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Anorexie et boulimie Guide à l’attention des parents

Anorexie et boulimie - Eki-Lib · ment ; ce qui suppose des nuances et des subtilités dans les réactions, les motivations, les pensées… même s’il existe des points communs

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Anorexie et boulimieGuide à l’attention des parents

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Table des matièresAvant-propos ......................................................................................................................5

Les maux de la faim ........................................................................................................8Anorexie et boulimie : des ressemblances ............................................................8Quelles causes aux troubles alimentaires ? ........................................................11

S’entendre sur les mots ................................................................................................13L’anorexie ..................................................................................................................13De quoi s’agit-il ? ......................................................................................................13Comment se fait le passage d’une alimentation courante à l’anorexie......................13Que se passe-t-il lorsque l’anorexie est installée ? ..................................................14Quelles sont les conséquences physiques ? ..........................................................17La boulimie ..............................................................................................................19De quoi s’agit-il ? ......................................................................................................19À propos des crises de boulimie ..............................................................................19Comment déceler la boulimie ? ................................................................................20Quel vécu intérieur ? ................................................................................................20Quelles sont les conséquences physiques ? ..........................................................21L’anorexie-boulimie ..................................................................................................23De quoi s’agit-il ? ......................................................................................................23Qu’éprouve la jeune fille ? ........................................................................................23Quelles sont les conséquences ? ............................................................................23

Et la famille dans tout ça ? ............................................................................................25Se focaliser sur l’alimentation ....................................................................................25Le temps est suspendu ............................................................................................25Tendance à manquer de souplesse ..........................................................................26Certains aspects de l’organisation familiale s’amplifient ..........................................26Un sentiment d’impuissance ......................................................................................27Les parents racontent ..............................................................................................28

Parents, que faire ? ........................................................................................................30Chercher un soutien ..................................................................................................30Gérer la peur et la culpabilité ....................................................................................31Cultiver la patience ....................................................................................................33Revoir la façon de communiquer ..............................................................................33Éviter de se prendre pour une victime ......................................................................35Rester en contact avec la vie ....................................................................................36Pas de guérison sans effort ......................................................................................36

Sur quelle aide compter ? ............................................................................................37Une aide pluridisciplinaire et professionnelle ............................................................37Le suivi médical et psychologique ............................................................................38Les hôpitaux, associations d’entraide, associations spécialisées ............................40

Elles vont mieux ! ..........................................................................................................45

Vous voulez en savoir plus ? ........................................................................................46

Cette brochure est une co-production de l’Union nationale des Mutualités Socialistes etdes Femmes Prévoyantes Socialistes.

Elle peut être obtenue gratuitement :

■ dans une permanence mutualiste■ auprès du département communication de l’Union nationale des Mutualités

Socialistes, rue Saint-Jean 32 - 1000 Bruxelles - Tél. : 02 515 05 59■ sur le site internet www.mutsoc.be

Éditeur responsable : Bernard DE BACKER Rue Saint-Jean, 32-38 - 1000 BruxellesRédaction : Josiane DE RIDDERCoordination et suivi de production : André NINANEMise en page : Héroufosse Communication

Nos plus vifs remerciements au Docteur Yves Simon (Le Domaine - ULB - Erasme) pour sesrelectures attentives, ses explications et le partage de son expérience. Merci aussi à Cécile Artus, psychologue auprès des FPS et du Centre de planning familialde Libramont, à Liliane Leroy, psychologue au service d’études des FPS, à Thierry Poucet,journaliste de santé publique à l’UNMS pour le suivi de cette publication, à l’associationMIATA et à Françoise Lievens, assistante sociale et fondatrice de l’asbl Anorévie, pour larelecture des textes, à Christiane Martin, psychologue et membre de l’asbl Infor Anorexie& Boulimie pour les informations données lors d’une interview.

Dépôt légal : D/2006/1222/04

AvertissementOn peut souffrir d’anorexie ou de boulimie à tout âge. Néanmoins, ce sontsurtout les adolescentes qui sont concernées, même si les garçons ne sontpas épargnés (ils représentent 10% des personnes souffrant d’un troublealimentaire).

Dès lors, et par souci de clarté, nous parlerons de jeunes filles, jeunesfemmes ou adolescentes. Les autres personnes, y compris les adolescents,seront donc implicitement désignées par ces termes.

Dans la même volonté de simplification, le terme «parent» est employéindifféremment au singulier et au pluriel, désignant par là tant la mèreque le père, le couple parental ou le parent isolé.

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Le premier chapitre concerne lespoints communs à l’anorexie et à laboulimie (page 8).

Il est suivi par un tour d’horizon dechaque trouble alimentaire (page 13).Pour chacun d’eux les différentsstades possibles sont évoqués. Cer-taines informations peuvent s’avérerpénibles à lire pour des parents enquestionnement et inquiets quant à lasanté de leur fille. Elles sont toutefoisindispensables pour vous aider àmieux comprendre ce qui se passe.

Dans le même ordre d’idées, voustrouverez ensuite des informations

sur ce qui se passe en général ausein d’une famille lorsqu’elle estconfrontée aux troubles alimentaires(page 25).

Après ce volet, vous trouverez despropositions de pistes pour réagir à lasituation, mieux gérer la relation, laculpabilité, trouver de l’aide…(page 30)

La brochure se termine par un cha-pitre consacré à l’aide médicale etpsychologique (page 37), ainsiqu’aux unités hospitalières et asso-ciations spécialisées dans les trou-bles de l’alimentation (page 40).

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Votre fille souffre d’anorexie ou deboulimie ? Vous en avez peut-êtrerepéré les premiers signes ? C’estbien à vous que s’adresse cettebrochure.

Vous vous sentez sûrement inquiet,anxieux, voire désemparé ou perdu.Impuissant face aux attitudes et auxcomportements de votre enfant, àson mutisme ou aux signes évidentsde son mal-être. Car il est fort pro-bable qu’elle nie tout problème etvous demande de ne pas vousinquiéter. Mais en attendant, vous nesavez que faire.

Nous allons tenter de dégager lesgrandes caractéristiques de ces trou-bles de l’alimentation qui, aux yeuxde la médecine et des sciences, res-tent complexes. Le nombre de fac-teurs dont ils dépendent invite à laprudence quant à leur interprétation.Il convient en tout cas, de ne pas fairetrop de généralités. Chaque adoles-cente a sa sensibilité et son tempéra-ment ; ce qui suppose des nuanceset des subtilités dans les réactions,les motivations, les pensées… même

s’il existe des points communs à cesmaladies.

L’objectif principal de cette brochureest de vous aider à mieux cerner lesenjeux des troubles de l’alimentation,à aller à la rencontre de votre fille, àvous mettre à son diapason. Vous nepourrez l’aider que si vous acceptezde ne pas tout comprendre et de nepas la juger. Dans la mesure du pos-sible, ne cherchez pas à tout prix àexpliquer, à interpréter ou à anticiperses réactions. Vous avez aussi voslimites et vous n’êtes pas obligé detout subir sous prétexte que votre filleest malade. Il est clair qu’à certainsmoments, vous devrez prendre desdécisions et faire respecter votrepoint de vue.

Le premier pas : reconnaître la maladiedont votre fille souffre et savoir qu’ellene se résume pas à une question denourriture ou de poids ; l’enjeu estplus personnel, directement lié à unefaçon de se vivre et à une difficulté des’accepter. Vous l’aurez compris,c’est au niveau subjectif que se situele problème.

Avant-propos

Le contenu de la brochure, en bref

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«Moi c’est après un régime que j’aisombré dans l’anorexie. Au début durégime, j’étais fière car j’arrivais àbien tenir (alors que mes copines,elles, craquaient). Je me privais sanstrop de mal. Enfin, je luttais tout aulong de la journée, mais j’aimais ça !Résister à la nourriture, ça me procu-rait une de ces joies ! Par contre, rienqu’à voir les autres manger, j’étaisécoeurée. Je me rendais bien comptequ’il était indispensable de manger,mais je n’arrivais plus à avaler quoique ce soit. C’est à ce moment-là quej’ai commencé à paniquer. Arriverais-je jamais à remanger ?»

Annie, 25 ans

«Je construisais ma vie à partir desrepas, de tout ce que j’allais mangerou pas manger. J’allais à l’école àvélo, j’étais en danseuse tout letemps et je pensais sans cesse auxkilos que j’allais perdre. À la maison,je courais dans les escaliers, je lesmontais et les descendais exprès à lamoindre occasion (j’allais prendre unlivre, puis je retournais pour un pull,puis pour un CD, tous les prétextesétaient bons). Je faisais tout dans unétat d’agitation intense.»

Catherine, 16 ans

«Je trouvais toujours plus maigre quemoi. J’ai eu 57 kg et à ce moment, jeme suis dit bon, je vais jusqu’à 52 kg.À ce stade, je me suis fixé la barredes 50 kg. Et puis j’allais tout letemps plus bas. Je regardais lesgens, dans la rue, à la télé, dans lesmagazines et je trouvais tout le tempsqu’ils avaient l’air plus maigre quemoi. Donc, je continuais.»

Élisabeth, 19 ans

«J’étais maigre comme un clou, maisje ne m’en rendais absolument pascompte. Du coup, je n’ai jamaismasqué ma maigreur avec des vête-ments larges par exemple. J’avais froidoui, mais je ne me couvrais pas davan-tage. J’en profitais au contraire pourobliger mon corps à brûler des calo-ries, pour maintenir sa température.»

Adeline, 16 ans

«Une amie a commencé un régime etc’est elle qui m’a appris ce que c’étaitque les calories par exemple. Ellesavait comment faire : les aliments àéliminer, les sports à pratiquer, ellem’apportait des magazines fémi-nins… C’est comme ça que je mesuis intéressée à tout cela et que j’aifinalement fait comme elle. Mais ellen’est jamais devenue anorexique…»

Géraldine, 15 ans

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«Un jour, la balance m’a renvoyé uneréalité que je fuyais depuis trop long-temps : 100 kg. Je pesais 100 kg.J’en ai chialé durant des heures. J’enétais arrivée là essentiellement pardes crises de boulimie. Régulière-ment, pendant une demi-heure aumoins, je mangeais (enfin quand jedis je mangeais, ce n’est pas juste, jem’empiffrais oui !) tout et n’importequoi : fromage, chips, ratatouille,jambon, pâté de foie… à m’en faireexploser la panse. Je ne me suis pasrendu compte de ce qui m’arrivait.C’est vrai que parfois j’étais perduedevant tout ce que j’avais à faire etcomme je ne savais pas par quoicommencer, je mangeais.»

Jeanne, 29 ans

«Dès que je me retrouve seule, je filedans ma chambre pour sortir mesréserves de nourriture de leurcachette (sous mon matelas, dans untiroir, derrière des livres…) et je mangejusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien. Jen’attends qu’une chose : que mamère parte et, en même temps, jesais que tant qu’elle est là, je suisprotégée, car je retarde la crise. Unefois seule, je n’arrive pas à m’arrêterde manger, je me goinfre ! C’est plusfort que moi, comme si quelqu’unavait pris possession de ma volonté.Ces crises sont programmées, jeconnais à l’avance les heures aux-quelles ma mère sera absente et jem’arrange pour avoir un stock denourriture suffisant.»

Chantal, 18 ans

«Il n’y avait pas d’heure pour lescrises, elles pouvaient survenir aussibien chez moi qu’en pleine rue. Com-bien de fois ne suis-je pas allée depâtisserie en pâtisserie pour mangerdes gâteaux ! Après, je me faisaisvomir. Personne n’a rien su pendantdes années. En fait, je menais unedouble vie. Je mangeais normale-ment aux repas et puis je me gavaisen cachette. J’étais mal, si mal. Je medétestais, je trouvais que j’exagéraiset pourtant je n’arrivais pas à dominermes envies de bouffe. C’est commesi j’étais sur un manège qui n’en finis-sait pas de tourner, impossible dem’échapper j’avais beau tirer sur lafloche, rien ne se passait.»

Marianne, 24 ans

«J’avais 18 ans lorsque tout a com-mencé. Quelques amies m’avaient ditqu’elles se faisaient vomir après lerepas. Je ne me suis pas renducompte de la gravité de cet acte et jel’ai fait. J’avais envie de maigriralors… Se faire vomir, c’était la solu-tion. Pendant des années, mêmeaprès mon mariage, j’ai oscillé entreboulimie et anorexie. Je maigrissaispuis grossissais. Je n’en ai jamaisparlé, j’avais bien trop honte de moi,de ma faiblesse ; je me dégoûtais.»

Éliane, 45 ans

Elles en parlent*

* Ndlr : les propos sont fidèles, les prénoms sont modifiés.

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Anorexie et boulimie :des ressemblancesL’anorexie et la boulimie sont commede fausses jumelles : intimement liéestout en étant différentes.

