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Analyses et points de vue - Mutualité Chrétienne · système de soins, pouvoir offrir des soins abordables, accessibles et de qualité en veillant particulièrement à la situation

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A l’occasion des 50 ans de l’assu-rance maladie-invalidité obliga-toire, la MC a voulu faire le point. Depuis sa création en 1963, l’assu-rance maladie-invalidité (AMI) a beaucoup évolué: elle s’est pro-gressivement étendue à toutes les tranches de la population, a dû faire face à différentes crises qui ont remis son fonctionnement en cause mais elle n'a jamais perdu de vue son objectif : offrir des soins de santé accessibles et de qualité au plus grand nombre d'assurés possible.

Financement des prestations de soins en Belgique

Evolution du nombre de lits pour 100 000 habitants 2000-2011 (OCDE)

Ambulatoire

COÛT DE LA PROCÉDURE FORFAIT/ALL IN BUDGET

Personnel Frais d'hébergement

Honoraires médicaux Infrastructure Frais infirmiers

Matériel médicalMédicaments

Matériel à usage unique

Nomenclature BMF

Hospitalisation

MC-InformationsAnalyses et points de vuePériodique trimestriel de l’Alliance nationale des Mutualités chrétiennes 254

décembre 2013

La solidarité, c’est bon pour la santé.

MUTUALITECHRETIENNE

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Éditorial

Dans le cadre de notre série d'articles consacrés aux 50 ans de l'AMI, nous nous penchons dans ce numéro sur le passé, le présent et l'avenir de l'assurance soins de santé obligatoire, et plus spécifiquement sur la nomenclature des prestations médicales, l'un de ses fondements. En raison de l'augmentation croissante des coûts induite par le vieillissement de la population, la recrudescence des maladies chroniques (un Belge sur quatre aujourd'hui  !), l’innovation technologique et l'utilisation de techniques et de médications plus onéreuses, le développement de la médecine prédictive et la multiplication de campagnes de prévention coûteuses, les coûts du personnel croissants ou les (trop ?) grandes attentes du public, il existe plus que jamais une nécessité de se doter d'une assurance obligatoire financièrement avantageuse et solidaire.

Cette augmentation des dépenses peut être partiellement compensée par une meilleure rationalisation. Nous avons en effet aujourd'hui encore trop d'hôpitaux et une concentration des soins insuffisante, un trop grand nombre de lits, une consommation trop élevée de médicaments et de certains examens techniques (coûteux), des différences de revenu trop importantes entre les médecins, un financement des prestations trop élevé et des soins pas toujours effectués au niveau le plus approprié. De nouvelles réformes, aussi bien au niveau de la nomenclature, des prescriptions de médicaments, du financement des hôpitaux, de l'organisation de la première ligne et des soins des seniors seront notamment nécessaires afin de pouvoir garantir l'accessibilité et la qualité de notre assurance soins de santé.

La fiche-info aborde la réforme de l’intervention majorée à partir du 1.1.2014 afin d'améliorer l'accessibilité des soins aux groupes les plus vulnérables. Comme il y a 50 ans, nous devrons rester attentifs afin de ne pas voir apparaitre une médecine à deux vitesses. Même si un rapport de l'OCDE estime la contribution personnelle du patient en Belgique à environ 25 %, ce qui constituerait une menace à l'accessibilité, nous ne disposons pas de chiffres précis dans ce domaine. La MC a donc réalisé

une étude afin de connaître l’importance des suppléments que paie un patient auprès d'un médecin spécialiste conventionné et non conventionné. Il ressort d'une autre étude que nous avons menée préalablement que le patient en Belgique est certes satisfait de la qualité des soins de santé qui lui sont offerts, mais qu'il n'a pas connaissance de ce qu'il doit payer à un spécialiste ou à un dentiste et qu'il trouve parfois ces montants trop élevés. 10 % des personnes interrogées disent s'être déjà privées de soins de santé pour raisons financières. L'étude que nous vous présentons aujourd'hui nous apprend que la plupart des médecins respectent les tarifs conventionnés et que même une petite moitié des spécialistes non conventionnés s'y tient également pour la facturation de leurs consultations. Hélas, il y a également des spécialistes conventionnés qui demandent en moyenne 9  EUR de supplément. Tous les patients ont un intérêt à ce que le plus grand nombre possible de médecins (et de préférence tous) soient conventionnés et à ce qu'ils respectent les tarifs convenus. Pour les non-conventionnés, les suppléments s'élèvent en moyenne à 13,5 EUR, mais avec de grandes disparités entre les spécialistes. Afin d'enfin connaître avec exactitude ce que doivent personnellement débourser le patient et les mutualités en Belgique pour chaque consultation, et pouvoir prendre ainsi les mesures éventuelles qui s'imposent, il existe un besoin manifeste d'une plus grande transparence.

Les auteurs de l'étude concluent qu'en 50 ans, l'AMI et le modèle de concertation ont apporté bien des éléments positifs. Nous entendons poursuivre dans cette voie en continuant la négociation d'accords afin d'améliorer ce qui doit l'être et garantir ainsi la continuité de soins de santé de qualité pour les patients. Pour y parvenir, il serait appréciable qu'au terme de la réforme de l'État, les mêmes parties prenantes dirigent de façon analogue la politique des soins de santé dans les entités fédérés et ce, dans l'intérêt des patients.

Michiel Callens

Directeur R&D

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50 ans AMI

Passé, présent et futur de l’assurance maladie-invalidité obligatoire

Naïma Regueras, Recherche et Développement

Résumé

A l’occasion des 50 ans de l’assurance maladie-invalidité obligatoire, la MC a voulu faire le point. Depuis sa création en 1963, l’assurance maladie-invalidité (AMI) a beaucoup évolué: elle s’est progressivement étendue à toutes les tranches de la population, a dû faire face à différentes crises qui ont remis son fonctionnement en cause mais elle n'a jamais perdu de vue son objectif : offrir des soins de santé accessibles et de qualité au plus grand nombre d'assurés possible.

Aujourd'hui encore, le contexte économique et politique de notre pays met notre système de Sécurité Sociale à mal. Si nous savons depuis longtemps déjà que nous devrons trouver des solutions pour assurer le financement à long terme de ce système, la 6ème réforme de l'Etat amène aussi avec elle son lot de défis.

Dans cet article nous retraçons l'histoire de l'assurance maladie-invalidité et exposons les défis auxquels elle fait face actuellement. Finalement, nous avons aussi voulu formuler des propositions quant à l'avenir de l'assurance obligatoire car les défis seront nombreux : assurer un financement à long terme de notre système de soins, pouvoir offrir des soins abordables, accessibles et de qualité en veillant particulièrement à la situation des plus vulnérables et adapter notre offre de soins aux besoins de personnes nécessitant de plus en plus des soins de longue durée.

En effet, c’est le 28 décembre 1944 que le Sécurité Sociale voit le jour et avec elle le Fonds National d’Assurance Maladie-Invalidité ancêtre de l’actuel Institut National de l’Assurance Maladie-Invalidité (INAMI). Historiquement, la Belgique, au même titre que la France et les Pays-Bas, a construit son système de protection sociale sur base du modèle bismarckien, d’influence allemande, qui diffère du modèle beveridgien d’influence britannique.

Quels sont les grands principes qui distinguent les deux systèmes  ? Dans les système d’influence bismarckienne, le financement se fait largement par des cotisations sociales (des employeurs et des travailleurs) proportionnelles au salaire. De même, les allocations octroyées (allocation de chômage, d’invalidité, etc.) sont proportionnelles à la rémunération perdue. On induit ainsi une solidarité forte entre actifs et inactifs, malades et bien-portants (tout un chacun participe au financement en fonction de ses moyens et reçoit une indemnisation en fonction de sa perte). Concernant la gestion de ce modèle, la logique adoptée est la suivante : puisque ce sont les employeurs et les travailleurs qui financent le système de

1. Introduction

L’assurance maladie-invalidité obligatoire fête cette année ces 50 ans d’existence. A l’instar des couples qui fêtent leur noces d’or, l’heure du bilan est arrivée. Nous avons aujourd’hui vécu assez longtemps avec elle pour pouvoir l’analyser avec recul et apprendre aussi tant de nos erreurs que de ce que nous avons accompli avec succès. Cependant, l’objet de cet article n’est pas seulement de retracer l’histoire de l’assurance obligatoire mais également de nous tourner vers l’avenir car, dans un contexte qui est loin d’être rose, il est fondamental de pouvoir offrir une perspective solide pour le futur de cette assurance.

2. Petit rappel historique

Bien que nous fêtions aujourd’hui les 50 ans de l’assurance maladie obligatoire dans notre pays, l’histoire de sa création ne commence pas au 9 août 1963. Si en Belgique, les débuts du mouvement mutualiste et l’apparition des premières caisses de secours mutuels datent de la fin du 19ème siècle, c’est à la fin de la deuxième guerre mondiale que sera officiellement créée la Sécurité Sociale belge.

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protection sociale, ce sont eux-mêmes qui devront en assurer la gestion. En Belgique, la Sécurité Sociale est donc co-gérée par les employeurs (représenté par les syndicats d’employeurs) et les salariés eux-mêmes (représentés par les syndicats des travailleurs) dans un système de gestion paritaire. De la même façon, les différentes branches de la Sécurité Sociale sont co-gérées par tous les acteurs impliqués.

Au contraire, les systèmes d’influence beveridgienne sont quant à eux universels et se donnent pour mission d’assurer une même protection minimale à tous les citoyens (tous le monde reçoit la même chose). Ils prévoient des allocations forfaitaires identiques pour tous. Le financement se fait par l’impôt, et le système est principalement et directement géré par l’Etat (puisque c’est l’Etat qui finance, c’est l’Etat qui gère).

La Belgique s’étant construite autour de ce modèle de gestion paritaire d’inspiration bismarckienne, c’est tout naturellement que la gestion de l’Assurance Maladie-Invalidité fut confié aux organismes assureurs ainsi qu’aux syndicats (travailleurs et employeurs) et aux représentant des prestataires de soins plutôt qu’à l’Etat. Dans ce contexte, de nombreux acteurs considéraient qu’il convenait de confier l’organisation et la gestion de cette nouvelle assurance aux mutualités qui avaient le mérite de disposer d’un réseau bien distribué sur l’ensemble du pays et d’une expérience non-négligeable dans le domaine. Dans ce modèle, les besoins sociaux ne sont donc pas fixés ‘aveuglément’ par le marché (libéralisme) ou par un appareil d’état extensif (socialisme), mais il s’exprime sous forme de dialogue au sein de la concertation sociale.

L’avantage d’un tel système est également qu’il permet d’assurer une certaine continuité dans le temps. En effet, dans les pays où le système de santé est intégralement géré par l’Etat, l’orientation de la politique de santé peut basculer rapidement au gré des changements dans la composition de l’appareil dirigeant (gouvernement plus à droite ou à gauche) sans que les acteurs de terrain aient leur mot à dire. Au contraire, notre système a permis de maintenir une grande stabilité en impliquant les partenaires de terrain durant les 65 ans d’existence de l’assurance maladie. Bien que les temps aient changé et que la médecine ait évolué, les défis restent les mêmes  : comment pouvons-nous, en relation étroite avec la population et ses besoins, garantir l’accès pour tous à des soins de santé de qualité ?

Mais pourquoi fêtons-nous alors les 50 ans de l’assurance maladie-invalidité ?

A sa création en 1944, l’AMI couvrait les risques de maladie et d’invalidité des travailleurs salariés et de leur famille uniquement. C’est la loi du 9 août 1963 (loi Leburton) qui va scinder l’AMI en deux secteurs distincts  : les soins de santé et les indemnités, le tout chapeauté par un organisme parastatal : l’Institut National de l’Assurance Maladie-Invalidité et permettre d’élargir l’assurance soins de santé à toute la population instaurant ainsi un système d’assurance maladie

obligatoire. Concernant le secteurs des indemnités, la priorité était de garantir un revenu de remplacement aux travailleurs salariés mis en incapacité pour cause de maladie ou d’accident. C’est aussi dans le cadre de cette loi que sera instauré le statut VIPO (veufs, invalides, pensionnés, orphelins) garantissant une protection contre les risque de santé à ces tranches plus vulnérables de la population.

La loi de 1963 introduisit également le système de négociations d’accords entre les mutualités et les prestataires de soins (accords médico-mutualistes). Tous les deux ans, les représentants des mutualités (garantes de l’équilibre financier de l’assurance maladie) et des prestataires de soins se réunissent pour fixer le niveau des tarifs (ou honoraires) que les prestataires de soins sont invités à pratiquer pour les deux années qui suivent, le but étant de garantir la sécurité tarifaire du patient et de pouvoir garder le budget de l’assurance soins de santé sous contrôle. En effet, sans ces accords, les prestataires de soins seraient entièrement libres de fixer leurs tarifs, ces derniers pouvant donc fluctuer très fortement d’un prestataire à l’autre ou d’une année à l’autre. De plus, l’accord médico-mutualiste fixe également le niveau des avantages perçus par les prestataires si ceux-ci décident d’adhérer à l’accord. Les tarifs fixés par les dentistes sont fixés dans un autre accord mais suivant le même principe (accord dento-mutualiste).

3. Les grandes évolutions depuis 50 ans

3.1 Les années 60 et l’élargissement de la couverture de l’assurance maladie-invalidité

Chronologiquement, le champ d’application de l’assurance soins de santé fut d’abord élargi aux indépendants, uniquement pour les ‘gros risques’ en 1964 et pour les ‘petits risques’ en 2008 seulement  ! En effet, ce n’est qu’en janvier 2008 que l’assurance libre ‘petits risques’, couvrant les consultations médicales, les soins dentaires, les soins paramédicaux et les médicaments ambulatoires, a été intégrée au sein de l’assurance maladie obligatoire. A ce moment-là, 80 % d’entre eux étaient déjà couverts pour les petits risques grâce à une souscription à une assurance facultative auprès de leur mutualité. Cette intégration a permis à tous les indépendants et leurs personnes à charge d’être couvert de sorte qu’il n’y a plus de différence entre salariés et indépendants quant aux soins de santé remboursés par l’assurance maladie obligatoire. Les cotisations sociales que versent les indépendants à leur caisse d’assurance sociale ont été adaptées pour intégrer ces nouveaux droits.

Elle fut ensuite élargie successivement aux fonctionnaires (1965), aux handicapés physiques (1967), aux handicapés mentaux (1968), aux travailleurs domestiques (1969) et aux membres du clergé et communautés religieuses (1969). Par son extension aux «  personnes non encore protégées  » en 1969, l’assurance soins de santé couvrit enfin une très large partie

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de la population. L’assurance indemnités d’incapacité de travail obligatoire pour les indépendants verra elle le jour en 1971.

3.2 L’introduction de la quote-part personnelle en 1972

Dans les années 1970, l’impact des deux crises pétrolières et la montée du chômage ont fait entrer le pays dans une période d’austérité. Dans le secteur des soins de santé, il fallait maximiser l’accès aux soins de qualité sous contrainte de ressources budgétaires. C’est dans ce contexte qu’ont été introduits les premiers tickets modérateurs ou quotes-parts personnelles dans le coût des soins.

Le ticket modérateur est la différence entre le tarif ou l’honoraire prévu par les conventions et ce qui est remboursé par la mutualité pour les prestations chez le médecins, à l’hôpital, pour les médicaments, etc. Le ticket modérateur peut varier fortement d’une prestation à l’autre, entre les secteurs et selon qu’une personne bénéficie ou non d’une intervention majorée de l’assurance maladie. Il s’agit donc d’une intervention financière directement à charge des patients.

L’objectif du ticket modérateur consiste à responsabiliser le patient par rapport à sa consommation de soins et à éviter qu’il «  abuse du système  ». Bien que différents système de protection tels que l’intervention majorée et le maximum à facturer aient été mis en place pour garantir un meilleur accès aux soins de santé aux populations plus vulnérables, on observe malheureusement que l’existence de tickets modérateurs constitue un frein à l’accès aux soins pour toute une série de personnes. Selon la dernière enquête réalisée par la MC à l’occasion des 50 ans de l’assurance soins de santé, 11 % des Belges doivent reporter des soins pour des raisons financières. Cela concerne principalement les personnes en invalidité (31 %), au chômage (28 %) et des isolés avec enfants (23 %).

En conclusion, bien que l’intervention financière du patient permette de conscientiser celui-ci au coût des soins de santé, elle ne peut avoir pour conséquence que certains groupes de patients reportent des soins. Le système de santé doit donc encore être amélioré en tenant compte de cette problématique.

3.3 Renforcement de l’accessibilité financière en 1997

En Belgique, à partir de la fin des années 90, des mesures ont progressivement été introduites pour pallier au fait que l’assurance soins de santé ne couvre que partiellement les coûts en matière de santé (en moyenne 25 % des frais de soins de santé restent à charge du patient), ce qui constitue une réel problème pour les populations plus vulnérables, tant sur le plan financier que sur celui de la santé.

Ainsi, le statut VIPO permettant d’être mieux remboursé pour la plupart des soins médicaux (hospitalisation, honoraires

médicaux, médicaments...) a-t-il été élargi en 1997 à de nouvelles catégories de bénéficiaires. Rebaptisé BIM (bénéficiaire de l’intervention majorée), ce statut a été complété, en 2007, par Omnio, un statut permettant aux ménages à revenus modestes de bénéficier aussi des remboursements préférentiels. Dans la même optique, le tiers payant (qui permet au patient de ne pas devoir avancer les frais de santé à l’hôpital ou en pharmacie et de payer uniquement sa quote-part) a été étendu aux consultations et visites chez le médecin pour les patients à faibles revenus (c’est le tiers payant social).

Par ailleurs, pour les malades chroniques et les ménages qui accumulent des dépenses de soins de santé élevées, des dispositifs ont également été mis sur pied tels que le maximum à facturer et les interventions spécifiques pour les malades chroniques (forfait de soins, forfait d’incontinence...).

