6
CHRISTOPHE WALLEMME Start “So Many Ways” 1 CD Bee Jazz/Abeille Musique Après l’Inde et une formation élargie (“Namaste”), Christophe Wallemme révise ses classiques en compagnie d’une équipe resserrée : « Cet album, je l’ai voulu comme un clin d’œil aux grands standards de jazz ». Le contrebassiste revient à ses premières amours, le trio avec piano, formule qu’il a maniée des années durant avec Prysm. Pour pimenter ce triangle musical, il convie au banquet deux bardes réputés : Julien Lourau et Manu Codjia – deux invités nomades pour échapper à la tentation du moment, le “power trio”. Le guitariste vient tantôt torturer tantôt magnifier les mélodies léchées de l’ex-Prysm (à l’exemple du duo goûteux qu’il forme avec le contrebassiste sur Where is My Way ?). De son côté, le saxophoniste ne se prive pas pour livrer sur mesure des embardées souvent fort à propos (des lueurs de Shorter jaillissent de son soprano sur Wanted). Pour son trio “fixe”, Wallemme a déniché une paire belge en vogue : et si Dré Pallemaerts tient la pulsation sans écarts, c’est Jozef Dumoulin qui crève l’écran. Inventif au Fender Rhodes ( Today Perhaps), fils de Bill Evans sur deux versions cristallines de U-Turn, le pianiste enrichit tout ce qu’il touche. À ses côtés, la contrebasse de Wallemme prend des faux-airs de LaFaro pour polir un album homogène, mais sans doute moins surprenant que son précédent. Mathieu Durand Christophe Wallemme (b, comp, arr), Jozef Dumoulin (p, elp, élec), Dré Pallemaerts (dm) + Julien Lourau (ts, ss), Manu Codjia (elg).

A CONTRE-COURANTGIUFFRE

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Page 1: A CONTRE-COURANTGIUFFRE

66 JAZZ MAGAZINE - NUMÉRO 596 - OCTOBRE 2008

CHRISTOPHE WALLEMMEStart “So Many Ways”1 CD Bee Jazz/Abeille Musique

Après l’Inde et uneformation élargie(“Namaste”), ChristopheWallemme révise sesclassiques en compagnied’une équipe resserrée :« Cet album, je l’ai voulu

comme un clin d’œil aux grands standardsde jazz ». Le contrebassiste revient à sespremières amours, le trio avec piano,formule qu’il a maniée des années durantavec Prysm. Pour pimenter ce trianglemusical, il convie au banquet deux bardesréputés : Julien Lourau et Manu Codjia –deux invités nomades pour échapper à latentation du moment, le “power trio”. Leguitariste vient tantôt torturer tantôtmagnifier les mélodies léchées de l’ex-Prysm(à l’exemple du duo goûteux qu’il formeavec le contrebassiste sur Where is MyWay?). De son côté, le saxophoniste ne seprive pas pour livrer sur mesure desembardées souvent fort à propos (deslueurs de Shorter jaillissent de son sopranosur Wanted). Pour son trio “fixe”, Wallemmea déniché une paire belge en vogue : et siDré Pallemaerts tient la pulsation sansécarts, c’est Jozef Dumoulin qui crèvel’écran. Inventif au Fender Rhodes (TodayPerhaps), fils de Bill Evans sur deux versionscristallines de U-Turn, le pianiste enrichit toutce qu’il touche. À ses côtés, la contrebassede Wallemme prend des faux-airs de LaFaropour polir un album homogène, mais sansdoute moins surprenant que son précédent.Mathieu Durand

! Christophe Wallemme (b, comp, arr), JozefDumoulin (p, elp, élec), Dré Pallemaerts (dm) + JulienLourau (ts, ss), Manu Codjia (elg).

BEN WOLFENo Strangers Here1 CD Maxjazz/Disques Dom

Le contrebassiste BenWolfe (quatre disques enleader à son actif,sideman auprès de HarryConnick Jr, WyntonMarsalis, Diana Krall) sefait ici plaisir en invitant

