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Journal des Maladies Vasculaires (2012) 37, 329—334 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Analyse de périodiques Valeur de la progression de l’épaisseur intima-média carotidienne pour la prédiction d’événements cardiovasculaires dans la population générale (le projet collaboratif PROG-IMT) : une méta-analyse des données individuelles des sujets inclus Lorenz MW, Polak JF, Kavousi M, Mathiesen EB, Völzke H, Tuomainen TP, et al. (the PROG-IMT Study Group). Carotid intima-media thickness pro- gression to predict cardiovascular events in the general population (the PROG-IMT collaborative project): a meta-analysis of individual participant data. Lancet 2012;379:2053—62 Épaisseur intima-média carotidienne et événements cardiovasculaires Nambi V, Pedroza C, Kao LS. Carotid intima- media thickness and cardiovascular events. Lancet 2012;379:2028—30 Cet article est l’un des résultats du travail d’un consor- tium scientifique international, constitué en 2006, dédié à l’étude du risque cardiovasculaire et, plus spécifiquement, à l’évaluation de la valeur de la progression de l’épaisseur intima-média (IMT) carotidienne pour la prédiction des évé- nements cardiovasculaires. On y retrouve des spécialistes reconnus de toutes nationalités (principalement Europe de l’Ouest, Amérique du Nord et du Sud, Australie et Asie), déjà auteurs de nombreuses publications scientifiques de haut niveau dans ce domaine. L’approche méthodologique ne s’est pas limitée à une simple méta-analyse des publications disponibles, mais a comporté l’examen détaillé des données individuelles de chacun des patients inclus dans les études prospectives rete- nues, ce qui a impliqué une collaboration active avec les auteurs de chacune de ces études. En pratique, une recherche sur « PubMed » jusqu’à jan- vier 2012 a permis d’identifier, parmi les 1649 publications référencées sur le sujet, 22 études observationnelles lon- gitudinales de cohortes représentatives de la population générale, reposant sur des critères d’inclusion et une stra- tégie de recrutement bien définis, comportant au moins deux mesures de l’IMT carotidienne (pour l’évaluation de sa progression dans le temps) et répertoriant les événements cardiovasculaires (décès, accidents vasculaires cérébraux, infarctus du myocarde) avec un minimum de 20 évènements constatés. Les auteurs de 16 de ces études ont accepté de collaborer au projet et ont donné accès aux données individuelles des patients, constituant ainsi une base de 58 407 patients avec un suivi de 625 593 années × patients (soit 66 et 71 %, respectivement, du total des données publiées dans le monde). Ces données ont été scrutées (exclusion des valeurs aberrantes. . .), conditionnées (harmonisation des unités et regroupement des mesures par méthode et site), et les évé- nements cliniques ont été recensés. L’IMT avait été mesurée sur la carotide commune (et la valeur retenue était alors la moyenne des mesures effectuées au cours d’une visite). Il s’agissait soit de l’épaisseur moyenne sur la carotide commune (moyenne des mesures effectuées à droite et à gauche, sur le versant superficiel et le versant profond, et sous différentes incidences éventuelles), soit de l’épaisseur maximale (moyenne des valeurs maximales mesurées sur la carotide commune, la bifurcation, ou la carotide interne). À partir de ces valeurs était calculé le taux annuel de pro- gression de l’IMT. Étaient exclus les patients ayant présenté un évènement cardiovasculaire avant ou entre les deux premières mesures de l’IMT (de sorte que ne soient analysés que les événements pouvant être mis en rapport avec la progression de cette variable). L’analyse statistique a comporté l’évaluation du 0398-0499/$ see front matter http://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2012.10.003

Analyse de périodiques

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Journal des Maladies Vasculaires (2012) 37, 329—334

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

Analyse de périodiques

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Valeur de la progression de l’épaisseur intima-médiacarotidienne pour la prédiction d’événementscardiovasculaires dans la population générale (leprojet collaboratif PROG-IMT) : une méta-analysedes données individuelles des sujets inclus

� Lorenz MW, Polak JF, Kavousi M, Mathiesen EB,Völzke H, Tuomainen TP, et al. (the PROG-IMTStudy Group). Carotid intima-media thickness pro-gression to predict cardiovascular events in thegeneral population (the PROG-IMT collaborativeproject): a meta-analysis of individual participantdata. Lancet 2012;379:2053—62

