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Anges et Maçonnerie Il peut paraître étrange de traiter de la question des Anges en une planche maçonnique, alors que nulle mention n'en est faite dans les grades de la Maçonnerie bleue, et que les premières allusions à ces entités n'apparaissent qu'au 18ème degré (Souverain-Prince Rose-Croix, qu'il soit du rite de Kilwining ou du rite moderne décrits dans "Le Tuileur de Vuillaume"). On les retrouvera ensuite dans nombre de grades du REAA sous forme de mots de passe, et d'une manière encore plus précise au 28ème degré (Chevalier du Soleil), où 7 membres de la Loge sont nommés "Chérubins". Il ne s'agit pas d'en effacer toute trace, comme certaine obédience qui remplace le nom de Raphaël par "Raison", pour que disparaisse la raison d'être de leur présence dans nos rituels. La suspicion éprouvée par certains Maçons qu'ils aient pu être introduits pour des raisons de "reliance" de la maçonnerie à une religion, quelle qu'elle soit, ne saurait tenir dès lors qu'on étudie d'un peu plus près ce phénomène. C'est à cette approche que je vous invite aujourd'hui. De tous temps les hommes ont attribué à des êtres surnaturels une fonction de messagers entre les dieux et l'homme. Dans la Babylone antique, on les appelait "Sukalli, Yazatas", c'est-à-dire "messagers et fils des dieux". En Inde, on les nommait "Devas", soit "les lumineux", et les Hindous désignaient par "Kinpuru'sh" des êtres qui adoraient Dieu et voletaient autour de lui. Les Persans avaient aussi leurs êtres ailés qui louaient Dieu et lui rendaient gloire, les "Feresh'ta"; les Amérindiens les connaissaient sous le nom d' "Ongwheonwhe", "le peuple des Oiseaux"; les Hébreux sous le nom de "Mal'ak", "ceux qui portent un message ou accomplissent une mission". Les Grecs les dénommaient "Aggelos", "les messagers". Dans la Bible, les anges de Dieu n'ont pas d'ailes, hormis les deux chérubins que Salomon dispose au milieu du debir du Temple. En fait, jusqu'au IVème siècle, les anges seront représentés sans ailes, et seul un nimbe les auréolant les différenciera des simples mortels. Jusqu'à la Nativité, ils seront les seuls médiateurs entre les hommes et le divin. Au Moyen âge on se préoccupera de leur forme, de leur nature …et de leur sexe. De nos jours, la matérialisation de leur vision sera complétée par des tentatives de dialogues au moyen du "channeling". Mais "quid" de la Maçonnerie et de son rapport avec les Anges ?

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Anges et Maçonnerie

Il peut paraître étrange de traiter de la question des Anges en une planche maçonnique, alors que nulle mention n'en est faite dans les grades de la Maçonnerie bleue, et que les premières allusions à ces entités n'apparaissent qu'au 18ème degré (Souverain-Prince Rose-Croix, qu'il soit du rite de Kilwining ou du rite moderne décrits dans "Le Tuileur de Vuillaume"). On les retrouvera ensuite dans nombre de grades du REAA sous forme de mots de passe, et d'une manière encore plus précise au 28ème degré (Chevalier du Soleil), où 7 membres de la Loge sont nommés "Chérubins". Il ne s'agit pas d'en effacer toute trace, comme certaine obédience qui remplace le nom de Raphaël par "Raison", pour que disparaisse la raison d'être de leur présence dans nos rituels. La suspicion éprouvée par certains Maçons qu'ils aient pu être introduits pour des raisons de "reliance" de la maçonnerie à une religion, quelle qu'elle soit, ne saurait tenir dès lors qu'on étudie d'un peu plus près ce phénomène. C'est à cette approche que je vous invite aujourd'hui. De tous temps les hommes ont attribué à des êtres surnaturels une fonction de messagers entre les dieux et l'homme. Dans la Babylone antique, on les appelait "Sukalli, Yazatas", c'est-à-dire "messagers et fils des dieux". En Inde, on les nommait "Devas", soit "les lumineux", et les Hindous désignaient par "Kinpuru'sh" des êtres qui adoraient Dieu et voletaient autour de lui. Les Persans avaient aussi leurs êtres ailés qui louaient Dieu et lui rendaient gloire, les "Feresh'ta"; les Amérindiens les connaissaient sous le nom d' "Ongwheonwhe", "le peuple des Oiseaux"; les Hébreux sous le nom de "Mal'ak", "ceux qui portent un message ou accomplissent une mission". Les Grecs les dénommaient "Aggelos", "les messagers". Dans la Bible, les anges de Dieu n'ont pas d'ailes, hormis les deux chérubins que Salomon dispose au milieu du debir du Temple. En fait, jusqu'au IVème siècle, les anges seront représentés sans ailes, et seul un nimbe les auréolant les différenciera des simples mortels. Jusqu'à la Nativité, ils seront les seuls médiateurs entre les hommes et le divin. Au Moyen âge on se préoccupera de leur forme, de leur nature …et de leur sexe. De nos jours, la matérialisation de leur vision sera complétée par des tentatives de dialogues au moyen du "channeling". Mais "quid" de la Maçonnerie et de son rapport avec les Anges ?

