitcontre le jugement, le greffier détruit les pièces dont les parties

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 411

276. L.R.Q., c. A-13.1.1.

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n’ont pas repris possession, un an après la date du jugementdéfinitif ou de l’acte mettant fin à cette instance, à moins que lejuge en chef n’en décide autrement.

Font cependant exception à ces règles les formulaires produitspar les parties en matière de fixation de pensions alimentairespour enfants.

La modification vise le dernier membre de phrase du troisièmealinéa, qui se lirait comme suit :

Font cependant exception à ces règles les formulaires de fixa-tion des pensions alimentaires pour enfants joints au jugementsuivant l’article 825.13.

Il s’agit en fait de faire la corrélation avec le nouvel alinéa del’article 825.13 C.p.c. (art. 50), qui se lirait comme suit :

Le formulaire de fixation des pensions alimentaires ayant serviau tribunal pour fixer la pension alimentaire d’un enfant doitêtre joint au jugement qui l’accorde.

On conviendra que cette façon de faire rendra les choses plusfaciles et évitera la recherche à travers de nombreuses simulations del’annexe I qui peuvent se trouver dans le dossier de la Cour et qui peu-vent porter à confusion.

Le législateur ajoute les articles 47, 48 et 49 lesquels se lisentcomme suit :

47. L’article 814.3 de ce code est modifié par l’insertion, après lesmots « et qu’une copie du rapport du médiateur », de « ou, le caséchéant, d’une attestation de participation ».

48. L’article 814.6 de ce code est modifié par le remplacement,dans le dernier alinéa, de la dernière phrase par la phrase sui-vante : « À l’issue de cette séance, une attestation de participa-tion est remise par le Service à chacune des parties présentes. ».

49. L’article 814.13 de ce code est modifié par l’insertion, aprèsles mots « le rapport d’un médiateur », des mots « ou l’attestationde participation à une séance d’information de groupe ».

412 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

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Ces articles visent à préciser qu’à l’issue d’une séance d’infor-mation de groupe portant sur la médiation, une attestation de parti-cipation sera remise par le Service de médiation familiale à chacunedes parties présentes. Les parties obtiennent donc sans délai le docu-ment nécessaire pour être entendues en vertu de l’article 814.3 duCode.

7.1.18 La Loi facilitant le paiement des pensionsalimentaires ou le troisième volet

Le troisième volet concerne la remise de la sûreté exigée envertu de la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires277

dans des conditions très précises.

L’article 34 de cette loi (art. 52) est modifié par l’insertion, aprèsle deuxième alinéa, du suivant :

Lorsque l’exemption a été accordée depuis au moins deux ans, leministre remet de même la sûreté au débiteur qui le demande sile créancier y consent et qu’aucuns arrérages ni frais ne sontdus.

Cette modification a été réclamée par la quasi-totalité des orga-nismes présents lors des consultations. En effet, la valeur de la sûretéétait fréquemment inférieure aux coûts des procédures nécessairespour la récupérer. Cette nouvelle façon de faire permettra désormaisde régler facilement, selon le libellé proposé, le retrait des sûretés ali-mentaires versées antérieurement par le débiteur alimentaire à titrede garantie du paiement futur des aliments. À ce jour, pareille chosen’était possible que lors de l’annulation de la pension alimentaire etexclusivement sur prononcé d’un jugement.

Nous croyons qu’un mécanisme similaire pourrait être utilisédans le cas des pensions alimentaires pour les enfants majeurs oudans divers cas évidents d’extinction de l’obligation alimentairerésultant :

– du décès du créancier alimentaire ;

– du fait que le parent qui a versé la sûreté devient le parent gardien,sans pension alimentaire ;

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 413

277. L.R.Q., c. P-2.2.

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– du fait que l’enfant majeur, de façon évidente et le tout appuyéd’une déclaration écrite, n’est plus un enfant à charge au sens de laloi.

