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Apports des tablettes tactiles pour jeunes adultes présentant une déficience mentale ou un trouble
autistique : études de cas Déborah Amar, Anja Goléa
Marion Wolff
Université Paris Descartes – Sorbonne Paris-
Cité, LATI
45 rue des Saints pères, Paris [email protected] - [email protected]
Maria Pilar Gattegno
Cabinet de psychologie
ESPAS-IDDEES
97 av. Charles de Gaulle,
Neuilly sur Seine [email protected]
Jean-Louis Adrien
Université Paris Descartes –
Sorbonne Paris-Cité, LPPS
Institut de psychologie,
Boulogne-Billancourt [email protected]
ABSTRACT The emergence of touchscreen interfaces and more
specifically of tablet computers raises the question of
contributions of this new interface as compared to
conventional interfaces. With these case studies, we looked
for possible contributions of touch pads for persons with
intellectual disability or autism spectrum disorder, more
particularly in terms of interaction and collaboration. An
experiment was carried out to analyze interaction behaviors
during an execution of tangram puzzles performed on a
tablet computer, or in the conventional way using wooden
pieces. Results suggest that the touch pad generates an
increased motivation and promotes positive interaction
between subjects.
Key Words Touchscreen interfaces, intellectual disability, autistic
spectrum disorder, interaction, collaboration.
ACM Classification Keywords H.5.2 Users Interfaces; Ergonomics
General Terms Human Factors
1. INTRODUCTION L’objectif de cette étude est d’évaluer les effets de la
réalisation de puzzle de type « tangram » sur tablette tactile
sur la communication et la collaboration chez un sujet
présentant un diagnostic d’autisme, ainsi que chez des
adultes atteints de déficience mentale. Quelques définitions
seront donc données avant de décrire la méthode utilisée
dans cette expérimentation et les résultats obtenus. De nos
jours, les Nouvelles Technologies de l’Information et de la
Communication (NTIC) sont de plus en plus intégrées dans
les pratiques éducatives. En effet, le bénéfice des NTIC
pour l’enseignement est aujourd’hui exploité à travers les
environnements numériques de travail (ENT), qui
permettent d’accéder à des ressources en ligne, mais aussi à
travers l’utilisation de logiciels spécialisés et plus
simplement d’internet.
Permission to make digital or hard copies of all or part of this work for personal or classroom use is granted without fee provided that
copies are not made or distributed for profit or commercial
advantage and that copies bear this notice and the full citation on the first page. To copy
otherwise, or republish, to post on servers or to redistribute to lists,
requires prior specific permission and/or a fee.
Ergo’IHM 2012, October 16–19, 2012, Biarritz, France. Copyright © 2012 ACM 978-1-4503-1846-4/12/10 ...$15.00.
Les NTIC favorisent aussi l’échange entre les individus.
Elles permettent par exemple de mettre en place un espace
collaboratif, c'est-à-dire un environnement informatisé
ayant pour objectif de favoriser la collaboration entre pairs,
à travers le partage des capacités de chacun pour mieux
atteindre un objectif commun.
Ainsi, certains travaux [1] ont été effectués dans l’objectif
de déterminer les principes de base pour la conception
d’environnement numérique de travail (ENT), favorisant les
interactions sociales. Les principaux résultats observés
montrent que les individus s’impliquent plus dans les
environnements qui favorisent l’interaction sociale. Les
auteurs concluent qu’en facilitant l’interaction sociale, les
NTIC pourraient favoriser le développement d’échanges de
connaissances et de savoirs. Il en va de même pour les
séniors qui peuvent aujourd’hui bénéficier de services issus
des tablettes interactives adaptées à leurs besoins [2]. Elles
pourraient donc également aider au suivi et à
l’accompagnement d’enfants et de jeunes adultes présentant
un handicap mental ou cognitif en vue de leur intégration
scolaire, sociale ou professionnelle en contribuant aux
actuels programmes mis en place pour les évaluer et les
accompagner [3].