un quatuor à cordes. Ses compositionsvont d’une esthétique hard-bop (GroovyMedium) à de la pure musique classique(Rosy & Zero) en passant par des balladestrès “standard” (Blue Envy, avec un VictorGoines renversant à la clarinette basse),mais dominé par une conception ouverteet swingante, façon second quintette deMiles (Circus, avec Jeff Tain Watts). Lescordes sont utilisées le plus souvent pourdérouler un tapis harmonique soyeux. Ona coutume de dénigrer ce genred’approche volontairement limitée, iln’empêche qu’elle est naturelle et résoutde façon convaincante l’épineux problèmede l’équilibre sonore avec le quartette dejazz ainsi que celui du phrasé swing auxcordes. Cela sonne donc magnifiquementet l’on ne reprochera pas à Ben Wolfe saprudence. En revanche, le phrasé raide etles stéréotypes mélodiques de MarcusStrickland alourdissent un peu unemusique qui aurait pu nous enthousiasmersi elle avait été défendue par unsaxophoniste de la trempe d’un BranfordMarsalis, invité sur deux titres, pas ausommet de son art mais tout de mêmebeaucoup plus convaincant.Nicolas Brémaud.

! Ben Wolfe (b), Marcus Strickland (ts, ss), LuisPerdomo (p), Greg Hutchinson (dm) + quatuor àcordes et invités.

DixielandPar Franck Bergerot

Trois figures du revival français à l’honneur dans les bacs.

n 1957, Claude Luter entraînait en Amérique du Sud son équipealors composée d’un très convaincant héritier de Louis Armstrong(Pierre Delvaux), de Christian Guérin au trombone (vigueur, vélo-cité et tendresse notamment sur les admirables wa wa de Wabash

Blues) et d’une rythmique composée de Jean-Claude Pelletier, Roland Bian-chini et Poumy Arnaud. On peut imaginer l’effet produit en Argentine par cerevival français formé au contact direct de Sidney Bechet et des tournées duHot Club de France. C’est ainsi que Claude Luter fut invité à enregistrer dansles studios Odeon de Buenos Aires ces standards du revival aujourd’hui réédi-tés par Milan1 sous leur titre original “Claude Luter en Buenos Aires”. Au mêmemoment, Swing Land2 rappelle à notre bon souvenir deux autres figures depointe du revival. L’influence de Sidney Bechet est patente avec Marc Lafer-rière (soprano mais aussi ténor sur Jeep’s Blues) qui débute son programmepar Dans les rues d’Antibes. Si l’on assiste ici à un concert organisé par lesJeunesses musicales de France à la MJC de Colombes en 1971, on a là l’or-chestre maison du Slow Club (trois jours par semaine, de 1957 à 1973 !), d’oùle titre “Au Slow Club”. Soit : Rolf Bührer (b), Michel Attenoux (arrangeur etaltiste ici trop discret, admirable sur Jeep’s Blues), Eddie Bernard (p, en solosur Let’s Die for the Birdies), Jean-Pierre Mulot (b), Bernard Malabre (dm).Moins convenu est le répertoire consacré par Maxim Saury aux “standardsde Chicago” (paru initialement sous le titre “Rendez-vous à Chicago” chezPathé). Fidèle à la seule clarinette, Maxim Saury est trop délicat pour passerpour un bechetien et l’on évoquerait plutôt Barney Bigard à son écoute. Maisl’on prêtera aussi l’oreille à Michel Camicas et surtout à Jean-Claude Naude,autre puissant héritier d’Armstrong. 1. Milan/Universal. 2. Swing Land/Jazz Trade

Revival

E

1.JIMM

Y G

IUFFR

E Seventy-six Trom

bonesN

ew York, 31 décem

bre 1957!

Bernie Glow

, Phil Sunkel, Joe Wilder (tp); Jim

my G

iuffre (bs); Al Cohn, Ed W

asserman (ts); Sol

Schlinger (bs); Wendell M

arshall (b); Ed Shaughnessy (dm).

Une ouverture en fanfare où le “doux” et “cool” G

iuffre rendait un homm

age pervers (troistrom

pettes, trois saxes mais aucun trom

bone pour cette apothéose à “76 trombones”) à

“The Music M

an”, un chromo sonore de l’A

mérique profonde, m

ais «la seule personne quine l’a pas aim

é,disait Giuffre, fut l’auteur»,M

eredith Willson, signataire de ce “Broadw

aym

usical” légendaire.« J’avais,confiait notre “music m

an”, une grande expérience des musi-

ques de marche

: quatre ans dans les orchestres du lycée, quatre à la North Texas State U

ni-versity, quatre à l’arm

ée… Si je n’ai pas le tem

po après ça, je ne l’aurai jamais!» (propos

traduits par Patrice Antona).