En outre, d’autres dispositifs prévoyant des avantages financiers pour le patient ont été mis en place tels que le dossier médical global et les maisons médicales au forfait. On peut encore citer les mesures prises dans le but de diminuer le prix des médicaments, implants et prothèses tout comme celles visant à limiter les suppléments facturés aux patients hospitalisés. Enfin, des mécanismes ont également été développés pour les personnes qui ne bénéficient pas de l’assurance soins de santé telle que l’aide médicale urgente.

Malgré toutes ces mesures, de nombreuses études mettent en évidence les difficultés rencontrées par certains ménages à assumer financièrement des soins de santé. L’accessibilité financière du système reste donc un défi important. Trois mesures en cours d’élaboration entrent dans ce cadre  : la simplification de la réglementation relative à l’intervention majorée (avec la création d’un statut unique pour début 2014), l’instauration d’un statut de malades chroniques ouvrant automatiquement au bénéfice de certains droits spécifiques et l’élargissement du droit au tiers payant social, facilitant son accès.

3.4 L’élargissement de l’AMI à tous les résidents en 1998

Dans tous les pays qui ont adopté le modèle bismarckien, la sécurité sociale s’est peu à peu généralisée par l’extension à des catégories de population initialement non protégées (étudiants, travailleurs indépendants, personnes handicapées, etc.). En Belgique, depuis le 1er janvier 1998, tous les résidents ont accès au système d’assurance soins de santé. Aujourd’hui, près de 99 % de la population est assurée. Les personnes non assurées sont essentiellement les sans-papiers, les diplomates ou encore les parlementaires européens.

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4. Etat des lieux de notre système de santé

4.1 Comment est gérée l’assurance obligatoire ?

L’assurance maladie-invalidité est gérée en Belgique par l’INAMI, placé sous la tutelle du SPF Sécurité Sociale. Tous les partenaires des soins de santé siègent au sein de ses différents organes : les pouvoirs publics, les mutualités, les prestataires de soins (médecins, dentistes, paramédicaux…) et les partenaires sociaux (syndicats, employeurs, organisations de classes moyennes). L’INAMI a pour mission de redistribuer le budget de l’assurance maladie-invalidité entre les organismes assureurs (soit les différentes unions nationales de mutualités, la caisse auxiliaire et la caisse de la SNCB). Aussi bien l’élaboration que le contrôle du budget ont lieu au sein des différents organes de l’INAMI. Le budget global est divisé par secteurs de soins (hôpitaux, médicaments, honoraires médicaux, maison de repos, personnel infirmier…) représentés au sein de leur commission de conventions respectives. En dehors de cette gestion globale des moyens, l’institut a également pour mission :

• degérerlanomenclaturedessoinsdesantéetdefixerlestarifs de remboursement ;

• deconcluredesaccordsentrelesmédecinsetlesmutualités(conventions) ;

• dereconnaîtrel’invalidité ;

• decontrôlerlefonctionnementdesmutualités ;

• degérerlesystèmederesponsabilitéfinancièredesmutua-lités.

Toutes ces missions sont exécutées au sein des différents organes de l’INAMI dans le cadre d’une gestion paritaire. En Belgique, les mutualités ne sont pas de simples organismes payeurs uniquement chargés de rembourser les soins de santé et de verser les allocations d’invalidité. Elle jouent un rôle actif dans la détermination de la politique de santé du pays tout comme tous les autres acteurs impliqués dans la gestion de l’AMI (syndicats de travailleurs et employeurs, représentant des prestataires et des institutions de soins…). Les syndicats de travailleurs et employeurs, les représentants des prestataires et des institutions de soins, les mutualités sont des organisations qui défendent les intérêts de leurs membres. Le modèle de gestion paritaire permet donc de dessiner la politique de santé en tenant compte des informations et des signaux émanant directement du terrain (des médecins, des patients, des institutions de soins, des fournisseurs de matériel de soins …).

4.1.1 Le Comité général de gestion

Le Comité général de gestion se compose paritairement (1/4 des voix chacun) de représentants des employeurs, des indépendants, des syndicats et des organismes assureurs. Cet organe a dans ses compétences l’approbation du budget de

l’assurance soins de santé et indemnités et des comptes des services de l’INAMI. Il octroi également les recettes organiques (celles reçues de l’ONSS) aux services des soins de santé et indemnités de l’INAMI.

4.1.2 Le Conseil général de l’assurance soins de santé

Il se compose paritairement de représentants des pouvoirs publics, des travailleurs, des employeurs, des organismes assureurs (1/4 des voix chacun). Les représentants des prestataires/hôpitaux y ont une voix consultatives. Il a pour mission d’élaborer la politique globale de soins de santé, de fixer l’objectif budgétaire global annuel et de s’assurer de la concordance entre les conventions signées avec les prestataires et le budget global.

4.1.3 Le Comité de l’assurance soins de santé

Le Comité de l’assurance se compose paritairement des représentants des prestataires de soins et des organismes assureurs (1/2 des voix chacun). Les représentants des employeurs et des travailleurs y ont une voix consultative. Les missions de ce Comité sont de fixer les objectifs budgétaires annuels partiels par secteur  (médicaments, maisons de repos, hôpitaux…), d’approuver les accords et les conventions signées entre les prestataires de soins et l’INAMI, prendre des décisions quant aux modifications de la nomenclature, de rédiger les règlements concernant les conditions en matière de droits aux prestations et de conclure des accords avec les établissement de rééducation fonctionnelle.

4.1.4 Les Commissions d’accords et de conventions

Ces commissions se composent comme le Comité de l’assurance (1/2 pour les OA et 1/2 pour les prestataires), les représentants des travailleurs et employeurs en moins. C’est au sein de ces commissions que se négocient les accords et les conventions entre les prestataires et l’INAMI. C’est dans ces accords que sont fixés les tarifs qui seront pratiqués par les prestataires adhérant à la convention et la valeur des remboursements qui seront accordés par les mutualités pour les prestations relevant de l’assurance obligatoire, la Commission la plus connue étant le fameuse Médico-mut où se négocient les accords tarifaires entre le médecins et les mutualités. On peut également citer la Dento-Mut (dentistes-mutualités) ou les Commissions de maisons de repos, des infirmières… A noter que ces commissions peuvent également proposer des adaptations de la nomenclature. Aussi bien les accords que ces adaptations de nomenclature devront ensuite être validés successivement par le Conseil et le Comité général de l’assurance soins de santé.

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4.1.5 La Commission de contrôle budgétaire

Parallèlement, la Commission de contrôle budgétaire est chargée de diverses missions de surveillance sur les organes précités (en particulier les Commissions d’accords et de conventions et le Comité de l’assurance soins de santé). Dans ce cadre, elle se doit de faire rapport, chaque trimestre, des recettes et dépenses en soins de santé, elle est impliquée dans l’élaboration des accords et conventions et exerce diverses tâches de contrôle dans le cadre de ses compétences.

Au-delà, les Commissions d’accords et de conventions et le Comité de l’assurance soins de santé sont également soutenus par divers Conseils et Comités techniques spécialisés (médical, dentaire, pharmaceutique, soins infirmiers…) et par un Conseil scientifique dans les missions sont de contrôler l’aspect scientifique et la qualité des soins. Ce Conseil scientifique est également chargé de remettre des avis au Ministre en fonction.

Figure 1 : Organes de décisions de l’assurance soins de santé

COMITÉ GÉNÉRAL DE GESTION DE L'INAMI

Composition Compétences

11/4 Organismes assureurs Approbation du budget et des comptes des

1/4 Pouvoirs publicsservices de l'INAMI

1/4 Rep. Employeurs Octroi des recettes organiques aux services

1/4 Rep. Travailleurs soins de santé et indemnités

CONSEIL GÉNÉRAL DE L'ASSURANCE SOINS DE SANTÉ

Composition Compétences

1/4 Organismes assureurs Elaborer politique globale soins de santé

1/4 Rep. Travailleurs Fixation budget global

1/4 Rep. Employeurs

1/4 Pouvoirs publics

Voix consultative : Prestataires

COMITÉ DE L'ASSURANCE SOINS DE SANTÉ

Composition Compétences

1/2 Organismes assureurs Fixation budgets partiels

1/2 Prestataires Approbation accords et conventions

Voix consultative : travailleurs et employeurs Modifications nomenclature

Conditions droit aux prestations

COMMISSION DE CONTRÔLE BUDGÉTAIRE

Composition Compétences

Rep. Employeurs Rapport trimestriel des recettes et dépenses

Rep. Travailleurs Contrôle budgétaire accords/conventions

Organismes assureurs /modifications nomenclature

Prestataires de soins

Pouvoirs publics

COMMISSIONS D'ACCORDS ET DE CONVENTIONS

Composition Compétences

1/2 Organismes assureurs Négocier les accords et conventions

1/2 Prestataires Proposer adaptations nomenclature

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4.2 L’INAMI seul à bord ?

L’INAMI n’est pas le seul acteur actif dans le domaine des soins de santé. En effet, d’autres organes interviennent dans les domaines relatifs à l’assurance obligatoire et à l’organisation des soins en Belgique.

Le SPF Santé Publique est notamment compétent pour l’organisation et la planification des professions de la santé. Ces missions tournent essentiellement autour de la programmation pour les institutions de soins (répartition de l’offre de soins sur le territoire) tels que les hôpitaux, les hôpitaux psychiatriques, les maisons de repos et de soins…. Le SPF est également compétent pour la fixation des normes d’agrément de ces mêmes établissements (critères de qualité).

D’autre part, les Communautés et Régions sont également compétentes dans une série de domaines relatifs à la santé. Les Régions sont essentiellement compétentes pour la mise en œuvre de la programmation, l’octroi d’agréments aux institutions de soins et le subventionnement d’établissements ou de structures de soins (hôpitaux, maisons de repos, services intégrés de soins à domicile) dont les règles sont dictées par le fédéral. Les Communautés sont, quant à elle, compétentes dans les domaines de l’éducation sanitaire (médecine scolaire) et la médecine préventive (vaccins, dépistages …).

4.3 Quelques caractéristiques de notre système de santé1

1

4.3.1 Les dépenses de santé

En 2011, la Belgique aura consacré 10,5 % de son PIB (plus de 38 milliards d’euros) à la santé, ce qui est légèrement supérieur à la moyenne européenne. Les dépenses de santé se répartissent entre dépenses publiques (essentiellement l’assurance maladie) et dépenses privées (tickets modérateurs, prestations et médicaments non remboursés et assurances privées) dans une proportion 75-25. Les patients belges supportent donc 25 % des dépenses totales de santé, ce qui est élevé par rapport aux pays voisins. Il ne s’agit pas ici d’un phénomène transitoire puisque cette répartition 75/25 s’observe depuis le début des années 2000 et constitue donc une caractéristique stable de notre système.

Les dépenses de santé se divisent ensuite en différents postes donc les plus importants sont : les soins curatifs (aigus) et de revalidation qui représentent 52,1% des dépenses totales, les soins de longue durée (20,6 % des dépenses totales) et les biens médicaux (essentiellement les dépenses pharmaceutiques) qui comptent pour 17,1 %. Les dépenses gestion du système de santé et de l’assurance maladie représentaient quant à elles 5,2 % des dépenses totales. Par rapport à ses voisins, la

1 Tous les chiffres repris dans cette section sont issus de la base de données Santé de l’OCDE

Figure 2 : Dépenses de soins de santé en % du PIB, répartition privé-public (source : OCDE 2011)

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Dépenses privées

Dépenses publiques

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Figure 3 : Evolution du nombre de lits pour 100 000 habitants 2000-2011 (OCDE)

2 Computed tomography

3 Imagerie par résonance magnétique

0,00

1,00

2,00

3,00

4,00

5,00

6,00

7,00

8,00

9,00

10,00

Belgique

France

Norvège

Danemark

Allemagne

Royaume-Uni

OCDE

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Belgique se situe en dessous de la France (6,7 %), au même niveau que l’Allemagne (5,3 %) et au dessus des Pays-Bas (3,9 %) en termes de dépenses de gestion du système de santé.

4.3.2 L’offre de soins

Il y avait en 2011, 2,91 médecins en exercice pour 1.000 habitants en Belgique ce qui est inférieur à la moyenne des pays de l’OCDE. En Europe, la plupart des pays compte une densité de médecins plus importante qu’en Belgique. Les médecins généralistes représentent 38,2 % de l’ensemble des médecins en exercice ce qui est supérieur au résultats affichés par l’Allemagne (18 %) et les Pays-Bas (24,6 %) mais inférieur à la France (48,9 %). Les médecins spécialistes représentent en Belgique le reste de l’effectif. Dans un avenir plus ou moins proche, l’âge moyen du personnel médical actuel constituera la principale menace concernant une éventuelle pénurie de médecins dans plusieurs pays de l’OCDE. En Belgique, 28 % des médecins étaient âgés entre 55 et 64 ans en 2011.

Concernant la personnel infirmier, la question de la pénurie de personnel déjà dans notre pays causée notamment par des nombreux départs en retraite (âge moyen du personnel infirmier élevé), le vieillissement de la population, l’augmentation de

l’offre de soins en dehors de l’hôpital (infirmières à domicile) et des conditions de travail parfois peu attractives.

La Belgique se caractérise également par une offre de lits hospitaliers importante. Bien que le nombre de lits ait diminué de manière constante entre 1997 et 2011, la densité pour 1.000 habitants reste élevée par rapport à d’autres pays européens avec 6,4 lits pour 1.000 habitants en 2011. Cependant, la diminution du nombre de lits s’est accompagné dans la plupart des pays, y compris en Belgique, par une diminution de la durée de séjour à l’hôpital.

Le nombre de CT2-scans et d’appareillages IRM3 a augmenté rapidement dans la plupart des pays européens ces vingt dernières années. Le nombre d’unités d’IRM par million d’habitants a plus que doublé en moyenne dans les pays de l’OCDE entre 2000 et 2009, atteignant 12,4 appareils en 2009, contre 6 en 2000. Le nombre de scanners CT est passé quant à lui de 19 par million d’habitants en 2000 à 22,6 en 2009. Tant pour les scanners IRM que CT, le nombre d’examens a également fort augmenté sur cette même période. Malgré l’impact positif que cela peut avoir sur le diagnostic et le traitement des patients, l’usage intensif de ces technologies médicales a également un impact important sur les dépenses de soins de santé.

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Figure 4 : Nombre d’examens par CT et IRM (OCDE, 2009)

0

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300

350

Nombre d'examens par scanners CT pour 1000 hab (2009)

Nombre d'examens IRM pour 1000 hab (2009)

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La Belgique se situe en tête de liste du nombre de scanners CT effectués par millier d’habitants. Le nombre d’examens par IRM y est aussi plus élevé que la moyenne des pays pour lesquels les données sont disponibles.

4.3.3 Les belges sont-ils satisfaits de leur système de santé ?

Différents indicateurs internationaux nous apprennent que, de manière globale, la Belgique dispose d’un système de soins de santé satisfaisant, plutôt performant et accessible aussi bien géographiquement que financièrement (Eurobaromètre de la Commission Européenne, Euro Health Consumer Index, OCDE…).

Afin d’approfondir et de nuancer ces résultats, la MC a mené une enquête en ligne sur la satisfaction des belges par rapport aux soins de santé à l’occasion des 50 ans de l’assurance maladie. Au cours de cette enquête, 21.900 personnes de plus de 18 ans ont exprimé leur avis concernant les soins de santé en Belgique constituant ainsi un échantillon représentatif de la population belge.

Si le Belge est très satisfait de son généraliste, dentiste et spécialiste, l’enquête a toutefois révélé quelques points négatifs. Ainsi, les répondants ne sont pas suffisamment informés quant à ce qu’ils doivent payer chez le dentiste et

chez certains spécialistes. Le prix d’une consultation ou d’une visite à domicile chez le généraliste par contre est bien connu. Pour certains, les honoraires à payer chez les dentistes et les psychiatres sont parfois trop élevés. En outre, les résultats de l’enquête révèlent aussi qu’il est parfois difficile d’obtenir rapidement un rendez-vous auprès de certains spécialistes.

Un Belge sur dix doit reporter des soins nécessaires en raison de problèmes financiers. Les personnes qui doivent vivre d’une indemnité suite à une maladie (de longue durée) ou au chômage ainsi que les familles monoparentales sont particulièrement vulnérables. En outre, il subsiste encore toujours des inégalités sociales concernant l’état de santé et la consommation de soins.

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4 Données 2000-2002 : Vade Mecum des données financières et statistiques de la protection sociale en Belgique, 1999-2005

Données 2004-2006 : Vade Mecum des données financières et statistiques de la protection sociale en Belgique, 2003-2010

Données 2007-2013 : Vade Mecum des données financières et statistiques de la protection sociale en Belgique, 2007-2013

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5. Quel avenir pour l’assurance obligatoire ?

5.1 Un contexte économique et politique difficile

5.1.1 Un financement sous tension

La Sécurité Sociale, et par extension l’assurance maladie-invalidité, est financée par 3 sources principales de recettes4 :

• les cotisations sociales des travailleurs et des employeurs pour 60 % (2011) ;

• le financement alternatif (partie de la TVA et des accises) pour 21,5 % (2011) ;

• des subventions directes de l’Etat pour 11,5 % (2011).

Les recettes de la Sécurité Sociale ont augmenté en moyenne de 5,1 % en moyenne entre 2000 et 2011 tandis que les dépenses de soins de santé ont augmenté de 6 % en moyenne par an sur la même période. Les besoins de financement de ce secteur ont donc augmenté plus rapidement que la croissance des recettes. Si la gestion globale des moyens permet en partie de répondre à ce genre de difficultés en transférant des moyens d’un secteur de la Sécurité Sociale à l’autre, cela pose tout de même certains problèmes de financement à long terme.