1.1 Les interfaces tactiles L’interaction avec une interface tactile, où l’utilisateur se
sert de ses doigts pour déplacer différents objets ou
naviguer dans les menus, est plus naturelle que l’interaction
classique effectuée avec une souris. Ainsi, les efforts
cognitifs et moteurs nécessaires pour désigner sont plus
faibles avec ce type de périphériques par rapport aux
dispositifs de pointage indirects (comme la souris par
exemple). De plus, l’utilisation d’un écran tactile est très
intuitive et ne nécessite donc pas d’apprentissage,
contrairement à l’utilisation d’un clavier ou d’une souris
[4]. Enfin, un écran tactile présente l’avantage de pouvoir
être utilisé par plusieurs utilisateurs en même temps. A
l’inverse, la souris reste souvent dans la main d’un seul et
unique utilisateur [5]. Dans le cadre des troubles cognitifs,
le côté sensoriel et l’aspect intuitif du « toucher-réaction »
pourrait faciliter la compréhension et l’utilisation des
nouvelles technologies. De plus, le fait que l’interface
tactile soit accessible par plusieurs utilisateurs en même
temps, pourrait contribuer à favoriser la collaboration et
l’interaction entre les individus lors de la réalisation
commune d’un jeu sur tablette tactile. Une étude [6] sur
l’utilisation des interfaces tactiles pour améliorer la
collaboration chez les enfants ayant des troubles
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envahissants du développement, illustre une des
applications possibles de l’utilisation des interfaces tactiles
dans le cadre du handicap. L’objectif de cette étude est
d’évaluer la collaboration entre les sujets à travers des
indicateurs verbaux et non verbaux du comportement
social. Pour ce faire, les auteurs ont choisi d’utiliser
l’interface tactile : la table Diamond Touch (DT). Les
résultats de cette étude montrent que l’utilisation de la DT
favorise les interactions sociales d’une manière générale.
En s’inspirant de ces travaux [6], l’étude exploratoire
proposée ici utilise une tablette tactile de type Ipad, de plus
en plus utilisée actuellement par le grand public. A partir de
puzzles de type tangram (modèles plus ou moins complexes
à reconstituer à partir de 7 figures géométriques
élémentaires), on a relevé les comportements de
communication et de collaboration chez un sujet présentant
un diagnostic d’autisme, ainsi que chez des adultes atteints
de déficience mentale invités à « jouer » en binômes. La
méthodologie utilisée ainsi que les résultats seront présentés
après avoir brièvement exposé les types de handicap des
sujets testés.
1.2 Déficience mentale et autisme : définitions
Le retard mental se définit comme un fonctionnement
mental inférieur à la moyenne. La principale caractéristique
du retard mental réside en une limitation des capacités
adaptatives de l’individu, et notamment de celles en lien
avec l’autonomie, les capacités sociales et la
communication, les apprentissages et le travail. Les
individus ayant une déficience mentale se caractérisent par
des traits de personnalité typiques, tels qu’une immaturité
affective, une tendance à l’entêtement et à la persévération,
une impulsivité et une intolérance à la frustration, ainsi
qu’une certaine passivité face à l’extérieur. [7].
L’autisme fait partie des Troubles Envahissants du
Développement (TED). Ces troubles du développement
apparaissent durant l’enfance (avant 3 ans) et se
caractérisent par trois aspects principaux qui sont des
altérations qualitatives des interactions sociales, des
altérations qualitatives de la communication verbale et non-
verbale et la présence de centres d'intérêts restreints et/ou
des conduites répétitives [3]. Les individus atteints
d’autisme ont un comportement typique, caractérisé par le
retrait autistique qui se manifeste par un manque d'intérêt
pour les autres et une indifférence à leur égard, ainsi que par
une indifférence affective et un manque d'expressivité
émotionnelle. L'enfant paraît complètement détaché de tout
ce qui se passe autour de lui. Il ne cherche pas le contact et
peut même le refuser, l'éviter. Concernant les capacités
cognitives des sujets atteints d’autisme, on remarque une
grande hétérogénéité. Chez un même enfant, tous les
domaines cognitifs ne sont pas développés de la même
manière. Cependant, le QI moyen est en général, pour la
majorité d’entre eux, inférieur à 55, ce qui témoigne d’une
déficience [8] [9].
2. METHODE 2.1 Sujets L’échantillon testé est composé de 9 jeunes adultes
présentant une déficience mentale, âgés de 19 à 26 ans
(moyenne d’âge : 23,56; écart-type : 2,35) répartis en
binômes1 et d’un jeune adulte de 19 ans présentant un
1 En raison de présences irrégulières de ces jeunes adultes, nous
avons été obligés de former deux types de binômes. Trois des sujets
ont réalisé les tangrams avec un expérimentateur, alors que les six autres sujets ont été répartis en trois binômes pour leur réalisation.
diagnostic d’autisme2. Afin de constituer un binôme de jeu
habituel, le frère du sujet atteint d’autisme a été sollicité,
l’accompagnant de ce jeune adulte avec handicap étant
observateur quant au bon déroulement de l’expérience.