2.JIMM

Y G

IUFFR

E The Train A

nd The RiverN

ew York, 24 décem

bre 1956!

Jimm

y Giuffre (cl, ts, bs), Jim

Hall (g), Ralph Peña (b).

Une instrum

entation inspirée par la Sonate pour flûte, alto et harpede D

ebussy pourcette version princeps du “tube” giuffrien (dont l’avatar du festival de N

ewport 58 allait

accompagner le générique du film

Jazz on a Summ

er’s Day

de Bert Stern, mais c’est

alors le trombone de Bob Brookm

eyer qui remplaçait la basse). O

u un parangon ducontrepoint et une conception du rythm

e, “pneumatique” dirait Jacques Réda, qui

donne envie de s’attarder dans ce train …

3.JIMM

Y G

IUFFR

E Pharaoh

New

York, 23 octobre 1956!

Bernie Glow

, Arthue Statter, Joe W

ilder (tp); Jim Buffington (cor); U

rbie Green, J. J. Johnson (tb);

Dick H

orowitz (perc).

Une des prem

ières expériences de Third Stream, ce fantasm

e de son ami G

unther Schul-ler associant écriture classique et certaines vertus du jazz

:«Les cuivres en nombre,disait

Giuffre,m

e font penser à des rituels royaux, à une sorte d’exaltation, comm

e si quelque chosede m

onumental allait se produire…

» Et donc ici pharaonique.

4.THE

MO

DE

RN

JAZZ Q

UA

RTE

T & JIM

MY

GIU

FFRE

FunM

usic Inn, Lenox (Massachusetts), 28 août 1956

!Jim

my G

iuffre (cl), Milt Jackson (vib), John Lew

is (p), Percy Heath (b), Connie Kay (dm

).U

n de ces “bibelots sonores” dont parle Jean-Robert Masson à propos du “m

agicien”G

iuffre. Co-inventeur du “Troisièm

e Courant”, John Lew

is, lors de cette historique rési-

dence estivale d’enseignement et ateliers, devait se découvrir avec G

iuffre de subtiles affi-nités m

usicales, concrétisées par cette confrontation avec son MJQ

, mais, précisait le cla-

rinettiste, «mêm

e quand je compose en m

ajeur, j’ai un sentiment de m

ineur», ce qu’illustrecertain clim

at sombre de ce m

orceau pourtant “léger”.

5.JIMM

Y G

IUFFR

E So Low

Los Angeles, 21 m

ars 1956!

Jimm

y Giuffre (cl, foot tapping).

Un blues lent et m

éditatif. Au-delà du jeu de m

ots giuffrien du titre, ce “solo” où le cla-rinettiste s’accom

pagne, comm

e pour souligner sa solitude, en tapant du pied – préludeau contrepoint – rappellera aux am

ateurs de blues une tradition du chant auto-accom-

pagné illustrée par, entre autres, John Lee Hooker.

6.SHO

RTY

ROG

ER

S Chant of The C

osmos

Los Angeles, 9 décem

bre 1955!

Shorty Rogers (tp), Bob Enevoldsen (vtb), Jimm

y Giuffre (cl), Bud Shank (as), John G

raas (cor), PaulSarm

ento (tuba), Lou Levy (p), Ralph Peña (b), Shelly Manne (dm

).«

Il y avait foule dans ce club, des gens qui dansaient… et je n’arrivais pas à m

’entendre.A

lors, au milieu du solo, je m

e suis mis à ne plus jouer que le rythm

e. Je n’ai joué qu’un toutpetit peu, com

me pour dire

: écoutez-nous!, puis je suis rentré dans le rang.»Ou la nais-

sance de cette plus simple expression giuffrienne

: le “souffle silencieux”.

7.JIMM

Y G

IUFFR

EFinger Snapper

Los Angeles, 10 juin 1955

!Jack Sheldon (tp), Jim

my G

iuffre (bs), Ralph Peña (b), Artie A

nton (dm).

Extraite de “Tangents in Jazz”, ce bouquet légendaire d’expériences où Giuffre jouait avec

et anamorphosait les grands “principes” de l’art afro-am

éricain, une irrésistible démons-

tration que le beat n’a pas toujours besoin d’être explicite, voire martelé, pour être signi-

fié. Encore fallait-il un batteur tel que le mystérieux A

rtie Anton…

8.SHE

LLY M

AN

NE

Abstract n°

1H

ollywood, 10 septem

bre 1954!