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Je signalais plus haut le rituel du 28ème degré du REAA, Le Chevalier du Soleil, Prince Adepte, décrit en 1820 par Vuillaume. Il avait été précédé par le rituel du 23ème degré du Rite de Perfection, Chevalier du Soleil, Chevalier de l'Aigle, Clef de la Maçonnerie, lui-même certainement précédé par le rituel du Chevalier du Soleil ou des Adeptes, au 24ème grade de la Grande Loge de Lyon, dont la patente constitutive date de 1761. Ceci pour la petite Histoire. Le rituel du Rite de Perfection commence ainsi: Le Grand Conseil ne doit être illuminé que par un seul luminaire et est éclairé par une divine Lumière… Le luminaire qui brille en notre Conseil est constitué d'un globe de verre rempli d'eau placé devant la source lumineuse… Le Grand Maître…est appelé Père ADAM… Les autres Officiers sont au nombre de sept et portent les noms des chérubins Zaphxiel, Zabriel, Camael, Uriel, Michael, Zephael et Gabriel. Vuillaume indique que Michael gouverne Saturne, Gabriel gouverne Jupiter, Ouriel (Uriel) gouverne Mars, Z'rahhiel (Zabriel) gouverne le Soleil, Hhamaliel (Camael) gouverne Vénus, Raphael (Zephael) gouverne Mercure et Tsaphiel (Zaphxiel) gouverne la Lune, tout en précisant que les cabalistes ne sont pas tous d'accord sur le nom, ni la distribution des intelligences célestes, mais qu'il donne le système adopté dans le grade. Sans entrer dans le détail du rituel, qui est essentiellement teinté d'apports alchimiques, il faut noter aussi l'influence qu'eurent, sur ses rédacteurs, les ouvrages de Kabbale pratique existant à cette époque. On retiendra notamment le Sepher Razi'el (le livre de l'ange Razi'el) imprimé en 1701 et répandu autant en Europe qu'au Maghreb. Lorsque le candidat a prêté son Obligation, on lui donne le Signe. Ce Signe signifie Qu'il n'y a qu'un seul Dieu, qui est la source véritable de l'exacte Vérité, et qu'en conséquence il ne peut y avoir qu'une seule vraie Religion, celle qu'Adam reçut de Dieu Lui-même… Les Sept Planètes désignent les sept couleurs dans leur état originel alors que nous connaissons aussi bien des nuances composites. Les Sept Chérubins représentent les sept métaux, c'est-à-dire l'or, l'argent, le cuivre, le fer, le plomb, l'étain et le vif-argent… Les Sept Planètes sont les sept principales passions de l'homme. les Sept Chérubins représentent les délices de cette vie, c'est-à-dire voir, entendre, goûter, sentir, éprouver un sentiment, être tranquille et être en bonne santé. Dans une autre instruction, la "bonne santé" sera remplacée par "la sainteté", dans une troisième instruction, par "la pensée". Dans cette dernière, l'explication des Planètes est plus complète: - Selon la Philosophie, les Sept Planètes représentent les sept principales passions de l'homme. Ces passions sont très utiles lorsqu'on en use avec modération pour ce à quoi le Tout-Puissant les a placées en nous. Mais elles peuvent devenir fatales et détruire notre corps si nous les laissons faire et c'est pourquoi nous avons le devoir de les maîtriser. - expliquez quelles sont ces passions ? - il s'agit de: la propagation de l'espèce l'ambition de devenir riche l'ambition d'acquérir de la renommée, dans les arts ou dans les sciences, et d'être connu des hommes la supériorité de la vie civile

