119
RAPPORT DU FEMISE 2005 SUR LE PARTENARIAT EURO-MEDITERRANEEN Analyses et propositions du Forum Euro-Méditerranéen des Instituts Economiques Samir Radwan, Economic Research Forum, Egypte Jean-Louis Reiffers, Institut de la Méditerranée, France Coordonnateurs Ce rapport a été réalisé avec le soutien financier de la Commission des Communautés Européennes. Les opinions exprimées dans ce texte n’engagent que les auteurs et ne reflètent pas l’opinion officielle de la Commission. Février 2006 Institut de la Méditerranée FEMISE CAISSE D EPARGNE PROVENCE - ALPES - CORSE 2005

Analyses et propositions du Forum Euro-Méditerranéen des ... · RAPPORT DU FEMISE 2005 SUR LE ... Sergio ALESSANDRINI Université de Modène Italie Aziz Al KAZAZ Deutches Orient

Embed Size (px)

Citation preview

RAPPORT DU FEMISE 2005 SUR LEPARTENARIAT EURO-MEDITERRANEEN

Analyses et propositions duForum Euro-Méditerranéen des Instituts Economiques

Samir Radwan, Economic Research Forum, EgypteJean-Louis Reiffers, Institut de la Méditerranée, France

Coordonnateurs

Ce rapport a été réalisé avec le soutien financier de la Commission des Communautés Européennes. Les opinions exprimées dans ce texte n’engagent que les auteurs et ne reflètent pas l’opinion officielle de la Commission.

Février 2006

Institut de la Méditerranée

FEMISE

C A I S S E D E PA R G N EPROVENCE - ALPES - CORSE

FEMISE2005

RAPPORT FEMISE 2005 SUR LE PARTENARIAT EURO-MEDITERRANEEN

Samir Radwan, Economic Research Forum, Egypte

Jean-Louis Reiffers, Institut de la Méditerranée, France

Coordonnateurs

Ce rapport a été réalisé avec le soutien financier de la Commission des Communautés Européennes. Les opinions exprimées dans ce texte n’engagent que les auteurs et ne reflètent pas l’opinion officielle de la Commission.

Février 2006

20 0 5

-iii-

Février 2006

RAPPORT FEMISE 2005 SUR LE PARTENARIAT EURO-MEDITERRANEEN

Principaux rédacteurs :

Frédéric Blanc Institut de la Méditerranée, France

Nathalie Grand Institut de la Méditerranée, France

Maryse Louis Economic Research Forum Egypte

Yasmine Fahim Economic Research Forum Egypte

Liste des principales études Femise utilisées pour la rédaction de ce rapport :

FEM 21-31 : «Promoting Competitivness in the Micro and Small Enterprise Sector in MENA», dirigee par Faculty of

Economics and Political Sciences, Cairo University, coord. Alia El-Mahdi, en collaboration avec INSEA (Maroc),

Bogazici University (Turquie), Consultation and Research Institute (Liban) ; décembre 2005

FEM22-02 : «Impact of Liberalization of Trade in Services: Banking, Telecommunications and Maritime Transport

in Egypt, Morocco, Tunisia and Turkey», dirigée par Bilkent University, Center for International Economics,

coord. Sübidey Togan en collaboration avec Faculty of Economics and Political Science, Cairo University.

(Egypte), INSEA (Maroc), Université de Tunis (Tunisie) ; décembre 2005

FEM22-06 : «The Informal Economy Employment Impacts Of Trade Liberalisation And Increased Competition In

Export Markets: The North African Textile, Clothing And Footwear Sector», dirigée par Federico Caffè Centre,

Roskilde Univeristy Denmark, coord. Bruno Amoroso, Andrea Gallina, en collaboration avec CREAD (Algeria),

INSEA (Morocco), University of Sussex (United Kingdom), University of Tunis, Tunisia ; octobre 2005

FEM22-07 : «Integration and enlargement of the European Union, lessons for the Arab region», Center for

European Studies, Faculty of Economics and Political Science, Cairo University, coord. Naglaa El Ehwany,

novembre 2005

FEM22-20 : «Flexibilité du travail et concurrence sur le marché des biens et services : impact sur les conditions de

travail et le développement du secteur informel en Algérie, au Maroc et en Tunisie», dirigée par le ROSES,

université de Paris I, coord. Gérard Duchêne, Boris Najman, en collaboration avec CREAD (Algérie), CREQ

(Maroc) et ISTIS (Tunisie) ; novembre 2005

FEM22-22 : «Identification des effets sur la croissance et l’emploi des mécanismes d’ajustement micro-éconbomique

de l’offre face à l’ouverture», dirigée par le CEFI, université de la Méditerranée, coord. Patricia Augier, Michael

Gasiorek, en collaboration avec INSEA (Maroc), Université de Sussex (Royaume-Uni) ; septembre 2005

FEM22-34 : «Les perspectives de changement sectoriel dans les pays méditerranéens: quels secteurs de croissance

après l’industrie légère?», dirigée par le CEPII, coord. Agnes Chevalier, Jean-Raphael Chaponnière, et Marc

Lautier, en collaboration avec CARE-Université de Rouen (France), CEPN-Université de Paris 13 (France),

ESSEC Tunis (Tunisie), Hebrew University Jerusalem (Israel), Université de Grenade (Espagne) ; juillet 2005

FEM22-36 : «Obstacles to South-South Integration, to trade and to foreign direct investment: the MENA countries

case», dirigée par CATT-Université de Pau, réseau EMMA, coord. Jacques Le Cacheux, en collaboration avec

Université de Grenade ; octobre 2005

FEM22-39 : «South-South Trade Monetary and Financial Integration and the Euro-Mediterranean Partnership: An

Empirical Investigation», dirigée par Institute of Financial Economics, American University of Beirut, Dir.

Simon Neaime ; juin 2005

-iv-

Samir RADWAN Economic Research Forum Egypte

Jean-Louis REIFFERS Institut de la Méditerranée France

Nuhad ABDALLAH Academic Unit for Scientific Research ( AUSR) Syrie

Sergio ALESSANDRINI Université de Modène Italie

Aziz Al KAZAZ Deutches Orient Institut University of Hamburg Allemagne

Bruno AMOROSO Federico Caffe Center Roskilde University Danemark

Slimane BEDRANI CREAD Algérie

Gérard DUCHENE Université de Paris XII France

Mahmoud EL JAFARI Al Quds University of Jerusalem Palestine

Alia EL MAHDI MSA Université-Le Caire Egypte

Michael GASIOREK Sussex University Royaume-Uni

Alejandro LORCA CORRONS Universidad Autonoma de Madrid Espagne

Samir MAKDISI Institute of Financial Economics Am. Univ. in Beirut Liban

Tuomo MELASUO University of Tampere TAPRI Finlande

Jan MICHALEK Department of Economics Université de Varsovie Pologne

Cherif MONDHER ESC Sfax Tunisie

Seyfeddin MUAZ Royal Scientific Society Jordanie

Lahcen OULAHJ Université Mohammed V Maroc

Yilmaz ÖZKAN Center for Mediterranean Studies Turquie

Khalid SEKKAT Université Libre de Bruxelles Belgique

Alfred TOVIAS Leonard Davis Institute of International Relations Israël

Meine Pieter Van DIJK UNESCO-IHE Institute for Water education Hollande

Février 2006

Membres du Steering Committee :

-v-

TABLE DES MATIERES

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.1

I- Les entreprises face à l’ouverture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.51. Les petites entreprises, une nouvelle panacée ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.52. La relation ouverture-emploi du point de vue des entreprises . . . . . . . . . . . . . . . .p.133. Déterminants des comportement : l’informalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.184. Comportements d’ajustements des entreprises et emploi . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.22

II- Des spécialisations sectorielles à ajuster pour modifier la dynamique . . . p.261. Une trajectoire industrielle spécifique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.262. L’impact des stratégies industrielles sur la relation ouverture-emploi . . . . . . . . . . .p.283. Le textile, secteur révélateur des dynamiques industrielles . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.344. Les services, opportunités de relais . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.49

III-L’intégration régionale : l’heure des choix . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.631. l’insertion internationale actuelle des PM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.642. L’intégration européenne, un modèle pour les inititiaves régionales au sud . . . . . . .p.713. Les migrations en Méditerranée : la voie d’une intégration plus profonde . . . . . . . .p.86

Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.98Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.101

Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.105Indicateurs sociaux-économiques des PM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.107Indicateurs macroéconomiques des PM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.108Entrées d’IDE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.109Panorama des échanges . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.110Modélisation de l’impact d’un accord sud-sud . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.111Modélisation de l’impact d’un accord nord-sud . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.112Modélisation de l’impact d’une libéralisation multilatérale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p.113

-vi-

-1-

INTRODUCTION

La Méditerranée, en tant que région, est à nouveau à un moment charnière. Il y a dix ans, le processus de Barcelone créait un cadre novateur de coopération nord-sud, qui jetait également les bases d'une intégration sud-sud et mettait en relief les directions pour créer un espace de paix et de prospérité. L'actuelle tran-sition vers la politique de voisinage crée à son tour opportunités et challenges. C'est dans ce cadre que le Femise a pour rôle d'examiner les résultats obtenus et d'identifier les pré-requis du succès de la politique de voisinage.

Sur le plan des résultats obtenus jus-qu'ici, le rapport du Femise sur les dix ans de Barcelone, réalisé en février 2005, relevait un bilan des 10 premières années du Processus, contrasté sur le plan économique. S’il est vrai que ses résultats ne sont ni à la hauteur des espoirs qui avaient été placés en lui, ni à la hauteur de la modification de dynamique nécessaire dans les PM pour impulser des changements visibles dans le quotidien des agents, le rapport con-cluait sur les faits suivants :

√ deux points positifs sont incon-testables et vont servir de présuppo-sés dans ce rapport. Le premier est qu'une discipline macroéconomique a été acquise, qui permet la préserva-tion des grands équilibres macroécono-

miques, indispensables pour bâtir une nouvelle dynamique dans ces pays. Il est important de souligner que, non seulement cet acquis se mesure dans les chiffres (Cf. Rapport 2005), notam-ment dans les budgets, dans les balan-ces des paiements ou encore au niveau de l'inflation, ce qui préserve l'avenir, donne un certain temps aux PM pour entreprendre les modifications néces-saires et à l'Europe pour imaginer les outils de soutien efficaces, mais, tout aussi important, qu'il est maintenant ancré dans les anticipations des agents, notamment non locaux. Il suffit ainsi de souligner que même parmi les agences les plus conservatrices évaluant tous les pays du Monde sur divers critères, la grande majorité des PM obtient les meilleurs classements en termes de régulation économique.

√ Le second point positif, lui aussi porteur d'espoir sur le futur des accords euro-méditerranéens, est le soutien pres-que indéfectible que la société civile dans l'Euromed apporte au processus. Paradoxalement, même les jugements durs à l'occasion du dixième anniversaire démontrent en fait une sorte de dépit envers un outil prometteur, mais qui tarde à donner des résultats tangibles. C'est bien cela qui doit aujourd'hui constituer une priorité : comment rendre visibles les efforts des deux rives, rendre visibles les actions entreprises dans le cadre des accords d'associations, rendre visibles

Samir Radwan, Economic Research Forum, EgypteJean-Louis Reiffers, Institut de la Méditerranée, France

Coordonnateurs

Février 2006

-2-

les effets positifs des ajustements qui pèsent, bref faire appréhender l'impact du processus par les agents plus que par les agences, dans leur quotidien.

√ A l'inverse, des facteurs internes (élargissement de l'Europe, persistance des conflits régionaux) et des facteurs externes (évolution de l'OMC impliquant une ouverture généralisée qui a dilué les évolutions des PM, ouverture de la Chine, notamment dans le contexte de la fin des accords multi-fibres), facteurs parfois imprévisibles, parfois ignorés, ont pesé lourdement sur la dynamique du processus euro-méditerranéen. Et pour gérer leurs conséquences, la seule stabilité macro-économique ne peut être suffisante. Elle sert d'assise indispensa-ble, mais elle doit être complétée par des éléments qui, eux, donnent des impulsions. Le rapport annuel 2006 du BIT sur les tendances de l'emploi dans le monde insiste d'ailleurs sur le fait que la croissance économique seule ne suffit pas à satisfaire les besoins globaux en emploi.

Le partenariat a été conçu dans l'idée qu'en mêlant la stabilité macro-éco-nomique à une stratégie d'ouverture incarnée dans une zone de libre-échange avec l'Europe, les PM auraient dispo-sé des fondamentaux sur lesquels se seraient greffés automatiquement des effets induits, comme une amélioration de la compétitivité des tissus productifs, une évolution de la spécialisation sec-torielle, une amélioration des relations régionales au sein des rives sud, effets à même de placer les PM dans une dyna-mique plus vertueuse, ce que n'auraient pas manquer de relever la communauté internationale, modifiant alors ses anti-cipations pour la région et, de ce fait,

amplifiant le mouvement. Force est de constater que l'on a surestimé ce méca-nisme, la plupart des relations automati-ques prévues ayant fort peu progressé.

Le présent rapport se situe dans le pro-longement de ce constat. En premier lieu, il prend pour acquis la stabilisa-tion macro-économique sans y revenir, d'autant que l'année 2005 est marquée par le phénomène conjoncturel de l'éner-gie, rendant encore trop rapides d'éven-tuelles conclusions. En même temps, il se situe dans une perspective d'insuffi-sance de l'équilibre atteint actuellement, puisque le problème de l'emploi ne se résout pas à une vitesse satisfaisante.

L'idée est donc d'identifier dans les con-ditions initiales et actuelles que rencon-trent les agents, les raisons spécifiques qui ont conduit à l'insuffisance de la dynamique promue par les accords d'as-sociation, en tentant de mettre en relief ce qui pourrait permettre de modifier les sentiers de croissance et les for-mes d'ajustement social. Cette question avaient été posée par le Femise dans son dernier programme de recherche, notamment en s'interrogeant sur les capacités de l'offre des PM à répondre aux sollicitations issues de la stratégie d'ouverture, c'est-à-dire à maximiser les effets induits escomptés dans la mise en place du processus.

Dans le présent rapport, sur la base de plusieurs travaux de recherche, l'hypo-thèse est de placer les sources d'une nouvelle dynamique dans un renouvel-lement du comportement des agents, en premier lieu dans le tissu des entreprises locales car ce sont elles qui vont offrir les emplois absolument nécessaires à l'équi-libre de la région. Toutefois, ces entre-

-3-

prises évoluent dans un cadre sectoriel historique, lent à se modifier et qui des-sine un certain nombre de contraintes. Il s'agit donc dans un deuxième temps de cerner les contraintes issues de la structure sectorielle de ces entreprises, notamment en termes de spécialisation, en cherchant les opportunités qui pour-raient impulser un cercle vertueux. Cette impulsion peut adroitement être épau-lée dans le cadre d'accords régionaux, c'est de fait l'idée même du partenariat euro-méditerranéen. Dès lors se pose la question du type d'association nord-sud et sud-sud qui sera cohérente tant avec les objectifs initiaux de 1995 qu'avec les évolutions géo-politiques actuelles.

Dans une première partie, le rapport utilise plusieurs enquêtes entreprises réalisées par des équipes du réseau, ainsi que des traitements spécifiques d'enquêtes entreprises nationales, pour mieux appréhendés les comportements des firmes et les conséquences pour elles de l'ouverture, notamment en ter-mes d'emplois.

Les tissus locaux restent extraordinai-rement dominés par les TPE, qui pour-voient à l'essentiel de l'emploi privé. Dans leurs comportements, dans leurs contraintes et leurs perspectives réside la dynamique de l'emploi, mais égale-ment les marges de manœuvre budgé-taires des Etats par la fiscalité, rendant la compréhension des comportements indispensable, en particulier sur le plan de la distinction informel/formel qui apparaît, dans les recherches Femise, bien plus floue que l'on ne pouvait le penser.

La deuxième partie propose une analyse sectorielle de l'économie des PM, avec

une importance donnée au secteur du textile. Il est en effet apparu clairement que l'amélioration de l'offre, indispensa-ble face aux contraintes d'emplois que connaissent les PM, ne peut pas décou-ler automatiquement de la seule stra-tégie d'ouverture. Parmi les principales conditions de la compétitivité et de la pérennité des entreprises se trouve la spécialisation, le métier et sa dynamique au niveau européen et mondial.

Sur le plan de la région euro-méditerra-néenne, la situation actuelle des PM doit évidemment beaucoup au fait que les deux secteurs de base de l'économie de ces pays (en 1995 comme aujourd'hui) sont d'une part l'agriculture, longtemps en marge des accords et seulement sur les agendas aujourd'hui, et d'autre part, le textile-habillement, proprement bouleversé par la fin des accords multi-fibres et l'ouverture de la Chine.

Se demander comment enclencher une dynamique plus en phase avec les besoins des PM, c'est forcément pro-gresser sur le plan agricole, dossier déjà traité par le Femise en 2003 et qui ne sera pas l'objet de ce rapport. C'est aussi se poser la question de l'après textile, ou du moins de l'après 2005. Les choix de spécialisation, qu'ils soient dictés par une adaptation forcée aux changements des données de la concurrence au niveau national ou international ou par des stratégies de politique industrielle, ne sont pas neutres du point de vue des résultats en termes d'emploi et de croissance d'un pays.

Comme l'a déjà souligné le Femise, il est important pour les PM de chercher à se positionner sur les marchés exter-

-4-

nes les plus dynamiques, ajustement qui reste à accomplir pour la plupart d'entre eux.

Mais la compétitivité des entreprises exportatrices des PM ne peut être une fin en soi étant donné le problème d'emploi auquel ces pays doivent faire face. En plus de se situer dans des secteurs générateurs d'une croissance économique rapide, les spécialisations des PM doivent permettre d'absorber suffisamment d'emploi pour au moins maintenir les niveaux de chômage actuels.

L'adaptation des tissus industriels aux changements des données de la con-currence au niveau domestique et international peut découler de politi-ques industrielles volontaristes ou de réformes sectorielles. Cette transition engendre un déplacement des facteurs de production, engendrant ici destruc-tion d'emploi et là création d'emploi. Pour les PM, la question du bilan final est sans doute la plus importante. On observera notamment qu'au-delà des secteurs industriels, certains services vont revêtir une importance extrême et que leur libéralisation est à même de modifier certains processus actuels.

Dans la troisième partie, la question abordée est celle de l'intégration régio-nale, tant sur le plan des potentialités que recèle une intégration régionale au sud, que de la forme que peuvent prendre l'intégration euro-méditerra-néenne et l'intégration sud.

Sur un plan strictement économique, il serait illusoire de croire que l'élar-gissement européen, mais surtout les conflits régionaux sur les rives sud

sont sans effet sur les anticipations des agents et, par conséquent, sur les flux économiques. Avec la mise en place de la politique de nouveau voisin, cette question de la forme de l'intégration va se poser de manière aiguë. Doit-elle être unilatérale, multilatérale ou prendre la forme d'accords régionaux entre pays de même niveau de déve-loppement ? Chacune de ces options s'exprime de manière spécifique. Une intégration Sud-Sud signifierait des réallocations de facteurs spécifiques qui pourraient être sensiblement diffé-rentes de celles qui seraient générées par une intégration avec l'Europe par exemple. Etant donnée la situation socio-économique des PM, il faut éviter que les PM supportent plusieurs fois les mêmes coûts d'ajustement, ce qui doit entrainer une profonde réflexion sur la cohérence d'ensemble des divers accords.

Et puis, il y a la dimension symbolique, bien trop sous-estimée : la pérennité d'une région euro-méditerranéenne, on l'a dit en introduction, ne peut se concevoir sans le soutien de la société civile. Ce même soutien de la société civile qui sera le plus grand moteur de la vitesse de transition, une fois les bonnes directions (enfin) déterminées. C'est pour cela qu'il est indispensable que les accords d'association, que le partenariat, que la politique de voisi-nage pénètre fermement le quotidien des agents. Là, non seulement la politique européenne, mais au moins autant la politique régionale des PM seront déterminantes.

Enfin, le rapport annuel 2005 s'in-téresse aux aspects migratoires. Le partenariat a cherché à créer une zone

-5-

équilibrée de paix et de prospérité, c'est-à-dire d'établir de jure l'inter-dépendance qui lie les deux rives de facto. Mais, le déséquilibre entre pos-sibilité de circulation de flux financiers, des flux de marchandises et des flux d'hommes, ces derniers étant systéma-tiquement plus contraints, ne peut que générer des frictions, des réallocations économiques non optimale et mettre en avant le caractère partiel de l'outil actuel. On pourra notamment penser que pour faire pénétrer les accords d'association dans le quotidien, pour conquérir l'opinion publique au sud et disposer d'un appui permettant l'accé-lération des réformes, une évolution dans les possibilités de circulation des hommes va être très rapidement nécessaire.

De plus, sur un plan strictement éco-nomique, il faut bien convenir que de toute façon il faudra du temps pour que les anticipations de la Communauté internationale se modifient en profon-deur quant aux contextes à l'œuvre dans les PM, ce qui continuera à peser sur les flux d'investissement, d'autant qu'un désavantage subjectif persistera entre eux et les pays de l'Est (parce qu'un projet politique connu y œuvre) ou la Chine (parce que son poids fait naître des perspectives économiques sans équivalent). Or, les besoins finan-ciers d'investissements, sur des petits projets, sont importants, comme on va le voir dans la suite. De ce point de vue, la migration est créatrice d'une ressource, celle des fonds rapatriés par les travailleurs émigrés (principa-lement en Europe) dont tout laisse à penser qu'elle peut constituer un levier important susceptible de rehausser le sentier de croissance.

I- Les entreprises face à l’ouverture

1. Les petites entreprises, une nou-velle panacée ?

Etudier les performances des MPE (Micro et petites entreprises) n'est pas une tâche facile, qui requière (au moins) de relever deux défis : (i) un défi théorique qui comprend des problèmes de défini-tion, de cadre conceptuel, etc., et (ii) les défis pratiques, puisqu'il s'agit d'analyser plus de 90% des entreprises qui existent dans un pays, dont la plupart sont non seulement « informelles », mais aussi si profondément intégrées dans la société qu'il est difficile de les localiser physi-quement.

Le besoin impératif de placer les PM sur des sentiers de croissance plus élevés a rendu nécessaire la mise en oeuvre de nouvelles sources qui dynamiseraient ces économies. Étant donné le poids des MPE dans l'activité économique, elles pourraient représenter cette « puissance endogène » qui, moyennant un soutien adapté, pourrait contribuer significati-vement à une croissance durable. Les MPE semblent ainsi être en mesure de contribuer à trouver une solution au problème de chômage, de constituer un canal transformant l'épargne privée en investissement et de devenir une source pour augmenter la valeur ajoutée des économies.

Actuellement, les MPE sont considérées comme un outil informel de stratégie de survie, non durable et d'une faible pro-ductivité. C'est pour remettre en cause cette vision qu'il est apparu nécessaire d'étudier ce secteur. Malgré les nombreu-ses difficultés que cela impliquait, une telle initiative a été considérée comme

-6-

susceptible de renforcer la compréhen-sion du secteur et de son potentiel, pour permettre la mise en œuvre de politi-ques ciblées et efficaces. C'est pourquoi, le FEMISE (en coopération avec plusieurs autres bailleurs internationaux) a finan-cé une étude importante et novatrice sur les moyens de promouvoir la compéti-tivité des MPE dans quatre partenaires méditerranéens : l'Egypte, le Liban, le Maroc et la Turquie (FEM21-31). L'étude est basée sur une enquête de terrain auprès de 5 000 micro et petites entre-prises opérant dans chacun de ces pays (3 000 dans le cas du Liban), qui vise à comprendre leurs caractéristiques, les obstacles grévant leurs performances, leurs perspectives et les déterminants de leur succès.

Les principales enquêtes ont été con-duites dans les quatre pays entre 2001 (la Turquie), 2002 (le Maroc) et 2003 (l'Egypte et le Liban), puis ont été sui-vies par une enquête complémentaire (sauf dans le cas du Liban). L'enquête était basée sur des questionnaires por-tant sur l'entreprise, l'entrepreneur et au niveau du ménage. La base de données de ces enquêtes permettra la meilleure évaluation des performances des MPE et la meilleure compréhension de leurs besoins.

Le profil des MPE dans les PM

Le secteur des MPE, défini ici comme des entreprises formelles et informelles employant de 1 à 49 personnes, consti-tue l'épine dorsale de l'activité dans les PM. Ce secteur représente plus de 90% des entreprises, employant 60-70% des effectifs dans ces pays et contribuant entre 30 et 50% de la valeur ajoutée des économies.

En Egypte, 97% des entreprises (for-melles et informelles) sont des MPE (employant de 1 à 49 personnes), dont 81% environ d'informelles[1]. On doit aussi remarquer que les femmes tra-vaillant informellement ne représentent seulement 14% des effectifs non décla-rés, ce qui est une part relativement modeste dans la mesure où les femmes constituent 50% de la population[2]. Les MPE égyptiennes représentent 62% des emplois formels et informels totaux (88% des emplois informels contre 23% des formels). En Turquie, ce secteur représente 99,4% du nombre total d'en-treprises, dont la plupart sont formelles depuis que l'enregistrement de la société est une obligation à la pratique de certai-nes activités. Le secteur représente 73% des emplois non-agricoles et 64,8% de valeur ajoutée totale. Au Liban, 96% d'entreprises sont micro (88%) ou peti-tes (8%) représentant plus de 50% d'emploi total. Au Maroc, les MPE repré-sentent 99,6% du total des entreprises et plus de 70% d'emploi total.

Les déterminants de succès des MPE

Le succès des MPE ne dépend pas seu-lement des bonnes performances de l'entreprise ou de l'éducation et de la formation des entrepreneurs. Ce secteur ne fonctionne pas en vase clos : l'envi-ronnement macro-économique, le cadre d'affaires ont un impact significatif sur leurs performances. Leurs perspectives, comme en témoignent les enquêtes égyptiennes et turques, ont été extrê-mement affectées par la récession que les deux pays ont subie. On pourrait penser qu'il ne s'agit que d'un phéno-mène transitoire non généralisable, mais le fait que ce secteur n'atteint pas son

-7-

potentiel de croissance perdure. Ainsi, tant la performance de la firme que l'en-vironnement macro-économique dans lequel elle évolue constituent les fac-teurs principaux de succès ou d'échec.

De ce fait, le programme de recherche a adopté une combinaison d'approches quantitatives et qualitatives de la col-lecte de données pour capturer à la fois le contexte et la dynamique à l'échelle nationale tout en permettant une appro-che comparative à l'échelle de la région entière.

La section venante présente les princi-paux déterminants de succès de ces MPE tels qu'identifiés par les entrepreneurs eux-mêmes en Egypte, au Liban, au Maroc et en Turquie.

1. Le fait de constituer une entreprise formelle[3] représente un des princi-paux déterminants de succès des MPE. Le degré d'informalité varie selon la définition retenue et les règlements. Certains pays comme la Turquie et le Liban, exigent l'enregistrement pour que l'entreprise exerce certaines acti-vités. Cependant, en Egypte, où l'en-registrement n'est pas une condition, on observe que 80% des MPE sont informels. Le fait d'évoluer dans la sphère formelle apporte de nombreux avantages comme un meilleur accès à l'appui financier et administratif, mais la plupart des entrepreneurs trou-vent les procédures d'enregistrement très compliquées, consommatrices de temps et coûteuses, relativement aux avantages qu'ils pensent en tirer.

2. Le regroupement de MPE dans des Clusters pourrait, généralement, four-nir un environnement incitatif, qui

accroît l'efficacité des entreprises du fait de l'existence d'entités complé-mentaires en termes de production. Evoluer au sein d'un cluster permet l'échange de connaissance, d'expé-rience et permet des interconnexions professionnelles entre les sociétés fonctionnant dans la même commu-nauté, qui accroissent la performance de la société par augmentation du capital social. En Egypte, l'apparte-nance à un cluster est apparu comme le premier déterminant prioritaire de succès. Au Liban, à l'inverse, les MPE qui n'appartiennent pas à un cluster réalisent des meilleures performan-ces. C'est en raison de la nature des clusters au Liban, qui consiste prin-cipalement en entreprises évoluant dans la même branche. La consé-quence est un environnement de con-currence qui limite les profits et ainsi les performances.

3. Toutes les études sur les MPE ont montré que le fait que l'entrepre-neur soit un homme coïncide avec une meilleure performance de l'en-treprise. Indépendamment de leur niveau éducation, de formation et d'expérience (s'il y en a), les entre-preneurs de sexe féminin souffrent d'une position désavantagée relative-ment aux entrepreneurs masculins : les femmes font face à plus de diffi-cultés sur le marché, dans l'éducation et l'obtention de formation ainsi que dans l'accès à des moyens financiers et autres services d'appui. De plus, le rôle de la femme au sein du ménage limite sa capacité à consacrer plus de temps à son affaire.

4. L'existence d'un environnement d'af-faires incitatif qui assure de bonnes

-8-

conditions de travail, la disponibilité d'une main d'oeuvre spécialisée, l'ac-cès aux services financiers et aux autres services professionnels, le fait de pouvoir disposer d'incitations fis-cales et une concurrence limitée de la part de sociétés plus importantes sont considérés comme essentiels pour assurer le succès de l'entreprise.

5. Le succès des MPE dépend du niveau

d'éducation des entrepreneurs, de leur formation et/ou de l'expérience acquise. Il a été trouvé au Maroc, au Liban et en Turquie que les entrepri-ses les plus performantes sont celles qui appartiennent à des entrepreneurs qui ont reçu plus de 10 ans d'éduca-tion. Toutefois, en Egypte, le nombre d'années d'éducation ne semble avoir aucun effet sur les performances de l'entreprise.

6. La formation professionnelle ou tech-nique formelle acquise par l'entrepre-neur apparaît aussi importante que le niveau d'instruction. En Turquie, seulement 10% des entrepreneurs avaient suivi une formation techni-que ou professionnelle formelle. En Egypte, ce pourcentage n'est que de 3,4% pour les entrepreneurs mâles et 2,9% pour les femmes. Au Liban, ces pourcentages sont de 9% et 15%

respectivement. Dans ce pays, ce qui semble importer n'est pas la forma-tion professionnelle (qui affichait un impact négatif sur la performance de la société), mais les entrepreneurs disposant d'une expérience d'appren-tissage semblent en faire profiter leurs entreprises qui affichent de meilleurs performances. Ceci est vrai dans tous les pays de l'étude, et se justifie par le fait que ce type de formation est spécialisé et donc particulièrement approprié à l'activité de la société.

7. L'accès aux ressources financières constitue un facteur déterminant du succès et de la pérennité des MPE. Comme indiqué par les entrepre-neurs, il faut le considérer comme l'un des principaux problèmes aux-quels ils font face : les institutions financières ne sont pas aptes ou enclines à prêter aux petites entre-prises en raison du risque élevé des prêts à de petits entrepreneurs incon-nus et du coût de transactions élevé lié à de petits prêts. En conséquence, l'enquête conduite dans les quatre pays a montré qu'un très petit pour-centage d'entrepreneurs disposent de prêts formels pour financer leur affaire, la plupart recourant à leurs économies personnelles ou d'autres sources de finances.

Tableau X1 : Les sources de financements des micro et petites entreprises

Source de finances Egypte Liban Turquie

Succession 21,0 18,0 5,3

Epargne personnelle 67,1 60,0 78,9

Liquidation d’actifs 3,6 3,8 1,9

Prêts formels 3,5 4,2 0,6

Prêts informels 2,6 2,5 8,8

Versements propres 0,5 5,5 0,1

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM21-31

-9-

8. Un autre facteur important de suc-cès est la disponibilité d'infrastruc-tures adéquates (comme des routes, le transport, l'électricité, l'eau, etc), ainsi que l'accès à du matériel et à la technologie avancée (particulière-ment pour les entreprises travaillant dans le secteur industriel), ce qui augmenterait la productivité et amé-liorerait la durabilité de croissance.

Évaluation des performances : le cas des MPE en Egypte

Pour mettre en évidence la dynami-que de croissance de MPE en Egypte, un Index de Croissance a été cons-truit utilisant les données de l'enquê-te principale (2003), où l'on dispose des données de performance sur deux points temporels : l'année de l'enquête (2003) et un an plus tôt (2002).

L'Index de Croissance[4] est composé de quatre variables en liaison avec la croissance : (i) valeur du capital investi; (ii) espace d'entreprise (iii) nombre d'employés; et (iv) valeur de matières premières utilisées. L'Index a été calculé en se fondant sur le taux de variation moyen de ces varia-bles entre la période de l'enquête et l'année précédente. Les variables de croissance, permettent de souligner quelques aspects sur la dynamique de cette période.

En moyenne, le taux de croissance expérimenté par les MPE n'a pas excé-dé 2,2% entre 2002 et 2003. L'index

de croissance a montré que plus de la moitié (52,2%) des MPE n'a connu de croissance cette année là. La plupart des MPE restantes (28,5%) ont connu une détérioration de l'activité et seu-lement 19% ont enregistré une crois-sance modérée. Pour 17%, la situation s'est détériorée de plus de cinq points de pourcentage, tandis que seulement 12% ont connu une croissance de plus de cinq points de pourcentage.

Testant la relation entre la valeur de l'index de croissance et certaines des caractéristiques des MPE, on peut observer que :

√ En termes d'activité économique, les entreprises travaillant dans le sec-teur d'industrie ont réalisé la crois-sance moyenne la plus haute avec 4,1%,à comparer à la croissance de 3,8% dans le secteur de services et 1,3% seulement dans le secteur commercial.

√ Par ailleurs, 15% des MPE travaillant dans le secteur tertiaire ont connu une croissance de plus de 5% contre seulement 10% des MPE travaillant dans le secteur industriel.

√ En termes de taille, les données ont montré que les petites entreprises employant de 5 à 9 personnes ont obtenu le taux de croissance moyen le plus haut avec 4,75%, tandis que celles employant de 10 à 49 per-sonnes ont connu une détérioration moyenne de la situation de 1,3%.

Tableau X2-: Distribution de MPE selon l'indicateur de croissance

Valeur de l’index de croissance <-5% -5<…< 0% 0% 0<…<5% > 5 %

% MPE 17,1 11,4 52,5 7,1 11,9

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM21-31

-10-

√ Les données indiquent également que presque la moitié des micro entreprises (1-4 employés) n'ont pas eu de crois-sance, 30% ont vu leurs performances se détériorer et seulement 18% ont réalisé un peu de croissance.

√ L'image est quelque peu différente

dans le cas des petites sociétés (5-9 employés), où le pourcentage des entreprises qui ont subi une détério-ration est presque égal à celui des entreprises qui ont amélioré la situa-tion (25%).

√ Si la situation est restée inchan-gée pour la plupart des plus gran-des entreprises (80% des 10 à 49 employés), indiquant que cette classe d'entreprises est plus stable, le nom-bre d'entre elles dont la dynamique a été négative était plus grand que celles qui ont amélioré leur situa-tion, entraînant le taux de croissance moyen de ce groupe à un niveau négatif (-1,3%).

√ En termes de capital investi, les résul-tats ont montré que les entreprises qui ont investi un capital compris entre 5,000 et 20,000 Livres égyp-tiennes ont obtenu le taux de crois-sance le plus haut à 4,4% tandis que celles qui ont investi moins de 1,000 livres égyptiennes ont réalisé les per-formances les plus basses (presque 0,5%).

√ Un des résultats particulièrement importants concerne la relation entre l'index de croissance et la «forma-lité». Les sociétés informelles ont réalisé un taux de croissance moyen plus haut à 2,7% que celles qui sont formelles (1,1%).

√ En termes de modèle de croissance, il reste le même pour des sociétés formelles et informelles : la moitié des deux catégories reste inchangée (52%); presque 28% des sociétés (formel ou informel) ont connu une tendance négative et presque 19% d'entre elles (formel ou informel) ont réalisé un peu de croissance.

Pour résumer, les sociétés les plus per-formantes en Egypte : 1. se situent dans le secteur industriel2. emploient entre 5 et 9 personnes3. disposent d'un capital investi impor-

tant entre 5,000 et 20,000 LE4. et sont dans le secteur informel.

Les perspectives de MPE

Il est clair que les performances des MPE et l'environnement dont elles béné-ficient sont les principaux déterminants de la façon dont l'entrepreneur perçoit l'avenir de son entreprise. L'étude a donc construit un Index de Perspectives Futures pour mesurer la perception que les entrepreneurs de MPE ont de l'avenir de leurs affaires.

L'index est basé sur les données recueillies dans l'enquête principale (2003) et lors d'une enquête complé-mentaire réalisée en (2004) sur les espoirs des entrepreneurs à l'avenir de leurs sociétés.

L'index mesure les perspectives futures des entrepreneurs à partir des fac-teurs suivants : (i) emploi; (ii) espace de l'unité économique; (iii) produc-tion; (iv) capital investi; (v) revenus; (vi) ventes sur le marché domestique; (vii) exportations; et (viii) introduction de nouveaux produits[5].

-11-

Les résultats indiquent qu'en Egypte, au Maroc et au Liban, la plupart des entre-preneurs ne prévoient aucun changement de leurs affaires. Les entrepreneurs en Egypte ont indiqué une perception plus négative de l'avenir de leurs affaires en 2004 qu'en 2003[6]. Les anticipations négatives étaient tout à fait claires sur le nombre des entrepreneurs qui ont l'intention de quitter l'affaire ou de dimi-nuer le nombre d'employés, la valeur des actifs, la production, les ventes domestiques et les revenus. A l'inverse au Liban, l'image était complètement différente, avec un nombre d'entrepre-neurs qui s'attendent à la croissance de leurs sociétés supérieur à ceux qui s'attendent à une contraction de leurs activités. Les fortes anticipations ont été particulièrement dominantes en termes de production (42% anticipaient une augmentation de la production) et de ventes domestiques (54%). Au Maroc, la situation est semblable à celle du Liban, les entrepreneurs qui ont de bonnes anticipations étant plus nombreux que ceux dont la perception est négative. Ces anticipations étaient plus favorables en termes de production future (39%) et de revenus (49%).

Recommandations de politique

Il n'est pas difficile de généraliser les recommandations de politique à mettre en place pour promouvoir le secteur des MPE, puisque l'on a bien observé que les besoins de base sont plus ou moins les mêmes dans tous les PM, même si certaines spécificités nationales dans les conditions spéciales dans lesquelles ce secteur fonctionne doivent être prises en considération. Les actions doivent non seulement se concentrer sur les politi-ques qui augmenteraient la croissance

des MPE, mais plus encore sur celles permettant d'améliorer leur efficacité et les conditions dans lesquelles elles opèrent. Il est à noter que l'efficacité de ces recommandations est condition-nelle à la poursuite des réformes macro-économiques concernant les domaines des infrastructures, de la fiscalité, des domaines institutionnel, sectoriel et la politique d'emploi.

√ Il est important de différencier les micro et les petites entreprises dans la mise en place de mesures pour améliorer leur croissance. Les deux groupes ont des schémas de pro-ductivité différents, des conditions d'opérations différentes, des pers-pectives de croissance différentes et des besoins différents. Les politiques visant les micro-entreprises devraient se concentrer sur l'amélioration de la productivité et de l'efficacité, en fournissant des programmes d'aide techniques particulièrement dans des clusters. De leur côté, les politiques ciblant les petites entreprises, doivent être plus diversifiées, en fournissant un appui dans les domaines finan-ciers, techniques et de marketing et des programmes de promotion de l'exportation.

√ Les politiques doivent mettre en relation les MPE (particulièrement les plus petites) et de plus grandes sociétés. Les MPE pourraient agir comme des industries amont, des sous-traitants, des fournisseurs de service/maintenance pour les acti-vités des sociétés plus grandes. Ce secteur peut être considéré comme un chaînon manquant que pourrait mettre à profit les entreprises plus importantes. Il pourrait par exemple

-12-

s'agir d'octroyer aux grandes entre-prises qui seraient en relation avec des MPE des primes ou des exonéra-tions de charges.

√ Il est nécessaire de mettre en place un environnement d'affaires et ins-titutionnel incitatif. Cela inclut la simplification des procédures d'en-registrement et la conception des cadres fiscaux spéciaux pour les MPE, les encourageant à fonctionner formellement. La plupart des MPE informelles ont tendance à limiter leur croissance dans certaines limi-tes et/ou préférer fonctionner de façon informelle, parce ce qu'elles redoutent le besoin de traiter avec les administrations publiques, les administrations fiscales, etc. Il est également nécessaire d'encourager les MPE à exercer au sein de clusters afin de partager les avantages de disposer de supports en termes de conseil et des services.

√ La plupart des entrepreneurs dans les quatre enquêtes ont souligné à quel point leur paraissait très difficile sinon tâche impossible l'accès aux prêts officiels. Ici, il est nécessaire de mettre en place les mécanismes permettant d'accorder des prêts à des activités/projets spécialisées, identifiés selon les besoins des mar-chés, et pour lesquels les condi-tions d'octroi et les garanties exigées seraient réduites.

√ Ainsi qu'il est apparu dans les enquê-tes, la formation continue est consi-dérée comme la principale (et par-fois la seule) source de formation. Pour soutenir ces entreprises, il est nécessaire de mettre en place plus

de possibilités et d'organismes de formation professionnelle. Les cen-tres publics de formation ne sont pas assez nombreux, ce qui entraîne le besoin d'encourager des organi-sations non gouvernementales et le secteur privé à investir dans la créa-tion de nouveaux centres modernes de formation spécialisés et ou le financement de la rénovation et de la gestion des centres de formation de public existants.

√ Des politiques spécialisées ciblant les entrepreneurs femmes doivent également être conçues pour limi-ter les inconvénients qui touchent actuellement les femmes : elles sont en effet apparues moins instruites, non qualifiées, non-formées, elles affichent une productivité basse, de faibles revenus, une valeur ajoutée inférieure; et ont moins accès aux actifs et aux ressources.

√ Le nombre de MPE exportatrices est extrêmement bas. Les MPE n'ont pas les connaissances, l'expérience ou l'infrastructure nécessaires pour l'exportation. La mise en place de formation et de services de conseils sur l'exportation, la création d'en-treprises d'exportation spécialisées capables de faire la médiation entre les marchés d'exportation et les MPE pourrait être une façon efficace de promouvoir une culture d'exporta-tion au sein des entreprises locales. Les MPE disposant d'un potentiel d'exportation devraient être infor-mées des marchés étrangers, ainsi que des entreprises étrangères sur les mêmes créneaux afin d'augmen-ter la possibilité d'une coopération active.

-13-

2. La relation ouverture-emploi du point de vue des entreprises

Les caractéristiques identifiées des peti-tes entreprises, qui rappelons-le, repré-sente l'essentiel du tissu industriel des PM et de l'emploi permettent ainsi de mieux comprendre quels peuvent être les canaux de transmission des béné-fices attendus de l'ouverture. Il reste néanmoins à connaître plus finement l'impact en termes d'emploi. C'est-à-dire qu'il faut non seulement évaluer le résultat global, dont on sait déjà qu'il a été modeste sur les dix dernières années, mais surtout quels sont les mécanismes précis qui ont conduit à cet impact, ce qui pourra conduire à amélio-rer les retombées potentielles.