Shorty Rogers (tp), Jimm

y Giuffre (cl, ts, bs), Shelly M

anne (dm).

Un des m

oments les plus im

pressionnants du 25-cm aux “pingouins” intitulé “The Three”.

Ou quand, à force de relations quasi télépathiques, la spontanéité d’un contrepoint (un

art et une philosophie à quoi Rogers et Giuffre avaient été initiés par le D

octeur Wesley

LaViolette) permet d’aboutir à cette m

anière de pré-free qui a tant fait gloser, pour le meil-

leur et le pire.

GIU

FFRE

A C

ON

TRE

-CO

UR

AN

Tpar Philippe C

arles

Traversée à rebours, une décennie déci-sive dans l’aventure de Jam

es PeterG

iuffre (1921-2008): de ses relectu-

res-arrangements de traditions étatsu-

niennes (fanfare, blues, “folk”) à sescom

positions pour big band illustrantson am

our de Lester Young (qui allaienten faire le “parrain” des brothers,cessaxophonistes héritiers de “Prez”), enpassant par le Troisièm

e Courant et lesform

es classiques, le solo a cappella,les phases “cool” et W

est Coast, les

libertés de l’improvisation “abstraite” et

les résurgences de rhythm and blues.

Soit un travelling express, et un flash-back, pour offrir de l’art giuffrien unetrace plurielle

: d’une force apparem-

ment tranquille et sans urgence, d’un

chant voué au mode m

ineur et jouantm

oins sur le cri que sur le souffle et sesvariations. D

’où la question posée parJean-Robert M

asson à la fin des années50 et restée en suspens

: «M

ais quidonc s’intéresse à cet hom

me

?».A

um

oins vous et moi.

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CHRISTOPHE WALLEME TRIO Start – So Many Ways… Jozef Dumoulin (p, elp), Christophe Wallemme (b), Dré Pallemaerts (dms) + Julien Lourau (ts, ss), Manu Codjia (g). Mai 2008. HHH Prometteur A la base de tout, l’assise rythmique. Si besoin était, démonstration en est faite dans ce nouvel opus de Christophe Wallemme, publié deux ans après le superbe « Namaste ». Où l’on découvre que l’association de Wallemme avec Dré Pallemaerts est comme un modèle d’intelligence et de symbiose rythmique, quasi télépathique. Presque à entendre des unissons contrebasse-batterie. Et si vous rajoutez à cela Jozef Dumoulin, qui apparaît, depuis quelque temps déjà, comme la révélation du moment, vous obtenez un superbe trio qui risque bien de marquer la scène du jazz. La formule, cependant, semble ne pas convenir entièrement à Christophe Wallemme, qui refuse de s’y enfermer et invite Julien Lourau et Manu Codjia sur quelques titres. Sont alors mis en évidence les chatoiements harmoniques auxquels sa belle écriture donne vie (un Portrait en noir et blanc réinventé). Mais le style de jeu du saxophoniste et du guitariste donne à leurs prestations des couleurs si radicalement différentes du trio que l’on a parfois un sentiment de discontinuité, zappant d’un climat à l’autre dans une géométrie variable dont on peine (à la différence du précédent album marqué par l’Inde) à établir le lien. Julien Lourau, comme à son habitude, est admirable de présence et de lyrisme. Quand à Codjia, on aime ses étirements à la Frisell qui viennent apporter un vrai contraste rythmique. Reste la frustration de ne pas avoir entendu d’un bout à l’autre un album de ce trio aux atours exemplaires. Jean-Marc Gelin Télécharger : To Bee or Not to Bee 1 CD Bee Jazz BEE026 – Distribué par Abeille Musique.

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MagazineL’Hérault du Jour Dimanche 26 octobre 2008

VMusiques

Mus

ique

b H

érau

lt

■ C'était dans les années 70.Après des lustres de silence

à souffler en solo sous le pont deBrooklyn, Sonny Rollins revenaitparmi les vivants. . En troisconcerts (Châteauvallon, Mont-reux et Tokyo), le colosse du saxs'imposait sur le devant de la scè-ne, place qu'il n'a plus quitté. Rol-lins, le boulimique, Shepp, la mé-moire et Sanders le grand prêtre.Depuis la sainte trilogie du sax té-nor se décline ainsi pour notreplus grand plaisir.