Considérées comme des maladiespsychosomatiques ou troubles psy-chiques (on parle aussi de «troublesdu comportement» ou «troubles ducomportement alimentaire»), toutesdeux débutent le plus souvent à l’ado-lescence (environ 95% des cas) etdurent en moyenne 3 à 4 ans, maisrarement moins d’un an. L’une et l’autrese caractérisent par l’incapacité derépondre au besoin fondamental de senourrir. Elles fragilisent la santé etencore bien d’autres aspects de l’exis-tence, plongent les adolescentes dansdes tourments intérieurs et des souf-frances intenses et les excluent petit àpetit de la vie familiale et sociale.

En relevant les aspects communs deces troubles, nous pourrons mieuxcomprendre les circonstances exté-rieures et intérieures qui favorisent leurémergence.

Au cœur des troubles,un besoin biologique fondamental Les adolescentes qui refusent demanger, tout comme celles qui n’arri-

vent pas à s’arrêter de manger, sonten fait dans l’impossibilité de faireconfiance à leurs sensations de faimet de satiété, et en cela, ne répondentpas à un besoin fondamental. C’est cequi, de prime abord, dérange et inter-pelle leur entourage proche et moinsproche : comment peut-on nier unbesoin essentiel pour l’équilibre de lavie ? C’est inadmissible et surtout, çafait peur ! Des jugements, principale-ment motivés par l’inquiétude, unréflexe de défense et une méconnais-sance du sujet, sont proférés sansaucune retenue, tantôt à l’égard de l’a-dolescente :«Tu n’es qu’une enfantgâtée et capricieuse !», «Tu manquesde volonté !», tantôt vis-à-vis desparents : «Si c’était ma fille, tu verraiscomme elle marcherait au pas !»Alors que rien, ici, n’est une questionde caprice. Nous sommes bel et bienen face de véritables troubles.

«Mais qu’est-ce qu’elle nous fait ? » C’est quelquefois la réaction desparents. Or, l’adolescente ne leur faitrien ! Souvent, même, elle s’en veutdu souci qu’elle leur cause. Elle n’apas choisi de vivre ce qui lui arrive etelle est la première à en souffrir. Elle abasculé dans la boulimie ou l’anorexiesans en avoir pleinement conscience.

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Les parents ne sont pas toujours lespremiers à se rendre compte de lasituationSi une adolescente peut s'enliser dansla maladie sans en être consciente, deleur côté, les parents ne perçoiventpas forcément ce qui se passe. Il y a en effet une période de dissimu-lation durant laquelle ils sont dans l’im-possibilité de déceler un quelconquesigne de la maladie. Ne s’apercevantde rien, ils adoptent parfois des com-portements inadéquats. Il arrive aussique des parents se vexent lorsqu’unproche ou une personne proche deleur enfant (un professeur, une éduca-trice, une voisine…) attire leur atten-tion sur un éventuel problème. Cetteréaction est due à un sentiment de cul-pabilité : «comment se fait-il que jen’ai rien vu alors que les autres s’ensont rendus compte ?», s’interrogentalors les parents.

Le manque de confiance en soi et la tendance au perfectionnismeSi beaucoup d’adolescentes disentqu’elles étaient déjà préoccupées parleur poids et leurs formes avant debasculer dans l’anorexie ou la bou-limie, certaines reconnaissent aussiqu’elles ne se sont jamais beaucoupaimées.

Ces troubles sont souvent l’expressiond’un manque d’estime de soi et d’unetendance au perfectionnisme. Si l’ado-lescente semble être calme, défier laterre entière ou n’en faire qu’à sa tête,dans le fond, elle n’est jamais sereine.Elle ressent plein de choses, les senti-

ments et les émotions s’entremêlent,mais elle ne sait pas comment enparler. La maladie va renforcer la dévalorisa-tion de soi puisqu’au fur et à mesurede son évolution, la jeune fille s’en veutde plus en plus, se durcit, se dégoûtemême.

Une voix négative et exigeanteDans son for intérieur, la jeune filleanorexique ou boulimique est divisée.Deux pensées et quelquefois deux« petites voix » s’affrontent constam-ment : l’une positive et l’autre négative.Peu à peu, c’est la voix négative quis’impose pour finalement prendre pos-session de l’adolescente et lui dicterce qu’elle doit faire. Terriblement des-tructrice, cette voix exige la perfectionet ne pardonne aucune faiblesse.

Toutes les adolescentes souffrant detroubles alimentaires sont habitées parce désir de perfection. La capacité d’yrépondre ou pas joue un rôle centraldans les deux maladies. Qu’elleséchouent ou réussissent, ce désir serenforce et finit par provoquer uneforte tension intérieure, chargée d’an-goisse, de honte, de culpabilité, cartoujours la voix négative revient : «Tupeux faire mieux : manger moins» ou,au contraire : «Allez bouffe, de toutefaçon tu ne vaux pas mieux, d’ailleurstu n’intéresses personne». Le travail de sape est soigneusementorchestré. Cette voix peu à peu lesentraîne sur des chemins pervers, où

Les maux de la faim

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elles commencent à avoir peur d’elles-mêmes, de leur propre colère ou vio-lence et de leur incapacité à résister àces pulsions destructrices.

Souffrir en silence«Plutôt me taire que faire de lapeine » : la majorité des adolescentesqui souffrent d’anorexie ou de boulimiepensent ainsi. Elles se sentent pour laplupart démunies face à ce qui leurarrive, n’ont pas les mots pour dire cequi leur fait mal. La voix négative lespousse aussi à se cacher des autres,à développer de multiples stratégiespour que personne ne remarque rien.Cela exige beaucoup d’efforts de leurpart et elles s’isolent chaque jour unpeu plus.

Le regard des autres et l’obsession de la minceurAutre point commun, une extrêmesensibilité à l’opinion d’autrui, auregard que portent les autres surelles. Une simple remarque comme«Tiens, tu as l’air fatiguée» peutprendre une connotation négative etrenforcer les blessures intérieuresd’une adolescente qui souffre d’ano-rexie ou de boulimie. Quelqu’un laregarde et elle croit tout de suite quec’est parce qu’elle est laide. Elle n’estplus du tout réaliste. D’ailleurs, biensouvent, elle ne se voit plus tellequ’elle est. Elle a d’elle-même uneimage déformée. Un complimentdans le genre «Comme tu as bonnemine» peut tout autant la perturber etavoir la même conséquence.

Des jeunes filles minces voire maigres,ou avec un poids normal se déclarentobèses. Elles sont dominées par lasensation d’être grosses. Elles ne peu-vent s’empêcher de contrôler leurpoids et leurs formes corporelles ;c’est plus fort qu’elles. Ces sensationsles conduisent à projeter sur le miroirune réalité déformée de leur sil-houette. Résultat : l’image est tout àfait tronquée et l’adolescente est dansl’impossibilité de se «regarder» toutsimplement et de se reconnaître.

La rupture avec l’entourageCette rupture survient en général à unstade avancé des troubles, lorsquepersonne n’a pu prendre la mesureexacte du problème. À ce moment, ladénutrition est déjà installée et sousl’emprise des pensées négatives,mais aussi pour éviter les confronta-tions et/ou les tentations, la jeune fillefinit par avoir peur de sortir. Elle peutalors éviter les contacts avec sescopines et ses amies. Elle cesse deparler à ses parents, frères et sœurs,évite les discussions, s’enferme danssa chambre. Bref, elle se coupe desautres et s’isole. Elle aimerait d’ailleursque personne ne la remarque. Parfois,elle souhaiterait même disparaître etsurtout ne pas faire souffrir les autres.En réalité, elle se sent coupable etlasse ; elle préférerait ne plus souffrir.La douleur est immense, la tristesseaussi. Elle ne veut pas mourir… sonproblème, c’est de ne plus savoircomment vivre.

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Quelles causes aux troubles alimentaires ?

Elles sont nombreuses et diffèrentselon les jeunes filles, leur cadre devie, leurs habitudes, leurs valeurs. Il nefaut jamais perdre de vue que chaqueadolescente est un être unique, avecson histoire, sa personnalité, sa sensi-bilité et sa manière de réagir aux évé-nements qui jalonnent son existence.

Du régime au stress en passant par le manquede respect de soiLes critiques sur le poids et les formescorporelles, la recherche de la minceurtant valorisée dans nos sociétés, lacroyance que pour être aimée il faut êtremince, peuvent conduire une adolescenteà entamer un régime qui sera ensuite àl’origine du trouble alimentaire. Toutefois,il en est rarement la seule cause.

Les troubles alimentaires découlentparfois, comme nous l’avons déjàévoqué, d’un mal-être qui sembles’être installé ; le doute rongeait déjàle cœur de ces jeunes adolescentes. Ilarrive aussi qu’elles ne se sentent pasà la hauteur des exigences de la vie.Elles ont alors l’impression qu’elles nepourront jamais répondre aux attentesdes autres ou aux attentes qu’ellesimaginent qu’ils ont. Un événement insécurisant, un stress,un échec, voire un manque de respect

psychologique ou physique de la per-sonne peut également favoriser lestroubles. Par exemple : un chagrind’amour, un voyage à l’étranger, unepériode d’examens, la fin d’une grandeamitié, le divorce ou la séparation desparents, le décès d’un proche, uneagression verbale ou physique… Par-fois, c’est en réaction à une prise depoids importante que la jeune fille selance dans de sévères restrictions ali-mentaires. Chez d’autres, c’est uneenvie de «clouer le bec» à tous ceuxqui depuis son enfance lui ont faitremarquer ses rondeurs (pas toujoursde façon sympathique d’ailleurs) quiles pousse au régime et les fait ensuiteentrer dans la maladie.

À l’heure actuelle, nous disposons demodèles de compréhension du phéno-mène. Toutefois, celui-ci reste complexevu le nombre de facteurs biologiques,environnementaux et situationnels qui ledéterminent. Des causes biologiquesont été mises en évidence et font l’objetde recherches importantes sans pourautant apporter, pour le moment dumoins, des pistes pour les traitements.

Ne pas se faire piéger à la première amélioration…Il arrive souvent que le troublecontinue alors que les facteurs quil’ont déclenché ont disparu. Noussommes ici en présence de pro-cessus qui s’installent dans la durée.C’est la raison pour laquelle lesparents ne doivent pas relâcher leurattention trop vite, ne pas se fier auxapparences et rester vigilants malgréquelques signes de guérison.

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La part de responsabilitéde la société et de la culture La pression sociale, les médias, laplace de l’alimentation dans lasociété, la surabondance de nourri-ture… jouent un rôle indéniable dansl’émergence des troubles alimen-taires.

On ne peut nier l’habileté aveclaquelle les médias et les milieux dela mode diffusent des messagescontraignants et contradictoires surl’idéal féminin et la séduction d’unepart, l’alimentation d’autre part. Lesarticles sur la diététique, les émis-sions télévisées et les campagnesorchestrées autour du phénomène del’obésité, les couvertures de maga-zines ne montrent que des corpsminces et sans formes auxquels il estimpossible de ressembler (hanchescreuses, côtes apparentes, photosretouchées le plus souvent par ordi-nateur, mannequins pesant 23% demoins que la femme moyenne1). Ils nedonnent la place qu’à un seul etunique canon de beauté auquel toutefemme doit correspondre si elle veutêtre dans le coup ou avoir la recon-naissance des autres. Ce diktat a dequoi perturber plus d’une adoles-cente qui, à la puberté, commencejustement à avoir des formes !

Autre paradoxe : l’industrie alimen-taire met continuellement sur lemarché de nouveaux aliments etvante leurs qualités à grands coups

de pub, tandis qu’en d’autres lieux(magazines féminins, presse santé,régimes amaigrissants…), cesmêmes aliments sont fustigés.

Dans une véritable cacophonie diété-tique, de nouveaux régimes fleuris-sent à chaque printemps. Fustigeanttour à tour les lipides, les glucides,les protéines, les combinaisons decertains aliments. Les injonctionsmédicales ou pseudo-médicalesorganisent différentes orthodoxies ali-mentaires. Ce ne sont plus les sensa-tions de faim et de satiété, de plaisirqui dictent les prises alimentaires.

De fausses croyances s’immiscentdans les têtes des adolescentes quiont déjà bien du mal à accepter leschangements de leur corps. Commentfaire pour rester mince, se deman-dent-elles ? « S’abstenir », répondentles unes. « Combler le vide et se fairevomir », disent les autres.

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L’anorexie

De quoi s’agit-il ?C’est refuser d’atteindre ou de main-tenir un poids normal pour l’âge et lataille.

Pour y arriver, l’adolescente se lancedans un combat contre la faim etmodifie ses habitudes alimentaires.Ces changements peuvent paraîtreanodins et ne se font pas en une fois.C’est plus subtil que cela. Il s’agit parexemple de sauter un repas, puis dene plus manger de corps gras (commele beurre et l’huile). Certaines jeunesfilles cessent ensuite de manger de laviande, ne supportent plus les saucesou les légumes cuits au beurre, puisvient le tour du sucre, des féculents, dupoisson…

Comment se fait le passage d’une alimentationcourante à l’anorexie ? On ne devient pas anorexique dujour au lendemain : le passaged’une alimentation normale à la pri-vation peut prendre des semaines,parfois des mois.