Lors des consultations particulières, le Protecteur du citoyenavait proposé que le SARPA soit visé à titre d’organisme public parles dispositions du Protecteur du citoyen, ce que reconnaît l’article 53en intégrant le SARPA à titre d’organisme public au sens de l’article15 de la Loi sur le Protecteur du citoyen278.

7.1.19 Les conflits d’intérêts

Une autre considération que le praticien devra garder à l’espritest l’existence de conflits d’intérêts potentiels. En effet, dès lors qu’ilaura agi comme « officier SARPA » dans le cadre d’un réajustement, ilne pourra plus agir contre l’une ou l’autre des parties dans un litigeultérieur ayant une connexité avec le processus de réajustement.Il en sera de même lorsque le praticien représentera conjointementles deux parties. Rappelons que, dans le cas d’une demande conjointe,il n’y a pas de devoir de confidentialité entre les parties et que le pro-cureur doit divulguer toute information qu’il reçoit à l’autre partie.Il s’agira sûrement d’une considération à évaluer pour le praticienqui souhaite agir dans l’une ou l’autre de ces situations.

7.1.20 Un peu de terminologie

Sans tomber dans l’exégèse de ce qui s’est écrit et dit au cours dela consultation qui a eu lieu dans le cadre de ce projet de loi, souli-gnons qu’on a beaucoup utilisé le terme « homologation » quant au faitpour le huissier d’intégrer l’avis de rajustement dans le dossier de laCour (premier volet) ou, encore, d’« homologuer » la convention issued’une demande conjointe (second volet). On retrouve ce concept à l’ar-ticle 44(2), al. 2 C.p.c. :

44.1. Le greffier spécial statue notamment sur :

1. toute demande, contestée ou non, pour réunion d’actions, cau-tionnement, assignation d’un témoin en vertu de l’article 282,communication, production ou rejet de pièces, examen médical,précisions, amendement, modification d’une entente en vertude l’article 151.2, substitution de procureur, nomination d’un

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278. L.R.Q., c. 32.

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praticien et pour être relevé du défaut ou pour cesser d’occuper ;et sur

2. toute autre procédure interlocutoire ou incidente, non con-testée ou contestée mais, dans ce dernier cas, avec l’accord desparties.

Le greffier spécial peut, lorsqu’il s’agit de demandes relatives àla garde d’enfants ou à des obligations alimentaires, homolo-guer toute entente entre les parties portant règlement completde ces questions. L’entente homologuée a le même effet et lamême force exécutoire qu’un jugement de la Cour supérieure.

Dans tous les cas, la décision peut être révisée par le juge en sui-vant les formalités prévues par l’article 42. (nos soulignements)

Or, on ne peut homologuer que ce qui peut faire l’objet d’unetransaction, ce qui exclut notamment toutes les questions qui inté-ressent l’ordre public (art. 2632 C.c.Q.), ce qui inclut certainement lecas de la garde et des aliments. Dès lors, le tribunal devrait entérinerla convention et la déclarer exécutoire. Dans l’arrêt Droit de lafamille – 083185279, la Cour indique ce qui suit :

21 Le terme « homologation » est impropre puisqu’en matièrefamiliale il n’y a pas de transaction et donc pas d’homologation,comme le rappelle le juge :

Cela étant dit, mentionnons que dans un arrêt récent, la Courd’appel considère que :

En effet, il ne peut être attribué aux conventions alimentai-res le caractère d’une transaction avec les conséquences quelui confère l’article 2633 C.c.Q. (la chose jugée), puisque l’ac-cord des parties demeure soumis à l’appréciation du tribu-nal à qui le législateur a conféré compétence en vertu de laLoi. Le juge doit alors considérer les besoins et les facultésdes parties, et vérifier notamment si les objectifs et les fac-teurs énumérés à la Loi (art. 15.2) sont satisfaits.*

* L.V. c. R.D., [2006] R.D.F. 17, par. 39.