C'est ce qu'a cherché à faire une autre étude Femise[7], à partir des données de l'enquête annuelle du Ministère du Commerce et de l'Industrie du Maroc qui couvrent la période 1990-2002. Les équipes ont étudié les processus de création et de destruction d'em-ploi dans l'industrie manufacturière au niveau des branches, afin d'appré-hender précisément les mouvements qui s'y produisent et qui reflètent les conséquences de l'ajustement indus-triel, ce que ne permet pas une analyse au niveau sectoriel de la variation de l'emploi net. L'objectif est de mieux connaître les origines de la réallocation de l'emploi (taille, secteur d'activité de l'entreprise, propension à exporter, etc.) et son ampleur au sein de l'indus-trie et entre catégories d'entreprises. L'hétérogénéité des entreprises a été, en effet, identifiée comme un élément explicatif important des vagues de création/destruction d'emploi qui, dans ce cas, ne sont pas liées directement

aux chocs sectoriels spécifiques ou au cycle conjoncturel, mais aux compor-tements des firmes. Par cette analyse, l'idée est d'appréhender les effets sur l'emploi marocain de l'ouverture sym-bolisée notamment par l'entrée du pays à l'OMC en 1995 et la signature de l'ac-cord d'association avec l'UE. L'analyse a également été menée dans un objec-tif similaire sur le Turquie.

L'étude du cas marocain, menée à un niveau fin, montre que la rigidité du marché du travail marocain est un obs-tacle moins important que cela n'a été souligné dans d'autres études et que la mobilité de la main d'œuvre est plutôt élevée :

√ Au total pour le Maroc, la création nette d'emploi a été faible (64 000 soit une croissance annuelle moyen-ne de 1,2% sur la période), surtout depuis 1998 malgré une forte mobi-lité de la main d'œuvre attestée par l'ampleur des chiffres bruts de créa-tion (650 000) et de destruction (586 000) et la faiblesse de la contrainte que représente la législation (licen-ciement, en particulier) qui est pour-tant souvent blâmée.

√ La création est assez régulière, elle se monte à 11,8% entre 1990 et 2002 (écart type inférieur à 0,7) alors que la destruction, presque aussi élevée (10,6%), est plus chaotique (écart type de 1,9) ce qui est cohérent avec les résultats obtenus pour d'autres pays en développement. Cela s'expli-que par le fait que la destruction est plus liée à la conjoncture que la créa-tion. Par ailleurs, le ralentissement de la création nette d'emploi serait l'ex-pression d'une plus forte destruction

-14-

plutôt que d'un essoufflement de la création (tableau X3).

√ la création d'emploi est à 90% le fait des entreprises pérennes, ce qui n'est pas le cas dans la plupart des autres pays pour lesquels ce type d'analyse a été mené, mais ce sont aussi ces entre-prises qui détruisent le plus d'emplois (57%) en réaménageant leurs effectifs (43% sont le résultat d'une faillite). Ces destructions sont très variables et oscillent entre 32,8% en 1999-2000 et 76,3% en 1993-1994.

Toutefois, au-delà du comportement des firmes, le cas marocain illustre l'impact de la spécialisation, dont les limites com-mencent à produire leurs effets néfastes sur la création d'emplois :

√ si les secteurs qui absorbent le plus de main d'œuvre, en particulier peu

qualifiée, à savoir ceux du textile et du cuir (46,7% de l'emploi manufac-turier total en 2002), de la chimie et parachimie (19,4%) et de l'agroali-mentaire (18,7%), voient leurs con-tributions relatives à l'emploi total reculer depuis une décennie, seul le dernier d'entre eux a perdu des emplois en termes absolus (tableau X4). Mais, comme va le montrer la deuxième partie du rapport, cela pourrait devenir également le cas du secteur du textile et du cuir du fait de la fin de l'accord multi-fibres et du manque de préparation du pays à affronter cette situation (recul de l'investissement, etc.).

√ Les industries électriques et électro-niques voient leur place se renforcer puisque, bien qu'elles ne viennent qu'en cinquième position en termes de part dans l'emploi total (5,6%),

Tableau X3-: Flux nets et flux bruts d'emplois dans l'industrie manufacturière au Maroc

AnnéesTaux net

de création (TNC)

Taux brut de création

(TBC)

Taux brut de

destruction (TBD)

Taux de réallocation

(TR)

1990-1991 3 12,3 9,3 21,6

1991-1992 2,8 11,7 8,8 20,5

1992-1993 2,2 12,3 10,1 22,3

1993-1994 0,5 12,1 11,5 23,6

1994-1995 1,7 11,7 10 21,6

1995-1996 2,8 12 9,2 21,2

1996-1997 2,9 10,9 8 18,9

1997-1998 -2,4 10,5 12,9 23,4

1998-1999 1,5 11,4 9,9 21,4

1999-2000 -1,4 12,8 14,2 26,9

2000-2001 0 12,9 12,9 25,8

2001-2002 0,7 11,3 10,6 21,9

moyenne 1,2 11,8 10,6 22,4

Ecart type 1,8 0,7 1,9 2,6

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM22-22

-15-

elles présentent un dynamisme dans la création d'emplois (22,7% entre 1990-2002, dont -0,9% pour 1990-1995 puis 77,2% pour 1996-2002) qui n'est surpassé que par celui des industries du textile et cuir (81,9%). Cependant, la part encore modeste du secteur ne le rend pas apte à prendre le relais du secteur du textile et cuir dans le court terme (tableau X5).

√ Au sein de l'industrie du textile et cuir, principal contributeur à l'em-ploi manufacturier, c'est la branche habillement qui a été le moteur de la création d'emplois alors que le textile perdait de la vitesse. Il apparaît donc que le degré d'exposition du Maroc aux conséquences que l'on prévoit négatives de la fin de l'accord multi-fibres est plus élevé que l'analyse au niveau sectoriel ne le laisse présager. Par ailleurs, cela souligne de plus l'in-

capacité du Maroc, à la différence de la Turquie comme on va le voir plus loin, à développer une filière sur son sol, ce qui lui permettrait de capter une partie de la rente (le tissu peut représenter 60% du prix d'un article d'habillement). S'ajoute également une incapacité de maîtrise des coûts et des délais qui vont fortement ren-forcer la concurrence supportée par les firmes à brève échéance.

√ Enfin, la création brute d'emploi émane des entreprises installées sur le marché depuis une période lon-gue (c'est le cas à 95% dans la chi-mie-parachimie, 92% dans l'agroa-limentaire, 92% dans la mécanique et métallurgie). La contribution des entreprises nouvellement créées est toutefois plus élevée dans les sec-teurs du textile et cuir ou de l'élec-tronique, moins capitalistiques. On

Tableau X4 : Evolution de la contribution à l'emploi manufacturier par secteur

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM22-22

Années Industries Agro-alimentaires

Industries Textile & Cuir

Industries Chimiques &

para-chimiques

Industries Mécaniques & Métallurgique

Industries Electriques & Electronique

Total

1990 22,9 41,2 21,9 11,0 3,0 100

1991 22,2 41,8 22,1 11,2 2,8 100

1992 20,8 42,9 22,3 11,6 2,4 100

1993 21,7 41,7 22,2 11,9 2,5 100

1994 21,9 42,8 21,8 11,0 2,4 100

1995 21,5 42,2 22,7 11,1 2,6 100

1996 20,6 42,2 23,7 10,8 2,6 100

1997 20,2 43,2 23,4 10,6 2,6 100

1998 18,9 45,7 22,1 9,7 3,6 100

1999 18,3 46,5 21,0 9,9 4,2 100

2000 18,8 46,1 20,5 9,9 4,7 100

2001 19,1 46,3 19,9 9,6 5,1 100

2002 18,7 46,7 19,4 9,6 5,6 100

Tableau X5 : Contribution sectorielle à la création nette d'emplois

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM22-22

AnnéesIndustries

Agro-alimentaires

Industries Textile &

Cuir

Industries Chimiques &

para-chimiques

Industries Mécaniques & Métallurgique

Industries Electriques & Electronique

Total

1990-1995 8,1 50,8 29,9 12,1 -0,9 100

1996-2002 -46,3 154,1 -58 -27,1 77,2 100

Ensemble -8,3 81,9 3,4 0,3 22,7 100

-16-

y verra à nouveau une illustration des problèmes d'accès au finance-ment pour les entreprises. Reste à connaître la capacité d'adaptation de ces grandes entreprises au change-ment de la situation concurrentielle au niveau international ; l'accord de partenariat ne les y ayant pas pré-parées puisqu'il s'est traduit par des délocalisations et une division inter-nationale des tâches, mais rarement par l'émergence de filières dans les PM ou de remontées sur la chaîne de valeur suffisantes pour vendre un produit sous une marque locale sur le marché européen.

Apparemment, l'industrie marocaine n'a pas encore enclenché un processus de transition vers un régime de croissance plus élevé qui répondrait à ses contrain-tes d'emploi. Elle est toujours dominée par les branches qui emploient une main d'œuvre peu qualifiée et produisent peu de valeur-ajoutée. L'émergence d'une industrie plus intensive en travail qualifié et à haute valeur-ajoutée s'avère difficile et l'ouverture ne soutient que peu ce processus. On remarque ainsi que :

√ la structure de l'emploi évolue peu ; l'emploi non qualifié représente en 2002, comme en 1990, quelques 51% de l'emploi total ; la part des emplois qualifiés et les taux d'enca-

drement stagnent autour de 39% et 10% respectivement.

√ les mouvements des travailleurs se font principalement à niveau de qua-lification constant en faveur des bran-ches habillement et au détriment du textile ; le passage des travailleurs d'une industrie faiblement capitalis-tique à une autre plus intensive en capital et en qualité de la main d'œu-vre est rare.

√ la création d'emplois n'est pas l'apa-nage des entreprises tournées vers l'export[8] puisque celles qui le sont moins ou qui servent uniquement le marché local enregistrent des résultats similaires sur ce point. Cependant, les premières enregistrent des taux de réallocation plus hauts que les secon-des et leur taux brut de destruction d'emploi est élevé et visiblement très sensible à la conjoncture, mais leur capacité à créer des emplois est supé-rieure et progresse entre 1990 et 2002 (-3,8 points pour les secondes). Surtout, l'évolution des taux bruts entre 1990/91 et 2001/02 tend à indi-quer que les entreprises exportatrices ont mieux réussi, comme attendu, à s'aligner face à la concurrence, le taux brut de destruction ayant très sensiblement chuté. A l'inverse, les entreprises non exportatrices voient

Tableau X6 : Création et destruction d'emplois selon l'orientation de l'activité des entreprises

% des entreprises exportatrices

Exportatrices Non exportatrices

TBC TBD TBC TBD

1990/1991 50,8 11,2 11 13,8 7,9

1994/1995 50,9 13 11,2 10,5 8,9

1999/2000 54,4 15,4 16,2 9,5 11,6

2001/2002 56,1 14,1 6,9 10 14,1

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM22-22

-17-

surtout leur taux brut de destruction croître indépendament de la conjonc-ture. Il semble donc que ce confirme d'une part que l'ouverture peut créer un choc positif de compétitivité, qui se traduit par une amélioration des possibilités de création brute et nette. Mais, il s'accompagne comme prévu d'un effet négatif sur les entreprises locales (taux de création moindre et taux de destruction en hausse), qui, globalement : (i) donne un effet net global faible ; (ii) menace donc la dynamique de création sur un terme assez long, ce qui est incompatible avec les besoins des PM et va néces-siter des actions pour modifier les processus actuels.

√ le taux de réallocation des emplois est de 22,4% (comptabilise la création et la destruction d'emploi) ce qui signifie que plus d'un cinquième des effectifs sont renouvelés chaque année.

√ l'hétérogénéité des firmes à l'intérieur de la branche explique la volatilité de la création d'emplois. Les entreprises peuvent être classées en deux grou-pes : celui des entreprises pérennes

au sein duquel la mobilité est forte mais qui créent presque autant d'em-plois qu'elles n'en détruisent, et celui des petites entreprises nouvellement crées qui ont des capacités d'absorp-tion des travailleurs élevées mais dont la survie est courte et qui sont renouvelées rapidement.

En Turquie[9], comme pour le Maroc, les effets statiques de court terme sur la croissance, liés à la réallocation des ressources des secteurs abrités vers les secteurs exportateurs exposés à la concurrence internationale, devraient être limités en général, et plus forte-ment négatifs sur l'emploi. Les effets dynamiques porteurs d'une croissance équilibrée à long terme, largement issus des transferts de technologies sont sup-posés dynamiser l'emploi, surtout des travailleurs qualifiés, et permettre des gains de productivité, tout comme cela s'est produit pour les NPI d'Asie.

La politique turque de promotion des exportations s'est appuyée sur l'octroi de subsides qui ont représenté jusqu'à 25% des exportations de biens entre 1979 et 1990 (tableau X7). Les pays

Tableau X7 : Evolution des subsides aux exportations turques 1979-1990 (% des exports totales)

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM22-22

Subvention directes

Crédits à l’exportation

Exonération de taxes à

l’importation

Ristourne sur la TVA

Subsides totales

-1 -2 -3 -4 (=1+2+3+4)

1979 11,0 9,9 0,3 0,0 21,2

1980 5,6 14,9 4,2 - 26,7

1981 9,1 13,0 3,3 - 27,4

1982 15,1 10,8 3,6 - 31,5

1983 17,4 10,5 5,6 - 35,9

1984 17,3 5,9 2,0 2,0 27,2

1985 10,0 2,0 5,1 2,0 19,1

1986 9,9 4,8 8,6 2,6 25,9

1987 8,6 2,9 6,7 4,3 22,5

1988 7,6 4,8 6,6 4,3 22,5

1989 5,5 8,8 7,7 5,9 27,9

1990 4,4 9,2 7,7 6,2 27,5

-18-

d'Asie ont également employé ce type de mesure incitative en liant le déblo-cage de subventions aux performances à l'export des entreprises. Cette politi-que s'inscrit dans un mouvement plus global de libéralisation de l'économie (déréglementation du marché du travail, libéralisation financière, convertibilité du compte de capital, etc.).

L'étude indique que, dans le cas turc, l'emploi est :

√ positivement lié au niveau de la pro-duction, mais que la faiblesse de l'élasticité (une hausse de 1% de la production accroît l'emploi de 0,44%) provient du développement de l'em-ploi informel qui aurait atteint près de 50% de l'emploi sur la période 1988-2003,

√ dépend négativement du prix des inputs et du capital, comme des investissements faits dans la période précédente. L'ajustement de l'appa-reil productif pèse donc fortement sur l'emploi,

√ l'ouverture économique, appréciée ici

à partir du taux de pénétration des imports, ne semble pas avoir influen-cé le niveau d'emploi dans le secteur manufacturier de façon significative, voire lorsque l'on décèle un effet, il s'agit d'une influence plutôt négative. Cela confirme les résultats obtenus généralement pour les pays en déve-loppement.

Ainsi, en Turquie également, les effets positifs attendus de l'ouverture commer-ciale sur l'emploi ne semblent pas s'être encore manifestés. Le développement extrêmement rapide de l'emploi infor-

mel vient cependant relativiser ces con-clusions peu encourageantes. De plus, l'analyse de la spécialisation montre que la Turquie est en train de mettre en place les conditions nécessaires à l'obtention d'une croissance plus élevée et stable à long terme et créatrice d'emplois, notamment pour les plus qualifiés.

3. Déterminants des comporte-ments : l'informalité

De l'ensemble des remarques précéden-tes qui découlent de plusieurs enquêtes réalisées par les équipes Femise auprès d'entreprises, du traitement statistique de ces enquêtes et des enquêtes indus-trielles nationales et de l'analyse de l'évolution de l'emploi, il apparaît claire-ment que : (i) l'effet global faible, voire le plus souvent négatif, que l'on observe entre ouverture et emploi découle pour une grande partie des conditions d'opé-rations que connaissent les entreprises, notamment en termes de financement ; (ii) ces comportements d'ajustement peuvent être sensiblement différents à la fois au sein d'un même pays entre diffé-rents secteurs et plus globalement entre différents PM (Cf. Maroc et Turquie), ce qui tend à souligner le rôle des anti-cipations des entrepreneurs locaux ; (iii) les incitations que mettent en place les politiques publiques peuvent amener les firmes à privilégier telles ou telles stratégies d'ajustement, lesquelles ont à leur tour un impact différencié sur la croissance d'emploi que peut générer l'ouverture à la concurrence.

Parmi les différents comportements ana-lysés dans les parties précédentes, le passage des entreprises dans le secteur informel a souvent été souligné comme possédant un rôle important sur ce que

-19-

l'on doit attendre de l'ouverture. Ce pas-sage est souvent justifié par la rigidité des cadres légaux. Il apparaît toutefois qu'il est difficile de distinguer DEUX secteurs différents, l'un formel et l'autre informel. Comme le montre la section suivante, les entreprises « ajustent » plutôt un certain degré d'informalité à l'évolution de la situation et à la percep-tion qu'elles ont de leur environnement concurrentiel.

Dans la section suivante, basée sur une étude Femise réalisée sur la base d'enquêtes[12], le principe est que la perception des firmes des obstacles auxquels elles doivent faire face et leurs comportements dépendent de données institutionnelles, politiques, juridiques propres au pays dans lequel elles sont implantées. Dans un contexte d'intensi-fication de la concurrence et de montée des prix du pétrole, on est en présence d'une relation « structure-conduite-per-formance » qui implique que les firmes vont adapter leur stratégies d'ajustement au contexte national. Les performances sont donc le fruit de comportements ou de stratégies qui s'incarnent dans des contraintes structurelles internes (caractéristiques techniques de la firme, fonction de production et de coût, struc-ture organisationnelle, etc.) et externes (caractéristiques sectorielles, position concurrentielle de la firme, etc.).

A partir de l'enquête faite par l'équipe du ROSES, des indicateurs de « gou-vernance » et de « pression concurren-tielle » sont construits pour symboliser ces contraintes structurelles, ainsi que deux mesures de la performance des firmes, l'une « synthétique » ou glo-bale (croissance de l'entreprise, etc.), l'autre qui reflète leurs résultats sur les

marchés internationaux. Les résultats de l'estimation de l'impact de l'appar-tenance d'une firme à un pays sur ses performances à partir d'un modèle pro-bit montrent que si celui-ci est faible dans le cas de la performance globale de la firme, il est nettement plus sen-sible pour ce qui est de sa capacité à exporter. Dans la mesure où l'on a remarqué plus haut la différence de potentiel de création d'emploi entre firmes locales et firmes exportatrices (dans le cas du Maroc), le rôle du con-texte local est à nouveau mis en relief. Mais, au delà de ce simple résultat, loin d'être contre-intuitif, l'intérêt de l'en-quête réside également dans ce qu'elle identifie pour le Maghreb les compor-tements des entrepreneurs face à la corruption et à l'arbitrage informel/for-mel, en permettant de préciser la part de l'activité informelle des entreprises, à quel moment les entreprises choisis-sent d'avoir recours à la corruption et comment elles la perçoivent.

Plusieurs déterminants de l'activité informelle ont été identifiés dans le cadre des études des effets des change-ments institutionnels liés à la transition vers une économie de marché, en par-ticulier dans les pays de l'Est. Ainsi, les entreprises peuvent (i) ne pas déclarer la totalité de leurs revenus si le niveau des taxes est trop élevé et les réglemen-tations trop contraignantes, (ii) inscrire leur activité dans l'économie informelle si les extorsions dont elles sont victimes sont proportionnelles à leur production ou si le coût d'opportunité de ce passa-ge est faible (du fait d'un contexte ins-titutionnel défaillant qui implique, par exemple, une incapacité à faire respec-ter les droits de propriété ou d'un fort degré de discrétion des représentants

-20-

du gouvernement dans l'application des régimes d'imposition), etc.

Quant à la propension à pratiquer une corruption active, qui se définit comme l'offre de corruption émanant des entre-prises, elle dépend d'éléments qu'il est possible de classer en deux catégories : ceux liés au contexte institutionnel (non respect des règles de droit surtout dans un environnement faiblement concur-rentiel) et ceux qui découlent des carac-téristiques des entreprises (entreprises ayant une position concurrentielle faible qui sont amenées à biaiser les règles du jeu en leur faveur pour durer, taille et rentabilité de la firme, nature de ses relations avec l'Etat, etc.).

Enfin, plusieurs canaux d'influence de l'activité informelle des entreprises sur leurs pratiques de corruption peuvent être distingués. Premièrement, avec l'accroissement de l'activité informelle, la base d'imposition se réduit ce qui implique d'une part, une hausse des taxes et incite à trouver des moyens d'éviter la fiscalité (pots-de-vin, etc.) et d'autre part, une baisse des recettes fis-cales donc de la qualité du service public d'où une corruption plus forte et des droits de propriété moins bien protégés (Johson et alii, 1998). Deuxièmement, le degré de corruption d'un pays est inversement proportionnel à l'intérêt qu'il y a à chercher à faire respecter la loi. Plus la corruption est fréquente, plus une stratégie visant à faire dispa-raître l'économie informelle, en tant que moyen d'échapper à l'autorité d'agents corrompus, aura de chances de se traduire par une hausse de la corrup-tion. Dans ce cas, selon Vostroknutova (2003), réduire la corruption doit être la première priorité.

La libéralisation commerciale, la passa-tion de nouveaux accords et l'intensifi-cation de la concurrence sont porteuses de nouvelles opportunités mais aussi de contraintes, notamment par le biais les changements de réglementation, qui obligent les firmes à s'adapter et à modi-fier leurs comportements.

L'enquête menée par l'équipe Femise du ROSES qui porte sur les cas de l'Algérie et de la Tunisie montre que :

√ la part de sa production que l'entre-prise dissimule sera d'autant plus éle-vée (i) que le montant des paiements supplémentaires demandés en sont fonction (plus d'un tiers), (ii) que la corruption est perçue comme un obs-tacle important à son activité, (iii) que cela lui permet de réduire son niveau d'imposition. Par ailleurs, si la position concurrentielle de l'entreprise est fai-ble, elle peut développer son activité informelle afin de diminuer le coût du travail et échapper à des procédures complexes.

√ les défaillances du système juridi-que expliquent aussi le niveau de l'activité informelle dans la mesure où l'intérêt de déclarer l'activité est de la protéger. Les entreprises peu-vent donc faire appel à la corruption pour garantir la protection de leurs droits lorsque le système juridique est défaillant. Si la capacité de faire respecter les droits de propriété ou de contrat des autorités est en effet peu satisfaisante, le coût d'opportunité d'inscrire son activité dans l'économie informelle diminue.

√ la petite corruption au quotidien, exercée ou subie, et qui conditionne

-21-

le bon déroulement des activités des firmes joue plus lourdement dans la décision des entreprises de mener des activités informelles que la cor-ruption qui vise à influencer sur le contenu des lois et des règlements, pratique qui relève d'une stratégie de plus long terme.

√ plus la part de l'activité informelle est significative, plus les firmes sont incitées à pratiquer la corruption sous les différentes formes envisagées. Cependant, c'est là une arme à dou-ble tranchant puisque la corruption est alors considérée par les entrepri-ses comme une entrave à l'extension de leur activité.

√ les entreprises qui jugent que les taxes sont contraignantes sont moins sensibles au problème de la corrup-tion qui est assimilée à une taxe addi-tionnelle relativement moins lourde.

√ l'obstacle d'une réglementation trop contraignante du point de vue des firmes est contournée non pas en pesant sur le contenu des lois et règlements (capture de l'Etat) mais sur leur application (corruption admi-nistrative).

√ plus l'entreprise est en position de force sur son marché moins elle est susceptible de pratiquer la corrup-tion.

Ces résultats soulignent donc l'existence d'une forte corrélation positive entre activité informelle et perception de la corruption, quelle que soit l'acception de ce terme. Elles se renforcent mutuel-lement comme cela a pu être observé dans les pays en transition de l'Est.

Ils témoignent également qu'il s'agit bien d'un comportement d'ajustement et d'optimisation pour faire face au con-texte de concurrence dans le contexte national.

Cependant, les comportements des fir-mes sont largement dictés par le contex-te politique ou leur histoire. Le premier élément détermine par exemple, la pro-pension des firmes à accepter de subir la corruption. Si le contexte politique est tel que celle-ci est dénoncée systéma-tiquement, alors le degré de corruption de l'administration comme des entre-prises baissera. Quant au deuxième élément, on peut citer les liens existants ou ayant existé entre l'entreprise et l'Etat. L'analyse menée montre alors que plus l'entreprise est proche des autori-tés, moins elle considère la corruption comme un obstacle à son développe-ment, probablement car elle peut alors influer sur le contenu des lois et de la réglementation, sans avoir à verser une contrepartie financière. En revanche, une entreprise publique a certes moins ten-dance à chercher à capturer l'Etat, mais étant parfois relativement plus exposée à la corruption, peut en souffrir.

En termes de recommandations de poli-tique économique, les résultats de cette étude soulignent donc le fait que, pour être efficace, en Algérie comme en Tunisie, une politique de lutte contre l'économie informelle doit aller de pair avec une politique de réduction de la corruption et d'amélioration des perfor-mances du système juridique, notam-ment du point de vue du respect des contrats et des droits de propriété. De plus, il est impératif de modifier la perception que les entreprises ont des réglementations qui ne doivent pas être

-22-

considérées comme des obstacles, ce qui est en particulier le cas de la fisca-lité. Au-delà même des modifications des cadres, il y a donc en premier lieu une campagne didactique à mener, pour expliciter auprès des entreprises les con-séquences de leurs choix.

4. Comportements d'ajustements des entreprises et emploi

On observe donc bien que les effets de l'ouverture, qui pour les PM renvoient d'abord aux Accords d'Association avec l'Union européenne, dépendent d'une part des stratégies des firmes, c'est-à-dire de la façon dont elles vont faire face aux évolutions de leur marché, et d'autre part, des évolutions de ces différents marchés, ce qui renvoit là aux spéciali-sations. Dans la présente section, c'est le premier point qui va nous préoccuper.

L'analyse de la relation ouverture-emploi doit inclure trois conséquences atten-dues de l'intensification des échanges :

(i) la réallocation des facteurs de pro-duction des secteurs abrités vers les secteurs exposés à la concurrence étrangère, supposés offrir des taux de rentabilité et de rémunération plus élevés ;

(ii) la réallocation des ressources pro-ductives entre les acteurs d'une même industrie, à nouveau des moins efficaces vers les plus effica-ces, les firmes étant hétérogènes de ce point de vue ;

(iii) un changement des choix straté-giques des firmes dans leurs ajus-tements, choix qui peuvent porter sur plusieurs éléments comme la

réduction des marges ou des salai-res, un recours plus fréquent à l'emploi non qualifié ou temporaire, la recherche d'une amélioration de la productivité ou de la qualité des produits, etc.

Une étude Femise a cherché à cerner ces comportements pour évaluer l'impact des décisions des entreprises existan-tes dans l'industrie[10] sur la relation ouverture-emploi, l'ouverture faisant référence essentiellement à l'évolution de la protection tarifaire et non tari-faire. La démarche consiste à identifier les secteurs pour lesquels les modifi-cations de l'intensité de la concurrence ont été les plus significatives à partir d'un indicateur de taux de pénétration des imports[11]. Il s'agit des secteurs du cuir, de la fabrication de meubles et accessoires, du caoutchouc et des autres industries manufacturières pour la Turquie et du textile, de la fabrication d'ouvrages en métaux, de machines et de matériels, d'équipements et appareils de radio, télévisions et communications, de l'industrie automobile et de la fabrica-tion d'autres matériels de transport.

Il apparaît que, dans le cas turc, comme le veut la théorie, la production des industries qui ont connu une hausse de l'intensité de la concurrence a dimi-nué (figures 1, 2, 3, 4 et par industrie en annexe) alors que la production de l'industrie dans son ensemble a pro-gressé. Les graphiques par industrie révèlent par ailleurs l'existence d'une déconnexion entre les évolutions de la production et de l'emploi, qui n'est pas corroborée par la dynamique sectorielle et est de ce fait attribuable aux spécifi-cités de l'environnement des firmes et à leur comportement. Pour le Maroc, cette

-23-

déconnexion production de l'ensemble de l'industrie-production par industrie et production-emploi au sein des industries de plus en plus exposées à la concur-rence étrangère a été nettement moins marquée et l'ajustement s'est réalisé par un recul de la productivité apparente du travail.

L'intensification de la concurrence peut en effet conduire à différents modes d'ajustement des comportements des firmes : soit elles jouent sur le prix de vente (réduction du prix des inputs, des salaires et des marges ou redéfinition du contenu en inputs de la production avec changement et accroissement de l'efficacité technique), soit elles accrois-sent la qualité de leurs produits et/ou les quantités écoulées. Les divergences qui apparaissent entre les évolutions des performances par sous industrie et pour

l'ensemble de l'industrie entre le Maroc et la Turquie proviennent probablement de leurs choix stratégiques d'adaptation aux modifications des données de la concurrence : la Turquie aurait réussi à préserver la productivité apparente du travail et globale grâce à des efforts d'investissement tandis que le Maroc pourrait avoir préféré une politique de prix avec compression des marges et des coûts de production. Cependant, d'autres facteurs ont vraisemblablement déterminé ces résultats, tels que des éléments de compétitivité propres à la localisation dans un pays donné dont l'influence a été soulignée par certaines études Femise (voir plus loin).

Pour identifier la stratégie suivie dans chaque pays, l'étude a ensuite estimé l'impact de l'ouverture sur l'emploi à partir d'une approche économétrique

Figure 1 : Evolution de la production et de l'emploi pour l'ensemble de l'industrie

Figure 2 : Evolution de la production et de l'emploi pour les firmes appartenant aux secteurs qui se sont le plus ouverts à la concurrence étrangère

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM22-22

-24-

en panel avec effets fixes sur la période 1993-2002 ou 1995-2001 (lorsque les diverses composantes de l'emploi total sont introduites dans l'analyse) pour le Maroc, 1985-1990 pour la Turquie. Sont employés le taux de pénétration des imports à 4 digits et la moyenne des droits de douane ad valorem à 4 digits selon les données disponibles. 7 sous échantillons de firmes ont été distingués en fonction de leurs caractéristiques : celles les plus exposées à la concurrence internationale, celles dont la production présente, sur la période, une tendance à la croissance ou à la baisse, celles qui exportent plus de 25% de leur produc-tion et celles pour lesquelles cette part est inférieure à 25%, les entreprises dont l'effectif est supérieur ou égal à 100 employés pour le Maroc et à 150 pour la Turquie et celles dont les effec-tifs sont inférieurs à ceux-ci. Suivant ces estimations, il s'est avéré que :

√ la relation ouverture-emploi est glo-balement faible et négative, ce qui confirme les résultats obtenus par d'autres équipes et pour d'autres pays. Ainsi, dans le cas du Maroc, une réduction des tarifs de 10 points engendre un recul de l'emploi de 1% au niveau de l'industrie, mais il peut atteindre les 3% si l'entreprise est de taille conséquente ou tournée vers l'export. Cet effet est encore plus marginal dans le cas turc puis-qu'une hausse du taux de pénétra-tion de 10% se traduit par une perte d'emploi de 0,3% et seules certaines catégories de firmes sont concernées (grande taille ou production décrois-sante).

√ une composante cruciale de la rela-tion ouverture-emploi au Maroc est la politique cambiaire avec une baisse de l'emploi (essentiellement tempo-

Figure 3 : Productivité apparente pour l'ensemble de l'industrie

Figure 4 : Productivité apparente pour les firmes appartenant aux secteurs qui se sont le plus ouverts à la concurrence étrangère

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM22-22

-25-

raire) qui va jusqu'à 7% en réaction à une appréciation du change de réel de 10%. Les firmes les plus exposées sont évidemment celles dont l'activité privilégie l'export. Mais, cet effet n'est pas systématiquement négatif pour la Turquie, ce qui peut s'expliquer par le poids élevé des inputs importés dans la production dont le coût est réduit lorsque le change s'apprécie ce qui augmente la compétitivité des biens produits et l'emploi (+2,5% à +3,5% pour une appréciation du change de 10%).

√ l'ajustement des effectifs, face aux modifications des conditions de la concurrence ou de la valeur de la monnaie, a été obtenu au Maroc par un recours plus fréquent à l'emploi temporaire, en particulier pour la main d'œuvre non qualifiée. Ce mou-vement n'est pas visible au niveau de l'industrie dans son ensemble, mais certaines entreprises ont certaine-ment d'ores et déjà procédé à des révisions de leurs choix de gestion de leur structure d'emploi.

√ dans le cas de la Turquie, deux élé-ments qui ont lourdement pesé sur la relation ouverture-emploi. L'un est positif : la marge réalisée, lorsqu'elle est positive, peut permettre une haus-se de l'emploi de 0,8% à 1,3%, si elle est contractée de 10%. Le second est négatif : une amélioration de la pro-ductivité globale de 1% pourrait faire reculer l'emploi de 2,8%. Il convient de savoir si une pareille évolution de la productivité a été possible. Elle est fonction de l'intensité capitalistique qui si elle croit ici de 10% serait sus-ceptible de diminuer l'emploi de 1%, même si l'investissement en lui-même

améliore l'emploi (+0,4% à +1,2% pour une hausse de 10%).

En conclusion à cette partie concernant le comportement des firmes, dans leur quotidien, et son impact sur les effets de l'ouverture sur l'emploi, on soulignera les principaux traits suivants :

√ la stratégie d'ouverture que la quasi-totalité des PM a suivi, modifie le cadre concurrentiel auquel les firmes locales vont faire face. L'ouverture, qu'elle soit d'origine multilatérale (OMC) ou régionale (les accords d'association) n'a donc pas seulement un contenu macro-économique. Elle a également une traduction micro-économique. En réaction à ces modifications de leur contexte concurrentiels, les firmes suivent en effet diverses stratégies qui découlent à la fois de leur besoin de développer leur activité (ou tout au moins de survivre) et des possibilités que leur contexte local leur octroie.

√ Ces comportements se traduisent comme partout par des actions sur les leviers habituels, notamment d'inves-tissement, de marges et d'emploi. On observe de ce point de vue que pour la plupart des PM, les choix effectués, notamment sur l'emploi et l'investis-sement, ne sont pas en phase avec les besoins macro-économiques (cf. par exemple la filière textile-habille-ment au Maroc).

√ Concernant les actions publiques à mener sur ce plan, les diverses enquêtes menées, qui ont concerné des sujets différents mais conne-xes et complémentaires sur plusieurs pays (Algérie, Egypte, Liban, Maroc, Tunisie, Turquie), ont confirmé plu-

-26-

sieurs priorités déjà soulignées par le Femise : amélioration des con-ditions de compétitivité des firmes, notamment sur le plan des services basiques de financement et de com-munications qui doivent permettre aux entreprises d'accéder à des res-sources financières et de pouvoir exporter au moindre coût, sur le plan des actions de formation pour déve-lopper des compétences nécessaires à la remontée en gamme le long des filières, sur le plan des procédures administratives encore complexe et opaque, notamment en ce que les entreprises doivent percevoir les con-séquences positives de la plus grande « formalisation » de leur activité.

Enfin, un autre point important qui est ressortit est que le comportement des firmes est aussi dicté par l'évolution générale du secteur dans lequel elle évolue, de sa dynamique mondiale et de l'évolution du contexte réglemen-taire qui le régie. Cet aspect est traité dans la partie suivante, en premier lieu en mettant en relief les aspects spécifiques des PM dans leurs trajec-toires industrielles, puis en examinant en détail ce que la dynamique du sec-teur textile-habillement a d'exemplaire, enfin en relevant les futurs opportuni-tés, notamment dans les secteurs de services et en particulier ceux identifiés plus haut.

II. Des spécialisations sectorielles à ajuster pour modifier la dynamique

1. Une trajectoire industrielle spécifique

L'analyse de la spécialisation d'un pays est donc incontournable pour toute étude

des effets de toute stratégie d'ouverture quelle qu'en soit l'origine (changement des données d'un accord, entrée d'un nouveau pays à l'OMC, etc.). Il s'agit dans cette première section de mieux appréhender le processus d'industriali-sation à l'œuvre dans les PM pour dres-ser un premier bilan de la capacité des PM à faire face au choc de concurrence.

A la fin des années 1960, les PM avaient tous un avantage comparatif sur les biens primaires. Ce sont les politiques d'ajustement structurel, de dévaluation du change et d'ouverture des années 80 qui les ont amené à développer de nouveaux avantages comparatifs, à modifier leur spécialisation et à réallouer leurs facteurs de production. Le déve-loppement économique est en effet un processus d'amélioration de la producti-vité fondé sur une dynamique vertueuse d'investissement et de croissance[13].

L'expérience historique montre que ce processus est invariablement associé à un changement structurel de la produc-tion et de l'emploi, de l'agriculture vers l'industrie d'abord, puis progressivement entre différentes branches de l'indus-trie manufacturière. Le développement industriel correspond à une dynamique de transformation de la structure de la production manufacturière qui, si elle n'est pas linéaire, est systématiquement orientée dans le sens d'un allongement du détour productif. L'interprétation de ce principe de division du travail crois-sante comme une évolution de la struc-ture industrielle vers des branches de plus en plus intensives en bien inter-médiaires permet de construire une typologie de l'industrie manufacturière en trois groupes de branches. La for-malisation du développement industriel

-27-

comme le déplacement progressif du centre de gravité de l'industrie –des productions simples intensives en tra-vail (IPS-L) d'abord vers les productions simples intensives en capital (IPS-K) puis vers les productions intensives en biens intermédiaires (IPC)– définit une trajectoire standard de l'industrialisation qui est d'abord testée avec succès sur les dynamiques longues des grands pays industriels. L'examen empirique montre que les processus longs de changement sectoriel sont orientés par les mêmes tendances générales, qu'ils s'inscrivent dans des limites qui sont identifiables et qu'ils sont convergents. Ils définissent donc une séquence, qui caractérise de manière générale l'évolution de la struc-ture industrielle. Depuis l'Angleterre du début du 19e siècle, jusqu'à la Corée du Sud et Taiwan dans le dernier tiers du 20e, tous les processus d'industria-lisation ont suivi cette même séquence sectorielle. Les rythmes nationaux ne sont pas pour autant identiques. Plus l'industrialisation est tardive, plus les pentes sont marquées et le changement structurel rapide.

La confrontation du changement struc-turel dans les industries des PM depuis le début des années 1960 à cette séquence standard de l'industrialisation montre en moyenne une évolution à rebours du sens du développement. Si la baisse du poids des IPS-L apparaît en effet conforme à la séquence historique, la principale particularité de la dynamique industrielle régionale est la stagnation à un faible niveau de la contribution des IPC.

Ce processus d'industrialisation « en marche arrière » est particulièrement remarquable en Tunisie, au Maroc et,

dans une moindre mesure, en Jordanie. Les industries les plus modernes (IPC) y demeurent marginales ou sont en décroissance relative, alors que les indus-tries support du démarrage industriel (IPS-L) représentent toujours une part considérable de la production manufac-turière. Relativement, la dynamique de changement structurel apparaît mieux orientée en Egypte, bien qu'elle soit faible. Israël étant un cas à part, la Turquie représente le seul réel écart à la tendance régionale. Sa séquence d'in-dustrialisation est assez proche de celles de la Corée du Sud et de Taiwan, avec un décalage de 25 ans.

La comparaison avec les autres régions en développement souligne le carac-tère contre-tendanciel des évolutions de la région méditerranéenne. Le pro-cessus d'industrialisation dans les NPI2 (Thaïlande, Malaisie, Indonésie, Philippines) ainsi qu'en Chine est par-ticulièrement conforme à la trajectoi-re historique d'industrialisation, mais décalé dans le temps. Si la croissance industrielle a été plus lente en Asie du Sud-Ouest, on observe néanmoins dans cette région la même séquence de changement structurel, sur un rythme atténué.

Cette orientation séculaire de l'indus-trialisation se retrouve également en Amérique Latine, malgré la lenteur de la modernisation industrielle et les « décen-nies perdues ». Les PM sont donc les seuls cas contre-tendanciels dans cet échantillon. L'hypothèse du retard sem-ble moins pertinente que celle de l'inertie structurelle. Au début des années 1970, les PM disposaient de structures indus-trielles plus avancées que celle des NPI2 ; Depuis, seule la région Méditerranée se

-28-

caractérise par une telle stabilité de la hiérarchie des trois groupes d'industries. L'absence de décollage des IPC incite à conclure à un faible approfondissement de la division du travail et à l'insuffisance de construction de nouvelles compéten-ces industrielles au cours des quatre dernières décennies. De fait, ce n'est pas tant la question de la vitesse de la transition des PM qui apparaît perti-nente, que celle de la direction à suivre, notamment en termes industriels.

2. L'impact des stratégies indus-trielles sur la relation ouverture-emploi

L'hypothèse souvent émise par le Femise est que cette inertie repose en partie

sur la volonté de préserver l'emploi, en favorisant les industries utilisant relati-vement intensivement la main d'œuvre. Cet objectif, pour parfaitement ration-nel qu'il soit, pourrait être tenable en économie fermée. Toutefois, il est non seulement difficile à pérenniser dans le long terme, mais il est de plus incohérent avec la démarche maintenant généralisée d'ouverture entreprise dans les PM. Dans ce contexte au contraire, les spécialisa-tions actuelles apparaissent contrepro-ductives en termes d'emploi, comme le montre une analyse comparative issue d'une recherche Femise[14]. Cette étude s'est intéressée aux conséquences des choix de spécialisation dans les domai-nes de la croissance et de l'emploi pour six pays (Maroc, Tunisie, Turquie,

Malaisie, Indonésie) sur la période 1985-2001 (qui est divisée en deux sous-périodes 1985-1995 et 1995-2001). Elle a confronté les résultats en termes de croissance et d'em-ploi des secteurs de l'économie afin d'éta-blir une typologie des secteurs qui répon-dent le mieux aux dif-ficultés des PM.

D'une manière géné-rale, la période 1995-2001 a été plus pro-pice à la création d'emploi et cela aussi bien pour les PM que pour les pays d'Asie ce qui prouve que cela n'est pas attribuable à un effet « intégration commerciale avec

Tableau x8 : Les coefficients d'emploi par grands secteurs manufacturiers[15]

Source : étude Femise 22-22, ONUDI 2005, calculs des auteurs.