Cela commence souventpar un régime amaigrissantChez de nombreuses jeunes filles, ledébut de l’anorexie coïncide avecl’envie de perdre quelques kilos et de

correspondre aux standards corporelsvalorisés dans nos sociétés.Ce dernier entamé, chacune varéagir à sa façon. Voici quelquesréactions ou signes avant-coureursde l’anorexie.

Éprouver du plaisir

dans le contrôleCertaines adolescentes n’éprou-vent aucune difficulté particulièreà «tenir» le régime et trouvent lasensation de faim agréable. Éton-namment, elles aiment sentir leurventre vide, leur tête tourner, lesmaux d’estomac ne les font paschanger d’attitude. À la limite,cette douleur physique leur faitplaisir, tout comme le fait dedominer leur appétit.Un jour, elles ne se préoccupentd’ailleurs plus de suivre le régime,elles ne cherchent plus qu’unechose : avoir la mainmise surl’absorption de la nourriture.Quand elles y parviennent, elleséprouvent un sentiment de puis-sance et de fierté intense. Elles nepeuvent renforcer ces états qu’enmaintenant et en augmentant lesrestrictions. Bientôt, le désir decontrôle est plus fort que tout.

S’entendre sur les mots

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1 http://www.cwhn.ca/ressources/faq/biMedia_f.html

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La pensée de la nourrituredevient obsédanteDe nombreuses recherches ontdémontré qu’une des consé-quences de la privation de nourri-ture est l’apparition de penséesalimentaires obsédantes. Plus lajeune fille restreint son alimenta-tion et perd du poids, plus elle estpréoccupée par son alimentation.

Elle s’impose un régime tropastreignant puis craque et se jettesur un paquet de biscuits parexemple. Mais dès qu’elle l’aavalé, elle s’en veut et se prometde ne plus faillir. Résultat : elleaugmente les restrictions, se ver-rouille encore un peu plus etmange de moins en moins. Aubout du compte, le régime s’éter-nise et la volonté de maigrir prendde plus en plus de place dans satête et dans sa vie. Chez cer-taines jeunes filles, l’obsession dela nourriture occupe plus de 70 %des pensées.

La jeune fille bascule dans ledéséquilibre alimentaire totalEt elle ne s’en est même pasrendu compte. Les restrictionssont devenues tellement sévèresque son assiette ne comporteplus, par exemple, que du yaourtet une biscotte. Certaines adoles-centes se limiteront aux tomateset à l’eau ! Résultat : le nombrede calories est insuffisant, lesbesoins en protéines et féculents

ne sont plus couverts.L’adolescente devient terrible-ment exigeante vis-à-vis d’elle-même. Les pensées et voix néga-tives triomphent et l’amènent ànier toute sensation de faim à unpoint tel qu’elle arrive à ne plus laressentir. Finalement, le fait demanger est devenu la sourced’une énorme angoisse.

Où est la frontière entre l’anorexieet le régime amaigrissant ?Faire régime, c’est se priver sélective-ment de certains aliments et/ou en res-treindre les quantités, tandis que l’ano-rexie consiste à s’en priver de manièreexcessive. De même, l’anorexiquesupprime de plus en plus d’alimentsde son assiette au détriment de l’équi-libre alimentaire, tandis qu’un régimerecommandable repose nécessaire-ment sur un équilibre nutritionnel.

Suivre un régime, c’est vouloir perdrequelques kilos pour être un peu plusmince, se sentir plus jolie, espérer êtreplus séduisante. L‘anorexie est unesouffrance, les adolescentes éprou-vent un malaise corporel qui persistemalgré la perte de poids. Leur com-portement est radical.

Que se passe-t-il lorsquel’anorexie est installée ? La rupture avec les habitudes alimen-taires antérieures est nette. Les res-trictions se rationalisent, s’intensifient.L’adolescente panique pour un kilopris, elle se pèse de plus en plus sou-vent (deux, trois, voire six fois par jour).

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Elle est sans cesse à la recherche derecettes pour maigrir. La nourriture etles calories sont désormais obsédan-tes. Parallèlement, l’adolescente selance dans des activités physiquesou intellectuelles intenses.

Distorsion de l’image du corpsElle ne se voit pas maigre. En fait, elleest incapable d’être objective ; lavoix négative brouille les pistes etcrée un décalage entre l’image réellede son corps (celle qui est reflétéedans le miroir) et l’image émotionnelle(celle qu’elle ressent physiquement).

ClandestinitéElle ne manque pas d’argumentspour échapper aux repas familiaux :avoir déjà mangé sur le chemin duretour, avoir étudié chez son amie oùelle a dîné avec la famille, être un peudérangée... Elle reste discrète et estsuffisamment débrouillarde pour quepersonne n’y voie rien. Elle estpassée maître dans l’art de noyer lepoisson et d’envoyer ses proches surde fausses pistes. Et ce, même s’ilsont remarqué sa perte de poids etqu’ils l’encouragent à manger. Elleemporte par exemple la nourrituredisant qu’elle la mangera plus tard ;parfois, elle cache la nourriture dansune serviette de table ou tout autreobjet qui lui permet de la dissimuler.Tout plutôt que manger !

De nouvelles habitudes alimentairesLa pensée obsédante de la nourriturel’angoisse. Alors, pour se rassurer,elle s’impose des règles alimentairesqui deviennent de véritables rituels :manger la même chose au mêmemoment chaque jour, ne pasdépasser la ration prévue (sinon ellese punit et se prive davantage denourriture, s’accuse d’être gour-mande), découper la nourriture entout petits morceaux (même si celaprend un temps fou), mastiquer 77fois la nourriture avant de l’avaler,manger uniquement dans desassiettes blanches… Si elle ne peutrespecter ces rituels, l’anxiété aug-mente.

Exclusion de la vie socialeLa vie avec les autres peut se main-tenir un certain temps, puis elledevient impossible. Dans sa tête, lajeune fille navigue continuellemententre son besoin biologique demanger et la peur d’y céder. Celacrée une tension intense et épuisantequi lui prend toute son énergie et toutson temps. Elle cherche à se pro-téger du regard des autres et s’isole.Figée par ses obsessions, elle s’em-pêche de vivre des expériences posi-tives et passe à côté de pas mal deplaisirs de la vie.

Activités physiques en excèsIl faut brûler les graisses par tous lesmoyens ! Du coup, même si elle n’a

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presque plus de muscles, la jeunefille pratique un sport à outrance, faitsans ménagement des exercicesphysiques : faire 100 pompes quatrefois par jour, courir chaque jour 10km, rouler à vélo en choisissant unparcours truffé de difficultés (mon-tées, virages), marcher des heuresdurant… Comme elle ne veut pas queson entourage apprenne quoi que cesoit, elle fait tout cela en cachette,parfois même en pleine nuit.

Ne plus rien s’octroyerLe besoin de contrôle commence às’étendre à d’autres aspects de sonexistence, comme le sommeil et lesactivités quotidiennes. Elle s’accusepar exemple de paresse dès qu’elledort un peu trop à son goût. Elleréduit au strict minimum les activitésqu’elle trouve agréables et qui lui fontdu bien : prendre un bain, jouer dupiano, surfer sur Internet, regarder unfilm, lire… La privation est aussi finan-cière : l’anorexique donne facilementde l’argent à ses proches, fait descadeaux, mais elle ne veut riendépenser pour elle, elle croit durcomme fer qu’elle ne le mérite pas.

Au bout du compte, elle ne s’autoriseplus rien. Elle est dominée par sa voixnégative qui lui rappelle sans cessequ’elle est égoïste, faible, médiocre.L’amour de soi est balayé. Les res-trictions alimentaires, le surcroît dedépenses d’énergie, le manque desommeil, la sensation de froid et latension intérieure finissent par provo-quer l’épuisement.

À propos de l’habillement et de lasensation de froid…Certaines jeunes filles essayent demasquer leur maigreur en portant desvêtements amples. Mais toutes ne secamouflent pas, pour la simple raisonqu’elles n’ont pas toutes conscienced’être maigres.

Par contre, elles ont quasi toutes et toutle temps froid (leurs pieds et mainssont glacés, leur tension est basse). Iciencore, leur réaction diffère. Les unesmettent plusieurs couches de vête-ments (pantalon, robe, t-shirt, pull…)pour essayer de se réchauffer ; d’au-tres refusent de se couvrir dans le butde faire travailler leur corps qui, pourmaintenir sa température, est obligéde brûler ces calories qui les hantent.

Au-dessus de la mêléeAlors que tout le monde autour d’elledésespère de la voir fondre, luttecontre le fossé qui s’installe, s’exaspè-re ou se met en colère, se sent impuis-sant, panique de la voir mourir…, elleest la plupart du temps d’un calmeolympien, du moins extérieurement,comme si elle ne vivait pas sur lamême planète, comme si elle regar-dait le monde de haut. La dénutrition

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l’empêche de penser juste : elle nemesure plus les risques qu’elle prendet ne se rend pas compte qu’elle metsa vie en péril. Les autres qui s’énervent n’ont riencompris, se dit-elle. À quoi cela sert-il de manger ? De se reposer ? Deparler ? D’ailleurs, la voix négative lafélicite : c’est bien, tu y es presque,prive-toi encore de … Elle rêve d’être un pur esprit débar-rassé de son corps. Elle ne se laissepas mourir (il est en effet rare qu’unejeune anorexique le souhaite vrai-ment), mais elle laisse le processusde dénutrition se poursuivre. C’estgénéralement à ce moment qu’elleest conduite aux urgences dans unétat grave.

Ne plus rien ressentir En se privant de nourriture, la jeunefille perd du poids. Cette perte vaentraîner une diminution des réactionsémotionnelles. Ainsi, la jeune adoles-cente peut en arriver à ne plus rienressentir intérieurement. Elle se coupede ses émotions et de ses sentiments.Or, les émotions sont indispensablespour prendre de bonnes décisions etnous permettre de nous adapter ànotre environnement. Cette fractureintérieure pourrait expliquer certainscomportements ou certaines réac-tions d’une jeune fille anorexique,comme le fait qu’elle ne se fatiguepas, qu’elle semble indifférente à lasouffrance (celle des autres toutcomme la sienne) ou encore qu’ellene comprenne pas les réactions(inquiétude, peur, angoisse…) de sesparents.

À des degrés divers …La plupart des jeunes filles ne mani-festent que modérément certainsaspects de la maladie, ce qui ne lesempêche pas de souffrir. Parexemple, certaines vont maigrir de 7kilos en 3 mois et continuer à setrouver grosses et laides ; après unrégime, d’autres deviennent végéta-riennes et refusent de manger lemoindre aliment gras ; d’autresencore ne cessent de se peser et devouloir maigrir…

Dans ces cas, l’anorexie n’est pas for-cément diagnostiquée par unmédecin, mais elle en est peut-être àses débuts ou alors elle est partielle.Les risques à long terme doivent tou-tefois être pris en considération. Lecomportement alimentaire de l’ado-lescente doit attirer l’attention desparents et ne pas être banalisé. Uneaide pour les parents peut s’avérerutile déjà à ce stade. Il vaut quandmême mieux consulter dès le débutd’une perte de poids anormale.

Une anorexie traitée dès le début sesoigne plus facilement qu’une ano-rexie qui sévit depuis des moisavec une perte de poids importante.Une fois les obsessions et les pho-bies installées, le combat à livrerest nettement plus ardu.

Quelles sont les conséquences physiques ?En dessous d’un certain poids, lesrègles disparaissent. La perte de poidsentraîne en effet une diminution de lamasse adipeuse où sont stockées leshormones (oestrogènes) nécessaires àdes règles régulières. Outre l’arrêt des

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règles et la disparition du désir sexuel,le faible taux d’œstrogènes affecteégalement la densité osseuse etaccroît le risque d’ostéoporose.

La dénutrition agit aussi sur l’appareildigestif : l’estomac, l’intestin secontractent moins bien et le ventreballonne. La constipation s’installe.La jeune fille peut souffrir de crampesabdominales violentes.

C’est en général un proche qui s’attaqueau problème car la situation devient inte-nable. Ou alors, c’est une discussionavec une amie qui déclenche le réveil del’adolescente… La lecture d’un article oud’un livre, une émission TV, un film… lavie quotidienne regorge de signes quipourraient éveiller sa conscience.

Un médecin évidemment peut attirer sonattention lors d’une consultation pour unrégime ou à la demande de la famille etl’aider dans le processus de prise deconscience, mais aussi un(e) assis-tant(e) social(e), un(e) psychologue, unprofesseur, un éducateur, une éduca-trice, etc.