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 415

279. EYB 2008-151813, [2009] R.D.F. 8, 2008 QCCA 2405, J.E. 2009-111 (C.A.).

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La question fut aussi analysée par notre Cour et voici ce qu’écrità ce sujet monsieur le juge Guthrie :

[37] However, the Court has serious doubts as to whether anagreement reached at the end of a settlement conference oncorollary measures in a divorce case, is a transaction. Firs-tly, article 2631 C.C.Q. defines a transaction as a contractby which the parties put an end to a lawsuit. In a divorcecase, an agreement on corollary measures does not put anend to the lawsuit ; only the divorce judgment can do this.Secondly, in one sense, such an agreement can never havethe « authority of a final judgment » as is required by article2633 C.C.Q. because, under sections 17(1), 17(4.1) and 17(7)of the Divorce Act, even an agreement confirmed by thecourt, can be varied subsequently by the court, dependingon the circumstances. Thirdly,[...]*

* R.B. c. C.C.W., [2004] R.D.F. 423.

Par ailleurs, on admettra que l’utilisation du concept d’homolo-gation est passée dans les mœurs juridiques.

7.1.21 Les dispositions transitoires

L’article 57 de la Loi prévoit que les dispositions de celles-cientrent en vigueur aux dates fixées par le gouvernement, donc pardécret, sauf pour les articles 43 (modifiant l’article 595 C.c.Q.), 44(ajoutant l’article 596.1 C.c.Q.), 52 (portant sur la sûreté) et 55 (relatifà l’adoption du règlement), qui sont entrés en vigueur le jour de lasanction, soit le 15 juin 2012. Quant au premier volet qui vise la créa-tion du SARPA et du second volet relatif à l’homologation de certai-nes demandes conjointes, le premier entrerait en vigueur dans les12 mois de l’entrée en vigueur de la loi et le second, dans les six moisde l’entrée en vigueur de la loi.

Le présent texte n’a certes pas la prétention de rapporter defaçon exhaustive toutes les suggestions et modifications mises de l’a-vant pendant les consultations particulières et qui ont été revuesdans le cadre de l’étude détaillée du projet de loi 64.

Celui-ci est donc composé de trois volets. Dans un premiertemps, le législateur crée un mécanisme de rajustement des pensionsalimentaires et un service administratif, le SARPA, au sein de la

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Commission des services juridiques pour le rajustement des pensionsalimentaires (art. 2 à 28). On vise les situations où aucune discrétionjudiciaire n’a à être exercée lors de la détermination de la pension ali-mentaire pour enfants mineurs et où le rajustement consiste à appli-quer les tables. Ce service administratif aura une compétence trèslimitée et ne privera en rien les citoyens de leur droit de saisir les tri-bunaux pour tous les cas où l’application stricte de la grille de calculne s’applique pas.

Quant au deuxième volet, le projet de loi modifie la Loi sur l’aidejuridique afin d’accorder aux personnes autrement inadmissibles uncertain accès aux services professionnels d’un avocat pour obtenir unjugement relatif à la garde d’un enfant ou à la pension alimentaire,sur demande conjointe et projet d’accord.

Enfin, le dernier volet vise la remise, dans certains cas, de lasûreté déposée auprès de l’Agence du revenu du Québec pour garan-tir le paiement de la pension lorsque les parties ont choisi de s’exclurede l’application de la Loi facilitant le paiement des pensions alimen-taires.

Il s’agit là d’un gain pour les justiciables, que nous souhaitonsêtre le premier jalon de plusieurs autres avancées.

7.2 L’ingratitude de l’enfant majeur : une limiteà l’obligation alimentaire ?

Cet argument, abondamment plaidé mais rarement accueilli,occupe tout de même beaucoup les tribunaux. L’article 597 C.c.Q. selit comme suit : « L’enfant, à tout âge, doit respect à ses père et mère ».Cet argument n’a guère eu plus d’impact dans les autres provincescanadiennes280.

Nous croyons qu’il faut éviter une vilaine tangente en mêlantconduite (lire attitude et ingratitude de l’enfant majeur) et obligationalimentaire281, tout en ajoutant une condition quant à l’obtention d’a-liments que ne sanctionne pas la loi282, à savoir le respect de l’enfant àl’égard du parent débiteur. Ce dernier pourrait voir son droit à des

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 417

280. Hon. Justice David L. CORBBETT et Claudia SCHMEING, « Child Support forEstranged Adult Children- « Parent as Wallet » or « Can’t buy me Love ? », (2011)30 Canadian Family Law Quarterly 165.

