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Analyse dynamique de l’interaction pont–véhicules pour les ponts routiers. II. Application au pont de Senneterre au Québec Kamel Henchi, Martin Talbot et Mario Fafard Résumé : Dans cet article, nous présentons une application de l’algorithme de l’interaction dynamique pont–véhicules que nous avons développé et présenté dans l’article qui précède. Nous comparons les résultats numériques et ceux obtenus à partir de tests expérimentaux des fréquences et modes propres et en vibrations forcées effectués sur le pont de Senneterre situé au Québec. Le modèle numérique du pont est obtenu par une modélisation tridimensionnelle par éléments finis, en utilisant des éléments de coques et de poutres, en tenant compte de l’interaction pont–vehicules et du profil de la route d’une façon réaliste. Le modèle numérique du véhicule utilisé dans la province de Québec est représenté d’une manière discrète selon des paramètres mécaniques calibrés et ajustés à partir des résultats expérimentaux. Une étude paramétrique a été réalisée par la suite. Cette étude permet de mettre en évidence quelques recommandations quant à la résistance des ponts aux effets dynamiques et l’établissement d’un facteur d’amplification dynamique adapté aux conditions spécifiques de chargement des ponts. Mots clés : coque, dynamique, éléments finis, interaction, pont, rugosité, véhicule, facteur d’amplification, essais expérimentaux. Abstract: In this paper, an application of the algorithm for the dynamic analysis of bridge–vehicles interaction that the authors developed in the preceeding paper is presented. The numerical results are compared to the results obtained from experimental tests of frequencies and mode shapes and from forced vibrations carried out on the Senneterre bridge located in Quebec. The numerical model of the bridge is obtained by tridimensional finite element modeling, using shell and beam elements, and taking into account bridge–vehicles interaction and the road profile in a realistic way. The numerical vehicle model used in the province of Quebec is represented in a discrete form based on mechanical parameters calibrated and adjusted according to experimental results. A parametric study was then carried out. The results of this study allow us to present some recommendations with regard to bridge resistance to dynamic effects and the determination of a dynamic amplification factor based on the specific loading conditions of the bridge. Key words: shell, dynamic, finite elements, interaction, bridge, roughness, vehicle, amplification factor, experimental tests. [Journal translation] 1. Introduction La plupart des programmes d’inspection des ponts incluent des examens visuels périodiques. Il n’est pas toujours facile d’ac- complir correctement ces inspections parce qu’elles sont chè- res, que les différentes parties du pont sont parfois difficiles d’accès et aussi qu’il n’y a pas toujours assez d’ingénieurs qualifiés. Il existe des formes de détérioration qui peuvent ne pas être visibles à l’œil nu. D’autres moyens d’inspection sont alors nécessaires pour compléter l’examen visuel et pour signaler une grave détérioration pouvant survenir. Ainsi, depuis les deux dernières décennies, un excellent complément à l’inspec- tion des ponts basé sur des tests non destructifs est devenu un outil majeur dans l’évaluation des ouvrages d’art. Plusieurs exemples de tests de ponts (vieux ou récents) à travers le monde ont été publiés ces dernières années (Lebet et Hirt 1979; Bakht et Jaeger 1990; Markey 1991; Favre et al. 1992; Paultre et al. 1992, 1995; Green et Cebon 1994). Cet article explore les détails techniques des tests effectués sur le pont de Senneterre (Québec) de même que les techniques avancées de la modélisation par éléments finis pour reproduire, d’une manière proche de la réalité, le comportement statique et dynamique du pont. Le seul moyen de vérifier et de confir- mer la bonne simulation du modèle numérique développé est de le calibrer et de le comparer à des résultats obtenus expéri- mentalement. À cet effet, nous avons utilisé les résultats de tests expérimentaux statiques et dynamiques effectués à l’aide du laboratoire mobile de la Direction des structures du minis- tère des Transports du Québec (Savard et Halchini 1993). Dans cette étude, on calcule et compare quelques paramètres dont, entre autres, les déplacements obtenus en intégrant les accélé- rations obtenues expérimentalement de même que les fréquen- ces de vibration et les FAD pour différents cas de charges et Reçu le 12 novembre 1996. Révision acceptée le 7 juillet 1997. K. Henchi 1 et M. Fafard. Groupe interdisciplinaire de recherche en éléments finis, Département de génie civil, Université Laval, Sainte-Foy, Québec, QC G1K 7P4, Canada. M. Talbot. Direction des structures, ministère des Transports, 930, chemin Sainte-Foy, Québec, QC G1S 4X9, Canada. Les commentaires sur le contenu de cet article doivent être envoyés au directeur scientifique de la Revue avant le 30 juin 1998 (voir l’adresse au verso du plat supérieur). 1 Auteur correspondant (tél. : (418) 656-2131, poste 6274; téléc. : (418) 656-2928; mél : [email protected]). Can. J. Civ. Eng. 25: 174–187 (1998) 174 © 1998 CNRC Canada

Analyse dynamique de l'interaction pont-véhicules pour les ponts routiers. II. Application au pont de Senneterre au Québec

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Analyse dynamique de l’interaction

pont–véhicules pour les ponts routiers.