Aux stades avancés de la maladie,viennent les chutes de tension, lesévanouissements, l’affaiblissementdu rythme cardiaque, la mauvaise cir-culation, la perte de cheveux, l’abais-sement de la température du corps…La peau devient terne, sèche, lesjoues se creusent. Un fin duvetrecouvre le corps et le visage. Lajeune fille s’épuise.

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La boulimie

De quoi s’agit-il ?Il s’agit de crises durant lesquellesl’adolescente, tout aussi obnubiléepar la minceur que la jeune fille ano-rexique, dévore de manière anar-chique des aliments, en grandesquantités et dans un laps de tempsextrêmement court.

Par ailleurs, elle peut chercher àcontrôler son poids (donc à ne pasgrossir) par des périodes de régime,le sport et, chez un bon nombre, parles vomissements ou l’abus de laxa-tifs ou de diurétiques. Elle se ditqu’elle peut manger beaucoup puis-qu’en vomissant elle ne garde rien.Mais après, elle se sent sale et hon-teuse. La voix négative l’insulte :«T’es qu’une cochonne…». C’estaussi sa honte qu’elle vomit.

Cette maladie peut être une réac-tion à une précédente phase derestriction alimentaire.

À propos des crises de boulimie À un certain moment, ça craque enelle… Sans qu’elle y comprenne for-cément quelque chose, elle seretrouve à ingurgiter en cachette degrandes quantités de nourriture.Nombre de jeunes filles ont leurs ali-ments favoris, chips ou biscuits, quine demandent aucune préparation etsont faciles à manger. Mais dans la

frénésie du moment, certaines ava-lent des choses aussi peu appétis-santes que des restes avariés, desspaghettis crus, des boîtes de cas-soulet non réchauffé, etc. Sur le coup, l’adolescente est sou-lagée. Les remords, le dégoût neviennent que plus tard, parfoisaccompagnés par les vomissements.Ensuite, elle se pèse, prend lamesure de sa taille, de ses cuisses,de ses bras…, les angoisses revien-nent et à nouveau il faut tenir… jus-qu’à la prochaine fois où elle se sen-tira obligée de passer à nouveau parcette crise. Si elle ne la fait pas, ellese retrouve en situation de manque etsombre dans la détresse.

Les moments de crisesLe rituel mis en place par rapport auxcrises est différent pour chaque ado-lescente. Chez certaines, les crisessont incontrôlées et peuvent se pro-duire à n’importe quelle heure du jouret de la nuit. C’est l’anarchie totale.D’autres les programment à l’avance,y pensent dès le matin et tiennentjusqu’au soir. Dans ce cas précis, laculpabilité sera tout aussi intenseaprès la crise.

La boulimie n’a rien à voir avec… ■ Le grignotage qui consiste à

manger de petites quantités de nour-riture. Qui ne l’a jamais fait en regar-dant la télévision par exemple ? Ici,les aliments sont choisis et aimés. Leplaisir est évident, même si la per-sonne a aussi l’impression de ne paspouvoir s’empêcher de grignoter.

Qu’est-ce qui peut déclencher la prise de conscience ?

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■ La fringale qui est une faim impé-rieuse due à un manque de glucose(sucre).

■ La gourmandise est toujours asso-ciée au plaisir, il s’agit d’une fête,d’une joie, d’un régal…

… alors que la jeune femme atteintede boulimie est loin d’éprouver lemoindre plaisir, au contraire, ellesouffre profondément.

Comment déceler la boulimie ? En apparence, tout semblealler pour le mieuxLes adolescentes qui souffrent deboulimie sont souvent souriantes, gen-tilles, un rien passives, parfois un peuextravagantes, mais rien de très per-turbant. Elles semblent en phase avecla réalité, vont à l’école, mangent avectout le monde à table. Côté poids, toutparaît également normal si elle est decelles qui se font vomir. Étant donnéces apparences trompeuses, c’est untrouble difficile à déceler.

Quelques indicesDe la nourriture disparaît du frigo etdes armoires. On découvre desrestes cachés sous son lit, dans lestiroirs de son bureau, au fond de sonbac à linge… Comme une fourmi, ellefait ses réserves en prévision descrises pour ne pas se retrouver sansrien et devoir affronter l’angoisse. Si la jeune fille prend des laxatifs, ontrouve parfois des boîtes de médica-ments dans sa poubelle.

Quand elle mange, elle le fait de plusen plus vite et donne l’impression dene pas pouvoir s’arrêter. Il est possiblequ’elle quitte très vite la table pouraller aux toilettes ou s’enfermer dansla salle de bain. Certaines s’aspergentde parfum pour noyer les éventuellesodeurs qui pourraient les trahir.

Au niveau de leur comportement et,si l’on y regarde de plus près, il appa-raît qu’elles ne sont pas si présentesque ça, qu’elles manquent d’élan oubien qu’elles agissent comme desautomates. On dirait parfois qu’ellessont retranchées du monde. En fait,dans leur for intérieur, elles sont entrain de faire des efforts considéra-bles pour être à la hauteur et suivreleurs bonnes résolutions.

À un stade déjà avancéQuand les crises sont bien instal-lées, le comportement de l’ado-lescente peut devenir étrange.Côté alimentation, elle devient deplus en plus imprévisible ; tantôtelle dévore, tantôt elle récupèrede ses excès. La même instabilitérègne au niveau de l’humeur et lajeune fille a tendance à être irri-table et dépressive. Elle ne dortpas bien. La honte s’incruste enelle, le dégoût aussi, mais elle apeur de renoncer, car elle croitqu’elle deviendrait énorme.

Quel vécu intérieur ? La boulimie est une souffrance, maisune souffrance cachée. La vie de l’a-

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dolescente est minée par le men-songe, la peur, la haine de soi.Elle se sent prisonnière de penséesintérieures négatives qui la dévalori-sent sans cesse et qui sont d’une exi-gence terrible.

Perte de contrôle et besoin de sécuritéL’adolescente a l’impression de nepas pouvoir s’arrêter de manger et, àl’inverse de l’anorexique, de perdretout contrôle sur la nourriture (choixdes aliments, quantité…). Elle mangesans faim et sans plaisir. Elle a honted’elle-même et se sent coupable. Ellele cache, mais au fond, elle souhaitequ’on l’aide. Tout comme l’anorexique, son com-portement cache un mal être qui nepeut s’exprimer autrement. Au moins,pendant qu’elle mange, elle n’ypense plus ! Elle se remplit pour seprotéger, ne plus sentir.

Poids et silhouette dominentElle accorde une importance déme-surée à son poids et à sa silhouette.Ce sont eux qui déterminent l’estimequ’elle aura pour sa personne. C’estun comportement fréquent à l’adoles-cence, mais dans ce cas il devientproblématique.

La jeune fille ne pense qu’à ça, sepèse et se mesure constamment. Ellene voit plus son corps en entier, maiselle le regarde par morceau : elle sefocalise sur la cellulite des cuisses, la

petite rondeur du ventre, la tailleinsuffisamment marquée et les brasou le visage trop ronds à son goût. Elle ne veut pas aller à la piscine(jamais elle n’oserait se mettre enmaillot de bain), encore moins semontrer nue…. Quand elle se regardedans un miroir, elle se sent grosse.Elle n’y voit qu’une image en formede reproche.

L’opinion des autres est plus importanteLe regard des autres, leurs opinionssont essentiels pour ces jeunes filles.Dans leur tête se bouscule une mul-titude d’obligations (« il faut », « jedois », etc.) qui les encombrent touten leur servant de repères, car, la plu-part du temps, elles se sententmédiocres et méprisables.Elles ont peur de ce qu’elles sont, demontrer quelque chose d’elles. Qu’est-ce que les autres vont penser ? Cettequestion ne les quitte jamais. Leurpiètre estime d’elles-mêmes les rendincapables de voir, de recevoir lesmarques d’estime et d’affection oualors, elles n’y croient pas.

Quelles sont les conséquences physiques ?Tout comme l’anorexie, les consé-quences peuvent être dommagea-bles pour la santé. Troubles digestifs,tachycardie, chutes de tension…sont des symptômes fréquemmentobservés.

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Les conséquences de la prise de laxatifsPour perdre des calories ou se puri-fier, certaines adolescentes bouli-miques abusent de laxatifs (lesdépassements de posologie sonthabituels). Les intestins sont évidemmentatteints. Non seulement, la jeune fillesouffre de crampes abdominales,mais également de diarrhée (son étatl’empêche parfois de quitter lamaison et de poursuivre ses activitésquotidiennes). L’abus de laxatifs pro-voque en outre une déshydratation,des ballonnements et accentue laperte de potassium.

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L’anorexie-boulimie

De quoi s’agit-il ? L’alternance entre l’anorexie et laboulimie concerne, en général, lesadolescentes qui se sont engagéesdans un régime de restriction alimen-taire et souffrent d’anorexie partielleou franche. D’autres, plus insidieuse-ment, ont trouvé dans les vomisse-ments une façon de pouvoir mangersans prendre de poids et se retro-uvent piégées lorsqu’elles se rendentcompte plus tard qu’elles ne peuventplus s’arrêter de manger et de vomir.

Elles font de véritables crises de bou-limie qu’elles regrettent aussitôt, nepensant plus qu’à une chose : éli-miner. Comme beaucoup d’ano-rexiques, elles peuvent aussi selancer dans la pratique d’une activitéphysique intense ou se dépensersans compter (marcher des kilomè-tres, faire des longueurs et des lon-gueurs à la piscine). Concrètement,elles alternent des périodes où ellesne mangent rien avec des momentsoù elles perdent totalement lecontrôle de ce qu’elles ingurgitent.

Par exemple : elles n’avalent rien dela journée et, le soir venu, elles cra-quent soudainement et mangent toutce qui leur tombe sous la main sanspouvoir s’arrêter. Puis, elles se fontvomir ou elles se purgent (prise delaxatifs, de diurétiques).

Que ressentent ces adolescentes ? La même chose qu’une adolescenteanorexique. C’est le même étatd’esprit, le même mal-être. Sauf quedans leur processus de privation,elles n’ont pas tenu jusqu’au bout ets’en veulent terriblement. Le pire pourelles, c’est d’avoir mangé, donc d’a-voir perdu le contrôle ! Elles se détes-tent encore plus.

Elles aimeraient ne jamais ressentir lafaim, mais elles sont incapables denier totalement ce besoin. Lors-qu’elles craquent, c’est tout leur sys-tème de «contrôle» qui faiblit. Ellespeuvent en éprouver une profonde tri-stesse, s’enfoncer dans la déprime,avoir envie de mourir et parfois tenterle suicide.

Quelles conséquences ?C’est probablement le trouble alimen-taire le plus pernicieux et le plusmenaçant pour la vie de l’adoles-cente. Car de toute évidence, ellesubit les conséquences des deuxmaladies. À la fois la sous-alimenta-tion et la suralimentation momen-tanée auxquelles s’ajoutent souventl’évacuation forcée de la nourriture(vomissement, purge, diurétique…).Cela demande au corps des effortsconsidérables, surtout s’il n’a plusaucune réserve !

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ts Les séquelles dues aux vomissementsVomir signifie rejeter ce qu’il y a dansl’estomac, ce qui correspond souventau tiers du repas, mais aussi à uneperte de potassium et d’eau. Cespertes peuvent conduire à des trou-bles du rythme cardiaque et à desproblèmes rénaux. Les matières vomies contiennentégalement de l’acide qui attaque l’é-mail des dents. Les vomissementsstimulent les glandes salivaires (sousles oreilles et la mâchoire) et provo-quent à la longue leur gonflement. Enoutre, à force de provoquer les vomis-sements, les adolescentes se bles-sent l’œsophage, certaines saignentde la gorge, ce qui est extrêmementdouloureux.

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Ils s’avèrent souvent plus ardus à dia-gnostiquer à cet âge étant donné quel’évaluation des critères de poids et desrègles est moins évidente. Ceci étant, chez la toute jeune adoles-cente, ils peuvent se manifester à tra-vers la peur d’étouffer, d’être conta-minée par les aliments ou de manger

La maladie est difficilement identifiablequand elle en est à ses débuts, quandelle est de faible ou de moyenne inten-sité et quand votre fille n’estime pasavoir un problème alimentaire.

Voici quelques repères qui devraientvous aider à y voir plus clair :

votre fille■ évite les repas ;■ mange lentement en fractionnant la

nourriture ;■ mange en secret ;

des aliments mauvais pour la santé.Certaines ont également peur desvomissements. La dénutrition est plusrapide que chez l’adolescente plusâgée ou l’adulte même si la perte depoids est moins sévère. Il faut y êtreattentif.

■ prépare des repas pour la famille, maisne les mange pas ;

■ nie faire un régime ;■ pratique beaucoup d’exercices phy-

siques tous les jours ;■ vide le réfrigérateur après une période

de restriction alimentaire sévère ;■ quitte la table immédiatement après le

repas, souvent pour aller vomir encachette ;

■ évite les repas pris en commun ;■ mange des aliments peu caloriques ;■ travaille excessivement pour l’école.