Épaisseur intima-média carotidienne et événementscardiovasculaires

� Nambi V, Pedroza C, Kao LS. Carotid intima-media thickness and cardiovascular events. Lancet2012;379:2028—30

Cet article est l’un des résultats du travail d’un consor-tium scientifique international, constitué en 2006, dédié àl’étude du risque cardiovasculaire et, plus spécifiquement,à l’évaluation de la valeur de la progression de l’épaisseurintima-média (IMT) carotidienne pour la prédiction des évé-nements cardiovasculaires. On y retrouve des spécialistesreconnus de toutes nationalités (principalement Europe del’Ouest, Amérique du Nord et du Sud, Australie et Asie),déjà auteurs de nombreuses publications scientifiques dehaut niveau dans ce domaine.

L’approche méthodologique ne s’est pas limitée à unesimple méta-analyse des publications disponibles, mais a

comporté l’examen détaillé des données individuelles dechacun des patients inclus dans les études prospectives rete-nues, ce qui a impliqué une collaboration active avec lesauteurs de chacune de ces études.

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0398-0499/$ – see front matterhttp://dx.doi.org/10.1016/j.jmv.2012.10.003

En pratique, une recherche sur « PubMed » jusqu’à jan-ier 2012 a permis d’identifier, parmi les 1649 publicationséférencées sur le sujet, 22 études observationnelles lon-itudinales de cohortes représentatives de la populationénérale, reposant sur des critères d’inclusion et une stra-égie de recrutement bien définis, comportant au moinseux mesures de l’IMT carotidienne (pour l’évaluation de sarogression dans le temps) et répertoriant les événementsardiovasculaires (décès, accidents vasculaires cérébraux,nfarctus du myocarde) avec un minimum de 20 évènementsonstatés. Les auteurs de 16 de ces études ont acceptée collaborer au projet et ont donné accès aux donnéesndividuelles des patients, constituant ainsi une base de8 407 patients avec un suivi de 625 593 années × patientssoit 66 et 71 %, respectivement, du total des donnéesubliées dans le monde).

Ces données ont été scrutées (exclusion des valeursberrantes. . .), conditionnées (harmonisation des unités etegroupement des mesures par méthode et site), et les évé-ements cliniques ont été recensés. L’IMT avait été mesuréeur la carotide commune (et la valeur retenue était alorsa moyenne des mesures effectuées au cours d’une visite).l s’agissait soit de l’épaisseur moyenne sur la carotideommune (moyenne des mesures effectuées à droite et àauche, sur le versant superficiel et le versant profond, etous différentes incidences éventuelles), soit de l’épaisseuraximale (moyenne des valeurs maximales mesurées sur la

arotide commune, la bifurcation, ou la carotide interne). partir de ces valeurs était calculé le taux annuel de pro-ression de l’IMT.

Étaient exclus les patients ayant présenté un évènement

ardiovasculaire avant ou entre les deux premières mesurese l’IMT (de sorte que ne soient analysés que les événementsouvant être mis en rapport avec la progression de cetteariable). L’analyse statistique a comporté l’évaluation du

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isque relatif en fonction de la progression de l’IMT (soit’un écart-type, soit de 0,01 mm). Les modèles de régres-ion de Cox ont été ajustés pour l’âge, le sexe, puis laaleur de base de l’IMT, l’origine ethnique et le niveau socio-conomique, enfin pour la valeur moyenne de l’IMT et larogression des facteurs de risque vasculaire (pression arté-ielle systolique, traitement antihypertenseur, cholestérolotal, traitement hypolipémiant, taux de créatinine, taux’hémoglobine, tabagisme et diabète).

Au total, ont été disponibles pour l’analyse6 984 patients avec un suivi de 257 067 années × patients,t la survenue de 1519 infarctus du myocarde, 1339ccidents vasculaires cérébraux et 4268 décès. Les cohortesnalysées comportaient des hétérogénéités de recrutementnotamment en ce qui concerne l’âge) et de méthodologie,ais les mesures réalisées sur la carotide commune étaient

ssez homogènes. La progression de l’IMT de la carotideommune variait de −0,001 à +0,030 mm par an pour laaleur moyenne et de −0,001 à +0,065 mm par an pour laaleur maximale. La reproductibilité de la mesure étaitomprise entre 0,27 et 0,84.