281. V. (O.) c. M. (G.), [2003] R.D.F. 478 (C.S.).282. B. (L.) c. B. (M.), REJB 2003-49233 J.E. 2003-2131, [2003] R.D.F. 958 (C.S.).

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aliments perdu ou réduit s’il met fin à toute relation avec le parentpayeur en adoptant une attitude équivalant à de l’ingratitude283. Lajurisprudence n’est pas fixée sur la question. Nous soumettons que leretrait d’un enfant majeur de la vie du parent débiteur sans motif neconstitue pas en soi un élément suffisamment grave. La jurispru-dence retient plutôt l’ingratitude caractérisée.

Comme nous le mentionnions, sauf dans les cas extrêmes demanque de respect, la pension alimentaire qui n’est pas une récom-pense devrait être maintenue. Doit-on faire assumer par l’enfant tousles problèmes de communication qui peuvent exister entre les partieset autres conséquences de la rupture de ses parents284 ? Notons que laseule preuve que le parent et l’enfant ne se parlent pas ne constituepas une preuve d’ingratitude285. Il faut s’interroger sur l’existenced’une relation parents-enfant, y a-t-il absence totale de communica-tion286 ? Chaque parent est-il informé des résultats scolaires desenfants ? Connaît-il le projet d’étude de l’enfant ? Y a-t-il des contactstéléphoniques ? Les relations doivent être évaluées en fonction deplusieurs éléments notamment l’effet de la rupture sur l’enfant et del’attitude des parents entre eux.

Citons à titre d’exemple les passages suivants tirés de la déci-sion Droit de la famille – 07686287 où le tribunal a refusé à un enfantmajeur aux études le droit à une pension alimentaire en raison de soningratitude envers sa mère. Analysant les obligations légales décou-lant respectivement des articles 585, 587 et 597 C.c.Q., il fait part descommentaires suivants :

69 Il est important de citer un passage du témoignage de ladéfenderesse :

Quand on écœure quelqu’un, sans arrêt, sans aucune politesse,sans regret, puis avec haine et colère, je comprends mal quand

418 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

283. F. (V.) c. F. (G.), [2004] R.D.F. 698 (C.S.) ; B. (A.) c. B. (L.), J.E. 2004-915 (C.S.) ; V.(O.) c. M. (G.), [2003] R.D.F. 478 (C.S.) ; M. (H.) c. V. (S.N.), [2003] R.D.F. 335(C.S.).

284. M. (H.) c. V. (S.N.), REJB 2003-38685, [2003] R.D.F. 335 (C.S.) ; V.S. (A.) c.S. (L.), C.S. Québec, no 200-04-011805-031, 17 février, j. Corriveau, REJB 2004-54412.

285. H. (S.) c. B. (D.), C.S. Trois-Rivières, no 400-12-007040-873, 28 janvier 2004,j. Legris, EYB 2004-53529 ; M. (H.) c. V. (S.N.), REJB 2003-38685(C.S.) ; Droit dela famille – 073247, EYB 2007-127979 (C.S.).

286. L. (B.) c. B. (Y.), C.S. Montréal, no 500-12-265492-029, 21 mars 2005, j. Hurtu-bise, EYB 2005-87309 (C.S.).

287. EYB 2007-117728, [2007] R.D.F. 487 (C.S.).

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on vient demander des cadeaux de Noël, des cadeaux de fête, etqu’on demande, parce qu’on sait que la maman valorise l’école,des sous alors qu’on ne fait pas d’efforts. X est intelligent, et çatout le monde le sait, mais il ne prend pas ses responsabilités.Il fait la victime et il veut utiliser le fait que j’ai une formationacadémique puis je mets en primeur l’école.

[...]