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Chaque famille fonctionne selon unedynamique et une organisation qui luisont propres ; chaque famille a sescodes, ses règles, ses côtés rassu-rants et ceux qui le sont moins. Si toutn’y est pas toujours rose, il y règne engénéral un modus vivendi, un équi-libre qui permet à chaque membre des’adapter aux changements, (quandils sont nécessaires), de trouver saplace au sein du groupe.

Les troubles alimentaires menacentcet équilibre, surtout lorsqu’ils sontgraves et qu’ils persistent. Dans leursillage, ils entraînent alors stress,conflits, angoisses, culpabilité… Lesréactions des membres de la familledépendent en grande partie de sesmodes de fonctionnement. Cela dit,le bouleversement produit a presquetoujours des conséquences (à desdegrés divers) sur les relations et surl’organisation de la famille.

Pour vous aider à mieux cerner ce quise passe chez vous, voici un aperçude ces conséquences.

Se focaliser sur l’alimentation Au fil de la maladie, les aliments ontpris une place essentielle dans les pen-sées (et les préoccupations) de votrefille. À un point tel que le problème a finipar déteindre sur toute la famille. En effet, les relations familiales, elles

aussi, se sont progressivement focali-sées et définies autour de la questionde l’alimentation. Dans certainesfamilles, on en arrive même à ce que laqualité des relations soit évaluée enfonction de cette question. La plupartdes échanges ou interactions entre lesmembres de la famille se centrent alorssur la nourriture, la façon de manger etle poids.

Dans le cas de l’anorexie, cette foca-lisation est difficilement contournabledans la mesure où la jeune fille jugesa valeur personnelle sur sa capacitéde résister à manger. Du coup, sesrelations dans la famille tournent prin-cipalement autour de la nourriture.D’ailleurs, ses remarques en disentlong : «si vous me compreniez, vousne me forceriez pas à manger».

Le temps est suspenduL’anxiété engendrée par un problèmemenaçant la vie ainsi que l’intensitédes interactions à propos de la nour-riture (qui occupent une bonne partiede la journée), amènent graduelle-ment la famille à se centrer unique-ment sur « l’ici et maintenant ». Cequi se passera au prochain repas,voire à la prochaine bouchée, revêtune importance considérable. Lespréoccupations intenses pour le pré-sent rendent par ailleurs accablantchaque échec au cours d’un repas.

Les troubles de l’alimentation de l’enfance et du début de l’adolescence

En bref : les premiers signes de l’anorexie et de la boulimie

Et la famille dans tout ça ?

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Tendance à manquer de souplesse Le manque de souplesse dans lemode de fonctionnement de la famillea été mis en avant dans de nom-breuses études, mais aussi par lespsychologues qui rencontrent lesfamilles.

L’anorexie ou la boulimie chez uneadolescente demande souvent auxfamilles de sortir de la routine quoti-dienne. Or, cela fait peur ! Figée,anxieuse, la famille s’accroche la plu-part du temps à ses modes de fonc-tionnement, et ce, même si elle serend compte que cela ne va pas for-cément marcher. En réalité, elle craintque le fait d’agir différemment puissebouleverser davantage la situation.

Certes, la flexibilité est nécessaireparce qu’elle permet de faire faceaux changements inhérents aux diffé-rents cycles de la vie. Toutefois lemanque de flexibilité n’est pas forcé-ment la cause du trouble alimentairede l’adolescente et n’est pas d’officeà l’origine de son développement. Larigidité peut par ailleurs constituerune réponse de la famille face audéséquilibre.

Certains aspects de l’organisation familiales’amplifientLe partage des tâches éducatives etdes rôles parentaux est encore très

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inégal et stéréotypé dans de nom-breuses familles. Très souvent lamère a une relation plus proche etcommunicative, l’autre parent jouantdavantage un rôle en périphérie. Lorsque qu’une maladie menace lavie d’un des enfants ces positionspeuvent s’intensifier. Par exemple, lamère surinvestit le problème alimen-taire et le père évite de rentrer enconflit avec sa fille. Avec le temps,ces comportements peuvent êtreconsidérés comme faisant partie duproblème. Les parents vont devoirredistribuer les responsabilités etfaire alliance pour s’engager dans lalutte contre la maladie.

La relation de couple peut être pertubéeLa peur, la culpabilité, l’impuissancepeuvent amener des tensions au seindu couple, allant d’une mise à dis-tance à une tension jusqu’auxdisputes ou à l’hostilité. Ici encorecela ne signifie pas que ce soit larelation du couple qui soit à l’originedu trouble chez l’enfant.

Il arrive que certains couples sedésunissent à ce moment-là. Si celase produit dans un contexte d’inquié-tude à propos de la maladie de leurfille, ils pensent que c’est à leursrelations insuffisamment bonnes qu’ilfaut attribuer les troubles de leurenfant. Dans ce cas, il arrive que ladistance entre l’homme et la femmes’accentue.

Autre cas de figure : l’adolescentepeut prendre part dans les disputesdu couple et, dans ce cas, il arriveque le problème alimentaire joue unrôle de médiateur et empêche parfoisles parents de se séparer.

Si le couple se disputait déjà avant ledébut de la maladie, il est tentant del’en rendre responsable. Pas forcé-ment à raison ! Il est en tout cas sou-vent faux de croire que seule la thé-rapie de couple pourra résoudre leproblème alimentaire de l’adolescente.

Un sentiment d’impuissanceLes familles se sentent invariable-ment impuissantes et désespérées.Nous l’avons vu, le contrôle tient uneplace importante dans les troublesalimentaires. L’adolescente ano-rexique a le sentiment que c’est seu-lement en ne mangeant pas qu’ellepeut contrôler sa vie. La jeune filleboulimique a le sentiment de ne pluscontrôler grand-chose… Les parentseux s’engagent bien souvent dans uncombat pour le contrôle de l’alimenta-tion et peu à peu, ils en arrivent àpenser qu’ils ont perdu le contrôle surtout, même sur leur propre vie.

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«Une étape importante : accepterqu’il s’agit d’une maladie. Et que fait-on quand on est malade ? On va voirle médecin et aussi le médecin spé-cialisé de la maladie qui nous atteint.»

Pascale, 42 ans

«Quand j’ai pu reconnaître que ma filleétait malade, j’ai aussi pu en parlerlibrement et calmement dans la famille,avec des amis. Ce qui nous a aussigrandement aidés, c’est d’avoir étéaccompagnés par un médecin spécia-lisé dans les troubles alimentaires. Si jedevais donner un conseil aux parents,c’est de ne pas se décourager. En fait,les choses s’arrangent petit à petitquand on commence à en parler et àchercher de l’aide.

Jacques, 48 ans

«Nous voyions notre fille perdue,angoissée, souffrante sans rien ycomprendre. Nous n’arrivions mêmepas à concevoir qu’il s’agissait d’unemaladie et à vivre avec cette idée.Tout est allé mieux dès qu’on a mieuxcompris ce que représentait cettemaladie. Cela nous a permis d’a-dapter nos comportements, d’êtreplus souples. Nous nous sommesalors sentis moins coupables, monmari et moi. Notre fille est guérieaujourd’hui. Le traitement a été long.La patience est une alliée extrême-ment précieuse.

Catherine, 45 ans

«Après avoir longuement cherché,nous avons consulté un spécialistedes troubles alimentaires. Il nous aimpliqués dans le traitement et nous amontré combien nous étions utilesnon seulement pour l’équipe soi-gnante, mais aussi pour notre fille.Nous, les parents, avons un véritablerôle de soutien à jouer. C’est à traversl’affection que nous portons à notreenfant, notre écoute de sa souffranceet de ses angoisses, mais encorenotre capacité à nous adapter à lasituation que nous sommes le plusefficaces et que nous remplissons aumieux notre rôle»

Viviane, 50 ans

«La thérapie familiale nous a faitfaire des bonds en avant et nous aété d’un immense secours. Dès lorsqu’il y a de l’amour, de la compré-hension et de la patience, leschoses peuvent être envisagéesavec beaucoup d’espoir et d’enthou-siasme. Ce n’est pas pour autantfacile tous les jours. L’amour et ladouceur sont plus que jamais néces-saires lorsque votre enfant est prisdans une crise d’angoisse.

Marc, 47 ans

«Je me rends compte que pour pou-voir aider son enfant, il faut aller biensoi-même, donc se faire du bien»

Marie-Josée, 38 ans

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«Je n’ai plus envie de jouer le rôle decelle qui contrôle ma fille et en parti-culier son poids. Je voudrais prendrede la distance et j’ai l’impression quema fille n’arrive pas à couper lecordon, alors que je voudrais tant lavoir devenir plus autonome. »

Anne, 45 ans

«Moins nous nous focalisons sur lanourriture, moins nous surveillons ceque notre fille mange, moins le stressest important et plus elle mange. Cequi ne veut pas dire que nous nousdésintéressons d’elle ni que nous l’ai-mons moins. Au contraire, avec monépouse, nous essayons de l’aider àprendre de plus en plus d’autonomie,en renforçant son image personnelleet sa confiance. Lors des repas, nousfaisons attention à ne pas parler d’ali-mentation, nous parlons de chosesqui plaisent en général à la famille, lerepas doit rester un moment deplaisir. Si ma femme ou moi avonsdes remarques à faire à notre fille,nous ne les faisons jamais durant lerepas ni tout de suite après. Il fautque le stress provoqué par ce repassoit calmé. Nous essayons de nejamais oublier que pour notre fille, lerepas est une épreuve qu’elle doitapprendre à surmonter petit à petit.»

Vincent, 41 ans

«Aujourd’hui, après avoir entendud’autres parents, je me dis que chezchacun, c’est un peu différent et j’ar-rive à mieux gérer les difficultés auquotidien»

Jean, 43 ans

«C’était si difficile de faire hospitaliserma fille et, en même temps, quel sou-lagement ! Difficile parce que j’avaisl’impression de l’abandonner (tou-jours cette fameuse culpabilité !),mais aussi parce qu’au début, je necomprenais pas les règles qui luiétaient imposées.»

Chantal, 39 ans

Les parents racontent...

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Il n’est jamais facile de comprendreun mal dont on ne souffre pas soi-même. Lorsque ce mal nie desbesoins aussi essentiels que la nour-riture, le repos, la relation, c’estencore plus difficile. Et quand ilatteint votre enfant, c’est le drame. Uncortège d’émotions vous assaille : dela colère à la honte, en passant parl’incompréhension, le sentiment d’im-puissance, le désespoir, la culpabi-lité, les interprétations hâtives…

Il est néanmoins possible de ne passe laisser submerger. Informez-vous,car vous devrez être patient et vousarmer de tolérance et de tendresse. Ilest essentiel de ne pas vous oublier.Pensez à vous ressourcer. Discutezde votre situation avec d’autresparents pour faire alliance contre lamaladie et non contre votre fille.

Voici quelques pistes qui devraientvous aider à garder un certain équi-libre.

Chercher un soutienL’isolement n’est pas d’un grand secoursLa honte, la culpabilité, mais aussi lapeur des remarques de l’entouragepeuvent parfois pousser les parents àcacher le mal dont souffre leur fille. Lesilence pourtant ne résout rien. Au

contraire, il accentue le mal-être,enferme et isole. En plus, dans biendes cas, le problème est trop lourd àporter par les seuls parents. Il vautmieux ne pas surestimer vos capa-cités et chercher un soutien auprèsdes intervenants en soins de santé.Un traitement médical s’avère la plu-part du temps indispensable pour lasanté de votre fille. Elle ne pourra enbénéficier que si vous ne vous voilezpas la face et reconnaissez qu’il y aun réel problème. En tant queparents, vous avez un rôle capital àjouer : votre fille a plus que jamaisbesoin de votre compréhension et desentir votre affection.

Consulter des professionnels de la santéRenseignez-vous le plus possible surles troubles alimentaires et sur la priseen charge thérapeutique1. Celle-ci esten général multidisciplinaire ; ce quisuppose l’intervention de pédopsychia-tre ou psychiatre, médecin, psycholo-gue, infirmier(e), diététicien(ne) spécia-lisés dans les troubles de l’alimentation.

Outre les soins et l’aide prodigués àvotre fille, ces professionnels vous per-mettront de clarifier la situation. Leuraccompagnement devrait en tout casvous aider à mieux vivre ce moment

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délicat. Faites-leur confiance ! Cetteconfiance aura aussi des répercus-sions sur la relation que vous entre-tenez avec votre fille.

À la fois parent et cothérapeute !Vous allez devoir coopérer avec l’é-quipe thérapeutique. Pour cela, il estimpératif que vous reconnaissiez quel’anorexie et la boulimie sont desmaladies. Une bonne compréhensionde ces troubles par des lectures, desentretiens avec les soignants, la ren-contre avec d’autres parentsconfrontés aux mêmes situations, vouspermettra de reprendre confiance. Ellevous aidera à réagir de manière plusadaptée, en développant par exemplede la patience, non exempte de fer-meté et de flexibilité dans les attitudesà adopter.