2.2 Déroulement de l’expérience La tâche à effectuer consiste à réaliser les tangrams en
binômes de deux manières différentes : tangrams classiques
(pièces en bois) et sur tablette tactile de type Ipad à l’aide
d’applications choisies (tangrams dont les pièces étaient
suffisamment appropriées en taille, colorées et attractives)
après en avoir étudié plusieurs disponibles sur ce support.
Au début de chaque passation, la règle du jeu est expliquée
aux participants, en précisant que le tangram pouvait être
réalisé en commun et que de l’aide pouvait être demandée
quand ils le souhaitaient. Toutes les passations, chacune
d’une durée de 30 minutes environ, ont été mises en œuvre
après une courte session d’entraînement sur les deux
supports. Pour chaque format de passation, présenté de
manière aléatoire (pièces en bois VS Ipad), trois niveaux de
difficulté croissante sont présentés aux sujets dans le même
ordre : facile, medium, difficile et aucune limite de temps
n’est fixée pour la réalisation. À la fin de chaque passation,
les sujets sont soumis à un débriefing au cours duquel il leur
a été demandé quel jeu ils avaient préféré et pourquoi.
Toutes les sessions ont été filmées avec l’autorisation des
familles, auxquelles l’anonymat a été garanti.
2.4 Méthode de recueil des données A partir des films réalisés, tous les comportements verbaux
(communication) et non verbaux (posture, gestes,…)
témoignant de la collaboration ou du refus de collaboration
entre les individus ont été relevés à l’aide d’une grille
d’observation, fondée sur des listes de comportements déjà
constituées lors de travaux antérieurs concernant
notamment les interactions sociales pendant le jeu [10],
[11], [12], et qui ont été adaptées à la problématique de
cette étude.
À partir de la grille d’observations établie, chaque
comportement relevé a ensuite été codé selon les catégories
prédéfinies ci-après :
a) Verbalisations de demande (VD) : le sujet
demande de l’aide, un conseil ou un complément
d’information (« je peux avoir un indice ? », « donc là, je
dois faire comme celui d’avant ? »), pose une question ou
demande confirmation par rapport à son action (« ça va bien
là ? », « donc là c’est bon ? »).
b) Signe de lassitude (SD) : le sujet soupire, hausse
les sourcils, reste inactif, se touche la tête de manière
répétée ou verbalise directement sa lassitude (« j’en ai
marre », « c’est long » …).
c) Attitude de concentration (AC) : Le sujet est
focalisé sur la réalisation du jeu sans jamais se détourner de
sa tâche et montre un intérêt constant dans sa réalisation (se
tient proche du jeu sans être envahissant, se prend le
menton entre le pouce et l’index).
d) Comportements et verbalisations d’interaction
positive (CVP) : le sujet touche ou s’adresse à l’autre dans
le but de l’encourager (« allez ! »), tend une pièce à l’autre,
tente d’établir un jeu coopératif (mise en commun des
Les analyses de comportements ont tout d’abord été effectuées séparément, puis regroupées ensuite car les résultats obtenus étaient
strictement similaires. 2 Compte tenu des délais nécessaires à l’obtention de différentes
autorisations, il n’a pas été possible au jour de la publication d’obtenir plus de sujets atteints d’autisme pour compléter l’étude.
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efforts pour atteindre le but), sourit à l’autre, prend en
considération les actions et les propositions de l’autre,
donne un conseil ou propose de l’aide (« tu devrais essayer
de placer celui là »)
e) Comportements d’évitement (CE) : le sujet se
tient en retrait par rapport à l’autre ou au jeu, regarde
ailleurs, tourne le dos à l’autre, ignore ce que dit l’autre,
cherche à établir le contact avec une personne extérieure, ou
se met en situation de jeu parallèle (joue à côté de l’autre
plutôt qu’avec l’autre).
f) Comportements et verbalisations d’interaction
négative (CVN) : le sujet a un comportement agressif
envers l’autre (tentative verbale et/ou physique d’intimider
(menace), de faire mal, ou de porter atteinte à autrui),
donne un ordre à l’autre (« mets-le ici je te dis ! »), a un
comportement envahissant par rapport au jeu (empêche
l’autre d’accéder au jeu de par sa position ou par ses
menaces), auto-agression (le sujet porte atteinte à sa propre
personne).