[105] Le demandeur a été ingrat envers sa mère il n’avait pasraison de la traiter comme il l’a fait. Le Tribunal considèreinconcevable que le demandeur puisse traiter sa mère de cettefaçon, et ce, non seulement dans l’intimité de la résidence dela mère mais également en public. En agissant en public, ledemandeur a volontairement voulu humilier sa mère.

[106] Tel que mentionné précédemment, l’obligation prévue àl’article 597 du Code civil du Québec est une obligation légaletout comme l’obligation prévue par l’article 585 du même Code.

[107] Si des parents ne respectent pas leur obligation alimen-taire imposée par l’article 585, le bénéficiaire de cette obligationpeut s’adresser aux tribunaux pour forcer les parents à respec-ter leur obligation alimentaire. Le jugement condamnera lesparents à verser une somme d’argent à titre de pension alimen-taire et, à défaut de ce faire par les parents, les revenus et lesbiens pourront être saisis pour satisfaire à l’obligation alimen-taire.

[108] Dans le cas où l’enfant transgresse sciemment l’obligationlégale qui lui est imposée par l’article 597 du Code civil du Qué-bec, quelle sanction peut imposer le tribunal ? Est-ce qu’unenfant peut impunément transgresser l’obligation imposée parl’article 597 sans subir aucune conséquence ?

[109] Est-ce qu’un enfant majeur aux études peut demander àun tribunal d’imposer à ses parents le respect de l’article 585,alors que lui-même ne respecte pas l’article 597 ?

[110] Le Tribunal ne le croit pas. Le comportement du deman-deur à l’égard de sa mère constitue de l’ingratitude et le Tribu-nal ne peut concevoir qu’un enfant majeur aux études doivebénéficier de l’aide de sa mère après avoir eu un tel comporte-ment. (Nos soulignements)

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 419

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L’arrêt de la Cour d’appel de la Saskatchewan dans Olszewski v.Willick288, insiste sur ce critère du manque de respect caractérisé. Enl’espèce, le père plaide que ses deux filles majeures ont coupé unilaté-ralement toute relation avec lui. Par ailleurs, jusqu’en 2006 il existaitun minimum de communication entre les enfants et le père. La cou-pure survient lorsque le père demande de l’information sur leurs pro-jets d’études respectifs. Les enfants refusent de fournir l’informationrequise par le père. Une des deux filles fait des démarches pourcontacter son père et le rencontrer, il ne donnera pas suite à cetteinvitation, la Cour d’appel dispose de la question comme suit :

[30] The case law indicates that the threshold is high for a find-ing that a child’s termination of the relationship with the parentis determinative of the child’s status and entitlement to mainte-nance.

[31] In Hamel v. Hamel the father sought to terminate child sup-port for his 20-year-old daughter on the basis that she had ter-minated the relationship with him. In that case the father’sefforts to contact the daughter were no greater than those of thedaughter to contact the father. This Court found the daughterwas still entitled to support. The Court stated :

[17] The father asserts that Christine unilaterally terminatedthe relationship, but it must be remembered that Mr. Hamelwas absent from the country for six months, having not in-formed his family that he was going to be absent. Upon hisreturn, he did not contact the daughter and when asked to con-tribute to her support he advised the daughter to contact him.This she did on one occasion, but when they were unable to fix atime neither she nor he made any further efforts. It would havebeen premature to make an order that she had unilaterallywithdrawn from his charge, even assuming that is the applica-ble law in a case such as this.

[18] In light of the case law, the evidence does not demonstratethat she unilaterally withdrew from her father. Indeed, thefather’s efforts to contact the daughter have been no greaterthan those of the child.

[...]

420 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

288. [2009] SKCA 133 (CanLII).

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[32] In Saunders v. Saunders, this Court dismissed the argu-ment that a 20-year-old university student was not a childunder parental charge. In that case the father had no communi-cation with his child for approximately five years and educa-tional decisions were made without consulting him.

[33] In Rebenchuk v. Rebenchuk, Scott C.J.M. observed atpara. 56 :

[...]