Une équipe parentale soudée pourraaider votre fille. Au cours du traite-ment, il vous sera demandé deprendre des décisions importantes :choix du thérapeute, accord sur lesrepas, hospitalisation ou non, objectifdu poids, attitude à l’égard des frèreset sœurs, des amis...

Vous serez aussi son porte-paroleauprès des infirmières, médecins,psychologues. C’est la raison pourlaquelle il est essentiel que vous voussentiez en confiance avec l’équipemédicale et écouté.

Chercher un soutienauprès des associationsspécialiséesRenseignez-vous auprès des associa-tions d’entraide, associations deparents et associations spécialisées2

dans les troubles alimentaires. Ellespourront vous aiguiller vers les bonnespersonnes. Dans les groupes d’en-traide, vous aurez l’occasion de par-tager votre vécu avec des parents quiont une expérience similaire à la vôtre.

Gérer la peur et la culpabilitéBeaucoup de vos réactions - irrita-tion, tristesse, impatience, colère,désespoir, etc. - sont provoquées parla peur, la culpabilité et le sentimentd’impuissance. «Comment ne pasavoir peur, direz-vous, quand ma fillese laisse mourir de faim, quand elles’enfonce dans une sorte de folie ?Ne suis-je pas responsable de ce quilui arrive ? Qu’ai-je fait de traverspour qu’elle se haïsse à ce point ?» Si ces doutes sont légitimes, vous nepourrez toutefois pas vivre indéfini-ment avec eux. Il va falloir apprendreà les gérer, à faire face aux angoissesqui vous prennent lorsque vous voyezvotre fille adopter des comporte-ments à risque pour sa santé.

Parents et éducateurs,que faire ?

1 Plus d’informations sur l’aide médicale et sur les centres hospitaliers et associations auprès desquels voustrouverez un soutien à partir de la page 37. 2 Vous trouverez les coordonnées de certaines associations en page 40

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À propos de responsabilité...Les troubles alimentaires ne sont pasnécessairement la conséquence d’at-titudes parentales inappropriées, ni lamanifestation de problèmes familiauxou d’une mésentente au niveau ducouple des parents. La maladie peutcertes, dans certains cas, révéler desdifficultés ou des insatisfactions fami-liales qui existaient déjà auparavant,mais les parents ne portent jamaisl’entière responsabilité du trouble del’alimentation vécu par leur enfant.Les recherches sur les causes sonttrès claires : il n’y a pas une causeunique qui serait de la seule respon-sabilité des parents. Ceux-ci ont, parcontre, la responsabilité de s’engagerdans le traitement en collaborationavec les équipes soignantes.

Tout comme l’adolescente, ils devrontpeut-être se remettre en question.Certains ne le supporteront pas, avecpour conséquence un durcissementdes positions, un dialogue rompu sipas brisé et parfois l’incapacité àcontinuer à vivre sous le même toit.Cette remise en question peut-êtredouloureuse. L’aide d’autres parentsconfrontés aux mêmes problèmesque vous ou de professionnels forméset compétents sera fort utile. Bienentendu, dans ce domaine, rien n’estfacile et un travail sur soi est toujoursconfrontant. Mais à long terme, il vouspermettra de restaurer une certaineconfiance, de retrouver plus de sou-plesse dans les relations familiales.

Famille et adolescence ne font pas forcément la paire !Chaque famille est une entité uniquequi a développé ses modes de fonc-tionnement, ses règles, ses valeurs. Ausein de ce microcosme, l’enfantdécouvre au fur et à mesure des situa-tions nouvelles et fait l’expérience d’é-motions intenses. C’est là qu’il fait l’ap-prentissage des sentiments tant posi-tifs que négatifs et qu’il se développephysiquement et psychologiquement,plus particulièrement à la puberté.

Selon son caractère et ses disposi-tions, il s’adaptera plus ou moins bienau climat familial, s’y sentira comme unpoisson dans l’eau ou un oiseau encage (sentiment d’être intégré, prison-nier, exclu, etc. – toutes les éventua-lités sont possibles !)Le monde extérieur, l’école, les diffé-rentes expériences de la vie peuventfragiliser un enfant.

Tous ces problèmes peuvent être unesource de désarroi. Les parents ne sont pas forcément encause. Parfois même, ce sont despetites choses qui sont mal ressentiesou mal vécues par l’enfant. Toujoursest-il que les parents devront prendrele temps pour écouter leur enfant etveiller à être présents.

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Culpabilité des parentsPour les parents, il est douloureux dese sentir coupable et de ne pouvoirsurmonter cette culpabilité lorsqu’ilsse rendent compte que leur fille estembarquée dans une relation des-tructrice avec la nourriture. « Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné dans l’édu-cation, se disent-ils, où ai-je failli ?Pourquoi ne veut-elle pas manger? ». Les repas sont des moments souventcentraux de la vie d’une famille, c’estparfois le seul moment que l’on par-tage tout ensemble. Les difficultés del’un des membres par rapport à l’ali-mentation, rendent ces moments diffi-ciles, c’est parfois la guerre et toute lafamille en est perturbée dans sonfonctionnement.

Cultiver la patience Nous l’avons évoqué dès le début,les jeunes filles qui souffrent de bou-limie ou d’anorexie sont habitées pardes pensées et des voix particulière-ment dévalorisantes. Personne ne sedébarrasse de cela en quelquesjours. Le temps dont votre fille abesoin, c’est celui qui lui permettrad’accepter son corps, son poids, sonimage, son être, sa conditionhumaine tout simplement, avec seslimites, ses gloires et ses failles. Etpour elle, c’est une grande épreuve.De la même manière qu’elle a mis dutemps à basculer dans la boulimie oul’anorexie, elle mettra aussi du tempspour en sortir. Vous devrez donc pro-bablement déployer des trésors depatience et de tolérance à sonégard. La persévérance sera votremeilleure alliée.

Revoir la façon de communiquer Parler avec son cœur, c’est-à-direavec sincérité, évite de s’engagerdans un rapport de force. Se placer dans une situation d’ac-ceptation et d’accueil, même si vousne comprenez pas tout, permetd’oser le dialogue. Persistez danscette voie. À la longue, elle porterases fruits. Si vous avez quelque chose à dire àvotre fille, il vaut mieux le faire quandelle est détendue. Vos paroles aurontalors certainement plus d’impact quesi vous lui parlez quand elle rentreénervée de l’école par exemple.

Éviter les critiques et les rapports de forceEn règle générale, s’abstenir de fairedes commentaires et de critiquervotre fille, montre que vous ne cher-chez pas le rapport de force. Celui-cisurvient lorsque vous vous sentezimpuissant ou encore lorsque voustransformez la souffrance de votrefille en un problème personnel.

Toute anxiété, toute menace, toutdésir de contrôle, toute tentative decontrôler la nourriture ou de forcer laparole, toute insistance, toute «leçon », plainte ou remarque dés-agréable sur son attitude, sera res-sentie par elle comme une agression,un rejet, un jugement. Cela ne va pas,en tout cas, lui donner envie de faireun effort. Au contraire, elle risque dese retrancher davantage et de pour-

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suivre, dans un secret encore mieuxgardé, son inexorable combat contrela nourriture.

Cela ne doit pas vous empêcherd’être engagé dans le traitement et sinécessaire de prendre parfois posi-tion ou d’adopter des attitudesfermes et flexibles (plutôt que rigidesou désorganisées), de fixer desrègles de vie (elles pourront d’ailleursévoluer avec le temps), de mettre deslimites. Votre fille est certainementintéressée par votre point de vue. Engénéral, elle sait très bien que lamaladie interfère dans ses relationset la vie familiale. Des règles clairesconcernant la ré-alimentation s’avè-rent souvent efficaces et permettentde diminuer l’anxiété et la culpabilitééprouvées par votre fille.

Aimez votre fille telle qu’elle est Comme la majorité d’entre nous,votre fille cherche à être appré-ciée pour ce qu’elle est. Elle sou-haite avoir son espace et faire leschoses à sa manière. Elle vousfera davantage confiance etviendra plus facilement vers voussi vous lui laissez de la liberté.

Ce dont elle a besoin, c’est devotre soutien et de votre affection.Vous ne devez pas forcémentexprimer cet amour en vousmêlant de tout. Apportez une pré-sence parentale forte et uniecontre la maladie. Restez focalisésur l’objectif d’une guérison pro-gressive, croyez en ses capacitésde renouvellement. Ainsi, tout lemonde gardera courage.

Parler d’autres choses que de nourritureL’angoisse, l’inquiétude face à lasituation risquent de vous donnerenvie de parler de nourriture, de nutri-tion, de poids… alors que votre filleest dégoûtée par la nourriture ouqu’elle se trouve répugnante à forcede trop manger. Il est donc normalqu’elle ait tendance à fuir les discourssur l’alimentation.

Elle aimerait peut-être aborder d’au-tres sujets, des choses du cœur et del’esprit, de se confier à vous sans êtrejugée. Ne cherche-t-elle pas à vousconnaître autrement, à créer une inti-mité nouvelle, une relation plus libre,

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avec des échanges qui n’ont pas seu-lement lieu autour des repas et d’unetable ? D’un autre côté, ne niez pas laréalité non plus : il ne s’agit pas de neplus jamais parler de nourriture.Comme dans beaucoup de domaines,tentez de trouver le juste milieu.

Que faire si votre fille nie le problème ?Comprenez que le fait de nier, de sefâcher, de refuser votre aide ou vos pro-positions d’aide font partie de la maladie.Pourtant il est essentiel qu’elle acceptede consulter un spécialiste.Faites-lui comprendre que vousrespectez son attitude, mais que celane peut vous empêcher d’exercer vosresponsabilités de parents. Dites-luique vous lui en reparlerez plus tard etque vous allez chercher une aide. Faites ce que vous avez dit, respecteztoujours vos promesses et vos enga-gements et faites attention de ne pasen prendre trop ou de promettre deschoses impossibles à tenir.

Se mettre à l’écouteÉcouter votre fille sans préjugés ouidées préconçues, en tentant d’é-prouver de la sympathie pour cequ’elle vous dit, sans projeter voscraintes, vos façons de fonctionner,vos valeurs, lui permettra de dire jus-qu’au bout ce qu’elle a besoin decommuniquer.

Elle souffrira si vous ne la prenez pasau sérieux. Et si vous trouvez sespropos incohérents ou stupides,reme t tez -vous en ques t i on :

demandez-vous quel regard vousportez sur elle ?

Éviter de se prendre pour une victimeVous pouvez reconnaître que la maladiede votre enfant vous fait souffrir, maisévitez de dire « tu es un problème ! ».Elle a un problème, oui, mais elle n’enest pas un. Évitez de faire l’amalgameentre sa souffrance et la vôtre. Si vouslui dites que vous souffrez à caused’elle, vous lui faites porter un poids quine lui revient pas, car en réalité voussouffrez à cause de la maladie. Necroyez surtout pas qu’elle est indiffé-rente à votre souffrance.

Veillez également à ce que les autresmembres de la famille ne se découra-gent pas. De cette façon, vousassurez aussi un cadre propice à laguérison de votre fille.

La place des frères et sœurs….Pensez à eux et gardez-leur du temps.Une fratrie n’est pas toujours soudée, etvotre fille n’y trouvera pas forcément unsoutien, mais elle peut aussi être d’unegrande aide. Son frère ou sa sœur peutfort bien devenir son confident. Leurcomplicité d’enfant peut parfois aider.

Si cela se passe, vous devrez accom-pagner ce frère ou cette sœur et veillerà ce qu’il/elle ne se fasse pas emporterà son tour par les problèmes de sasœur. Réservez-lui aussi des tempspour parler, pour évaluer où il/elle en est(si ce n’est pas trop lourd, etc.). Bref,apprenez-lui à mettre des limites et à nepas porter la souffrance des autres.

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Rester en contact avec la vieSachez prendre de la distance etposer des limites (chacun a lessiennes). Continuez à faire deschoses pour vous ou apprenez à enfaire seul, en couple, en famille…Suivez vos envies, vous en privern’arrangera en rien l’état de votre fille.Ne vous arrêtez surtout pas de vivreen attendant qu’elle aille mieux.Offrez-vous des moments de détente,ressourcez-vous. Le plus beaucadeau que vous pouvez lui faire, lameilleure aide que vous pouvez luiapporter est d’aller bien vous-même.Votre lien à la vie et la liberté aveclaquelle vous en jouissez rappellerontaussi à votre fille que la vie n’est pasuniquement synonyme de danger,qu’elle est aussi une source géné-reuse de rencontres positives, d’épa-nouissement, de bien-être.

Pas de guérison sans patience Il n’y a pas de solution rapide ou demiracle aux troubles alimentaires.