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les joies et les plaisirs de la société les amusements et les gaîtés de la vie la Religion… - Que signifient les Sept Chérubins dont les noms sont écrits sur un grand cercle que l'on appelle le Premier Ciel ? - Ils représentent les délices corporelles de cette vie, que l'Eternel donna à l'homme lorsqu'il le créa, et qui sont la vue, l'audition, l'odorat, le goût, le sentiment, la tranquillité et la pensée.

La première instruction, dite "de la Loge Spirituelle", est de nature déiste. La seconde instruction est dite "de la Loge Physique", et si la teinture en est alchimique, elle n'a pas grand-chose à voir avec une alchimie spirituelle. La troisième instruction allie Symbolisme et Ethique, et mérite le plus le qualificatif de Clef de la Maçonnerie;

Nous voici loin des croyances superstitieuses ou même des définitions des anges décrites par la théorie de théologiens qui s'est attaquée à cette question depuis Tertullien (160-240). C'est lui qui le premier, parlera dans son Apologétique, des "songes dont les anges nous gratifient". Origène (185-254) "inventera" l'ange gardien: "Auprès de chaque homme, il y a toujours un ange du Seigneur qui l'éclaire, le garde et le protège de tout mal". Saint Denys (mort vers 121) traita dans un livre qui servit de référence à tous ceux qui étudièrent cette question après lui, "De la Hiérarchie céleste". Il définit la première hiérarchie, celle des Séraphins, des Chérubins et des Thrônes, leurs rôles et leurs fonctions. La seconde hiérarchie, celle des Dominations, des Vertus et des Pouvoirs (ou Puissances). La troisième hiérarchie, composée des Principautés, des Archanges et des Anges. Et il insiste sur un point capital: "On ne doit pas s'imaginer, avec l'ignorance impie du vulgaire, que ces nobles et pures intelligences aient des pieds et des visages, ni qu'elles affectent la forme d'un boeuf stupide ou du lion farouche, ni qu'elles ressemblent en rien à l'aigle impérieux ou aux légers habitants des airs. Ce ne sont ni des chars de feu qui roulent dans le ciel, ni des trônes matériels destinés à porter le Dieu des dieux, ni de coursiers aux riches couleurs, ni de généraux armés de lances, ni rien de ce que nomment les Ecritures dans leur langage si fécond en pieux symboles…".

De Saint Bernard de Clairvaux (1090-1174) au curé d'Ars (1786-1859) en passant par Saint François d'Assise (1182-1226), Saint Thomas d'Aquin (1225-1274), Sainte Jeanne d'Arc (1412-1431), nombreux sont ceux qui eurent "la faveur" de visions angéliques et tentèrent de les décrire de la manière la plus concrète en fonction de ce qu'ils avaient ressenti lors de ces rencontres surnaturelles. Des poètes, comme Dante (1265-1321), des Rose-Croix, comme Robert Fludd (1574-1637), surent leur attribuer des fonctions et des rôles. Dante nous dit que Dieu créa les anges dans son éternité, hors du temps, comme il lui plut, "en de nouveaux amours s'ouvrit l'éternel amour". La durée pour les anges participe de l'éternité de Dieu; pour les anges spécialement, elle est en rapport avec leur activité et diffère du temps. Du reste, la création est, comme acte, en dehors du temps. L'Amour, l'éternel amour, est Dieu. Les