Et le plaisir, avec Rollins, se dé-multiplie. A l'image de ses phra-ses qu'il étire, qu'il répète inlassa-blement, comme par gourmandi-se. Le son de Rollins, identifiable,son phrasé, inimitable, ses auda-ces tranquilles et ses fulgurancesde chaque instants, n'arrêtent pasde bouleverser. Rollins ne jouepas « de mieux en mieux », il jouede plus en plus. De plus en plusfort, de plus en plus beau, de plusen plus swing. Road Shows, volu-me 1 en porte témoignage. C'est lesaxophoniste lui-même qui a pro-

duit l'album, choisi les enregistre-ments live que contient la pré-cieuse galette. De Tokyo à Toulou-se, des Etats Unis à l'Europe, lessept proposés, loin d 'un simple« best of » donnent à entendre uncontinuum, cette permanence dudevant de scène. L'audace, elle esttoujours présente lors de ses stopschorus qui frisent le solo dit « ab-solu » (sur les ballades entre autreet ici Easy living, la tradition, il laréactive dans le hard bop (Tenormadness qu 'il continue dejouer/travailler comme si sa ren-contre avec Coltrane n'avait pas

suffit) sans oublier les racines,l'enfance et donc le calypso (BestWishes). Picorées sur les scènesdu monde entier, Rollins joue avecdes formations variables. Nonobs-tant le talent deMark Soskin aupiano, c 'est sans doute avec lescombos sans pianistes qu'il restele plus remarquable, qu'il se lâchele plus et pousse ses camarades(l'impeccable et fidèle Bob Crans-haw à la basse) vers des contréesinsoupçonnées. Car Rollins, volu-bile, ogre à trompe d'or s'il est aumitan du jeu, ne tire jamais lacouverture à lui. Son talent résidedans cette humilité, dans sa prop-re surprise à être encore vivant,énergique et ludique. « RoadShows » c'est du live avec un coeurqui bat et un souffle jamais prisen défaut. Et comme le disqueporte en soutitre « Vol 1 » on at-tend déjà les volumes suivant enpiaffant d'impatience.

C.M.! Sonny RollinsRoad Shows Vol 1Universal Jazz

Sax ténor. Rollins enregistré live sur les scènesdu monde entier... Voyage en compagnie d'un géant.

Sonny, sons et lumière

Sonny Rollins, le plus énergique des ténors toujours vivant

Chet BakerLégende inédite■ En 1986, à Chicago, Chet Bakerenregistre en compagnie dupianiste Bradley Young . Cedernier, fan du trompettiste.l’avait rencontré quelques annéesplus tôt pour lui demander unedédicace... Et Chet lui avaitdemandé de faire un set.L'enregistrement vient d’êtreédité. L'inédit vient de laformation (le trio de BradleyYoung) qui l'accompagne, plusque du répertoire : Old DevilMoon , My Funny Valentine etautres standards (Solar de Miles,Ornithology du Bird). Cependant,le disque confirme que, lorsqu'ilétait en forme vers la fin de sa vie(ce qui n'était pas toujours le cas),Chet restait impressionnant desensualité. On ne sait jamais enl'écoutant ici, si, lorsqu'il chante,sa voix module comme satrompette, ou, lorsqu'il joue, sison phrasé et vibrato n'est pas leprolongement de sa voix.Fascinant et cool à la fois.! Chet in ChicagoEnjaHarmonia Mundi

Titi RobinDeux suites■ Le guitariste le plus excitantde la musique traditionnelle atoujours aimé mêler l'Andalousieà l'Inde, le chant berbère auswing manouche. Avec « KaliSultana » il nous livre ni plus nimoins qu'un double CD pourdeux suites en plusieursmouvements et autantd'émotions. Débuté avec l'oud etles sables du désert, les percusarrivent, puis la voix, puis lescordes classiques. Ce voyagedialectique (on retournera audésert à la fin du second CD) estl'occasion pour Titi de brasser lespaysages musicaux autour de sasix cordes dans une fresque d'unebelle ampleur et d'imposer ici unevéritable sérénité dans son jeux.Car le melting pot musical quepropose Titi Robin lui permet dedévelopper sur sa gratte, dessonorités littéralement «inouïes»,aussi nouvelles qu’ancestrales.« Kali Sultana » est un disqued'une profonde spiritualité jamaisostentatoire.! Kali Sultan Naïve