II. Application au pont de Senneterre au Québec

Kamel Henchi, Martin Talbot et Mario Fafard

Résumé :Dans cet article, nous présentons une application de l’algorithme de l’interaction dynamique pont–véhicules quenous avons développé et présenté dans l’article qui précède. Nous comparons les résultats numériques et ceux obtenus à partirde tests expérimentaux des fréquences et modes propres et en vibrations forcées effectués sur le pont de Senneterre situé auQuébec. Le modèle numérique du pont est obtenu par une modélisation tridimensionnelle par éléments finis, en utilisant deséléments de coques et de poutres, en tenant compte de l’interaction pont–vehicules et du profil de la route d’une façon réaliste.Le modèle numérique du véhicule utilisé dans la province de Québec est représenté d’une manière discrète selon desparamètres mécaniques calibrés et ajustés à partir des résultats expérimentaux. Une étude paramétrique a été réalisée par lasuite. Cette étude permet de mettre en évidence quelques recommandations quant à la résistance des ponts aux effetsdynamiques et l’établissement d’un facteur d’amplification dynamique adapté aux conditions spécifiques de chargement desponts.

Mots clés : coque, dynamique, éléments finis, interaction, pont, rugosité, véhicule, facteur d’amplification, essaisexpérimentaux.

Abstract: In this paper, an application of the algorithm for the dynamic analysis of bridge–vehicles interaction that theauthors developed in the preceeding paper is presented. The numerical results are compared to the results obtained fromexperimental tests of frequencies and mode shapes and from forced vibrations carried out on the Senneterre bridge located inQuebec. The numerical model of the bridge is obtained by tridimensional finite element modeling, using shell and beamelements, and taking into account bridge–vehicles interaction and the road profile in a realistic way. The numerical vehiclemodel used in the province of Quebec is represented in a discrete form based on mechanical parameters calibrated andadjusted according to experimental results. A parametric study was then carried out. The results of this study allow us topresent some recommendations with regard to bridge resistance to dynamic effects and the determination of a dynamicamplification factor based on the specific loading conditions of the bridge.

Key words: shell, dynamic, finite elements, interaction, bridge, roughness, vehicle, amplification factor, experimental tests.[Journal translation]

1. Introduction

La plupart des programmes d’inspection des ponts incluent desexamens visuels périodiques. Il n’est pas toujours facile d’ac-complir correctement ces inspections parce qu’elles sont chè-res, que les différentes parties du pont sont parfois difficilesd’accès et aussi qu’il n’y a pas toujours assez d’ingénieursqualifiés. Il existe des formes de détérioration qui peuvent nepas être visibles à l’œil nu. D’autres moyens d’inspection sontalors nécessaires pour compléter l’examen visuel et pour signaler

une grave détérioration pouvant survenir. Ainsi, depuis lesdeux dernières décennies, un excellent complément à l’inspec-tion des ponts basé sur des tests non destructifs est devenu unoutil majeur dans l’évaluation des ouvrages d’art. Plusieursexemples de tests de ponts (vieux ou récents) à travers lemonde ont été publiés ces dernières années (Lebet et Hirt 1979;Bakht et Jaeger 1990; Markey 1991; Favre et al. 1992; Paultreet al. 1992, 1995; Green et Cebon 1994).

Cet article explore les détails techniques des tests effectuéssur le pont de Senneterre (Québec) de même que les techniquesavancées de la modélisation par éléments finis pour reproduire,d’une manière proche de la réalité, le comportement statiqueet dynamique du pont. Le seul moyen de vérifier et de confir-mer la bonne simulation du modèle numérique développé estde le calibrer et de le comparer à des résultats obtenus expéri-mentalement. À cet effet, nous avons utilisé les résultats detests expérimentaux statiques et dynamiques effectués à l’aidedu laboratoire mobile de la Direction des structures du minis-tère des Transports du Québec (Savard et Halchini 1993). Danscette étude, on calcule et compare quelques paramètres dont,entre autres, les déplacements obtenus en intégrant les accélé-rations obtenues expérimentalement de même que les fréquen-ces de vibration et les FAD pour différents cas de charges et

Reçu le 12 novembre 1996. Révision acceptée le 7 juillet 1997.

K. Henchi1 et M. Fafard. Groupe interdisciplinaire derecherche en éléments finis, Département de génie civil,Université Laval, Sainte-Foy, Québec, QC G1K 7P4, Canada.M. Talbot. Direction des structures, ministère des Transports,930, chemin Sainte-Foy, Québec, QC G1S 4X9, Canada.

Les commentaires sur le contenu de cet article doivent êtreenvoyés au directeur scientifique de la Revue avant le 30 juin1998 (voir l’adresse au verso du plat supérieur).

1 Auteur correspondant (tél. : (418) 656-2131, poste 6274;téléc. : (418) 656-2928; mél : [email protected]).

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différentes vitesses. La majorité des tests dynamiques ont pourobjectifs : (i) la vérification des fréquences propres; (ii) la dé-termination et la visualisation des modes; (iii) la déterminationd’un modèle modal.

Toutes ces propriétés sont utilisées pour l’identification etsurtout pour la calibration du modèle éléments finis (Ewins1984; Hogue et al. 1991; Salane et Baldwin 1990; Fafard et al.1993). La calibration est normalement faites en deux phases :(i) la phase statique qui consiste à calibrer les propriétés stati-ques tel que les conditions aux limites et les rigidités; (ii) laphase dynamique qui consiste à calibrer les propriétés dyna-miques tel que les masses et l’amortissement du pont et éven-tuellement les propriétés du véhicule d’essai.