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amours qu'il tire de sa substance, sont toutes ses créatures: anges, hommes, plantes et matières. " L'ordre fut créé et établi en même temps que les substances, et celles-là furent le sommet du monde, chez qui l'acte pur fut produit ". (Divine Comédie; Par. XXIX, 31-33) Robert Fludd, dans son " Rempart mystique de la Santé ", posera en principe que le mal est une résultante de la désobéissance d'Adam et de la révolte des mauvais anges. Cette désobéissance fut cause d'un déséquilibre dans le monde, produisant de nombreuses perturbations, ayant pour conséquences la maladie, la souffrance et la mort. Ce n'est donc pas Dieu qui a créé le mal, ainsi que beaucoup le croient, mais une résultante de la désobéissance de notre premier ancêtre et de l'insoumission des mauvais anges. Lucifer, qui est à la tête de ces derniers, commande aux quatre vents principaux, vents malfaisants, qui sont chargés de dévaster la terre, de bouleverser la mer et de détruire les arbres fruitiers. Saint Michel est chargé de contenir les puissances maléfiques. Il est considéré par les cabalistes comme le plus grand protecteur de l'âme et du corps de l'homme. On distingue quatre vents principaux: l'aquilon, le vent du midi, le vent de l'Orient et le vent du couchant. Les vents ne soufflent pas à leur gré, ils sont surveillés par quatre anges: Michel, plutôt porté à la clémence et à la miséricorde, commande au vent de l'Orient. Gabriel, plutôt enclin à la justice et à la sévérité, commande au vent Borée, vent du Nord ou aquilon. Raphaël, plutôt porté à la clémence et à la miséricorde, régit le vent de l'Occident, ou vent du Couchant. Uriel, ayant plutôt une tendance à la justice et à la sévérité, régit le vent Auster ou vent du Midi. Plus près de nous, on ne peut omettre les Enseignements de Maître Philippe (1849-1905) sur les Anges, ni la Prière médiévale aux neuf Choeurs du Sâr Joséphin Péladan.

Pour Maître Philippe, " le seul qui n'ait pas d'ange gardien (c'est-à-dire d'esprit supérieur à lui), c'est celui qui est le Christ. Au-dessus de Lui, il n'y a rien. Il est l'esprit vivant, conscient total de l'humanité ". Il fonde son affirmation sur la déclaration de Jésus rapportée dans Jean (VIII, 58): "En vérité, en vérité je vous le dis, avant qu'Abraham fût, je suis". Il disait aussi: " si vous ne voulez pas avoir d'ange gardien, progressez et on vous le retirera ". Quant au Sâr Péladan, il écrit dans son " Bréviaire du Rose-Croix ": " Les Oelohim de la Genèse, littéralement Eux-de-Lui, forment l'homme d'après leur ombre portée. L'homme serait ainsi l'ombre de l'ange… Celui qui triomphe dans la vie douloureuse dépasse la vie angélique ". Emile Dantine, un disciple de Péladan, écrira: "…et la devise de la Rose-Croix est réellement une reconnaissance de la délégation, car l'initié lui-même devient un délégué de l'Être Divin, et il remplit dans le monde un rôle analogue aux anges ". Robert Ambelain ira beaucoup plus loin dans son traité sur "La Kabbale Pratique". Citant Jamblique (Des Mystères, VII,7) dans son avant-propos, il dit: " Il existe dans l'âme un principe supérieur à la nature extérieure. Par ce principe, nous pouvons surpasser l'ordre et les systèmes de ce monde, et participer à la vie immortelle et à l'énergie des Essences Célestes. Quand l'âme s'élève jusqu'à des natures supérieures à la sienne, elle abandonne

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l'Ordre auquel elle est temporairement liée, et, par un magnétisme religieux, elle est attirée vers un Plan Supérieur avec lequel elle se mêle et s'identifie…". Analysant les origines de la Kabbale, il écrit: " On peut le dire sans crainte, c'est l'universel et l'éternel ferment initiatique qui, déposé au sein de l'ésotérisme d'Israël, comme au sein de n'importe quelle religion, révélée ou non, a suscité la naissance de la Kabbale. La Kabbale n'est donc que la Doctrine éternelle, dissimulée sous tous les symboles et dans tous les Récits légendaires, simplement véhiculée par des traditions venues du fond des âges, et qui jettent leurs racines dans le mystère originel des peuples de Summer et d'Akad. Elle est l'aspect sémitique de cette Doctrine éternelle et elle ne fait qu'emprunter des procédés d'expression aux concepts raciaux, héréditaires, ou didactiques , des peuples d'Occident, et plus précisément méditerranéens. Le Christianisme a été son principal messager, lui qui repose avant toute chose sur l'Ancien Testament…". Mettant en correspondance les Séphiroth, " qui ne sont pas, selon le kabbaliste Irira, des créatures à vrai dire (puisqu'elles servent à créer), mais des rayons de l'Infini, qui descendent de la Source Suprême, sans pourtant s'en séparer réellement…", avec les choeurs angéliques, il décrit ce que sont les Forces Energétiques, qui se subdivisent en Entités et en Egrégores.