Secteurs 1985-1995 1995-2001 1985-2001

IAA 0,5 1,0 0,5

ICPC 0,6 1,2 0,8

Indonésie IEE 0,5 1,0 0,5

IMM 0,4 1,5 0,7

ITC 0,5 1,9 1,0

TotIT 0,5 1,3 0,7

IAA 0,7 1,1 0,8

ICPC 0,7 1,1 0,7

Malaisie IEE 0,5 0,9 0,5

IMM 0,5 1,1 0,6

ITC 0,4 1,1 0,4

TotIT 0,6 1,0 0,6

IAA 0,6 1,1 0,7

ICPC 0,5 1,1 0,6

IEE 0,6 1,3 0,7

Maroc IMM 0,4 1,2 0,5

ITC 0,6 1,3 0,7

TotIT 0,5 1,1 0,6

IAA 1,0 0,9 0,9

ICPC 1,4 1,2 1,6

IEE 1,4 1,9 2,7

Tunisie IMM 1,0 0,9 0,9

ITC 0,8 1,3 1,1

TotIT 1,1 1,2 1,3

IAA 0,4 1,0 0,4

ICPC 0,3 1,1 0,3

Turquie IEE 0,3 1,2 0,4

IMM 0,3 1,1 0,3

ITC 0,4 1,2 0,4

TotIT 0,3 1,1 0,4

-29-

l'UE ». Les coefficients d'emploi enre-gistrés pour le Maroc, la Tunisie et la Turquie sont proches pour la deuxième période alors qu'ils étaient nettement différents pour la première. La Tunisie domine le groupe avec des coefficients supérieurs à 1 et en légère amélioration (tableau x8). Les secteurs les plus créa-teurs d'emplois sont identiques pour les trois PM (IEE, ITC, ICPC), ce qui signifie qu'ils ont des spécialisations similaires qui tranchent avec celles des deux pays d'Asie retenus qui diffèrent d'ailleurs entre elles. Les secteurs les plus porteurs en termes d'emploi sont les IMM et ITC pour l'Indonésie et l'IMM et l'IAA pour la Malaisie (IAA : industrie agroalimen-taire, ICPC industrie de la chimie et de la parachimie, IEE industrie électrique et électronique, IMM industrie mécanique, métallurgie et machines, ITC industries du textile-habillement).

Cependant, une mise en perspective des contributions sectorielles à la créa-tion nette d'emploi et de valeur-ajoutée (tableau x9) souligne :

√ que la stratégie des pays d'Asie rete-nus a été de développer des secteurs relativement plus intensifs en tech-nologie et en travail qualifié et qui permettaient de gagner des parts de marché à l'international, tout en pré-servant les secteurs dotés d'une capa-cité d'absorption de la main d'œuvre élevée (Rizwanul, 2003). L'Indonésie a bien surmonté la crise qui a frappé durement les secteurs des ITC et des IMM qui sont restés largement con-tributeur de la création d'emploi et a favorisé l'émergence de secteurs tels que l'électronique ou la chimie dont le rôle de moteur de la croissance et de la création d'emploi s'accroît.

Quant à la stratégie de la Malaisie, qui a opté pour une restructuration beaucoup plus rapide, elle a consisté à soutenir les industries électriques et électroniques qui occupent main-tenant un rôle clé dans l'absorption de l'emploi et la création de richesse (80% de la création d'emplois).

√ que la Tunisie a une stratégie plus proche de celle des pays asiatiques. Elle préserve le secteur du textile-habillement où elle a un avanta-ge comparatif et qui crée beaucoup d'emplois mais réoriente sa spécia-lisation vers les secteurs des IAA et IEE et se désengage des ICTC. De la même manière, la Turquie se repose et renforce ses avantages comparatifs dans le secteur des ITC qui reste un important pourvoyeur d'emplois et tente de diversifier son tissu industriel et en particulier les ICPC et IMM.

√ qu'il existe un décalage entre les réservoirs d'embauche identifiés dans les PM et les secteurs moteurs de la croissance, plus particulièrement pour le Maroc. La structure de la spé-cialisation pour 1985-1995 montre que les sources de création d'emplois sont les ITC alors que ce sont les ICPC, les IAA et les ITC, mais dans une moindre mesure, qui génèrent de la richesse. Les changements induits par le processus de Barcelone se sont traduits par une diversification des secteurs moteurs de la croissance en faveur des IEE et des IMM qui sont parmi ceux dont la capacité d'ab-sorption de main d'œuvre est la plus faible.

L'analyse de la transformation des exportations manufacturières des PM

-30-

menée dans le cadre d'une autre étude Femise[16] confirme ces résultats. La comparaison entre l'évolution des exportations manufacturières des PM et celle des pays émergents, notamment celle des deux générations de NPI et de la Chine, montrent que les expor-tations ont joué un rôle modeste en Méditerranée. Le différentiel de dyna-misme à l'export avec la moyenne des PED s'est creusé alors même que les traités d'association offraient aux PM un accès privilégié au marché européen. Cette approche quantitative est com-

plétée par une analyse de la « qualité » des exportations des PM, dans une perspective dynamique et comparative, qui s'appuie sur la construction d'un indicateur synthétique : l'Indicateur de Rattrapage des eXportations, IRX. L'IRX synthétise le degré de sophistication des exportations de chaque pays et permet, à toute période, de situer son niveau sur une échelle internationale allant du pays le moins performant au plus performant. Le calcul de l'IRX ne se fonde pas sur les caractéristiques du produit mais sur les caractéristiques des exportateurs de ces

Tableau X9 : contributions sectorielles*

création d’emploi valeur-ajoutée

1985-1995 1995-2001 1985-2001 1985-1995 1995-2001 1985-2001

Indonésie

IAA 15% (-68%) 12% 17% (-8%) 20%

ICPC 31% 50% 34% 29% (-15%) 33%

IEE 5% (-32%) 4% 7% (-5%) 7%

IMM 11% 28% 13% 27% (-30%) 26%

ITC 37% 22% 37% 20% (-42%) 13%

TotIT 100% 100% 100% 100% (-100%) 100%

Malaisie

IAA 5% 18% 6% 8% (-5%) 7%

ICPC 33% (-12%) 32% 35% (-47%) 30%

IEE 37% 82% 42% 34% 100% 44%

IMM 18% (-27%) 16% 18% (-35%) 15%

ITC 7% (-61%) 5% 5% (-14%) 4%

TotIT 100% 100% 100% 100% 100% 100%

Maroc

IAA 31% 15% 27% 39% 34% 39%

ICPC 17% 17% 17% 30% 19% 30%

IEE 1% 11% 3% 2% 24% 3%

IMM 6% 16% 8% 10% 23% 11%

ITC 45% 42% 44% 19% (-100%) 16%

TotIT 100% 100% 100% 100% 100% 100%

Tunisie

IAA 15% 2% 12% 16% 33% 17%

ICPC 23% 17% 22% 36% 24% 36%

IEE 4% 25% 9% 4% 26% 6%

IMM 13% (-100%) 9% 10% (-100%) 9%

ITC 45% 57% 49% 33% 17% 33%

TotIT 100% 100% 100% 100% 100% 100%

Turquie

IAA 4% 1% 14% 5% 13%

ICPC 13% 22% 19% 41% 43% 41%

IEE 6% 4% 5% 6% (-100%) 5%

IMM 0% 17% 11% 21% 24% 22%

ITC 80% 53% 64% 18% 28% 19%

TotIT 100% 100% 100% 100% 100% 100%

* : il s'agit des contributions positives aux variations absolues de l'emploi et de la VA déflatée. Pour information, les contributions négatives à la baisse sont reportées en italique et entre parenthèses.Source : étude Femise 22-22

-31-

confrontation et la prédominance de l'intra-firme suggèrent que la diversifi-cation des exportations des PM a pu être freinée par l'irruption des PECO, qui ont massivement attiré des IDE européens dans les années 1990.

D'autres indicateurs confirment ces ten-dances. A partir de l'analyse des efforts d'investissement, de la valeur-ajoutée, de l'emploi et de la productivité appa-rente du travail, il est clair que la spé-cialisation dérivée de l'ouverture et de la mise à niveau de l'économie n'ont pas permis au Maroc de se positionner sur un sentier de croissance cohérent avec les problèmes d'emploi qu'il connaît[17]. Plus grave, un processus de déqualifica-tion du travail semble à l'oeuvre ce qui explique les difficultés grandissantes des diplômés à trouver un emploi.

Si l'on se penche sur les formes de l'ajus-tement sectoriel, il faut noter que, dans le cas du Maroc, le processus de spéciali-sation en œuvre dans les industries élec-triques et électroniques ne provoque pas de montée en gamme. L'emploi a beau-coup progressé ainsi que l'investissement en début de période, mais la productivité apparente du travail et le salaire réel ont sensiblement reculé à partir de 1995. Ceci trouve son origine dans le fait que le Maroc est essentiellement un sous-trai-tant sur ce secteur. Pour ce qui est de la Tunisie, l'emploi a certes quintuplé entre 1993 et 2001, pour ce même secteur, cependant le salaire réel a fortement chuté et des progrès de l'investissement et de la valeur-ajoutée se manifestent lentement.

La situation turque est complètement différente puisque ici ce secteur génè-re une valeur-ajoutée conséquente, en

produits ; il s'inspire d'une méthode pro-posée initialement par C.H Kwan (2002) dans un autre contexte. L'IRX permet de mesurer l'écart entre la structure d'exportation d'un PED et celle du pays qui a la structure d'exportation la plus avancée et, en dynamique, la réduction de cet écart, c'est à dire la dynami-que de rattrapage des exportations du pays. L'application de cette méthode à la structure du commerce international depuis le milieu des années 1960 fait à nouveau ressortir la situation singulière du Maroc et de la Tunisie. Alors qu'Israël et la Turquie connaissent des évolutions analogues à celles des NPI2, la Tunisie et le Maroc, qui avaient le même IRX que les NPI 2 jusqu'au début des années 1970, ont connu une évolution diver-gente. Leur IRX fluctue mais demeure très bas.

Cette approche comparative est com-plétée par l'analyse des niches de diver-sification à un niveau plus fin (niveau 4 de la CTCI, soit un millier de postes) entre 1994 et 2003. Lorsqu'on écarte les exportations ne relevant ni de la valo-risation des ressources naturelles ni du TH, les niches exportatrices deviennent presque inexistantes en Jordanie et en Syrie et rares en Egypte. On en recense une dizaine au Maroc et en Tunisie, un nombre stable, et de l'ordre d'une ving-taine en Turquie. En termes de demande, ces niches se situent sur des marchés peu dynamiques. Sur ces segments, la concurrence est faible entre les pays du Maghreb et ceux du Machrek, mais forte entre tous les PM et la Turquie. Au Maghreb, ces niches concernent sur-tout des échanges intra-firmes, orientés vers l'Europe. Sur ce marché, les PM sont plutôt en concurrence avec les PECO qu'avec l'Asie et la Chine. Cette

-32-

hausse rapide et offre des niveaux de rémunération parmi les plus élevés. La Malaisie se trouve dans une position similaire : progression de l'emploi, de la valeur-ajoutée et de l'investissement, baisse des salaires et hausse de la pro-ductivité du travail, ainsi que l'Indonésie, qui suit à quelque distance, mais prend le même chemin.

Pour ce qui est des performances du secteur du textile-habillement, les investissements importants consentis en 1993-1996 ne se sont pas traduits par la redynamisation de la crois-sance et de la valeur-ajoutée espérée alors que les salaires se maintenaient aux niveaux antérieurs. Une montée en gamme sera difficile surtout dans un contexte fortement perturbé mar-qué par la fin de l'accord multi-fibres. Cela vaut pour la Tunisie où le recul très significatif des salaires n'a pas profité à l'investissement ou à une amélioration de la productivité appa-rente du travail qui est de plus en plus déqualifié.

La Turquie, a contrario, a su se doter des moyens nécessaires pour organi-ser une montée en gamme à savoir un rythme d'investissement élevé qui n'a pas fléchi, et a même été renforcé, face aux conséquences potentielles néfas-tes de la fin de l'accord multi-fibres. La production de valeur-ajoutée, la productivité apparente du travail s'ac-croissent sur la totalité de la période et la création d'emploi se fait au profit de travailleurs relativement plus qua-lifiés. L'Indonésie a le même type de profil avec des investissements qui ne faiblissent pas, des niveaux de salaire et de productivité apparente du travail stables et un emploi en hausse.

Au Maroc, l'investissement profite prin-cipalement aux industries de la chimie et de l'agroalimentaire. Le premier, qui est un secteur clef de l'économie maro-caine, parvient à préserver sa création d'emploi et ses salaires malgré une tendance à la baisse de la productivité apparente du travail suite à celle de la valeur-ajoutée qui se conjugue, en fin de période, à une tendance au recul des salaires. La Tunisie, du fait de l'épui-sement progressif de ses ressources naturelles, notamment pétrolières, a vu le poids de ce secteur diminuer (chute des salaires, de la valeur-ajoutée, des investissements, l'emploi se maintient mais la productivité apparente du travail perd 50%).

Dans ce domaine, la Turquie mise encore une fois sur les investissements ce qui explique les bons résultats en termes de valeur-ajoutée, et de productivité du travail, mais ce n'est pas un secteur très dynamique du point de vue de l'em-ploi. L'Indonésie est sur le même type de stratégie, l'investissement nourrie les gains de productivité et de valeur-ajoutée, mais, ici, le secteur crée de l'emploi.

Le secteur de l'agroalimentaire souffre également d'un manque de dynamisme à partir de la deuxième partie de la décennie 90. L'emploi continue de pro-gresser doucement, mais la valeur-ajou-tée baisse entraînant la productivité. En Turquie et en Tunisie, la vigueur de l'in-vestissement a favorisé le maintien des niveaux de productivité. Les salaires ont fortement progressé en Tunisie et sont parmi les plus élevés en Turquie.

Un des rares secteurs où les efforts d'in-vestissement sont restés importants sur

-33-

la fin de la période est celui des industries mécaniques et métallurgiques. Malgré cela la progression de la valeur-ajoutée demeure en retrait tandis que l'emploi et les salaires augmentent, ce qui tant à prouver que les investissements faits ne sont pas suffisamment valorisés. Les performances de la Turquie ou de la Malaisie sont nettement meilleures car l'investissement n'a pas fléchi sur toute la période et que la valeur-ajoutée a crû au même rythme, l'emploi étant stable.

La question qui se pose maintenant est de connaître le résultat, en termes d'em-ploi, des ces différentes stratégies indus-trielles dans un contexte d'ouverture commerciale. De ce point de vue, le cal-cul du contenu en emploi des échanges confirme le fait que les pays asiatiques considérés ont eu une stratégie complè-tement différente de celle adoptée par les PM.

Les premiers ont axé leur développe-ment économique sur une industria-lisation lourde et souvent diversifiée, protégeant ainsi leur capacité d'absorp-tion de la main d'œuvre peu qualifiée et accroissant celle des travailleurs plus qualifiés. La stratégie des pays asiati-ques a consisté :

(i) d'une part, à protéger des économies naissantes qui devaient créer des opportunités de montée en gamme, comme l'industrie électrique et élec-tronique, d'où un renouvellement des avantages comparatifs et un positionnement sur des secteurs plus dynamiques au niveau international. Les besoins humains et financiers nécessaires à la réorientation de la spécialisation ont été couverts grâce à un engagement résolu de l'Etat

qui a également ciblé les secteurs dont le poids devait être renforcé et étendu.

(ii) d'autre part, à restructurer des sec-teurs traditionnels en consentant un effort d'investissement souvent très conséquent, d'où des montées en gamme, tout en conservant leur niveau de création d'emplois.

Cette stratégie industrielle a préservé la cohésion sociale tout en créant des opportunités de croissance de manière à ce que le pays absorbe plus facile-ment les ajustements structurels liés tant aux contraintes macroéconomiques internes que de compétitivité interna-tionale. Ainsi, l'Indonésie ménage les possibilités d'emploi de la main d'œu-vre peu qualifiée dans les industries du textile et de l'habillement tout en soutenant le développement des sec-teurs de la chimie et de l'électronique plus intensifs en capital et en travail qualifié. La Malaisie, dont la restructu-ration du tissu industriel est plus avan-cée, a suivi le même chemin et peut dorénavant se focaliser sur les secteurs de pointe des secteurs électriques et électroniques qui sont devenus suffi-samment dynamiques pour créer de l'emploi. Les politiques d'intervention dans ces pays ont eu pour souci essen-tiel de réussir l'adéquation entre les besoins de qualifications de l'industrie et les compétences acquises au sein du système éducatif.

Pour ce qui est des PM, ceux-ci n'en-registrent pas d'amélioration de leur contenu en emplois des échanges sur les deux sous périodes, si ce n'est pour le textile-habillement. La Turquie étant encore dans une position relativement

-34-

plus favorable du fait de son comporte-ment d'investissement.

Si les performances des PM sont telle-ment éloignées de celles de ces pays d'Asie cela provient en partie du fait qu'ils ont des conceptions différentes du rôle de l'industrie dans le processus de croissance et que la question de l'emploi ne se pose pas dans les mêmes termes. La preuve en est l'évolution du secteur tertiaire dont le développement a suivi et accompagné celui de l'industrie qui a modelé ses activités (banques, con-seil aux entreprises, etc.) dans les pays d'Asie. Dans les PM, le poids du secteur tertiaire dans l'économie reflète peu le stade de l'industrialisation du pays, il en est relativement déconnecté, il renvoie à la nécessité de répondre à l'offre d'em-ploi peu qualifiée. Ce positionnement ne paraît pas optimal dans la mesure où même s'il satisfait aux urgences de court terme et assure la pérennité de l'ordre social, il oblitère les capacités d'absorp-tion d'emploi de long terme et pèse sur la qualité de la main d'œuvre.

Les crises graves qui ont touché la Turquie ont peut-être favorisé ces res-tructurations en abaissant leur coût d'opportunité, lui faisant faire un bond en avant conséquent sur le chemin de sa transition. Pour les PM, la crise que risque de véhiculer la fin de l'accord multi-fibres avec ses effets induits sur le reste de l'économie pourrait les obli-ger à accélérer le rythme de la mise à niveau et à développer une stratégie de recherche de nouveaux avantages com-paratifs étant donné le stock de main d'œuvre très qualifiée dont ils disposent d'une part, et de montée en gamme, d'autre part, en ne se cantonnant pas à des activités de sous-traitance qui ne

permettent pas de capturer une part importante de la rente. L'expérience des pays asiatiques ou de la Turquie montre que refaçonner sa position sur les mar-chés internationaux est possible pourvu que ce mouvement soit servi par des politiques industrielles résolues et un engagement fort de l'Etat.

Cet engagement peut être celui d'un investisseur, mais se posera alors rapi-dement la question du maintien des équilibres nécessaires, comme celle de la rupture avec le système précédent qui a, force est de le constater, montré ses limites. Il peut aussi transiter par l'action sur le comportement des firmes, comme on l'a vu edans la première partie. Il s'agit ici d'accompagner le mouvement des acteurs en facilitant leur quotidien opérationnel pour qu'ils soient amenés à adopter des stratégies en cohérence avec les objectifs nationaux. On l'a vu plus haut, la dynamique du secteur tex-tile habillement est de ce point de vue exemplaire.

3. Le textile, secteur révélateur des dynamiques industrielles

Le secteur du textile-habillement a été le moteur de développement de nombreux pays et reste important nombre de pays développés. Ainsi au sein de l'UE, la part de la valeur-ajoutée du TH dans celle du secteur manufacturier se monte à 4% et cette activité absorbe 7% de l'em-ploi. L'Italie, le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne et l'Espagne produisent les trois quarts du T-H de l'UE. Au total 200 milliards (billions) d'euros que se par-tagent 177 000 entreprises employant plus de 2 millions de personnes[18]. Les premiers exportateurs de textile sont la Chine, l'Italie, l'Allemagne, la République

-35-

de Corée, Taipei, la France, la Belgique, le Japon et le Royaume-Uni, pour ce qui est de l'habillement dominent la Chine, l'Italie, l'Allemagne, la France, la Turquie, l'Indonésie, la République de Corée et la Thaïlande.

Mais, dans le cas des PM, l'enjeu est renforcé, d'abord par le rôle historique joué par le secteur dans l'industriali-sation des économies, ensuite par son poids aujourd'hui dans leurs industries, dans leurs échanges et surtout dans les emplois, enfin parce qu'au moment d'un choc d'ouverture majeur, que consti-tue la fin de l'accord multi-fibre et que va constituer dans deux ans celle des mesures transitoires prises par l'UE et les Etats-Unis lorsqu'ils ont pris cons-cience de l'impact quantitatif potentiel, le secteur est très symptomatique du rôle que peuvent jouer différentes stra-tégies industrielles, tant en comparant les PM aux pays asiatiques qu'au sein même des PM.

Essor de la filière textile

Le Maroc et la Tunisie étaient des pays très ouverts avant leur indépendance et dont l'économie nationale dépen-dait largement des importations de produits européens dans le secteur du TH. L'obtention de leur indépendance a coïncidé avec la mise en place de plans de substitution aux exports qui ont dynamisé les investissements. 41% des investissements agréés au Maroc vont au secteur TH en 1960. Cependant, ces plans montrent rapidement leurs limites et des nouvelles mesures sont prises visant à accentuer le rôle des exports dans la croissance. En 1972, la Tunisie adopte une loi qui instaure le statut d'entreprise exportatrice et prévoit des

avantages fiscaux tandis que les entre-prises sont encouragées à produire pour le marché intérieur qui reste protégé. Le Maroc a pris cette même voie et le plan d'ajustement structurel de 1983 et la promulgation d'un code des investis-sements et des exportations favorisent le développement des échanges.

L'essor du secteur TH dans ces pays a bénéficié du mouvement de délocalisa-tion européen qui a été à l'origine, en moyenne, de 30% des investissements faits au Maroc, après 1987 ; et de la signature du traité d'association UE-Tunisie en 1976. Entre 1972 et 1981, l'industrie du TH crée 40% des nou-veaux emplois dans le secteur manufac-turier en Tunisie et 48% pour le Maroc, entre 1980 et 2000. Elle compte pour 40% des exportations manufacturières de la Tunisie en 1980 soit plus que pour le Maroc ou la Turquie.

La structure du secteur du TH dans les trois pays du Maghreb est très diffé-rente. En Algérie, au début des années 1980, le secteur du TH représente 30% de l'emploi industriel total. Avant les privatisations qui ont débuté dans les années 1990, le secteur du textile était dominé par des entreprises publi-ques alors que les entreprises privées avaient une place prépondérante dans le secteur de l'habillement. Ces deux secteurs s'enfoncent dans la crise, inca-pables de faire face à la concurrence induite par les privatisations. En 2001 la production de textile se stabilise autour de 25% de son niveau de 1990 et celle d'habillement autour de 40%. L'emploi a beaucoup reculé jusqu'en 2000. Dans la première partie de la période de privatisation, les détaillants algériens ont fait de plus en plus appel

-36-

à des productions étrangères mais cette tendance s'est inversée et la production domestique augmente depuis peu. En 2002, le secteur compte pour 4,4% de la production industrielle (hydrocarbu-res exclus) tandis que le secteur privé du TH représente 9,9% de la valeur de la production en 2003.

L'Egypte a un parcours très différent. L'industrie se développe grâce au sou-tien de la banque Misr et à la fin de la guerre, Misr Spinning and Weaving qui compte quelques 25000 salariés est la plus grande entreprise industrielle du Moyen-Orient. Dès 1945, le TH occupe une place prépondérante dans l'écono-mie turque et totalise 42,4% des entre-prises et 37% de l'emploi du secteur manufacturier. Depuis les nationalisa-tions des années 1960-1962 où seuls les établissements de moins de 200 salariés sont restés privés, le secteur public domine le textile, et le privé l'ha-billement (75% des exports).

L'industrie textile est également très ancienne en Turquie. Largement dépen-dant des importations tant qu'il n'a pas retrouvé son autonomie douanière le pays a, dans le cadre du premier plan quinquenal et avec l'aide des soviéti-ques, confié à la Sümerbank le déve-loppement du secteur TH. Mais, ici, le secteur privé a surtout été présent dans la production de fils et tissus (50% à 60%).

L'activité textile s'est beaucoup accrue après la seconde guerre mondiale bénéficiant du boom sur le coton dû à la guerre de Corée, des mesures d'incitation à l'investissement dans le cadre de la politique de substitution des importations et de protection du

marché domestique. Ce n'est qu'avec la politique d'ouverture commerciale et de promotion des exportations que le secteur de l'habillement a décollé et ses performances à l'export sont devenues meilleures que celles du textile à la fin des années 1980. Dans la décennie 90, ce sont les relations privilégiées de la Turquie avec l'Allemagne et la perspec-tive de la création de l'Union douanière avec l'UE qui ont tiré les exports d'ha-billement et soutenu et encouragé les efforts considérables d'investissement et de modernisation entrepris.

Le TH est une composante essentiel-le des exportations industrielles en Jordanie, au Liban, au Maroc, en Syrie et en Turquie. Etant donnée l'incapa-cité de la plupart de ces pays de créer une filière sur le territoire national, il est également un poste important des importations.

Le TH demeure le plus important seg-ment du secteur manufacturier et le premier employeur en Egypte, au Maroc, en Tunisie et en Turquie. Au Maroc, il a contribué à créer 60% de nou-veaux emplois manufacturiers depuis 1986 contre plus de 30% des emplois industriels de la Tunisie. Il s'agit d'un emploi fortement féminisé et informel et les chiffres sur l'emploi du secteur sont peu fiables. Ainsi, en Turquie, les professionnels estiment que l'emploi du secteur est cinq fois plus élevé que ne laissent à penser les statistiques. Autre difficulté, il est malaisé d'évaluer la production dans la mesure où dans cette activité quelques grandes entre-prises[19], souvent parmi les plus gran-des du pays et générant des exports conséquentes, avoisinent avec de très nombreuses PME-PMI.

-37-

L'importance majeure au niveau économique et social

Au Maroc, comme en Tunisie, le secteur de l'habillement occupe un rôle central dans les exports manufacturées et cela depuis les années 80. Pour la Tunisie, depuis 1996, le textile représente plus de la moitié des exportations en valeur de produits manufacturés et, en 2001, le textile, les chaussures et le cuir comp-tent pour 48,5% des exports totales en valeur (ce chiffre tombe à 42% en 2002). Le Maroc est dans une situation similaire : les exports de TH s'élevaient à 23% de la valeur totale des exporta-tions manufacturées en 1996 et 33% en 2001[20]. Pour l'Algérie, le poids est moindre[21].

Dans les trois pays du Maghreb, au sein du secteur textile, c'est celui de l'habille-ment qui domine en termes de valeur de la production et d'emploi. Cet élément structurel a son importance puisque le secteur de l'habillement est plus intensif en travail que celui du textile en général, ce qui se répercute sur le niveau de l'em-ploi formel. La production de TH au Maroc se monte à 15% de la production manu-facturière en valeur mais compte pour 45% de l'emploi, en 2003. La Tunisie est dans le même cas où la production de ce secteur représente le tiers de la produc-tion manufacturière alors qu'il absorbe plus de la moitié de l'emploi et compte pour 7,1% du PIB (EIU, 2003).

Il faut souligner quelques caractéris-tiques propres au secteur du TH dans les pays du Maghreb qui sont une part importante d'emploi informel et un com-portement des firmes qui recourent à de l'emploi non déclaré afin de réduire les coûts. L'origine des difficultés de

compétitivité rencontrées par ces pays réside dans le niveau du coût de la main d'œuvre qui est significativement plus haut que celui que supporte leurs con-currents asiatiques. En 2002, le salaire moyen dans le secteur textile au Maroc et en Tunisie était presque 5 fois celui de la Chine et équivalait à celui enregis-tré dans certains pays de l'Est comme la Slovaquie et l'Estonie ou encore en Turquie. Avec la fin de l'accord multi-fibres et son impact sur les quotas qui étaient imposés aux concurrents d'Asie, il était fatal que les pays du Maghreb souffrent de la pression concurrentielle et licencient.

Du point de vue de la structure et des conditions d'emploi dans le secteur du TH au Maroc, il apparaît une domination de l'emploi féminin, de la production informelle, des employés jeunes et/ou non mariés ayant un niveau d'éducation faible et qui n'ont pas été scolarisés régulièrement, et ont souvent occupé un emploi temporairement. En 1999, 61% des salariés et 90% des travailleurs à domicile étaient des femmes. Les employeurs ont une préférence mar-quée pour les femmes célibataires qui n'ont pas de responsabilité familiale et sont faciles à former. Selon Bouquia (2002), 59% des employées de ce sec-teur ont moins de 25 ans contre 45% des employés. Reste qu'ils ont une res-ponsabilité familiale en termes de con-tribution aux dépenses de la famille au sens large. Le travail temporaire est très répandu surtout dans les PME. Cette structure de l'emploi découle de l'orien-tation principalement vers l'export de l'activité des firmes du secteur formel et de la dépendance vis-à-vis des comman-des venant des distributeurs européens. Ces derniers préfèrent faire appel à des

-38-

entreprises proches géographiquement lorsque les délais de livraison doivent être courts (Belghazi), au cas où, par exemple, un produit est écoulé plus rapidement que prévu et qu'un réassort est nécessaire, et les entreprises basées au Maroc sont apparemment capables de satisfaire ces contraintes.

Les enquêtes menées pour l'étude Femise montre que si la force de travail est rela-tivement jeune au Maroc, ce n'est pas vrai pour la Tunisie et l'Algérie où les travailleurs ont plutôt moins de 30 ans ; Par contre, ici aussi, l'emploi féminin domine. Cependant, en Tunisie, où le revenu moyen par habitant est presque deux fois plus élevé qu'au Maroc, les motivations des femmes pour occuper un emploi sont plus personnelles, comme avoir suffisamment d'argent pour ache-ter un trousseau de mariage.

Une crise révélatrice qui a débuté avant la fin de l'accord multi-fibre

Les tendances récentes pour les pays du Maghreb montrent que la production a commencé à décliner au début des années 1990 pour l'Algérie, en 1999 pour le Maroc et en 2002 pour la Tunisie, et que l'emploi a suivi l'évolution de la production.

La crise du TH est apparue à la fin des années 1990 au Maroc. Des licencie-ments ont eu lieu. L'appréciation du Dirham marocain et les incertitudes liées à la fin de l'accord multi-fibre ont engen-dré un recul de l'investissement d'où de nouveaux licenciements et des pertes de parts de marché en Europe. L'expansion de l'emploi dans le secteur du TH a souffert de l'évolution défavorable de la demande et des prix. Pour la première

moitié de l'année 2005, le Maroc a connu une perte d'emploi de 60 000 alors que les effectifs pour 2002 étaient de 202 000 personnes[22]. Le Maroc rencontre des problèmes y compris sur son propre marché, qui s'incarnent dans une baisse des prix, ce qui explique les performan-ces décevantes de ce secteur. Au troisiè-me trimestre 2005, la production de l'in-dustrie de l'habillement a perdu -8,9% par rapport à 2004 et la branche textile et cuir -0,8% alors qu'elle progressait de 5% en 2004. Au deuxième trimes-tre 2005, les exportations d'articles de confection et de bonneterie ont fléchi de 10,8% et de 17,9% respectivement. Ceci a occasionné une baisse de -3,3% de la valeur ajoutée du « textile et cuir »[23].

Quant à la Tunisie, elle a bien surmonté le ralentissement intervenu dans les années 1980 et la croissance du secteur a surpassé celle des exportations manu-facturières. Le pays a pu préserver sa part de marché en Europe, qui atteint son maximum 6,1% en 1998, mal-gré l'arrivée de nouveaux concurrents (Maroc, Turquie, puis pays de l'Est). Ce n'est pas le cas depuis la fin de l'accord multi-fibres. Attentisme et incertitude, ralentissement des réformes d'un côté alors que dans le même temps, les grands pays exportateurs accroissaient leurs investissements. 79% des entrepri-ses tunisiennes du secteur ne produisent que pour l'export[24] et connaissent néanmoins des difficultés à soutenir la concurrence des producteurs asiatiques à la fois sur le marché étranger et domestique.

En Turquie, la crise bancaire et économi-que de 2001 et la perte de salaire réel qu'elle a entraîné a permis de restaurer la compétitivité des exportations turques

-39-

minée par une inflation galopante et une forte appréciation du taux de change réel. A partir de 2005, la production du secteur TH fléchie cependant, alors que le secteur manufacturier dans son ensemble est en progression grâce à la diversification vers l'automobile et l'élec-tronique.

En Algérie, le secteur est entré en crise plus tôt qu'en Tunisie ou au Maroc suite aux restructurations visant le passage à une économie de marché. Dans les années 80, les conditions de travail étaient relativement bonnes, surtout dans le secteur public, moins pour les employés du secteur privé, en particulier des PME, qui ont été remplacés par des apprentis ou des travailleurs à domicile afin de diminuer les coûts de production. Dans les années 1990, la restructuration économique a engendré une vague de fermeture d'entreprises et de réduction de la production (1500 entreprises au total ont été concernées). L'emploi dans ce secteur a reculé de près de 60%, les salaires ont baissé et le travail occa-sionnel s'est accru. La législation sur les conditions de travail (normes de santé et de sécurité, couverture sociale, horaires de travail, etc.) a été moins scrupuleu-sement respectée. Dans la même mou-vance, les congés payés ont été abolis ou réduits, les programmes de formation abandonnés et les cantines ou les cen-tres médicaux fermés. Les travailleurs n'ont pas été déclarés et la pratique du paiement du salaire en espèces s'est répandue.

La fragilité du secteur est d'essence industrielle

L'industrie du TH dans les PM est très fra-gile car, hormis la Turquie, il apparaît:

√ que ces pays n'ont pas su construire de filière, c'est-à-dire établir des rela-tions étroites clients-fournisseurs. Or, tout au long de la filière les activités peuvent être segmentées et localisées dans des pays différents sans que cela ait des implications sérieuses sur le prix du produit final dans la mesure où le coût de transport des produits intermédiaires est relativement fai-ble. Les variables stratégiques ici sont le temps de transport et le coût de stockage supportés par chaque inter-venant de la filière. Ceci explique l'es-sor de l'externalisation des opérations de coupe et de montage permettant de tirer parti des conditions de fabri-cation spécifiques à chaque lieu et cela aussi bien à l'échelle d'une ville que d'un ou plusieurs pays.

√ que leurs entreprises n'ont pas su améliorer leur position sur la chaîne de valeur. La position centrale dans l'organisation de la chaîne de valeur dans le secteur du textile est tenue par le distributeur car il maîtrise les variables stratégiques qui sont la conception des produits et la con-naissance du marché. C'est donc à ce niveau que se crée le plus de valeur (tableau X12). Le prix d'un article peut être de trois à quinze fois son prix sorti d'usine. La différence s'ex-plique non par une qualité du tissu ou un temps d'exécution significati-vement plus élevés mais du fait des coûts de promotion et de distribution et de la « rente » que procure la mar-que. Reste que les inputs, tels que le tissu qui représente près de 60% du prix de revient d'un article d'habille-ment, sont les éléments essentiels de la compétitivité du produit et non les coûts de fabrication[25].

-40-

Ces quelques faits qui illustrent le mode d'organisation du secteur du TH sou-lignent la différence qui existe entre l'entreprise qui exporte sous une mar-que locale propre et qui contrôle et peut capter une large part de la valeur, et le sous-traitant qui confectionne ces mêmes produits pour le compte d'un

donneur d'ordre étranger qui lui a fourni le modèle et le tissu (tableau X12). La compétitivité du premier repose sur des facteurs hors coûts (collection, noto-riété), celle du second sur les coûts et les délais. Un troisième acteur peut s'immiscer entre les deux premiers, le co-traitant qui confectionne un article à

Tableau X10 : structure des coûts dans l'industrie du vêtement dans plusieurs pays, 2001 (% de la production)

Source : étude Femise 22-34

Tableau X11 : structure des coûts dans l'industrie textile dans plusieurs pays, 2001 (% de la production)

Source : étude Femise 22-34

Tableau X12 : Valeur ajoutée à chaque étape de la chaîne de valeur ajoutée (des fibres à la distribution)

Source : étude Femise 22-34, à partir de Kurt Salomon Associates, cité dans Textile Outlook internatio-nal, Janvier 2004

Main d’œuvre non qualifiée

Main d’œuvre qualifiée Capital Total de la valeur

ajoutée Cons.

Intermédiaire dont importé

Canada 25,9 5,0 10,2 41,2 58,8 19,8

USA 21,0 5,8 5,8 32,6 67,4 13,8

France 21,6 4,7 8,8 35,0 65,0 24,3

Italie 14,3 3,1 16,4 33,8 66,2 13,5

Japon 21,9 4,0 11,2 37,1 62,9 7,8

Hong Kong, China 22,6 7,9 12,9 43,4 56,6 13,0

Corée 15,0 2,9 4,7 22,6 77,4 15,9

Chine Taipei 20,8 3,5 6,0 30,3 69,7 10,9

Chine 18,2 2,5 12,2 32,9 67,1 6,7

Inde 21,1 2,9 7,8 31,8 68,2 1,8

Viet Nam 9,0 1,2 3,8 14,0 86,0 40,4

Tchéquie 21,1 3,2 9,9 34,1 65,9 28,9

Maroc 14,6 2,1 10,9 27,6 72,4 37,9

Main d’œuvre non qualifiée

Main d’œuvre qualifiée Capital Total de la valeur

ajoutée Cons.

Intermédiaire dont importé

Canada 22,7 3,1 10,3 36,1 63,9 24,2

USA 19,5 4,2 10,3 34,0 66,0 9,7

France 13,8 3,7 7,2 24,7 75,3 22,0

Italie 11,8 3,2 7,2 24,7 75,3 22,0

Japon 17,6 6,6 7,0 31,2 68,8 11,2

Hong Kong, China 9,0 3,9 10,8 23,8 76,2 5,8

Corée 12,0 2,3 16,2 29,5 70,5 20,0

Chine Taipei 10,4 3,3 8,3 22,0 78,0 10,2

Chine 9,7 1,6 12,0 23,2 76,8 8,1

Inde 17,8 2,8 6,7 27,3 72,7 4,0

Viet Nam 10,2 1,6 12,4 24,3 75,7 34,3

Tchéquie 13,0 1,8 13,8 28,7 71,3 35,1

Maroc 5,8 0,9 6,2 13,0 87,0 44,3

Etape Fibre Fils Tissage Confection Distribution

Chemise Homme

Unité 1kg 0,8 kg 4,85 m 2,1 chemises 2,1 chemises

Valeur en USD 1 2,0 4,7 9,8 22,7

Valeur ajoutée (USD) 1,0 2,6 5,1 12,9

% de valeur finale 4% 5% 12% 23% 57%

Pantalon

Unité 1 0,75 kg 2,3 m 2 pantalons 2 pantalons

Valeur en USD 1 2,2 7,5 14,5 37,5

Valeur ajoutée en USD 1,2 5,2 7 23

% de valeur finale 3% 3% 14% 19% 61%

-41-

partir de tissus qu'il a acheté et dont la compétitivité renvoie à sa connaissance du marché des produits de base.

Ces deux points de vue, la chaîne de valeur et la filière, ne sont pas entiè-rement indépendantes l'une de l'autre. La place, que les entreprises d'un pays peuvent occuper sur la chaîne de valeur, dépend du niveau de développement de la filière. Plus l'industrie est diversifiée, plus une entreprise peut trouver facile-ment les matériaux de base dont elle a besoin dans son pays, plus les activités de co-traitance peuvent se multiplier.

L'accord multi-fibre et les accords com-merciaux préférentiels, tout en freinant l'immigration et en dynamisant l'émer-gence de pays en développement, ont favorisé l'apparition de « spécialisations habillement » dans les pays voisins de l'Europe qui, à leur tour, ont permis un accroissement des exportations de tissus européens. Les produits entrants sur le marché européen hors droits de douane doivent respecter les règles d'origine et les PM, à l'exception de la Turquie, n'ayant pas su mettre en place une filiè-re sur le territoire national ont été obligé d'importer les tissus d'Europe.

Cependant, ce mouvement a induit un morcellement du marché. Les quatre principaux exportateurs (Chine, Mexique, Inde, Turquie) comptent pour 38% des exportations mondiales et suivent une vingtaine de pays à hauteur de 1% du total mondial. L'examen des coûts salariaux et de la compétitivité et des performances de l'industrie des divers protagonistes montre que les positions que certains occupent sur le marché mondial sont maintenues artificiellement et uniquement par l'existence de l'accord

multi-fibre. Les pays qui ont éliminé les quotas ont d'ailleurs enregistré une forte concentration de leurs imports d'où deux configurations de l'économie :

√ des pays dont les exportateurs de TH sont présents sur tous les marchés, qui s'appuient sur une offre textile nationale abondante et diversifiée ;

√ des pays dont les exportateurs, essentiellement des sous-traitants, ont un rayon d'action régional (mar-ché européen ou américain), mais où le secteur du TH compte pour plus de 40% des exports du pays, même si sa part dans la valeur-ajoutée est faible (faible productivité, emplois peu qualifiés), est un des principaux employeurs de l'industrie, permet de pallier à la faiblesse d'autres exporta-tions et attire des IDE (Bangladesh, Cambodge, Egypte, Syrie, Tunisie).

En termes de compétitivité, les PM accu-sent plusieurs types de handicaps :

√ ils ne peuvent rivaliser en termes de coûts salariaux avec les pays d'Asie où les salaires varient entre 50 euros (Mayanmar) et 100 euros (Chine) bien qu'ils le puissent vis-à-vis des pays d'Europe (5% à 15% des coûts européens).

√ ils souffrent d'un retard sensible de qualification de la main d'œuvre avec l'impact négatif que cela peut avoir sur leur productivité.

√ la rigidité du marché du travail freine les réallocations de main d'œuvre.

√ l'évolution des taux de change effec-tifs réels pèse sur la compétitivité

-42-

externe et l'évolution du cours de change du dollars a soutenu celle des pays asiatiques sur les marchés euro-péens.

Reste qu'ils ont un avantage de proxi-mité avec le marché européen, non que le coût de transport soit particulièrement bas, mais cela favorise une meilleure réactivité. L'envoi par avion, qui repré-senterait un coût additionnel de 1 euro par article et qui n'est pas pénalisant pour les articles de moyenne gamme et plus, risque d'entamer cet avantage (10% des exports chinoises). La proxi-mité culturelle demeure.

Un fait troublant est le recul de la part de marché des pays du Maghreb sur le mar-ché européen intervenue depuis 1998 : 5,4% en 1998 contre 4,9% en 2004 pour le Maroc et 6,1% contre 5,2% pour les mêmes années pour la Tunisie. Ces mauvaises performances ne peuvent être attribuées à la progression de la Chine sur les marchés mondiaux, suite à son entrée à l'OMC, ou à la libéralisation des échanges de certains biens puisque ceux-ci ne figurent pas parmi les princi-pales exports de ces pays.

Ce phénomène s'explique en particulier par le ralentissement de l'investissement qui a accompagné la montée des incerti-

tudes quant à l'ampleur des conséquen-ces néfastes de la fin de l'accord multi-fibre. La crise du secteur TH dans les pays du Maghreb a probablement une dimension auto-réalisatrice. Les chiffres d'achat d'équipement le prouvent. Entre 2000 et 2003, quand la Chine achetait la moitié des équipements de filature (fibre longue) vendus dans le monde, et l'Inde et le Pakistan le quart de ceux pour fibre courte, l'Europe de l'Ouest acqué-rait 18000 métiers et la Turquie 11000 soit plus que l'Inde, le Bangladesh, le Pakistan et la Thaïlande réunis. L'effort fourni par la Turquie est considérable puisque malgré la très grave crise éco-nomique que le pays traversait à cette époque, le PIB a perdu quelques 7%, 40% du parc a été renouvelé. L'Egypte et la Syrie ont suivi plus mollement alors que la Tunisie et le Maroc ont fait très peu d'investissements.