Après ajustement, le risque relatif d’évènement étaite 0,97 à 0,98, alors même que cette analyse confir-ait la corrélation entre la valeur absolue de l’IMT et le

isque cardiovasculaire (relation néanmoins atténuée par’ajustement sur les facteurs de risque cardiovasculaire).ucune des variantes de l’analyse (en fonction du sexe ou de

’âge, avec ou sans exclusion des plaques d’athérome, en seestreignant aux études comportant au moins trois mesuresans le temps, ou en excluant les études comportant’éventuels biais de recrutement. . .) ne modifiait sensible-ent ce résultat.Les auteurs concluent donc qu’il n’existe, à l’heure

ctuelle, pas de preuve formelle d’association entre larogression individuelle de l’IMT carotidienne et le risqueardiovasculaire dans la population générale, malgré laolide corrélation, confirmée par cette analyse, entre laaleur absolue de l’IMT et les maladies cardiovasculaires.i des progrès peuvent être espérés grâce au raffinementechnique et à la standardisation des protocoles de mesure,l ne serait aujourd’hui pas licite d’utiliser la progressione l’IMT carotidienne comme substitut des événements cli-iques dans des études interventionnelles portant sur laopulation générale.

Dans le même numéro de cette revue, a étéublié un commentaire soulignant les limites de cettetude :l’exclusion des patients ayant présenté un évènement car-diovasculaire avant l’étude ou entre les deux premièresmesures de l’IMT, bien que méthodologiquement fondée,a pu amoindrir le résultat ;la possibilité d’hétérogénéité clinique des populationsobservées dans les différentes études a pu aussi en réduirela signification ;

la variabilité de mesure de l’IMT, créant un « bruit defond », peut avoir masqué un résultat positif ;

le traitement des données et l’exclusion des valeursextrêmes ou aberrantes peuvent avoir affaibli le résultat ;

six études excluaient de la mesure d’éventuelles plaquesd’athérome tandis que huit les incluaient, et il est pro-bable que la progression des plaques est différente decelle de l’IMT.

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Analyse de périodiques

Néanmoins, les auteurs de ce commentaire considèrentue les conclusions de cette analyse sont fondées en ceens que, en l’état actuel de la technique et des don-ées disponibles, l’évolution dans le temps de l’IMT n’estas exploitable comme substitut des évènements cliniquest la prédiction du risque cardiovasculaire dans la popu-ation générale. Ils insistent, eux aussi, sur la nécessité’améliorations techniques et de standardisation de laesure.Au total, il s’agit d’un travail considérable, fort bien

ené, selon une méthodologie bien construite, et dont lesonclusions sont claires, fondées et bien analysées. Elles ne’appliquent, bien évidemment, qu’à la population généraleet il peut en être différemment dans la population à hautisque). La mesure de l’épaisseur intima-média carotidiennest donc utile à l’évaluation du risque cardiovasculaire,ais son évolution dans le temps ne peut, aujourd’hui,

tre exploitée, que ce soit pour des études interven-ionnelles ou pour la prise en charge individuelle d’unatient.

C’est donc « un pavé dans la mare », si l’on considère toute qui a pu être dit et écrit sur le sujet ces dernières années.ela nous rappelle qu’il ne faut pas aller trop vite, notam-ent lorsque la logique apparente (ou la vraisemblance)

oudrait nous faire devancer la démonstration. Il fautonc toujours attendre les preuves et réfréner nos enthou-iasmes. La médecine progresse lorsqu’elle s’interroge et seemet perpétuellement en question. . .

Michel Dauzat

Service d’exploration et médecine vasculaire, CHU,place du Professeur-Robert-Debré, 30029 Nîmes, France

Amélioration de la survie sans amputation dansl’ischémie critique non revascularisable desmembres inférieurs et son implication dans ledesign des essais cliniques et la mesure de la qualité

� Benoit E, O’Donnell Jr TF, Kitsios GD, IafratiMD. Improved amputation-free survival in unre-constructable critical limb ischemia and itsimplications for clinical trial design and qualitymeasurement. J Vasc Surg 2012;55:781—9

es progrès de la prise en charge médicale de’athérothrombose et l’augmentation des procédurese revascularisation, notamment par voie endovasculairees 20 dernières années ont permis une réduction de la mor-alité et des amputations majeures. Cependant, chez 20 à0 % des patients en ischémie critique, la revascularisationchoue ou n’est pas réalisable.