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" Les Entités sont dénommées différemment selon les races, les religions et les époques. Dieux, déesses, séraphins, chérubins, archanges, anges, dévas, gandarvas, daïmones, génies, etc… et désignant des natures différentes dans le détail, mais unique quant au principe "… " Ces Entités sont des forces, des courants, pas autre chose. Nous les visualisons sous deux dimensions, mais ceci ne nous assure point qu'ils soient des êtres à deux dimensions…". Quant à l'Egrégore, c'est " une Force générée par un puissant courant spirituel et alimentée ensuite à intervalles réguliers, selon un rythme en harmonie avec la Vie Universelle du Cosmos, ou à une réunion d'Entités unies par un caractère commun… Instinctivement, le langage populaire donne à un égrégore le nom de "cercle", exprimant ainsi intuitivement l'idée de circuit. Entre la cellule constitutive et l'égrégore, c'est-à-dire entre l'affilié et le groupe, s'établit alors une sorte de circulation psychique intérieure "… Selon la tradition universelle, il y a trois sortes d'entités: la première appartient à ce que l'on appelle le monde surcéleste et l'angéologie catholique y classe les Séraphins, les Chérubins et les Trônes. Celle du second ordre est située dans le monde céleste. Les théologiens catholiques y classent les Dominations, les Puissances et les Vertus. Les Kabbalistes y voient simplement les Anges des sphères de Saturne, de Jupiter, de Mars, du Soleil, de Vénus, de Mercure et du monde lunaire. La troisième catégorie est celle des génies terrestres. Les théologiens catholiques y voient les trois derniers choeurs des Anges: les Principautés, les Archanges, les Anges "gardiens".Les philosophes hermétistes les ont répartis en quatre catégories, selon les quatre éléments (feu, air, eau, terre). Il ne faut pas voir en ces éléments les choses physiques auxquelles nous nous référons couramment, mais des essences symboliques, avec tout ce que l'analogie y sous-entend. XXX La question qui se pose maintenant est simple. Pour quelle raison les entités nommées dans le rituel maçonnique du 28ème degré (Chevalier du Soleil) portent-elles la désignation de Chérubins, alors que les théologiens catholiques et les occultistes les considèrent comme des Archanges ? Les Archanges sont considérés dans les religions comme étant les sept Officiers de la suprême volonté de Dieu, comme les Ambassadeurs chargés des messages importants. Certains occultistes (Cf. Michel de Saint-Martin) les associent aux sphères du système solaire, à l'encontre des Kabbalistes qui relient ces sphères aux entités du second ordre (Dominations, Puissances et Vertus). Les Chérubins sont des Esprits sublimes, des cerveaux d'omniscience, brillant par l'intelligence, la plénitude de science et de sagesse. Ils sont lucides et voyants. Témoins de la Grâce, ils excellent par le silence et se fortifient par la contemplation. Chérubim signifie : ministre du feu astral, puissance fécondante. Cherub équivaut à fort, puissant. Pour rappeler leur vigilance, les Chérubins sont dits pleins d'yeux. Au 28ème degré, nous dit Vuillaume, le maître a une robe rouge et un manteau de couleur aurore; il tient en la main un sceptre, peint en bleu, au bout duquel est un globe en or. Le Frère de la Vérité porte un bâton blanc, à l'extrêmité duquel est un oeil en or. Les chérubins portent un cordon blanc moiré, mis en sautoir. Sur la pointe du cordon est peint ou brodé un oeil. Le bijou est suspendu au cordon; c'est un triangle radieux, en or, au milieu duquel est un oeil…