Si vous tentez de le résoudre troprapidement, c’est peut-être parceque vous êtes trop exigeant. Soyezprudent, car dans ce cas, vous (tantvous-même que votre fille) risquez devivre dans le stress, ce qui n’arran-

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Lorsque l’on demande aux personnesqui sont sorties d’un trouble alimentairece qui les a le plus aidées, elles répon-dent en général : la rencontre avec desprofessionnels expérimentés et avec despersonnes guéries, et surtout le soutiendes proches, notamment les parents.

L’aide professionnelle et multidisciplinaireL’objectif principal de l’intervention desprofessionnels de la santé, qui se situe àun niveau physique et psychologique,est d’aider votre fille à retrouver l’équi-libre dans son corps et dans sa tête. Carsi s’alimenter est un acte qui doit êtreréappris, cet apprentissage ne peut sefaire sans un travail sur soi et, pour l’ado-lescente, sans le concours des parents.Dans ce but, l’aide prodiguée tientcompte des différentes dimensions destroubles alimentaires : le corps (nutrition,diététique), les sentiments, émotions,comportements, pensées (psychologie,ateliers créatifs…) et le contexte rela-tionnel (les parents, les frères et lessœurs, les pairs et les proches).

Plusieurs intervenants sont dès lorsappelés à collaborer. Au minimum, unmédecin généraliste et un psychologuequi ont une expérience dans la matière.

Ce qui favorise le bon déroulement etl’efficacité de ces soins, c’est d’unepart, la bonne circulation des infor-mations entre les différents interve-

L’aide médicale et psychologique

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? gera rien. Le mieux : avancer pas àpas et persévérer.

La guérison ne se fait pas sans souf-france, ni en quelques semaines. Elleexige, pour votre fille, un travail souventdifficile: elle va devoir se battre et elleaura besoin de votre soutien tout aulong de ce combat jusqu’à la guérison.Sachez néanmoins que vous pouvezfaire tout ce qui est en votre pouvoirpour aider votre fille, mais que c’estelle-même qui devra fournir le plusd’efforts pour guérir.

Des troubles qui durent…Anorexie et boulimie peuvent s’installerpour des mois, des années même !Certaines femmes en souffrent encoreà 60 ans. D’autres ont seulement arrêtéde se priver de nourriture à la nais-sance de leur premier enfant. Noussommes en présence de phénomènestenaces qui exigent de tout le monde -tant de l’adolescente que de sonentourage et des professionnels de lasanté - de faire preuve de patience etde persévérance.

Le processus de guérison est parfoislong et difficile, mais il est possible. Bien des adolescentes s’en sortentaprès quelques mois de maladie seu-lement. C’est ici que l’engagementdes parents est d’une aide précieuse.

Plus vite la maladie est décelée ettraitée, plus les chances d’enrayerson développement sont grandes.

nants et, d’autre part, le climat deconfiance qui s’installe avec la jeunefille et sa famille. Il est essentiel queces interventions s’organisent autourd’une parole libre et d’une écouterespectueuse des uns et des autres.

S’adresser aux bonnes personnes Peu importe que ce soit un médecin,un psychologue ou quelqu’un d’autre,il vaut toujours mieux se tourner versdes personnes reconnues, formées etqui ont une expérience ; c’est-à-diredes professionnels et des associationscompétentes dans le domaine destroubles de l’alimentation. Eux seulsvont pouvoir développer les stratégiesde traitement offrant des chancesréelles de guérison, respectant le vécude l’adolescente et de sa famille. Ilssont capables d’une bonne écoute.Veillez à ce qu’ils se mettent en contactavec votre médecin généraliste.

Soyez présent lors du premier rendez-vousAccompagnez votre fille lors de sonpremier rendez-vous à l’hôpital ouchez un médecin. Mais ne lui imposerpas votre présence lors de la consul-tation. Si elle a déjà consulté sanssuccès, cherchez encore et menezplutôt vos recherches vers deséquipes spécialisées.

Un coup de main de la part de vos proches…Ils peuvent aussi vous soutenir par desaides ponctuelles, par exemple : allerchercher les autres enfants à l’écolependant que vous vous rendez à uneconsultation.

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Le suivi médical et psychologiqueDans un premier temps, les complica-tions de la dénutrition doivent être trai-tées rapidement. Par la suite, un traite-ment spécialisé est proposé et adaptéen fonction de chaque adolescente.

À propos de thérapieL’anorexie et la boulimie sont lessymptômes d’un malaise existentiel.Ils sont un langage qu’il faut décoder,c’est le rôle d’une psychothérapie.Dans le cadre des troubles du com-portement alimentaire, quelques thé-rapies ont fait leurs preuves et ontaidé des jeunes à en sortir.

La thérapie familialeL’engagement des parents dansune thérapie familiale, voire unethérapie multifamiliale (lorsqueplusieurs familles se rencontrenten même temps) offre des résul-tats intéressants. La situationpeut être dédramatisée, la souf-france de chacun peut s’ex-primer, la communication et ledialogue sont favorisés. Lesparents peuvent jouer un véri-table rôle de cothérapeutes ettravailler en collaboration avecl’équipe thérapeutique. La seuleapproche diététique est troplimitée et peu efficace voire dan-gereuse car elle peut renforcerles blocages et les tensions. Lathérapie familiale est surtout indi-quée lorsque le jeune vit encoreavec sa famille.

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Le traitement est en général long etcomplexe. Il faut souvent fairepreuve, à la fois de fermeté et deflexibilité dans les moyens qui sontmis en œuvre et ne pas se laisserpiéger par le sentiment d’urgence.Le refus du traitement est par exempleau cœur de l’anorexie, et ce, pourdeux raisons relativement simples :■ la jeune fille ne vit pas forcément

son comportement comme grave etle considère comme une solutionlégitime à ses problèmes ;

■ la peur intense de prendre du poidsva forcément à l’encontre de toutedémarche de soins.

À propos de l’hospitalisationDans le cas de l’anorexie lorsqu’unejeune fille ne reprend pas de poids oua fortiori en perd, malgré un traitementbien conduit en consultation, l’hospi-talisation peut être judicieuse. Uneunité hospitalière ou une équipe qui aune bonne expérience du traitementdes troubles alimentaires sont tout àfait indiquées pour fournir une priseen charge efficace et structurée.

Il est faux de croire que l’hospitalisa-tion doit se faire quand tout a échouéou lorsque le poids est trop bas. Laréalimentation de la jeune fille peuts’avérer temporairement impossibleau sein du milieu familial. Poursuivrele traitement en restant à la maisonpeut dès lors être néfaste pour sasanté et épuisant pour ses parents etses proches. Plus vite la maladie estprise en charge par une équipe spé-cialisée, plus les chances de gué-rison sont grandes.

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e La thérapie individuelleElle peut être approfondie, de typepsychanalytique, psycho-corpo-relle, basée sur des techniquesd’hypnose… ou brève de typecognitivo-comportementaliste.L’objectif est de permettre l’ac-ceptation des émotions que lessymptômes cachent et exprimentà la fois. Une fois l’étape de l’acceptationde soi franchie, le thérapeute peutdiriger la thérapie vers une prisede conscience des événementsextérieurs et des stress induits parl’environnement psychosocial quiont déterminé le comportementalimentaire problématique.D’autres pistes comme la médita-tion, le massage, l’art thérapie…peuvent compléter la prise encharge.

Choisir un thérapeuteDans l'anorexie mentale, il n'y a pasde thérapie individuelle spécifique quisoit plus efficiente qu'une autre. Untravail de soutien, d'acceptation desémotions, de mise en valeur des res-sources dont dispose l'adolescentepour résoudre ses problèmes actuelsdans le contexte d'une bonne relationavec un thérapeute semble le plusefficace. Attention, bien des per-sonnes se disent psychothérapeutemais n'en ont pas les compétencesou proposent des méthodes farfelues.Renseignez-vous sur les diplômes, laformation, les méthodes et les pra-tiques avant de vous engager. Lesligues d'hygiène mentale et les fédé-rations des centres de planning, votremédecin traitant peuvent vous aider.

L’objectif du traitementOutre le fait d’aider votre fille à renoueravec la part d’elle qui veut aller bien, ils’agit de l’aider à retrouver :■ un poids compatible (avec le retour

des règles quand elles se sontarrêtées) ;

■ une alimentation équilibrée, normale,variée (couvrir tous les besoins enprotéines, glucides, lipides, oligo-élé-ments…) ;

■ un bien-être corporel ; ■ une bonne estime de soi et des rela-

tions satisfaisantes ;■ la reprise de la confiance dans la

vie.

Tenir compte de l’ambivalence de l’adolescenteL’un des objectifs de la relation d’aide est aussi de mettre au point la stratégie pourdétourner la voix de la résistance qui déjà s’élève et renie la part qui veut guérir. Eneffet, il ne faut jamais perdre de vue que les pensées négatives, sont toujours pré-sentes et qu’elles essayent à tout moment de prendre le dessus et de déformer laréalité. Dès lors, une main tendue peut être vite perçue comme destructrice.

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Témoignage d’Adeline Je pense que le milieu médical (psycho-logue, médecin généraliste, pédiatre,diététicien) méconnaît le sujet. Pas tous,mais certains oui. Et c’est sur eux que jesuis tombée, au tout début du moins. Parexemple, un jour je confie enfin mon pro-blème au médecin qui me suit depuislongtemps. Je lui dis que je ne mangepresque plus et cette ignorante m’en-courage vivement à tartiner mon pain debeurre, à manger avec plein de sauce !Tout ce que la diététicienne m’interdirade faire par la suite (d’ailleurs, je ne l’aijamais fait !), car il s’agit bien dereprendre l’alimentation petit à petit. En

parlant de la diététicienne, cela me faitpenser que, dans mon cas, cela m’aencore plus branchée sur les calories etj’ai trouvé là un prétexte pour peser mesaliments. De plus, elle m’a demandé detenir un journal avec ce que je mangeais.Cette habitude m’est restée jusqu’à monentrée à l’hôpital, où je continuais à rem-plir des feuilles avec ce que je m’autori-sais à manger, en fonction des caloriesperdues pendant le sommeil et pendantla journée (où je bougeais unmaximum !). Bref, cela m’a enfoncéeplus qu’autre chose. Donc, je mets engarde et conseille de s’adresser à despersonnes bien informées sur le sujet.

Voici un recensement - non exhaustif - de lieux susceptibles de vous accueilliren tant que parent et/ou d’accueillir votre fille pour lui donner un soutien à courtterme ou lui offrir un suivi tout au long de sa maladie.

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partir de 12 ans). Les principes de trai-tement sont : la reprise d’un poids etd’un comportement alimentaire satis-faisant une perspective de développe-ment personnel, en concertation etcoordination avec le médecin traitant,le psychothérapeute et le (la) diététi-cien(ne) consultés au plus près dudomicile du patient et, si nécessaire, lecentre PMS et l’école. Des ateliers surl’image du corps et le bien-être cor-porel sont proposés. Pour la boulimie,une approche cognitivo-comporte-mentaliste est privilégiée en thérapieindividuelle, en thérapie de groupe oudurant une hospitalisation. Dans le pro-gramme destiné aux adolescents etaux jeunes adultes, les parents, consi-dérés comme des cothérapeutes, par-ticipent à des entretiens familiaux, àdes groupes de parents ou à desgroupes multifamiliaux. En cas d’hospi-talisation, une école secondaireimplantée sur le site permet au jeunede poursuivre la scolarité. Ce programme n’est pas accessibleen cas de trouble sévère du compor-tement, d’abus de substances ou d’al-coolisme associés au trouble alimen-taire. Il n’y a pas de programme pourles personnes souffrant d’obésité. Le Domaine - ULB - ErasmeRue Jean Lanneau, 391420 Braine-L’AlleudTél. : 02/384 25 93 Fax : 02/384 31 68http://www.ulb.ac.be/assoc/chorus/domainee-mail : Consultation des troubles alimentairesHôpital ErasmeRoute de Lennik, 808 - 1070 BruxellesTél. : 02/555 35 06

Le Domaine - ULB - ErasmeProgramme anorexie/boulimie En lien avec l’Hôpital Erasme, cethôpital psychiatrique s’est doté d’unCentre spécialisé qui propose desmodules de soins et de traitements

La RaméeCette clinique comprend une unitéspécifique aux troubles alimentaires.L’approche qui y est développéeconsiste à aider les jeunes à utiliser aumieux leurs ressources afin d’êtrecapables de s’assumer dans le mondeet empêcher la désinsertion socialetout en traitant au mieux le symptôme.Il s’agit d’une approche de type analy-tique et pluridisciplinaire (nombreusesactivités, diversité des soins…).La RaméeAvenue de Boetendael, 34 1180 BruxellesTél. : 02/344 18 94"http://www.laramee.be"

Cliniques Saint-Luc Une unité de pédopsychiatrie, en col-laboration avec les pédiatres ou lesmédecins traitants ou à la demandedes familles, organise des consulta-tions axées sur les troubles alimen-taires. L’intervention proposée est plu-ridisciplinaire.