2. Modélisation des ponts

Nous nous intéressons à la modélisation de l’interactionpont–véhicules par éléments finis. Les ponts sont modélisés engénéral par des éléments de coques et de poutres tridimension-nels qui peuvent représenter tous les mouvements possiblesd’un point quelconque de la structure. Cette modélisation nouspermet d’inclure toutes les rigidités possibles, entre autres, lesrigidités transversales et longitudinales du pont.

L’équation d’équilibre dynamique pour un pont de formequelconque modélisé par éléments finis, s’écrit (Henchi et al.1998) :

[1] [Mb]{U��

} + [Cb]{U�

} + [Kb]{U} = {Fbvint}

Les matrices [Mb], [Kb] et [Cb] représentent, respectivement,les matrices de masse, de rigidité et d’amortissement du sys-tème global (pont) et {Fbv

int} représente le vecteur des forcesd’interaction pont–véhicules (l’effet des véhicules sur le pontet vice versa).

La modélisation des ponts par éléments finis implique lesaspects suivants :

2.1. Choix des élémentsUn pont peut être représenté simplement par des poutres; c’estle cas des ponts à géométrie simple et dont le chargement n’estpas excentré suivant la largeur du pont. Dans le cas contraire,où la géométrie et le chargement sont complexes, ces pontssont modélisés d’une manière tridimensionnelle avec des élé-ments de coques et de poutres (et de câbles dans le cas desponts suspendus et haubanés).

2.2. Choix du maillagePour une étude dynamique correcte de l’interaction pont–véhicules,il est très important de choisir un maillage convenable pour lepont. Cela revient à choisir un nombre de noeuds par région defaçon à ce que tous les modes importants puissent être captés.C’est le cas, par exemple, des ponts à haubans et des pontssuspendus, où il faut choisir un nombre de noeuds suffisant surchaque câble pour ne pas omettre les modes importants (dontles modes de torsion). Dans le cas des ponts à piles (fig. 1), lespoutres longitudinales sont souvent modélisées soit par despoutres excentrées (raidisseurs), soit par des éléments de co-ques, où les effets de membrane sont dominants. Dans ce der-nier cas, le maillage doit être raffiné pour prendre en compteles fortes variations de déformation en membrane.

Modèles des connecteursDans le cas des ponts composites, la présence des connecteurs(goujons) pose des problèmes parfois au niveau de la modéli-sation. Des solutions plus au moins compliquées sont disponi-bles pour contourner cette difficulté et assurer l’actioncomposite de la dalle avec la poutre. En particulier, on peutmettre, entre la dalle et les poutres, une plaque transversaledont les dimensions sont des paramètres à calibrer (voir fig. 2;Denis et al. 1994). On peut aussi utiliser un élément d’interfacede type poutre (Fafard et al. 1993) qui assure la liaison entreles noeuds de la dalle et ceux de la poutre (fig. 3).

Véhicule et rugositéCes deux paramètres représentent, respectivement, la sourced’excitation et l’interface entre le pont et le véhicule (Henchiet al. 1998). Ils doivent être modélisés d’une façon réalistepour bien représenter les forces d’interaction exercées sur lepont.

Conditions d’appuisEn général, les conditions d’appuis sont considérées commedes appuis simples si les appareils d’appuis ne sont pas tropdégradés; dans le cas contraire, elles sont considérées commedes appuis élastiques, c’est-à-dire entre un appui simple et unencastrement parfait. Cela revient à introduire, au niveau del’appui, un élément de ressort à rigidité ks déterminée expéri-mentalement.

3. Application au pont de Senneterre (voirfig. 4)

3.1. Mise en situation et description du pontLe pont testé est une structure en béton armé de longueur Lt =78,457 m, constitué de trois travées simples indépendantes(22,593, 22,289 et 22,593 m). Chacune de ces travées comptecinq poutres en section transversale (fig. 5). C’est la travéecentrale qui a été retenue pour les tests, vu la présence defissures inclinées en plusieurs sections. Les essais dynamiquesavaient pour objectifs d’identifier les premiers modes de vibra-tion de la travée de même que les vecteurs propres correspon-dant en mesurant les accélérations en différentes positions dutablier (fig. 6). Pour les essais dynamiques, seuls les chemine-ments CA et CB (ce dernier correspond approximativement àune des voies de circulation) ont été empruntés par les véhicu-les, et ce à différentes vitesses. Il est à noter que la chaussée dupont est en assez bon état, ce qui nous permet de modéliserassez bien le profil de la route.

3.1.1. Accéléromètres et mesures d’accélérationLa figure 6 présente la position, sur le tablier du pont, des huitaccéléromètres utilisés pour les essais dynamiques. Ceux-cisont fixés avec des aimants sur des plaques d’acier munies detrois vis, permettant de les placer au niveau. Ces accéléromè-tres sont reliés directement à un système de microordinateurcontrôleur de données d’acquisition. Les accélérations sontmesurées ici à l’aide d’accéléromètres à basse fréquences detype SA-102 (Terra Technology, Redmond, Washington).Chaque accéléromètre a une fréquence de résonnance de50 Hz de même qu’une réponse en fréquence relative cons-tante entre 0 et 25 Hz.

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Fig. 1. Présentation d’un pont à piles et sa modélisation par éléments finis de type coques et poutres. (a) Pont mixte métallique.(b) Pont en béton.

Fig. 2. Action composite modélisée avec des éléments d’interfacede type coque.

Fig. 3. Action composite modélisée avec des éléments d’interfacede type poutre.

Fig. 4. Position géographique de Senneterre dans la région duQuébec.