Dans les recommandations du TASC II, la survie sansmputation est le critère principal d’évaluation du suc-ès thérapeutique, notamment dans les études randomiséese référence telles que PREVENT III et BASIL ou pour laDA pour juger de l’efficacité des nouvelles thérapeu-iques.

L’objectif de cette étude est d’évaluer l’évolution auours du temps des patients en ischémie critique non revas-ularisés ces 20 dernières années en étudiant les groupesémoins des essais cliniques, partant du principe que ces

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Mmdreanévrismal après thérapeutique endovasculaire. Les auteurs

Analyse de périodiques

patients bénéficient d’un traitement médical optimal quilui-même a évolué, avec une meilleure prise en charge glo-bale des facteurs de risque.

Les auteurs ont réalisé une méta-analyse à partir d’uneanalyse bibliographique et statistique des essais cliniquessélectionnés incluant plus de cinq patients, excluant les obli-térations aiguës, les étiologies non athéromateuses et danslesquels la population non revascularisée (pour des raisonsanatomiques, d’échec de procédure ou de co-morbidités)pouvait être évaluée séparément. Les critères principauxd’évaluation retenus étaient la survie sans amputation, lamortalité et le taux d’amputation à un an. L’évolution dela sévérité de la pathologie au cours du temps était esti-mée par l’évolution des caractéristiques des patients àl’inclusion.

Onze essais ont été retenus, de 1995 à 2010, totalisant886 patients non revascularisables. La majorité des patientsprovenait des groupes témoins d’essais randomisés (9/11)visant à évaluer de nouvelles thérapeutiques (stimulationcordonale postérieure, thérapie génique. . .). En résumé, àun an, les taux sont les suivants (intervalle de confianceà 95 %) : survie sans amputation 55 % (40—69), décès 20 %(12—32) et amputation 34 % (25—45).

De facon statistiquement significative, la survie sansamputation augmente avec le temps, alors qu’on observeune tendance non significative à une diminution des ampu-tations et des décès. Le manque de données publiéesn’a pas permis d’évaluer l’évolution des co-morbidités etde la sévérité des tableaux cliniques d’ischémie critiquenon revascularisable au cours du temps. À noter, une trèsgrande hétérogénéité des données cliniques et des caracté-ristiques des patients : aucun des essais retenus ne détaillaitles mêmes données à l’inclusion (par exemple, les étudespubliées avant 2003 ne comportent pas de données sur ladyslipidémie, la définition de l’atteinte coronarienne estvariable. . .).

Alors que les critères hémodynamiques font partie de ladéfinition de l’ischémie critique depuis 1992 (Second Euro-pean Consensus Document on Critical Limb Ischemia), cetarticle confirme que les données hémodynamiques sont lar-gement sous-utilisées et non consensuelles, ce qui contribueégalement à la grande hétérogénéité des patients. Huitessais sur 11 utilisent l’Index de pression systolique de che-ville (IPS) comme critère d’inclusion. Pour deux essais, lavaleur seuil de pression de cheville est de 50 mmHg alorsque pour cinq essais plus récents, ce seuil est de 70 mmHg.Six essais sur 11 utilisent la pression de gros orteil avec desvaleurs, définissant l’ischémie critique, inférieures à 30 ou50 mmHg à l’inclusion. Quatre essais utilisent la pressiontranscutanée en oxygène (TcPO2) avec une valeur seuil infé-rieure à 30 mmHg.

Finalement, le taux de patients survivants non amputésapparaît comme un marqueur adapté de l’évolution cliniquedes patients en ischémie critique chronique. L’augmentationde ce taux est corrélée à une diminution du taux de morta-lité et des amputations majeures observée ces 20 dernièresannées. Cela est lié non seulement à une meilleure priseen charge des facteurs de risque et à une optimisationdu traitement médical mais également à une augmenta-

tion de la fréquence des procédures de revascularisation,notamment endovasculaires, chez les patients fragiles. Mal-gré une grande hétérogénéité des essais inclus dans cette

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éta-analyse, la survie sans amputation apparaît comme unarqueur pertinent.