En effet, au fur et à mesure de son évolution, l’assurance maladie obligatoire, initialement destinée aux travailleurs, s’est étendue à de nouvelles catégorie de bénéficiaires (chômeurs, résidents…) couvrant ainsi la quasi-totalité de la population belge. Cependant, la source principale de financement est constituée par les cotisations sociales que seuls les travailleurs et leurs employeurs paient. Si des efforts ont été réalisés ces dernières années pour modifier les sources de financement (la part du financement alternatif est passée de 8 % en 2000 à 21,5 % en 2011 tandis que la part des cotisations sociales est passée de 71 % à 60 %), l’Etat doit encore trop souvent intervenir pour combler d’éventuels déficits. A noter également que cette diminution de la part des cotisations sociales est essentiellement le résultat d’une volonté politique de soutenir le marché de l’emploi en diminuant les cotisations patronales, plutôt que d’élargir les sources de financement de la Sécurité Sociale. De nouvelles sources de financement doivent donc être trouvées afin de protéger le financement du système des mouvements et crises sur le marché de l’emploi et du cycle économique. Nous en faisons d’ailleurs actuellement les frais. Le climat économique défavorable de ces dernières années a eu un impact direct sur le financement de la Sécurité Sociale et de nombreuses mesures d’économies ont dû être mises en œuvre dans le secteurs des soins de santé en 2013 et pour 2014.

5.1.2 Une 6ème réforme de l’Etat

L’accord institutionnel pour la sixième réforme de l’Etat prévoit le transfert d’un pan important de la sécurité sociale vers les entités fédérées. Pour le secteur de la santé, ce n’est pas moins de 16 % du budget de l’assurance maladie (soit plus de 4,2 milliards sur les 24 milliards d’euros du budget soins de santé en 2011) qui sera communautarisé notamment dans les domaines des soins aux personnes âgées, de la première ligne, de la santé mentale, des hôpitaux et de la prévention. En effet, des compétences qui relèvent aujourd’hui de l’INAMI et du SPF Santé Publique seront transférés aux entités fédérées qui devront les accueillir dans un nouveau modèle de gestion. S’il ne s’agit que de quelques pages dans l’accord institutionnel, les changements seront néanmoins considérables.

Lors des discussions concernant le nouveau modèle de gestion pour les compétences transférées, la MC a activement plaidé pour la sauvegarde des grands principes qui ont fait le succès de notre système de soins :

• les partenaires sociaux, acteurs de terrain, sont impliqués de manière active dans la gestion et la définition de la politique de santé ;

• l’organisation et la gestion du système est centralisée, et permet dès lors d’adapter rapidement l’offre de soins aux besoins ;

• les sources de financement (principalement les cotisations sociales) sont garanties et permettent une réelle solidarité entre tous les bénéficiaires du système de santé ;

• la gestion globale permet un arbitrage des politiques menées et des glissements entre branches de la sécurité sociale selon les besoins.

En septembre 2013, les quatre partis francophones ont fait une proposition commune quant au futur modèle de gestion des com-pétences transférées en Wallonie et à Bruxelles. Il en ressort que la plupart de ces grands principes seront préservés (gestion globale et paritaire avec implications des partenaires sociaux et des acteurs de terrain) et que le nouveau modèle devrait garantir une coordination forte en la Wallonie et Bruxelles.

Du côté néerlandophone, aucune proposition concrète n’a encore été formulée par les partis politiques. Cependant, un livre ‘vert’ a été élaboré par l’administration flamande, tenant compte de tous les avis qu’elle a reçus, décrivant les différents modèles possibles. Ceux-ci vont d’un modèle où la privatisation est envisagée (donc, où au moins une partie de la couverture serait confiée aux assureurs privés, tandis que l’autorité publique concentrerait son action sur une assurance de base, pour des soins difficilement assurables ou à l’égard de ceux qui

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5 Source : Statistiques de Santé, OCDE

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impératif de prévoir également une offre de qualité et un financement suffisant du secteur des maisons de repos.

5.2.2 La progression des maladies chroniques

Si nous vivons aujourd’hui plus longtemps que par le passé grâce, notamment, au progrès de la médecine, il est vrai aussi que nous vivons plus souvent avec une ou plusieurs maladies chroniques. En effet, les nombreux progrès de la médecine ont eu également pour effet que certaines maladies mortelles auparavant se sont chronicisées (sida, cancers,…). D’après la dernière enquête de santé (2008), plus d’un belge sur quatre serait atteint d’une maladie chronique. Si cela entraine certainement une pression à la hausse sur les dépenses de santé, ces personnes représentent un groupe de patients particulièrement vulnérables dont les dépenses de soins peuvent être particulièrement élevées.

De nombreux efforts ont été consentis depuis la création de l’assurance obligatoire afin d’améliorer l’accessibilité financière des soins de santé. Si certaines mesures sont spécifiquement conçues pour aider les malades chroni-ques  (création du statut malade chronique, du maximum à facturer spécifique pour les malades chroniques,…); parfois, des mesures générales ont également joué un rôle crucial pour ce groupe spécifique (élargissement de l’assurance maladie à de nouveaux types de bénéficiaires, l’intervention majorée). Malgré ces évolutions positives, l’accessibilité des soins reste un problème pour ce groupe de patients. À l’avenir, il faudra continuer à déployer des efforts pour améliorer l’accessibilité financière des soins de santé en général et plus particulièrement pour les malades chroniques. La MC a fait œuvre de pionnier dans le domaine des enquêtes sur la situation financière des malades chroniques et a joué un rôle moteur dans des mesures importantes. C’est un rôle que la MC va continuer à remplir à l’avenir.

5.3 Pistes de réflexion pour assurer l’avenir de notre système de santé

5.3.1 Assurer l’avenir financier de notre système

Afin d’assurer la pérennité de notre système d’assurance, deux options complémentaires s’offrent à nous : continuer à diversifier et à élargir la base de financement de la Sécurité Sociale et donc de l’assurance maladie (augmenter les recettes) et augmenter l’efficience de notre système (faire plus ou mieux à niveau de dépenses donné).

n’auraient pas accès à la couverture privée) jusqu’à un modèle où l’administration aurait tout en main. Le Parlement flamand devra en débattre en fin d’année. Le débat sera probablement tranché après les prochaines élections.

De manière générale, le nouveau modèle de gestion devra également veiller à ce que les soins gérés par les entités fédé-rées restent accessibles financièrement et géographique-ment tout en garantissant un niveau de qualité élevé. En effet, le transfert de compétences présente un risque pour le portefeuille des patients (si les budgets transférés s’avèrent insuffisants, ce seront les patients qui devront financer directement) mais aussi risque de concurrence entre entités fédérées (ce serait le cas si, par exemple, il devenait plus intéressant pour les infirmières de travailler en Wallonie plutôt qu’à Bruxelles ou inversement). Cependant, la création d’un organe de concertation entre les différentes entités devrait limiter ce dernier phénomène.

5.2 Des défis de taille

5.2.1 Le vieillissement de la population

Le vieillissement de la population aura certainement un impact important sur les dépenses de soins de santé et sur l’organisation de notre système de soins. Car si les dépenses liées au soins de longue durée ont déjà fortement augmenté ces dernières années (elles représentaient 16,3 % des dépenses totales en 2003 contre 20,6 % en 20115), il ne faut pas oublier que le véritable boom démographique aura lieu après 2025, lorsque la génération du baby-boom atteindra les 80 ans. Il nous reste donc encore 10 ans pour nous y préparer et adapter notre système de soins de santé aux nouveaux besoins de cette population.

Dans ce domaine, et depuis longtemps déjà, la MC articule ses revendications autour de deux axes. Le premier concerne le développement des soins et des aides à domicile ainsi que d’infrastructures intermédiaires de soins telles que les centres de courts séjours, les centres de soins de jour, les centres de revalidation afin de créer un réel continuum de soins centré sur les besoins de la personne et permettre ainsi à chacun de rester le plus longtemps chez soi. Mais une telle politique ne pourra voir le jour que si le financement (déjà largement insuffisant) du secteur des soins à domicile est complètement revu. Il faut, de plus, veiller à ce que toutes ces formes de soins soient financièrement abordables pour les membres.

D’autre part, l’institutionnalisation restera la réponse la plus adaptée aux besoins de certaines personnes en grande perte d’autonomie et nécessitant des soins lourds. Il est donc

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6 Pour plus d’informations sur ce sujet, voir bibliographie (Crommelynck A., Degraeve K., Lefèbvre D.)

7 Lambert M et al. (2011) L’AMI en chiffres 2011, page 19, Publication MC 2011

8 Pour plus d’informations sur ce sujet voir bibliographie (Koen Cornélis)

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Comme nous l’avons déjà évoqué plus haut, les sources de revenus « classiques » telles que les cotisations sociales, le financement alternatif et les subventions de l’Etat, ne seront plus à l’avenir suffisantes pour répondre aux besoins des assurés belges. Dans ce cadre, différentes pistes de réflexion peuvent être évoquées. Premièrement, une partie plus importante de la TVA pourrait financer l’assurance maladie, en particulier la TVA sur les produits tels que les boissons sucrées, l’alcool, le tabac ou l’essence. Une autre idée déjà largement évoquée serait l’introduction d’une cotisation sociale généralisée (CSG) que tous les bénéficiaires de la Sécurité Sociale devraient verser et non pas seulement les travailleurs et les employeurs. Cette option permettrait d’élargir la base de financement de la Sécurité Sociale et de le rendre plus indépendant de la conjoncture sur le marché du travail. De manière plus globale, c’est l’ensemble du système fiscal belge qui devrait être réajusté afin de mettre en place une taxation plus équilibrée entre les revenus du travail et ceux du capital. En effet, le patrimoine accumulé par les ménages (foncier ou financier) pourrait devenir une source de perception de cotisation supplémentaire élargissant ainsi l’assiette de financement de la Sécurité Sociale.

D’autre part, il est également nécessaire de revoir le fonc-tionnement actuel de notre système de santé et d’augmenter son efficience. Ici aussi de nombreuses pistes de réflexion peuvent être évoquées :

• Une réforme approfondie du système de financement deshôpitaux sera tôt au tard nécessaire. Le système actuel de financement est inflationniste. En effet, la plus grosse partie des recettes hospitalières est encore liée au nombre de prestations effectuées : soit directement via les honoraires des médecins exerçant dans l’hôpital, soit indirectement via l’enveloppe fermée qu’est le Budget des Moyens Financiers (BMF) des hôpitaux. Actuellement, pour obtenir un financement plus important un hôpital doit conserver ses lits « justifiés » ce qui implique de devoir prester chaque année de plus en plus pour conserver sa part dans le budget total des hôpitaux. Le financement à la prestation devrait être progressivement remplacé par un financement forfaitaire par pathologie également appelé financement all-in6. Ce type de financement prévoit un montant fixe par type de patient et/ou de pathologie et implique que nous ne prenions plus en compte les efforts réels déployés dans le cadre d’un épisode de maladie mais que nous procédions à une estimation de l’effort «  moyen  » (justifié), celui-ci devant être rétribué de manière équitable. Le défi consiste donc à évoluer correctement les besoins en termes d’actes de diagnostics et thérapeutiques et à leur attribuer une rémunération réaliste et équilibrée.

• Undomainedanslequelnousdevronségalementrationalisernos dépenses est celui des médicaments. Ces 20 dernières années (1990-2010), les dépenses pharmaceutiques ont augmenté de 6,8 % par an en moyenne. Cette hausse a été supérieure à celle des dépenses totales en soins de santé, qui ont connu une augmentation de annuelle 6,0 % sur la même période7. Afin de garder le contrôle sur cette hausse des dépenses, les pouvoirs publics ont mis en place depuis 2001 une série de mesures visant à promouvoir la délivrance de médicaments moins chers (remboursement de référence, prescription en DCI, imposition d’un quota de prescriptions de médicaments moins chers, substitution générique). Si ces mesures ont largement permis d’augmenter la part de médicaments bons marché, d’autre initiatives concrètes pourraient encore être mises en place afin de promouvoir les médicaments moins chers8. En effet, cette dernière décennie, nous aurions pu nous attendre à voir les dépenses pour les médicaments diminuer suite à l’introduction de toutes les mesures mentionnées ci-dessus. Ces économies auraient pu être utilisées pour financer de nouveaux médicaments, souvent onéreux, à haute valeur ajoutée thérapeutique. Cependant, sur cette même période nous constatons une augmentation nette de 4 % des dépenses pour les médicaments remboursés. Ceci s’explique en partie par l’introduction dans le système de remboursement de nouvelles spécialités très onéreuses, mais surtout par la croissance très importante (+20 % entre 2008 et 2012) des volumes consommés. Des mesures concrètes devront donc être prises pour contrôler le volumes de médicaments prescrits, notamment en analysant les comportements de prescription des prestataires et en les responsabilisant davantage. Cependant, les prestataires ne sont pas les seuls responsables de la surconsommation de médicaments dans notre pays. Nous devons poursuivre nos efforts en termes d’éducation du patient et souligner l’importance d’une consommation plus «  appropriée  » des médicaments. Un exemple concret est la campagne menée pour une consommation plus adaptée des antibiotiques.

• Accroître l’informatisation de notre systèmeet continuer àfavoriser l’échange d’information sera essentiel à l’avenir si nous voulons augmenter l’efficience de notre système. Nous devrons réaliser le dossier médical et pharmaceutique électronique de sorte que tous les partenaires impliqués dans les soins de santé (prestataires de soins, organismes assureurs,…) puissent avoir accès à l’information de manière simplifiée, l’échanger et l’utiliser afin d’organiser les soins de manière optimale autour du patient.

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• Si l’innovation dans le secteur médical nous a permisd’améliorer considérablement la santé de la population et d’augmenter l’espérance de vie, nous devons à l’avenir nous baser d’avantage sur l’Evidence Based Medecine (EBM) et les analyses coûts-bénéfices pour choisir de manière rationnelle les nouveaux traitements, appareillages, médicaments pour lesquels l’assurance maladie souhaite investir. D’autre part, il faudra d’avantage mettre en place des contrats de type « prix-volume » pour favoriser les économies d’échelle notamment dans le secteurs du matériel médical.

• Il est également nécessaire de poursuivre l’examen etla modernisation de la nomenclature afin que celle-ci corresponde d’avantage à la réalité de terrain sans pour autant diminuer la masse totale d’honoraires médicaux.

• Les mutualités ont également un rôle à jouer dans cedomaine. En effet, en leurs donnant les outils nécessaires pour organiser les soins (notamment en augmentant la responsabilité financière des organismes assureurs), elles pourraient elles aussi contribuer à l’efficience du système. Les organismes assureurs pourraient par exemple conclure des accords avec certains prestataires de soins qui garan-tiraient la mise en place de soins accessibles et de qualité pour leurs membres.

• Il faudra également donner une place plus importanteà la prévention qui pour l’instant ne représente que 3 % des dépenses totales de santé. Cela est particulièrement important du fait que l’espérance de vie et l’état de santé sont essentiellement déterminés par les comportements individuels et moins par les caractéristiques du système de soins. Ici aussi les mutualités ont un rôle à jouer et s’impliquent d’ailleurs déjà dans ce domaine.

5.3.2 Garantir des soins accessibles, de qualité et lutter contre les inégalités sociales de santé

Tout en veillant à garantir la soutenabilité de notre système d’assurance maladie dans un contexte d’économies, nous devrons toujours garantir des soins et des services accessibles financièrement, de qualité et répartis de manière efficiente sur l’ensemble du territoire. Dans ce cadre, nous devons porter une attention particulières aux questions suivantes :

• Nous devons éviter une privatisation trop importante dusecteur des soins de santé. Elle engendre deux risques majeurs en fonction du type de privatisation que nous considérons. Le premier type de privatisation concerne les assureurs. On distingue en Belgique deux types d’assureurs : les mutualités (sans but lucratif) et les compagnies d’assurances commerciales. Le système mutualiste belge est basé sur différentes valeurs telles que la solidarité, la non discrimination et la non exclusion. Au sein d’une même mutualité, tous les membres paient la même cotisation et bénéficient des mêmes services. Toute personne peut venir s’affilier à une mutualité quel que soit son état de santé et n’en sera jamais exclue parce qu’il tombe malade

et qu’il coûte cher. Au contraire, pour être couvert par une assurance commerciale, l’assuré doit répondre à une série de critères. Il paiera des primes différentes suivant le risque qu’il représente et si jamais son état de santé s’aggrave considérablement sa compagnie d’assurances peut décider de ne plus le couvrir. Dans ce type de modèle, les « bons » risques sont favorisés par rapport aux « mauvais » risques en payant des primes plus faibles.

Le deuxième type de privatisation concerne directement les prestataires de soins (maisons de repos ou cliniques privées par exemple). Ces cliniques privées attirent de nombreux médecins réputés qui y pratiquent des tarifs que seule une partie limitée de la population peut se permettre. De même, les prix d’hébergement dans les maisons de repos privées varient considérablement et ne sont pas accessibles à tous. Toutes ces évolutions contribuent au développement d’une médecine à deux vitesses dans laquelle seuls ceux qui ont les moyens peuvent se payer des soins de qualité. C’est principalement contre ce phénomène que les mutualités luttent.

• En Belgique, la part des dépenses de soins de santé quireste à charge des patients est encore élevée (25 %) et, pour de nombreuses personnes, il existe encore une barrière financière importante, en particulier pour les soins spécialisés, les soins dentaires et les médicaments. Ces dépenses à charge se décomposent en tickets modérateurs et suppléments pour les prestations et médicaments remboursés par l’assurance maladie, le coût complet des prestations et des médicaments non remboursés ainsi que les primes d’assurances facultatives hospitalisation (les courvertures complémentaires souscrites auprès des mutualités ou des compagnies d’assurances commerciales). Afin de réduire cette part à charge du patient, le caractère assurantiel de l’AMI doit être renforcé. Nous devons souligner l’importance du système de concertation sociale et de conventionne- ment qui ont pour objectif de garantir une protection financière aux patients. Il est nécessaire de créer d’avantage d’incitants au conventionnement et de penser à l’abolition du système de conventionnement partiel. Les différences de remboursement entre les médecins conventionnés et les autres devraient également être réexaminés. Une autre piste pour protéger les patients serait de plafonner les admissions en chambre double à 250 euros à charge du patient. Cette tâche et sa surveillance pourrait être effectuée par les mutualités.