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3.1.2. Système d’acquisition de donnéesLes donnée sont recueillies à l’aide d’un appareil Bakker Elec-tronics 2570, Waveform Analyser. Celui-ci possède 20 canauxdont le taux d’échantillonnage maximum est de 50 000 enre-gistrements par seconde. Le multiplexage n’est pas nécessairepuisque chaque canal possède son propre convertisseur analo-gique-numérique de 12 octets. L’appareil est entièrement pro-grammable par ordinateur grâce à une interface GPIB et auprotocole IEEE488. De plus, avant que les données ne soientnumérisées, des filtres anti-repliement de fréquence (anti-aliasingfilter) de marque IO-Tech ont été utilisés. Ces filtres sont pro-grammables et permettent un gain variable de 1, 10, 100 et1000, de même qu’une option de couplage courant alternatif –courant continu.

3.1.3. Évaluation des fréquences et modes propresLes fréquences de vibration de la structure peuvent être iden-tifiées en déterminant les fréquences pour lesquelles l’énergiedu signal obtenu de chaque accéléromètre atteint un maxi-mum. La représentation dans le domaine des fréquences d’unsignal est obtenue en calculant la transformée de Fourier (FFT)de celui-ci. Le module de cette fonction, constituée de nombrescomplexes, est appelé le spectre du signal et représente la dis-tribution de l’énergie du signal en fonction de la fréquence.Ainsi, on peut déterminer les fréquences qui correspondent àcertaines valeurs maximales d’énergie ou pics de la FFT. Cesfréquences approchent quelques-unes des fréquences de vibra-tion de la structure. Pour s’assurer de l’authenticité des fré-

quences identifiées, une approche basée sur les fonctions ré-ponse en fréquence a été exploitée.

Les deux estimateurs suivants permettent d’évaluer la fonc-tion réponse en fréquence, aussi appelée fonction de transfert :

[2] H1 =Gxy

Gxx; H2 =

Gyy

Gyx

où Gxx, Gyy, Gxy et Gyx sont, respectivement, l’autospectre dusignal d’entrée, l’autospectre de sortie, le spectre croisé dessignaux d’entrée et de sortie et le spectre croisé des signaux desortie et d’entrée. La fonction de cohérence permet de vérifierl’égalité des deux estimateurs H1 et H2. On a :

[3] γ(f) =H1

H2=

GxyGyx

GxxGyy

Pour une fréquence donnée, si le rapport des deux estimateursest égale à un, la relation entre les signaux d’entrée et de sortieest linéaire.

Dans le cas des essais du pont de Senneterre, l’intensité descharges appliquées sous chacune des roues du véhicule ne pou-vant être mesurée pendant le parcours du véhicule sur le pont.L’analyse est effectuée en considérant la réponse de l’accélé-romètre de référence comme signal d’entrée. Ainsi, une valeurélevée de la fonction de cohérence (>0,8) pour une fréquencedonnée assure que celle-ci est une fréquence de vibration dupont. En effet, par définition d’un mode de vibration, les ac-célérations de deux points demeurent en tout temps dans unrapport constant, établissant ainsi une relation linéaire entre lessignaux des accélérations de deux points. Pour définir les mo-des de vibration correpondant à chacune des fréquences devibration identifiées, il suffit de diviser l’ordonnée du pic dela FFT à la fréquence considérée par l’ordonnée de la FFT dusignal de l’accéléromètre de référence évaluée à la même fré-quence. On procède ainsi successivement pour chaque accélé-romètre pour un essai donné. La phase du spectre croisé permetde spécifier si le mouvement du point considéré est en phase(0 ± 20°) ou déphasé (180 ± 20°) par rapport au mouvementdu point de référence.

3.2. Description du véhicule d’essaiLes différents types de véhicules utilisés sont des camions àbenne basculante (10 roues) chargés et pesés (fig. 7). Les au-tres caractéristiques estimées du modèle dynamique discretsont données au tableau 1. Les fréquences de vibration du vé-hicule d’essai obtenues numériquement sont indiquées au ta-bleau 2.

3.3. Description du modèle du pont par éléments finisLe tableau 3 donne les principales caractéristiques physiquesdu pont de Senneterre. Pour le calcul des fréquences et modespropres du pont, nous avons utilisé deux modèles tridimen-sionnels par éléments finis.

Le premier modèle numérique (coque–poutre) est constituéd’un maillage mixte de coques et de poutres. Le tablier est icimodélisé par des éléments de coques DWG4 (Talbot et al.1992). Il constitué de la superposition de l’élément de plaqueavec cisaillement transversal Q4γ (Batoz et Dhatt 1992) etl’élément de membrane enrichie Q4WT (Taylor et al. 1976).Les poutres principales sont modélisées par des éléments de

Fig. 5. Vue en plan et section transversale de la travée centrale.Toutes les unités sont en millimètres.

Henchi et al. 177

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poutres excentrées (fig. 8). Ce modèle comporte au total441 noeuds, 2646 dl et 532 éléments.

Le second modèle (coque–coque) est constitué seulementd’éléments de coques (DWG4) pour modéliser la dalle et lespoutres (fig. 8). Ce modèle comporte au total 861 noeuds,5166 dl et 832 éléments. Dans les deux modèles, la travée enquestion est considérée sur appuis simples vu que les appareilsd’appuis sont en bon état (Savard et Halchini 1993)

3.4. Calcul des modes et des fréquences propresNous avons calculé les fréquences et les modes propres du pontpour les deux modèles éléments finis. Le tableau 4 présente lesrésultats numériques et expérimentaux.