Les conséquences de la fin de l'ac-cord Multi-fibre

Les échanges dans le secteur du tex-tile-habillement sont régis par l'accord général sur les tarifs et le commerce du 1er janvier 2005 qui met fin au sys-tème de quotas d'importation en vigueur depuis 40 ans. La libéralisation des échanges de textile tant redoutée est donc aujourd'hui une réalité à laquelle

Figures 5 et 6 : Investissements dans le textile habillement en % du chiffre d'affai-res (Tunisie et Maroc)

-43-

les PM, comme l'UE et les Etats-Unis, doivent faire face. Certes, face à la levée de bouclier engendrée par les premiers effets de la fin de l'accord multi-fibre, les quotas sur les importations chinoises ont été réintroduits de façon temporaire au printemps 2005. Les PM ont ainsi obtenu un délai supplémentaire de deux ans pour restructurer ce secteur et être prêts à affronter la concurrence asiati-que. Après janvier 2008, la seule protec-tion qui subsistera sera tarifaire 12,4% dans le cas de l'UE (avec un maximum de 13,4%) et 12,8% pour les Etats-Unis (avec un maximum de 29,7%).

La conséquence de la levée des quotas sur l'industrie européenne est un recul très sensible de ses exportations de fils et tissus qui se monterait à près de 15%. Pour les Etats-Unis et l'UE, le danger est moins l'invasion de leurs marchés par des produits fabriqués en Chine qu'une baisse significative de leurs exporta-tions de fils et tissus. Ceux-ci alimentent les industries d'habillement d'Europe Centrale, du Sud de la Méditerranée et d'Amérique Centrale qui subissent le choc de la concurrence des produits chinois de plein fouet et l'évolution des exports de fil et tissus européens et américains n'est qu'un effet induit des difficultés que rencontrent les industries de ces pays.

Pour les PM, la nouvelle situation est porteuse à la fois de risques puisque les échanges des industries textiles du Maghreb avec l'UE notamment étaient relativement bien protégés par ce systè-me mais ouvre également de nouvelles opportunités que ces pays doivent saisir. Cela demandera un effort d'adaptation considérable face à des concurrents qui se sont plus tardivement, mais plus

résolument, engagés dans la voie des réformes.

Les opportunités et les risques peuvent être mesurés en quelques chiffres. Le Bangladesh, le Sri Lanka, le Vietnam, la Mauritanie et le Cambodge ont enre-gistré des rythmes de croissance très élevés dans ce secteur. La Chine a été le premier exportateur de T-H sur la pério-de 1995-2002 et sa part du marché mondial est passée de 22,5% à 30% dans le secteur de l'habillement et de 16% à 22% dans celui du textile. Mais, à l'inverse, de nombreuses industries n'ont pas su s'adapter et survivre aux changements de la concurrence. Celle des vêtements au Bangladesh pourrait être la prochaine. Selon un rapport du FMI, le pays pourrait perdre un quart de ses exports, ce qui se traduirait par 2,3 millions d'emplois en moins, après la suppression des quotas. L'Afrique du Nord, la Turquie et les pays d'Europe de l'Est pourraient être en partie évincés du marché européen tout comme les producteurs mexicains et africains du marché américain. Le succès rapide du Cambodge, pour lequel les vêtements sont la première production manufactu-rière, est également en péril.

L'impact de la levée des quotas est souvent mesuré avec un biais qui tend à minimiser la concurrence chinoise. Les mesures sont en effet réalisées à partir des similitudes des structures d'exportation des pays qui entrent en concurrence sur les marchés de l'UE, biaisées dans le cas de la Chine par l'utilisation de données d'exportation d'habillement vers l'UE qui reflètent l'existence des quotas. Pour contourner ce problème, on peut calculer l'indice en prenant comme référence les échanges

-44-

Chine-Japon dont la structure n'est pas très éloignée de celle avec l'UE mais dont les montants ne souffrent pas des mêmes limites. Il apparaît alors que la concurrence potentielle des exporta-tions chinoises sur celle des PM est très forte et que les PM sont concurrents entre eux par bloc (Maroc et Tunisie, mais pas Maghreb-Machrek et Turquie avec les PM). La concurrence est cepen-dant moins forte qu'avec les pays de l'Est nouvellement membres de l'Union Européenne.

Les effets attendus du changement sont alarmants par leur importance, même si les mesures sont toujours indicatives. On s'attend par exemple à ce que la part sur le marché européen du Maroc passe de 5% à 4% en 2005 du fait de la hausse des importations de l'UE en provenance de l'Asie et en particulier de Chine. Cependant, dans ces pays le contenu en imports des exports de tex-tile est élevé et ceci pèse sur la part de valeur-ajoutée marocaine ou tunisienne dans la production totale et ne permet pas d'employer l'arme de la dévaluation pour dynamiser la compétitivité inter-nationale.

L'expérience de 2002 de la forte crois-sance des parts de marché de la Chine sur le marché européen des onze pro-duits concernés par la levée des quotas suite à l'entrée de la Chine à l'OMC (+13% à +45%) est édifiante et pré-figure ce qui se produira sans doute dans 2 ans. Sur les huit produits qui concernaient l'habillement, la Chine a enregistré des progrès fulgurants et une chute des prix toute aussi éton-nante : -12% à -80% des prix unitaires en euros (figures 6 et 7). Cela est le résultat de la suppression des quo-tas qui impliquaient des coûts, de la réforme de l'industrie chinoise puisque les entreprises d'Etat ont perdu leurs privilèges ce qui a permis à d'autres de progresser et à la réduction du nombre d'intermédiaires.

Sachant que le secteur du TH a joué un rôle moteur dans le développement de la production, de l'emploi et des expor-tations et étant données les caractéris-tiques socio-économiques du secteur, le choc de compétitivité induit par les modifications des données de la concur-rence sur les marchés internationaux pourrait donc se traduire par :

Tableau X13 : Indicateur de concurrence dans la filière textile-habillement, PM, nouveaux membres, Chine, à partir des données 2003

Source : étude Femise 22-36L’indicateur utilisé est nommé Cos Cos. Pour comparer les structures exportatrices vers l’UE d’articles de l’habillement d’un pays i à celle d’un pays j, on a considéré les vecteurs Eik et Ejk pour k=1,…,n (n étant les 246 postes de la nomenclature HS pour l’habillement) qui représentent les exportations des deux pays étudiés dans ce secteur. La «distance» entre ces deux vecteurs est obtenue en calculant le cosinus de leur angle qui varie de 0 (dissimilarité totale) à 1 (similarité totale).

Roumanie Tunisie Maroc Pologne Tchéquie Egypte Syrie Chine Chine*

Turquie 0,5 0,6 0,7 0,5 0,6 0,7 0,8 0,3 0,8

Roumanie 0,7 0,8 0,9 0,8 0,4 0,4 0,4 0,7

Tunisie 0,9 0,8 0,8 0,4 0,2 0,3 0,6

Maroc 0,9 0,8 0,6 0,5 0,4 0,7

Pologne 0,8 0,4 0,3 0,4 0,6

Tchéquie 0,0 0,0 0,4 0,8

Egypte 0 0,3 0,7

Syrie 0,2 0,6

-45-

(i) un déplacement de la main d'œuvre du secteur formel vers le secteur informel de l'économie (PME-PMI et entrepreneurs indépendants),

(ii) une baisse du rendement du travail suite au déplacement de la main d'œuvre formelle et cela dans les secteurs des biens échangeables et non-échangeables, suite au recul du salaire horaire ou du temps de travail,

(iii) une évolution du salaire qui dépend de l'intensité en capital et en quali-fication des différentes branches de production des PME.

Une étude menée par une équipe Femise montre, en particulier à partir d'enquê-tes[26], que :

√ les conséquences de la perte d'emploi varient au sein et entre les pays en fonction des caractéristiques structu-relles des trois pays et de leur niveau

de développement économique mais que l'insécurité augmente.

√ du point de vue des conditions d'em-ploi, l'idée selon laquelle il existe une dichotomie claire entre les fir-mes du secteur formel et celles du secteur informel semble fausse. Il existerait un continuum d'entrepri-ses dont les caractéristiques et les comportements s'incarnent en une façon de mener leurs affaires qui est en partie conforme à la législation et aux règles formelles et en partie cherche à en contourner certaines obligations, notamment en ce qui concerne l'emploi.

√ que, parce que les firmes ferment ou réduisent les effectifs du fait des restructurations en cours, il est dif-ficile de retrouver un emploi dans le même secteur, que la période de chômage se prolonge, et que les difficultés économiques s'accroissent même si ce n'est pas le cas de tous

les travailleurs. Dans l'ensem-ble, les enquêtes confirment les résultats d'autres études selon lesquelles l'emploi infor-mel progresse en Afrique du Nord.

√ qu'il est très peu pro-bable que le secteur de l'ha-billement dans les trois pays soit en mesure d'absorber les travailleurs qui ont été licen-ciés sur les quelques dernières années ou vont l'être et cela quelle que soit l'efficacité des restructurations et des amé-liorations qui seront faites. Par ailleurs, tout ce qui peut être fait pour accroître la compéti-

Figure 6 et 7 : Augmentation de la part de la Chine dans les importations UE et chute des prix unitaires

Source : étude Femise FEM22-34

-46-

tivité et l'efficacité de ce secteur doit être fait mais, selon les auteurs, une stratégie d'absorption de la force de travail qui dépasse le seul secteur de l'habillement doit être pensée et mise en place rapidement.

A la fin des deux ans pendant lesquels l'UE imposera de nouveaux quotas, comme les Etats-Unis, les exportateurs chinois auront organisé la montée en gamme de leurs produits et la conver-gence de leurs spécialisations avec celles des PM. Pour ces derniers, il est impéra-tif d'exploiter ce répit pour être capable de faire face au choc qui se profile en 2008 et qui pourrait marquer le début de l'« après textile » dans les PM.

Gérer l'après Multifibre pour le tex-tile

Au vu de ce qui prècède, se pose natu-rellement la question suivante : peut-on préparer un « soft-landing » pour le sec-teur du textile dans les PM, pour donner du temps à l’identification et à l’émer-gence d’activités du secteur industriel et des services qui pourront relayer le secteur du TH en termes d'emploi, d'ex-portations et de gains de productivité ? L'étude citée ci-dessus, a proposé les recommandations de politique suivantes dont les effets bénéfiques pourraient se manifester rapidement :

√ les pays du Maghreb doivent prendre en compte trois éléments nouveaux qui doivent guider leur stratégie de restructuration : premièrement, les changements intervenus dans les conditions de la concurrence interna-tionale, deuxièmement une tendan-ce de plus en plus marquée de l'UE à recentrer ses sources d'approvi-

sionnement sur l'Asie (Chine, Inde), enfin, une modification du rôle des producteurs de TH, géographique-ment plus proches de l'UE mais dont les coûts de production sont plus élevés, qui devront être capables de fournir des séries réduites en un temps très court (production de mi-saison ou besoin d'un réassort face à une demande plus impor-tante que prévue, etc.). Cependant, il est nécessaire pour les pays de l'UE d'assurer une qualité constante de leurs produits. Ils continueront donc à imposer des contrôles stricts à la fois sur le design et sur la pro-venance des inputs (principalement hors Afrique du Nord). Le niveau de la production pour l'export d'Afri-que du Nord restera de ce fait probablement intensive en impor-tations et dépendra de la capacité des firmes à satisfaire dans des délais brefs les nouvelles comman-des, à diversifier leurs productions et à passer de l'une à l'autre. Les contraintes qui en découlent sont qu'il faudra sous-traiter certaines activités, comme c'est déjà le cas au Maroc, et renforcer la tendance à l'emploi occasionnel, ce qui est également une caractéristique du secteur de l'habillement marocain. En Tunisie, où la majorité des fir-mes sont habituées à produire pour des marques telles que Levis ou Lee Cooper, il y a place pour des entreprises qui auraient les moyens de répondre à une demande plus ponctuelle (comme en Egypte ou en Jordanie).

√ Comme le Maroc l'a démontré, le développement de productions de niche orientées vers la partie géné-

-47-

rant des revenus relativement plus élevés du marché européen est pos-sible. Les autres pays doivent s'en inspirer même si repérer ce type de niche n'est pas aisé. La Tunisie connaît actuellement des problè-mes à prendre ce tournant dus à un manque d'originalité des pro-ductions, une peur du changement des entrepreneurs et un retard dans l'adoption des techniques modernes de gestion (Zghal, 1999). Les clés de la réussite de la restructuration du secteur sont : l'amélioration de la qualité des produits, l'adoption d'innovations et de techniques de management modernes. Dans ce domaine, l'UE pourrait aider les firmes des pays du Maghreb (i) en contribuant à identifier les oppor-tunités de marché de niche exis-tantes (possibilités d'exploiter des connaissances et savoir-faire spéci-fiques en broderie et autres techni-ques décoratives destinés à certains marchés comme les kaftans et les vêtements de cuir, tenues de maria-ge brodées, les vêtements de soirée utilisant des coupes européennes mais agrémentées de broderies tra-ditionnelles des PM), (ii) en offrant les fonds nécessaires au démarrage d'activités conjointes EU-MED, dans le secteur de l'habillement, (iii) en encourageant l'innovation au sein des PME-PMI, (iv) en aidant les fir-mes du Maghreb à mener des étu-des de marché au sein de l'UE, (v) en encourageant une gestion plus efficace via des programmes de for-mation des entrepreneurs maghré-bins dans les entreprises européen-nes notamment (ces programmes peuvent d'ailleurs être étendus à tous les PM et tous les secteurs).

√ le fait que ce soit au niveau des PME qu'il soit pertinent d'intervenir signi-fie que des politiques en faveur de la facilitation des échanges, de l'acqui-sition de compétences en termes de design et de production, de possibi-lités de micro-finance, de l'obtention de conseils techniques et d'encou-ragement aux groupement d'entre-prises pourraient être très efficaces dans le court-moyen terme ; l'objectif de ces initiatives étant le dévelop-pement des PME dans le secteur de l'habillement mais pas seulement.

√ Il serait également très bénéfique de développer les connaissances des travailleurs dans les domaines du design et de la production, cela en étroite collaboration avec les entre-prises afin d'assurer à chacun un emploi et de ne pas créer un suref-fectif qui viendra nourrir le chômage. La Tunisie a d’ores et déjà pris des initiatives dans ce sens en créant des écoles délivrant des enseignements techniques, en particulier en matière de design, spécifiquement tournées vers le secteur du TH. Les capacités de formation existantes ne sont pas employées pleinement. De ce fait, il faudrait établir une coopération régionale dans le développement des organismes de formation.

√ un rôle essentiel que doit jouer le gouvernement s'il souhaite aider les entreprises à s'adapter aux nouvelles conditions de la concurrence, est de simplifier les formalités douanières. La réactivité des firmes à l'export est souvent entravée par des lour-deurs administratives qui retardent le passage en douane de biens inter-médiaires importés qui entrent dans

-48-

la fabrication de ces produits. Le Maroc, qui est en train de moderni-ser la douane en coopération avec la Banque mondiale, doit prendre en compte cette dimension et, pour ce faire, une étude sur l'opinion des firmes sur l'efficacité de la réforme douanière au Maroc permettrait de dégager des informations utiles pour les autres PM.

√ les problèmes relatifs à la perte de revenu et à l'emploi suggèrent une extension de la période de mise en place de la zone de libre-échange avec l'UE pour le Maroc de 3-5 ans, comme ce fut le cas pour la Tunisie, à la condition que soient prises des mesures supplémentaires permettant d'accroître la capacité de l'économie à répondre efficacement à la libéra-lisation des échanges. Ce délai met-trait le Maroc à l'abri d'une pression additionnelle sur sa compétitivité, ce qui limiterait les licenciements. La Tunisie a déjà obtenu un délai et lui en donner un autre ne serait pas per-tinent car cela encouragerait les fir-mes et le gouvernement à repousser la restructuration qui s'impose afin de faire face à la réalité du marché.

√ un renforcement de l'éducation est nécessaire pour les trois pays et cela à tous les niveaux. Ces réformes doi-vent viser en priorité à développer les capacités d'adaptation et la flexi-bilité de la main d'œuvre, c'est-à-dire possédant les connaissances de base, y compris dans le domaine des nouvelles technologies. Au niveau du secondaire et supérieur, une exten-sion des possibilités d'apprentissage professionnel et tout au long de la vie serait bienvenue.

Le projet de création d'une zone de libre-échange entre l'UE et les PM pêche cruellement par l'absence d'une straté-gie économique claire à l'adresse des pays qui devaient libéraliser. Le temps passant, les prévisions concernant la hausse des revenus et de l'emploi dans les pays partenaires, qui devait théori-quement découler de la libéralisation et de la réforme des politiques économi-ques nationales, se sont révélées très optimistes. Peu d'études se sont con-centrées sur l'analyse de la nature de la compétition que ces pays pourraient progressivement être amenés à suppor-ter sur leurs principaux marchés d'expor-tation. Etant données les difficultés que connaissent le Maroc et la Tunisie avec leurs exportations clefs, il est urgent aujourd'hui d'élaborer des stratégies de développement réalistes, ce qui signifie, en premier lieu, qu'elles doivent prendre acte du fait que les réformes et les inves-tissement en infrastructures sont certes des pré-requis essentiels mais n'ont pas permis de générer le dynamisme dont ces pays ont besoin. Il faut donc trouver d'autres voies. Selon l'équipe qui a mené cette étude, ces stratégies doivent tenir compte des spécificités des pays afin d'identifier et de tirer parti de nouvelles opportunités à l'export tout en explorant les possibilités de dynamiser l'expansion des productions intensives en travail pour le marché domestique. Ce dernier aspect dépend du rythme d'expansion du marché domestique, dont la hausse permettrait d'augmenter la demande dans la proportion nécessaire, mais qu'il est difficile de contrôler et qui dépend, à son tour, du rythme d'expansion des exportations intensives en travail (biens et services) et de la volonté de l'UE d'y contribuer, par exemple en réduisant les restrictions sur ses importations hor-

-49-

ticoles en provenance du Maghreb. Il faudrait également favoriser une amé-lioration de la qualité et de la compé-titivité des productions domestiques et de générer un revenu supérieur pour l'économie domestique via l'acquisition de formations techniques, notamment.

Au Maroc, où il existe des capacités non exploitées significatives dans le domaine des réserves d'eau (Yang et Zehnder, 2002), une restructuration des exploi-tations via une redistribution des terres des productions céréalières irriguées à large échelle vers des unités horticoles et l'élevage de bétail plus intensives en travail pourrait accroître le revenu et l'emploi et, de ce fait, contribuer à l'expansion de la demande domestique pour les biens et services produits loca-lement. La mise en place de cette stra-tégie ne sera cependant viable que si la libéralisation des importations agricoles du côté de l'UE non seulement a lieu mais aussi se fait au sein d'un processus négocié qui reconnaît le bien fondé d'une transition plus lente vers la levée des protections sur les produits agricoles en Méditerranée.

Quoiqu'il en soit, si la revitalisation de la filière textile-habillement est néces-saire, elle semble également être un objectif de court terme compte-tenu des enseignements des deux premiè-res parties. C'est à une stratégie plus globale, de diversification sectorielle et de soutien aux entreprises locales qu'il faut mettre en place. Dans un contexte marqué par une intensification de la concurrence entre les pays en dévelop-pement dans le secteur manufacturier et par de nouvelles ouvertures sur les marchés des services exportables, la question pertinente selon le Femise

est celle de l’amélioration des capaci-tés de réponse de l'offre des PM et de l’émergence de secteurs qui pourront prendre le relais des spécialisations actuelles, dont on maintes fois souligné qu’elles ne coorespondaient pas le plus souvent aux marchés les plus dynami-ques sur le plan mondial. Mais, pour ce faire, comme l’ont montré les enquêtes auprès des entreprises durant la par-tie I, toute stratégie industrielle devra être mise en place en cohérence avec les points soulevés par la première par-tie, concernant les besoins des entrepri-ses, qui, en premier lieu, ont souligné l’importance particulière que revêt le secteur des services, notamment les services financiers, de communications et de transport.

4. Les services, opportunités de relais

Les services sont rarement abordés par les théories du développement qui, mar-quées par une tradition industrialiste, les cantonnent au rôle de supports de l'industrie. Cependant, les évolutions techniques et institutionnelles actuel-les invitent à réévaluer la viabilité d'un développement par les services. Les progrès des télécommunications et de l'informatisation modifient la division du travail et créent des possibilités nouvel-les d'externalisation, de délocalisation et d'exportation d'activités de services. Simultanément, l'accumulation de capi-tal humain dans les PED permet à cer-tains d'entre eux de mobiliser une offre de main d'œuvre qualifiée et compétitive pour de telles activités productives.

Dans un contexte marqué par une cou-verture statistique insuffisante et une problématique encore relativement nou-

-50-

velle, plusieurs approches sont combi-nées. Après une synthèse du processus de tertiarisation dans les différents PM et des perspectives d'exportation dans ce domaine seront abordées les principales opportunités qui sont ouvertes au PM aujourd'hui, soit par le développement d'avantages comparatifs et de niches porteuses (tourisme, services de santé), soit par la libéralisation et la réforme des secteurs identifiés dans la première partie comme indispensables pour aider les firmes à s'adapter à leur nouveau contexte (services bancaires, télécoms, transport).

Perspectives de croissance et de développement des services en Méditerranée

Le processus de tertiarisation a con-cerné les pays riches comme les pays en développement et la corrélation entre le revenu par tête et le degré de tertiari-sation est étroite. Mis à part la Turquie, les PM font exception à ces tendances structurelles lourdes puisque, d'une part au niveau régional, il n'y pas de relation

entre le PIB par tête et la contribution des services au PIB et que, d'autre part au niveau des économies nationales, le poids des services stagne (Jordanie, Maroc, Tunisie) ou diminue (Algérie, Syrie) depuis les années 1970.

Par contre, l'internationalisation en cours dans l'économie des services semble avoir été engagée assez tôt dans les PM. Le taux d'ouverture des services, au niveau agrégé, y est supérieur à la moyenne mondiale comme européen-ne ; et il augmente. Pour l'ensemble des PM, la contribution des exportations de services au revenu national s'est accrue de 50% au cours des deux dernières décennies et ce secteur compte pour une plus large part qu'ailleurs aux exporta-tions totales. Il assure plus de la moitié des recettes d'exportation dans deux pays (Egypte, Liban), et plus du quart dans cinq autres (Turquie, Israël, Maroc, Tunisie, Jordanie). Au niveau régional, les échanges de services dégagent un excédent commercial croissant et sont un facteur essentiel d'équilibrage des balances des paiements.

Tableau X14 : Taxonomie des industries de service dans pour lesquelles existe un potentiel de croissance

Source : étude Femise 22-34

Industrie Turquie Israel Algérie Maroc Tunisie Egypte Jordanie Liban Syrie

Services

Services Commerciaux ..

Services Transport + .. ..

Transport Maritime + .. .. ..

Transport Aérien .. + .. ..

Autres transports .. + .. ..

Voyages + .. + + .. +

Autres Services ..

Communications .. .. + .. .. ..

Construction + .. + + .. .. ..

Assurance .. .. .. ..

Services Financiers .. .. .. .. .. ..

Services informatiques .. .. .. .. + + .. .. ..

Royalties et revenus de licences .. .. .. .. ..

Other Business services + .. ..

Serv. Pers. Cult & loisirs + .. .. .. + .. .. ..

Services Gouvernementaux , n.i.e. ..

.. pas d’informations disponibles

+ Services avec un potentiel de croissance

Services dans lequel le pays est spécialisé

-51-

Malgré cette « spécialisation services », les PM n'ont pas profité autant que les autres PED de l'internationalisation du secteur et leur part du marché mondial diminue. Par ailleurs, les PM se caracté-risent par une très forte hétérogénéité au regard des différents indicateurs de performances commerciales. L'utilisation d'une classification désagrégée en dix branches de services permet de carac-tériser les spécialisations services de chaque PM et d'identifier, à coté des spé-cialisations effectives, les opportunités de croissance (tableau X14).

Les gains de la libéralisation dans les services : le cas des banques et des télécommunications

A côté des marchés traditionnels comme le tourisme (encadré ci-contre) ou nais-sants comme les echanges de services de santé (encadré ci-après), l'autre ver-sant de la question des services peut s'appréhender en termes de compétiti-vité. On l'a souligné à de nombreuses reprises, les PM se sont engagés dans une stratégie d'ouverture. Mais, celle-ci se focalise pour l'instant sur les secteurs industriels. Il est donc nécessaire de progresser également sur la question des services, rapidement dans certains secteurs clefs bien identifiés à travers les réactions des firmes (cf. partie 1), et ce pour deux raisons qui se renforcent l'une l'autre : (i) dégager des spécia-lisations nouvelles qui se révèleront porteuses avec l'évolution internationale et (ii) améliorer les conditions de com-pétitivité des firmes locales pour qu'elles progressent dans les autres secteurs.

Il y aujourd'hui une prise de conscience certaine de l'importance de services dans l'économie. Les avancés techno-

Encadré : Les exportations de servi-ces de tourisme de la Tunisie et des pays méditerranéens

Le tourisme assure le tiers des expor-tations mondiales de services. Pour les PM, les crédits du poste voyage s'éle-vaient à 20 milliards de dollars US en 2000, à comparer à 10 milliards pour les exportations de textile, 90 milliards pour les exportations totales de mar-chandises et 5 milliards pour les reve-nus issus de l'émigration. Ces recettes assuraient alors entre 15% (Turquie) et 50% (Chypre) des rentrées en devises. Les recettes nettes directes du tourisme représentent un pourcentage croissant du PIB de la région : de 1 point en 1980 à 4 points en 2000. Pour les PM qui en disposent, l'utilisation des comptes satel-lites du tourisme montre que le poids du secteur, mesuré par la demande à l'éco-nomie, est compris entre 10% (Turquie) et 19% (Tunisie). La place dans l'emploi est proche de sa participation au PIB. Le rapprochement de la valeur ajoutée et des emplois du tourisme (hors effet induit), conduit à un niveau de producti-vité proche de celle de l'activité du tex-tile habillement.

Le sud de la Méditerranée est l'une des premières destinations du tourisme de masse. Les flux dans la région sont pas-sés de 4% (1990) à 6% (2003) du total mondial, alors que les entrées y étaient multipliées par 2,5. Simultanément la concurrence s'intensifiait sur le mar-ché euro-méditerranéen. Cependant, les offres touristiques des PM sont plus différenciées qu'il n'y paraît a priori. On observe en effet des préférences nationales qui se traduisent par des spécialisations assez marquées, à la fois par pays émetteur et par pays de destination. De plus, les PM propo-sent des services touristiques différents. Mais leurs performances à l'exportation sont également bien différenciées. Il est possible de distinguer trois types de profils : croissance extensive (Turquie), croissance intensive (Maroc), perte de compétitivité (Egypte, Tunisie).

-52-

logiques jouent également un rôle clef dans l'intérêt porté au commerce des services par les décideurs. Les avancés dans les domaines financier, technologies de l'information et de communication, transport ont contribué à une expan-sion rapide de commerce de services. Longtemps considérées comme coûteu-ses, les transactions internationales sont maintenant rendues faciles en raison du flux d'information électronique.

Les bénéfices de la libéralisation de ser-vices sont mis en lumière par quelques faits stylisés, notamment le fait que les pays qui ont amélioré les perfor-mances des services liés au commerce (transport, finance, réseaux et télé-communications) semblent avoir connu une augmentation substantielle de leurs exportations et des flux d'IDE. Les réformes domestiques visant la baisse des coûts du transport et du manage-ment quotidien des affaires peuvent en effet jouer un rôle crucial en améliorant les possibilités de liaison aux marchés mondiaux. La libéralisation de services renforcerait d'une part les capacités de réponse des exportateurs aux réformes menées dans le cadre du commerce et, d'autre part, permettrait aux pro-ducteurs locaux de mieux coordonner leurs activités avec des fournisseurs d'intrants situés dans des pays à reve-nus élevés, rendant ainsi le pays plus attractif aux IDE. Ainsi, libéraliser le commerce des services peut créer plus d'opportunités d'investissement pour le secteur privé domestique et aider à attirer des financements étrangers non créateurs de dette comme les IDE et les investissements de portefeuille, puisque les IDE dans les services ont été le moteur principal des flux d'IDE mondiaux pendant les années 1990 et

Encadré : Le commerce international de services de santé et les pers-pectives d'exportation des pays en développement

Les exportations de services de santé ont traditionnellement été dirigées du Nord vers le Sud ; les patients voya-geant dans le sens inverse. Mais les facteurs qui assuraient l'attractivité des systèmes de santé au Nord se sont pro-gressivement banalisés et diffusés, avec l'accroissement et l'amélioration des compétences médicales dans de nom-breux pays en développement (PED).

Les opportunités d'exportation dans ce secteur sont évaluées ici à partir, d'une part, de l'estimation du volume global du commerce international de santé, de la tendance et de la structure de ces échan-ges et, d'autre part, de l'analyse de l'ex-périence de la Tunisie. Les exportations de services de santé y représentent le quart de l'activité du secteur privé. Avec les services d'hébergement induits, elles atteignent 107 millions de dollars US en 2003 -environ 4% des exportations de services de Tunisie- et assurent près de 10 500 emplois.

Au niveau mondial, ce commerce con-naît une expansion plus rapide que la moyenne des échanges, surtout depuis 2000. Il représente 11,8 milliards de dollars US en 2003, soit 0,75% des échanges mondiaux de services. Cette part a doublé depuis 1997. Les études de cas et l'analyse globale convergent pour souligner la dimension régionale des échanges extérieurs de services de santé. 84% des patients étrangers en Tunisie, et 87% en Jordanie, provien-nent des pays voisins. Le commerce des autres PED exportateurs de soins (Thaïlande, Malaisie, Cuba) est soumis au même principe de proximité. La natu-re particulière du commerce des services de santé et la spécificité de la deman-de expliquent cette prédominance des échanges Sud-Sud. Ces deux caracté-ristiquent soulignent l'aspect niche pro-metteuse pour les PM dans le contexte euro-méditerranéen avec la proximité de l'UE, mais également dans le cas d'une progression de l'intégrationSud-Sud.

-53-

représente aujourd'hui encore environ la moitié de la valeur des stock d'IDE dans le monde.

Les PM connaissent cependant des dif-ficultés à profiter de ces tendances mondiales parce qu'ils ont eu tendance à mettre en place les réformes concer-nant les services de façon décousue. Les privatisations ont été plus lentes que dans d'autres parties du monde,des barrières à l'entrée freinent toujours les investisseurs tant étrangers que domestiques. La raison de cela est sans doute encore à chercher dans les stra-tégies de préservation de l'emploi. Les services, essentiellement publics, ont été (ou sont encore) envisagés d'abord comme un réservoir d'emplois qui per-mettent éventuellement de gérer les ajustements sociaux dans l'industrie. Ils ne sont pas appréhendés comme des secteurs « productifs » en eux-mêmes. Or, ce qu'il est ressorti de façon incon-testable des diverses enquêtes menées par les équipes du Femise, c'est que nombre de ces secteurs participent de fait au processus industriel, en four-nissant aux firmes d'autres sources de compétitivité, de sorte qu'ils sont plei-nement au cœur des processus indus-triels. La spécificité des PM est, de ce point de vue, qu'ils agissent en négatif, c'est-à-dire que les firmes regrettent leur absence ou leur inefficacité. Ainsi, non seulement ils pourraient évoluer en nouvelle spécialisation régionale, mais les effets d'entraînement sur les tissus locaux sont à même d'améliorer forte-ment « le rendement » de la stratégie d'ouverture en général, du processus euro-méditerranéen en particulier.

L'ouverture à la concurrence des mar-chés de services dans la région peut

compenser les coûts d'ajustement pro-venant de la libéralisation du commerce de marchandises : les réformes pro-concurrence, qui facilitent l'entrée de nouvelles entreprises, peuvent produire des fortes opportunités d'emploi pour les travailleurs qualifiés ou non qua-lifiés, actuellement employés par les gouvernements dans des emplois de productivité basse. Parce que l'on ne peut pas le plus souvent échanger des services, l'amélioration de l'accès aux marchés de services va probablement entraîner l'entrée de concurrents étran-gers par le biais d'IDE, dont on peut espérer qu'ils introduiront également de nouvelles technologies et des deman-des d'emplois sur le marché du travail domestique.

Dans cette section, basée sur le cas de quatre Partenaires Méditerranéens (l'Egypte, le Maroc, la Tunisie et la Turquie), il s'agit d'explorer les béné-fices potentiels de bien-être issue de la libéralisation, spécifiquement définie ici comme l'alignement avec les règle-ments de l'UE en matière de commerce dans les services. Trois secteurs sont étudiés : le secteur bancaire, le sec-teur de télécommunication et le sec-teur maritime de transport. L'accent est mis d'une part sur le secteur ban-caire, où sont mis en relief les points importants de réformes récentes et la performance actuelle du secteur dans les quatre pays, et, d'autre part, sur le transport en raison du gain attendu et de la cohérence avec les stratégies des PM. Pour les 3 secteurs, la présentation générale est suivie par une évaluation de l'amélioration de bien-être global de la libéralisation entendue comme mise en conformité avec les règlements de l'UE.

-54-

Le secteur bancaire : Les effets d'une pleine conformité avec l'UE

Pendant les années quatre-vingt-dix, plusieurs pays méditerranéens ont initié des programmes de réforme significative de leurs secteurs financiers, qu'ils débu-taient généralement avec la réforme de secteur bancaire. Les résultats de ces programmes, quoique variés selon les pays, ont été généralement modestes et ont ainsi entraîné le besoin d'une autre vague de réforme et de moderni-sation. Dans la phase à venir, la plupart des économies méditerranéennes vont chercher à mettre en place le nécessaire pour l'intégration mondiale plus profon-de, dont l'intégration avec l'UE est une composante clef. Ainsi, plusieurs pays de la région considèrent en effet une ouverture graduelle de leurs secteurs de services à la concurrence européenne ; il s'agit donc d'étendre leurs Accords de Libre-échange avec l'UE au commerce des services.

Il est important de noter que la notion de libéralisation utilisée dans le présent contexte ne signifie pas l'annulation de tous les règlements et formes de restric-tions. Elle se comprend comme un autre cadre préservant les éléments essentiels que sont les règlements prudentiels nécessaire à la survie du secteur ban-caire. En fait, le terme « libéralisation » dans cette section se réfère à l'adap-tation des législations des pays et des institutions pour être conforme à ceux généralement adoptés par les pays de l'UE et donc, par la même, à la confor-mité avec les conditions de l'intégration avec l'UE. La section explore l'impact de la libéralisation des secteurs bancaires dans les quatre PM choisis (l'Egypte, la Tunisie, le Maroc et la Turquie) en ter-

mes de performance, en supposant que chaque pays entreprend les réformes nécessaires pour une intégration réus-sie.

L'ouverture de services bancaires à la concurrence de l'UE peut probablement conduire à l'amélioration du système bancaire dans les PM, ouvrant la voie à des services de meilleure qualité et meilleur marché. En comparaison au cas du commerce de marchandises, la mesu-re des effets de la libéralisation dans les services semble difficile et probléma-tique. Le commerce dans les services diffère du commerce de marchandises non seulement s'effectuant selon quatre modes conventionnels, mais également par les moyens de protection du marché intérieur. Dans le cas des services, on considère que les législations d'un pays et les institutions ajoutent encore à la simple protection tarifaire observée dans le cas des marchandises. Cependant, il a été possible de calculer l'équivalent tari-faire du règlement restrictif. Cela facilite l'évaluation de l'impact de libéralisation sur les divers indicateurs, dont les prix et le bien-être.

Cette section, basée sur les résultats d'une étude Femise[28] réalise donc l'évaluation des avantages en termes de bien-être général issus de la mise en oeuvre complète de la libéralisation, en évaluant quantitativement l'équivalent tarifaire de mesures restrictives adop-tées dans le secteur bancaire et évaluant l'effet de leur élimination.

En Egypte, les mouvements de libéra-lisation déjà entamés s'incarnent dans un secteur affichant un taux de protec-tion équivalent tarifaire relativement bas (11,7%) comparés à 5% dans le cas de

-55-

l'UE. La prise en compte d'un certain nombre d'indicateurs complémentaires, non inclus dans les calculs, auraient même abouti à un équivalent tarifaire inférieur. Les simulations ont montré que si le secteur bancaire en Egypte se libéralisait davantage, atteignant le taux de l'UE, cela ne se traduirait pas par des bénéfices de bien-être significatifs pour l'économie égyptienne, puisque la réduc-tion de prix de 6% qui en résulterait, n'entraînera qu'une modeste hausse de bien-être de 1,44% dans la consomma-tion et 1,2% du produit intérieur brut. De plus, même si des baisses de prix encore plus significatives avaient lieu, il n'en résulterait pas pour autant un bouleversement, dans la mesure où une réduction des prix de 26% entraînerait une augmentation de bien-être évaluée à 6,54% en termes de consommation et 5,47% pour le produit intérieur brut.

En Tunisie, l'estimation obtenue donne un indice restrictif (RI) de 55 pour cent; qui est tout à fait remarquable : ce taux est haut, mais comparable avec d'autres mesures obtenues pour d'autres pays en voie de développement semblables. Il implique, approximativement, un taux équivalent tarifaire de 50 pour cent. En utilisant le tableau d'entrée-sortie Tunisien de 1997 à 99 secteurs, il appa-raît que les bénéfices sont positifs, signi-ficatifs, mais modestes. Les prix, autres que le prix des services bancaires, dimi-nueraient de seulement 1% au mieux et, le plus souvent, de moins de 0,5%. Cela conduirait à un gain de bien-être global de moins de 0.5% du produit intérieur brut actuel.

Quant au Maroc, l'harmonisation des règlements du secteur bancaire maro-cain avec celui de l'UE, se traduirait

par une réduction de 19,3% du coût de services bancaires, étant donné un équivalent tarifaire de 6,3% par rapport à un scénario de pleine libéralisation. Pour évaluer l'effet de cette réduction sur l'économie, la matrice d'Entrées-Sorties 1998 de l'économie marocaine a été utilisée, supposant ainsi qu'il n'y a aucun changement significatif de la structure de l'économie marocaine pen-dant la période 1998-2005. Les résultats indiquent que le bien-être, en termes de consommation totale, s'améliorerait de 1,15%. Comme, en 1998, la consom-mation représentait 86,12% du produit intérieur brut, le gain de bien-être se traduirait dans une augmentation de 0,99% du produit intérieur brut.

Dans le cas turc, le nouveau prix de ser-vices bancaires issu de la libéralisation augmenterait le bien-être de la société de 1,38%. Ainsi, l'effet de l'adoption des règles et règlements de l'UE dans le secteur bancaire se traduit par une augmentation annuelle du revenu réel des consommateurs turcs de 2,1 mil-liards US$. Comme la consommation en 1996 comptait pour 72,95% du produit intérieur brut, ce changement bien-être de la société est équivalent à l'augmen-tation de 1% du produit intérieur brut réel. De plus, comme le coût de la crise financière 2001 a été évalué comme 53,2 milliards de $ et compte-tenu d'un taux d'intérêt réel annuel de 6,86%, on peut évaluer le coût annuel de la crise monétaire à 3,65 milliards US$. La Turquie n'aurait donc pas eu à supporter un tel coût si elle avait adopté et mis en oeuvre la structure législative, régula-trice et institutionnelle du système ban-caire de l'UE au début des années 1990. En notant que le produit intérieur brut en 2004 s'est élevé à 300,63 milliards US$,

-56-

le gain de bien-être issu de l'implanta-tion des règles européennes régissant le secteur bancaire peut être ainsi évalué à 2,2% du produit intérieur brut.

On peut conclure des résultats précé-dents que l'on ne doit pas s'attendre à ce que l'adoption des règlements européens entraîne une augmentation substantielle du le bien-être général. Les bénéfices potentiels les plus hauts ont été obser-vés en Egypte (1,2% de produit intérieur brut) et le plus bas ont été observé en Tunisie (0,5%). Toutefois, cela ne prend pas en compte les gains encore plus importants induits par un secteur ban-caire plus compétitif, les effets sur l'in-vestissement et la croissance, que l'on ne peut capturer par les équations de production d'entrée. L'exercice de quan-tification ne porte là en effet que sur les effets statiques de prix, positifs et géné-ralement de l'ordre d'un point de PIB. On rappellera que ces effets sont calculés en utilisant les matrices input-output qui supposent une fixité des combinaisons productives. Comme la première partie l'a montré, l'essentiel du gain à attendre d'une « mise à niveau » des secteurs bancaires repose en fait sur les effets dynamiques, qui seront induits par une modification positive de la compétitivité des firmes (rappelons que dans la plu-part des enquêtes qui ont porté sur les obstacles rencontrés par les entreprises, les possibilités d'obtenir des finance-ments sont revenues dans les premiers soucis cités), et par conséquent sur l'en-semble des secteurs.

On y ajoutera d'autres effets, que l'on a trop souvent tendance à sous-estimer : les effets en termes d'anticipation, ceux qui vont amener à un moment donné la communauté à considérer qu'un pas

décisif est franchi. L'exemple du secteur du textile-habillement, et de son sous-investissement, tend à indiquer que les anticipations actuelles des agents sont réservées également au plan national. On doit alors considérer que modifier le secteur bancaire, notamment dans sa fonction de fournir des sources de finan-cement aux entreprises, constituera une étape décisive, d'abord en ce que cela apportera un changement visible dans les conditions d'opérations quotidiennes des agents avec un fort pouvoir symbo-lique, ensuite que les firmes efficaces y trouveront une source de compétitivité pour l'instant absente.

La libéralisation dans les télécom-munications

Au cours de la dernière décennie, le secteur de télécommunication est entré dans une période de changement pro-fond, amorcée par l'innovation techno-logique, la libéralisation des marchés nationaux et par la libéralisation partielle ou complète des opérateurs historiques. Traditionnellement, les opérateurs de télécommunication étaient des mono-poles publics verticalement intégrés. En raison des forts coûts fixes liés à la construction d'un réseau, on a considéré l'activité de fournisseur de services de télécommunication comme un monopole naturel. Cependant, le progrès techno-logique et l'innovation ont introduit des nouveaux systèmes de transmission et ont diminué le coût de construction des infrastructures. Ainsi, l'idée d'un mono-pole naturel n'est plus aussi évidente. De plus, on a bien observé que l'absence de concurrence n'incite pas à diminuer les coûts, à réduire les processus inef-ficaces et à des pertes de bien-être. En conséquence, la plupart des opérateurs

-57-

historiques, dans le monde entier, ont été la cible de plans de privatisation.