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Ce grade est souvent dénommé "alchimique", notamment parce que son mot de passe est celui de l'antimoine. En fait, une phrase du rituel répond à la question que nous nous sommes posée : il y est dit que le candidat a " pénétré dans le Troisième Ciel, ce qui signifie (qu'il est) parvenu au lieu où réside la Pure Vérité depuis qu'Elle a abandonné la Terre aux monstres qui La persécutaient…". Ce Troisième Ciel est bien celui des Chérubins et l'initié se trouve effectivement rapproché de la Lumière. Certes, il lui aura fallu non seulement comprendre tous les symboles que l'Ordre lui aura fait rencontrer, mais aussi en appliquer les vertus correspondantes en sa vie maçonnique autant que profane. Les Sept Chérubins représentent en fait les sept métaux, c'est-à-dire l'or, l'argent, le cuivre, le fer, le plomb, l'étain et le mercure. Le candidat, au travers de ses différentes purifications, est passé de l'ombre terrestre échue aux hommes, à la quintessence des quatre éléments. Il y a rencontré l'égrégore des Entités terrestres (Premier Ciel). Raphaël le guidait. Puis il est passé au monde céleste (Deuxième Ciel) prenant conscience de l'Unité vers laquelle tendent tous les êtres et toutes les choses, y compris les sphères du système solaire (les Sept Planètes qui désignent les sept couleurs dans leur état originel alors que nous connaissons aussi bien des nuances composites).

Prenant conscience de l'Unité en laquelle se fondent ces sept couleurs pour se magnifier en Lumière Blanche, il est apte à passer au monde surcéleste (Troisième Ciel), celui où il prendra conscience que, de même que le plomb a la capacité d'être transformé en or, chaque homme a la possibilité de se transformer lui-même, et de devenir aux yeux des autres un rayon lumineux émanant de la Grande Lumière, indissolublement lié à Elle, un Instructeur ayant lui-même été instruit par Ceux de l'invisible. Que ce pouvoir est en lui, qu'il lui suffit de se maintenir "dans le Droit Chemin, la Justice et l'Equité". Le rayon lumineux que nous sommes en devenir doit, en plus de la clarté, apporter de la chaleur. "A quelle extrémité de misère faut-il se trouver acculé pour que, sur les mains, le visage, les yeux, les gestes, le corps sublimé, l'âme, évidemment se voie, comme issue de tous les membres, eux-mêmes évanouis ? " R. Guariento ( mort en 1378)

Cette phrase résonne au plus profond de quiconque s'est approché du Néant.

" Les étoiles elles-mêmes ont disparu l'une après l'autre, cédant la place à une brume sombre qui a dissous mes yeux et m'a plongé dans le silence d'une dernière nuit. Plus d'espoir de revoir se lever le jour. Seul le battement du coeur, comme des pas paisibles sur un chemin, sans fin et sans retour. Même les sons s'éteignent, filtrés par un voile d'ouate. Le martèlement des pas de ceux qui me recherchent trace au sol le cercle du Néant où je vais me dissoudre. En moi bruissent des sons, comme si des milliards de cellules s'interrogeaient entre elles, tentaient de rassembler leurs forces pour m'insuffler un ultime désir. Des légions d'anges tapis en moi depuis si longtemps, tissent maintenant des voiles de chaleur et m'emportent au milieu de clameurs sur l'arc aux sept couleurs. Près de moi un atome d'herbe me

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montre le chemin. Tant que je le verrai, mon esprit ne sera pas mêlé au sien. Je sens en moi le feu…du soleil ? de la vie ? Uriel me tend la main. Déjà mon esprit est mêlé au sien…Je suis Feu, je deviens Un au centre du Tout. "

Combien d'hommes ont attendu en vain la chaleur de l'Amour, un regard, un simple morceau de pain. A côté de combien de regards silencieux sommes-nous passés sans les voir ? Quelles souffrances avons-nous su apaiser ? La cohorte des anges est en chacun de nous, enfouie au plus profond de notre inconscient, et nous ne l'entendons pas tant que nous ne prenons pas conscience que nous sommes de tout temps reliés à elle.

Seul le véritable initié se sent participer à la fois du visible et de l'invisible. Seul il sait qu'en lui sommeille un égrégore d'anges. Seul il sait qu'il est vain de ne connaître les vertus s'il ne consacre sa vie à les mettre en pratique.

GH