À première vue, on peut estimer que le nombre de modesdominants est de l’ordre d’une dizaine, vu que la fréquencef8 = 23,4 Hz est supérieure à la fréquence maximale du véhi-

cule (fv7 = 22,23 Hz). Ainsi le spectre des fréquences du char-gement est inclus dans celui du pont. Par contre, on remarqueque les modes 2, 4 et 7 n’ont pas été identifiés lors des testsexpérimentaux. Cela est dû soit au nombre insuffisant d’accé-léromètres (mode 4), soit aux positions de ceux-ci sur le tablieret les poutres ou soit à la trop faible excitation des modes parles véhicules (modes 2 et 7). Dans ce cas, on remarque que lessix premières fréquences sont inférieures à 20 Hz, ce qui rendla structure sensible aux effets du trafic routier et aux amplifica-tions d’efforts que les phénomènes d’interaction pont–véhiculespeuvent générer.

On remarque que le mode 4 est un voilement des poutreslongitudinales (fig. 9). Ce mode n’a pas été identifié mêmeavec le premier modèle éléments finis car, dans ce dernier, latorsion spatiale des poutres dans le sens indiqué par la figure 9n’est pas représentable avec ce type d’élément. Ce mode est

Fig. 6. Vue en plan. Localisation des cheminements des véhicules et des positions des accéléromètres. Toutes les unités sont en millimètres.

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Fig. 7. Caractéristiques du véhicule d’essai utilisé pour les tests dynamiques.

Distance de l’essieu avant au centre de gravité, S1a1 0,742Distance du centre du tandem au centre de gravité, S1a2 0,258Distance de la roue avant au centre de gravité,S2a3 = a4S2

0,5

Amortissement dans les amortisseurs avant,c1 = c3 (N⋅s/m) 20 000Amortissement dans les amortisseurs arrière,c2 = c4 (N⋅s/m) 20 000Amortissement dans les pneus avant, cp1 = cp3 (N⋅s/m) 20 000Amortissement dans les pneus arrière, cp2 = cp4 (N⋅s/m) 20 000Hauteur du centre de gravité du véhicule, hv (m) 2,0Moment d’inertie de roulis, Iα (N⋅m⋅s2) 6702Moment d’inertie de tangage, Iθ (N⋅m⋅s2) 60 198Rigidité des amortisseurs avant, k1 = k3 (N/m) 4,0×108

Rigidité des amortisseurs arrière, k2 = k4 (N/m) 0,8×107

Rigidité des pneus avant, kp1 = kp3 (N/m) 2,25×106

Rigidité des pneus arrière, kp2 = kp4 (N/m) 0,8×107

Masse équivalente pour les roues avant, m1 = m3 (kg) 445Masse équivalente pour les roues arrière, m2 = m4 (kg) 890Masse du chargement du véhicule, Mv (t) 27,29

Tableau 1.Données estimées des caractéristiques statiques etdynamiques du véhicule isolé (Fafard et al. 1993).

fi Valeur (Hz)

f1 3,130f2 3,334f3 6,025f4 9,260f5 19,400f6 21,580f7 22,233

Tableau 2.Fréquences devibration du véhicule d’essai.

E (N/m2) 2,4×1010

g (m/s2) 9,81G (N/m2) 1,0×1010

MT (kg) 383 688PTb (kN) 3763,98Ar (m3/cycle) 6,0×10–6

ν 0,2VTb (m3) 159,87ρ (kg/m3) 2400

Tableau 3.Données du pont.

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en fait, pour la structure, un mode local. Notons que, d’aprèsla relation obtenue par corrélation (Tilly 1986), f1 = 82L–0,9 =5,01 Hz, alors que les fréquences obtenues par élément finis etexpérimentalement sont respectivement de 5,03 et 4,8 Hz. Cesvaleurs ne sont donc pas très éloignées.

3.5. Présentation des résultats expérimentauxPour le pont de Senneterre, huit accéléromètres ont été utilisésafin de mesurer, en autant de points, l’accélération suivantl’axe vertical (fig. 6). L’accéléromètre A4 a été choisi commeréférence. La résolution des spectres, soit l’intervalle comprisentre chaque point formant un spectre, est inversement propor-tionnelle à la durée totale de l’enregistrement. Pour ce pont, ladurée utile de l’enregistrement est d’environ 8 s. La fréquenced’échantillonnage est de 400 lectures par seconde. La fré-quence de coupure (filtre de type Bessel) a été fixée à 30 Hz.En complétant les enregistrements avec des valeurs nulles jus-qu’à 4096 (212) valeurs, pour une durée de 10,24 s. L’erreurmoyenne en fréquences entre plusieurs tests est de l’ordre de0,1 Hz et la résolution du capteur (accéléromètres) est de l’or-dre de 0,0001g. Notons ici que les mesures ont commencé à1,5 s avant que le véhicule n’entre en contact avec le pont. Lesaccélérations expérimentales ont été corrigées pour les bruitsde fond (baseline corrections) (Paultre et al. 1995) afin d’éli-miner la dérive des déplacements. Les résultats expérimentauxd’accélération présentés à la figure 9 sont utilisés pour obtenirles déplacements en appliquant une méthode d’intégration nu-mérique telle que la méthode des trapèzes (Hjelmstad et al.1995). Pour ce pont, nous n’avons pas pu utiliser de déflecto-mètres pour la mesure directe des déplacements car les condi-tions géométriques et la position des poutres longitudinales parrapport à la rivière posent beaucoup de difficultés pour l’em-placement des déflectomètres. D’après la figure 10, on remar-

que que les travées sont bien indépendantes car les mesuresrelevées sur la travée centrale sont presque nulles (négligea-bles) avant que le véhicule n’entre en contact avec la travéecentrale.