Cette section, issue de la même étude Femise, suit la même approche que la précédente en évaluant le bien-être attendu provenant de la libéralisation des services de télécommunication en Egypte, en Tunisie, au Maroc et en Turquie.

En Egypte, ce secteur a renforcé son importance depuis 1999 avec l'établisse-ment du « Ministère des Communications et des Technologies de l'information » (MCIT). De nombreux changements importants ont eu lieu dans ce sec-teur, reflétant le rôle accru qu'il joue dans le processus de développement et dans la mise à niveau en termes de technologies avancées. Le secteur des télécommunications contribue significa-tivement au produit intérieur brut, les statistiques officielles évaluant sa part à 3%. Il s'agit de plus, de l'un des secteurs dont la croissance est la plus rapide. Le nombre d'employés dans le secteur atteint environ 0,27% de main-d'oeuvre totale, ce qui est relativement bas et illustre la nature capital-intensive de cette industrie. Les dépenses tota-les dans ce secteur se sont élevées à 2,3 milliards de dollars en 2001, soit 2,5% de produit intérieur brut (l'Union de Télécommunications Internationale (ITU), 2001).

L'indice FR pour les lignes fixes est éva-lué à 0,519 et l'indice FDR (Restrictions dues aux discriminations envers les investisseurs étrangers) atteint 0,387 (soit environ 75% du FR). Une seconde évaluation a été menée sur la base du scénario plus libéral probable après la fin 2005. L'indice FR atteint cette fois 0,138

et l'indice FDR de 0,0973 (soit environ 70% du FR). Pour le secteur de la télé-phonie mobile, on observe un indice FR de 0,354 et un indice FDR de 0,235 qui représente 67% du FR. Pour le secteur d'Internet, l'indice FR est de 0,124 et le FDR de 0,089.

En calculant l'équivalent tarifaire, on obtient un taux de protection de 13% dans le cas de la téléphonie mobile, qui diminue à 4% si l'on se base sur le sec-teur des lignes fixes. Dans le cas d'In-ternet, où sont appliqués les coefficients des lignes fixes, on obtient un équivalent tarifaire de 2%.

Les résultats révèlent que généralement le secteur des télécommunications en Egypte a connu plusieurs changements de politique et de niveau de régulation, conduisant le secteur et tous ses com-posants vers davantage de libéralisa-tion. Les équivalents tarifaires calculés indiquent que le secteur de la téléphonie mobile est relativement plus fortement protégé relativement aux lignes fixes et Internet. Quoique cela puisse sembler surprenant, les lignes fixes étant sup-posées être généralement plus proté-gées, il peut s'agir plutôt d'un effet dû aux spécifications du modèle utilisé (qui change énormément si les spécifications « lignes fixes » sont appliquées). Les estimations indiquent néanmoins que l'on peut attendre une forte diminution du niveau de protection dans le domaine des lignes fixes quand les engagements GATS sont entièrement mis en œuvre à la fin de 2005. Malgré l'adoption rapide de nouvel-les technologies et leur introduction dans différents secteurs de l'économie, comme en témoigne plusieurs indica-

-58-

teurs différents, l'Egypte reste toujours relativement en retard, comparée aux autres pays à revenu moyen-inférieur, groupe dans lequel elle se classe.

Dans le cas de la Tunisie, le gouverne-ment tunisien a été pendant une longue période peu disposé à entreprendre tout mouvement de libéralisation significatif, et peu a été fait jusqu'en 2001. Mais en 2001, le processus de libéralisation dans ce secteur a été accéléré, la question n'étant plus de savoir s'il fallait ouvrir à la concurrence et à l'investissement étranger, mais de savoir comment et à quelle vitesse libéraliser. La réponse pourrait dépendre de l'impact attendu de cette libéralisation sur le secteur de télé-communication lui-même et sur l'écono-mie entière, mais également de la façon dont la libéralisation est conçue.

En appliquant l'analyse séparément à la téléphonie fixe, aux portables et aux services Internet, les indices de res-triction atteignent respectivement 60% pour les lignes fixes, 46% pour la télé-phonie mobile et 53% pour l'Internet. Sur la base des ces trois composantes, on obtient donc un taux moyen de 53%. En conséquence, l'équivalent tarifaire complet est évalué à 70%. Le résultat n'est pas surprenant et confirme que les télécommunications sont toujours forte-ment protégées. Mais, au-delà des effets directs attendus, la principale question que cela pose pour la Tunisie est celle de la cohérence avec le plan stratégique tunisien préparant l'émergence d'une économie fondée sur la connaissance. Les techniques de communication en sont un pilier et le succès du plan tuni-sien ne peut s'envisager sans une réduc-tion importante de la protection afin d'élargir la diffusion locale.

Quant au cas marocain, comme beau-coup d'autres pays, le Maroc a mis l'accent sur les télécommunications et les technologies de l'information dès le début des années quatre-vingt-dix. Le développement significatif enregistré au cours de la période peut être expliqué maintenant par trois actions principa-les-: réformes légales et institutionnelles dans le domaine des télécommunica-tions, ouverture politique et démocra-tisation et changements technologiques.

L'indice de restriction général pour les services de télécommunications au Maroc a été évalué à 0.278 et l'équiva-lent tarifaire qui en découle atteint 32%. Autrement dit, les restrictions existantes augmentent le prix de services de télé-communications de 32% relativement au niveau qui prévaudrait en cas de libéralisation complète. Les calculs indi-quent également que l'équivalent tari-faire s'élève à 40,5% pour la téléphonie fixe, 29,7% pour les services Internet et seulement 23,4% pour la téléphonie mobile. Ces résultats indiquent ainsi que la libéralisation complète de services de télécommunications profiterait aux utilisateurs plus particulièrement dans la téléphonie fixe et Internet. La réduc-tion des prix attendue pour les services mobiles est relativement plus basse, mais toujours significative en termes absolus.

Pour évaluer l'effet total d'une dimi-nution de 32% du prix des services de télécommunications de l'économie, l'étude recourt à nouveau à la matri-ce d'Entrée-sortie 1998 de l'économie marocaine. On suppose à nouveau l'ab-sence de changement significatif de la structure de l'économie marocaine pen-dant la période 1998-2005. Plus particu-

-59-

lièrement, cela suppose que le secteur des télécommunications joue également plus ou moins le même rôle en 2005 qu'en 1998. Là, cette hypothèse est une limitation sérieuse en sous-estimant les progrès remarquables dans le sec-teur de télécommunication ces dernières années. Une deuxième limite inhérente à la matrice d'Entrée-sortie 1998 est l'ab-sence de distinction entre le transport et les télécommunications, regroupé dans la même ligne. Sur la base des données de valeur ajoutée, la part des télécom-munications dans l'ensemble « Transport et télécommunications » s'est élevée à 23% en 1998 et plus de 34% en 2002.

Sur la base des calculs précédents, on peut s'attendre à ce que l'adoption des règlements de l'UE dans le secteur de télécommunication conduise à une réduction moyenne du prix des services de télécommunication de 32%. En con-séquence, le bien-être global en termes de consommation totale, s'améliorera de 1,627%. En 1998, la consommation représentant 86,12% du produit inté-rieur brut, ce gain de bien-être se tra-duirait par une augmentation de 1,4% du produit intérieur brut. En 2004, le produit intérieur brut s'est élevé à 444 milliards DH, soit 50 milliards d'US$, ce qui permet d'évaluer le gain de bien-être dû à l'adoption des règlements de l'UE en matière de télécommunication à 700 millions US$ (tout en gardant en mémoire que ce chiffre sous-estime l'effet total).

En Turquie, les services de télécommuni-cation étaient fournis jusqu'en 1994 par la société publique PTT, monopole natio-nal offrant également les services pos-taux. La Turquie a décidé de libéraliser le secteur des télécommunications pendant

les années 1990. Le Parlement a passé une nouvelle Loi de Télécommunications en 2000, amendée en 2001. Depuis lors, la Turquie essaye de libéraliser le secteur de télécommunications en sui-vant l'approche de l'UE. Les autorités partent du principe que la concurrence et la réglementation dans le secteur sont essentielles et que la privatisation, combinée avec l'établissement de codes de conduite, est essentielle pour attein-dre l'efficacité économique et garantir le service universel nécessaire pour éviter toute « fracture digitale ».

Les estimations des différents indices de restriction atteignent 0,193 pour les lignes fixes, 0,165 pour la téléphonie mobile et 0,12 dans le cas des services Internet. En utilisant la matrice d'en-trée-sortie et en supposant que l'adop-tion des règles de l'UE dans le secteur des télécommunications conduise à une baisse de prix des télécommunications de 33,53%, le bien-être global devrait s'accroître de 0.587%, soit une aug-mentation annuelle de 1,12 milliards US$ du revenu réel des consommateurs turcs. La part de la consommation dans le PIB s'élevant à 72,95% en 1996, le changement de bien-être est équivalent à l'augmentation de 0,428% du pro-duit intérieur brut réel. Finalement, il faut remarquer qu'à partir de 2005, la Turquie a adopté la plupart des règles européennes. Il ne reste donc plus qu'à mettre en oeuvre ces règlements par la Turquie pour tirer les bénéfices calculés ci-dessus.

L’importance du transport maritime

Le transport maritime constitue une acti-vité économique importante dans pres-que tous les partenaires de Méditerranée.

-60-

Ainsi, environ 95% de commerce inter-national de marchandises de la Tunisie est expédié ou reçu par voie maritime et le volume de son commerce équivaut à près de 80% de son produit intérieur brut. En Egypte, l'importance du secteur résulte de l'emplacement géographique de l'Egypte dont les ports comptaient parmi les plus importants dans la région de Méditerranée, faisant fonction de hub pour la région arabe, ou de station importante de transbordement entre l'Europe et le reste du monde. Au Maroc, les statistiques disponibles indiquent que plus de 98% du commerce international du pays empruntent la mer, soit plus de 60 millions de tonnes métriques en 2004.

Le transport est donc un élément essen-tiel de la capacité des PM à préserver et étendre leurs parts de marché et à faire face à la concurrence sur leurs marchés. Mais, dans le cas présent sans dout plus qu'ailleurs, la cohérence régionale doit prévaloir au moment d'envisager en détails les mesures d'ouverture, le rendement des initiatives de chacun étant fortement dépendant des actions des autres partenaires. Ainsi, si l'Algérie améliore la capacité de ses aéroports d'accueillir des gros porteurs, cela peut intensifier ses échanges avec les autres PM à condition qu'eux-mêmes puissent offrir des services similaires aux compa-gnies aériennes[29].

Pour illustrer l'importance du secteur, on pourra se référer à une étude Femise portant sur les conditions d'intégration régionale[30]. L'analyse montre entre autre que le commerce vers des zones de plus en plus distantes croît grâce à l'expansion du transport maritime dont le coût reste élevé alors qu'il est

un élément clé de la capacité des PM à faire face à la concurrence, s'exprimant sur les marchés européens notamment. Le lien création de trafic-qualité des infrastructures semble se distendre, ce qui peut paraître paradoxal, mais qui, en fait, reflète l'existence d'économies d'échelle. Les pays qui accusaient un certain retard dans les années 70-80 ont progressivement rattrapé les pays les plus avancés et les gains de la cons-truction d'une route supplémentaire, par exemple, seront de moins en moins importants à mesure que le réseau rou-tier s'étendra.

Il apparaît toutefois que la création de trafic au sein des PM (Algérie, Egypte, Maroc, Tunisie, Turquie) induite par une réduction des coûts de transport due à une amélioration de la qualité du trans-port d'une situation intermédiaire à un niveau équivalent à celui des 25% des pays les plus performants[31], pourrait être de 34% à 55%[32]. Le pays qui en retirerait le plus de profit serait la Turquie qui est le pays le plus riche de la zone mais celui qui enregistre une part dans les infrastructures totales faible. Reste à savoir s'il pourra tirer tous les bénéfices potentiels d'une telle mise à niveau sachant que le rattrapage néces-saire est conséquent. Figure 8 : Part de chaque pays dans le total des infrastructures de la zone

Source : étude Femise FEM22-36

-61-

On peut également calculer l'effet glo-bal d'une libéralisation du secteur du transport maritime, en utilisant la même méthodologie que dans les sections pré-cédentes. C'est ce qu'a réalisé l'étu-de Femise déjà cité (FEM22-02), éva-luant l'impact sur le bien-être provenant d'une libéralisation du secteur entendue comme la mise en conformité avec les règlements de l'UE. Ainsi, on soulignera à nouveau que la libéralisation dans le contexte présent se conçoit comme le mouvement vers les règlements en usage au sein de l'UE et est bien loin de l'abolition de tous les règlements.

Les résultats sur l'Egypte montrent que le secteur maritime est parmi les sec-teurs qui restent relativement protégés comparé aux secteurs des banques et des télécommunications. Les équivalents tarifaires sont relativement hauts, mais néanmoins comparables à d'autres pays. En fait, l'indice de restriction envers les étrangers (l'indice FR) est inférieur à celui des Etats-Unis et très compara-ble à celui de l'Allemagne. Le principal problème du secteur maritime est la non transparence : les textes évoquent certaines pratiques libérales mais la réa-lité démontre des pratiques restrictives. Malgré les réformes entreprises dans les années 90, qui ont ouvert le secteur, il demeure donc fortement protégé. Cela a été confirmé par les obligations de l'Egypte pour le GATS qui ont montré des engagements fortement restrictifs.

Pour des questions de données, l'ana-lyse a été conduite conjointement sur le transport maritime et le secteur des télécommunications. La libéralisation du transport maritime et du secteur des télécommunications, suivant les normes de l'UE, doit aboutir à des augmentations

de bien-être respectivement de 11,2% et 0,89% en termes de consommation ou encore 5,47% et 0,74% en termes de produit intérieur brut. En fait l'effet de bien-être sera probablement plus bas que cela, les calculs supposant que la libéralisation s'applique au secteur entier qui inclut les télécommunications avec tous les modes de transport.

Dans le cas de la Tunisie, l'indice de restriction du transport maritime atteint 40%, soit un équivalent tarifaire de 50%. Étant données les mesures déjà prises pour libéraliser le secteur, ce taux n'est pas si haut comparé à d'autres pays au sein et à l'extérieur de la région, mais il reste plutôt élevé comparé aux taux obtenus par les pays plus dévelop-pés, dont les pays de l'UE. La libérali-sation se définissant comme l'adoption des règlements en vigueur dans l'UE, l'indice devrait être réduit à environ 30%, approximativement le taux obtenu dans les pays de l'UE, pour un équivalent tarifaire de ce même ordre. Les prix du transport maritime connaîtraient donc une baisse significative. En termes d'im-pact indirect sur le prix de marchandises et sur le bien-être, le résultat peut sem-bler faible, mais il ne s'agit là que des effets directs qui ne représentent pas tous les gains.

Au Maroc, en convertissant l'indice de restriction complet concernant les ser-vices maritimes de transport, évalué à 0.5425, on parvient à un équivalent tarifaire de 72%. Autrement dit, les restrictions actuelles entraînent un coût supplémentaire des services maritimes de transport de 72% en comparaison à ce qui prévaudrait après libéralisation. Ce coût substantiel affecte l'économie dans son ensemble et sape sérieuse-

-62-

Dans le cas turc, l'indice du niveau des restrictions touchant les étrangers atteint 0,4944 pour la Turquie contre 0,3270 pour les 15 Etats membres de l'UE. Pour effectuer la conversion de l'indice en un tarif ad valorem, l'étude a considéré trois scénarios alternatifs. Le premier scénario suppose que la Turquie baisse son indice (0.4944) au niveau de celui de l'UE (0.3270) en adoptant les règles européennes telles qu'elles étaient fin 1998. Dans le deuxième scénario, le degré des restrictions en Turquie est abaissé au niveau de celui du Royaume-Uni (0.2394), le plus bas parmi tous les Etats membres de l'UE considérés. Finalement, dans le dernier scénario, il est supposé que toutes les restrictions du commerce dans les ser-vices maritimes sont levées.

Les calculs révèlent que, si la Turquie libéralise son secteur maritime pour que son indice rejoigne le niveau 1998 pour 15 Etats membres de l'UE, les prix maritimes turcs seraient réduits de 30,44%. Une poursuite de la libérali-sation maritime en Turquie conduisant au niveau du Royaume-Uni impliquerait une chute de prix supplémentaire de 15,92%. Enfin, une élimination com-plète des barrières commerciales dans le secteur maritime turc donnerait une baisse de prix de 89,9%.

Pour obtenir l'effet en termes de bien-être du possible changement du prix de transport maritime sur les prix d'autres marchandises et des services, l'étude a utilisé la matrice d'Entrées-sorties 1996 qui comporte 97 secteurs. Selon les trois scénarios alternatifs de libéralisa-tion maritime en Turquie mentionnés ci-dessus, le bien-être de la société turque augmenterait respectivement de

ment la capacité des opérateurs maro-cains à rivaliser efficacement sur les marchés étrangers. Il représente aussi un handicap sérieux pour attirer des investisseurs étrangers désirant faire du Maroc une plate-forme d'exportation.

Pour évaluer l'effet présumé d'une dimi-nution de 72% du prix de services mari-times, on utilise à nouveau la matrice 1998 d'Entrées-sorties de l'économie marocaine. Cela suppose que le sec-teur maritime joue grossièrement le même rôle en 2005 qu'en 1998, ce qui est dans une certaine mesure soutena-ble vues les statistiques du transport maritime et l'état actuel des réformes touchant les divers composants de la chaîne logistique. Cependant, la limite la plus importante dans l'évaluation de bien-être est due au fait que la matrice d'Entrées-sorties 1998 ne sépare pas le transport des télécommunications. Sur la base des calculs effectués, on peut estimer néanmoins qu'en alignant les règlements marocains des services de transport maritime sur les règle-ments européens et assurant la con-currence dans la fourniture des servi-ces, on observerait une amélioration du bien-être des consommateurs de 3,254% en termes de consommation totale. Celle-ci comptant pour 86,12% du produit intérieur brut 1998, ce gain de bien-être se traduirait par une aug-mentation de 2,84% du produit inté-rieur brut. C'est là une croissance subs-tantielle qui révèle l'ampleur du coût économique pour le Maroc du manque d'efficacité dans les services de trans-port maritime. Elle illustre aussi le gain potentiel attendu une fois les réformes du secteur maritime efficacement mises en œuvre.

-63-

0,22, 0,34 et 0,66%. Convertis dans leurs équivalents de croissance de pro-duit intérieur brut réels, la consom-mation de 1996 formant 72,95% du produit intérieur brut, on obtiendrait 0.1616, 0.2464 ou 0.4793% de crois-sance du produit intérieur brut réel de la Turquie.

On peut conclure que la libéralisa-tion du secteur maritime constitue une bonne opportunité d'augmentation du bien-être des PM, bien qu'à des degrés divers. Les quatre pays bénéficieraient de l'adoption et de la mise en œuvre de la structure légale, régulatrice et institutionnelle de l'UE sur le plan du secteur du transport. L'effet principal découlerait de l'augmentation de la con-currence dans le secteur. Il convient de noter à nouveau les limites de la métho-dologie des tableaux Entrées-sorties qui ne peuvent prendre en compte que les effets statiques. Ils ne capturent par exemple pas l'augmentation probable de la demande de consommation pour les matières premières après la réduc-tion de leurs prix, qui nécessiterait des informations sur les élasticités des prix de demande de toutes les matières pre-mières couvertes dans les tableaux.

On notera une fois encore que, pour « modestes » que peuvent apparaître ces effets statiques globaux, ils demeu-rent toutefois parmi les plus significatifs pour 3 d'entre-eux. Surtout, en termes de prix, l'effet pour les firmes sera loin d'être négligeable au niveau micro-économique. Comme on l'a souligné dans la partie I, les firmes adoptent un comportement d'optimisation pour faire face à la concurrence, et de ce point de vue, les problèmes liés aux transports

constituent un obstacle souvent cité. Il est bien évident que toute source permettant de stimuler la compétitivité-prix des firmes, sans agir au niveaux des effectifs ou de la masse salariale (cela est incompatible avec la contrain-te sociale des PM) revêt une importance stratégique. Enfin, l'examen des pro-blèmes du secteur du textile-habille-ment ont également montré que les PM devaient pour progresser dans la chaîne de valeur, accroître la « réactivité » de leur firme. Ici, en plus de l'effet prix, la libéralisation du transport devient éga-lement une composante majeur d'un projet industriel global.

De plus, le transport demeure un des principaux facteurs du processus com-plexe de développement, parce que l’existence d’un réseau de transport fiable est un pré-requis pour les inves-tisseurs et, en particulier, pour les exportateurs. Il est en effet bien établi qu’un système de transport maritime inefficace, les progrès en termes d’in-vestissement et de croissance seront très difficiles à atteindre.

III. L’intégration régionale : l’heure des choix

La question du transport conduit tout naturellement à l'un des grands manques des dix premières années du processus de Barcelone, comme indiqué dans l'in-troduction, celui de l'intégration régio-nale sud-sud. La sratégie de l'ouverture a clairement été choisie par la quasi-totalité des partenaires méditerranéens, mais l'axe nord-sud semble encore bien privilégié par rapport à une dimension plus régionale. C'est l'objet de cette partie que de se poser la question de la cohérence de cet état de fait, des raisons

-64-

qui peuvent l'expliquer ou permettre de progresser sur l'axe transversal et, ce qui peut apparaître essentiel dans le contexte euro-méditerranéen, de ce que le modèle européen peut apporter aux dernières initiatives régionales.

1. L'insertion internationale actuelle des PM

Très peu de pays ne sont pas impliqués dans un accord commercial quelconque (7 selon Bouet et Mayer, 2003) et de ce point de vue les PM ne sont pas dans une situation atypique au premier abord. Ils sont membres de l'OMC (Egypte, Maroc, Tunisie, Turquie depuis 1995, Jordanie depuis 2000) ; ils ont signé des accords commerciaux avec leurs voisins euro-péens et la politique de nouveau voisin ouvre des négociations pour la mise en place d'une vaste zone de libre-échange euro-méditerranéenne ; enfin, ils sont partie prenante de divers accords régio-naux.

Toute la question est de savoir quelle est la cohérence de la stratégie com-merciale des PM et la compatibilité entre leurs approches multilatérale et régiona-le de la libéralisation des échanges. Pour répondre à cette question, une approche consiste à mesurer le degré d'ouverture commerciale d'un pays, à partir d'une estimation du niveau et de la dispersion des tarifs et des conséquences des bar-rières non-tarifaires. Le protectionnisme peut se définir, en effet, comme toute action qui gêne les échanges de biens et services en faisant en sorte que les biens importés par un acteur national soient relativement plus coûteux que les mêmes biens produits sur le marché national. Si le prix, toutes taxes compri-ses, de ces deux biens identiques mais

produits en des lieux différents est le même sur le marché considéré alors il n'y a pas de protectionnisme. A partir de ces indicateurs de degré d'ouverture du marché domestique d'un pays et de ses marchés d'exportation, il est possible d'avoir une meilleure idée de la politique commerciale optimale pour ce pays et enfin, de la cohérence entre les accords passés et de la stratégie d'ouverture optimale (multilatérale, régionale, etc.).Une étude menée par une équipe Femise[35] a exploité une nouvelle base de données qui offre une estimation du degré d'ouverture d'un pays fon-dée sur un calcul, mené sur une base bilatérale, détaillée et désagrégée, qui inclut le degré de dispersion des tarifs selon les biens, ce qui se fait tradition-nellement, mais également selon les partenaires suivant le type d'accord en vigueur (accords régionaux, traitements préférentiels) et qui se traduisent par des dispositions particulières (quotas tarifaires, droits spécifiques, etc.). Cette démarche permet de donner une image plus réaliste des barrières aux échanges existantes, même si chaque type de bar-rière a un impact différent sur le niveau des échanges qui dépend de l'élasticité de l'offre et de la demande et donner une estimation ad valorem de certaines d'entre elles est délicat.

L'accès au marché des PM

La nouvelle mesure des barrières com-merciales employée ici montre que les marchés des PM sont très protégés. Les pays les plus riches appliquent en général un niveau global de protection inférieur, mais l'examen par secteur sou-ligne une réalité toute autre, notamment en ce qui concerne les marchés agricoles des pays de l'OCDE où la protection est

-65-

tout aussi forte que celle calculée pour les PM (tableau X15). Au sein du groupe des pays en développement, le niveau de protection est en général plus élevé et plus homogène que pour des pays plus riches. Quelques exceptions cepen-dant : Madagascar a une politique de libre-échange et le Lesotho a un niveau de barrières tarifaires qui varie d'un sec-teur à l'autre.

Une comparaison des performances des PM au niveau mondial comme avec les pays à revenu intermédiaire[36] souli-gne le fort degré de protection de leurs marchés domestiques, surtout pour la Libye, le Maroc, la Tunisie et l'Egypte (figure 9). La Turquie est relativement

plus ouverte que les autres PM, à l'ex-ception du Liban. Cela reflète l'influence de l'UE, via l'accord d'union douanière et les perspectives d'entrer dans l'Union économique, qui oblige le pays à s'ali-gner sur ses pratiques. Son secteur agri-cole demeure néanmoins très protégé. Ce traitement différencié des secteurs industriel et agricole est commun à tous les pays. Seuls l'Egypte, la Syrie et la Libye protègent moins l'agriculture que l'industrie dont certaines activités sont naissantes.

Une analyse plus fine de la protection par type de bien confirme que celle-ci est élevée pour certains produits agricoles, comme les céréales au Japon, la viande

Tableau X15 : Niveau de protection global et sectoriel dans les PM

Source : Etude Femise FEM22-36, à partir de MacMap-HS6 des calculs des auteurs

Global Agriculture Industrie

Pays méditerranéens Algérie 13,8% 17,9% 13,5%

Egypte 29,0% 13,8% 30,3%

Jordanie 11,2% 11,8% 11,1%

Liban 3,9% 8,8% 3,4%

Libye 21,0% 11,9% 21,8%

Maroc 20,9% 43,9% 19,0%

Syrie 16,4% 12,1% 16,8%

Tunisie 20,2% 57,5% 17,1%

Turquie 6,1% 42,0% 3,1%

Pays OCDE Australie 5,2% 1,2% 5,5%

Canada 3,5% 15,2% 2,6%

UE 3,5% 17,2% 2,6%

Japon 4,1% 37,4% 1,5%

Suisse 3,9% 43,7% 1,0%

USA 2,4% 5,1% 2,2%

Pays émergents Argentine 12,5% 11,5% 12,6%

Brésil 11,8% 10,2% 11,9%

Chine 14,1% 23,6% 13,3%

inde 33,4% 59,2% 30,1%

Pakistan 19,1% 26,9% 18,1%

Afrique du Sud 8,5% 19,4% 7,4%

Pays les moins avancés Bangladesh 17,4% 20,0% 17,1%

Cambodge 12,9% 12,7% 13,0%

Tchad 15,8% 21,5% 14,7%

Ethiopie 14,4% 17,0% 13,9%

Lesotho 8,1% 20,7% 6,4%

Madagascar 4,4% 4,8% 4,3%

-66-

en Suisse, etc. et pour les productions de secteurs-clé de l'économie (habille-ment en Egypte, véhicules en Syrie), ce qui reflète le poids des lobbies ou l'adop-tion de politiques de développement de nouvelles activités qu'il faut isoler de la concurrence mondiale jusqu'à ce qu'elles soient en mesure d'y faire face.

De plus, les données employées permet-tent de tracer le niveau de protection bilatérale, c'est-à-dire le degré d'accès d'un pays au marché de son partenaire (tableau X15). L'interprétation de ces chiffres doit être prudente[37] car ils renvoient à la fois au type d'accord

qu'un pays entretien avec un autre (le Maroc a des accords avec la Libye et l'Al-gérie et le commerce est libre entre ces pays) mais aussi la composition de leurs flux d'échanges et leurs spécialisations respectives qui, plus elles sont similaires à celles du pays partenaire, plus elles l'incitent à hausser ses barrières (par exemple, les exports d'habillement de la Turquie sont fortement pénalisées dans ses échanges avec l'Egypte, con-tre exemple, les exports de pétrole et gaz de l'Algérie ou de la Libye bénéfi-cient d'un accès quasi libre à tous les marchés). Les enseignements de cette approche sont :

Figure 9 : Comparaison des niveaux de protection dans le monde, imports

Source-: Femise, à partir de l’étude FEM22-22

Figure 10 : Comparaison des niveaux de protection dans le monde, exports

-67-

√ que globalement les PM discrimi-nent fortement leurs partenaires à l'import. Cela est dû certes à l'exis-tence d'accords commerciaux mais plus largement à l'hétérogénéité des tarifs qu'ils pratiquent ;

√ que la plupart des pays, membres de l'OMC, se réservent le droit de prati-quer des tarifs qui dépassent sensi-blement ceux prévus par les accords (16,2% plus élevés pour la Tunisie, 24,8% pour la Turquie), à l'exception de l'Egypte.

√ que les exports des PM à destination de l'UE ont pu se développer grâce aux faibles tarifs imposés comparati-vement à ceux pratiqués par d'autres pays tels que les Etats-Unis ou le reste de l'OCDE. C'est ce qui expli-que leur spécialisation dans le tex-tile-habillement par exemple car l'UE est un marché proche et un des plus riches du monde.

√ que les tarifs imposés par les PM sur les PM sont parmi les plus élevés, ce

qui ne favorise pas une intégration Sud-Sud.

√ que les tarifs élevés sont appliqués aux imports qui sont d'une impor-tance mineure pour le bien-être des consommateurs dans les cas de la Turquie, de la Tunisie et du Maroc mais pas pour le reste des PM.

La spécialisation des PM, telle qu'évo-quée précédemment influence égale-ment les formes d'intégration dans les flux qui sont susceptibles de convenir aux PM, de même que le poids de la protection tarifaire sur leurs flux. On remarquera ainsi que :

√ Le degré de diversification des expor-tations dépend de plusieurs facteurs tels que le processus d'industrialisa-tion, la politique d'ouverture mise en place et la concentration géographi-que des flux d'échanges. La proximité des pays du Maghreb et de l'UE expli-que donc la structure relativement plus concentrée des exports des pays du Maghreb. Deux conséquences à

Tableau X16 : Niveau de protection bilatéral, imports, 2001[38]

Source : Etude Femise FEM22-36, à partir de MacMap-HS6 des calculs des auteurs

PartenairesReporter Algérie Egypte UE Jordanie Liban Libye Maroc Rest OCDE Syrie Tunisie Turquie USAAlgérie 14,6% 14,6% 15,3% 18,4% 8,6% 0,0% 13,7% 12,8% 19,1% 19,7% 12,0%Egypte 7,3% 28,6% 10,2% 17,6% 3,2% 14,0% 24,1% 23,8% 15,1% 77,2% 28,2%Jordanie 18,8% 5,8% 12,6% 7,9% 3,6% 4,5% 10,3% 5,0% 7,1% 16,2% 9,9%Liban 2,0% 3,3% 4,7% 5,8% 2,3% 1,8% 3,0% 2,2% 4,5% 7,8% 3,8%Libye 37,9% 7,6% 21,6% 5,2% 11,6% 0,0% 18,5% 24,0% 7,0% 18,7% 20,5%Maroc 0,0% 20,5% 18,9% 11,1% 16,6% 0,0% 20,9% 12,7% 15,8% 34,1% 19,5%Syrie 10,1% 16,1% 20,0% 10,8% 17,2% 7,1% 9,7% 16,2% 18,3% 27,7% 14,0%Tunisie 4,0% 15,9% 12,7% 15,7% 21,8% 4,7% 16,6% 23,2% 12,8% 40,1% 23,7%Turquie 0,6% 12,0% 3,3% 5,4% 11,4% 1,3% 12,1% 6,2% 6,6% 16,1% 6,2%

Australie 2,7% 7,7% 5,8% 12,7% 4,4% 5,0% 10,4% 5,2% 5,7% 13,8% 12,0% 3,3%Canada 0,0% 4,5% 4,7% 9,9% 4,7% 0,4% 8,0% 2,6% 1,1% 9,8% 8,0% 0,5%UE 0,1% 1,7% 3,0% 2,6% 2,8% 0,3% 1,4% 3,9% 0,5% 2,1% 1,5% 3,8%Japon 0,9% 7,2% 4,6% 6,3% 6,9% 0,2% 6,5% 3,0% 1,4% 6,4% 5,0% 3,0%Suisse 0,0% 6,7% 4,1% 18,2% 7,9% 0,0% 8,1% 3,9% 1,8% 3,5% 6,9% 5,4%USA 0,2% 3,7% 2,7% 4,2% 2,3% 0,2% 5,8% 1,4% 1,1% 6,3% 5,9%

Argentine 0,2% 13,0% 13,8% 10,7% 15,3% 1,0% 7,9% 12,9% 7,7% 9,5% 16,2% 13,2%Brésil 0,4% 10,9% 13,9% 7,1% 10,3% 1,0% 7,9% 13,2% 5,0% 11,6% 15,7% 10,6%Chine 4,6% 10,6% 16,4% 10,3% 13,8% 1,7% 9,8% 14,3% 6,8% 16,2% 19,2% 13,7%inde 15,6% 24,6% 32,9% 29,4% 32,1% 31,2% 30,4% 33,4% 13,4% 31,0% 34,1% 30,8%Pakistan 9,6% 12,4% 19,4% 15,1% 17,6% 12,6% 12,6% 20,1% 7,8% 17,5% 21,1% 17,7%Afrique du Sud 1,8% 10,3% 8,2% 4,7% 14,7% 5,3% 5,3% 7,9% 8,5% 6,0% 15,6% 8,0%

Bangladesch 13,3% 21,3% 14,8% 13,0% 19,6% 17,3% 15,5% 15,8% 7,4% 14,4% 23,2% 15,8%Cambodge 3,8% 9,1% 14,4% 9,6% 15,6% 6,4% 9,1% 12,9% 10,9% 9,5% 14,2% 15,7%Tchad 11,3% 15,9% 14,8% 11,5% 15,8% 7,5% 23,3% 13,3% 20,4% 24,0% 18,5% 11,9%Ethiopie 5,9% 9,4% 14,8% 9,0% 15,1% 0,8% 26,4% 9,7% 27,3% 21,0% 16,8% 9,4%Lesotho 3,6% 6,9% 7,3% 6,1% 9,2% 2,5% 3,1% 7,8% 15,5% 7,7% 13,2% 9,6%Madagascar 0,7% 0,0% 4,5% 2,3% 4,9% 0,3% 5,8% 4,7% 5,8% 4,9% 3,7% 3,2%

-68-

cela : d'une part, les pays du Maghreb seront plus vulnérables aux fluctua-tions du cycle économique européen, d'autre part, la concentration des exports, dans l'absolu, affaiblit la capacité de résilience de leurs écono-mies.

√ L'insertion des PM sur les marchés internationaux se fait essentiellement sur la base d'avantages compara-tifs reposant sur des différences de productivité relative ou de dotation factorielle. La proximité géographi-que avec l'UE explique l'intensité des échanges et les caractéristiques de l'offre déterminent largement la com-position des échanges. Les échan-ges sont principalement inter-bran-ches[39]. Cependant, on commence à observer le développement d'un commerce intra-branche.

√ Les PM sont particulièrement per-formants à l'export sur les produits manufacturés à l'exception de l'Al-gérie qui régresse et de l'Egypte qui stagne. Pour la Turquie ou Israël,

le recul de l'agroalimentaire a été plus que compensé par les bons résultats des biens de consommation et d'équipement respectivement. En revanche, depuis la deuxième partie des années 90, les gains de parts de marché enregistrés par le Maroc et la Tunisie ont marqué un coup d'ar-rêt, en grande partie parce que les entreprises du secteur textile ont été paralysées face aux conséquences de la fin de l'accord multi-fibre et que l'investissement a été freiné.

√ Excepté l'Algérie, tous les PM sont en déficit commercial, dont l'origine réside dans leurs échanges avec l'UE (sauf pour l'Egypte) plus spécifique-ment de produits manufacturés. Le comblement du déficit permis dans la décennie 80 par la hausse des exports et la limitation des imports a été stoppé du fait du ralentissement de la demande européenne et des gains de part de marché. La Turquie, qui est en situation d'union doua-nière avec l'UE depuis janvier 1996, a vu ses imports en provenance de

Tableau X17 : Niveau de protection bilatéral, exports, 2001

Source : Etude Femise FEM22-36, à partir de MacMap-HS6 des calculs des auteurs

ImporterExporter Algérie Egypte UE Jordanie Liban Libye Maroc Rest OCDE Syrie Tunisie Turquie USAAlgérie 7,3% 0,1% 18,8% 2,0% 37,9% 0,00ù 1,5% 10,1% 4,0% 0,6% 0,2%Egypte 14,6% 1,7% 5,8% 3,3% 7,6% 20,5% 7,4% 16,1% 15,9% 12,0% 3,7%Jordanie 15,3% 10,2% 2,6% 5,8% 5,2% 11,1% 10,2% 10,8% 15,7% 5,4% 4,2%Liban 18,4% 17,6% 2,8% 7,9% 11,6% 16,6% 12,3% 17,2% 21,8% 11,4% 2,3%Maroc 0,0% 14,0% 1,4% 4,5% 1,8% 0,0% 8,2% 9,7% 16,6% 12,1% 5,8%Syrie 12,8% 23,8% 0,5% 5,0% 2,2% 24,0% 12,7% 5,3% 12,8% 6,6% 1,1%Tunisie 19,1% 15,1% 2,1% 7,1% 4,5% 7,0% 15,8% 7,0% 18,3% 16,1% 6,3%Turquie 19,7% 77,2% 1,5% 16,2% 7,8% 18,7% 34,1% 8,3% 27,7% 40,1% 5,9%

Australie 11,1% 11,7% 9,0% 6,9% 2,5% 15,5% 31,4% 10,3% 8,3% 30,4% 17,6% 2,0%Canada 10,3% 10,1% 5,1% 7,8% 3,0% 16,0% 22,1% 5,2% 10,1% 38,7% 10,6% 0,1%UE 8,8% 5,7% 2% 5,9% 5,1% 92,7% 18,5% 3,3% 8,5% 8,4% 1,0% 1,5%Japon 12,9% 17,7% 4,3% 10,9% 3,0% 21,7% 17,9% 5,6% 17,6% 20;6% 4,4% 1,9%Suisse 12,4% 12,8% 0,8% 8,2% 2,8% 15,2% 16,8% 3,4% 7,9% 22,2% 0,6% 2,2%USA 12,0% 28,2% 3,8% 9,9% 3,8% 20,5% 19,5% 3,1% 14,0% 23,7% 6,2% -

Argentine 14,0% 16,0% 6,8% 9,8% 5,0% 24,4% 28,0% 15,5% 16,7% 33,2% 16,7% 3,5%Brésil 14,6% 22,8% 6,7% 11,1% 4,8% 19,4% 26,6% 14,6% 18,0% 25,0% 18,6% 3,0%Chine 19,9% 142,6% 4,3% 15,9% 5,5% 18,9% 28,4% 5,6% 25,1% 32,0% 9,4% 4,5%Inde 17,0% 51,6% 5,6% 10,4% 3,4% 9,8% 33,8% 11,1% 13,4% 30,3% 14,5% 4,6%Pakistan 17,8% 45,0% 2,7% 3,9% 2,8% 14,1% 38,6% 14,7% 30,3% 25,9% 9,1% 8,2%Afrique du Sud 14,8% 35,2% 3,3% 14,1% 5,7% 17,1% 28,0% 5,9% 17,0% 28,8% 11,1% 0,7%

Bangladesh 18,1% 63,9% 0,7% 5,7% 3,3% 8,0% 30,5% 6,7% 17,9% 28,3% 7,8% 11,7%Cambodge 15,5% 42,4% 1,6% 4,4% 1,9% 10,2% 36,6% 7,5% 23,8% 28,4% 8,6% 12,4%Tchad 5,5% 6,1% 0,0% 1,1% 0,5% 1,4% 4,0% 0,6% 28,8% 1,8% 0,2% 2,0%Ethiopie 14,6% 28,6% 3,0% 12,6% 4,7% 21,6% 18,9% 6,0% 20,0% 12,7% 3,3% 2,7%Lesotho 8,4% 13,0% 0,7% 2,6% 1,7% 27,1% 10,9% 7,0% 8,3% 10,4% 2,2% 12,0%Madagascar 23,4% 0,0% 1,5% 23,4% 4,0% 6,5% 33,1% 7,2% 22,8% 34,8% 19,3% 5,0%

-69-

l'UE 15 progresser rapidement alors que ses exports demeuraient très diversifiées. En ce sens, le pays a su profiter de l'opportunité offerte d'im-porter des technologies nouvelles et des produits meilleur marché pour dynamiser sa compétitivité et ses échanges et réduire son déficit (la dévaluation de sa monnaie l'y a aidé également).

√ Une estimation, à partir d'un modèle gravitaire au niveau sectoriel, des effets sur les importations et les exportations de chaque PM du niveau relatif de richesse des pays considé-rés, de l'intensité capitalistique de leurs échanges et de leur structure, de l'existence d'un langage ou d'une frontière commune, de leur histoire commune, et des tarifs montre que le niveau de protection tarifaire influen-ce plus significativement les importa-tions des PM que leurs exportations et l'élasticité des flux d'échange aux tarifs est élevée[40]. Ceci renvoie à l'existence d'un accès préférentiel des PM à certains grands marchés comme celui de l'UE, certes, mais signifie aussi qu'une levée des tarifs engendrerait une hausse importante des échanges, plus importante que celle obtenue généralement dans ce type d'analyses qui ne tiennent pas compte des tarifs et du fait que les PM ne peuvent influencer le prix de marché imposé par leurs partenaires commerciaux. Au delà de cela, les contraintes imposées par la plupart des PM à l'importation, notamment de technologies plus avancées, ont certainement eu un impact négatif sur leur capacité d'ajustement en entravant la mise à niveau de l'in-dustrie.

√ Il apparaît aussi que partager une lan-gue commune dynamise les exports et les imports des PM, surtout en pro-venance de pays dont ils étaient des colonies dans le passé, alors qu'avoir une frontière commune n'a pas d'im-pact sur l'intensité du commerce, ce qui capture bien les difficultés d'une intégration Sud-Sud, alors même que la taille du marché de l'importateur joue un rôle significatif. Cependant, les estimations faites montrent que l'effet d'une levée des barrières tarifaires des PM vis-à-vis des autres PM n'aurait qu'un effet marginal sur les échanges intra-zone et que d'autres éléments doivent relayer cette politique com-merciale d'intégration Sud-Sud pour en faire un complément à un rappro-chement avec l'UE.

√ Sans oublier, comme on l'a vu plus haut, l'importance de réduire les coûts de transports, tant par la réforme des différents secteurs, en particulier les transports maritimes, que par la créa-tion de nouvelles infrastructures.