• L’amélioration de la situation financière des invalides doitégalement être poursuivies, en particulier celle des chefs de ménage. Le pécule de vacances et les allocations familiales complémentaires pour les invalides doivent également être réexaminés (augmenter le pécule de vacances et majorer les allocations familiales pour les chefs de famille). La mise en place d’une politique de réactivation des personnes en invalidité méritent également toute notre attention. Dans la mesure où cela bénéficie au travailleur et à l’employeur, il faudrait clairement le communiquer. Dans ce domaine, les mutualités devraient pouvoir soutenir leurs membres aussi

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bien sur le plan de la santé que sur le plan administratif.

• Afin de réduire les inégalités sociales de santé, nousdevons mettre en place des politiques transversales qui agissent sur les différents déterminants de la santé : niveau de revenus, d’éducation, chômage, logement… tout en continuant à promouvoir des mécanismes tels que le maximum à facturer, le statut BIM/OMINIO ou le tiers-payant social qui ont pour objectif d’augmenter l’accessibilité financière au soins de santé. D’autre part, nous constatons que les personnes plus vulnérables ne consomment pas seulement moins de soins (report de soins plus fréquents, moins de visites chez le dentiste et le spécialiste) mais ils les consomment aussi différemment (plus de visites aux urgences par exemple). Dans ce contexte, nous devons également soutenir le développement des maisons médicales car celles-ci sont souvent bien intégrées dans les quartiers où vivent des populations plus fragilisées.

Il faudra à l’avenir veiller à offrir non seulement des soins accessibles et abordables mais également de qualité. En Belgique, comme dans la plupart des pays, la qualité des soins est considérée depuis toujours comme la responsabilité quasi exclusive des professionnels de la santé. Or, de nombreux autres acteurs ont également un rôle à jouer dans ce domaine. Que ce soit les autorités publiques, les mutualités ou les chercheurs, tous ont leur contribution à apporter à l’édifice9. Dans ce domaine, plusieurs initiatives peuvent être mentionnées :

• Poursuivrelamiseenplace,encollaborationaveclesentitésfédérées, d’indicateurs de qualité permettant aux hôpitaux et autres institutions et prestataires de soins de mesurer leur performance et leur qualité mais aussi de travailler sur leurs points faibles.

• Mettre en œuvre un système de rémunération lié à labonne application de ces critères de qualité et favoriser le remboursement des traitements qui ont lieu dans des insti-tutions/lieux réputés pour leur expertise concernant le traitement en question.

• Développer des indicateurs de qualité qui ne mettent pasuniquement l’accent sur la vérification des ressources (normes de personnel, matériel nécessaire, superficie règle-mentaire…), ce qui est le cas aujourd’hui via les inspections des hôpitaux et des institutions de soins, mais également sur la qualité des processus (comment sont faites les choses) et des résultats. A terme, if faudra favoriser le passage d’un système d’agrément des institutions de soins (qui se base uniquement sur des critères de qualité et de suffisance des ressources) vers un système d’accréditation des institutions de soins qui se baserait sur des critères de ressources, de processus et de résultats.

• Favoriser une plus grande transparence dans ce domainevia l’analyse et la publication des évaluations de qualité et des différences de pratique. Dans ce domaine, l’Evidence Based Medecine et la formation continue seront des outils incontournables.

• Lesmutualitésont,ici,égalementunrôleàjouer.Enévoluantvers un système de responsabilité forte des organismes assureurs et des prestataires de soins basé sur des indicateurs de qualité, la tâche de contrôle d’application de ces critères pourrait revenir aux mutualités.

5.3.3 Adapter notre offre de soins aux besoins futurs : adopter une approche intégrée de soins autour du patient

En raison du vieillissement de la population et de la progression des maladies chroniques, les besoins des patients se modifient, notamment en termes de soins de longue durée. A l’avenir, il faudra partir de ceux-ci et non plus des structures fédérales, régionales ou communautaires pour construire une politique de santé plus intégrée en termes de financement et d’organisation. Ceci implique de :

• Renforcerlapremièreligne:lerôledumédecingénéralistecomme voie d’entrée dans le système de santé doit être réaffirmé et se traduire en une collaboration saine et coor-dination avec les autres acteurs de la première ligne et de la deuxième.

• Favoriser les soins dans l’environnement du patient et lemaintien à domicile. La réforme en santé mentale (‘Psy 107’) est un excellent exemple de ce type d’initiatives. Dans ce cadre, il faut :

- Financer davantage et de manière adéquate les soins infirmiers à domicile ;

- Opérer un transfert / un glissement de financement entre le secteur hospitalier et ambulatoire. Il faudra à l’avenir financer en fonction des besoins et non en fonction des prestataires. Dans ce cadre, il faut mettre la priorité sur la reconversion des moyens destinés aux soins aigus vers la revalidation et la convalescence.

9 Pour plus d’informations sur ce sujet, voir bibliographie (de Béthune X.)

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6. Conclusions

En 50 ans, l’assurance maladie obligatoire est passée par des nombreux changements et offre aujourd’hui une protection large à plus de 99 % de la population belge contre les risques de santé. Par le passé, elle a déjà dû faire face à des crises économiques et politiques mais elle en est toujours sortie grandie. Aujourd'hui encore, l'avenir de l'assurance maladie-invalidité est compromis et plus que jamais nous devons trouver des solutions pour garantir la soutenabilité à long terme de notre système. De plus, pour la première fois depuis sa création un pan entier de la Sécurité Sociale sera transféré aux entités fédérées. Dans cette bataille, nous ne devons oublier ni nos principes fondateurs: solidarité et implication des différents acteurs de terrain (prestataires de soins, représentants des travailleurs et employeurs, mutuelles, associations...) ni nos objectifs : offrir des soins de santé accessibles et de qualité qui répondent aux besoins de tous.

Bibliographie

Alliance Nationale des Mutualités Chrétiennes (1991) : La mu-tualité aujourd’hui et demain. Editions Duculot (1991).

Cornelis K. (2013) : La politique en matière de médicaments moins chers en Belgique. Alliance Nationale des Mutualités Chrétiennes, MC-Info n°253 (Septembre 2013). 

Crommelynck A., Degraeve K., Lefèbvre D. (2013): L’organisation et le financement des hôpitaux. Alliance Nationale des Mutualités Chrétiennes, MC-Informations n°253  (Fiche Info, septembre 2013).

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50 ans AMI

La nomenclature des prestations de santé : instrument de répartition du budget fédéral entre les prestataires de soins de 1963 à 2013

Rob Van Den Oever, Crista Volckaert – Cellule politique de santé

1. Introduction

Tout le monde s’accorde à dire qu’en raison des inégalités face à la maladie et de l’incertitude quant à l’influence des soins médicaux sur l’état de santé de la population, un régime de libre marché, régi par l’offre et la demande, conduit inexorablement à une utilisation inefficace et à une répartition inégale des soins. L'accès aux soins de santé pour les patients est en grande partie déterminé par leur accessibilité financière. C'est précisément ce postulat qui fonde l'assurance soins de santé obligatoire : chaque citoyen a droit à des prestations de soins de qualité et il convient d'éviter autant que possible l'apparition d'une médecine à deux vitesses, où la qualité et l’accès est tributaire des moyens financiers du patient.

En guise d'alternative au libre marché et afin de préserver l'équilibre financier du système de sécurité sociale financé par la collectivité, l'État a décidé, de par la loi Leburton de 1963, de mettre sur pied un modèle de concertation sociale. Le système de santé en Belgique est un système où les pouvoirs publics formulent les objectifs généraux de la politique de santé et fixent chaque année le budget nécessaire pour les atteindre, mais où sa mise en œuvre est en principe laissée aux partenaires sociaux traditionnels (employeurs-employés) et aux premiers concernés  : les organismes assureurs et les prestataires de soins. L'accessibilité financière et à l’offre de soins pour le patient, de même que l'équilibre financier du budget, doivent être réalisés par la conclusion d'accords et de conventions tous les deux ans entre les organismes assureurs et les prestataires de soins. Dans ce cadre, le montant des honoraires et le niveau de remboursement des prestations de santé sont fixés et les règles d'application sont convenues collectivement.

Le contrôle des dépenses de l'assurance soins de santé peut-il être garanti dans un modèle de consensus impliquant les mutualités et les prestataires de soins  ? N'est-il pas temps que le contenu et la mise en œuvre de l'assurance soins de santé obligatoire soient déterminés de façon exclusive par les pouvoirs publics ?

Les dépenses totales, aussi bien publiques que privées, des soins de santé augmentent chaque année dans les pays occidentaux industrialisés où les systèmes de sécurité sociale sont fort

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développés. Avec une proportion légèrement supérieure à 10 % de son PIB accordé aux soins de santé, la Belgique se situe dans la moyenne des pays d'Europe occidentale.

L’origine de cette augmentation des dépenses (au-delà de la croissance du PIB) est connue et identique dans la plupart des pays  : augmentation de la demande en soins de santé pour raisons démographiques (vieillissement de la population), avènement de nouvelles technologies, augmentation des coûts du personnel et empowerment du patient (par l'éducation et les soins auto-administrés).

Le vieillissement de notre population entraine en effet un besoin croissant en soins de santé, surtout en soins chroniques, et la prise en charge d'un nombre croissant de maladies d'usure (dégénérescences), dont le traitement est moins curatif que symptomatique.

On constate par ailleurs une plus grande demande en soins de santé de la part de la population, surtout plus âgée, qui résulte d'une plus grande accessibilité des soins spécialisés. L'augmentation progressive des consultations auprès des spécialistes et la médicalisation accrue d'une série de désagréments et de petits maux du quotidien, pour lesquels une solution est recherchée à tort dans la médecine, illustrent cet état de fait.

De même, la croissance exponentielle des technologies médi-cales, qui offrent sans cesse plus de possibilités, essentiellement diagnostiques, et l'apparition d'appareils et de prothèses toujours plus sophistiqués, en association à des médications particulièrement onéreuses, surtout les médicaments antitu-moraux, mais pas toujours accompagnés d'un investissement thérapeutique efficace et responsable, contribuent aussi à l’augmentation globale des coûts des soins de santé.

L'augmentation des coûts du personnel dans un secteur des soins de santé qui requiert énormément de main-d'œuvre (loi de Baumol), la multiplication des initiatives coûteuses en soins préventifs et l'utilisation croissante de matériel médical à usage unique, toujours plus cher, forment d'autres facteurs expliquant la croissance des dépenses.

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18 MC-Informations 254 • décembre 2013

Figure 2 : Nombre de consultations/visites de médecins généralistes et de médecins spécialistes

*Petits risques pour indépendants à partir du 01/01/2008

Figure 1 : Dépenses totales en soins de santé en pourcentage du PIB en 2010 (Source : OCDE, 2012)

0

10.000.000

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Médecins généralistes

Médecins spécialistes

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Enfin, l'empowerment du patient (influencé ou non par les médias et l'Internet) joue un rôle sans cesse croissant dans la création d'attentes souvent déraisonnablement élevées chez les patients et leurs familles vis-à-vis de la médecine moderne et de ses moyens (limités) lors de la prise en charge et du traitement d'affections complexes et/ou potentiellement mortelles.

Les dépenses totales en soins de santé dans un pays donné ne sont toutefois pas directement liées à la quantité totale de soins prestés et à la santé de sa population, si cette dernière est mesurée à l'aune de paramètres tels que l'espérance de vie à la naissance et la mortalité périnatale. Plus de dépenses en prestations de santé ne signifient donc pas automatiquement une amélioration de la santé publique. Les pays occidentaux se posent aujourd'hui légitimement la question de savoir quel montant doit et peut être consacré exactement aux soins de santé en termes de pourcentage du PIB (Savedoff, 2007).

Ajoutons enfin que le choix de la meilleure façon de payer les prestataires de soins en utilisant les meilleurs systèmes de finan-cement et de rémunération (et les plus complémentaires) afin de stimuler la dynamique et la motivation des médecins et des institutions à prodiguer des soins de qualité, est au moins aussi important que le budget total à accorder aux soins de santé.

La nomenclature des prestations de santé constitue l'instrument de travail par excellence pour pouvoir répartir le budget public des soins de santé entre les différents prestataires de soins par l'intermédiaire d'accords et de conventions. Elle constitue également un paramètre de mesure de l'usage des prestations de soins (épidémiologie clinique) et, indirectement, des besoins.

Après 50 années d'utilisation de la nomenclature dans le cadre d'un paiement à la prestation du prestataire de soins, les critiques du modèle actuel de l'assurance soins de santé, et de sa nomenclature en tant qu'instrument de travail, s'intensifient. La question est aujourd'hui de savoir si la nomenclature caractérisée par un financement à la prestation doit être entièrement repensée et remplacée par l'une ou l'autre forme forfaitaire de financement des soins.

2. La nomenclature belge des prestations de santé

2.1 La conclusion d’accords sur les honoraires et les tarifs de remboursement

Bien avant l’introduction de l’assurance soins de santé obligatoire en 1963, il existait déjà certains accords tarifaires avec les prestataires de soins. Les mutualités locales et les fédérations de mutualités essayaient en effet de conclure des « accords » avec les médecins et les pharmaciens de leur région afin de fixer les honoraires facturés à leurs affiliés. De 1920 à 1944, nous avons connu un système d’honoraires maximums pour les consultations, applicable aux remboursements (afin d’éviter que les médecins ne demandent des honoraires

trop élevés) et aux tickets modérateurs (afin d’éviter la surconsommation par le patient).Dans le sillage du modèle allemand de Bismarck, il existait en Belgique un intérêt grandissant pour la mise sur pied d’une assurance soins de santé obligatoire. Il fallut finalement attendre le terme de la Deuxième Guerre mondiale pour que l’arrêté-loi du 24 décembre 1944 instaure une assurance soins de santé et invalidité obligatoire pour les travailleurs salariés.

Cette forme d’assurance soins de santé ne constituait toutefois qu’une simple garantie de tarif de remboursement fixe et non une couverture des frais réels de la prestation de soins. Pendant des années, les interventions n’ont pas été adaptées et n’étaient aucunement en lien avec les honoraires réelle- ment demandés et payés. Les honoraires pour un même acte et pour une même discipline médicale pouvaient ainsi connaître de très grandes disparités en fonction d’une série d’impondérables, en grande partie déterminés par le médecin lui-même. Le tarif de remboursement était donc bien établi, mais pas encore la contribution personnelle du patient.De façon paradoxale, l’assurance soins de santé obligatoire de 1945 impliqua une réduction du degré de protection de nombreux assurés comparativement à la situation précédente. En effet, la protection sociale obligatoire déjà généralisée a été à l’origine d’une augmentation des honoraires pratiqués. Ainsi, le ticket modérateur, qui existait préalablement sous la forme d'une contribution personnelle limitée aux coûts des soins médicaux (dans le but de limiter la surconsommation), devint un seuil financier insurmontable pour de nombreux assurés sociaux. Il n'existait donc d'une part aucune base légale permettant la conclusion de véritables accords tarifaires, mais il y avait d'autre part de nombreux groupes de la population (indépendants, religieux, étudiants, handicapés) non couverts par l'assurance soins de santé existante.

Enfin, l'arrêté-loi de 1944 tenait insuffisamment compte de la répartition des risques et appliquait un système de partage des moyens entre mutualités sur la base des contributions (revenus), de telle sorte que la solidarité nationale s'effrita rapidement en raison d'un déficit de financement global et structurel sans cesse plus marqué.

La solution vint finalement de la loi du 9 août 1963 régissant la mise sur pied des instances et des procédures nécessaires à la fixation d'honoraires négociés collectivement, que les prestataires de soins individuels devaient s'engager à appliquer et qui formeraient la base du remboursement par l'assurance soins de santé. L'assurance soins de santé et invalidité obligatoire fut divisée en deux branches, avec les assurances des soins médicaux (frais médicaux) d'une part et l'assurance invalidité (revenu de remplacement) d'autre part. Il fut ainsi possible d'élargir les avantages de l'assurance soins de santé aux autres groupes professionnels (et plus uniquement aux travailleurs) afin de garantir un degré de couverture total à la population.

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Dans le but de fixer des tarifs raisonnables, basés sur les coûts réels et acceptables par les médecins et des autres prestataires de service, et pour offrir aux assurés davantage de certitudes quant au coût de certains soins médicaux dont ils devront s'acquitter, une concertation paritaire visant à fixer les droits et les obligations des deux parties, organismes assureurs et prestataires de soins, s'avérait essentielle. Ce n'est que par le biais de cette concertation qu'il fut possible d'éviter toute concurrence déloyale des prestations de soins et que des moyens de financement fixés par la loi et suffisants pouvaient garantir un bon équilibre entre les honoraires et les remboursements.

Par crainte de ne pas disposer de suffisamment de moyens et d'une distorsion de concurrence induite par des tarifs différenciés entre les médecins conventionnés et non conventionnés, le corps médical refusa ce modèle de concertation. La croissance des dépenses prévues et les déficits budgétaires auraient pu avoir des conséquences négatives sur le financement des soins de santé et donc sur l'exercice de la médecine. Au sein de l'opinion publique, les médecins traduisirent cette objection, et avec succès, sous la forme de trois arguments : atteinte au secret médical (attestation et une facturation détaillées de la prestation aux mutualités), perte de la liberté thérapeutique (fixation d'honoraires clairement définis) et perte de la liberté de choix pour le patient (fixation de règles de remboursement plus favorables pour les soins prodigués par des médecins conventionnés).

Cela conduisit en mars-avril 1964 à une grève des médecins et des dentistes sans précédent, au cours de laquelle il fallut même recourir aux services des médecins de l'armée. Grâce à des modifications de la loi du 09-08-1963, un terrain d'entente fut finalement trouvé le 25-06-1964 entre les médecins et les mutualités (les fameux accords de la Saint-Jean). Les médecins renoncèrent alors à leur responsabilité de gestion et ne siégeaient au sein du Comité de gestion de l'Institut national d'assurance maladie-invalidité (INAMI) qu'à titre consultatif, tandis qu'ils acquirent un plus grand nombre de sièges au conseil technique médical (CTM). Enfin, il fut également convenu que les conditions de remboursement s'appliqueraient aux prestations de soins des médecins et des dentistes conventionnés et non conventionnés. Dans ce cadre, pour tous les autres prestataires de services, tels que les infirmiers et le personnel paramédical, seulement 75 % des tarifs de remboursement sont d'application pour les non-signataires de l'accord.