3.6. Amortissement du pontDans cette étude, on considère que l’amortissement du pont estun amortissement visqueux de type Rayleigh. La détermina-tion des coefficients a et b est conditionnée par la connaissancede deux coefficients d’amortissement ξi correspondant à deuxfréquences ωi et ωj. La détermination de ces coefficients peutici se faire à partir des résultats expérimentaux à l’aide dudécrément logarithmique qui est donné par

[4] δ = 1n

ln

u1

un+1

= 2πξωωa

= 2πξ

On calcule δ d’après les mesures expérimentales des accéléra-tions et, ensuite, ξ peut être obtenu par

[5] ξ = δ ⁄ 2π

D’après les tests, on obtient les résultats des amortissements enpourcentage, tels que présentés au tableau 5. La valeurmoyenne finale du coefficient d’amortissement est ξ = 2,69%.À titre de comparaison, les valeurs recommandées d’amortis-sement, pour l’étude analytique de structures d’ouvrages d’art,sont données au tableau 6.

Généralement dans le cas d’ouvrages d’art, l’amortisse-ment augmente à cause de l’absorption d’énergie due à l’adhé-rence aux niveaux des connecteurs (ponts métalliques) et dessupports. Cependant, dans le cas des ponts en bon état, cetteabsorption d’énergie est souvent minimale à cause de la con-ception soignée au niveau des supports et parfois l’absence desconnecteurs, à l’exception des ponts rails mixtes.

On considère deux valeurs de ξ pour calculer a et b. Prati-quement, on prend ξi = ξj, tel que i = 1 et j est le dernier modede la base modale calculée (Clough et Penzien 1993). Cettedémarche est choisie de manière à ce que les effets des modessupérieurs soient réellement négligeables. On obtient ainsia = 1,34 et b = 0,0003.

3.7. Comparaison des résultats numériques etexpérimentaux en déplacements

Étant donné les résultats très similaires obtenus en fréquencespour les deux modèles d’éléments finis, nous n’avons retenuque le modèle 1 pour les analyses dynamiques, vu son nombrede degrés de liberté moins important relativement au modèle2. Les paramètres de simulation sont présentés au tableau 3.On a utilisé un coefficient d’amortissement ξ de 2,69%, obtenuà partir des résultats expérimentaux en accélération. La matriced’amortissement [C] est de type Rayleigh avec les coefficientsa = 1,34 et b = 0,0003. Les propriétés mécaniques du véhiculed’essai ont été ajustées (Winkler et al. 1980; Fafard et al. 1993)et sont présentées au tableau 1. La chaussée était en assez bonétat (faible rugosité); on suppose que Ar = 6×10–6 m3/cycle(Henchi et al. 1998). Les cheminements empruntés par les vé-hicules d’essai sont CA et CB (fig. 6), et ce avec un seul véhi-cule d’essai pour chaque cheminement. La méthode derésolution utilisée est ici celle de l’algorithme découplé (pro-cessus itératif) avec une analyse modale avec correction com-portant 10 modes. Le schéma d’intégration utilisé est celui de

Fig. 8. Modélisation par éléments finis du pont de Senneterre.

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No du mode Modèle 1 Q4γ+poutre Modèle 2 Q4γ+Q4WT Données expérimentales Nature du mode

1 4,03 4,56 4,8 Flexion longitudinale2 5,83 5,83 — Torsion3 8,06 7,497 7,6 Flexion transversale4 — 9,043 — Voilement des poutres5 12,88 13,18 11,9 Flexion transversale6 18,68 15,03 16,7 Flexion longitudinale7 19,42 18,14 — Torsion8 20,54 20,28 23,4 Torsion

Tableau 4.Comparaison des fréquences (Hz) de vibration des modèles numériques et expérimentaux.

Fig. 9. Modes propres de vibration obtenus par les deux modèles.

Henchi et al. 181

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Newmark β pour les deux systèmes, véhicule et pont. La con-vergence est généralement obtenue en deux itérations ou aumaximum en trois.

Les figures 11 et 12 représentent respectivement des résul-tats en déplacements verticaux aux points A3 et A4. Les figuresmontrent les résultats obtenus pour le modèle par élémentsfinis versus les valeurs expérimentales (par intégration des ac-célérations expérimentales) dans le cas du cheminement CA.Les résultats sont ici généralement bons. Les différences ob-servées peuvent être causées par certains facteurs, dont :(i) les erreurs de la méthode d’intégration des accélérations

expérimentales (valeurs discrètes pour obtenir les dépla-cements);

(ii) les imperfections au niveau des conditions aux limites dela structure et au niveau de la chaussée;

(iii) le profil de chaussée utilisé pas exactement celui du pontde Senneterre;

(iv) la loi de comportement linéaire prise pour les amortisseursdu véhicule d’essai, ainsi que les caractéristiques dynami-ques exactes des ressorts de suspension;

(v) le modèle éléments finis ne représentant pas exactementtous les phénomènes existants sur le pont, tels que la partiefissurée de la poutre no 2 ainsi que les autres défauts dubéton.

Les mêmes remarques s’appliquent pour tous les points demesures et de calcul pour Ai, i = 1,8 (Henchi 1995).