[56] Termination of the parent/child relationship is a par-ticularly difficult issue. In my view, selfish or ungratefulchildren who reject the non-custodial parent without justifi-cation should not expect to be supported through their yearsof higher education. But this factor rarely stands alone asthe sole ground for denying support unless the situation is« extremely grave » (Pepin v. Jung, [2003] O.T.C. 401 (Sup.Ct.) ; [2003] O.J. No. 1779 (S.C.J.)).

[34] Counsel for the mother argued that in order for rejection ofa parent alone to be a determinative factor, the circumstancesmust be unilateral, unjustifiable and extremely grave. Whetherall of these factors need to be present in order for withdrawal tobe a determining factor is not necessary to decide in this case.We agree however that unilateral withdrawal rarely standsalone as a factor disentitling an adult child to maintenance andthat the threshold for such a finding is high.

[...]

[38] It is clear from the evidence that the lack of communicationafter September of 2006 between father and daughters wasmutual with each stonewalling the other except for a few abor-tive attempts by Nicole in 2007 to reconnect with her father.However, this does not necessarily mean that the daughters hadwithdrawn from the relationship with the father unilaterally.The father could have stayed in contact with the daughtersdespite the litigation and their failure to provide him with aca-demic records and otherwise communicate about their educa-tion. The father did not reciprocate Nicole’s attempt at recon-nection. As in Hamel, the father’s efforts to contact the daugh-ters were no greater than the daughters’ to contact him.

[...]

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 421

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[41] With respect, the learned trial judge placed too muchemphasis on the daughters’ poor treatment and disdain of thefather. His finding that the daughters did not wish to maintaina meaningful relationship with the father misapprehends theevidence respecting the historical and ongoing nature of theirrelationship. The fact that the emphasis of the relationshipafter 2003 shifted, does not imply that they had no meaningfulrelationship in their own way. The quality of the parent/childrelationship by itself rarely determines the matter. The properconclusion to be drawn from all the evidence of the relationshipbefore September 2006 and the relative silence after September2006 is that father and daughters were fighting and this mutualfight was prolonged and sustained by the litigation and theintervention of the mother. However, all of this does not meanthat they had withdrawn from the relationship with him unilat-erally. Even if the circumstances as a whole are construed as aunilateral withdrawal by the daughters, the high threshold fora finding that it disentitles the daughters to maintenance hasnot been met. (Nos soulignements ; références omises)

Nous croyons que les commentaires de la Cour sont représenta-tifs du critère à appliquer. Après tout, la gravité du traitement (humi-liation, violences physiques, etc.) que réserve l’enfant à l’égard d’unparent, sans motif raisonnable, doit être considérée ce qui noussemble couler de source. Il n’est pas question d’argent de poche maisbien de l’obligation alimentaire. Notre Cour d’appel s’est prononcéesur la question dans l’arrêt Droit de la famille – 114039289, dans lecadre d’un divorce où le parent avait agi in loco parentis, nous citons :

33 L’intimé a agi à l’endroit de X comme s’il était son véritablepère ce qui entraîne pour lui certaines obligations de nature ali-mentaire. En appel, il ne remet pas en cause cette détermina-tion. Selon l’appelante, les motifs invoqués par le juge pourjustifier son refus d’accorder une pension alimentaire à X sontinsuffisants. Elle réclame que la pension alimentaire soit fixéeen tenant compte de 2 874,40 $ à titre de frais particuliers.

34 L’enfant majeur peut, dans certaines circonstances, récla-mer une pension alimentaire pour ses besoins. Les articles 585et 587.1 C.c.Q. ne distinguent pas l’enfant majeur de l’enfantmineur. Selon la Loi sur le divorce, un enfant majeur et à charge

422 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

289. EYB 2011-200159, 2011 QCCS 6948, J.E. 2012-307 (C.A.).

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peut faire l’objet d’une ordonnance alimentaire. La poursuited’études permet notamment de considérer un enfant majeurcomme un enfant à charge. Comme le juge le souligne avec jus-tesse, X est une enfant à charge puisqu’elle étudie à temps pleindans un programme universitaire.