De même, le principe de convention « partielle », qui tient compte des exigences spécifiques de l'assuré et du plafond de revenu en rapport à l'application de tarifs libres, a également été pris en compte.

2.2 Assurance soins de santé obligatoire : accessibilité, sécurité tarifaire et contrôle des dépenses

La loi du 09-08-1963 pose les fondations d’une véritable assurance soins de santé nationale, qui garantit aussi bien l’accessibilité aux soins que leurs tarifs pour les patients, et qui permet simultanément un contrôle des dépenses.

L’accessibilité de la prestation de soins est concrétisée en élargissant de façon progressive la base des ayants droits à l'assurance soins de santé obligatoire à la quasi-totalité de la population et en soumettant tous les prestataires de soins aux mêmes accords tarifaires.

Le contenu de l'accord entre les prestataires de soins et les mutualités est préparé par les conseils techniques (conseil technique médical, conseil technique dentaire, etc.), une structure de concertation tripartite composée de représentants des organisations professionnelles, des prestataires de soins, des universités et des organismes assureurs. Les conseils techniques sont chargés de la réalisation et de la modification de la liste détaillée des prestations de soins (la nomenclature) couvertes par les accords nationaux (médecins et dentistes) ou les conventions nationales (autres prestataires de soins) et ayant fait l'objet d'un consensus entre les prestataires et les mutualités. Dans ce cadre, l'objectif est de créer la liste la plus large possible de prestations, en tenant compte de l'évolution de soins de santé modernes et de haute qualité, des besoins réels de la population et des nouvelles technologies. Les conseils techniques forment une plate-forme de concertation et un organe de consensus et d'évaluation des procédures médicales et des technologies.

Les nouvelles technologies médicales sont donc évaluées et proposées en vue d'une intégration à la liste des prestations couvertes. De façon analogue, les procédures jugées obsolètes peuvent, sur la base d'un consensus, être supprimées de la liste. Les propositions du conseil technique sont toujours reprises en l'état et approuvées (ou non) par la commission d’accords et de conventions, qui ne décide que de la mise en pratique effective et du tarif définitif de la (nouvelle) prestation. Au travers des incitants financiers et une méthodologie de financement variable (par prestations et/ou paiement forfaitaire), la prestation de services peut faire l'objet de modifications annexes.

La sécurité tarifaire pour le patient est réalisée par la fixation des honoraires, qui peuvent être facturés par le prestataire de services pour une prestation reprise dans la nomenclature et à travers la limitation de la contribution personnelle (ticket modérateur) à un pourcentage fixe de ce tarif convenu et en fonction des moyens financiers de l'assuré (titulaire du régime préférentiel, maximum à facturer).

À l’exception des prix des médicaments (Ministère des Affaires économiques) et des frais infirmiers et d'hébergement lors de l'admission à l'hôpital via le budget des moyens financiers

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(Ministère de la Santé publique), ce régime de convention permet en principe également d'exercer une forme effective de contrôle des coûts via les responsabilités collectives des partenaires et des objectifs budgétaires établis. Néanmoins, les évolutions sociales et technologiques, ainsi qu'un manque de responsabilité (politique), ont fait que ce système de paiement à la prestation n'a pas toujours permis de réaliser le contrôle des coûts espéré.

2.3 La nomenclature des prestations de santé

Toutes les prestations de santé (préventives et curatives) pour lesquelles l’assurance soins de santé prévoit un rembourse-ment sont résumées à l’article 34 de la loi du 9 août 1963 relative à l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités coor-donnée par arrêté royal du 14 juillet 1994. L’ensemble de ces prestations médicales s’accompagne d’une description pré-cise, de règles d’application et de modalités de remboursement spécifiques. Les modalités de remboursement ont évolué d’un payement à l’acte vers des paiements forfaitaires (biologie cli-nique, imagerie médicale, matériel endoscopique, honoraires de permanence et de disponibilité en cas d’urgence). Les pres-tations remboursées de cette manière sont rassemblées dans un registre intitulé « nomenclature des prestations de santé », établie par l’arrêté royal du 14 septembre 1984. Cette nomen-clature énumère les prestations selon les catégories suivantes, reprises à l’article 34, 1° à 4° :

1° Aide médicale simple comprenant :• les consultations et visites de médecins ;• les soins dispensés par les praticiens de l'art infirmier, le

personnel soignant et les garde-malades ;• les soins de kinésithérapie ;• les prestations technico-diagnostiques et thérapeutiques

n'exigeant pas la compétence d'un médecin spécialiste ;• les soins dentaires.

2° Accouchements ;

3° Prestations exigeant une compétence spécifique d'un médecin spécialiste, d'un pharmacien ou d'un licencié en sciences (dont biologique clinique) ;

4° Prestations effectuées dans le cadre de prothèses oculaires, de lunettes, d'appareils auditifs, d'implants, de matériel orthopédique et d'orthèses ;

7° bis Prestations de logopédie.

La nomenclature ne constitue qu'une liste limitée de presta-tions intellectuelles et technico-médicales faisant l'objet d'un remboursement à la prestation. D'autres prestations remboursées par l'assurance soins de santé invalidité sont régies par des arrêtés royaux distincts (dialyse rénale chronique, laboratoire FIV, nomenclature de revalidation, etc.) ou par des projets financés par l'article 56 de la loi AMI (monitoring à distance de défaillances cardiaques chroniques).

Certaines prestations de santé sont explicitement exclues de tout remboursement, telles que les interventions esthétiques, ou ne sont pas couvertes par l'assurance soins de santé nationale, mais sont remboursées par les entités fédérées, comme certaines prestations de prévention (vaccination).

La nomenclature a donc évolué et se présente aujourd'hui sous la forme d'un volumineux registre de 36 articles, dans lequel sont répertoriées et classées près de 10.000 prestations (même s'il ne couvre pas l'ensemble des soins médicaux), et dont il ne reste que peu de traces de la structure originelle de 1963.

Prestations de santé effectuées par des médecins et des obstétriciens :

1. les actes (purement) intellectuels, dont les consultations, les visites et les conseils, la psychiatrie, les honoraires de surveillance des patients hospitalisés et les honoraires d'urgence (art. 1, 2, 25 et 26) ;

2. les prestations techniques « conventionnelles » facturables par tous les médecins (art. 3) ;

3. les prestations d'obstétrique, dont les prestations spécifi-quement réservées aux accoucheurs (art. 9) ;

4. les prestations techniques « spéciales générales » factura-bles par tous les médecins spécialistes (art. 11) ;

5. les prestations chirurgicales appartenant aux spécialités des disciplines « externes », dont la chirurgie (art. 14, 15 et 16), l’anesthésie (art. 12) et la réanimation (art. 13) ;

6. les prestations appartenant aux disciplines « internes », la médecine interne (art. 20) ;

7. les spécialités techniques, dont l'imagerie médicale (art. 17, 17bis, 17ter et 17quater), la médecine nucléaire (art. 18 et 19), la biologie clinique (art. 24), l'anatomie pathologique (art. 32) et les examens diagnostiques génétiques et moléculaires (art. 33 et 33bis) ;

8. les prestations multidisciplinaires, telles que les prestations interventionnelles percutanées par imagerie médicale (art. 34) ;

9. les prestations de spécialistes spécifiques, dans la derma-tologie (art. 21) et la physiothérapie (art. 22 et 23).

Les prestations effectuées par :

1. Dentistes (art. 5 et 6)2. Kinésithérapeutes (art. 7)3. Infirmiers (art. 8)4. Bandagistes (art. 27)5. Orthopédistes et prothésistes (art. 29)6. Opticiens (art. 30, 30bis et 30ter)7. Audioprothésistes (art. 31)8. Fournisseurs d’implants (art. 35 et 35bis)9. Logopèdes (art. 36)

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22 MC-Informations 254 • décembre 2013

558552 558563 Électromyographie K 63

Numéro d'ordreAmbulatoire

Numérod'ordreHospitalisation

Libellé Lettre-clé Nombre-coefficient

Chaque prestation de la nomenclature des prestations de santé se caractérise par un numéro d’ordre, un « libellé », une lettre-clé et un nombre-coefficient. La nomenclature indique également la compétence exigée du prestataire pour l’exécution de la prestation, de même que les règles de recours. À titre d’exemple, nous reprenons ici la prestation diagnostique de l’électromyographie afin d’analyser de plus près les différentes sections de la nomenclature (voir Exemple 1).

Numéro d’ordre

Le numéro d’ordre applicable (code de nomenclature, numéro de prestation) est un code unique à six chiffres. Depuis le 01-04-1985, la plupart des prestations sont réparties soit sous un code ambulatoire, dont le cinquième chiffre est toujours impair, soit sous un code d'hospitalisation, dont le cinquième chiffre est toujours pair, selon que le patient est traité en ambulatoire ou hospitalisé.Il suffit d'ajouter 11 au code ambulatoire pour obtenir le numéro d'ordre correspondant pour l'hospitalisation, sauf lorsque le dernier chiffre du code ambulatoire est six, auquel cas il ne faut ajouter que 4. Étant donné que tous les numéros d’ordre sont classés par ordre croissant, les premières positions indiquent déjà la nature de la prestation :

• 22xxxx chirurgiegénérale ;

• 23xxxx neurochirurgie ;

• 24xxxx chirurgieabdominale ;

• 30xxxx chirurgiedentaire ;

• 42xxxx soinsinfirmiers ;

• 45xxxx radiologie ;

• 47xxxx médecineinterne ;

• 56xxxx(+639xxx) kinésithérapie ;

• 589xxx prestationsinterventionnelles percutanées.

Chaque numéro d’ordre s’accompagne également d’une formule arithmétique permettant le contrôle de validité automatique lors de l’enregistrement et du traitement des codes de nomenclature.

Libellé

Le «  libellé  » décrit la nature de la prestation remboursable avec même, dans certains cas, l’indication, les circonstances, les conditions, les délais, etc. Cette description est parfois

extrêmement complète et détaillée, comme par exemple la prestation de l’hémodialyse aiguë (470455 - 470466).

Lettre-clé

La lettre-clé suit le libellé et se trouve avant le nombre-coefficient. Actuellement, une vingtaine de lettres-clés sont en vigueur (article 1) :

•N pour les conseils, visites et consultations d’unmédecin ou d’un dentiste et pour certaines prestations techniques de médecins ;

•D pourladisponibilité ;

•E pour les frais de déplacement des médecinsgénéralistes ;

•BetF pourlabiologiecliniqueetlamédecinenucléaire«invitro » ;

•K pourlesautresprestationstechniquesdemédecins ;

•AetC pourleshonorairesdesurveillance ;

•I pourlesprestationsinterventionnellespercutanées ;

•L pourlesprestationstechniquesdedentistes ;

•V pourlesprestationstechniquesd'accoucheurs ;

•M pourlesprestationsdekinésithérapeutes ;

•W pour les prestations des infirmiers et du personnelsoignant ;

•Z pourlesprestationsdesopticiens ;

•S pourlesprestationsdesaudioprothésistes ;

•Y pourlesprestationsdesbandagistes ;

•T pourlesprestationsdesorthopédistes ;

•Q pourle supplément lié à l’accréditation ;

•U pourlesimplantsetlesproduitsàusageunique ;

•R pourlesprestationsdeslogopèdes.

L’ensembledeceslettres-clésaunevaleurintrinsèque(enEUR),appelée valeur de la lettre-clé. Cette valeur est non seulement différente pour chaque lettre, mais peut également changer au sein du même groupe de lettres par type de prestation. Ces différences ont été volontairement introduites afin de permettre la (ré)évaluation spécifique ou l’indexation de certaines prestations au sein d’un même article de la nomenclature.

Exemple 1 : Prestation diagnostique de l'électromyographie

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Les valeurs des lettres-clés sont déterminées par les com-missions d’accords et de conventions et doivent en outre être soumises à l’approbation du comité de l’assurance de l’INAMI sur conseil de la commission de contrôle budgétaire et enfin à l'accord du (de la) Ministre des Affaires sociales et de la Santé publique.

Unecirculairedel’INAMIàl’organismeassureursuffitàtitrede communication. Cette procédure de modification de la valeur de la lettre-clé permet de prendre des mesures bien plus rapidement que dans le cas d'une modification de la nomenclature, qui doit toujours s'effectuer par arrêté royal.

Nombre-coefficient

Enfin, le nombre-coefficient indique la valeur de la prestation concernée et établit l’honoraire de convention. Pour reprendre l’exemple de l’électromyographie (EMG), la valeur K au 01-01-2013s’élevaità1,1598 EUR.Lecoefficient63 déterminedoncquel’honorairedel’EMGà63x1,1598 EUR=73,07 EUR.

C’est sur cette base que sont déterminés les montants du remboursement et du ticket modérateur. Le ticket modérateur pour les prestations ambulatoires délivrées aux ayants droits sans règlement préférentiel s’élève à 15 %, avec un maximum de8,68 EUR(A.R.11-12-2001).Leremboursementdecettemêmeprestation chez un ayant droit hospitalisé peut donc différer de celui d’une personne ayant bénéficié de cette même prestation en ambulatoire.

Application, interprétation et modification de la nomenclature

Pour pouvoir entrer en considération en vue d’un rem-boursement, chaque attestation de soins donnés (ASD) doit mentionner la prestation effectuée ainsi que le numéro de nomenclature s’y rapportant.

La nomenclature mentionne également les différentes règles d’application se rapportant à une, à plusieurs, ou à un groupe de prestations. Les règles d'application sont reprises dans la description elle-même ou à sa suite, voire dans un paragraphe séparé.

Ces règles d'application se rapportent aux éléments suivants :

• lesexigencesdecompétenceduprestataireouduprescripteur ;

• lesconditionsdanslesquelleslaprestationdoitêtreeffectuée ;

• l'infrastructureet/oulareconnaissancedulieu,del'institution ou du service ;

• lecaractèrecumulableavecd'autresprestations ;

• l'obligationderédigerunprotocoled'examenouunrapport ;

• lesdélaisderenouvellement ;

• lesmodalitésrelativesàlaprescription ;

• lesprocéduresdedemandederemboursement(médecin-conseil, collège de médecins directeurs) ;

• lesconditionsassociéesauxpatients(indication) ;

• l'inclusionounondumatérieldeconsommationoud'utilisation (honoraires nets/bruts) ;

• les conditions de fabrication (produits : fauteuils roulants, chaussures orthopédiques) ;

• lesdélaisdeconservationdedocuments(prescriptions,radiographies).

Il peut arriver que le « libellé » ou que la règle d’application soit soumise à l'interprétation ou que la prestation change en raison de l'évolution technologique (procédure peu invasive, automatisation). Le conseil technique médical fait office d'instance compétente dans la formulation d'interprétations officielles (groupe de travail Interprétation). Dans la mesure où cette règle d'interprétation peut avoir un intérêt d'ordre général, celle-ci est entérinée par le comité d'assurance et après approbation du ministre compétent, publié sous forme d'arrêté royal, par lequel elle devient officiellement applicable est opposable en tant que règle distincte.

2.4 La relation entre les honoraires et le coût réel de la prestation de soins

Dans le cadre de la mise en application des accords et des conventions entre les prestataires de soins et les organismes assureurs, la nomenclature des prestations de santé constitue un instrument essentiel.

L’usage d’une nomenclature extrêmement détaillée dans un système de remboursement à la prestation forme également une source inestimable d’informations sur l’utilisation et la prescription de prestations de soins. Cet usage a conduit au développement d’une série d’instruments de gestion et de mé-canismes de financements, tels que les profils des prestataires de soins et des hôpitaux, les montants de référence, le bud-get des moyens financières (sous-partie B2) et le financement forfaitaire des laboratoires de biologie clinique et des services d’imagerie médicale.

Le soin et les coûts inhérents à sa prestation ont servi de base à la fixation des honoraires. Ces coûts ont été déterminés à partir d’une estimation de la durée nécessaire à l’exécution de l’acte en question et de sa complexité. D’autres éléments, tels que la qualité du processus ou les risques pour la santé, n’ont pratiquement joué aucun rôle dans la fixation des honoraires.

Unefoislavaleurdeshonorairesdéterminéepourunnombrelimité de prestations de base, les tarifs des procédures diagnostiques et thérapeutiques connexes étaient toujours établis par le biais d'une comparaison. Par exemple, si l'appendicectomie était la prestation de base dans la nomenclature de la chirurgie abdominale, des opérations plus

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Tableau 1 : Honoraires des interventions chirurgicales de durée et de complexité différentes (INAMI 2013)

Lettre-clé Nombre-coefficient

Honoraires01/01/13

Durée standardaccept. (min)

Duodenopancreatectomie N 900 480

Gastrectomie N 650 895,61 385

Cholécystectomie N 350 385,80 180

Appendicectomie N 200 231,48 110

24 MC-Informations 254 • décembre 2013

complexes et plus longues telles que la cholécystectomie, la gastrectomie ou la duodenopancreatectomie sont associées à des honoraires qui sont de 2, 3 ou x fois supérieurs à ceux de l'appendicectomie. En faisant varier la valeur de la lettre-clé (p.ex. la valeur N des prestations N200 est inférieure à la valeur N des prestations N650) au sein d'une même discipline parallèlement aux nombreux coefficients (nombre K ou N), les honoraires peuvent varier en fonction de la durée et de la complexité de la prestation (tableau 1).

Au fil des ans, cette méthode de fixation des honoraires par comparaison avec une série de prestations de base s’est toutefois avérée obsolète. Par conséquent, les honoraires de nombreuses prestations ne sont plus en mesure de couvrir le coût réel des prestations concernées (prestations intellectuelles telles que les consultations, honoraires de surveillance) ou les dépassent largement (certaines analyses en laboratoire et imagerie médicale).En raison d'une révision insuffisante de la nomenclature en fonction de l'évolution de la science médicale, les valeurs des honoraires de certaines prestations ont ainsi acquis un caractère historique et ne correspondent aujourd'hui plus du tout aux coûts réels.