Ulrique Michon-Pasturel

Service de médecine vasculaire, groupe hospitalierParis Saint-Joseph, 185, rue Raymond-Losserand,

75674 Paris cedex 14, France

Adresse e-mail : [email protected]

Le traitement par statine est associé à unerégression du sac anévrismal après réparationaortique endovasculaire

� Raux M, Cochennec F, Becquemin JP. Statin the-rapy is associated with aneurysm sac regressionafter endovascular aortic repair. J Vasc Surg2012;55:1587—92

es statines, mises sur le marché depuis près de 20 ans,eprésentent une véritable révolution thérapeutique et,orénavant, sont une classe thérapeutique majeure enatière cardiovasculaire. Que cela soit en prévention pri-aire ou en prévention secondaire, en prévention coronaire

u en prévention cérébrovasculaire, les statines sont delus en plus incontournables dans l’arsenal thérapeutique.ême en chirurgie cardiovasculaire, de nombreuses études

es placent au premier plan. Dans cet article d’une excel-ente revue de chirurgie vasculaire, l’équipe de Jean-Pierreecquemin propose une nouvelle indication, à savoir laéduction de la taille du sac anévrismal après la mise enlace d’une endoprothèse comme traitement d’un ané-risme de l’aorte abdominale [1].

Les thérapeutiques endovasculaires représentent unelternative à la chirurgie à ciel ouvert dans la cure des ané-rismes de l’aorte abdominale, dont la proportion ne cessee croître ces dernières années. Le but de la réparationndovasculaire est de prévenir la rupture ou la fissurationortique par la réduction de pression sur le mur vascu-aire. Souvent, et c’est d’ailleurs un critère d’efficacité duraitement, cette réduction de pression sur le mur artériel’accompagne d’une réduction du diamètre anévrismal. Ilst bien connu que différents facteurs anatomiques sontssociés à cette réduction de diamètre après mise en place’une endoprothèse, notamment le diamètre de l’artèreliaque, le diamètre maximal transverse de l’anévrisme,e diamètre du collet ou encore la longueur totale de’anévrisme. Parallèlement, quelques études rétrospectivesupposaient un effet favorable des statines sur le diamètreu sac anévrismal après mise en place d’une endoprothèseais une récente méta-analyse n’était pas en faveur d’unuelconque effet thérapeutique [2].

L’équipe du professeur Becquemin, de l’hôpital Henri-ondor à Créteil, est une équipe pionnière en matière deise en place d’endoprothèses dans le cadre du traitementes anévrismes de l’aorte abdominale. Elle rapporte lesésultats d’une étude rétrospective d’observation mettantn relation la prescription d’une statine et l’évolution du sac

nt ainsi colligé 166 dossiers parmi lesquels 120 patientstaient traités par statine et 46 ne l’étaient pas. Lesaractéristiques des patients étaient comparables en début

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32

’observation. Ils ont montré que, deux ans après la mise enlace de l’endoprothèse, le groupe des patients avec traite-ent par statine avait une réduction du sac anévrismal plus

réquente que le groupe de patients non traités par statine25 % contre 14 %, p < 0,0001). Autrement dit, si on consi-ère comme critère de jugement une réduction de 5 mm duac anévrismal, les patients sous statine avaient huit foislus de chance d’atteindre ce seuil. Une analyse multipa-amétrique montrait que la probabilité de régression du sacnévrismal était environ neuf fois plus forte chez les patientsraités par statine. Les auteurs concluent en la nécessité dea mise en place d’un essai thérapeutique randomisé pouronfirmer cette hypothèse issue d’une étude rétrospective’observation.

Cette étude, assez convaincante notamment par sa puis-ance, soulève tout de même deux types de questions :

tout d’abord, on sait bien que l’hypercholestérolémien’est pas facteur de risque de la survenue d’un anévrismede l’aorte abdominale. Il est rare en médecine que letraitement d’un facteur, qui n’est pas facteur de risque,puisse améliorer la survenue ou l’évolution d’une mala-die. Néanmoins, il a bien été démontré, dans le cadred’études in vitro et/ou animales, que les statines ne selimitaient pas à la baisse du LDL-cholestérol mais qu’ellesavaient aussi d’autres effets, nommés effets pléiotropes,incluant une activité anti-inflammatoire, un effet surdifférentes protéases ou encore l’amélioration de la fonc-tion endothéliale. Malheureusement, cette hypothèsed’effets pléiotropes des statines n’a jamais vraimentété confirmée sur le plan épidémiologique, à savoir quele niveau de risque cardiovasculaire des patients sousstatines est fonction du niveau de LDL-cholestérol obtenusous traitement, ni plus ni moins. Il n’existe donc pas, surle plan épidémiologique, d’effet bénéfique des statinesau-delà de la baisse du LDL-cholestérol. A contrario decette faiblesse épidémiologique, on pourrait rétorquerque, alors que l’hypercholestérolémie n’est qu’un trèsfaible facteur de risque cérébrovasculaire, les statinesont un effet substantiel sur le risque de survenue et/oude récidive d’un accident vasculaire cérébral ;