35 En principe, l’appelante était justifiée de réclamer pour Xune pension alimentaire ainsi que des frais d’études postsecon-daires selon l’article 9 du Règlement :

« frais d’études postsecondaires », les frais annuels engagéspour permettre à un enfant de poursuivre des études postse-condaires, y compris notamment, outre les frais de scolaritéet les frais liés au matériel pédagogique requis, les frais detransport ou de logement engagés à cette fin ; [...]

36 La jurisprudence reconnaît toutefois que l’ingratitude carac-térisée de l’enfant majeur envers le parent débiteur peut êtresanctionnée en lui refusant la pension alimentaire à laquelle ilaurait autrement droit. Dans le présent dossier, le juge a justifiéle refus de la pension alimentaire de la façon suivante :

[37] However her attitude towards the Defendant is com-pletely unacceptable. She has taken sides in the disputethat opposes her mother to the Defendant and will not callhim father, as she used to, because she has decided that he isundeserving. She has gone to her biological father, a shadycharacter according to Plaintiff’s testimony and she has toldDefendant that she would not call him « dad » since she hasfound her real father. She has bluntly stated that anywayhe is undeserving of such title.

[38] Upon receipt of her letter from the [A University] fac-ulty of law acknowledging her acceptance as a law student,she has used such a letter to taunt Defendant.

[39] This attitude towards a man that has fed and cared forher since infancy is such that it will disqualify her fromseeking support as an adult child.

37 Avec égards pour le juge de première instance, le comporte-ment de X ne comportait pas ce caractère de gravité nécessairepour la priver des aliments dont elle a besoin. Sa réaction à laséparation de ses parents et les gestes qu’elle a posés ensuite

DE CHOSES ET D’AUTRES EN DROIT DE LA FAMILLE 423

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témoignent davantage de la souffrance et d’une perturbationassociées au divorce des parties que de l’ingratitude. La pensionalimentaire n’est pas une récompense, ni une punition, faut-il lerappeler, et les situations où elle est refusée doivent se limiteraux cas extrêmes. La jurisprudence reconnaît le principe sui-vant lequel le droit aux aliments est un droit fondamental. Elleenseigne également que ce n’est qu’en présence de cas extrêmesd’ingratitude que le créancier alimentaire en sera privé. C’estl’application de ce principe qui pose problème. Un courant dejurisprudence va dans le sens où la conduite irrespectueuse d’unenfant peut être sanctionnée par la réduction ou le refus d’accor-der une pension alimentaire. Je ne suis pas d’accord. Il fautbeaucoup plus qu’un comportement irrespectueux pour priverd’aliments un enfant qui en a besoin. La perte du droit aux ali-ments doit être réservée aux seules situations d’ingratitudecaractérisée. (nos soulignements ; références omises)

8. LA FILIATION

8.1 La filiation : zone de turbulence ?

La jurisprudence qui interprète le concept de la possession d’é-tat qui, ajouté au titre, crée une présomption irréfragable quant à lafiliation (art. 530 C.c.Q.) retient comme un des critères déterminantsqu’elle se soit étendue sur une période continue d’environ 16 mois.L’autre principe établi tant en jurisprudence qu’en doctrine est quedans le cadre de l’instance en filiation, l’intérêt de l’enfant n’est pasun enjeu si ce n’est de son intérêt général à déterminer sa filiation.La question de la capacité parentale n’est pas un enjeu290.

Dans Droit de la famille – 12236291, la Cour dans le cadre d’unerequête en rejet d’appel rend l’arrêt suivant :

1 La Cour est d’avis que l’appel ne présente aucune chance rai-sonnable de succès.POUR CE MOTIF, LA COUR :2 ACCUEILLE la requête en rejet d’appel ;3 REJETTE l’appel ;4 Le tout, sans frais vu la nature du litige.

424 DÉVELOPPEMENTS RÉCENTS EN DROIT FAMILIAL

290. Droit de la famille – 12395, EYB 2012-203157, [2012] QCCS 751, J.E. 2012-601(C.S.).

291. EYB 2012-202203, 2012 QCCA 288 (C.A.).