Il n'est ainsi pas suffisamment tenu compte de la charge de travail réelle, des coûts du personnel paramédical, de l'infrastructure et du matériel, de l'évolution des techniques opératoires (peu invasives), des techniques d'anesthésie (locorégionale ou topique), de l'automatisation et des durées deprocédure(imageriesmédicales,examensCT,IRMouPETplus rapides). Il n’est également pas suffisamment tenu compte del'importance de la qualité et de l'efficacité des prestations de soins, ou pour le dire autrement, de l'importance du résultat atteint ou de l'approche multidisciplinaire et pratique.

À la suite du développement exponentiel des technologies médicales, surtout en milieu hospitalier, il est ces dernières décennies devenu de plus en plus difficile d'atteindre un niveau d'honoraires qui couvre totalement les coûts de la prestation. Dans la nomenclature des prestations de santé, il est même parfois explicitement stipulé que les honoraires ne couvrent pas les coûts du personnel, de l'infrastructure et du matériel

médical. Ainsi, si le chirurgien et l'anesthésiste bénéficient généralement d'honoraires « nets », le médecin interne doit couvrir avec ses honoraires les frais du personnel et le coût du matériel.

Cette situation est à la source d'un financement mixte de l'activité hospitalière, à la fois via la rétrocession par les médecins d’une partie de leurs honoraires et par le biais du budget des moyens financiers (BMF). En cas de difficultés financières, les gestionnaires des hôpitaux se voient contraints de retenir une part sans cesse plus importante des honoraires pour couvrir les frais généraux liés aux infrastructures, au personnel, au matériel et à toute une série de services connexes (perception centrale). Bien que le principe de base défini en 1963 était parfaitement approprié, cette répartition en honoraires nets et bruts relève aujourd'hui de l'anachronisme et les compensations sur le terrain peuvent parfois être difficilement applicables. Par exemple, les honoraires pour une endoscopie effectuée dans le local de fonction du gastro-entérologue doivent couvrir les frais du personnel et de matériel, tandis que si cette même endoscopie est effectuée par un chirurgien abdominal au bloc opératoire, les honoraires sont considérés comme nets. Les représentations variables au sein du conseil technique médical, et donc une différence des possibilités de lobbying sur les éventuelles modifications de la nomenclature par discipline de spécialisation, font que certains chapitres de la nomenclature sont pourvus de prestations mieux remboursées (souvent techniques).

Avec l'obsolescence progressive de la nomenclature (le conseil technique médical ne peut pour l'instant pratiquement pas réaliser les extensions et modifications de la nomenclature nécessaires et souhaitées en raison de la croissance exponentielle de la technologie médicale et des formes toujours plus contraignantes de contrôle budgétaire), cette représentation inéquitable conduit à une forme croissante d'inégalité des revenus entre les différentes spécialités médicales. Un système à la prestation continue ainsi desurévaluer les prestations techniques diagnostiques et thérapeutiques et à sous-évaluer les prestations intellectuelles (consultations, surveillance, compte-rendu, discussions d'équipe, coaching, explication aux patients et à la famille). Si

1.240,08

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25MC-Informations 254 • décembre 2013

une telle inégalité est constatée en cas de durée de formation et de charge de travail équivalentes, elle peut rapidement prendre la forme d'une injustice, qui conduit à une frustration, à un désintérêt pour les spécialités moins valorisées, à une « fuite » des hôpitaux vers le privé et à l'apparition de lacunes progressives dans l'offre de soins.

La compensation d'une baisse de revenu à la suite de déductions plus importantes et de tarifs conventionnés réduits s'opère par l'ajout d'honoraires supplémentaires (déplacement du coût vers le patient) et/ou la multiplication des prestations techniques. La possibilité de prendre en compte des honoraires supplémentaires (patients privés, chambre individuelle) est toutefois très variable en fonction de la spécialité et conduit notamment à ce que les «  procéduralistes  » (chirurgien, cardiologue, gastro-entérologue, radiologue, anesthésiste) gagnent toujours plus que les « non-procéduralistes » (médecin généraliste, cancérologue, pédiatre, gériatre, psychiatre, rhumatologue) (Schoenman et al. 2001).

Cette inégalité de revenu ne pouvant pas être justifiée par une différence de charge de travail ou de coût est à l'origine d'une tension croissante entre les différentes spécialités médicales au sein de l'hôpital, ce qui conduit à un déséquilibre lors du choix des spécialités, avec trop de « procéduralistes » et pas assez de « non-procéduralistes » en formation, ce qui constitue un frein irrémédiable à la collaboration multidisciplinaire, élément pourtant nécessaire à une approche des soins de santé moderne, efficace et placée au service du patient.

La pratique a démontré que le système de remboursement à la prestation peut facilement conduire à une augmentation débridée du volume des prestations. En Belgique, respectivement en 1986 et 1992, le paiement forfaitaire partiel a été introduit pour la biologie clinique et l'imagerie médicale pour les prestations effectuées aux patients hospitalisés et en ambulatoire. Cela n'a conduit que provisoirement au contrôle des dépenses visé, car le paiement forfaitaire restait en réalité associé à la prestation (nombre d'hospitalisations, nombre d'admissions de jour, nombre de prescriptions) et que cette activité médicale, qu'elle soit basée ou non sur des besoins médicaux réellement croissants, a continué d'augmenter de façon constante.

Comme dans de nombreux pays, l'augmentation des dépenses constantes en biologie clinique, en imagerie médicale, en prestations diagnostiques de routine et en hémodialyse a conduit à des diminutions automatiques des honoraires ou à leur non-indexation à répétition en compensation des dépassements budgétaires. La nomenclature a ainsi évolué et est devenue un instrument de contrôle des coûts par excellence en lieu et place d'un instrument de répartition correcte des budgets des prestations de soins. Au travers de cette approche purement financière, les travaux préparatoires effectués au sein des différents conseils techniques et les négociations menées au sein des organes de

concertation (commission des accords et des conventions) sont sans cesse plus difficiles. Cela rend également l'harmonisation des revenus souhaitée, ou la revalorisation de la nomenclature au profit des spécialités « sous-évaluées », quasiment impossible au sein d'un modèle de consensus. La recherche d'une solution à ce problème d'inégalité des revenus est prioritaire afin de pouvoir garantir à l'avenir un équilibre et une offre de soins complémentaire et équitable entre les différents prestataires de services au sein et en dehors de l'hôpital.

2.5 Vers un autre financement de la prestation de soins ou une révision fondamentale de la nomenclature

La nomenclature belge des prestations de santé en tant qu’outil de financement des prestations de soins fait l’objet de critiques depuis plusieurs décennies. Citons tout d’abord l'aléa moral dans le chef du médecin et du patient, car ces deux acteurs du système ne disposent pas d’une perception suffisante des coûts, en raison du fait qu’une troisième instance (l’assurance soins de santé en l’occurrence) paie l’addition. En outre, un système à la prestation basé sur une demande induite par le prestataire et régi par la volonté de ce même prestataire d'obtenir un revenu convenable conduit à l'augmentation de volume et à l'impossibilité de maîtriser les coûts. Le système à la prestation conduit aussi à de grandes inégalités de revenu entre le « procéduraliste » (chirurgien, cardiologue, radiologue, gastro-entérologue, anesthésiste, biologiste clinique) et le «  non-procéduraliste  », dont les revenus proviennent essentiellement de prestations intellectuelles (médecin généraliste, cancérologue, pédiatre, gériatre, neurologue, psychiatre, rhumatologue). Ajoutons encore la critique légitime selon laquelle la nomenclature ne tient que très peu compte des critères de qualité, mais uniquement de la quantité des prestations, de même que la quasi-absence de critères de reconnaissance dans la nomenclature et le fait que les imprécisions sur les honoraires nets et bruts (hôpital de jour, polyclinique, cabinet) conduit à d'interminables discussions entre les gestionnaires des hôpitaux, les médecins et les mutualités, jusqu'à ce que cela aboutisse en définitive à un déplacement du coût vers le patient. Enfin, la nomenclature étant devenu extrêmement complexe, elle conduit à de nombreuses questions et interprétations, nécessite l'utilisation d'un logiciel de tarification sophistiqué, se caractérise par un cadre conceptuel quelque peu obsolète (règle des champs, sanglant/non sanglant) et offre insuffisamment d'espace aux innovations temporaires et à la mise en place de nouvelles techniques et procédures (médecine peu invasive, médecine à distance, pluridisciplinarité).

D'autre part, il convient de souligner que l'utilisation de la nomenclature en tant qu'instrument de répartition du budget de soins de santé et qu'instrument de travail de la concertation permanente entre prestataires de soins et mutualités est indiscutablement à l'origine d'une série d'avantages. Tout d'abord, la nomenclature, en tant que système de paiement à la prestation, permet une forme de prestation de soins plus

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Tableau 2 : Avantages et inconvénients des différents modèles de financement des soins de santé

FINANCEMENT AVANTAGES INCONVÉNIENTS

ALAPRESTATION

• performance• niveau de service• instrument de contrôle• soins personnalisés

•aléamoral• augmentation volume/coûts• obsolescence• absence de pluridisciplinarité

FORFAITAIRES(forfait, capitation, salaire)

• gestion des coûts

• harmonisation des revenus

• planification des ressources

humaines

•perted'informations• sous-utilisation• références excessives• listes d'attente

A LA PATHOLOGIE(DRG,GHM)

•gestiondescoûts• financement équitable• basé sur le travail fourni

•«DRG-creep»/sélection•sur/sous-codage•casisolés•listesd'attente•disponibilitéréduite

26 MC-Informations 254 • décembre 2013

individualisée et mieux adaptée au patient. Elle offre aussi aux médecins la rémunération qu'ils méritent (plus de consultations et d'interventions impliquent un revenu plus élevé). Par ailleurs, la nomenclature constitue une base de données extrêmement détaillée, qui permet parfaitement l'évaluation de la politique de santé, le contrôle des coûts et du recours aux soins, mais également des études de type clinico-épidémiologique.

Enfin, la nomenclature reste un instrument de financement mis au point et adapté par les acteurs de terrain (prestataires de soins et mutualités) au sein des conseils techniques et fait partie intégrante d'un modèle de concertation non imposé par une instance publique. Face aux faiblesses d'un modèle de financement à la prestation, d'autres modèles ont été mis sur pied et appliqués. Néanmoins, il ne semble pas exister de système optimal, dans la mesure où chacun d'entre eux présente ses avantages et ses inconvénients (voir Tableau 2)

La nomenclature en tant que système de paiement à l’acte présente l’avantage d’une disponibilité et d’une implication maximale du médecin, ainsi qu'une prestation de service rapide et efficace. Elle s'accompagne cependant d'une série d'inconvénients liés à l’aléas moral et à l'augmentation de volume.

Le financement forfaitaire, par capitation ou basé sur un salaire permet, à l'instar d'un modèle de financement case-mix, une meilleure gestion des coûts. Le financement par capitation, dans sa forme la plus évoluée, est basé sur des honoraires attribués par (périodes de) maladie ou par patient, indépendamment des différences éventuelles de prestations de service effectives (nature et/ou volume) pour des affections ou des patients comparables. Une forme moins évoluée de financement parcapitation se rapporte aux honoraires forfaitaires, tels que

le prévoit la nomenclature belge actuelle, notamment pour la biologie clinique, l'imagerie médicale, les soins infirmiers ambulatoires ou le matériel à usage unique dans le cas de la chirurgie endoscopique. Les différences entre médecins et/ou patients dans l'administration ou l'utilisation de soins pour des pathologies identiques sont ici gommées, mais la relation avec la prestation de soins effective demeure.

En revanche, les inconvénients du financement par capitation (forfait, abonnements, salaires) ne sont pas minimes : l'avantage limité d'une meilleure gestion des dépenses est contrebalancé par la réduction du niveau de service (apparition de listes d'attente, risque de sous-traitement, tendance au renvoi trop rapide vers d’autres prestataires). Il existe également un manque d'incitants en lien avec la charge de travail. De même, les informations relatives aux soins prestés en tant qu'instrument politique essentiel sont disponibles de façon beaucoup moins détaillée, ce qui constitue un inconvénient, par ailleurs également applicable au système de financement case-mix ou au financement par pathologie.

Le financement par pathologie fait usage d'un montant forfaitaire pour la prise en charge et le traitement d'une pathologie donnée. La relation avec le patient individuel est préservée, mais le remboursement total pour le traitement ne peut plus être divisé en composantes de soins en fonction des interventions diagnostiques ou thérapeutiques des différents spécialistes, infirmiers ou membres du personnel paramédical. La prise en charge de la pathologie à rembourser est généralement standardisée dans des entités médico-diagnostiques comparables (Diagnosis Related Groups,Groupes Homogènes de Malades (GHM)) et le financement est ensuite adapté en tenant compte des éléments influençant les coûts (âge, comorbidités).

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Tableau 3 : Financement des prestations de soins en Belgique

Ambulatoire

COÛTDELAPROCÉDURE FORFAIT/ALLIN BUDGET

Personnel Frais d'hébergement

Honoraires médicaux Infrastructure Frais infirmiers

Matériel médicalMédicaments

Matériel à usage unique

Nomenclature BMF

Hospitalisation

27MC-Informations 254 • décembre 2013

Dans la plupart des pays d'Europe occidentale, on est passé progressivement d'un financement à la prestation à un financement budgétaire sur base de la pathologie(Okamura et al. 2005). Les inconvénients de ce type de financement par pathologie sont également connus : risque de sur-codage afin d'obtenir la valeur DRG la plus grande possible et doncun remboursement DRG plus élevé (le fameux DRG-creep),manque d'affinage des différentes catégories de patients dont les coûts de soins sont très diversifiés et élevés (Flohe et al. 2007) et possibilités d'un remboursement correct en fonction de la charge de travail de tous les médecins impliqués, dans le cas où le (coûteux) modèle basé sur le salaire n'a pas été choisi.

Dans l'éventualité où l'on souhaite conserver les avantages d'un paiement à la prestation (nomenclature), une révision profonde est toutefois indiquée, avec une attention plus marquée pour l'harmonisation des revenus, l'innovation, les honoraires nets et bruts, le double financement des soins hospitaliers, le calcul des coûts réels, le remboursement des coûts des soins prestés et évidemment, une maîtrise responsable des volumes et des dépenses.Unedesmodificationssouhaitablesserapporteàlacouverture des coûts, par laquelle les honoraires du personnel, les coûts de l'infrastructure et du matériel sont remboursés en fonction du lieu d'exécution des soins (bloc opératoire, hôpital de jour, polyclinique, cabinet privé), permettant ainsi la mise sur pied d'un double financement au sein de l'hôpital et la possibilité d'une rémunération différente pour une même prestation.

En Belgique, le budget des moyens financiers (BMF) prévoit depuis 2002 le financement des frais infirmiers et d'hébergement sur la base de la pathologie traitée (nombre de jours d'hospitalisation), tandis que le médecin est encore rémunéré via un système à la prestation (Tableau 3).

Pratiquement la moitié des moyens de fonctionnement de l’hôpital provient des retenues sur les honoraires. Cela peut expliquer l’intérêt du gestionnaire de l’hôpital et du médecin à voir augmenter les volumes ainsi que la tendance qu'ont de nombreux spécialistes à travailler en dehors de l’hôpital dans leur propre cabinet privé.

Lorsque les avantages du maintien d'un financement à la prestation (partiel) contrebalancent les inconvénients et lorsqu'il existe une certaine unanimité sur les carences actuelles de la nomenclature, se pose inévitablement la question de savoir comment les modifications souhaitées peuvent être mises en œuvre au sein du modèle de convention existant. Malgré la mise sur pied d'une commission officielle et la création de mandats (à l'exception du mandat de président), une révision fondamentale de la nomenclature n'a à ce jour toujours pas été mise en œuvre.

La résistance à l'harmonisation des revenus est surtout liée à une crainte de perte de revenus du fait d'une redistribution. La profession médicale craint également que l'instauration de rémunérations forfaitaires implique un «  gommage  » des différences de charge de travail. C'est la raison pour laquelle une modification de la nomenclature et la fixation de nouveaux tarifs d'honoraires doivent tenir compte de l'effort fourni par le médecin et des coûts réels du soin presté. En dépit de cette résistance, une revalorisation a quand même pu être mise en pratique, au moyen de petites interventions ciblées, pour les psychiatres, les pédiatres, les gériatres, les généralistes, les cancérologues, les rhumatologues et les néonatologues.

AuxÉtats-Unis,WilliamHSIAO(Hsiao1988)aréaliséuntravailrévolutionnaire pour le compte de Medicare et Medicaid en mettant sur pied unmodèle (Resource Based Relative Value

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Complexité de l'acte Effort physique

Compétences techniques

Durée

Effort mental

Exigences d'évaluation

StressRisquesdedommageiatrogène

Gravité et lourdeur del'affection

Incertitude diagnostique etthérapeutique et traitement

28 MC-Informations 254 • décembre 2013

Scale) qui évalue la prestation du médecin en fonction de la durée, de l'effort intellectuel, des compétences techniques exigées, de la capacité d'évaluation, du stress relatif à la lourdeur de l'intervention et aux conséquences possibles de cette dernière, et de l'investissement éventuel en formation complémentaire. Ce module d'évaluation complexe du travail fourni par le médecin est agrémenté des différents coûts générés par l'exécution de la prestation : personnel infirmier, infrastructure (pro rata), matériel médical et frais indirects (Tableau 4).

Si une telle évaluation des composantes des honoraires d’une prestation de soins est utilisée dans le cadre d’une revalorisation de notre nomenclature, il convient de prendre d’emblée sérieusement conscience de l’ampleur de la tâche. La nomenclature américaine (Healthcare Common Procedure Coding System), qui contient à l’heure actuelle aux alentours de 7.000 prestations, calcule les honoraires sur la base de trois unitésdevaleurrelative(RVU-relativevalueunits) :lapremièrepour le travail du médecin (temps, effort, compétences, stress), la seconde pour les coûts liés à la mise en œuvre(infrastructures, personnel infirmier, matériel médical) et la troisième pour les coûts de l'assurance liée à la responsabilité professionnelle. La partdechaqueunitéestcommesuit :52,5%(RVU‘médecin’),43%(RVU‘miseenœuvre’)et9,9%(RVU‘responsabilité’).