la limite principale de cette étude est bien entendu soncaractère observationnel et rétrospectif ; ce point estd’ailleurs bien discuté par les auteurs qui concluent en lanécessité d’un essai thérapeutique randomisé pour confir-mer leurs résultats. Au bénéfice des auteurs, dans lecadre de leurs analyses, ils ont clairement tenté d’évitertous les biais d’inclusion ou d’analyse possibles. Sur les957 patients initialement recrutés, ils ont exclu nombrede patients, notamment les patients mauvais observantsou modifiant la posologie ou la molécule de statine pen-dant les deux ans de suivi. Il est intéressant de noterque les statines ont été souvent prescrites en préopé-ratoire par l’équipe d’anesthésistes. Il aurait d’ailleursété intéressant de connaître les caractéristiques précisesmotivant la prescription. Étaient-elles homogènes enfonction des différents anesthésistes ? Était-ce lié exclu-sivement au niveau de LDL-cholestérol ? Avec le mêmeniveau de seuil pour tous les patients ? Bien entendu, toutce raffinement dans l’analyse des études rétrospectives a

pour objet de pouvoir juger de la causalité entre une pres-cription (ici les statines) et la survenue d’un évènement(ici la réduction du sac anévrismal). Un élément rapporté

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Analyse de périodiques

par les auteurs, à savoir le fait que la durée du traitementpar statine n’avait pas d’effet sur la réduction du dia-mètre de l’aorte, est plutôt en défaveur de la causalité.Ces quelques limitations mises à part, ne boudons pas

otre plaisir ! Cette étude est l’une des plus puissantes, sie n’est la plus puissante, publiées à ce jour. D’ailleurs,insi que le font remarquer les auteurs, il n’est pas certainu’un essai randomisé statine versus placebo voie le jourans cette indication puisque, les statines ayant démontréne réduction de la morbi-mortalité cardiovasculaire chezes patients à risque cardiovasculaire élevé, ce qui est indis-utablement le cas des patients porteurs d’un anévrisme de’aorte abdominale, un comité de protection des personnesourrait s’émouvoir du caractère éthique d’un groupe pla-ebo.

En conclusion, même si l’on n’est pas absolument certainu bénéfice sur la réduction du sac anévrismal, il semble dif-cile de ne pas prescrire de statine après la mise en place’une endoprothèse pour traiter un anévrisme de l’aortebdominale.éférences1] Raux M, Cochennec F, Becquemin JP. Statin therapy is

associated with aneurysm sac regression after endovas-cular aortic repair. J Vasc Surg 2012;55:1587—92.

2] Twine CP, Williams IM. Systematic review and meta-analysis of the effects of statin therapy on abdominalaortic aneurysms. Br J Surg 2011;98:346—53.

Hélène Lelong, Jacques Blacher

Centre de diagnostic, Hôtel-Dieu,75181 Paris cedex 04, France

Mise en place d’un filtre cave inférieur temporairepour thrombose veineuse profonde des membresinférieurs des grossesses à terme

� Liu Y, Sun Y, Zhang S, Jin X. Placement of aretrievable inferior vena cava filter for deepvenous thrombosis in term pregnancy. J Vasc Surg2012;55:1042—7

es auteurs, du département de chirurgie vasculaire d’unôpital de l’université de Shandong (Chine) rapportent unetude prospective monocentrique menée de 2006 à 2010 sura faisabilité d’une interruption cave temporaire en préven-ion des événements thromboemboliques de la délivrance.