3. ANALYSE DES RESULTATS Les comportements identifiés ont été tout d’abord
dénombrés puis répertoriés selon les différentes catégories
retenues. Ils ont ensuite été étudiés selon le type de tangram
mis à disposition (condition pièces en bois vs pièces
virtuelles de l’Ipad) à l’aide de tableaux à double entrée dits
« tableaux de contingence ». Ces types de tableaux
permettent de mettre en évidence les relations pouvant
exister (ou non) entre les modalités de ces différentes
variables qualitatives croisées deux à deux.
Les effectifs observés étant limités, il n’a pas été possible
de mettre en œuvre un test d’inférence (Khi-deux), nous
avons eu alors recours à une analyse des taux de liaison
inter-modalités interprétables en termes «d’attractions
pertinentes» – ou de sur-représentations de comportements3
- pouvant indiquer des tendances à la reproductivité (pour
des exposés théoriques voir [13] ; et pour des exemples
d’application : [14] et [15]).
Ce type d’analyse, bien qu’il ne permette pas de généraliser
les résultats obtenus sur l’échantillon testé, donne ainsi des
pistes non négligeables qui pourraient être approfondies lors
d’études ultérieures. Ci-après les résultats concernant les
différents binômes étudiés.
3.1 Sujets présentant une déficience mentale À partir de l’analyse des taux de liaison positifs (indiqués
en gras dans le tableau 1 ci-après), nous pouvons constater
que les verbalisations de demande (VD), les signes de
lassitude (SL), les comportements d’évitement (CE) et les
comportements et les verbalisations négatifs (CVN) ont
tendance à être observés lors de la réalisation du tangram en
bois.
A l’inverse, les attitudes de concentration (AC), les
comportements et les verbalisations d’interaction (CVP) ont
tendance à être observés lors de la réalisation du tangram
sur Ipad. Pour les comportements négatifs, les chiffres étant
proches de 0, il faut relativiser leur poids.
3 Le taux de liaison peut être envisagé comme un rapport de
proportions entre les effectifs réellement observés et ceux que l’on
aurait dû obtenir compte tenu de la répartition des observations recueillies. Ce taux peut être ainsi positif (interprétable en termes
d’attraction ou de sur-représentation) ou négatif (interprétable alors
en termes de répulsion ou de sous-représentation). Cf. Corroyer & Wolff, 2003 [16].
BOIS IPAD
VD + 0.19 (92) - 0.32 (31)
SL + 0.07 (35) - 0.12 (17)
AC - 0.34 (29) + 0,57 (41)
CVP - 0.14 (87) + 0.23 (74)
CE + 0.32 (47) - 0.53 (10)
CVN + 0.01 (53) - 0.01 (31)
Tableau 1: Taux de liaison pour les sujets présentant
une déficience mentale
Il est possible que les verbalisations de demande (demande
d’aide, de conseil, de complément d’information, de
confirmation ou autre questionnement) soient plus présentes
lors de la réalisation du tangram en bois parce que les sujets
rencontrent plus de difficultés sur ce support. Par
opposition, la réalisation sur Ipad apparaîtrait donc plus
simple à gérer pour les sujets.
Les signes de lassitude peuvent témoigner d’un ennui plus
important lors de la réalisation du tangram en bois. Ces
résultats sont cependant à nuancer car les taux de liaison
sont relativement faibles (+0.07). Les sujets semblent plus
concentrés lorsqu’ils réalisent le tangram sur Ipad, ce qui
pourrait témoigner d’un plus grand intérêt pour la
réalisation sur ce support par rapport à la réalisation du
tangram en bois. De plus, les sujets montrent peu de
comportements d’évitement lors de la réalisation sur Ipad,
ce qui témoigne de leur intérêt pour ce support. Les
comportements et les verbalisations d’interaction positive
sont plus nombreux sur ipad ; on peut donc penser que ce
support stimule la collaboration entre les individus.
3.3 Sujet avec autisme Les données d’observations étant insuffisantes pour calculer
des taux de liaison pertinents et représentatifs (un seul sujet
avec autisme a pu être observé), seuls les dénombrements
de comportements par catégories seront présentés dans le
tableau 2 ci-après. Le nombre de comportements relevés est
plus élevé lors de la réalisation du tangram en bois par
rapport à la réalisation du tangram sur l’Ipad (53.59% VS
46.48%). Cependant, les comportements d’évitement (CE),
les signes de lassitude (SL) et les comportements et
verbalisations d’interaction négative (CVN) sont absents
sur l’Ipad, alors qu’ils sont présents lorsque le sujet réalise
le tangram en bois.