LaRVU‘miseenœuvre’diffèrelorsquelaprestationestréaliséeen cabinet privé ou à l'hôpital et corrige donc l'inégalité présente dans la nomenclature belge (couverture des coûts par les honoraires uniquement). En Belgique, les articles 139 bis et 140 de la loi sur les hôpitaux, de même que le caractère extrêmement imprécis des composantes des honoraires bruts de la nomenclature, sont à l'origine de débats, voire de conflits interminables entre le conseil médical et le gestionnaire de l'hôpital. Mais la levée de ces imprécisions est loin d'être simple et exige non seulement une division de la nomenclature entre les prestations effectuées au sein de l'hôpital (honoraires nets) et en dehors (honoraires bruts), mais également le déplacement d'une grande partie des honoraires nets des prestations techniques vers le budget des moyens financiers.

Le choix d'un tel modèle basé sur des honoraires nets, qui ne rétribue que la prestation intellectuelle et physique du médecin, n'est pas si évident. Tout d'abord, les coûts du matériel médical, de l'infrastructure et du personnel peuvent augmenter de façon considérable et être parfois supérieurs à la rémunération offerte par les honoraires existants, ce qui induit immédiatement un surcoût important. Deuxièmement, il faut y ajouter que les effets d'une telle modification des honoraires nets sont difficiles à estimer. Le modèle de financement des soins de santé est en effet étroitement lié aux dépenses totales du secteur, en ce

Tableau 4 : Composantes des honoraires d’une prestation de soins

MÉDECIN

COÛTS

•Personnelinfirmier (niveau de formation, délégation, nombre)

•Infrastructure (amortissement, entretien)

•Matériel (usage unique, implants)

•Coûtsindirects(temps de préparation, temps d'attente, disponibilité, interprétation, compte-rendu, assurance)

(ResourceBasedRelativeValueScale)(Hsiao,1988)

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29MC-Informations 254 • décembre 2013

compris la régulation par l'État, à l’évolution du système de santé, à l'impact sur les assureurs privés et surtout au profil de pratique du médecin et à la consommation de soins par les patients. La sensibilisation du médecin à l'égard des coûts à couvrir par les honoraires bruts (personnel, infrastructure, matériel médical) risque d’entièrement disparaître par la création d'honoraires nets et confronter le gestionnaire de l'hôpital à d'importants coûts supplémentaires (pas toujours couverts), un phénomène également présent dans un modèle où les médecins sont salariés.

Quelles seront les conséquences d'une telle situation sur la«  serviabilité  » du médecin vis-à-vis de sa patientèle, sur sa disponibilité, sur la qualité de la prestation de ses soins et surtout sur sa volonté de travailler en dehors de l'hôpital ? Pour éviter d'obliger les prestataires à effectuer les prestations en milieu hospitalier (plus coûteux), il convient en effet de prévoir des honoraires différents (plus élevés afin de couvrir les coûts) par rapport à cette même prestation en cabinet privé. Enfin, dans le cadre de la révision souhaitée de la nomenclature et de la revalorisation des honoraires, et indépendamment du fait que nous évoluions ou pas vers un système d'honoraires nets, il convient de porter une attention particulière à la couverture des coûts non directement liés à l'exécution de la prestation de soins, mais qui font néanmoins bel et bien partie d'une médecine moderne et multidisciplinaire orientée vers le patient. Ces coûts complémentaires se rapportent par exemple au leadership, aux missions de gestion, au travail en dehors des heures normales et à la qualité du soin presté.

RoexetTelgenkamp (1999) ont mis sur pied un modèle basé sur un système d'honoraires plus individualisé (médecin en milieu hospitalier). Ce système n'est pas lié aux prestations (tableau 5).

Dans la mesure où ce système de rémunération ne semble pas faire l’unanimité aux Pays-Bas et où la nomenclature belge actuelle et les couvertures complémentaires tiennent déjà compte de certains de ces déterminants (suppléments d’urgence, disponibilité, maîtrise de stages, primes d’attente et de permanence), une amélioration du système existant semble préférable.De plus, la nécessité de devoir à terme rémunérer la participation du médecin de l’hôpital à la politique hospitalière lorsqu’il consent des investissements supplémentaires en formation, en concertation et en management (chef de service, comité de gestion médicale, conseil médical) sera inévitable.

En ce qui concerne la rémunération de la qualité du service presté, des propositions ont été formulées et analysées par une structure multipartite. L’objectif de cette démarche était de mettre sur pied un système de bonus pour les hôpitaux répondant à certains paramètres de qualité, à mettre en œuvre par l’intermédiaire du budget des moyens financiers, mais ce type d’incitant n’a pour l’instant pas encore été intégré à la nomenclature.

Dans la mesure où nous traversons une période de récession socio-économique de plusieurs années, qui nous prive d’une grande partie, voire de la totalité, des moyens financiers nécessaires à la mise en œuvre de modifications, d’une revalorisation ou d’une extension de la nomenclature au service d’une prestation de soins novatrice, les possibilités de révision fondamentale de la nomenclature restent limitées. On constate en outre chez les médecins et les autres prestataires de services l’absence de disposition à collaborer à un renouvellement de la nomenclature, qui est toujours utilisée comme un simple instrument de compression des coûts. Les conseils techniques

Tableau 5 : Composantes de la rémunération de la prestation de soins par le médecin (Roex et Telgenkamp, 1999)

FACTEUR CRITÈRE CARACTÉRISTIQUE

1) Niveau de fonction

Impact Mission/publications/

Connaissance Formation

RésolutiondeproblèmeSimple/complexediagnostique/thérapeutique

Communication Niveau de communication

Leadership Equipe/service/direction

2) ProfessionnelRisquederéclamation Prime d'assurance

Risquedel'intervention Mortalité, complications

3) Disponibilité Hors heures normales Nuit/soirée/weekend

4) Prestation de soinQualité

Connaissances, compétences,personnalité, motivation

Quantité Norme de production

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et la commission d’accords et de conventions ont toutefois mis sur pied une série de modifications favorables, où les principes de revalorisation, d’augmentation de la rémunération forfaitaire et de stimulation de la concertation multidisciplinaire ont été instaurés. Cela s’est toutefois opéré à un rythme très lent et de façon encore insuffisante (réévaluation des prestations intellectuelles, prime de permanence, consultations oncolo-giques multidisciplinaires, trajets de soins).

La poursuite de l’application d’une méthode d’évaluation des prestations et de calcul des coûts lors de la fixation de nouveaux honoraires pour un grand nombre de prestations de base par spécialité médicale dans la nomenclature, où les autres tarifs peuvent être modifiés sur la base d’une comparaison, peut permettre à court terme de corriger les tarifs de la nomenclature devenus obsolètes du fait de l’automatisation, de l’évolution technologique, de la délégation au personnel infirmier et de la nouvelle structure des coûts.

3. Conclusion

Plusieurs enquêtes de satisfaction démontrent que les soins de santé en Belgique sont toujours performants comparativement à ceux des pays voisins. La vaste accessibilité, le niveau de services et la qualité moyenne justifient l’implication actuelle des fonds communautaires investis par la sécurité sociale.

Cette situation résulte en grande partie de l’utilisation depuis un demi-siècle d’une nomenclature de prestations de santé rémunérées à l’acte. Dans la mesure où il n’existe pas de modèle de financement optimal des soins de santé et compte tenu du fait que le remboursement des soins de santé, au sein de l’hôpital et en ambulatoire, est étroitement lié au maintien d’un système de soins de santé efficace et largement accessible, une suppression totale du système de prestations actuelles n’est pas indiquée.

Pour la stimulation des soins de santé préventifs, un système definancementparcapitationpeuts’avérerutile (DRG).Pourles prestations de soins plus rares, la mise en place d’un système basé sur l’octroi d’un salaire au prestataire de soins peut être envisagée, même si ces situations doivent rester exceptionnelles.

Il conviendrait donc plutôt de privilégier le maintien du financement à la prestation actuel, mais à condition de procéder à une révision en profondeur de sa nomenclature. Dans ce cadre, les formes de financement mixtes, impliquant à la fois un paiement à la prestation (part associée au médecin) et forfaitaire (part associée aux coûts), de même que la mise sur pied de budgets pour la gestion des dépenses et le financement de certains systèmes expérimentaux (financement DRG,montant de référence avec bonus-malus, incitant pour des soins sous-évalués et/ou spécialisés) devraient être permises.

La réalisation des modifications de la nomenclature souhaitée sera axée sur l'harmonisation des revenus en fonction de soins intégraux plus efficaces et plus orientés vers le patient. Cela demandera nécessairement un investissement de plusieurs années. La mise en œuvre de ces modifications peut s'effectuer par le biais d'une commission spéciale, mais uniquement en étroite collaboration avec le conseil technique concerné, qui doit disposer d'un droit de parole bien établi.

Après 50 ans d'existence, la nomenclature des prestations de santé a aujourd'hui clairement besoin d'être actualisée, en accordant une attention prioritaire à sa revalorisation, à la mise en place d'incitants à la qualité et aux résultats et en tenant compte de l'avènement des nouvelles technologies. En tant que moyen de répartition des budgets de soins de santé et qu'instrument de travail du modèle de concertation entre prestataires de soins et organismes assureurs, la nomenclature ne doit certainement pas être abandonnée trop rapidement.

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Enquête

« Combien payez-vous chez un médecin spécialiste ? »

Bram Peters, Katte Ackaert, Onderzoek en ontwikkelingAvec nos remerciements à Birgit Gielen, Frank De Smet, Anja Crommelynck, Elise Henin et Michiel Callens.

Résumé

De septembre 2012 à juin 2013, la MC a réalisé une enquête en ligne afin de connaître le montant réel payé par les patients à leurs médecins spécialistes. A cet effet, nous avons envoyé près de 700.000 mails à nos membres qui ont consulté un spécialiste et nous avons reçu 154.505 réponses. Cette enquête fait apparaître que dans 23,26% des consultations auprès de spécialistes conventionnés, en moyenne, le patient a payé 9 euros de trop (arrondi à 0,5 euro toléré). Pourtant, les médecins conventionnés ne peuvent pas réclamer de suppléments. En échange de leur engagement à la convention, un montant (4.444 euros en 2013) est versé pour leur assurance pension, décès et invalidité.

D’autre part, les spécialistes non conventionnés ont respecté les tarifs de la convention dans 45,11% des consultations (arrondi à 0,5 euro toléré). C’est assez surprenant puisqu’ils sont libres de demander des suppléments. Les patients payent en moyenne 13,5 € de plus pour les consultations auprès de spécialistes non conventionnés facturant des suppléments.

Les situations varient cependant fortement en fonction de la spécialisation du médecin. Parmi les spécialistes conventionnés, ce sont les gynécologues (49%), les spécialistes en médecine physique et rééducation fonctionnelle (35%) et les orthopédistes (35%) qui demandent le plus souvent des suppléments pour leurs consultations. Par contre, toujours parmi les spécialistes conventionnés, les oncologues (5%), les spécialistes en radiothérapie (11%) et les psychiatres (12%) sont ceux qui en réclament le moins souvent.  La MC a tiré trois leçons de cette enquête. Tout d’abord, il faut convenir d’une stratégie au niveau médico-mutualiste concernant les médecins conventionnés qui ne respectent pas les tarifs. Ensuite, il s’avère indispensable d’être plus transparents. La MC plaide pour des factures claires. Les patients connaitraient ainsi précisément les montants qu’ils paient et la mutualité pourrait vérifier si la convention a bien été respectée. Enfin, la MC souhaite encourager les spécialistes à signer – et respecter – la convention. Le taux de conventionnement est en effet particulièrement bas chez les dermatologues, les ophtalmologues et les gynécologues.

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1 Montant pour 2013, soumis à l’indexation.

2 Ce ‘oui’ ou ‘non’ répond à la question de savoir si l’intégralité du ticket modérateur a été facturée. Nous avons besoin de ces informations, en tant que mutualité, pour savoir si le compteur MAF doit être alimenté.

1. Introduction

Tous les deux ans, mutualités et représentants des médecins se réunissent pour conclure un accord fixant les tarifs et conditions de remboursement de chaque prestation médicale. Il s’agit plus précisément des honoraires officiels. La majeure partie de ces honoraires sont à charge de l’assurance soins de santé-invalidité (ASSI) et sont remboursés au patient par les mutualités. Il revient au patient de s’acquitter personnellement de la partie restante du tarif en vigueur, le ‘ticket modérateur’.

Les médecins qui adhèrent à l’accord sont tenus de respecter les tarifs de la convention. En échange de quoi, ils perçoivent une allocation annuelle et le statut social. Cette allocation annuelle de 4.444 euros1 est investie dans une assurance pen-sion ou invalidité.

Les médecins non-conventionnés ne sont pas tenus de suivre les tarifs officiels. Ils sont libres d’attester des suppléments en sus des tarifs de la convention. Le patient doit par conséquent s’acquitter lui-même non seulement du ticket modérateur officiel, mais également de ces suppléments.

En Belgique, 83,1 % de tous les médecins sont (partiellement) conventionnés, avec un taux de conventionnement fortement dépendant de la spécialisation. Chez les médecins généra-listes, le taux de conventionnement (partiel) atteint les 88  %. Chez les spécialistes, il s’élève à 77%. Dans certains groupes de spécialistes, moins de la moitié des médecins sont (partiellement) conventionnés (ex. dermatologues, gynéco-logues, …).

Nos membres nous font régulièrement savoir que des médecins conventionnés demandent tout de même des suppléments et que les suppléments portés en compte par certains médecins non-conventionnés sont parfois particulièrement élevés. Il ressort en outre d’une étude précédente que nos membres éprouvent des difficultés, surtout chez les spécialistes, à estimer le coût de la consultation (50 ans de l’AMI, MC Info 253 pp. 3-13.)Enfin, il est également frappant qu’un patient ne reçoive aucune preuve de paiement pour une visite chez un médecin. Il reçoit bien une ‘attestation de soins donnés’, mais celle-ci ne précise, dans la plupart des cas, pas le montant payé par le patient. Plutôt qu’un montant, le médecin se contente de mentionner ‘oui’ ou ‘non’ dans la case prévue à cet effet.2

En principe, le montant payé doit également apparaître sur la souche fiscale (‘reçu’) attachée à l’attestation. Si le patient paie comptant, cette souche (bien que détachable) ne peut pas être détachée par le médecin. Pourtant, dans de nombreux

cas, elle n’est pas complétée et/ou est détachée. D’autre part, les attestations des SPRL ne comportent, quant à elles, pas de souche fiscale.

La seule façon de connaître le montant effectivement payé par les patients à leur médecin est de leur poser la question individuellement.

En tant que mutualité, nous souhaitons veiller à ce que les soins de santé restent financièrement accessibles et à ce que la sécurité tarifaire soit garantie. L’accord entre médecins et mutualités (point 9), prévoit que les deux parties s’engagent à tout mettre en œuvre pour en faire respecter et appliquer correctement les dispositions. Cette étude, sans précédent en Belgique, cadre donc non seulement avec cette mission mais également avec notre rôle de défenseur du patient. Aucune instance ou organisation ne connaît le coût réel des soins de santé pour le patient. D’où l’importance de cette enquête pour objectiver la problématique des suppléments.

Les questions posées sont simples :

• Lesmédecinsconventionnésfacturent-ilsdessupplémentset combien ?

• Lesmédecinsnon-conventionnésfacturent-ilsdessuppléments et combien ?

• Dansquellemesurenosmembressont-ilsinformésdustatutde conventionnement de leur spécialiste ?

32 MC-Informations 254 • décembre 2013

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Le deuxième volet posait la question « Quel montant avez-vous réellement payé à votre médecin ? » avec trois possibilités de réponses. La première réponse possible faisait référence aux honoraires officiels  ; le montant correct était déjà complété. Dans la deuxième réponse, le membre avait la possibilité de signaler qu’il avait payé un autre montant et d’en préciser la valeur. Le répondant pouvait enfin également indiquer s’il ne se souvenait plus du montant payé.

Le troisième volet de l’enquête avait pour but de vérifier dans quelle mesure les répondants étaient au courant du statut de conventionnement du spécialiste consulté. Les répondants pouvaient indiquer si leur spécialiste était oui ou non conventionné, s’ils n’en savaient rien ou s’ils ignoraient ce qu’est un médecin « conventionné ».

2.2 Réponses

686.899 e-mails ont été envoyés, invitant les membres à participer à l’enquête, pour 154.505 réponses exploitables pour l’étude des suppléments. Lors de la vérification de la représentativité des réponses exploitables, il s’est avéré que la plupart des spécialistes non-conventionnés en Belgique étaient représentés dans les résultats de l’enquête (Tableau 1). Le nombre d’enquêtes complétées pour des consultations chez des spécialistes conventionnés et partiellement conventionnés est moins élevé. Quatre spécialistes (partiellement) conventionnés sur dix sont présents dans les réponses. Ces résultats laissent supposer que les membres qui estimaient avoir trop payé sont surreprésentés dans les résultats de l’enquête.

2. Collecte de données

Entre le 25 septembre 2012 et le 26 juin 2013, une enquête e-mail a été adressée aux titulaires MC ayant eux-mêmes consulté un spécialiste en ambulatoire ou dont une personne à charge a consulté un spécialiste. Pour entrer en considération dans le cadre de l’enquête, l’attestation du membre devait parvenir à la mutualité pour remboursement moins de deux mois après la consultation chez le spécialiste. Les titulaires inscrits pour recevoir un récapitulatif de leurs remboursements par e-mail (ci-après : l’extrait de compte électronique ou M30) ont reçu, le jour suivant réception de ce récapitulatif, un e-mail les invitant à participer à l’enquête.

Il importe de noter que la population de l’étude se limitait aux membres MC ayant reçu des soins ambulatoires. Aucune enquête n’a été envoyée aux patients hospitalisés. Les données concernent uniquement les consultations au cabinet privé du spécialiste ou les consultations ambulatoires à l’hôpital. Elles ne concernent donc pas les consultations chez les généralistes, les kinésithérapeutes, les dentistes, etc.