Evaluation des bénéfices de diffé-rentes formes d'intégration

Sur la base de ces constats, l'étude a cherché à déterminer quel type d'ouver-ture est optimale pour les PM. Les simu-lations faites à partir du modèle MIRAGE montrent que :

√ un accord de libre-échange Sud-Sud ne bénéficierait qu'à la Turquie et à la Tunisie et très marginalement au Maroc qui est très protectionniste rela-tivement aux autres PM. Le premier accroîtrait ses exports, notamment de textile-habillement, vers les PM et le second verrait ses exports vers les PM

-70-

et les pays de l'UE progresser grâce aux gains de compétitivité que l'ouver-ture des marchés au Sud permettrait.

√ le même type d'accord signé entre l'UE et chaque PM pris séparément induit une hausse du bien-être en Turquie, en Tunisie et au Maroc mais pas dans le reste de la zone médi-terranéenne pour laquelle il décroît. Le Maroc et la Tunisie bénéficieraient d'une création de trafic conséquen-te (respectivement +54% et +48%) induite par la libéralisation des échan-ges de biens agricoles avec l'UE qui compenserait la baisse des échanges entre PM. L'équilibre budgétaire souf-frirait beaucoup du manque à gagner impliqué par la levée des tarifs, mais l'emploi, les revenus et l'investisse-ment progresseraient. Cette stratégie d'ouverture entraînerait une modifica-tion profonde de la structure produc-tive. Les secteurs qui seraient voués à voir leur activité réduite sont ceux du lait et de la viande pour la Turquie, le Maroc et la Tunisie, ceux du textile-habillement et de l'agriculture pour les autres PM. D'autres profiteraient largement de cette croissance des échanges tels que les secteurs du textile-habillement pour la Turquie, le Maroc (plus les produits agricoles) et la Tunisie. Cependant, cette stra-tégie ne semble pas optimale pour les PM en tant que zone, la création de trafic dont bénéficient certains étant tout ou partie compensée par le détournement de trafic dont souffrent d'autres. Par exemple, dans le sec-teur du textile-habillement, la créa-tion de trafic avec l'UE porte sur des échanges intra-branche. Les avan-tages comparatifs du Maroc, de la Tunisie et de la Turquie sont tels que

leur activité croit et leur balance com-merciale nette vis-à-vis de l'UE dans ce secteur s'améliore. La compétiti-vité des autres PM dans ce domaine étant faible, l'UE va préférer à leurs produits ceux du Maroc, de la Tunisie ou de la Turquie et leur balance com-merciale nette vis-vis de l'UE va se détériorer de même que leurs termes de l'échange. Ceci affaiblit l'efficacité globale de cette stratégie.

√ enfin, une libéralisation commercia-le multilatérale profiterait a priori à tous les PM mais moins à la Turquie. Des coûts d'ajustement, plus impor-tants que ceux issus des deux cas de figure envisagés précédemment, sont à prendre en compte (haus-se du chômage dans les secteurs exposés à la concurrence étrangère, devenir de l'agriculture, réallocation massive de facteurs de production) ce que ne peut pas faire ce modèle. Les résultats sont donc à manipuler avec précaution, mais cette stratégie générerait une forte création de trafic qui dynamiserait principalement la production de textile-habillement en Tunisie et au Maroc, de céréales dans les autres PM, d'où une croissance sensible du PIB et des salaires.

Certains avanceront qu'une approche régionale peut servir de tremplin à une ouverture multilatérale. L'avantage serait une transition progressive en dou-ceur qui faciliterait la réallocation des facteurs de production, dont la mobi-lité n'est pas parfaite ce qui implique des coûts d'ajustement. Cependant, une telle approche ne débouche pas toujours naturellement sur un accord multilaté-ral. C'est possible uniquement si celui-ci demande les mêmes ajustements que

-71-

l'accord régional dans tous les autres cas, le pays concerné aura à supporter les conséquences de deux transitions.

Une analyse de la situation des PM en ter-mes de congruence structurelle montre que si pour la Turquie et pour les autres PM conclure un accord de libre-échange avec l'UE peut constituer un bon moyen de se préparer à une libéralisation com-plète des échanges sur une base multi-latérale, pour le Maroc, la situation n'est pas aussi tranchée, et pour la Tunisie, un accord régional avec les autres PM serait préférable (tableau X18).

Il n'en reste pas moins que derrière les seuls apports économiques, se trouvent également d'importants effets politiques et sociaux, ce dont la construction euro-péenne peut largement témoigner. Il est évident que la situation actuelle, orien-tée nord-sud, n'est pas satisfaisante et que le premier facteur de rééquilibrage repose sur des initiatives comme Agadir ou GAFTA. Il est alors intéressant de s'interroger sur les pas nécessaires pour transformer ses accords en une intégra-tion régionale plus profonde.

2. L'intégration de l'Europe, un modèle pour les initiatives régiona-les au sud

L'intégration régionale est devenue ces dernières années un objectif global. L'intégration prend plusieurs formes, depuis la création de zones de libre-échange, les marchés communs, jus-

qu'aux configurations plus profondes comme les unions économiques et poli-tiques. L'intégration régionale est sup-posée maximiser le bien-être d'une nation et renforcer le pouvoir de négo-ciation d'une région dans le contexte international. Cette section du rapport examine la capacité des PM à mettre en place une intégration régionale forte. Comme la plupart des PM sont aussi des pays ara-bes, on ne peut pas exclure de l'analyse les tentatives d'unions arabes, notam-ment parce que les PM ont été parmi les plus actifs dans la création des accords au sein de la région arabe. La sec-tion, qui repose sur une étude Femise (FEM22-07), se référera donc principa-lement à l'intégration arabe. Elle tire les leçons de l'expérience d'intégration de l'UE, mettant en relief les similitudes et les différences entre les deux régions et proposant des recommandations politi-ques pour la région arabe. Sept aspects différents de l'intégration sont discutés ci-dessous, à savoir les relations com-merciales, les lois de concurrence, la convergence des politiques publiques en matière de finance et de fiscalité, la poli-tique monétaire, la question agricole, la politique sociale et les flux migratoires.

Les Relations Commerciales

Il est intéressant de noter qu'entre 1990 et 2004, le nombre d'accords commer-ciaux régionaux signés (ACR) est passé de 50 à 230 environ. Le nombre moyen

Tableau X18 : indicateur de congruence structurelle

Source : Etude Femise FEM22-36

Turquie Maroc Tunisie Autres PM

Sud Sud /Multi. 94,1% 94,5% 96,3% 97,7%

Nord Sud/Multi 98,5% 93,5% 91,5% 98,1%

-72-

d’ACR auquel un pays appartient est six.

Au cours des années, plusieurs ACR ont été lancés entre les pays arabes. L'histoire de ces accords remonte à 1950, quand a été signé le Traité de Défense Commune et de Coopération Économique. Comme le nom l'indique, c'était davantage une forme de coopé-ration que d'intégration. Sensiblement à la même période, les premières initia-tives d'intégration voient également le jour en Europe. L'histoire européenne commence avec la formation de la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier (CECA) qui comprend l'Al-lemagne, la France, la Grande-Bretagne et les pays du Bénélux (la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg). Alors que l'intégration européenne a été renforcée à la fois selon les axes verticaux et hori-zontaux, l'intégration arabe, qui incluait plus de pays, n'a pas encore semblé s'approfondir.

Plus tard, d'autres ACR ont été signés, dont l'Accord sur la Facilitation Commerciale et le Règlement du Commerce de Transit en 1953, qui devait exempter les pro-duits arabes de droits de douane, comme forme de traitement préférentiel. En 1953 toujours est apparu l'Accord pour le Paiement des Transactions Courantes et les Mouvements de Capitaux, qui n'est constitué que de recommandations non contraignantes et est donc resté inusité. Ces deux accords ont été suivis par l'Accord d'Union Économique Arabe en 1957, l'Accord de Marché Commun Arabe en 1964 et l'Accord de Facilitation et de Développement du Commerce en 1983. Toutefois, la contribution de ces accords à l'intégration régionale a été très modeste. C'est principalement en rai-son de la formulation vague de ces accords, qui était souvent destinée à garantir l'approbation par toutes les parties impliquées. Cela a donné des accords faibles et non contraignants. De plus, ces ACR sont souvent con-sidérés comme trop ambitieux, étant données les circonstances dans lesquel-les ils devaient fonctionner, ce qui finit par faire apparaître la frustration des partenaires commerciaux du fait de la non réalisation des objectifs annoncés. En outre, ces ACR manquent générale-ment d'une vision claire des réalisations nécessaires. Aussi, constituent-ils fré-quemment des slogans politiques qui ne sont pas mis en action. L'intégration devient également sélective dès lors que des controverses apparaissent, notam-ment parce que les signataires veulent toujours être gagnants et n'envisagent jamais de remettre en question une par-tie de leurs avantages immédiats pour des bénéfices futurs.

Encadré : coup de projecteur sur le GCC

Le Conseil de Coopération du Golfe (GCC) est l'un des exemples d'intégra-tion régionale réussie. Formé en 1981, le Conseil devait accroître la coopération de six pays qui ont des conditions poli-tiques, sociales et économiques conver-gentes, à savoir les Emirats Arabes Unis, Bahreïn, l'Arabie Saoudite, Oman, le Qatar et le Koweït. Le Conseil a débuté avec des objectifs spécifiques limités, comme la zone de libre-échange GCC. Dans la mesure où cet objectif a été atteint avec succès, les pays du GCC ont récemment envisagé l'étape suivante, soit la création d'une union douanière et d'un marché commun GCC. En 2001, ils ont approuvé un accord économique plus complet qui a détaillé la nouvelle struc-ture d'intégration économique GCC.

-73-

Plusieurs raisons économiques et insti-tutionnelles ont gêné le processus d'in-tégration. D'un point de vue économi-que, la similitude de la production et de la composition des exportations des pays de la région, aussi bien que le manque de congruence entre les expor-tations d'un pays et les importations d'un autre empêche l'approfondissement de relations commerciales. De plus, la stratégie de substitution d'importation largement répandue dans ces pays, cou-plée à la haute protection tarifaire et la taille importante du secteur public, sont autant d'autres entraves. Enfin, il y a une disparité flagrante entre des taux tarifaires et le revenu des pays de la région, ainsi que leur structure économi-que (Cf. figure 11).

En plus de ces obstacles économiques, l'intégration de la région arabe fait face à un certain nombre de difficultés ins-

titutionnelles. Un des principaux incon-vénients est, comme on l'a vu précé-demment l'absence d'un système de transport adéquat. Il est symptomatique de noter, par exemple, qu'il y a deux vols quotidiens entre Le Caire et différents aéroports en Allemagne, mais seulement deux vols hebdomadaires entre Le Caire et Casablanca.

Le principal handicap institutionnel est le manque d'institutions supranationa-les qui piloteraient le processus com-plet d'intégration. Au lieu de cela, les PM utilisent une approche intergouver-nementale qui limite le processus d'in-tégration aux limites de chaque gou-vernement. Ce manque d'institutions a plusieurs implications, notamment le manque de précision des règlements contrôlant le commerce. De plus, de telles institutions auraient l'autorité pour arbitrer les discussions et les

Figure 11 : Part des différents grands secteurs dans le PIB de certains pays ara-bes

Source : Etude Femise FEM22-07, à partir de World Bank, WDI 2003

-74-

conflits surgissant entre des pays, d'autant que certains PM ne sont pas membres de l'OMC, à savoir l'Algérie, l'Autorité palestinienne et le Liban. Ainsi, les violations signalées entre ces pays, comme celles établies entre l'Egypte et le Liban, sont résolues bila-téralement d'une façon inefficace, qui exige souvent une intervention politi-que. Ces conditions affaiblissent en fin de compte les liens commerciaux entre les pays, constituant un nouvel obsta-cle à l'intégration régionale.

L'ACR le plus récent dans la région arabe est la Grande Zone Arabe de Libre-échange (GAFTA), qui est spécifi-quement orientée vers la libéralisation du commerce des marchandises. Il est prévu que, par le biais de GAFTA, une union douanière sera formée parmi des Etats membres à l'issue d'une période de dix ans débutant en 2006. Les analystes considèrent GAFTA comme le premier véritable accord d'intégra-tion et pensent généralement que cet accord surpassera ses prédécesseurs. Pour éviter de tomber dans les travers d'inefficacité, qui ont jusqu'ici toujours marqué les ACR arabes, la mise en œuvre de GAFTA devrait se fonder sur les leçons tirées des expériences réus-sies, comme celle de l'UE.

L'UE a disposé de plusieurs avantages et forces qui ont soutenu son intégra-tion régionale. En premier lieu, et sans doute le plus important, le processus dispose d'une vision claire des objec-tifs voulus. Pour l'UE, l'intégration économique n'est pas une fin en soi, mais plutôt le moyen de réaliser une intégration politique. Du côté arabe, cependant, l'objectif est rarement clair et, comme indiqué précédemment,

fréquemment fondé sur des réactions émotionnelles.

De plus, l'UE a adopté une approche que l'on peut qualifier de fédérale du point de vue du sud, en créant des institutions supranationales qui sont en charge de surveiller le processus d'intégration. Parmi ces institutions, on citera le Parlement Européen, la Cour de Justice Européenne, la Banque Centrale Européenne et la Commission Européenne. Dans la région arabe, l'intégration est toujours fondée sur une approche gouvernementale, prin-cipalement du fait que des leaders politiques craignent une perte de leur souveraineté et de leur autorité. En outre, les accords européens sont clairs et spécifiques avec des objec-tifs accessibles. L'UE a adopté une approche graduelle et pragmatique qui a permis une transformation lissée et soutenable, mais allant fermement d'une intégration superficielle à une intégration plus profonde. Les analys-tes pensent, toutefois, que le déve-loppement récent dans le commerce international et le progrès technologi-que ne permettraien pas le succès et le caractère durable d'une intégration peu profonde.

En se retournant sur les débuts de l'UE, deux facteurs ont aidé le processus d'intégration, dont l’un est la pression et l'appui des Etats-Unis pour pousser en avant le processus. De plus, les six pays fondateurs de l'UE avaient des conditions économiques semblables. La différence entre des niveaux tarifai-res moyens non-pondérés, par exem-ple, était autour de 10% seulement. Du côté arabe, comme indiqué ci-des-

-75-

sus, les pays de la région ne sont pas assez homogènes pour permettre un processus d'intégration lissé.

Les lois de concurrence

Pour compléter et faciliter les relations commerciales, les lois de concurrence ont été introduites et affinées dans le monde entier. En 2005, plus de 110 pays ont mis en place de telles lois nationales de compétition pour interdire les com-portements anti-compétition et garantir un marché concurrentiel. Cependant, il a été prouvé que des lois de concurrence nationales ne sont pas suffisantes pour promouvoir la concurrence à un niveau régional. Cette affirmation repose sur le fait que les objectifs des différentes lois nationales sur la concurrence peuvent varier et que des pays entrant dans un processus d'intégration régionale peu-vent ne pas disposer d'une telle législa-tion nationale. La mise en place d'une loi régionale sur la concurrence nécessite l'introduction d'une autorité régionale de la concurrence.

En ce qui concerne l'intégration arabe, la Charte de la Ligue des pays arabes de 1945 ne fait pas mention de dispo-sition légale sur la compétition. Il n'est pas évident de savoir s'il s'agissait d'une décision délibérée ou d'un « oubli ». Il est communément admis cependant, que la Charte a involontairement laissé de côté cette notion, notamment parce qu'elle ne jouissait pas de sa notoriété actuelle. Sur le plan européen toutefois, les lois de compétition ont été introdui-tes en Autriche en 1890. La première loi européenne de concurrence a été adop-tée en Allemagne en 1923 et développée depuis. Dans la mesure où l'on pense que l'accord GAFTA devrait impulser plus

d'intégration, la région arabe a besoin d'une loi de concurrence régionale, pour laquelle l'expérience de l'UE pourrait ser-vir de leçon.

Un des principaux objectifs de la loi européenne de concurrence était le sou-tien à la création du marché unique. Le processus législatif pour l'UE n'était pas facile et plusieurs obstacles ont dû être surmontés. L'opposition de gran-des industries était l'un de ces obsta-cles, celles-ci concevant la loi comme la limitation. Il a également dû faire face à une résistance politique et intellec-tuelle. Ce fut essentiellement grâce à la persévérance et la détermination des Etats membres que cette loi a pu voir le jour. Il a été nécessaire de modifier la perception prévalente faisant des lois de compétition une contrainte, et instiller l'idée qu'elles ont à l'inverse un pouvoir social constructif. Initialement, les accords européens n'incluaient pas de dispositifs pour gérer la concurrence, mais ils contenaient les dispositions nécessaires pour les mettre en place. Ce type de dispositions, comme mentionné précédemment, manque également dans le cas de la région arabe.

De plus, les administrations européen-nes étaient en faveur de la mise en place de lois de compétition, ce qui a facilité leur promulgation. Dans la région arabe, les administrations manquent de compréhension de l'importance de ces lois au sein d'un processus d'intégra-tion. Il peut être alors envisagé qu'un modèle de loi sur la concurrence pour la région arabe puisse être formulé, pour servir de guide pour l'harmonisation des lois nationales, qui ouvrirait la voie à la mise en place d'une loi de compétition régionale.

-76-

La convergence en termes de finan-ces publiques

Un autre aspect considéré comme impor-tant pour approfondir une intégration régionale est la convergence de finances publiques. Il est en effet souvent avancé que la non-conformité de la politique fiscale entre Etats membres peut créer tension politique et désaccord. Une con-vergence fiscale graduelle peut garantir une intégration aisée et réduire les coûts d'ajustement encourus par les Etats membres. De plus, l'élimination des bar-rières et des distorsions, en particulier la coordination fiscale, est cruciale pour l'intégration régionale. La convergence de finances publiques est même un pré-requis pour les formes plus profondes d'intégration, en particulier les unions monétaires et fiscales. A nouveau, cette convergence implique l'existence d'une autorité unifiée, soit une institution supranationale.

L'expérience de l'UE est très instructive en matière de convergence des finances publiques. L'UE s'est rendue compte qu'il est crucial de combler l'écart entre les zones les plus riches et les zones les plus pauvres de l'Union. Ainsi, l'Union a adopté une sorte de fédéralisme budgé-taire pour répondre à ce défi, d'autant que le revenu par habitant des 15 mem-bres initiaux de l'UE est de 2,2 à 13 fois plus élevé que celui des dix nouveaux membres. La Commission Européenne a donc mis en place un plan d'action pour la période 2006-2013 pour combler l'écart. Le plan est doté d'un budget de 336,4 milliards d’€, divisé en trois objec-tifs principaux. Le premier, qui dispose d'un budget de 262 milliards d’€, ciblera les zones les moins développées, celles qui ont un produit intérieur brut inférieur

à 75% de la moyenne de l'UE. Le deuxiè-me objectif, qui est doté de 61 milliards d’€, cible les régions en reconversion. Le troisième objectif, doté d'un budget de 13,4 milliards d’€, doit accroître le com-merce parmi les Etats membres. Ce plan a été présenté en détail pour donner une idée de la façon dont les régions gèrent leurs disparités. Un tel plan devrait être adopté, moyennant quelques modifica-tions, au sein de la région arabe.

Dans la région arabe en effet, on peut observer des disparités semblables entre les pays, ainsi que des problèmes de pauvreté. Le niveau de la dette publique domestique et étrangère, par exemple, est relativement élevé dans certains pays arabes, atteignant 100% du pro-duit intérieur brut en Egypte, 135% au Liban, 93% en Jordanie et 81% en Syrie. De plus, les différences en matière de dépenses publiques entre les Etats sont très importantes, en particulier du fait que plusieurs pays allouent une somme considérable de dépenses publiques à la dépense militaire.

On doit cependant reconnaître que la pression fiscale a connu une tendance baissière dans des pays arabes. De plus, avant 2004, les droits de douane entre les pays arabes ont été réduits à 20% de leur niveau de 1997. De nombreux pays ont également commencé à réviser et restructurer leurs systèmes fiscaux. Toutefois, ces réformes sont conduites sur une base nationale plutôt que régio-nale, ce qui peut aboutir à l'approfondis-sement des disparités.

Le problème avec la convergence fiscale est que les Etats doivent accepter de subir des coûts d'ajustement à court terme pour récolter des bénéfices à long

-77-

terme. De plus, la coordination est un problème-clef. Les réformes individuel-les pourraient alors être plus négatives que des disparités existantes.

Les politiques monétaires

Après la convergence fiscale, l'étape suivante serait l'harmonisation des poli-tiques monétaires. Ce sujet ne peut pas être discuté sans évoquer l'expérience unique de l'UE. Il fait remarquer que l'idée d'une monnaie unique avait ren-contré un grand scepticisme. Ce nou-veau pas a nécessité une forte volonté des leaders politiques, une structure institutionnelle régionale efficace et le consentement sur le fait qu'un des Etats membres jouerait un rôle principal dans le processus. Dans le cas de l'UE, c'est l'Allemagne qui fut la force première. La version arabe cependant, ne remplit aucune de ces trois exigences. Il y a d'abord des doutes sur la volonté des leaders arabes à entrer dans une telle intégration profonde. Dans le monde arabe, l'intégration est surtout un slo-gan politique. De ce fait, il est diffi-cile d'avoir une structure institutionnelle régionale dans une telle ambiance hos-tile. Et certainement, choisir un leader constituerait la tâche la plus difficile sinon impossible.

La création de la Banque Centrale Européenne (BCE) a été cruciale dans le succès de cette forme d'intégration. Il s'agit d'une institution supranationale qui possédait la crédibilité, une stratégie appropriée, l'expertise technique ainsi que l'autorité pour mettre en oeuvre ses plans. Un préalable décisif pour le suc-cès de la BCE a été son indépendance. Il est parfois avancé que l'indépendan-ce de banques centrales implique des

Encadré : Intégration Financière et Monétaire sud-sud (basé sur l'étude Femise 22-39)

Les PM semblent vouloir se diriger vers une intégration économique régionale accrue. Une partie importante de l'intégration économique est l'augmentation du commerce. Cependant, étant donné les environnements monétaires, macro-économiques et financiers instables dans certaines parties de la région, il semble douteux que les politiques macro-économi-ques suivies actuellement fourniront la sta-bilité nécessaire pour accroître l'intégration économique à une échelle régionale. On continue de plus à observer des divergen-ces significatives dans les politiques de taux de change et les cycles d'activité. L'existence d'une surévaluation des taux de change réels et de mauvais alignements dans les pays GAFTA freinent toujours les flux de commerce intra-régional. Ici, la divergence des politiques macro-économiques dans la région peut être considérée comme l'un des principaux obs-tacles à la réalisation d'une intégration com-merciale et monétaire. Une façon possible de résoudre ce problème est peut-être l'adoption d'une devise commune dans la région MED.

La littérature sur les problèmes de taux de change indique que les bénéfices d'une union monétaire, par adoption d'une devise commune, sont issus de l'élimination des coûts liés aux mauvais alignements de taux de change et à la conversion des monnaies. Les accords GAFTA actuels ne prévoient pas immédiatement la mobilité du travail dans la région, ni la possibilité de transferts fiscaux inter-frontaliers pour aplanir les chocs écono-miques et financiers. Plus loin, les banques centrales des divers PM ne possèdent pas des bons antécédents pour maintenir la stabilité des prix et un taux de change flexible, qui leur permettraient de poursuivre leurs propres politiques monétaires indépendantes. Une politique monétaire qui adopterait une devise commune ou qui ancrerait étroitement les devises MED à l'euro et non au dollar pourrait contribuer à « emprunter » de la crédibilité monétaire de la Banque Centrale Européenne (BCE) et ainsi, réduire l'inflation et les taux d'intérêt de la région MED.

Si le souhait est l'indépendance monétaire, un régime de taux de change flexible est meilleur pour les PM, compte tenu de leurs différences structurelles. Cependant, les expériences du Liban, de l'Egypte, du Maroc et de la Tunisie en termes de taux flexibles ont été décevan-

-78-

tes, vus la forte volatilité de leurs taux de change réels et le mauvais alignement pro-longé de leurs devises respectives par rapport aux valeurs d'équilibres. Une monnaie domes-tique faible contribue à la faible productivité des entreprises domestiques qui rivalisent avec l'étranger. Dans la mesure où ces pays optent pour une stratégie d'ouverture qui devrait conduire à des liaisons commerciales plus grandes les uns avec les autres, une plus grande fixité des taux de change vis-à-vis de l'euro pourrait être favorisée.

L'étude Femise a analysé cette question à partir des données annuelles de la base de données « Statistiques Financières Internationales » et du Fonds Monétaire arabe sur la période 1960-2003, pour étudier le statut d'intégra-tion monétaire dans la région MED et les pers-pectives d'adoption d'une devise commune.

Des tests de co-integration ont été utilisés pour étudier l'intégration monétaire sud-sud, notamment si les PM menaient leurs politi-ques macro et monétaires indépendamment ou suivaient une sorte de convergence favo-rable à l'adoption d'une devise commune. Les résultats montrent qu'il n'y a aucune con-vergence dans les politiques monétaires ou macro en général. Ces résultats indiquent une forte relation de long terme entre les taux de croissance du PIB de la Jordanie, du Koweït, du Maroc, de l'Arabie Saoudite, de la Syrie, de la Tunisie, des EAU et du Liban, indiquant une convergence forte des cycles d'activité. Si une croissance du commerce intra-régional peut conduire apparemment à plus de synchroni-sation dans des cycles d'activité, ici les taux de croissance de PIB sont aussi fortement cor-rélés avec les fluctuations du prix du pétrole. C'est non seulement vrai pour les pays pro-ducteurs, mais également pour les autres, du fait des effets significatifs des rapatriements des travailleurs émigrés travaillant dans des pays pétroliers. On peut ainsi sans risque conclure que la convergence forte dans les taux de croissance du PIB n'est pas vraiment le résultat d'une intégration commerciale plus grande, mais est plutôt conduite par la dyna-mique du prix de pétrole. Les résultats de cointegration des taux de change nominaux en Jordanie, Egypte, Koweït, Maroc, Syrie, Tunisie et les EAU indiquent une convergence plutôt faible, qui n'est pas surprenante. C'est expliqué par le manque de coordination et au degré significatif d'hétérogénéité des politi-ques monétaires et de taux de change : au moins cinq des sept pays MED semblent fixer leurs taux de change indépendamment. Les résultats sur les taux d'inflation de Bahreïn,

d'Egypte, de Jordanie, de l'Arabie Saoudite et de la Syrie indiquent une convergence très faible des politiques monétaires en ce qui con-cerne l'inflation. Les éléments indiquant une convergence ne peuvent pas être attribués à une coordination, mais sont plutôt dues au fait que tous les PM ont fourni des efforts significatifs pour contenir les pressions infla-tionnistes depuis la fin des années 1980.

La conclusion générale est que la coordination des politiques monétaires et macro manque toujours dans la région et que plus d'efforts doivent être consacrés à cet égard. Un sec-teur où des véritables efforts vont devoir être menés concerne les politiques monétaires. Il est nécessaire d'accroître l'harmonisation des politiques de taux d'intérêt et de taux de change. La politique de taux de change fixés à l'USD a conduit à la surévaluation de taux de change réels avec des impacts négatifs sur le commerce intra-régional. Deux options de politique sont disponibles. L'option de politi-que monétaire optimale est une union moné-taire entre les pays. Toutefois, la perspective d'une union monétaire entre des membres GAFTA apparaissant peu probable à court terme, ces pays devraient peut-être suivre les exemples tunisiens, marocains et égyptiens et présenter à court terme plus de flexibilité dans leurs taux de change. A long terme, les pays peuvent opter pour plus de fixité par un ancrage rigide ou une zone de cible de taux de change comme étape avant l'adoption d'une devise commune. Toutefois, cela ne semble pas actuellement une alternative viable pour la majorité des PM, compte tenu de l'absence de politiques monétaires indépendantes et des marchés financiers bien développés. De plus, le faible développement d'institutions monétaires, politiques et des institutions pour appliquer les politiques ont tendance à affai-blir l'efficacité de politiques monétaires dis-crétionnaires. Pour le moment, l'option la plus sûre pour la plupart de ces pays peut être un certain type d'entente fixée. Pour les PM qui réalisent une part significative de leur com-merce avec l'UE, un ancrage à l'euro peut être plus approprié qu'un ancrage au dollar. Dans tous les cas, les pays qui prendraient des dispositions de taux de change fixes doivent mettre en oeuvre des mesures de prévention de crise, à savoir en exerçant la discipline fiscale, gérant leurs dettes et leurs réser-ves de devises et évitant l'appréciation de monnaie. A mesure que les PM amélioreront leurs infrastructures monétaires et fiscales et deviendront plus intégrés aux marchés finan-ciers mondiaux, ils pourront songer à adopter une devise commune.

-79-

taux d'inflation inférieurs, une meilleure croissance et de meilleures conditions d'emploi. La BCE a également cultivé la transparence, bien que ce soit une tâche difficile, n'importe quels événements imprévus et affectant la politique moné-taire pouvant attaquer sa crédibilité. Le processus a été accompagné par des campagnes d'information pour garantir l'appui du public.

Dans la région arabe, la plupart des ten-tatives d'intégration reposent principale-ment sur le commerce, qui était parfois suivi par une mobilité des capitaux et du travail. Mais, peu d'efforts ont été dirigés vers l'identification de politiques moné-taires régionales.

Les questions agricoles

Au sein des interrogations sur l'intégra-tion de la région arabe, une attention spéciale doit être portée au secteur agri-cole, qui est l'un des principaux secteurs du monde arabe. Environ 23 millions de personnes sont employées directe-ment dans les activités agricoles dans la région. Ici aussi, malgré les ressources

naturelles importantes disponibles dans la région, l'absence de politiques et de régulation a conduit à un déficit com-mercial élevé et grandissant dans ce secteur. La majorité des pays arabes importe massivement des produits agri-coles. Au cours de la période 1980-2003, les importations agricoles de la région arabe ont augmenté de 19 milliards US$ à 26,2 milliards US$. Dans le même temps, les exportations sont passées de 3 milliards US$ à seulement 5,7 milliards US$ (Cf. figure 12). En ce qui concerne le commerce au sein des pays arabes, le volume s'est élevé à 5,3 milliards US$, ce qui implique que les importations depuis la région arabe ne représentent qu’un quart des importations totales des pays arabes.

Du côté européen, le nombre d'em-ployés dans le secteur agricole a baissé de 19 millions en 1970 à seulement 6,7 millions en 2002. Cette baisse peut être attribuée à plusieurs facteurs, notam-ment la croissance de l'industrie et des services, représentant un facteur d'at-traction et la mécanisation croissante des processus agricoles. Le secteur agri-

Figure 12 : Importations et exportations totales de produits agricoles dans la région arabe 1980-2003 (US$1000)

Source : Etude Femise FEM22-07

-80-

ser le marché, d'assurer l'indépendance alimentaire et de maintenir des prix raisonnables. Grâce à cette politique, la production de céréale, par exemple, s'est fortement développée en Europe au cours des années quatre-vingt-dix. L'UE a également œuvré au comblement de l'écart entre ses importations et exportations (Cf. figure 13).

De plus, alors que le commerce intra-arabe est tout à fait limité, comme nous l'avons vu ci-dessus, l'UE dépend plus de ses marchés internes que des mar-chés externes. La figure 14 distingue la proportion du commerce intra-européen dans le commerce total. Les chiffres reproduits ici concernent seulement l'UE à 15, ce qui suggère que l'élargissement de l'UE à 25 états va augmenter la pro-portion du commerce intra-européen.

La faible intégration de l'agriculture a été attribuée à plusieurs facteurs. Une des principales raisons est l'importation de produits bon marché depuis l'ex-térieur de la région arabe. Une autre raison est que les investissements sont dirigés vers de grands projets de tra-

cole au sein des deux régions a deux différences marquantes. En premier lieu, sa contribution au produit intérieur brut est bien inférieure pour les pays de l'UE. En second lieu, la structure de produc-tion agricole est tout à fait différente, que ce soit en termes de qualité de production, de niveau de mécanisation, d'échelle des exploitations, etc.. Pour illustrer la différence, on peut noter que le niveau le plus haut d'exportations par employé dans la région arabe a été atteint en 2002. Il ne représentait que 10% de celui de l'UE la même année. Alors que la région arabe n'en est qu'à l'étape de la libéralisation commerciale, l'UE est déjà pleinement intégrée.

Malgré le fait que l'agriculture ne compte en moyenne que pour seulement 2% dans les comptes nationaux des pays de l'UE, son développement et le mouve-ment d'intégration ont fait l'objet d'une attention particulière de la part de l'UE. L'UE a introduit la Politique Agricole Commune (PAC) dont l'objectif était d'augmenter la productivité agricole, de garantir un niveau de vie convenable à la communauté agricole, de stabili-

Figure 13 : Importations et exportations agricoles de l’Union Européenne en millions US$ (1980-2003)

Source : Etude Femise FEM22-07

-81-

vaux publics. Ces projets ont souvent des coûts élevés de maintenance, ce qui ne laisse aux pays que de faibles fonds à consacrer au développement du sec-teur agricole et à l'adoption de nouvelles technologies. Enfin, un facteur qui est commun à tous les aspects de l'intégra-tion est l'absence de politique agricole régionale.

Pour combattre les faiblesses du secteur agricole, plusieurs institutions arabes ont porté une attention particulière à son développement dans toute la région. Un exemple est le Fonds Arabe pour le Développement Économique et Social. De 1974 à 2003, le développement agricole et rural a bénéficié d'un budget de 886 millions KD, soit environ un cin-quième des engagements de prêt totaux du Fonds. Le Fonds du Koweït pour le Développement Économique Arabe a consacré un budget de 338 millions KD à l'agriculture, ce qui représente autour de 19% de débours totaux. Le Fonds Saoudien pour le Développement a également porté de l'intérêt au secteur agricole, en y consacrant autour de 19% de ses dépenses, qui s'élèvent à envi-

ron 4,5 milliards SR pendant la période 1974-2003 pour 71 projets. Bien que ces efforts aient été largement appréciés, ils n'ont pas induit un élan d'intégration régionale, ni de politique régionale, dans la mesure où ils n'ont pas de nature supranationale.

En se basant sur l'expérience de l'UE, on constate un fort besoin de la région arabe d'adopter un modèle agricole qui renforcerait l'orientation du marché, augmenterait la productivité agricole et coordonnerait les efforts entre les diffé-rents Etats membres. Les pays arabes doivent commencer leur négociation sur ce sujet comme une unique entité afin d'améliorer les termes de l'échange et d’être clairement entendus internationa-lement.

Les politiques sociales

On ne pourra considérer l'intégration comme réussie, qu'à condition qu'elle bénéficie vraiment aux citoyens de cha-que Etat membre. C'est pourquoi les analystes ont tendance à considérer la politique sociale comme une mesure de

Figure 14 : Le commerce européen total de produits agricoles, incluant et excluant le commerce intra-européen (1990-2003, million US$)

Source : Etude Femise FEM22-07

-82-

l'intégration régionale et du bien-être des citoyens.

La région arabe est souvent caractéri-sée par le manque de coordination des efforts de développement sociaux, non seulement au niveau régional, mais au sein même de chaque pays. Les efforts de développement sont souvent le fait des organisations non gouvernementa-les individuelles. La région a connu des améliorations successives de certains indices sociaux, comme la mortalité maternelle et infantile, l'espérance de vie et les taux d'alphabétisation, que l'on verra en détail plus loin. Toutefois, le Rapport Arabe sur le Développement Humain a constaté que les progrès ont été longs et ne peuvent pas être considérés comme universels, puisque beaucoup de citoyens de la région sont toujours privés des besoins de base.

Il faut remarquer que le revenu par habi-tant moyen PPP des états arabes atteint 5 685 US$. C'est une valeur relativement haute, comparée à la moyenne des pays en développement, qui est 4 359 US$ (valeurs de 2003 selon le Rapport 2005 sur le Développement Humain). Mais, cette moyenne est assez trompeuse, car elle est fortement déterminée par les valeurs des pays du Golfe, dont les revenus par habitant peuvent atteindre 22 420 US$ aux Emirats Arabes Unis. Pour d'autres états arabes, cependant, les valeurs sont considérablement infé-rieures, comme au Soudan (1 910 US$) et au Yémen (889 US$).

Malgré l'amélioration apparente des revenus, certains indices de base restent toujours en arrière. Le taux d'alphabéti-sation moyen pour les états arabes est 64,1% alors que la moyenne des pays

en développement s'établit à 76,5%. Les taux d'alphabétisation les plus bas dans la région se rencontrent en Algérie, en Egypte, au Maroc, à Oman, au Soudan, en Tunisie et au Yémen, qui cumule avec un niveau inférieur des revenus. D'ailleurs, le niveau de revenu n'est pas le seul déterminant de l'alphabétisa-tion, comme le montre la comparaison entre Oman et la Jordanie. Tandis que le revenu par habitant à Oman est le triple de celui de Jordanie, le taux d'alphabé-tisation de cette dernière est plus élevé de 20%.

De plus, la discrimination par genre est une caractéristique particulière dans le monde arabe. Les taux d'alphabétisation comme les valeurs en termes de main-d'oeuvre le prouvent. Les taux d'alpha-bétisation féminins, en pourcentage des taux masculins, atteignent 71% dans la région. De plus, les taux d'inscriptions scolaires pour les femmes s'établissent autour de 83,8%, contre une moyenne des pays en développement de 87,3%. Plus loin, le taux d'activité féminin, toujours en pourcentage des taux enre-gistrés pour les hommes n'atteint que 38,9%. Les écarts les plus faibles pour l'activité économique entre hommes et femmes se rencontrent au Maroc, au Koweït, en Tunisie et en Egypte, quand les plus haut sont l'apanage d'Oman, de l'Irak et de l'Arabie Saoudite. On doit cependant reconnaître que la partici-pation féminine dans la main-d'oeuvre a augmenté de 11,7% entre 1985 et 1997 dans la région arabe, contre une augmentation moyenne pour les pays en développement de seulement à 2,3%.

Sur un autre plan, l'espérance de vie s'est substantiellement améliorée depuis les années cinquante, où elle était de

-83-

40,5 ans pour les hommes et 42,6 ans pour les femmes. Pour la période 1990-1995, l'espérance de vie a atteint 62,6 ans pour les hommes et 65,2 ans pour les femmes. De plus, le taux de morta-lité des enfants de moins de 5 ans (pour 1 000 naissances vivantes) varie de 3 à 39, le Liban affichant le taux le plus bas et le Yémen le plus haut. Les taux de mortalité maternelle (pour 100 000 naissances vivantes) s'étendent de 3 à 550. Les dépenses totales de santé en pourcentage du produit intérieur brut vont de 1,5 à 10,1%.

Pour améliorer le bien-être des citoyens, plusieurs pays arabes ont créé des fonds sociaux, qui agissent comme des média-teurs et répartissent des fonds provenant des gouvernements ou des donateurs, principalement aux pauvres en finan-çant de petits projets. Ils œuvrent en assurant des offres d'emploi, améliorant l'infrastructure et offrant des services de base aux démunis. Toutefois, l'efficacité de tels fonds peut être entravée par plu-sieurs facteurs. L'indépendance de ces fonds est variable d'une nation à l'autre. Alors que les fonds jordaniens et liba-nais, par exemple, atteignent les plus hauts niveaux d'indépendance, le conseil d'administration du Fonds Social égyp-tien est en grande partie composé par des représentants gouvernementaux, ce qui accroît sa nature bureaucratique. De plus, le contrôle et l'évaluation des activités des fonds sociaux sont parfois abandonnés afin de réduire les coûts. Enfin, la nature temporaire de ces fonds est le principal défi au caractère durable de leurs interventions.

En plus de l'effort national, il existe un effort régional pour améliorer le bien-être des citoyens. Comme dans le cas

de l'agriculture vu dans la section pré-cédente, différentes institutions, comme le Fonds arabe pour le Développement Économique et Social, ont prêté une attention particulière au développement social. Le fonds a ainsi dirigé presque 9,3% des débours de prêt totaux aux projets de services sociaux. Le Forum de Réforme Arabe est encore une autre tentative d'harmonisation de la politique sociale. Le forum a été créé en 2004 dans la Bibliotheca Alexandrina avec pour mandat un dialogue continu entre des intellectuels. Ces dialogues portent sur les questions de développement, en se concentrant particulièrement sur le rôle des jeunes et des femmes dans le développement.

Actuellement, la politique sociale dans le monde arabe apparaît en retrait. Cela peut être attribué à plusieurs obstacles. La tension politique dans la région a conduit les gouvernements à investir de grandes sommes dans le déve-loppement militaire, au détriment du développement social. Ainsi, il y a éga-lement un problème de non disponibilité de fonds. De forts taux de croissance démographique constituent encore un défi sérieux, qui pose la question du chômage et de l'échec, dans de nom-breux cas, à assurer la formation pro-fessionnelle. L'incapacité à coordonner les efforts de développement entre les gouvernements et les différentes entités non gouvernementales pèse également sur l'efficacité, d'autant que la société civile dans la région arabe n'a qu'une expérience limitée. La centralisation du processus décisionnel est également un obstacle, en particulier en présence d'une importante corruption et du man-que de capacité humaine. La nature de gestion de crise de la plupart des efforts

-84-

en termes de développement entraîne le manque de caractère durable et une vraie amélioration du bien-être.

En examinant l'expérience européen-ne, il faut noter que le Fonds Social Européen n'a joué qu'un rôle marginal dans l'intégration en termes de politique sociale. Sur un autre plan, la Charte Sociale Européenne de 1961, qui a été révisée et étendue en 1996, représente un ensemble d'actions obligatoires. De plus, pour renforcer l'intégration en matière sociale, la Cour Européenne de Justice a limité le contrôle national d'un pays sur sa politique sociale dans le sens où elle interdit la restriction des prestations sociales aux seuls citoyens d'un pays.

Un des principaux défis que l'UE ren-contre est le chômage persistant des années quatre-vingt-dix. Pour traiter un tel problème, il a été exigé que chaque Etat membre formule un plan d'action. Les plans de tous les pays seraient alors coordonnés par les différentes institu-tions de l'UE. Le Fonds Social Européen devait fournir l'appui à ces initiatives. Le problème est là d'identifier comment l'UE a coordonné les efforts de dévelop-pement sociaux.

Pour accélérer le processus de leur déve-loppement, les pays arabes doivent uti-liser efficacement les ressources dispo-nibles et coordonner les efforts de déve-loppement sociaux. Les deux principaux problèmes de développement social, à savoir le chômage des jeunes hommes et la discrimination de genre, doivent également être traités. Pour soutenir les efforts de développement, il est néces-saire d'encourager et de développer la participation de la société civile.