Les figures 13 et 14 représentent respectivement des résul-tats numériques obtenus pour les cheminements CA et CB.Elles montrent les flèches statiques en certains points (A2, A3,A4′ et A8). Les résultats obtenus sont acceptables et respectent

Fig. 10.Accélérations mesurées expérimentalement pour les cheminements CA et CB. v = 50 km/h.

Position des accéléromètres (voir fig. 6)

A2 A3 A4′ A8 ξ_

(%)

Cheminement A 3,0 2,1 2,5 3,1 2,675Cheminement B 2,5 2,8 3,1 2,4 2,700

Tableau 5.Amortissement du pont obtenu à partir des résultatsexpérimentaux.

Type de structures ξ (%)

MatériauMétal 0,03–0,15Béton 0,15–1,0Cordage métallique 0,40–2,0

Ponts métalliques 0,20–1,0Ponts à constructions composites 0,30–1,6Ponts en béton armé ou béton précontraint 0,30–1,6

Tableau 6.Valeurs recommandées del’amortissement dans les ponts (Smith 1988).

Can. J. Civ. Eng. Vol. 25, 1998182

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le comportement du pont sous les sollicitations prescrites.Nous avons représenté aussi, sur les deux figures, la différenceentre le comportement statique et le comportement dynamiqueau point A3 pour le cheminement CA (fig. 13) et au pointA4′ pour le cheminement CB (fig. 14). Le maximum du dépla-cement est obtenu au voisinage de x/L = 0,7. La position ducamion est alors au centre du pont. Notons que x représente laposition de l’essieu avant par rapport à l’origine du pont.

4. Calcul du FAD en fonction de la vitesse

Nous présentons maintenant les flèches dynamique et statiquemaximales obtenues par éléments finis dans certains positions(A3, A4 et A8) pour chaque cas de charge (CA et CB), et celaen fonction de la vitesse de passage v (tableaux 7 et 8).

Les figures 15 et 16 portent sur les comportements dyna-mique et statique de la section au centre de la travée (la coupe

Fig. 11.Déplacement dynamique vertical au point A3. Courbes expérimentale et numérique. v = 50 km/h. Cheminement A.

Fig. 12.Déplacement dynamique vertical au point A4. Courbes expérimentale et numérique. v = 50 km/h. Cheminement A.

Henchi et al. 183

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de la travée suivant A3–A4′–A7) selon la position transversaledu véhicule sur le tablier. Les figures 15 et 16 représententrespectivement les flèches maximales pour les cheminementsCA et CB. Le cheminement CA provoque des effets dynami-ques et statiques maximaux plus importants que le chemine-ment CB. Le cheminement CA, pour une vitesse du véhiculede 27,7 m/s, donne un déplacement de –4,626 mm, alors quecelui-ci n’est que de –2,24 mm pour le cheminement CB. Enconclusion, le mode de chargement transversal joue ici un rôletrès important sur l’amplification dynamique de la réponse.

Enfin, la figure 17 montre la variation du facteur d’ampli-fication dynamique (FAD) en fonction de la vitesse du par-cours et du cheminement. On y remarque que le FAD dépend

d’une façon importante de la position transversale du véhiculesur le tablier et que les poutres externes subissent ici des dé-formations plus importantes que les poutres internes. Le FADcroît avec l’augmentation de la vitesse, et cela jusqu’à unevitesse critique (dans ce cas-ci, elle est de l’ordre de100 km/h).

Pour cette structure et pour une position transversale ex-trême du véhicule (chemin CA), le FAD est plus important quecelui obtenu pour une position transversale centrale du véhi-cule sur le tablier (chemin CB).

À titre de comparaison, d’après les normes AASHTO del’American Association of State Highway and TransportationOfficials (1989), le FAD serait donné par (1 + 15,24)/(L + 38,1),

Fig. 13.Déplacements verticaux statiques et dynamiques obtenus par le modèle numérique. Cheminement CA.

Fig. 14.Déplacements verticaux statiques et dynamiques obtenus par le modèle numérique. Cheminement CB.

Can. J. Civ. Eng. Vol. 25, 1998184

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Fig. 15.Déplacements verticaux statiques et dynamiques maximaux en fonction de la position transversale sur la section du centre de la travée.Cheminement CA.

Déplacement dynamique

Positionv = 13,88

m/sv = 27,77

m/sv = 41,664

m/sDéplacement

statique ∆maxD /∆max

S

A3 –3,9480 –4,6270 –3,8347 –3,5290 1,31A4 –2,5400 –2,7200 –2,4261 –2,2539A8 –0,3310 –0,4435 –0,2900 –0,0726

Tableau 7.Déplacements verticaux maximaux (mm) suivant Z,obtenus pour le cheminement CA.

Déplacement dynamique

Positionv = 13,88

m/sv = 27,77

m/sv = 41,664

m/sDéplacement

statique ∆maxD /∆max

S

A3 –0,9698 –1,900 –0,9146 –0,7000A4′ –2,2117 –2,2400 –1,9835 –1,8050 1,24A8 –0,7700 –0,8755 –0,6883 –0,5218

Tableau 8.Déplacements verticaux maximaux Z (mm) obtenuspour cheminement CB.

Fig. 16.Déplacements verticaux statiques et dynamiques maximaux en fonction de la position transversale sur la section du centre de la travée.Cheminement CB.