Quinze patientes dont les grossesses étaient à terment bénéficié de la mise en place d’un filtre caveemporaire entre 2006 et 2010. Dans tous les cas, il’agissait d’une première grossesse menée à terme chezes patientes primipares (11/15 G1P0 et 4/15 G1P1), âgéesn moyenne de 29,4 ans (extrêmes 20—41 ans), sans anté-édents thromboemboliques personnels (les antécédentsamiliaux thrombotiques ne sont pas précisés) et chez les-uelles le bilan de thrombose comprenant les dosages desrotéines C, S, de l’antithrombine, des anticorps anticar-iolipines et la recherche d’un anticoagulant circulant était

La thrombose veineuse était proximale, de siège iliofé-oral, chez toutes les patientes en dehors d’une thrombose

umelle survenant chez la patiente âgée de 41 ans. La

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10 ; amélioration modérée si score de 5 à 7 et importante

Analyse de périodiques

thrombose survenait lors du troisième trimestre(34—40e semaine), sans signe de migration embolique.L’ancienneté de la TVP au moment de la délivrance étaitinférieure à deux semaines (un à trois semaines ; 1,73 enmoyenne) et justifiait une héparinothérapie curative parHBPM en injections biquotidiennes.

Aucune patiente n’avait de surrisque hémorragique,aucune n’a présenté de saignements pathologiques sous trai-tement anticoagulant.

La mise en place d’un filtre cave temporaire est justifiéepar les auteurs par l’augmentation du risque thromboem-bolique de la délivrance rapportée dans la littérature chezles patientes présentant une thrombose veineuse profondeen fin de grossesse du fait de l’interruption nécessaire dutraitement anticoagulant. Cette interruption était réalisée12 heures avant l’accouchement programmé par césariennechez toutes les patientes et le traitement anticoagulantétait repris 12 heures après la délivrance.

Le filtre (OptEase) était inséré sous anesthésie localepar voie jugulaire avec un cathéter de 6 french, la miseen place nécessitant une injection brève (2 min) de pro-duit de contraste. L’ablation était réalisée par voie fémorale(cathéter de 10 french) après échographie de contrôle puiscavographie afin d’exclure une migration et contrôler lavacuité du filtre (contrôle radiographique de 7—8 min).Aucune complication n’a été relevée lors de la mise en placeou le retrait du filtre.

Chez deux patientes asymptomatiques, le contrôle parimagerie avant le retrait a retrouvé un thrombus dans lefiltre, dont un a disparu après fibrinolyse par urokinase. Onpeut donc supposer que deux évènements thromboembo-liques ont été évités.

Le filtre a été laissé en place en moyenne 13 jours(9—15 jours) chez 14 patientes. L’échec de la fibrinolyse dufiltre chez une patiente a justifié le maintien de celui-cide facon permanente associé à un traitement anticoagulantprolongé.

Dans tous les autres cas, le traitement anticoagulant parwarfarine a été maintenu au minimum trois mois en post-procédure.

Le suivi moyen a été de 15 mois (extrêmes 6—48 mois). Iln’y a pas eu de récidive d’évènement thrombotique. Douzepatientes sont restées strictement asymptomatiques et letraitement poursuivi trois mois. Trois patientes ont présentédes douleurs et un œdème du membre inférieur sur syn-drome post-thrombotique (dont la patiente chez laquelle lefiltre cave a été laissé en place) justifiant pour les auteurs,outre la compression veineuse, la poursuite du traitementanticoagulant plus de six mois (durée totale non précisée).En dehors du traitement anticoagulant par AVK, la nature dela contraception n’est pas précisée.

En conclusion : chez ces 15 patientes sans surrisque(tant thrombotique qu’hémorragique) particulier, cette pro-cédure (accouchement programmé par césarienne avecfenêtre thérapeutique du traitement héparinique justifiantla mise en place d’une interruption cave temporaire aumoment de la délivrance) est jugée sûre, efficace et fai-sable.

Deux évènements thrombotiques ont été a priori évités,

ce qui précise le niveau de risque thrombotique élevédans cette situation. L’absence de complication tant lorsde la mise en place du filtre que lors de son retrait est

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emarquable dans cette étude validant pour les auteursette procédure « invasive ».

Compte tenu du faible effectif lié à la rareté des évène-ents thromboemboliques dans une population peu étudiée,

l est cependant impossible de définir des facteurs prédictifse succès de cette procédure.