La mobilité des travailleurs

La forme la plus superficielle d'inté-gration, à savoir les ACR, se concentre principalement sur la liberté de mouve-ment des marchandises et des services. Les marchés communs, deuxième étape d'intégration, prennent en compte les mouvements des facteurs de produc-tion, donc la mobilité du travail. Il est notoire que la mobilité du travail est un processus naturel qui accompagne la croissance économique. Cependant, il peut être amélioré par la politique d'intégration. Ainsi, en absence de tel-les politiques, ce qui est le cas dans la région arabe, les facteurs d'attraction sont le seul déterminant de la mobilité du travail. Des accords bilatéraux sont les seuls accords dans la région arabe qui traitent quelques aspects de mobilité du travail, sans aller toutefois jusqu'à la libre circulation.

L'Egypte, par exemple, a signé des accords de coopération sur la question du travail avec neuf pays arabes au cours de la période 1974-1990. Le Maroc a des accords avec cinq pays arabes, datant du début des années 1980, la Tunisie avec quatre pays et les Emirats Arabes Unis avec cinq pays. Malgré ce nombre d'accords bilatéraux, la main-d'oeuvre arabe a dû faire face à la concurrence de travailleurs résidant en dehors de la région, particulièrement en provenance de l'Asie. En outre, les tensions politiques entre les pays arabes ont souvent abouti à la résiliation des contrats de travail des travailleurs d'autres pays arabes. Ce genre d'événement n'a pas été uni-que; il a été répété dans plusieurs pays sur un grand nombre de travailleurs. En 1985, par exemple, la Libye a mis fin aux contrats de travail de nombreux

-85-

émigrés égyptiens et tunisiens. Le Qatar a expulsé plusieurs centaines d'ouvriers égyptiens en 1998. De plus, la deuxième guerre du Golfe a conduit au retour d'en-viron 390 mille travailleurs égyptiens dans leur pays. Les évaluations tendent à indiquer que les pays GCC, suite au désaccord sur la position politique adop-tée par ces pays pendant cette guerre, ont expulsé plus d'un million d'ouvriers en Jordanie, en Syrie et au Yémen.

L'Organisation Arabe du Travail a adopté deux chartes pour régir les mouvements des hommes dans la région arabe. Elles indiquent que l'on devrait donner la pré-férence aux travailleurs arabes, en par-ticulier aux palestiniens, après la préser-vation d'offres d'emploi pour les citoyens d'un Etat membre. Cependant, elles ne font aucune mention sur la libre circula-tion du travail. De plus, ce sont des ins-truments non contraignants. Le dernier accord est la Déclaration de Principes sur la Facilitation du Mouvement du Travail Arabe, établie en février 2005. Cette déclaration ne mentionne que la facili-tation et non la libération, des mouve-ments des travailleurs. C'est également un accord non obligatoire.

Comme indiqué précédemment, en l'ab-sence de politique sur la circulation des travailleurs, la croissance économique est le seul déterminant des migrations. Dans la région arabe, les principaux fac-teurs d'attraction résident dans les pays GCC, qui possèdent un fort potentiel de croissance. Au cours de la période 1975-2002, la population des pays GCC récepteurs a augmenté de 335%, soit de 9,7 à 32,5 millions. Cependant, alors que la population nationale représentait 77,4% de population totale en 1975, elle n'en représente plus que 61,5%

en 2002, ce qui implique un taux de croissance de population migrante de 568%. La partie arabe non-GCC de la population migrante a diminué de 72% en 1975 à 31% en 1996. Dans le cas spécifique de l'Arabie Saoudite, exemple le plus saisissant, cette part a chuté de 90% à seulement 30%.

A l'inverse, l'UE dispose d'une solide politique d'intégration en ce qui con-cerne la mobilité du travail. Les citoyens des Etats-membres de l'UE ont le droit de résider et d'être employés dans tout autre Etat membre. Un des principaux obstacles auxquels cette forme d'inté-gration a dû faire face était la diver-gence de qualifications. Pour répondre à ce défi, il a été décidé que les Etats membres reconnaîtraient mutuellement les qualifications de chacun plutôt que de tenter d'unifier les critères de l'édu-cation. Il est important de comprendre la différence entre le cas de la région arabe et celui de l'UE. Alors que la première ne dispose pas d'une vision claire, ni de la détermination à l'atteindre, la seconde a établi des règles précises et a délégué l'autorité de leur mise en place à des institutions supranationales afin d'en garantir leur accomplissement en temps opportun.

Progresser

La région arabe dispose de nombre d'avantages de valeur importante. Les pays de la région ont un fort héritage historique, culturel et religieux com-mun, en plus d'être unis par une langue commune, avantage indisponible pour les Etats membres de l'UE. De plus, la région dispose d'une importante variété et d'une grande richesse de ressources naturelles. Une population qui dépasse

-86-

les 270 millions en 2003 représente un très important marché et une main-d'œuvre diversifiée. L'emplacement de la région au coeur du monde est égale-ment un grand actif. La région semble toutefois paralysée par plusieurs fac-teurs et notamment un manque d'en-gagement pour l'intégration de la part des Etats.

La discussion autour des différents aspects de l'intégration et de l'expérien-ce européenne a indiqué un ensemble d'actions communes nécessaires pour atteindre une plus forte intégration. En premier lieu, les pays de la région doi-vent établir une vision claire de ce qu'ils veulent vraiment réaliser. Les pays doi-vent également coordonner leurs efforts dans des domaines différents pour for-mer une région homogène plutôt que dispersée et parfois même marquée par la contradiction. La mesure la plus importante qui réclame vraiment une action immédiate est la formation des institutions supranationales capables de contrôler et surveiller les progrès faits dans les différents pays vers l'intégra-tion. Sans ces institutions, les pays arabes ne seront pas capables de coor-donner sérieusement leurs efforts et de garantir la mise en œuvre des objectifs consentis. Le préalable à la formation de telles institutions est la volonté des autorités politiques à être évaluées par des institutions régionales.

3. Les migrations en Méditerranée : la voie d’une intégration plus pro-fonde

La migration dans le bassin méditerra-néen est un phénomène ancien, avec des implications historiques et sociopo-litiques profondes. Récemment, cette

question est devenue un sujet beaucoup plus complexe et débattu.

L’influence des migrations sur le déve-loppement global est considérable : con-sidérable pour l’UE, parce qu’il s’agit de combler les manques sur le marché de l’emploi et d’augmenter la taille de la main-d’oeuvre et le nombre d’actifs ; positif pour les pays en développe-ment parce qu’elles relâchent la pression que connaissent les marchés d’emploi domestiques, parce qu’elles entraînent un afflux de devises étrangères, en général supérieur à l’aide officielle, et parce qu’elles augmentent les compé-tences.

Avec un chômage toujours élevé au sein des Partenaires de Méditerranée, les migrations constituent une oppor-tunité pour absorber l’excès de main-d’oeuvre. Néanmoins, les questions de cohésion sociale et de migration illé-gale en Europe empêchent d’accepter la migration comme une compensation de la croissance lente de la main-d’œuvre.

Les contrastes démographiques des tendances des marchés du travail dans le bassin méditerranéen

La situation démographique en Méditerranée varie considérablement. La population dans l’UE vieillit. Les nais-sances (7,3 millions par an) ne com-pensent plus les décès (8,1 millions par an) (Femise, 2003). De plus, le taux de croissance démographique moyen pour l’UE s’établit à 0,3% dans la période de 1990-2003, contre 2,4% pour les pays du sud, et les projections montrent qu’ils baisseront respectivement à 0% et 1,7% dans la période 2003-2015 (Banque Mondiale, 2005).

-87-

Les pays du nord ont une population relativement plus âgée alors que celle des rives sud est jeune. Les moins de 15 ans y représentent de 35 à 40% de la population (Femise, 2003). La pro-portion de la population en âge de tra-vailler va donc croître plus rapidement que la population totale. L’offre d’em-ploi va augmenter, ainsi que le poten-tiel migratoire. En conséquence, trouver un emploi à l’extérieur de l’économie domestique est devenu une caractéristi-que structurelle de beaucoup de pays de la région sud.

De plus, la population de la Méditerranée du Sud et les entrées sur le marché du travail continueront à croître au moins jusqu’à 2015, la structure de population étant caractérisée par la prédominance des jeunes (FEMISE, 2003). Ainsi, le taux de chômage moyen pour l’UE est 6,7% (OIT, 2004a), tandis qu’il atteint environ 16.0% pour les pays du sud (Banque mondiale, 2005).

Parallèlement, les pays de l’Union Européenne, confrontés au vieillisse-ment de leur population, sont réticents à reconnaître la nécessité de program-mes de gestion de l’immigration légale pour répondre aux besoins futurs de leur

marché du travail.

L’ampleur des migrations : la moitié des migrants des Pays du sud choi-sissent l’Europe

Les pays du sud de la Méditerranée constituent aujourd’hui une zone majeu-re d’émigration, caractérisée par deux flux principaux : l’un vers les pays de Conseil de Coopération du Golfe (CCG), et l’autre vers les pays européens. Avec un nombre de primo-émigrants allant de 10 et à 15 millions, suivant que le calcul s’effectue par destination ou par pays d’origine, les primo-émigrants des pays du sud représentent environ 4,8% de leur population agrégée, qui s’élève à 260 millions en 2005 (Fargue, 2005).

Le flux de migration vers les pays du Conseil de Coopération du Golfe

Ce flux se dirige vers les pays riches pro-ducteurs de pétrole : Bahrayn, le Koweït, le Sultanat d’Oman, le Qatar, l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis. Ces pays ont maintenant une popula-tion active étrangère importante. Cette immigration est liée au développement de la ressource pétrolière depuis 1972, date à laquelle environ 800 000 ouvriers

Tableau X19 : Pourcentage de ressortissants et expatriés dans la main-d’oeuvre de pays GCC, 1995-2001 (000 Personnes)

Sources : * Maurice Girgis, Les nationaux et les ouvriers migrants dans le GCC : Faire face au change-ment, 2000** GCC, STATISTICAL BULLETIN, volume 12, 2003; Http : // www.gcc-sg.org/gccstatvo112/genstat/g4. htm*** Annuaire d’OIT de Statistique du Travail 2002

1995 * 2002**

UAE 955,1 11,6 88,4 2 269,0 10,2 89,8Bahrain 226,5 40,0 60,0 308,3 40,1 59,0

KSA 6 450,0 36,5 63,5 6089,8*** 49,7 50,3Oman 670,3 35,8 64,2 731,5 21,7 78,2Qatar 218,0 17,9 82,1 322,9 14,2 85,7Kuwait 1 051,5 16,6 83,4 1 320,2 19,6 80,4Total 9 571,4 26,4 73,6 11 041,7 26,0 74

Total ('000s) % Nationaux % Non nationaux

% Nationaux % Non nationaux

Total (000s)

-88-

√ L’augmentation du coût de la main d’œuvre étrangère par des mesures fiscales.

√ La mise en œuvre de mesures obliga-toires, y compris des quotas de res-sortissants employés par des sociétés privées, pour certaines professions ou secteurs spécifiques.

√ Une tentative d’égaliser l’attractivité de l’emploi public et privé, en alignant les régimes de retraite et les presta-tions sociales de tous les nationaux, quel que soit le secteur dans lequel ils sont employés.

√ Une tentative de réduction des écarts de salaire et de productivité entre les secteurs public et privé.

Grâce à l’augmentation des prix de pétrole et à la croissance des revenus générée, qui devrait excéder celle des années 1970 et 1980, la balance budgé-taire et la balance courante s’améliorent considérablement, créant une deman-de intérieure forte. L’excédent courant régional devrait atteindre 23,5% de PIB en 2006 (le FMI, 2005)

Ce bonus financier est une occasion pour les pays du CCG d’accélérer la mise en œuvre de réformes qui produiraient l’emploi, pour répondre à la croissance de la population active nationale et à la croissance de la demande de main d’œu-vre étrangère.

Le flux vers l’Europe

Entre 5,0 et 6,4 millions de primo-émi-grants Med-MENA résident en Europe (migrants clandestins non inclus). Ce chiffre n’inclut pas les émigrés « de la

migrants vivaient dans le CCG. Avec l’augmentation du prix de pétrole depuis 1972, la région entière est rapidement devenue dépendante de la population active étrangère : dès 1975, la popu-lation étrangère dans les Etats du CCG était évaluée à 3.8 millions de person-nes, soit 40% de population totale.

Aujourd’hui, les travailleurs étrangers représentent presque les trois quarts de la main-d’œuvre (Fasano et, Rishi, 2004). Il y a cependant de grandes différences en termes distribution par pays du CCG : tandis qu’ils représentent presque 90% dans la main-d’oeuvre des EAU, les travailleurs étrangers représen-tent 50% de la main d’œuvre en Arabie Saoudite (tableau X19).

Du milieu des années 1980 au milieu des années 1990, le CCG a vu le rempla-cement des travailleurs arabes par des travailleurs asiatiques : la part des ara-bes dans la force de travail étrangère est passée de 75% à 28% en 2000, au béné-fice des travailleurs asiatiques (Girgis, 2002). Une des explications de cette baisse est la tendance à la nationalisa-tion des marchés du travail. Confrontés à l’augmentation du chômage de leurs nationaux, les gouvernements du CCG ont pris des mesures qui ont conduit à l’adoption de règlements limitant la part de la main d’œuvre étrangère, en faveur de la main-d’oeuvre nationale, comme :

√ Une condition de nationalité pour certaines professions, réservées aux nationaux.

√ Des subventions aux entreprises pour encourager le recrutement de natio-naux et accroître leur part dans les effectifs employés.

seconde génération ». En général, on estime qu’il y a environ 10,6 millions d’émigrés, première et deuxième géné-rations confondues (Fargue, 2005)

Les statistiques agrégées fournies par les Etats membres d’UE comptabili-sent 5.8 millions de migrants d’origine Med-MENA. Deux pays traditionnels de destination, l’Allemagne et la France, accueillent presque les trois-quarts de cette population, le reste étant distribué entre les vingt-trois autres Etats mem-bres de l’UE (Figure 15). Parmi les trois

-89-

pays suivants dans le classement - Pays-Bas, Espagne et Italie -, les deux derniers constituent un nouveau pôle d’attraction pour les migrants de la Méditerranée du sud. Les principaux pays d’origine sont : les Territoires Palestiniens, la Turquie, le Maroc et l’Egypte.

La figure 16 indique l’existence de tra-jets migratoires spécifiques selon les différents pays d’origine. Les migrants du Maghreb et de la Turquie sont princi-palement attirés par l’Europe, tandis que ceux de pays arabes de la Méditerranée

Figure 15 : Migrants MENA par pays de résidence

Sources : Fargue, 2005, basé sur les calculs de :Algérie : Recensement de la population, 1998; Arménie : recensement de la population, 2001; Australie : Recensement de la population, 2001; l’Autriche : Recensement de la population, 2001; Belgique : Bureau des étrangers, 2005; Canada : 2001, Statistiques du Canada; Chypre : Recensement de Population, 2002; République Tchèque : Ministère de l’Intérieur, 2002; Danemark : Statistiques du Danemark, 2003; Estonie : recensement de la population, 2000; Finlande : Statistique de La Finlande, 2003; France : Recensement de la population, INSEE, 1999; Allemagne : Registre Central sur les Étrangers, 2002; Grèce : Recensement de la Population, 2001; Hongrie : Recensement de la Population, 2001; Islande : Statistiques de l’Islande, 2003; Iran : Centre Statistique de l’Iran, 2003; Irlande : nd; Israël :Bureau Central de Statistique, mi-2003; Italie : Permis de séjour 31.08.2004; Japon : Bureau de Statistique du Japon, 2000; la Jordanie : Recensement de la Population et du Logement, 1994; Lettonie : Recensement de la Population et du Logement, 2000; Lituanie : Recensement de la Population et du Logement 2001; Luxembourg : RP2001; Malte : nd; Maroc : Direction Gén. De la Sûreté Générale, 2002; Pays-Bas : statistique des Pays-Bas, 2004; Nouvelle-Zélande : Recensement de la Population, 2001; Norvège : Statistique la Norvège, 2005; Territoires Palestiniens : Israël, le Bureau Central de Statistique, fin 2004; Pologne : nd; Portugal : 2003; Roumanie : Recensement de la Population, 2002; Slovaquie : nd; Slovénie : Recensement de la Population, 2000; Afrique du Sud : Statistique l’Afrique du Sud, 2003; Espagne : Permis de séjour 31.12.2003; Suède : Statistique la Suède, 2003; Suisse : Bureau fédéral de l’Immigration, 2003; la Tunisie : Recensement de la Population 2004; Turquie : Recensement de la Population 2000; Royaume-Uni : Recensement 2001; Etats-Unis : Bureau de Recensement américain, Recensement 2000.

-90-

orientale sont attirés par les pays du CCG et d’autres régions du monde.

Les rapatriements de revenus des tra-vailleurs jouent un rôle central dans la stabilité monétaire de beaucoup de pays en voie de développement et sont cru-ciaux pour la survie des ménages pau-vres. Pendant ces deux dernières décen-

nies, voire davantage, les rapatriements des revenus des migrants d’Afrique du Nord ont constitué la part de PIB la plus élevée par rapport aux autres régions dans le monde : en 2002, ils représen-taient 3,1% de PIB, contre 1,6% pour l’Amérique Latine et 0,6% pour l’Afrique sub-Saharienne (la plus basse dans le monde) (Gallina, 2004).

Figure 16 : Répartition des migrants en provenance de 7 PM par région de destina-tion Selon les données des pays d’origine

L’Israël, la Jordanie et la Syrie ne fournissent pas de statistiques de leurs ressortissants à l’étranger par le pays de résidence et ne sont pas inclus dans le graphique.

Source : Fargue, 2005, basé sur les calculs de :1/Conseil Économique national et Social (1997), Commission Communauté de la Algérienne à l’Étranger «Situation de la Communauté Algérienne à l’étranger «, étude préliminaire2/CAPMAS (2001)3/Choghig Kasparian, L’entrée des jeunes libanais dans la vie active et l’émigration depuis 1975, Université Saint Joseph de Beyrouth, 20034/Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération, Maroc, 20045/Bureau Central palestinien de la Statistique, Résumé Statistique de la Palestine, No4. Ramallah, 20036/Ministère des Affaires Etrangères, Tunis, 20057/Direction Générale des Services pour les Ouvriers À l’étranger, Attaché au Ministère du Travail et à la Sécurité sociale (2002).

Tableau X20 : Les rapatriements des revenus des migrants (milliard $)

1996 2000 2004* % PIB % ExportsEgypte 3,1 2,9 3,0 4,0 39,0Jordanie 1,7 1,8 2,2 19,7 56,4Maroc 2,2 2,2 3,6 7,2 37,1Turquie 3,5 4,6 0,7 0,2 1,1

2004**

Source : Finances du Développement Global 2005 : Mobilisation des Finances et Gestion de la Vulnérabilité** Calculs du Rapport sur le Développement Mondial 2006 et des Finances du Développement Global 2005

-91--91-

Depuis la Déclaration de Barcelone et le lancement du Partenariat, les flux de revenus rapatriés sont devenus une source importante de revenu des PM (Tableau X20), puisqu’ils représentent plus de 35% de la valeur des exporta-tions du Maroc et de l’Egypte, et plus de 50% de la valeur des exportations de la Jordanie.

Il apparaît que les montants des rapatrie-ments sont plus importants que ceux des aides à destination de la région. Ainsi, l’aide de développement de l’UE - confor-mément au programme MEDA lancé avec le Processus de Barcelone - dans 8 des 12 pays de la Méditerranée s’élève à moins de 1 milliard d’USD par an, auquel s’ajou-te un milliard supplémentaire, provenant des prêts de la Banque Européenne d’In-vestissements. Cette aide, qui représente environ 9 USD per capita, est supposée stimuler la modernisation des économies de la Méditerranée du Sud et les encoura-ger à rivaliser avant 2010 avec leurs par-tenaires européens, au sein d’un marché complètement libre. Les rapatriements ne sont pas seulement plus importants et plus stables, ils contribuent également directement au bien-être de ménages à bas revenus, tant dans les zones rurales que dans les zones urbaines (Gallina, 2004).

Le défi de l’intégration : le cas des migrations turques vers l’UE

Un des principaux débats provoqués par l’ouverture des négociations rela-tives à l’adhésion de la Turquie à l’UE, est son effet sur les migrations de main-d’oeuvre. La question est rendue complexe par l’affrontement du point de vue des opposants, pour que cela pourrait ouvrir la porte à une migration incontrôlée en provenance d’un pays de 72 millions de personnes et celui des partisans, qui voit là un réservoir de main-d’oeuvre jeune pouvant compen-ser les effets du rapide vieillissement de la population européenne, ce qui va rendre longues les négociations avec l’UE.

Le nombre officiel des migrants turcs dans l’UE est difficile à évaluer, mais l’on peut estimer approximativement à 4 millions de migrants et de réfugiés. 93% d’entre eux sont concentrés dans quatre pays de l’UE : l’Allemagne, qui accueille à elle seule 70% des migrants turcs, les Pays-Bas (9%), la France (8,7%) et l’Autriche (4,4%). Plus de la moitié de ces migrants sont inclus dans la main-d’oeuvre de ces pays, contri-buant à 0,7% de leur produit intérieur brut.

Tableau X21 : Taux de Participation* dans certains pays de l’OCDE choisis, moyen-nes 2002-2003

Autriche Belgique Suisse Allemagne Danemark France Pays-Bas Suède Roy.-Uni

Taux global 71,7 64,2 81,2 71,8 79,7 69,2 76,4 78,0 75,3

Dont Étrangers 74,1 57,0 80,2 65,0 64,2 62,5 61,3 66,0 67,0

Dont Turc 64,7 39,8 74,9 58,9 46,9 55,8 57,6 47,4 51,3

Femmes 41,6 22,3 61,7 40,4 - 30,4 45,1 - 24,8

Hommes 83,5 60,5 83,4 74,8 51,6 78,6 69,7 70,8 76,9

Note : le signe «-” indique que l’estimation n’est pas statistiquement significative.*Le taux de participation est défini comme le rapport de la population active âgée de 15 à 64 ans sur la population en âge de travailler.Source : calculs de l’OCDE basés sur l’enquête sur la force de travail de la Commission européenne, 2005

-92-

En plus de leur forte proportion en Europe, les turcs constituent un pouvoir économique qui est encore sous-estimé aux niveaux nationaux et internatio-naux. Selon un centre de recherches turc, la somme des investissements turcs dans l’UE a augmenté de plus de 50% ces 7 dernières années, avec un nombre croissant d’entrepreneurs turcs (plus de 6% de main-d’oeuvre turque sont des entrepreneurs).

Le nombre de migrants turcs en Allemagne est en hausse. L’OCDE estime les ressor-tissants turcs à environ 1,9 millions (dont 46% de femmes). Plus de 832 000 turcs y travaillent (70% de la main-d’oeuvre émigrée turque est en Allemagne) et ils contribuent à 2% du produit intérieur brut allemand. Toutefois, les résidants turcs font toujours face à des difficultés d’intégration dans la société allemande. Du fait de l’ancienne politique considé-rant les Turcs comme « des invités », ils ont été isolés (en particulier les fem-mes qui appartiennent au groupe le plus désavantagé). La plupart d’entre eux ne disposent pas de passeports allemands et certains ne parlent même pas la lan-gue. Cette politique peu intégratrice a contribué à la formation et au développe-ment de groupes fondamentalistes dans la communauté turque.

Une nouvelle loi d’immigration a été présentée en janvier 2005, qui rationa-lise les procédures d’immigration, amé-liore l’intégration des immigrés et facilite l’entrée des travailleurs qualifiés dans certains secteurs. Bien que cette loi soit considérée comme un premier pas pour intégrer les turcs dans la société alle-mande, elle ne supprime pas le statut temporaire de milliers de réfugiés et ne traite pas entièrement des questions de naturalisation et d’intégration. Certains suggèrent qu’il est nécessaire d’abord d’intégrer les résidants existants dans la société avant d’admettre de nouveaux migrants, afin d’éviter le risque de créer des sociétés parallèles.

Au sein de l’UE et particulièrement en Allemagne, les principales craintes sont qu’en formalisant la migration, il y ait un risque d’augmenter le problème déjà existant de chômage de certains pays européens et que le type des compéten-ces des migrants ne corresponde pas aux besoins de main-d’oeuvre. On observe ainsi de forts taux de chômage (au-dessus des moyennes nationales) parmi les migrants turcs dans certains pays européens, en particulier en France et en Belgique. D’un autre côté, certains pays européens comme l’Irlande, l’Espagne et le Royaume-Uni admettent un nombre

Autriche Belgique Suisse Allemagne Danemark France Pays-Bas Suède Roy.-Uni

Taux global 4,8 7,3 3,6 9,2 4,9 8,9 3,1 5,3 5,0

Dont Étrangers 9,0 17,5 7,3 15,1 12,9 18,5 7,4 12,4 8,0

Dont turcs 13,7 34,2 12,6 19,1 - 25,4 - - -

Femmes 13,0 48,1 14,9 17,9 - 38,4 - - -

Hommes 13,9 28,3 11,6 19,7 - 20,8 - - -

Tableau X22 : Taux de Chômage dans certains pays de l’OCDE, moyennes 2002-2003

Note : le signe «-” indique que l’estimation n’est pas statistiquement significative. * Le taux de chômage est défini comme le rapport de la population active âgée de 15 à 64 ans qui est au chômage sur la population active.Source : calculs de l’OCDE basés sur l’enquête sur la force de travail de la Commission européenne, 2005

-93-

croissant de main-d’oeuvre immigrée parce que les migrants apportent des compétences qui font défaut localement et remplissent un grand nombre d’em-plois dans l’agriculture, la santé et des services que les locaux ne veulent ou ne peuvent occuper.

Selon certains points de vue, un ralen-tissement (ou une suspension) dans le processus d’accession de la Turquie pourrait avoir un impact négatif substan-tiel sur les questions de migration. Sur le plan économique, ralentir le proces-sus entraînerait une croissance basse et l’augmentation du chômage en Turquie. Cela pourrait aussi ralentir ou suspendre les réformes politiques et économiques entreprises en Turquie. Cela accroîtrait également le sentiment général d’insé-curité et, en conséquence, le nombre des migrants potentiels (légal ou illégal).

Sous les régimes stricts actuels, la migration nette de Turquie vers l’UE représente un minimum de 35 000 per-sonnes par an. Il faut s’attendre à ce que cette tendance s’accélère dans l’avenir si aucun règlement formalisant la migra-tion n’est mis en place.

Dans une étude évaluant l’émigration éventuelle de la Turquie vers l’UE dans le cas où la Turquie devient un Etat-membre, des scénarios ont été élaborés pour la période 2004 à 2030, fondés sur les expériences de divers groupes. Ces scénarios ont évalué une migration nette de la Turquie vers l’UE15 d’ici 2030 com-prise entre 0,5 et 4,4 millions de person-nes, en supposant la libre circulation du travail d’ici à 10 ans dès ce moment-là (chiffres inférieurs aux estimations obte-nues dans le cas où l’adhésion dans l’UE seraient suspendue).

L’ouverture de la Turquie et son accession possible à l’UE représente un grand défi. Il est cependant probable que le dévelop-pement et l’intégration croissante de la Turquie dans l’économie mondiale dimi-nueront le rôle des migrations. Ces der-nières années, le gouvernement turc a de plus entamé les premiers pas sérieux vers la formulation et la mise en place d’une nécessaire politique européenne de migration. Il est néanmoins clair que plus vite le débat commence, plus des anticipations politiques et économiques sur la croissance de l’économie turque renforceront cette tendance. De fait, l’enjeu concerne certainement davantage les façons d’intégrer les immigrants turcs déjà présents, plutôt que de se con-centrer sur les nouveaux migrants vers l’UE. Il est même probable que certains migrants turcs choisissent de retourner dans leur pays d’origine après l’intégra-tion, suivant les exemples observés pour la Grèce, l’Espagne et le Portugal).

Pour une approche plus équitable des migrations euro-méditerranéennes : défis et opportunités

Au Sommet de Barcelone de novembre 2005, la déclaration du président du Sommet a appelé « à la création d’un espace de coopération mutuelle sur la migration, l’intégration sociale, la jus-tice et la sécurité, et au renforcement d’une gestion globale des flux migratoi-res légaux, pour le bénéfice des peuples des deux rives de la Méditerranée ». Il apparaît néanmoins que les négocia-tions en la matière se sont principale-ment concentrées sur les préoccupations européennes.

Au cours des négociations, les chefs d’Etats de l’UE ont mis un accent con-

-94-

sidérable sur les questions concernant la lutte contre les migrations illégales, la régulation des flux migratoires et la cohésion sociale. La déclaration finale du Sommet fait écho à ses préoccupa-tions, en précisant que les partenaires euro-méditerranéens développeront des mécanismes de coopération, afin de lutter contre les migrations illé-gales, notamment par les accords de réadmission, la lutte contre le trafic humain, et le développement de la capacité à contrôler les frontières.

Le Programme de Travail en cinq ans du Sommet de Barcelone tente de dessiner les principes directeurs d’une politique de migration. Il affirme que « la Migration, l’Intégration Sociale, la Justice et la Sécurité sont les ques-tions d’intérêt commun dans le par-tenariat et devraient être traitées par une approche globale et intégrée » et que le partenariat Euro-méditerranéen augmentera la coopération dans ces domaines pour :

√ Promouvoir des opportunités de migration légale, et faciliter la migration légale des individus, car ceux-ci constituent une chance pour la croissance économique et un moyen de renforcer les liens entre les pays, instaurer un traitement juste et une politique d’intégration pour les migrants légaux, facili-ter les rapatriement de revenus et prendre en considération « la fuite des cerveaux »;

√ Réduire significativement le niveau de migration illégale, le trafic d’in-dividus et le nombre de morts dus aux traversées périlleuses de la mer et des frontières;

√ Continuer à moderniser et accroî-tre l’efficacité de l’administration de la justice et faciliter l’accès des citoyens à la justice ;

√ Renforcer la coopération judiciaire, y compris sur les questions des frontières internationales.

Pour parvenir à une politique de migra-tion juste, certains défis doivent être relevés. La nouvelle politique doit répon-dre aux préoccupations de l’UE concer-nant la lutte contre les migrations illéga-les (sur la base d’accords bilatéraux et de la Politique de Voisinage européen-ne), la cohésion sociale et l’intégration des émigrants de deuxième génération. Elle devra aussi prendre en considération les opportunités que représente pour les PM le gap démographique avec l’UE, et le mode 4 de prestation de services du GATS.

√ Les migrations « clandestines » au sein de la région méditerranéenne ont considérablement augmenté au cours de la dernière décennie, malgré le renfor-cement des règlements européens et des règles internationales. Par ailleurs, un autre nouveau phénomène apparaît dans la région : la migration de transit. La plupart des pays du Maghreb se sont métamorphosés en pays de transit pour des migrants d’Afrique Sub-Saharienne et du Moyen-Orient, qui se dirigent vers les pays européens. D’après les estimations, environ 100 000 à 120 000 migrants traversent la Méditerranée chaque année. Parmi ces migrants, envi-ron 35 000 sont d’origine sub-saha-rienne (Baldwin, 2005). En 2003, 9 800 migrants illégaux ont été arrêtés sur le sol marocain, 6600 d’entre eux prove-naient d’Afrique Sub-saharienne.

-95-

L’UE a l’intention d’utiliser la politique de Voisinage et les Instruments du Partenariat pour intensifier sa coopéra-tion sur la gestion des migrations avec les pays tiers de la Méditerranée. Cette coopération sera spécifique selon les pays, ou, conformément au langage de la politique européenne de voisinage, « différenciée ».

√ Les politiques globales d’inté-gration des migrants sont aujourd’hui cruciales. La politique de migration a été principalement défensive et cen-trée sur le contrôle, au lieu d’être pro-active. De la même façon, la politique d’intégration des migrants a été réac-tive. Dans de nombreux cas, la politi-que d’intégration a d’ailleurs contribué à accroître les perceptions négatives à l’égard des migrants, ce qui a conduit à des politiques d’immigration encore plus défensives.

Dans ce contexte, de nombreux acteurs non-gouvernementaux peuvent forte-ment influencer le processus d’intégration des migrants. Ces acteurs institutionnels essentiels incluent les églises, les syn-dicats, les organisations d’employeurs, les parties politiques, les médias et les autres acteurs de la société civile. Les politiques gouvernementales visant à l’intégration devraient impliquer acti-vement les immigrés, mais aussi les acteurs importants de la société civi-le. Ces partenaires non-gouvernemen-taux sont importants pour deux raisons. D’une part, ils constituent des partenai-res directs dans la mise en oeuvre de ces politiques. D’autre part, et surtout, ils sont des acteurs politiques. Ils peuvent influencer le climat politique et les résul-tats des politiques, en tant qu’agents importants dans la lutte contre l’exclu-

sion, la discrimination et la xénophobie (Penninx, 2004).

√ Sur un autre front, comme cela a été mis en évidence auparavant par le FEMISE, les PM peuvent profiter de l’opportunité offerte par les structures démographiques contrastées des pays européens comparés aux PM. En effet, alors que l’Europe vieillit rapidement, les PM bénéficient d’une structure démogra-phique où la part des jeunes est prépon-dérante. Si les taux de participation de main-d’oeuvre restent constants dans l’UE, une part toujours plus importante de la population sera inactive suite au vieillissement, ce qui affectera négative-ment la croissance économique à long terme.

Pour déterminer les besoins potentiels d’immigration des pays de l’UE, l’OIT a réalisée une analyse combinée, démo-graphique et économique, afin d’évaluer l’impact du vieillissement sur la réduc-tion du niveau de vie (mesuré par le PIB per capita).

Pour le but de l’exercice, le PIB par per-sonne et le niveau de consommation moyen par personne est supposé aug-menter, en termes réels, d’environ 3% par an. L’analyse, utilisant un modèle de simulation, prévoit un manque subs-tantiel de force de travail d’environ 38 millions de travailleurs avant 2050, sur la base d’une hausse de la productivité du travail de 2.5%. Si la productivité augmente seulement de 2% par an, le manque s’accroît à 88 millions de tra-vailleurs. L’effet sur « l’écart entre le niveau de vie ciblé et celui qui est pos-sible » serait alors substantiel. Par per-sonne, le PIB serait seulement à 78% du niveau attendu en 2050 (l’OIT, 2004b).

-96-

√ Une autre opportunité qui doit être exploitée par les PM est la pres-tation de services par les personnes physiques sous le Mode 4 du GATS. Cependant, même avec ces standards modestes de libéralisation de services, très peu de mesures ont été prises pour libéraliser les déplacements temporaires des prestataires de services, et la plu-part des pays ont seulement souscrits à des engagements limités sur le Mode 4. L’UE a tendance à restreindre le mode 4 aux seuls travailleurs fortement qua-lifiés, et à planifier la gestion de l’immi-gration Mode 4 sur la base d’évaluation des besoins économiques ou de quotas, pour éviter des chocs sur le marché du travail.

À court terme, les PM doivent analyser de manière plus approfondie les plei-nes implications du Mode 4 du GATS, et identifier les stratégies pour en tirer pro-fit, en orientant la négociation vers l’ap-profondissement de libéralisation dans ce secteur, afin d’ouvrir une voie d’accès au marché du travail européen.

Dans ce contexte, la nouvelle politique de migration doit être conçue pour pro-mouvoir et encourager des flux non-permanents régulés. Cette forme de migration est dynamique, plus équitable et assure des flux migratoires conti-nus. Cette migration non-permanente pourra répondre aux exigences du mar-ché du travail des pays européens, sans entraîner des problèmes sociaux. La migration provisoire peut également être mise en œuvre comme un outil per-mettant d’augmenter les compétences des migrants, grâce à l’expérience pro-fessionnelle qu’ils acquièrent à l’étran-ger. La migration pourrait ainsi consti-tuer une facette d’une stratégie visant à

accroître le capital humain dans les pays d’origine; autrement dit, une telle politi-que permettrait de passer d’une situation « d’exode des cerveaux » à une situation « d’enrichissement des cerveaux » (du « brain drain » au « brain gain »).

Conclusion :

Les migrations internationales des indi-vidus sont un phénomène substantiel et répandu, qui a concerné plus de 10 millions de personnes par an au cours de la dernière décennie, aussi bien qu’un nombre croissant de pays (OIT, 2004c). Cependant, le cadre institutionnel actuel souffre de l’absence d’une structure mul-tilatérale pour traiter de ce phénomène.

Du point de vue de la Commission Mondiale sur la Dimension Sociale de la Globalisation, le manque d’une struc-ture multilatérale sur la migration est une illustration claire du déséquilibre des règles du jeu actuelles. Les règles instaurées pour l’économie globale ont protégé et renforcé considérablement les droits pour les investissement étran-gers, mais les droits des travailleurs migrants ont fait l’objet de beaucoup moins d’attention. Un cadre multilatéral pour les migrations internationales des individus, qui permettrait de les réguler et d’éliminer l’exploitation des migrants, pourrait représenter un gain considéra-ble pour tous.

En raison de la prolongation des négo-ciations concernant les services au sein l’OMC (Doha, Cancun, Hong-Kong), les disposition du GATS «Mode 4» restent faibles, très limitées et restreintes au mouvement provisoire des prestatai-res de services. Elles ne concernent donc qu’une infime partie de l’ensemble

-97-

des migrations internationales des tra-vailleurs.

Beaucoup pourrait être fait pour amélio-rer significativement la situation actuelle. La question de développer une structure multilatérale pour réguler les migrations internationales devrait à présent être inscrite à l’agenda international. Les objectifs d’une telle structure devraient être (l’OIT, 2004c) :

√ faciliter, dans une optique de béné-fices mutuels, l’accroissement des opportunités d’immigration, et assu-rer que le processus soit juste pour les pays d’origine et les pays d’ac-cueil ;

√ faire des phénomènes migratoires un processus régulé, prévisible et légal ;

√ éliminer le trafic d’êtres humains, et les abus auxquels les femmes sont particulièrement vulnérables ;

√ assurer la pleine protection des droits des travailleurs migrants et faciliter leur intégration locale ;

√ maximiser les bénéfices des migra-tions internationales en termes de développement.

-98-

-99-

Notes

[1] : l’informalité se réfère aux entre-rpises qui ne respectent pas les procédures légales pour la créa-tion et l’exploitation de la socié-té, notamment enregistrement, licence, sécurité sociale, fiscalité, etc...Données établies à partir de Egyptian Labour Market survey (ELMS), 1998.

[2] : Source : Egyptian Labour Market survey (ELMS), 1998.

[3] : La formarlité se définit par trois grandes caractéristiques : (i) être enregistré ; (ii) posséder une licence et (iii) tenir une compta-bilité récurrente.

[4] : L’indice se calcul comme suit :

où fai = valeur du facteur i à la date de l’enquête et fbi =valeur du facteur i un an plus tôt.

[5] : Cet indice a été calculé à par-tir des des valeurs pour cha-cune des ces variables avec : la valeur (1) donnée à chaque variable attendue croissante, (0) pour les variables qui devraient être stables et (-1) pour celles qui devraient décroître. Le score pour chaque entreprise est standardisé pour appartenir à l’intervalle[-100%;100%].

[6] : Il faut remarque que l’Egypte a connu une récession en 2003 et 2004, qui a effectivement affecté la perception des d’entreprises.

[7] : Etude FEM22-22, conduite par le CEFI.

[8] : Une entreprise est ici considérée comme tournée vers l’export si au moins 10% de son chiffre d’affaires est destiné au marché extérieur.

[9] : Analyse à partir des données col-lectées à l’occasion des enquêtes annuelles faites auprès des entre-prises publiques et privées de plus de 10 travailleurs par l’insti-tut national de la statistique turc (niveau des secteurs à quatre chiffres de la classification inter-nationale des types d’industries).

[10] : Cf. FEM22-22, Cefi op. cit.. Les firmes entrées ou sorties sur la période sont oblitérées.

[11] : Soit Imports / (imports + produc-tion ou chiffre d’affaires).

[12] : Etude FEM22-20, dirigée par le ROSES.

[13] : Cf. Marc Lautier, Care et Cepii, étude FEM22-34, dirigée par le Cepii. Cette section utilise dans certaines parties une contribution résumée de l’étude Femise rédi-gée par Marc Lautier.

[14] : FEM22-22, Cefi, op. cit.[15] : Elasticité de la croissance de l’em-

ploi à la valeur-ajoutée industriel-le réelle. Ainsi, pour le Maroc, une hausse de 1 point de la valeur-ajoutée industrielle a créé 1,13 emplois entre 1995 et 2001.

[16] : FEM22-34, Cepii, op. cit.[17] : FEM2222, Cefi, op. cit.[18] : Commission of the European

Communities. European Commission (2003). Economic and Competitiveness analy-sis of the European Textile and Clothing Sector in support of the Communication: the Future of theTextiles and Clothing sector in an enlarged Europe. Commission Staff Working Paper, SEC (2003) 1345, Brussels, Belgium.: 3-4.

[19] : 99 parmi les 500 premières entre-prises industrielles en Turquie, 16 parmi les 50 premières tous secteurs confondus au Maroc, 7 parmi les 100 premières en Tunisie. Parmi les 330 plus gran-des entreprises du secteur au niveau mondial, 13 sont turques, 1 est israélienne, 2 égyptiennes et 1 syrienne.

[20] : Chiffres Association Marocaine des Industries du Textile Habillement (AMITH).

[21] : Nordås, H. K.. The Global Textile and Clothing Industry post the Agreement on Textiles and Clothing.Discussion Paper n. 5, World Trade Organization, Geneva, Switzerland, 2004: 16.

[22] : Les chiffres concernant la Tunisie sont beaucoup plus difficiles à trouver et le plus souvent non publiés.

∑=

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛×−=

4

1

10041

1i bi

biai

fff

Index

-100-

[23] : Chiffres du Haut Commissariat au Plan, notes de conjoncture.

[24] : Ce qui représente 1690 firmes dont 997 enregistrent une par-ticipation étrangère et 632 sont détenues en totalité par des étrangers.

[25] : Cela explique l’avantage des NPI qui ont réussi à remonter la filiè-re. Ces pays ont en effet percé sur le marché mondial de l’ha-billement en s’appuyant sur le différentiel de salaire. Le succès de leurs exportations d’habille-ment qui utilisaient des tissus importés a élargi les débouchés de l’industrie textile locale. Cette dernière a réussi à fabriquer des tissus répondant aux exigences des confectionneurs locaux et, après s’être substitués aux impor-tations, ses tissus ont été expor-tés. La « remontée de la filière » (Cepii, 1978), s’est prolongée jusqu’à l’industrie des fibres syn-thétiques devenue à son tour exportatrice.

[26] : Etude FEM22-06, dirigée par Federicco Cafe Center, Roskilde University

[27] : Etude FEM22-02, dirigée par Bilkent University.

[28] : Illustration complète de la métho-dologie et résultats disponibles dans l’étude FEM22-02, Bilkent Univ., op. cit.

[29] : Etude FEM22-36, dirigér par le Catt, réseau EMMA.

[30] : FEM22-36, Catt, op. cit.[31]: Estimations obtenues à partir

d’un modèle gravitaire. Le coût de transport est mesuré à partir de la compilation de trois indices de qualité des communications, du transport par train et par route.