Magic MalikFlûte alors■ Encore un double album pournos esgourdes : cette fois avec leflûtiste Magic Malik Mezzari. Pasvraiment de suite concertante(sinon la poursuite du concept XPsur le second album) mais commetoujours de l’inventivité àrevendre. En quintet avec des« guests » (Nicolas Genest aubugle, le rapeur Anonymous…)l’orchestre ré-arrange ses propresstandards (Marthe, Le Bip) etpropose des micros climatsimpeccables. L’obstinée LaPassacouialle comme le trèsnonchalant Caraïbes sont appelésà devenir des musts. Côtéharmonies, on plane, on flirteavec le groove, on imaginel’ombre de Frank Zappa oulasaudade de Jobim. Aussi bienbinaire (Paper Nut) que swing(un décalage de Giant Steps) saflûte trille, serpente avec dans sadémarche ce rien de tropical etd’épices qui fait de Malik unmusicien Magik.! SaouleLabel BleuHarmonia Mundi

WallemmeBasse oeuvres■ Mine de rien le contrebassisteChristophe Wallemme s’imposecomme un superbe compositeur.Après Time Zone (2004) il signeici Start comme un nouveaudépart. En compagnie de JozefDumoulin (le pianiste de MagicMalik voir ci-contre) del’excellent Dré Pallemaerts auxdrums, il invite Julien Lourau(saxes) et le guitariste ManuCodjia il lancine sur Quartz,propose avec Picture in black andwhite une mélodie appelée àdevenir un standard. La mise enplace est parfaite et les compospermettent à chacun des’exprimer. Pas loin du Milesélectrique (Wanted) desbrouillards de Bix (U-Turn) oud’une nostalgie de cinéma quiserait une évocation de Françoisde Roubaix (Portrait of Cendrine)Wallemme n’est pas qu’uncontrebassiste accompli mais l’undes plus inspirés musiciens dumoment.! Start « So many ways »Bee JazzAbeille Musique

Daniel HumairFleur de peaux■ Il y a cinq ans, le peintrehelvète le plus célèbre de labatterie, invitait des petits jeunesà jouer avec lui. Baby boomrevient. Les jeunes ont pris de labouteille mais le plaisir reste demise. Aux côtés du drumiste-peintre on retrouve le guitaristeManu Codjia (présent sur leWallemme voir ci-contre),Matthieu Donarier et ChristopheMonniot (saxes) et SébastienBoisseau (basse). Chacun s’estfendu d’au moins unecomposition et tout le monde seretrouve aussi sur du JoachimKhün, le copain de toujours. C’estfree, expérimental (Bergen),déstructuré à souhait (Directiontechnopole) et réactive la traditionde fort belle manière (un Moodindigo lascif). En prime et commeil se doit avec Humair, c’esttoujours enjoué et ludique. Lebatteur fait chanter ses peaux etses balais avec ce soin du détailqui est sa pâte à sel.! Bonus Baby BoomBee JazzAbeille musique

Dans les bacs

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De beaux accords exposés par un piano électrique inventif, des harmoniques superbes jouées par une contrebasse qui ébauche les pas d’une danse légère et gracieuse : les premières mesures de ce disque diffusent d’emblée une lumière estivale. Découvert auprès du batteur Dré Pallemaerts – il joue dans le “Pan Harmonie“ de ce dernier – Jozef Dumoulin lui offre une large palette de couleurs, tant au piano acoustique (Portrait of Cendrine, les trois derniers morceaux le mettant particulièrement en valeur) qu’électrique, son Fender Rhodes sonnant comme nul autre pareil. Les musiciens invités, Julien Lourau et Manu Codjia, apportent également à la musique un éclairage spécifique. Le premier possède un son de ténor qui lui est propre ; le second trempe To Bee or not to Bee dans le grand fleuve du rock, mais donne une autre sonorité à sa guitare dans Where is my Way, ballade aux longues notes oniriques. Emmanuel Codjia jouait déjà dans “Namaste“, le précédant album du contrebassiste, un enregistrement de 2006 longtemps mûri, souvenirs d’une jeunesse passée en Inde et jamais oubliée. L’Orient et ses couleurs n’inspirent ici que Pharaon’s Dance, mais c’est toujours Christophe Wallemme que l’on retrouve dans ces musiques fraîches comme de la rosée de petit matin. Le mélodiste sait agencer leurs rythmes, leur donne surtout un cœur pour battre et faire rêver. Meilleurs morceaux : Quartz, Portrait of Cendrine, Where is my Way, Certainly Tomorrow.

par Pierre de Chocqueuse publié dans : Chroniques de disques

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