Ulrique Michon-Pasturel

Service de médecine vasculaire, groupe hospitalierParis Saint-Joseph, 75674 Paris cedex 15, France

Essai randomisé contrôlé contre placebo del’oxybutynine dans le traitement initial del’hyperhidrose palmaire et axillaire

� Wolosker N, Milanez de Campos JR, Kauffman P,Puech-Leao P. A randomized placebo-controlledtrial of oxybutynin for the initial treatment ofpalmar and axillary hyperhidrosis. J Vasc Surg2012;55:1696—700

’hyperhidrose est une production excessive de sueur. Elleeut être généralisée ou localisée. Les hyperhidroses locali-ées, axillaires ou palmoplantaires, sont les plus fréquentes,ébutant à la puberté et régressant en général après 50 ans.lles seraient dues à un dysfonctionnement des circuitsympathiques réflexes impliqués dans la sudation eccrine.es hyperhidroses palmaires (HP) et axillaires (HA) peuventntraîner des gênes esthétiques et fonctionnelles majeuresans la vie sociale et professionnelle. Le traitement médi-al est suspensif et repose sur les antiperspirants dont lesels d’aluminium à la concentration de 10 à 20 %, les iono-horèses pour les HP et la toxine botulinique pour les HA.’utilisation de la toxine botulinique dans les HP est possibleais hors AMM, assez douloureuse et très coûteuse. Le trai-

ement chirurgical n’est utilisé qu’en dernière intention. Il’agit d’une sympathectomie endoscopique thoracique. Ellee complique souvent d’une hyperhidrose compensatoire,mprévisible. L’oxybutynine est un médicament anticholi-ergique ayant l’AMM dans les troubles mictionnels. Sonfficacité au cours de l’HP, de l’HA ou de l’hyperhidroseost-sympathectomie a été rapportée dans quelques cas,ans qu’aucune étude ne soit disponible, avec une toléranceonne en dehors d’une sensation de bouche sèche. Cettetude prospective randomisée, contrôlée contre placebo

testé l’efficacité de l’oxybutynine utilisée en premièrentention dans les HP et les HA. La dose utilisée était pro-ressivement croissante de 2,5 mg/j à j0 jusqu’à 5 mg × 2/j

partir de j22 jusqu’à la fin de l’étude (six semaines deraitement au total). L’évaluation était réalisée de la faconuivante :

avant l’inclusion par un questionnaire spécifique du reten-tissement de l’hyperhidrose sur la qualité de vie (QDV).Ce questionnaire n’est pas détaillé dans l’article et a déjàété utilisé une fois dans la littérature par les auteurs ;

après six semaines de traitement par une évaluation par lepatient de l’amélioration des symptômes (échelle de 0 à

pour les scores de 8 à 10), une évaluation de la sécheressebuccale sur une échelle de 0 à 3 et par une évaluation del’amélioration de la QDV par le même questionnaire.

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34

Cinquante patients ont été inclus, mais seuls 45 ontté analysés (cinq perdus de vue, répartis dans les deuxroupes). Les patients inclus avaient une HP ou une HA (maisn fait aucun ne semble avoir eu les deux !), associée ouon à une hyperhidrose plantaire, sans contre-indication àn anticholinergique (glaucome notamment). L’HP et l’HAtaient améliorées significativement dans le groupe oxybu-ynine chez plus de 70 % des patients (versus 27,3 % danse groupe placebo), dont 48 % avec une amélioration impor-ante. L’hyperhidrose plantaire était améliorée dans plus de0 % des cas. La QDV était altérée chez tous les patients et’améliorait significativement dans le groupe oxybutynineans 74 % des cas, versus 13,6 % dans le groupe placebo.nfin, la sensation de bouche sèche était significativementlus fréquemment rapportée dans le groupe oxybutynine

modérée à sévère) à la dose de 10 mg que dans le groupelacebo (34,8 % versus 9,1 %).

Bien que cette étude soit imparfaite sur le plan métho-ologique (absence de double insu, outil d’évaluation non

Analyse de périodiques

alidé, absence de calcul d’effectif préalable, pas d’analysen intention de traiter, par exemple), les résultats sont trèsntéressants et confirment des données préalables, dans uneathologie fréquente avec jusqu’à présent, peu de solu-ions thérapeutiques. L’efficacité de l’oxybutynine devraittre confirmée idéalement sur de plus grands effectifs, enouble insu et avec un suivi à plus long terme pour savoiri un échappement ou une tachyphylaxie ne survient pasu bout de plusieurs mois de traitement. En tout état deause, ce traitement, si les contre-indications sont res-ectées, est facile et peu coûteux à utiliser en premièrentention.

Patricia Senet

Unité de dermatologie vasculaire, service dedermatologie, hôpital Tenon, 4, rue de la Chine,

75020 Paris, France