Henchi et al. 185

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d’où FAD = 1,25; la norme AASHTO (1994) donne un FADconstant de 1,33. La norme CAN/CSA-S6-88 de l’Associa-tion canadienne de normalisation (ACNOR 1988) donne unFAD de 1,37 pour la fréquence fondamentale, f1 = 4,8 Hz ob-tenue expérimentalement et, enfin, les normes OHBDC (On-tario Highway Bridge Design Code) du ministère desTransports de l’Ontario (1991) et CHBDC de l’ACNOR(1996) donnent un FAD de 1,3. Les résultats obtenus par notreétude sont de 1,31 pour le cheminement CA et de 1,24 pour lecheminement CB.

Conclusions

L’algorithme de l’interaction pont–véhicules utilisant la mé-thode découplée donne de bons résultats. Ceux-ci se compa-rent bien à ceux obtenus expérimentalement. L’utilisationde l’analyse modale pour les problèmes d’interactionpont–véhicules est ici acceptable à condition que le nombre demodes choisis soit suffisant. Il faut cependant que le contenuspectral des fréquences de vibration du pont soit supérieur àcelui des véhicules. L’exemple d’un cas réel de pont démontreque le modèle numérique peut simuler convenablement lecomportement dynamique des véhicules routiers. En effet,après que le modèle tridimensionnel par éléments finis ait étécalibré sur les modes de vibration expérimentaux, nous avonsprocédé à la comparaison des déplacements expérimentaux etnumériques. Puis, nous avons effectué une série de tests visantà calculer des FAD pour certaines sections et certains chemi-nements.

À la lumière des résultats obtenus, nous constatons que leFAD est un facteur qui peut varier plus ou moins selon lesvaleurs mesurées (déplacements, sections choisies et type decheminement). Pour un pont donné et selon le type de mesureutilisée pour la détermination du FAD (déplacement, déforma-tion, réaction, etc.), il existe plusieur FAD possibles (Akoussahet al. 1997).

De nombreux autres ponts ont aussi été étudiés expérimen-talement par le ministère des Transports du Québec. Ceux-cifont aussi actuellement l’objet d’une analyse détaillée tridi-mensionnelle par éléments finis. De plus, et de la même ma-nière, Paultre et al. 1995 ont aussi démontré

expérimentalement et sur plusieurs types de pont du Québecqu’il peut y avoir de fortes variations du FAD pour chaquepont analysé. Ce n’est donc vraisemblablement qu’à partird’un nombre suffisant de tests que nous pourrons dégager desconclusions beaucoup plus générales pour chaque type deponts étudiés. Cela est particulièrement vrai en ce qui concernele bon comportement dynamique (et notamment le FAD) deces ouvrages d’art.

Remerciements

Les auteurs remercient le ministère des Transports du Québec pour lesupport financier.

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Can. J. Civ. Eng. Vol. 25, 1998186

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Liste des symboles

a, b coefficients d’amortissement de Rayleighai distance non dimensionnelle de l’essieu i du

véhicule au centre de gravitéAr coefficient de rugosité spectrale (m3/cycle)ci amortissement dans les amortisseurs (N⋅s/m)cpi amortissement dans les pneus (N⋅s/m)[Cb] matrice d’amortissement du système global (pont)e excentricitéE module de Young (N/m2)fi fréquence du mode ifvi fréquence du véhicule du mode iFbv

int

vecteur des forces d’interaction pont–véhiculeg accélération due à la gravitéG module de cisaillement (N/m2)

Gxx autospectre du signal d’entréeGxy spectre croisé des signaux d’entrée et de sortieGyx spectre croisé des signaux de sortie et d’entréeGyy autospectre du signal de sortiehv hauteur du centre de gravité (m)i mode iIα moment d’inertie de roulis (N⋅m⋅s2)Iθ moment d’inertie de tangage (N⋅m⋅s2)j dernier mode de la base modale calculéeki rigidité des amortisseurs (N/m)kpi rigidité des pneus (N/m)ks rigidité du ressort (N/m)[Kb] matrice de rigidité du système global (pont)L longueur du pont (m)Lc longueur de calcul, approximativement 2L (m)Lt longueur totale du pont (m)mi masse équivalente pour la roue i (kg)mv masse du véhicule[Mb] matrice de masse du système global (pont)MT masse totale du véhicule (t)Mv masse du chargement du véhicule (t)n numéro de cyclePTb poids total du pont (kN)r(x) profil de la route (m)si position curviligne de la roue iS1 espacement entre les essieux 1 et 2S2 espacement entre les essieux 1 et 3un+1 déplacement du cycle n + 1{U} vecteur global des déplacements (pont){U

} vecteur global des vitesses (pont){U

��

} vecteur global des accélérations (pont)Un vecteur des déplacements du noeud nv vitesse de passage du véhicule (m/s)VTb volume du pont (m3)w flèchex position de l’essieu i avant par rapport à l’origine

du pontX position spatiale d’un pointzG déplacement du centre de gravité du véhicule{Z} vecteur des déplacements des degrés de liberté du

véhicule∆max

D déplacement dynamique maximal∆max

S déplacement statique maximalγ fonction de cohérenceθ nombre aléatoire compris entre 0 et 2p

θx rotation autour de l’axe Xθy rotation autour de l’axe Yθz rotation autour de l’axe Zy coefficient de poissonξi, ξj coefficients d’amortissement correspondant

respectivement aux modes i et jρ masse volumique (kg/m3)

ωa, ωi, ωj fréquences amortie, non amortie du mode i et nonamortie du mode j

Henchi et al. 187

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