[32] : Selon la qualité des routes, l’exis-tence de déserts séparant les PM considérés ici et le l’évolution de l’ouverture des frontières Maroc-Algérie.

[33] : FEM22-02, Bilkent Univ. op. cit.[34] : Pour l’analyse détaillée, cf. FEM22-

02, Bilkent Univ. op. cit.[35] : A partir de FEM22-36, Catt, op.

cit.[36] : Exception faite de l’Inde.

[37] : Ils reflètent en effet non seule-ment les préférences accordées et le degré d’intégration d’un pays avec un autre mais également la composition de leurs flux d’échan-ges. Prenons le cas de l’Uruguay, par exemple. Ce pays exporte principalement de la viande et ses produits dérivés. Des condi-tions préférentielles lui ont été accordées par l’UE mais aussi le Japon et les pays de l’AELE, mais l’accès au marché de ces pays ne s’améliorera pas pour l’Uruguay tant qu’ils imposeront des tarifs élevés sur ces produits.

[38] : Le tableau se lit de la manière sui-vante : globalement la Jordanie impose en moyenne des droits de 18,8% sur les produits en prove-nance d’Algérie.

[39] : La branche se définie comme l’en-semble des fractions d’entreprises fabriquant le même produit, le secteur regroupe les entreprises selon leur activité principale. Les échanges intra-branche (inter-branches) consistent à échanger des produits issus de la même branche industrielle (de branches industrielles différentes).

[40] : Les résultats seraient certaine-ment plus contrastés si les tarifs employés ici n’étaient pas issus de la base TRAINS mais de la base développée par le CEPII.

-101-

FEM22-22 : «Identification des effets sur la

croissance et l’emploi des mécanismes

d’ajustement micro-éconbomique de

l’offre face à l’ouverture», dirigée par

le CEFI, université de la Méditerranée,

coord. Patricia Augier, Michael Gasiorek,

en collaboration avec INSEA (Maroc),

Université de Sussex (Royaume-Uni) ;

septembre 2005

FEM22-34 : «Les perspectives de change-

ment sectoriel dans les pays méditer-

ranéens: quels secteurs de croissance

après l’industrie légère?», dirigée par

le CEPII, coord. Agnes Chevalier, Jean-

Raphael Chaponnière, et Marc Lautier,

en collboration avec CARE-Université

de Rouen (France), CEPN-Université

de Paris 13 (France), ESSEC Tunis

(Tunisie), Hebrew University Jerusalem

(Israel), Université de Grenade

(Espagne) ; juillet 2005

FEM22-36 : «Obstacles to South-South

Integration, to trade and to foreign

direct investment: the MENA countries

case», dirigée par CATT-Université de

Pau, réseau EMMA, coord. Jacques

Le Cacheux, en collaboration avec

Université de Grenade ; octobre 2005

FEM22-39 : «South-South Trade Monetary

and Financial Integration and the

Euro-Mediterranean Partnership:

An Empirical Investigation», dirigée

par Institute of Financial Economics,

American University of Beirut, Dir.

Simon Neaime ; juin 2005

ACHY L. (2002), « Labour market and growth in Morocco », Global Development Network.

ADAIR P. (2002), « L’économie informelle au Maghreb : une perspective compa-ratiste Algérie-Maroc», Contribution à la Première Université de Printemps des Economies Méditerranéennes et du Monde Arabe à Tanger, 25-27 avril.

Bibliographie

Liste des principales études Femise utilisées

pour la rédaction de ce rapport :

FEM22-02 : «Impact of Liberalization of Trade in

Services: Banking, Telecommunications

and Maritime Transport in Egypt,

Morocco, Tunisia and Turkey», diri-

gée par Bilkent University, Center for

International Economics, coord. Sübidey

Togan en collaboration avec Faculty of

Economics and Political Science, Cairo

University. (Egypte), INSEA (Maroc),

Université de Tunis (Tunisie) ; décembre

2005

FEM22-06 : «The Informal Economy

Employment Impacts Of Trade

Liberalisation And Increased

Competition In Export Markets: The

North African Textile, Clothing And

Footwear Sector», dirigée par Federico

Caffè Centre, Roskilde Univeristy

Denmark, Dir. Bruno Amoroso, Andrea

Gallina, en collaboration avec CREAD

(Algeria), INSEA (Morocco), University

of Sussex (United Kingdom), University

of Tunis, Tunisia ; octobre 2005

FEM22-07 : «Integration and enlargement

of the European Union, lessons for

the Arab region», Center for European

Studies, Faculty of Economics and

Political Science, Cairo University, coord.

Naglaa El Ehwany, novembre 2005

FEM22-20 : «Flexibilité du travail et con-

currence sur le marché des biens et

services : impact sur les conditions de

travail et le développement du secteur

informel en Algérie, au Maroc et en

Tunisie», dirigée par le ROSES, univer-

sité de Paris I, coord. Gérard Duchêne,

Boris Najman, en collaboration avec

CREAD (Algérie), CREQ (Maroc) et

ISTIS (Tunisie) ; novembre 2005

-102-

AGENOR P-R. et EL AYNAOUI K. (2005), « Politiques du marché du travail et chômage au Maroc : une analyse quantitative », Revue d’Economie du Développement, n°1, mars.

AIT FARAJI S. et AMOR N. (2004), « Offre de travail au Maroc : situation et ten-dance », dans ETUDES ET METHODES, Revue de la DPEG, n°1, Ministère des finances et de la privatisation.

Baldwin E. (2004): ‘Mediterranean Migrations: Regionalisms versus Globalization’, Finisterra, Universidade de Lisboa

Baldwin E. (2005), “Migration In The Middle East And Mediterranean” A Regional Study prepared for the Global Commission on International Migration, Mediterranean Migration Observatory, University Research Institute for Urban Environment and Human Resources, Panteion University

BONNAZ H., COURTOT N. et NIVAT D. (1994), « Le contenu en emplois des échan-ges industriels de la France avec les pays en développement », Economie et Statistique, n°179-280, pp. 13-34.

BORJAS G. J., FREEMAN R. B. et KATZ L. F. (1991), « On the Labor Market Effects of Immigration and Trade », Working Paper Series, n° 3761, NBER.

BOUSSIDA S. (2004), « Ouverture com-merciale et emploi (cas des industries manufacturières tunisiennes », IEQ.

BURGESS S., Lane J. et Stevens D. (2000), « Job Flows, Worker Flows and Churning », Journal of Labor Economics, 18, 473-502.

CABALLERO R. J. et HAMMOUR M. L. (1996), “On the timing and efficiency of crea-tive destruction,” Quarterly Journal of Economics, 111, 805-852.

CERED (1997), Situation et perspectives démographiques du Maroc.

CORTE O. et JEAN S. (1995), « Echange international et marché du travail : une revue critique des méthodes d’analyse », Revue d’Economie Politique, 105, pp. 369-403.

Dasguta D, Nabli MK, Pissarides C et Varoudakis A (2003), “Making trade Work for Jobs : International evidence and lessons for MENA” World Bank, Departemental Working paper 27023, Juillet 2003.

DAVIS S. J. et HITWANGER J. (1992), « Gross job creation, gross job destruction and

employment reallocation », Quaterly Journal of Economics, pp. 819-861.

DAVIS S., HALTIWANGER J. et SCHUH S. (1996), Job Creation and Destruction, MIT Press.

DRIVER C., KILPATRICK A. et NAIISBITT B. (1988), « The sensibility of estimated employment effect of input studies », Economic Modeling, pp. 145-150.

EDWARDS (1988), « Terms of trade, tariffs and labour market adjustment in deve-loping countries », World Bank Economic Review, vol 2, pp. 165-85.

Fargue P. (2005) Ed., “Mediterranean Migration 2005 Report”, Cooperation project on the social integration of immi-grants, migration, and the movement of persons, Financed by the European Commission, Robert Schumann Center, European University Institute

Fasano, U and, Rishi G, 2004. “Emerging Strains in GCC Labor Markets”, paper in Middle Eastern and North African Economies, electronic journal, Volume 6, Middle East Economic Association and Loyola University Chicago, September, 2004. http://www.luc.edu/publications/academic

FEMISE (2003), FEMISE 2003 Report on euro-Mediterranean partnership, http://www.femise.org

FEMISE (2004), Profil pays Maroc, Institut de la Méditerranée. http://www.femise.org

FONTAGNE L. et MIRZA D. (2003), « The Role of Demand in the Adjustment of Employment to Trade”, Paper presen-ted at the GEP conference on Trade and Labour Perspectives on Worker Turnover, University of Nottingham 27-28.6.2003.

Gallina A., Amoroso B. (2004), «A favourable macro-economic environment, innovati-ve financial instruments and interna-tional partner-ship to channel workers’ remittances towards the promotion of local development. Two case studies in Morocco and Tunisia», étude femise FEM21-08, http://www.femise.org

Gallina A. (2004), “Migration, financial flows and development in the Euro-Mediterranean area”, Research Report n.5 /2004, Federico Caffè Centre - Department of Social Sciences, Roskilde University

GCC, Statistical Bulletin Volume-Twelve, 2003; Gulf Cooperation Council, http:

-103--103-

//www.gcc-sg.org/gccstatvo112/gens-tat/g4.htm

Girgis, M. (2002) “National Versus Migrant Workers in the GCC” in H. Handoussa and Z. Tzannatos (eds.), Employment Creation and Social Protection in the Middle East and North Africa. Cairo: AUC Press.

Global Development Finance 2005: Mobilizing Finance and Managing Vulnerability, The World Bank, Washington DC

HAOUAS I., YAGOUBI M. et HESHMATI A. (2003), « The impacts of trade libera-lization on employment and wages in Tunisian Industries », Discussion Paper n°688.

ILO (2002), Yearbook of Labor Statistics 2002, The International Labor Organization, Geneva

ILO (2004a), Global Employment Trends 2004, The International Labor Organization, Geneva

ILO (2004b), “Towards a Fair Deal For Migrant Workers in the Global Economy”, International Labor Conference, 92nd Session, 2004, The International Labor Organization, Geneva

ILO (2004c), “A Fair Globalization: Creating Opportunities For all”, Global Commission on The Social Dimension of Globalization, The International Labor Organization, Geneva

Johnson S., Kaufmann D. et P. Zoido-Lobaton, (1998), « Corruption, Public Finances and the Unofficial Economy », World Bank Policy Research Working Paper no. 2169

LALL S. (2002), “The employment impact of globalisation in developing countries”, QEH Working Paper Series, n°93.

MALIRANTA M. (2003), “Micro level dynamics of productivity growth: An empirical analysis of the great leap in Finnish manufacturing productivity in 1975-2000,” Helsinki School of Economics, Doctoral Dissertations N° A-227.

Menegaldo F, Palméro S et Roux N (2004), Tendances de la spécialisation des pays méditerranéens et impact sur la crois-sance dans le cadre d’une comparaison Partenaires Méditerranéens- Pays de l’Est Européen, dans « Les effets des accords d’association sur l’industrie des Pays Partenaires Méditerranéens », Contrat et Rapport de recherche Forum Euro-Mediterranéen des Instituts de Sciences

Economiques (FEMISE) (ME8/P7-4100/1B/97/0739-01) FEM21-21, sou-tenu par la Commission Européenne.

MILNER C. et WRIGHT P. (1998), « Modelling labour market adjustment to trade libe-ralisation in an industrialising economy », The Economic Journal, 108, pp. 508-528.

NURMI S. (2004), “Openness to Trade and Employment Dynamics in Finnish Manufacturing”, Statistics Finland.

Palméro S et Roux N (2005), dynamiques sectorielles et emploi au maroc, in étude Femise FEM22-22.

Pennix R. (2004), “Integration: The Role of Communities, Institutions, and the State”, Migration Policy Institute, Washington DC

RAUCH J. E. et WEINHOLD D. (1997), « Openness, specialisation, end producti-vity growth in less developed countries », NBER Working Paper, 6131, March.

RIZWANUL I. (2003), « Labour Market Policies, Economic Growth and Poverty Reduction : Lessons and Non-lessons from the Comparative Experience of East, South-East and South Asia », Issues in Employment and Poverty, Discussion Paper 8, International Labour Office, Geneva.

SPIEZIA V. (2002), « Trade and employment : some empirical evidence », Paris, OCDE, draft for ILO project on Understanding Globalisation, Employment and Poverty Reduction.

VIVARELLI M. (2002), “Globalisation, skills and within-country inequality in deve-loping countries”, Genève,

Vostroknutova E., (2003), « Shadow Economy, Rent-Seeking Activities and the Perils of Reinforcement of the Rule of Law », William Davidson Institute Working Paper no. 578

WOOD A. (1995), « North South trade unem-ployment and inequality », Clarendon Press Oxford, Chapitres 5-8.

-104--104-

-105--105-

ANNEXES

Indicateurs sociaux-économiques des PM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.107Indicateurs macroéconomiques des PM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.108Entrée d’IDE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.109Panorama des échanges . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.110Modélisation de l’impact d’un accord sud-sud . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.111Modélisation de l’impact d’un accord nord-sud . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p.112Modélisation de l’impact d’une libéralisation multilatérale . . . . . . . . . . . . . . p.113

-106--106-

-107--107-

Adult L

itera

cy

Rate

1990

(i)Adult L

itera

cy

Rate

2003b

(ii)

School

enro

llment,

tertia

ry,

fem

ale

(%

gro

ss) 1

990

(i)

School

enro

llment,

tertia

ry,

fem

ale

(%

gro

ss) 2

002

(i)

School

enro

llment,

secondary

(%

gro

ss) 1

990

(i)

School

enro

llment,

secondary

(%

gro

ss) 2

002

(i)

School

enro

llment,

tertia

ry (%

gro

ss) 1

990

(i)

School

enro

llment,

tertia

ry (%

gro

ss) 2

002

(i)

Hum

an

Develo

pm

ent

Index 2

003

(ii)

Pupil-te

acher

ratio

, prim

ary

1998

(i)

Pupil-te

acher

ratio

, prim

ary

2002

(i)

Public

spendin

g

on e

ducatio

n,

tota

l (% o

f GD

P)

1999

(i)

Alg

érie

52,9

%69,8

%..

..60,9

%80,0

%11,8

%20,5

%0,7

22

28,1

927,5

3..

Egypte

47,1

%55,6

%96-9

911,6

%..

70,8

%88,1

%c

16,7

%38,3

%e

0,6

59

23,3

722,4

9c

..

Isra

ël

91,4

%96,9

%36,0

%67,1

%c

88,1

%94,4

%c

35,8

%57,6

%c

0,9

15

13,3

912,4

0c

7,2

%

Jord

anie

81,5

%89,9

%25,5

%31,3

%c

63,3

%86,5

%c

24,0

%31,0

%c

0,7

53

....

5,0

%

Lib

an

..86,5

%a

..48,2

%..

79,4

%..

44,3

%0,7

59

13,9

117,0

02,1

%

Maro

c38,7

%50,7

%a

8,1

%9,9

%35,5

%45,0

%10,9

%10,8

%0,6

31

28,1

428,1

86,1

%

Syrie

64,8

%82,9

%14,4

%..

48,8

%48,3

%18,5

%..

0,7

21

24,7

724,0

2c

..

Tunis

ie59,1

%74,3

%6,9

%21,4

%d

44,4

%79,1

%c

8,7

%23,2

%c

0,7

53

23,8

621,8

9c

7,5

%

Turq

uie

77,9

%88,3

%9,1

%20,9

%c

48,2

%76,0

%c

13,1

%24,8

%c

0,7

50

....

4,0

%

������������

�����

������

������

������

������

������

������

������

������

������

������

�����

Life

expecta

ncy

at b

irth, to

tal

(years

) 1990

(i)

Life

expecta

ncy a

t

birth

, tota

l

(years

) 2003

(i)

Impro

ved

wate

r sourc

e

(% o

f

popula

tion

with

access)

1990

(i)

Impro

ved

wate

r sourc

e

(% o

f

popula

tion

with

access)

2002

(i)

Pro

bability

at

birth

of n

ot

surv

ivin

g to

age 4

0

2000-2

005

(ii)

Pers

onal

com

pute

rs

(per 1

,000

people

)

1995

(i)

Pers

onal

com

pute

rs (p

er

1,0

00 p

eople

)

2003

(i)

Tele

phone

main

lines (p

er

1,0

00 p

eople

)

1995

(i)

Tele

phone

main

lines (p

er

1,0

00 p

eople

)

2003

(i)

Inte

rnet u

sers

(per 1

,000

people

)

1995

(i)

Inte

rnet u

sers

(per 1

,000

people

)

2003

(i)

Public

spendin

g

on e

ducatio

n,

tota

l (% o

f GD

P)

2002

(i)

Alg

érie

67,3

770,8

895%

87%

7,8

%3,0

7,7

g41,9

69,3

0,0

215,9

7g

..

Egypte

62,8

069,1

394%

98%

7,8

%4,3

21,9

46,7

127,3

0,3

439,3

3..

Isra

ël

76,0

978,7

6100%

100%

7,7

%f

133,5

242,6

g416,9

458,2

8,9

0301,4

0g

7,3

%c

Jord

anie

68,4

872,1

298%

91%

6,4

%8,2

44,7

73,9

113,6

0,2

381,0

5..

Lib

an

67,9

070,8

8100%

100%

5,7

%16,6

80,5

g149,1

198,8

g0,8

3117,1

3g

2,7

%

Maro

c63,4

868,5

975%

80%

8,6

%3,2

19,9

42,4

40,5

0,0

433,2

06,5

%

Syrie

66,4

170,4

979%

79%

4,6

%7,1

19,4

g67,7

123,2

g0,0

01,8

5d

..

Tunis

ie70,3

173,1

677%

82%

4,7

%6,7

40,5

58,2

117,7

0,1

163,7

06,8

%d

Turq

uie

65,6

968,6

481%

93%

8,9

%14,9

44,6

g214,4

267,5

0,8

184,8

53,7

%c

������������

�����

������

����

����

�����

����

����

����

���

�����

����

������

�����

��������������������������������

�������������������������������������

�������������������������������

�������������������������������������������������������������������������������������

���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������

������������������������������������������������������������������������

�����������������������������������������������������������

�����������������������������������������������������������

Indicateurs sociaux-économiques des PM

-108-

Taux d

e

cro

issance (

% a

nnuel

moy.)

1995-1

998

(ii)

Taux d

e

cro

issance

( % a

nnuel

moy.)

1998-2

002

Pib

PPP p

ar

tête

Inte

rnatio

nal

$

1995

(i)

Taux

d'in

flatio

n (%

)

1995-1

998

(iii)

Taux

d'in

flatio

n (%

)

1998-2

002

(iii)

Sold

e

budgéta

ire

(% P

IB)

1995

(iv)

Sold

e

budgéta

ire

(% P

IB)

2002

(iv)

Cro

issance d

e

la m

asse

monéta

ire (%

an. m

oy.) 1

993-

1997

(ii)

Cro

issance d

e

la m

asse

monéta

ire (%

an. m

oy.)

1998-2

002

(ii)

Alg

érie

3,0

%3,0

%(iv

)5027

16,1

%2,7

%-1

,4%

0,2

%13,7

%21,7

%

Egypte

5,4

%4,5

%(iv

)3025

7,9

%2,7

%0,9

%-5

,8%

10,7

%10,7

%

Isra

ël

3,3

%2,1

%(iv

)18477

8,9

%3,7

%-5

,0%

-3,0

%xi

21,5

%9,9

%

Jord

anie

2,7

%4,1

%(iii)

4056

4,1

%1,6

%0,3

%-4

,1%

3,9

%9,9

%

Lib

an

3,3

%1,1

%(ix

)4102

7,7

%-0

,8%

-18,3

%-1

1,8

%21,9

%9,3

%

Maro

c5,4

%2,6

%(iii)

3214

3,2

%1,7

%-5

,6%

-4,3

%9,9

%9,8

%

Syrie

5,8

%0,9

%3162

4,3

%-0

,9%

-4,2

%(ix

)-3

,4%

(ix)

10,0

%18,6

%

Tunis

ie5,8

%4,3

%(iii)

5083

4,2

%2,7

%-3

,2%

-3,5

%(x

i)11,1

%11,9

%

Turq

uie

6,0

%0,5

%(iv

)5601

84,7

%60,8

%-4

,1%

-15,2

%115,2

%61,3

%

Tota

l PM

(0)

5,4

%1

2,3

%1

4079

17,7

%1

2,7

%1

-3,2

%1/2

-3,6

%1/2

11,1

%10,7

%1

Taux d

e

cro

issance (

% a

nnuel

moy.) 2

003

(i)

Taux d

e

cro

issance

( % a

nnuel

moy.) 2

004

(i)

Pib

PPP p

ar

tête

Inte

rnatio

nal

$

2003

(i)

Taux

d'in

flatio

n (%

)

2004

(iii)

Taux

d'in

flatio

n (%

)

2005

(iii)

Sold

e

budgéta

ire

(% P

IB)

2003

(iii)

Sold

e

budgéta

ire

(% P

IB)

2004

Cro

issance d

e

la m

asse

monéta

ire

2003

(ii)

Cro

issance d

e

la m

asse

monéta

ire

2004

(ii)

Alg

érie

6,8

%5,2

%5769

3,6

%3,5

%5,1

%(iv

)2,4

%xii

16,0

%11,3

%

Egypte

3,2

%4,3

%3731

8,1

%8,8

%-6

,1%

(iv)

-5,9

%iv

21,3

%14,4

%

Isra

ël

1,3

%4,3

%18925

-0,4

%1,2

%-3

,1%

(xi)

-4,0

%xiv

-0,2

%3,6

%

Jord

anie

4,0

%7,5

%4081

3,4

%3,7

%-2

,3%

(iv)

-3,9

%vii

16,6

%10,5

%

Lib

an

4,9

%6,3

%4793

3,0

%2,0

%-1

4,5

%-8

,2%

xi

13,0

%10%

Maro

c5,2

%3,5

%3783

1,5

%2,0

%-3

,6%

(vii)

-4,4

%vii

8,7

%7,7

%

Syrie

2,5

%3,6

%3378

4,6

%10,0

%-2

,7%

xi

n.a

.7,8

%n.a

.

Tunis

ie5,6

%5,8

%6765

3,6

%2,9

%-3

,5%

(xi)

-2,8

%xi

6,4

%11,3

%

Turq

uie

5,8

%8,9

%6398

10%

8,4

%-1

1,3

%xi

-8,1

%xi

14,6

%22,1

%

-3,6

%-3

,6%

Tota

l PM

(0)

4,9

%1

5,2

%1

4793

13,6

%1

3,5

%-3

,5%

1/2

-4,2

%1

13,0

%1/2

10,9

%

Taux d

'inté

rêt

inte

rbancaire

2002

(iv)

Sold

e d

u

com

pte

coura

nt

(% P

IB)

1995

(iii)

Sold

e d

u

com

pte

coura

nt

(% P

IB)

1998-2

000

(iii)Ta

ux d

'investis

-

sem

ent 1

995

(ii)Ta

ux d

'investis

-

sem

ent 2

001

(ii)

Serv

ice d

e la

dette

(% d

es

exporta

tions)

1995-1

998

(ii)

Serv

ice d

e la

dette

(% d

es

exporta

tions)

2002

(ii)

Réserv

es d

e

change

(nom

bre

de

mois

d'im

porta

tions)

1998-2

001

(ii)

Taux d

e

chôm

age

1995

(iii)

Taux d

e

chôm

age

2002

(iii)

Alg

érie

5,5

%-5

,4%

n.a

.27,0

%22,8

%33,0

%22,6

%iv

)8,5

28,1

%27,3

%

Egypte

5,5

%-0

,4%

-1,2

%16,2

%17,7

%11,0

%12,3

%iv

11,9

9,6

%9,1

%

Isra

ël

6,5

%-6

,0%

-1,9

%25,4

%19,0

%19,7

%21,1

%(iv,v

)6,4

6,9

%10,3

%

Jord

anie

4,5

%-3

,9%

-0,1

%29,6

%19,5

%16,0

%13,7

%8,6

14,2

%15,3

%

Lib

an

10,8

%-4

1,9

%-1

8,5

%33,0

%17,0

%n.a

.85,4

%e

8,6

n.a

.9,9

%a

Maro

c5,1

%-3

,9%

0,6

%21,4

%22,3

%28,0

%17,8

%7,0

22,3

%11,2

%

Syrie

n.a

.-2

,9%

0,6

%27,2

%20,9

%6,0

%3,2

%(ix

)n.a

.7,0

%11,7

%

Tunis

ie6,1

%-4

,3%

-3,5

%24,2

%26,2

%16,0

%17,2

%xi

2,9

15,3

%14,9

%

Turq

uie

n.a

.-1

,4%

-0,7

%23,8

%18,2

%23,0

%37,3

%xi

5,8

6,6

%10,6

%

Tota

l PM

(0)

5,5

%1

-3,9

%1

-1,0

%1

25,4

%1

19,5

%1

17,9

%1

17,8

%1

7,7

111,9

%1/2

11,2

%1/2

Sold

e d

u

com

pte

coura

nt

(% P

IB)

2002

(iii)

Sold

e d

u

com

pte

coura

nt

(% P

IB)

2003

(iii)

Sold

e d

u

com

pte

coura

nt

(% P

IB)

2004

(iii)Ta

ux d

'investis

-

sem

ent 2

003

(ii)Ta

ux d

'investis

-

sem

ent 2

004

(ii)

Serv

ice d

e la

dette

(% d

es

exporta

tions)

2003

Serv

ice d

e la

dette

(% d

es

exporta

tions)

2004

Réserv

es d

e

change

(nom

bre

de

mois

d'im

porta

tions)

2003

(ii)

Réserv

es d

e

change

(nom

bre

de

mois

d'im

porta

tions)

2004

(ii)

Taux d

e

chôm

age

2003

(iii)

Taux d

e

chôm

age

2004

Alg

érie

7,7

%13,0

%8,8

%23,8

%n.a

.17,7

%xiv

n.a

.24,3

30,0

23,7

%f

22,0

%xiv

Egypte

0,7

%2,4

%4,3

%16,3

%16,5

%13,3

%iv

11,7

%iv

12,4

10,0

iv9,9

%n.a

.

Isra

ël

-1,2

%0,7

%0,3

%17,6

%17,0

%n.a

.n.a

.6,7

8,2

xiv

10,7

%10,4

%v

Jord

anie

5,6

%11,3

%5,3

%19,3

%n.a

.23,5

%n.a

.12,3

7,4

xi

13,9

%xi

14,5

%xi

Lib

an

-15,1

%-1

2,5

%-1

0,9

%16,7

%n.a

.21,7

%xi

22,3

%xi

17,9

n.a

.n.a

.n.a

.

Maro

c4,1

%3,6

%2,3

%23,5

%n.a

.14,2

%xi

n.a

.12,7

9,6

vii

13,1

%10,9

%vi

Syrie

8,9

%6,0

%2,8

%22,6

%n.a

.n.a

.n.a

.8,8

xi

8,0

%xi

12,1

%xi

n.a

.

Tunis

ie-3

,5%

-2,9

%-3

,0%

23,4

%22,9

%15,1

%xi

19,0

%xi

3,4

2,9

xi

14,3

%13,8

%xi

Turq

uie

-0,8

%-3

,3%

-3,0

%15,5

%17,8

%34,9

%xi

31,1

%xi

6,3

4,7

9,4

%n.a

.

Tota

l PM

(0)

0,7

%1

2,4

%1

2,3

%1

19,3

%1

17,4

%1

17,7

%1

20,7

%1

12,3

17,8

112,6

%1/2

13,8

%

Prin

cip

aux a

gré

gats

macro

économ

iques

Sourc

es : W

orld

Bank, W

DI 2

004 c

édéro

m (i) ; F

ond M

onéta

ire In

tern

atio

nal, S

FI c

édéro

m (ii) ; W

old

Bank, W

orld

Econom

ic O

utlo

ok D

ata

base, A

vril 2

004 (iii) ; B

anques C

entra

les (iv

) ; Offic

es n

atio

naux d

e s

tatis

tiques (v

), DPEG

Maro

c (v

i), Min

istè

re d

es

Fin

ances (v

ii), Calc

uls

Institu

t de la

Medite

rranée (v

iii), pré

vis

ions d

e la

Banque M

ondia

le, o

n lin

e W

DI 2

003 (ix

), Sta

te P

lanin

g O

rganiz

atio

n (x

); Fond M

onéta

ire In

tern

atio

nal, C

ountry

Pro

file (x

i), EIU

(xii),D

REE (x

iii).

0 : s

auf in

dic

atio

n c

ontra

ire, le

s ra

tios P

PM

sont c

alc

ulé

s à

partir d

e la

som

me d

es v

ale

urs

nom

inale

s c

onvertie

s e

n $

. 1 : m

édia

ne d

es p

ays c

onsid

éré

s. 2

: hors

Turq

uie

. 3 : h

ors

Lib

an. a

: 2002, b

/e : p

aie

ment d

es in

térê

ts s

ur la

dette

étra

ngère

uniq

uem

ent, f=

trois

ièm

e trim

estre

2003.

*oct à

oct 2

004

Indicateurs macroéconomiques des PM

-109-

En

trées d

'ID

E e

n m

illion

s d

e U

S $

19

90

19

91

19

92

19

93

19

94

19

95

19

96

19

97

19

98

19

99

20

00

20

01

20

02

20

03

20

04

���

(B)

(B/A

) %1990-

1995

1996-

2004

Alg

érie

*12

10

-59

18

54

7501

507

438

1 1

96

1 0

65

634

882

-3582

Egypte

734

253

459

493

1 2

56

596

637

888

1 0

76

1 0

65

1 2

35

510

647

237

1 2

53

632

839

32,7

%

Isra

ël

151

346

589

605

442

1 3

51

1 3

98

1 6

35

1 7

37

3 1

15

5 0

77

3 6

35

1 7

70

3 8

80

1 6

19

580

2 6

52

356,8

%

Jord

anie

38

-12

41

-34

313

16

361

310

158

801

120

64

424

620

8319

3802,9

%

Lib

an

62

18

723

35

80

150

200

250

298

249

257

358

288

Maro

c165

317

423

491

551

335

357

1 0

79

417

850

215

2 8

25

481

2 3

14

853

380

1 0

43

174,3

%

Syrie

71

62

18

1 0

20

1 0

79

987

912

854

743

972

1 2

02

947

1 0

30

1 0

84

1 2

06

540

994

84,3

%

Tunis

ie76

125

526

562

566

378

351

366

668

368

779

486

821

584

639

372

562

51,1

%

Turq

uie

684

810

844

636

608

885

722

805

940

783

982

3 2

66

1 0

63

1 7

53

2 7

33

745

1 4

50

94,7

%

Pays P

arte

naire

s d

e M

édite

rranée

2 0

51

2 0

78

3 0

60

2 8

40

4 5

45

4 5

85

4 4

76

6 1

44

6 5

92

8 0

68

11 0

27

13 2

34

7 1

98

11 2

68

10 0

93

3 1

93

8 6

78

171,8

%

Pays P

arte

naire

s d

e M

édite

rranée h

ors

Isra

ël

1 7

75

1 5

69

2 3

39

3 1

17

4 1

03

3 2

34

3 0

79

4 5

10

4 8

55

4 9

53

5 9

50

9 5

99

5 4

28

7 3

88

8 4

74

2 6

90

6 0

26

124,1

%

To

tal M

on

de

20

7 8

83

16

1 2

78

16

9 2

38

22

7 6

94

25

9 4

69

34

1 0

86

39

2 9

22

48

7 8

78

70

1 1

24

1 0

92

05

21

39

6 5

39

82

5 9

25

71

6 1

28

63

2 5

99

64

8 1

46

22

7 7

75

76

5 9

23

23

6,3

%

Pays e

n d

évelo

ppem

ent

35 7

36

43 9

51

54 8

72

80 4

20

105 1

41

117 5

44

151 7

46

191 7

64

186 6

26

232 5

07

253 1

79

217 8

45

155 5

28

166 3

37

233 2

27

72 9

44

198 7

51

172,5

%

Am

ériq

ue L

atin

e e

t Cara

ïbes

9 5

86

15 8

03

18 0

76

17 7

96

30 1

02

30 1

67

50 2

46

76 2

60

82 5

40

108 6

40

97 5

23

89 1

30

50 4

92

46 9

08

67 5

26

20 2

55

74 3

63

267,1

%

Asie

du S

ud e

t de l'E

st (e

xcl. C

hin

e, in

cl. H

K)

18 6

71

17 6

27

18 8

20

26 0

89

32 0

00

40 1

97

48 2

81

55 6

68

45 9

96

69 3

77

101 2

40

54 6

05

33 5

75

41 2

50

77 0

75

25 5

67

58 5

63

129,1

%

Euro

pe c

entra

le e

t de l'e

st

957

4 1

45

6 7

51

11 0

59

8 3

79

16 9

91

16 7

62

24 1

85

26 8

49

29 0

72

29 4

00

30 1

41

35 4

79

34 8

68

53 6

71

8 0

47

31 1

58

287,2

%

Czech R

epublic

72

523

1 0

03

654

869

2 5

62

1 4

28

1 3

00

3 7

18

6 3

24

4 9

86

5 6

41

8 4

83

2 1

01

4 4

63

947

4 2

72

351,1

%

Esto

nia

00

82

162

215

202

151

267

581

305

387

542

284

891

926

110

481

337,5

%

Hungary

623

2 9

50

2 9

55

4 8

92

2 2

86

5 1

04

3 3

00

4 1

67

3 3

35

3 3

12

2 7

64

3 9

36

2 9

94

2 1

62

4 1

67

3 1

35

3 3

48

6,8

%

Latv

ia0

029

45

214

180

382

521

357

347

413

132

254

300

647

78

372

376,9

%

Lith

uania

00

10

30

31

73

152

355

926

486

379

446

732

179

773

24

492

1949,4

%

Pola

nd

89

291

678

1 7

15

1 8

75

3 6

59

4 4

98

4 9

08

6 3

65

7 2

70

9 3

43

5 7

14

4 1

31

4 1

23

6 1

59

1 3

85

5 8

35

321,4

%

Rom

ania

040

77

94

341

419

263

1 2

15

2 0

31

1 0

41

1 0

37

1 1

57

1 1

44

2 2

13

5 1

74

162

1 6

97

948,7

%

Slo

vakia

93

81

100

179

273

258

370

231

707

428

1 9

25

1 5

84

4 0

94

669

1 1

22

164

1 2

37

653,8

%

Slo

venia

465

111

113

117

151

174

334

216

107

136

370

1 6

86

337

516

93

431

361,3

%

Sourc

e : U

nite

d N

atio

ns : W

orld

Investm

ent R

eports

1995 à

2004.

Selo

n ré

vis

ion d

es p

révis

ions U

NCTAD

, WIR

2004

Moyenne a

nnuelle

(mio

s $

)

Entrées d’IDE

-110-

Avec le

Mo

nd

e

Taux

d'o

uvertu

re

(X+

M/P

IB)

Importa

tions

Exporta

tions

Importa

tions

Exporta

tions

Tous p

roduits

Hors

pétro

lePro

duits

manufa

ctu

rés

Part d

es

pro

duits

manufa

ctu

rés

Concentra

tion

des e

xports

[1]

2003

Hors

pétro

leH

ors

pétro

leIm

ports

Exports

2003

2003

2003

2003

2003

Alg

érie

57,8

%13 5

32,5

24 6

11,5

13 4

24,8

481,9

2,9

2%

0,9

3%

11 0

79,0

-12 9

43,0

-9 6

59,0

1%

0,6

0

Egypte

20,7

%10 8

92,7

6 1

60,7

10 3

29,7

3 5

07,5

-1,4

3%

6,2

4%

-4 7

32,0

-6 8

22,0

-3 4

14,0

25%

0,3

2

Isra

ël

60,0

%*

34 2

10,9

31 7

82,7

30 4

51,9

31 6

44,6

1,6

7%

6,5

5%

-2 4

28,0

1 1

93,0

1 8

71,0

96%

0,3

4

Jord

anie

88,6

%5 6

53,2

3 0

81,6

4 7

20,3

3 0

74,1

4,9

0%

7,1

6%

-2 5

72,0

-1 6

46,0

-1 3

54,0

66%

0,1

0

Lib

an

45,7

%7 1

67,5

1 5

23,9

6 0

46,8

1 5

20,4

2,4

1%

13,2

3%

-5 6

44,0

-4 5

26,0

-3 5

61,0

51%

0,2

1

Maro

c50,6

%13 7

30,6

8 7

77,2

11 5

14,6

8 5

47,7

5,7

4%

8,0

1%

-4 9

53,0

-2 9

67,0

-3 2

40,0

46%

0,1

6

Syrie

50,4

%5 1

10,6

5 7

30,7

4 9

24,5

1 6

42,1

3,5

9%

6,9

6%

620,0

-3 2

82,0

-3 0

83,0

21%

0,6

1

Tunis

ie72,1

%10 1

46,7

7 3

54,4

9 4

54,5

6 7

21,9

3,2

3%

3,7

4%

-2 7

92,0

-2 7

33,0

-2 0

50,0

68%

0,1

7

Turq

uie

49,0

%69 3

39,7

47 2

52,8

57 7

64,8

46 2

72,6

8,0

5%

10,1

8%

-22 0

87,0

-11 4

92,0

-7 0

46,0

82%

0,0

9

��

�����

���������

���������

���������

���������

�����

�����

���������

���������

���������

���

����

* : P

IB 2

002

Avec l'U

nio

n E

uro

péen

ne

Importa

tions

Exporta

tions

Importa

tions

Exporta

tions

Tous p

roduits

Hors

pétro

lePro

duits

manufa

ctu

rés

Part d

es

pro

duits

manufa

ctu

rés

Concentra

tion

des e

xports

[1]

Hors

pétro

leH

ors

pétro

leIm

ports

Exports

2003

2003

2003

2003

2003

Alg

érie

7 9

47,6

14 5

37,2

7 8

78,4

338,2

2,7

5%

5,1

2%

6 5

90,0

-7 5

40,0

-6 0

46,0

2%

0,6

1

Egypte

2 8

05,2

2 0

23,3

2 7

78,2

1 0

27,7

-5,9

4%

0,0

8%

-782,0

-1 7

51,0

-1 3

88,0

39%

0,3

4

Isra

ël

13 9

55,3

8 4

23,4

13 9

06,2

8 4

20,8

-0,6

6%

4,0

1%

-5 5

32,0

-5 4

85,0

-5 5

00,0

87%

0,2

2

Jord

anie

1 4

28,1

89,3

1 4

25,3

89,3

1,9

4%

-5,6

3%

-1 3

39,0

-1 3

36,0

-1 0

94,0

42%

0,1

1

Lib

an

3 0

64,6

143,5

2 6

65,3

143,5

-1,2

9%

1,2

8%

-2 9

21,0

-2 5

22,0

-2 0

38,0

67%

0,1

5

Maro

c8 3

52,5

6 6

45,5

7 7

77,1

6 5

32,6

6,7

1%

10,8

8%

-1 7

07,0

-1 2

44,0

-1 9

62,0

75%

0,2

0

Syrie

972,1

3 2

69,9

949,6

278,8

-7,1

2%

-4,2

3%

2 2

98,0

-671,0

-626,0

5%

0,8

8

Tunis

ie7 3

53,1

5 8

77,7

6 9

26,7

5 3

41,1

3,0

1%

3,9

3%

-1 4

75,0

-1 5

86,0

-1 3

97,0

84%

0,2

1

Turq

uie

31 6

95,5

24 4

87,9

31 2

20,7

24 2

75,0

8,1

2%

10,5

5%

-7 2

08,0

-6 9

46,0

-6 3

41,0

89%

0,1

4

��

��������

��������

��������

��������

�����

�����

���������

���������

���������

���

����

Sourc

e : C

om

trade, c

alc

uls

Institu

t de la

Médite

rranée

Hj=��

i=1314 (x

i/X)2

/ �(1

/239)/(1

- �(1

/239))

Stru

ctu

re d

es é

changes

Echanges to

taux 2

003 (e

n m

illions d

e d

olla

rs)

Sold

es c

om

merc

iaux (m

illions d

e d

olla

rs)

Stru

ctu

re d

es é

changes

Taux d

e c

rois

sance a

nnuels

moyens d

es é

changes h

ors

pétro

le 1

995-2

003

Taux d

e c

rois

sance a

nnuels

moyens d

es é

changes h

ors

pétro

le 1

995-2

003

Echanges to

taux 2

003 (e

n m

illions d

e d

olla

rs)

Sold

es c

om

merc

iaux (m

illions d

e d

olla

rs)

[1] C

alc

ulé

e s

elo

n l’in

dic

e d

e H

erfin

dahl-H

irschm

ann q

ui p

erm

et d

’avoir u

ne m

esure

du n

iveau d

e la

concentra

tion d

es e

xporta

tions d

’un p

ays s

ur u

n p

etit n

om

bre

de p

roduits

.

Hj é

tant l’in

dic

e d

u p

ays, X

i = v

ale

ur d

es e

xporta

tions d

u p

roduit i , X

= v

ale

ur d

es e

xporta

tions to

tale

s d

u p

ays j 2

39 =

nom

bre

de p

roduits

de la

SIT

C re

v 2

à 3

dig

it. L’indic

e e

st n

orm

alis

é a

fin

d’o

bte

nir d

es v

ale

urs

com

pris

es e

ntre

0 e

t 1. P

lus l’in

dic

e e

st fa

ible

, plu

s la

stru

ctu

re d

’exporta

tion e

st d

ivers

ifiée. L

ors

qu’il e

st é

gal à

1, la

concentra

tion m

axim

ale

(le p

ays n

’exporte

qu’u

n s

eul

pro

duit).

Panorama des échanges

-111-

Tableau A4 : Impact d’un accord d’intégration sud-sud sur diverses variablesmacroéconomiques (en% de croissance)

Tableau A5 : Impact d’un accord d’intégration sud-sud sur les secteurs de production(niveau initial en Mds de US $, et taux de croissance après 14 ans)

Source : étude Femise FEM22-36, CATT

Modélisation de l’impact d’un accord sud-sud

-112-

Tableau A6 : Impact d’un accord d’intégration nord-sud sur diverses variablesmacroéconomiques (en% de croissance)

Tableau A7 : Impact d’un accord d’intégration nord-sud sur les échanges extérieursbilatéraux (niveau initial en Mds de US $, et taux de croissance après 14 ans)

Tableau A8 : Impact d’un accord d’intégration nord-sud sur les secteurs de production(niveau initial en Mds de US $, et taux de croissance après 14 ans)

Source : étude Femise FEM22-36, CATT

Modélisation de l’impact d’un accord nord-sud

-113-

Tableau A9 : Impact d’un accord multilatéral de libéralisation totale sur diversesvariables macroéconomiques (en% de croissance)

Tableau A10 : Impact d’un accord d’intégration nord-sud sur les secteurs de production(niveau initial en Mds de US $, et taux de croissance après 14 ans)

Source : étude Femise FEM22-36, CATT

Modélisation de l’impact d’une libéralisation multilatérale