La simplicité et la clarté de l’enquête avaient toute leur importance pour obtenir des données fiables. L’enquête portait de ce fait systématiquement sur une consultation chez un spécialiste. Si plusieurs consultations ambulatoires chez un spécialiste apparaissaient sur un même extrait de compte électronique, seule une enquête était envoyée concernant le contact le plus récent. Si un patient avait consulté plusieurs spécialistes le même jour, un spécialiste était retenu au hasard.

2.1 Le formulaire d’enquête

L’enquête comportait trois volets (voir image ci-dessous). Le premier volet était automatiquement complété et précisait le nom du patient, le nom du médecin, la date de consultation, le montant total (honoraires officiels), le montant remboursé par la MC et la quote-part patient (tels que mentionnés sur l’extrait de compte).

Statut de conventionnement

Nombre total despécialistes actifs

Nombre de spécialistesdans les enquêtes

% de spécialistes dansl’enquête

Non-conventionné 4.684 4.347 93%

Conventionné 15.480 6.224 40%

Partiellement conventionné 3.269 1.280 39%

33MC-Informations 254 • décembre 2013

Tableau 1: Comparaison entre le nombre de spécialistes actifs en Belgique et dans les enquêtes selon le statut de conventionnement

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Chez les spécialistes conventionnés

Parmi toutes les consultations de l’enquête visant des spécialistes conventionnés, 23,26 % ont été surfacturées (arrondi de 0,5 euro toléré) . À l’inverse, parmi les spécialistes conventionnés, dans 76,74 % des consultations, aucun supplément de plus de 0,5 euro n’a été porté en compte.

5

3. Analyse

3.1. Respect des tarifs de la convention

Il ressort de l’enquête qu’aucun supplément n’est demandé dans plus de la moitié des consultations. Lorsqu’un supplément est porté en compte, il s’agit dans la plupart des cas de suppléments inférieurs à un euro. Pour tenir compte des arrondis des tarifs officiels, le pourcentage de consultations qui ne dérogent pas aux tarifs officiels est calculé selon 3 niveaux d’arrondis  : pas d’arrondi, un arrondi vers le haut jusqu’à 0,5 euro et un arrondi vers le haut jusqu’à un euro.

Supposons que le tarif officiel d’une prestation soit de 21,63 euros et que le spécialiste demande 22 euros, 0,37 euros de

trop ont au final été demandés. Si l’on tient toutefois compte d’un arrondi de €0,50 vers le haut, les 22 euros demandés seront considérés comme corrects.

Attention, un arrondi d’un euro vers le haut ne signifie pas en soi qu’un euro de plus est demandé.

Les personnes ayant l’impression d’avoir trop payé ont plus tendance à répondre à ce type d’enquête. Dès lors, on peut s’attendre à ce que les pourcentages mentionnés ci-dessous soient en réalité moins importants.

34 MC-Informations 254 • décembre 2013

Tableau 2: Pourcentage d’enquêtes concernant des consultations chez des spécialistes conventionnés où le tarif de la convention a été respecté/un supplément a été porté en compte, par type d’arrondi

Type d’arrondi (euro) Respect du tarif de la convention Supplément porté en compte

Tarif officiel 72,97% 27,03%

Arrondi de max. 0,5 76,74% 23,26%

Arrondi de max. 1 78,15% 21,85%

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6

Chez les spécialistes non-conventionnés

Chez les spécialistes partiellement conventionnés

Parmi toutes les consultations de l’enquête visant des spécialistes non-conventionnés, 54,89 % ont été surfacturées de plus de 0,5 euro. À l’inverse, dans 45,11 % des consultations de l’enquête, aucun supplément de plus de 0,5 euro n’a été demandé. Ce dernier constat est plutôt frappant sachant que les spécialistes non-conventionnés sont libres de facturer des suppléments.

Parmi toutes les consultations de l’enquête visant des spécialistes partiellement conventionnés, 43,47 % ont attesté plus qu’un arrondi de 0,5 euro. Inversement, aucun supplément de plus de 0,5 euro n’a été demandé dans 56,53  % des consultations de l’enquête chez des spécialistes partiellement conventionnés.

Les médecins partiellement conventionnés sont tenu de communiquer à l’INAMI les heures durant lesquelles ils sont ou ne sont pas conventionnés. Le statut de conventionnement du médecin dépendra par conséquent du moment de la consultation. Sachant que nous ne disposons pas de ces informations, nous considèrerons ce groupe  « à part ».

35MC-Informations 254 • décembre 2013

Tableau 3: Pourcentage d’enquêtes concernant des consultations chez des spécialistes non-conventionnés où le tarif de la convention a été respecté/un supplément a été porté en compte, par type d’arrondi

Tableau 4: Pourcentage d’enquêtes concernant des consultations chez des spécialistes partiellement con-ventionnés où le tarif de la convention a été respecté/un supplément a été porté en compte, par type d’arrondi

Type d’arrondi (euro) Respect du tarif de la convention Supplément porté en compte

Tarif officiel 44,34% 55,66%

Arrondi de max. 0,5 45,11% 54,89%

Arrondi de max. 1 45,70% 54,30%

Type d’arrondi (euro) Respect du tarif de la convention Supplément porté en compte

Tarif officiel 54,55% 45,45%

Arrondi de max. 0,5 56,53% 43,47%

Arrondi de max. 1 57,56% 42,44%

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3.2. Montant des suppléments

Dans cette partie, nous considérons comme supplément tout dépassement du tarif. Étant donné que nous allons considérer des médecins de différentes spécialisations et qu’à chaque spécialisation est associé un nombre conséquent de prestations, elles-mêmes assorties de tarifs différents, il importe – en plus de la moyenne des suppléments – de considérer également leur répartition.

Dans plus de la moitié des consultations de l’enquête, aucun supplément n’est demandé, qu’importe le statut de conventionnement du spécialiste (la médiane est nulle dans la première ligne du Tableau 5). La médiane est uniquement supérieure à 0 pour les spécialistes non-conventionnés. Le Tableau 6 suit la même tendance, mais uniquement pour les consultations où des suppléments ont été portés en compte.

Tableau 5: Moyenne et répartition des suppléments, selon le statut de conventionnement (en euros)

Enquêtes concernantNombre de

consultationsMoyenne P5 P25 Médiane P75 P95

tous les spécialistes 154.505 5,6 0,0 0,0 0,0 7,8 24,7

spécialistes non-conventionnés

91.391 7,4 0,0 0,0 2,9 10,9 26,4

spécialistes conventionnés

49.888 2,3 0,0 0,0 0,0 0,3 15,0

spécialistes partiellementconventionnés

13.225 5,8 0,0 0,0 0,0 7,8 26,3

Si des suppléments sont portés en compte, leurs montants varient selon le statut de conventionnement (Tableau 6). Les spécialistes non-conventionnés facturent - comme escompté - les suppléments les plus élevés, les suppléments les moins élevés sont réclamés par les spécialistes conventionnés. Dans la moitié des enquêtes où des suppléments ont été portés en compte par des spécialistes non-conventionnés, le supplément est d’au moins 9,8 euros. Chez les spécialistes conventionnés, il s’élève à 5,5 euros. Les spécialistes partiellement conventionnés se situent comme toujours entre les deux.

36 MC-Informations 254 • décembre 2013

Tableau 6: Moyenne et répartition des suppléments, si des suppléments ont été portés en compte, selon le statut de conventionnement

Enquêtes concernantNombre de

consultationsMoyenne P5 P25 Médiane P75 P95

tous les spécialistes 70.361 12,6 0,7 4,7 8,9 15,9 34,8

spécialistes non-conventionnés

50.866 13,5 1,4 5,9 9,8 16,3 35,5

spécialistes conventionnés

13.484 9,0 0,1 1,3 5,5 11,3 29,7

spécialistes partiellementconventionnés

6.011 12,8 0,7 4,4 8,8 16,3 39,3

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Tableau 7: Résumé par spécialisation

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Spécialisation

Taux

de

conv

entio

n-ne

men

t en

Bel

giqu

e

Spécialistes conventionnés Spécialistes non conventionnés

Nom

bre

d’en

quêt

es re

lativ

es à

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co

nsul

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resp

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Nom

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d’en

quêt

es re

lativ

es à

des

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nsul

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Supp

lém

ent m

oyen

en

Supp

lém

ent m

édia

n en

Psychiatrie 79% 5.510 17,51% 11,78% 0,53 0 1.717 6,55 0

Pédiatrie 80% 4.470 19,75% 13,65% 0,72 0 1.181 3,46 0

Cardiologie 67% 4.447 38,05% 34,99% 3,33 0 2.971 7,74 0

Ophtalmologie 31% 4.250 25,18% 18,21% 1,26 0 20.295 5,59 1,13

Chirurgie orthopédique 42% 3.627 32,95% 31,54% 3,4 0 12.532 7,71 5,85

Médecine interne 87% 3.483 15,71% 12,03% 1,7 0 944 5,84 0

Otorhinolaryngologie 45% 2.983 35,00% 31,78% 2,3 0 4.845 5,68 3,33

Gastro-entérologie 67% 2.512 29,42% 28,03% 3,3 0 1.719 6,82 0

Gynécologie et obstétrique 31% 2.488 49,84% 48,83% 5,21 0 18.276 10,38 8,33

Chirurgie 69% 2.223 27,71% 25,06% 1,94 0 3.322 8,69 0

Neurologie 76% 2.206 18,72% 14,42% 1,36 0 746 4,03 0

Pneumologie 82% 1.966 22,43% 19,58% 2,82 0 460 7,57 2,55

Médecine physique et revalidation 61% 1.754 38,83% 35,29% 3,95 0 3.609 9,4 4

Dermatovénérologie 20% 1.371 25,60% 19,48% 2,21 0 15.221 5,82 1,93

Urologie 47% 1.345 32,27% 31,23% 2,86 0 3.250 8,47 5,85

Rhumatologie 53% 1.285 22,41% 18,21% 1,86 0 1.776 5,54 0

Anesthésie-réanimation 86% 696 20,12% 18,53% 2,28 0 319 11,06 0

Oncologie médicale 82% 615 10,41% 5,37% 0,47 0 167 4,37 0

Neurochirurgie 56% 548 30,84% 29,38% 3,65 0 1.354 6,92 0

Stomatologie 48% 430 25,12% 24,42% 6,29 0 1.205 8,91 0

Radiodiagnostic 60% 401 33,42% 30,18% 5,45 0 6.449 8,71 4,54

Neuropsychiatrie 77% 338 20,12% 12,43% 0,8 0 459 6,96 0

Radiothérapie 84% 288 11,81% 11,11% 0,85 0 68 3,47 0

Médecine nucléaire 89% 286 31,82% 30,77% 6,07 0 120 18,99 3,33

Gériatrie 96% 133 20,30% 19,55% 1,34 0 11 1,5 0

Chirurgie plastique 28% 92 16,30% 15,22% 3,48 0 1.163 9,67 0

Biologie clinique 92% 87 26,44% 25,29% 4,3 0 435 6,32 0

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3.3. Suppléments par spécialisation

Sur base du tableau 7, nous pouvons analyser la situation de chaque spécialisation sur base individuelle. Une brève description de la signification des principales colonnes du tableau s’avère nécessaire pour une interprétation correcte. Le taux de conventionnement reflète dans quelle mesure les médecins qui exercent cette spécialisation sont conventionnés. Le nombre de consultations chez des spécialistes conven-tionnés ou non-conventionnés dans l’enquête permet de voir dans quelle mesure les colonnes à droite de cette colonne sont étayées par suffisamment d’observations. La colonne « % de consultations où la convention n’est pas respectée (sans arrondi)  » donne le pourcentage de consultations qui ont été surfacturées par des médecins conventionnés qui n’ont donc pas respecté les tarifs de la convention, chaque centime d’euro étant considéré comme supplément. La colonne « % de consultations où la convention n’est pas respectée (arrondi à 0,5 euro) » présente la même chose, mais pour à un supplément supérieur à 0,5 euro. Il s’agit en l’occurrence du nombre de consultations où la convention n’a pas été respectée et non pas du pourcentage de médecins qui ne respectent pas les tarifs de la convention. Les colonnes «  supplément moyen  » et «  supplément médian  » donnent un aperçu du supplément moyen et de la médiane pour toutes les consultations de l’enquête chez des médecins conventionnés et non-conventionnés de différentes spécialisations. Il est évident que si tous les médecins conventionnés d’une spécialisation donnée facturaient les tarifs officiels, un zéro apparaîtrait dans les colonnes « supplément moyen » et « supplément médian ».

Quatre groupes peuvent être identifiés à partir du tableau 7.

Gynécologues : Le taux de conventionnement (31%) est aussi bas que le taux de consultations chez des gynécologues conventionnés respectant le tarif de la convention (51%). En outre, c’est chez les gynécologues que les suppléments moyens sont les plus élevés. Cette spécialisation présente un profil particulier.

Ophtalmologues et dermatologues : Le taux de conventionnement de ces spécialisations est particulièrement bas (respectivement 31  % et 20  %), tandis que la convention est bien respectée (respectivement 75 % et 74 %). Le principal problème réside donc dans le faible taux de conventionnement.

Psychiatres, pédiatres, spécialistes en médecine interne, pneumologues et neurologues : Ces spécialistes sont majoritairement conventionnés. Sur toutes les consultations chez ces spécialistes conventionnés, le tarif de la convention a été suivi dans au moins 81  % des cas. Sur base des résultats de notre enquête, nous pouvons conclure que le patient qui consulte ces spécialistes a le moins de chance de payer des suppléments.

Cardiologues, orthopédistes, ORL, urologues et spécialistes en médecine physique et revalidation : Le taux de conventionnement de ces spécialisations pourrait être meilleur. En outre, 31  % des consultations chez des médecins conventionnés de ces spécialisations ont été facturées à un tarif supérieur au tarif de la convention.

Les autres spécialisations ont des profils moins spécifiques.

3.4. Connaissances à propos de la convention

La deuxième question de l’enquête portait sur le statut de conventionnement du spécialiste traitant. Chaque répondant pouvait compléter jusqu’à 4 fois l’enquête. Nous avons décidé de ne retenir pour ce volet de l’analyse que la première enquête complétée de chaque répondant. Il est en effet possible qu’un répondant, après avoir complété l’enquête, s’informe et en sache par conséquent davantage sur le statut de conventionnement de son spécialiste lors de l’enquête suivante. Les enquêtes précédemment laissées de côté parce que le montant effectivement payé n’était pas complété ont été réintégrées dans ce volet de l’analyse.

62,33  % des répondants ont indiqué ne pas savoir si leur spécialiste était conventionné. Et 18,39 % ont en outre précisé qu’ils ne savaient pas ce que ‘conventionné’ signifie.

En comparant le nombre de répondants pensant que leur spécialiste est conventionné avec le statut de conventionnement réel de leur spécialiste, nous pouvons calculer dans quelle mesure les répondants, qui pensaient connaître le statut de conventionnement de leur spécialiste, sont dans le bon. Nous avons ainsi pu constater que 34,32  % des répondants qui pensaient que leur spécialiste était conventionné se sont trompés.

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4. Conclusion

4.1 Que ressort-il de l’étude ?

Il ressort de cette étude que 77 % des consultations chez des spécialistes conventionnés sont facturées suivant les tarifs de la convention et que ce chiffre atteint tout de même 45 % chez les spécialistes non-conventionnés. Cette étude a toutefois révélé l’existence de certains problèmes. Des suppléments ont en effet été demandés dans 23 % des consultations chez des spécialistes conventionnés et 55  % des consultations chez des spécialistes non-conventionnés de notre enquête. En outre, le taux de conventionnement de certaines spécialités est particulièrement faible et il s’avère donc très compliqué pour le patient de trouver un médecin conventionné.

Il ressort de l’analyse des suppléments payés qu’un patient paie en moyenne 5 euros de moins lorsqu’il consulte un spécialiste conventionné. L’enquête révèle également que la plupart des répondants ne savent pas si leur spécialiste est conventionné, voire même - pour certains - ce que ‘conventionné’ veut dire.

Quatre groupes sont clairement distinguables parmi les spé-cialisations:

• Haut niveau de conventionnement et respect élevé de la convention: psychiatres, pédiatres, spécialistes en médecine interne, pneumologues et neurologues

• Faible niveau de conventionnement et respect élevé de la convention: ophtalmologues et dermatologues

• Taux de conventionnement relativement faible et respect relativement faible de la convention: cardiologues, ortho-pédistes, ORL, urologues et spécialistes en médecine physique et revalidation

• Très faible taux de conventionnement et très faible respect de la convention: gynécologues

Les autres spécialisations ont des profils moins spécifiques.

4.2 Quelles solutions la MC propose-t-elle ?

Il est de notre devoir, en tant que mutualité, de garantir l’accessibilité des soins. Il nous revient par conséquent également, en tant que cosignataire de l’Accord, de vérifier si ce dernier est bel et bien respecté. D’où notre volonté d’avancer les trois objectifs prioritaires suivants, étroitement liés :

• Approche des médecins conventionnés qui attestent des suppléments  : La MC souhaite soumettre le problème des spécialistes conventionnés qui demandent des suppléments aux associations de médecins et définir une approche dans le cadre de la concertation médico-mutualiste.

• Transparence  : Les patients et leurs mutualités doivent être informés du prix réel des soins de santé pour le patient, ce qui signifie que la facture doit préciser les honoraires officiels de chaque prestation, qu’importe le statut de conventionnement du médecin traitant et le montant effectivement payé par le patient. Cela permettrait, d’une part, aux patients de savoir pour quoi ils paient et d’autre part, à la mutualité de vérifier le respect de la convention. Parallèlement à la mutualité, le médecin a lui aussi pour tâche d’informer ses patients à propos de son statut de conventionnement et de ses tarifs. Il le fait malheureusement trop rarement.

• Améliorer le taux de conventionnement  : Le conventionne-ment doit être rendu plus attrayant par l’instauration d’incitants. Le patient n’a pratiquement pas le choix chez certains spécialistes comme les dermatologues, les ophtalmologues et les gynécologues.