BOIS IPAD Total
VD 2.99% (2) 4.48% (3) 7.47%
SL 1.49% (1) 0% (0) 1.49%
AC 11.94% (8) 13.43% (9) 25.37%
CVP 23.88% (16) 28.36% (19) 52.24%
CE 2.99% (2) 0% (0)
2.99%
CVN 10.45% (7) 0% (0) 10.45%
Total 53.74% (36) 46.27% (31) 100%
Tableau 2: Comportements d’interaction chez le sujet
atteint d’autisme (exprimés en pourcentages)
On remarque que les comportements et les verbalisations
d’interaction positive (CVP) sont les plus présents quel que
soit le support de jeu. En effet, ces comportements
représentent plus de la moitié des comportements relevés
(52.24%). Ils sont cependant légèrement plus présents lors
de la réalisation sur ipad (28.36%). Les verbalisations de
171
demande sont aussi plus nombreuses lorsque le sujet
effectue le tangram sur l’ipad, ce qui peut témoigner d’une
difficulté de prise en main de l’outil. Comme en témoignent
les relevés concernant les attitudes de concentration, le jeu
semble intéresser le sujet ; cet intérêt peut expliquer le
nombre élevé de comportements d’interaction positive. De
plus il est important de noter que même si l’Ipad
n’augmente pas nécessairement les comportements
d’interaction de ce sujet par rapport à la réalisation du
tangram en bois, il est associé à la suppression des
comportements négatifs, des comportements d’évitement et
des signes de lassitude exprimés par le sujet.
3.4 Analyse qualitative des débriefings A la question « quel jeu avez-vous préféré ? », l’ensemble
des sujets a répondu l’Ipad. Tous les sujets préfèrent donc
réaliser le tangram sur l’Ipad plutôt que le tangram en bois.
Lorsque l’on cherche à savoir pourquoi ils préfèrent l’Ipad,
tous les sujets évoquent le caractère ludique de l’objet
(« c’est marrant ! », « c’est plus drôle »,…), 60% d’entre
eux trouvent qu’il est plus facile de réaliser le jeu sur Ipad
et 20% s’intéressent au caractère pratique de l’Ipad (« bah
c’est mieux, on peut l’utiliser quand on prend le métro par
exemple», « c’est léger donc on peut l’emmener partout »).
Enfin, 10% des sujets s’intéressent au coté
multidimensionnel de l’Ipad (« on peut faire plein d’autres
choses avec ça, avec le jeu en bois on peut rien faire
d’autre »).
DISCUSSION ET CONCLUSION Si l’on considère l’ensemble des résultats, les deux types de
passations semblent favoriser l’interaction entre les sujets.
Cependant, lorsque l’on regarde plus en détails, on
remarque que les deux situations de passation ne favorisent
pas systématiquement le même type d’interaction.
Les signes de lassitude, les comportements d’évitement, les
comportements négatifs, ainsi que les verbalisations de
demande qui dénotent ici d’une certaine difficulté dans la
réalisation de la tâche, sont plus présents lors de la
réalisation du tangram en bois. En revanche, lors de la
passation du Tangram sur Ipad, on note des attitudes de
concentration, ainsi que des comportements d’interaction
positive. L’Ipad semble donc être bénéfique pour favoriser
l’interaction positive et la collaboration chez les sujets
atteints de déficience mentale ou d’autisme. De plus, il est
nécessaire de prendre en compte l’aspect de plaisir
d’utilisation relevé lors des débriefings. En effet, la totalité
des sujets a évoqué sa préférence pour l’Ipad et son aspect
ludique. La motivation liée à cette préférence est un facteur
à ne pas négliger dans l’approche des apports de ce nouveau
type d’outil pour les personnes avec handicap. Malgré ces
résultats encourageants, l’effectif réduit de la population et
la nature très diverse des troubles mentaux/cognitifs
présentés par les sujets rendent les résultats difficilement
généralisables à une population plus large. Néanmoins, les
premiers résultats obtenus lors de cette étude exploratoire
semblent très prometteurs et il serait intéressant de
poursuivre ce travail à travers une étude plus approfondie
pouvant prendre en compte des effectifs plus importants et
également un matériel tel que la table interactive
« Diamond Touch », qui permet les interactions à plusieurs
personnes [17], l’Ipad étant limité à des binômes.
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