Le service de médecine internegénérale intervient également dans lecas d’anorexie tout comme l’unitéd’endocrinologie et nutrition. Desséjours en hôpital sont égalementpossibles. Divers services collabo-rent et organisent les soins : pédia-trie générale, psychopathologie,nutrition, diététique…Cliniques Saint-LucAvenue Hippocrate, 101200 BruxellesTél. : 02/764 11 11http://www.saintluc.be

intensifs et multidisciplinaires enconsultation et en hospitalisation pourles personnes souffrant d’anorexiementale, de boulimie ou d’un troubleapparenté. Le programme thérapeu-tique est établi en fonction de l’âge (à

Les hôpitaux,associations d’entraide, associations spécialisées…

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D’autres hôpitaux, cliniques, unités…

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HUDERFMentionnons encore ici une unitépédopsychiatrique particulière del’Hôpital universitaire des enfantsReine Fabiola (HUDERF) qui présentedes caractéristiques originales sus-ceptibles de convenir à certainesjeunes filles et à leur famille. Il s’agit,en effet, d’une des rares unités de viemédicalisée ayant pour vocation d’ac-cueillir de jeunes enfants (autour des7-14 ans) confrontés à des problèmessévères. Elle accueille des cas d’ano-rexie précoce (parfois des filles pré-pubères, avec les spécificités soma-tiques que cela comporte), mais traiteaussi simultanément nombre d’autres

Hôpital Vincent Van Gogh Rue de l'Hôpital, 556030 Marchienne-au-PontTél. général : 071/92 14 11 Fax central : 071/92 00 61

Service de Psychosomatique Cliniques Universitaires Mont-GodinneAvenue Therasse, 1 5530 Mont (Yvoir)Tél. : 081/ 42 21 11Fax : 081/ 42 20 07

cas : enfants suicidaires, drogués,alcooliques, violentés… La dimension«communautaire» (une dizaine derésidents, pour des durées de séjourforcément variables) y est particuliè-rement travaillée et cette cohabitationd’enfants confrontés à des problèmesprofondément éprouvants mais trèsdifférents peut, dans le processus dereconstitution de soi, soutenir certains- notamment parmi les anorexiquesjuvéniles - à se dépêtrer de leurs pro-pres comportements obsédants.Huderf (Unité 69)Avenue J.-J. Crocq, 15 - 1020 BruxellesTél. : 02/477.26.96http://www.huderf.be

Service de Psychiatrie et de Psychologie MédicaleCentre Hospitalier Universitaire du Sart-TilmanBâtiment B 35 - 4000 LiègeTél.: 04/270 30 30 et 04/366 77 86Fax : 04/366 72 83

Centre hospitalier régional de la CitadelleBoulevard du 12ème de Ligne, 14000 LiègeTél. : 04/225 61 10http://www.chrcitadelle.be

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Miata,Maison d’Information et d’Accueil des Troubles de l’Alimentation asbl Miata est une association d’entraidedont le but est d’apporter un soutienaux parents et aux proches de per-sonnes souffrant d’anorexie mentale,de boulimie ou de troubles desconduites alimentaires apparentés.Elle leur propose un accueil person-nalisé et une écoute téléphoniquedeux après-midi par semaine (lemardi et le jeudi) de 14 à 17h. Endehors de ces heures, les personnesont la possibilité d’écrire par e-mail([email protected]) et de poser les ques-tions qui les préoccupent. Via son siteWeb http://www.miata.be, l’associa-tion propose de multiples informationsainsi que des liens et adresses utiles.Miata dispose également d’une biblio-thèque, organise des conférences àthème, conférences-débats, autourdes troubles des conduites alimen-taires (témoignages, différentesapproches thérapeutiques, avancéesdes recherches scientifiques…)Miata 85, rue de la Goëtte 420 Braine-l’AlleudTél : 02/385 09 40 (+ messagerie)http://www.miata.bee-mail : [email protected]

Anorévieet Infor Anorexie & BoulimieIl s’agit d’associations d’aide et d’orien-tation thérapeutique auprès desquellesvous pourrez obtenir des informationssur les troubles alimentaires. Lieux derencontre, d’écoute et d’échange, ellesse définissent aussi en tant que relaisentre les personnes en souffrance et lesprofessionnels de la santé susceptiblesde pouvoir les aider. AnorévieRoute de Dinant, 28 6800 LibramontTél. : 061/22 34 63e-mail : [email protected] Anorexie & Boulimie asblClos du Bergoje1160 BruxellesTél./fax : 02/662 27 88e-mail : [email protected]://www. anorexie-boulimie.com

Réseau Wallonie/Bruxelles de l’anorexie mentale et de la boulimieRéseau de partenaires, professionnelset associations, ayant pour objectif dese coordonner et de se concerterdans la prise en charge de personneset leurs proches confrontés à l’ano-rexie mentale et la boulimie. Secrétariat :Le Domaine-ULB-ErasmeRue Lanneau, 391420 Braine l'Alleude-mail: [email protected]

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Centres de santé mentaleCes centres subsidiés par les pouvoirspublics accueillent toute personne endifficulté, quel que soit son âge.L’adolescente y trouvera une aideponctuelle ou sur le long terme.Chaque centre fonctionne avec uneéquipe pluridisciplinaire constituée auminimum d’un psychiatre, d’unpsychologue et d’un travailleur social.Le travail est centré sur l’écoute, l’idéeétant de réfléchir ensemble aux diffi-cultés et de chercher des solutions.Institut wallon pour la santé mentaleRue Henri Lemaître, 78 - 5000 NamurTél.: 081/23 50 15 - Fax : 081/22 52 16e-mail : [email protected] bruxelloise pour la santé mentaleRue du Président, 53 - 1050 BruxellesTél.: 02 511.55.43 - Fax : 02.511.52.76

Centre de Planning familialUn centre de planning familial, c’estun lieu d’accueil et de prise en chargepsychologique. Il n’a pas été créé enfonction de la problématique des trou-bles alimentaires, mais il disposed’une structure multidisciplinaire oùl’on retrouve au minimum un médecin,un(e) psychologue, un(e) assistant(e)social(e). L’adolescente y seraaccueillie, écoutée et par la suite, ellesera si nécessaire orientée soit versun autre centre de planning (le plusproche de chez elle), soit vers unedes associations spécialisées dansl’accompagnement des jeunes fillesanorexiques ou boulimiques. Centre de planning familial des FPSRue des Remparts 21 - 6700 ArlonTél.: 063/23 22 43Centre de planning familial des FPSRue du Midi 120 - 1000 BruxellesTél.: 02/546 14 33

Centre de planning familial des FPSRue Warocqué 21 - 7100 La LouvièreTél.: 064/22 88 40Centre de planning familial des FPSRue d’Orléans 34 - 6000 CharleroiTél.: 071/20 88 38Centre de planning familial des FPSFaubourg Saint Germain 46 - 5660 CouvinTél.: 060/34 41 93Centre de planning familial des FPSPlace Patenier 9 - 5500 DinantTél.: 082/22 73 60Centre de planning familial des FPSAvenue Herbofin 30 - 6800 LibramontTél.: 061/23 08 10Centre de planning familial des FPSRue des Carmes 17 - 4000 LiègeTél.: 04/223 13 73Centre de planning familial des FPSRue des Savoyards 2 6900 Marche-en-FamenneTél.: 084/32 00 25Centre de planning familial des FPSChaussée de Waterloo 1825002 Saint-ServaisTél.: 081/72 93 80Centre de planning Willy Peers (FPS)Boulevard du Nord 195000 Namur - Tél.: 081/73 43 72Centre de planning familial des FPSRue des Cordes 8 - 7500 TournaiTél.: 069/84 23 46Centre de planning familial des FPSRue de Gosselies 7 - 6183 TrazegniesTél.: 071/45 87 91Centre de planning familial Rosa Guilmot (FPS)Rue Ferrer 3 - 1480 TubizeTél.: 02/355 01 99Centre de planning familial des FPSRue Saucy 14 - 4800 VerviersTél.: 087/31 62 38

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Je m’en suis sortie… Bien qu’il m’ar-rive encore de faire des crises deboulimie aujourd’hui, mais je n’ingur-gite plus de crasses ; je ne mangeplus que des aliments sains :carottes, fruits… Je me suis prise enmain. Avant, j’étais passive, aujour-d’hui je sais que si on peut se faire dumal en étant anorexique ou bouli-mique, on peut aussi se faire du bien,mais il faut apprendre à gérer cescomportements.

Hélène, 24 ans

Mon rapport à la nourriture achangé. Mais je n’y suis pas arrivéetoute seule. J’ai été voir un psycho-logue et mon médecin généralistem’a aussi beaucoup aidée. Aujour-d’hui, je ne me prive plus de mangeret j’apprécie même quelques petitesrondeurs. Je me connais mieux, jerepère immédiatement la petite voixnégative. J’ai appris comment lafaire taire et comment écouter lesautres voix intérieures nettementplus positives.

Fanny, 18 ans

Plus jamais ça ! C’est ce que je medis tous les matins. Cela fait six moisseulement que je ne me fais plusvomir et que je mange «normale-ment». J’aime pas ce mot. J’aimepas être comme tout le monde. Jeme cherche encore. C’est ce que j’aicompris. Je vais voir un psy avec mafamille. Chez nous les rapportsétaient plutôt tendus. Mes parents ne

supportaient pas ma maladie. Main-tenant ça va mieux. En tout cas, jevais mieux, je suis beaucoup plusjoyeuse et la vie me semble intéres-sante.

Adrienne, 16 ans

Ma mère a été d’une patienced’ange. Aujourd’hui je me rendscompte combien elle a souffert. Maiselle ne m’a rien fait sentir. Elle abeaucoup pleuré, mais jamaisdevant moi. J’ai pu tout lui dire, mesangoisses, ma haine de moi-même,mon désir de mourir, elle a toujourssu me donner de la tendresse. Aufond, elle a réussi à tisser un fil entrenous, il était fin comme tout, vraimenttrès fragile, mais c’est lui qui m’apermis de continuer à vivre même sile souffle qui m’habitait était à peineperceptible.

Aurélie, 28 ans

Elles vont mieux

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Voici une liste de livres présentantune diversité de points de vue, tousaussi intéressants les uns que lesautres et qui pourront vous permettred’élargir vos connaissances.

Anorexie, boulimie et compulsions :les troubles du comportementalimentaire, Marabout, 2003.

AGMAN Gilles et GORGE Annie,Vivre avec une anorexique, Josette Lyon, 1999.

BUCKROYD Julia,Anorexie et boulimie,J’ai lu (coll Santé, n° 7191), 2000.

CLAUDE-PIERRE Peggy,Guérir l’anorexie et la boulimie par laméthode Montreux, Plon, 1998.

COMBE Colette,Soigner l’anorexie, Dunod, 2002.

COMBE Colette, Comprendre et soigner la boulimie,Dunod, 2004.

CRAHAY Marcel et GOFFINET Christine, Regards croisés sur l’anorexie, ULg (coll. Synopsis), 2001.

DARMON Muriel, Devenir anorexique. Une approche sociologique, La Découverte, 2003.

DOYEN Catherine et COOK-DARSEN Solange,Anorexie, boulimie : vous pouvez aider votre enfant,InterEditions, 2004.

LIEVENS Françoise, Anorexie-boulimie, mon fil d’Ariane vers la Liberté,Éole, 2001.

PERROUD Alain,Tout savoir sur anorexie et boulimie :comment aider les parents, Favre Santé, 2000.

PERROUD Alain, Faire face à la boulimie, Retz, 2001. 2e éd. en 2004.

POIVRE D’ARVOR Patrick, Lettre à l’absente, Albin Michel/Le livre de poche, 1993

POIVRE D’ARVOR Patrick, Elle n’était pas d’ici, Albin Michel/Le livre de poche, 1995

RIGAUD Daniel, Anorexie, boulimie et autres troublesdu comportement alimentaire, Milan, 2002.

SCHASSEUR Barbara, La boulimie. Un suicide qui ne dit pas son nom, De Boeck, 2002.

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SCHMIDT Ulrike et TREASURE Janet, La boulimie, s’en sortir repas après repas,Estem,1998.

SIMON Yves et NEF François,Comment sortir de l'anorexie ? Et retrouver le plaisir de vivre,Odile Jacob, 2004.

SIMON Yves et NEF François,Comment sortir de la boulimie et se réconcilier avec soi-même ?Odile Jacob, 2004.

Vous voulez en savoir plus ?Vanessa et le Dr MEUNIER Alain, Je m’aime donc je vis. C’est quoi l’anorexie ?Payot, 2001.

Sites Internet

http://www.mutsoc.be/centredeplanning

http://www.planning-familial.be

http://www.ifeelgood.be

http://www.self-help.be

http://www.miata.be

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www.mutsoc.be

Edition avril 2006