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ANNEE UNIVERSITAIRE 2015-2016 Apport de l’impression 3D pour l’apprentissage d’un geste en chirurgie maxillo-faciale MÉMOIRE présenté et soutenu le 14 octobre 2016 pour obtenir le DIPLÔME INTERUNIVERSITAIRE DE PÉDAGOGIE MÉDICALE PAR Mourad BENASSAROU Né le 25 août 1983 à Vitry-le-François (Marne) HÔPITAUX UNIVERSITAIRES PITIÉ-SALPÊTRIÈRE – CHARLES FOIX

Apport de l’impression 3D pour l’apprentissage d’un …...4 Preece et al.(3) et Liew et al.(4) ont montré l’intérêt de l’impression 3D sur les capacités d’interprétation

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ANNEE UNIVERSITAIRE 2015-2016

Apport de l’impression 3D

pour l’apprentissage d’un geste

en chirurgie maxillo-faciale

MÉMOIRE

présenté et soutenu

le 14 octobre 2016

pour obtenir le

DIPLÔME INTERUNIVERSITAIRE DE PÉDAGOGIE MÉDICALE

PAR

Mourad BENASSAROU

Né le 25 août 1983 à Vitry-le-François (Marne)

HÔPITAUX UNIVERSITAIRES

PITIÉ-SALPÊTRIÈRE – CHARLES FOIX

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Table des matières

Résumé ....................................................................................................................................... 1

Introduction ................................................................................................................................ 2

Matériel et méthodes .................................................................................................................. 5

Résultats ..................................................................................................................................... 8

Discussion ................................................................................................................................ 11

Bibliographie ............................................................................................................................ 13

Table des illustrations ............................................................................................................... 14

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Résumé

Introduction :

Depuis la démocratisation des technologies de fabrication additive, de nombreux services

hospitaliers sont équipés d’imprimantes 3D afin de fabriquer des modèles en vue de la

simulation et de la planification d’interventions chirurgicales. Peu d’auteurs se sont intéressés

à l’aspect pédagogique de ces technologies. L’objectif de cette étude est d’évaluer l’apport

objectif de l’impression 3D pour l’apprentissage d’un geste technique simple et l’intérêt

subjectif exprimé par les étudiants en comparaison avec la visualisation 3D virtuelle du modèle.

Matériel et méthode :

Une mandibule type a été segmenté à partir des données tomodensitométriques DICOM d’un

patient. Le modèle 3D STL a été imprimé une première fois et habillé de silicone afin de

confectionner un fantôme permettant de simuler la réalisation de bloc anesthésique au foramen

mandibulaire. Trois tentatives de ponction ont été réalisées par chaque étudiant : une première

sans avoir accès à l’imagerie, une deuxième après avoir visualisé un modèle virtuel de la

mandibule du fantôme et une troisième après avoir manipulé un duplicata brut du modèle utilisé

dans le fantôme. La précision du geste a été évaluée par la mesure de la distance entre la pointe

de l’aiguille et le foramen mandibulaire. L’intérêt de l’apport de chaque modalité a ensuite été

évalué de manière subjective auprès de chaque étudiant.

Résultats :

La visualisation du modèle virtuelle a permis une amélioration de la précision du geste avec

une différence moyenne de –2,09 mm par rapport au geste sans imagerie. La manipulation du

modèle 3D a permis une amélioration de la précision supplémentaire de –0,18 mm en moyenne.

Comparé au geste sans imagerie, la combinaison de la visualisation 3D virtuelle et de la

manipulation du modèle 3D imprimé a permis une amélioration de la précision de –2,27 mm.

Seuls deux étudiants ont amélioré leur geste lors des deux étapes. La comparaison par test t de

Student apparié n’a pas permis de retrouver de différence statistiquement significative entre les

moyennes. L’évaluation subjective du ressenti des étudiants a quant à elle mis en évidence une

préférence pour la visualisation du modèle 3D sur l’ordinateur par rapport à la manipulation du

modèle stéréolithographique.

Discussion :

Notre étude n’a pas permis de mettre en évidence une amélioration significative de la précision

des étudiants lors de la réalisation d’une ponction en direction du foramen mandibulaire, que

ce soit après visualisation d’une reconstruction virtuelle de la mandibule ou après manipulation

d’un modèle imprimé en 3D. Elle évoque par ailleurs que la valeur ajoutée subjective de

l’impression 3D puisse être limitée par rapport à la simple possibilité de visualiser la pièce sur

un écran d’ordinateur. Une étude contrôlée randomisée reste nécessaire pour répondre à ces

questions.

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Introduction

Les technologies d’impression 3D, ou prototypage rapide, ne sont pas nouvelles. Elles ont

maintenant plus de 30 ans. C’est en effet en 1983 que Charles Hull (aujourd’hui vice-président

de 3D systems) que le brevet de la stéréolithographie (SLA) a été déposé et en 1986 que la

première machine reposant sur ce principe a été commercialisée.

En 1987, un autre procédé, le frittage sélectif laser (Selective Laser Sintering, SLS) est inventé

par l’entreprise DTM corp.

En 1988, la technologie de dépôt de filament fondu (Fuse Deposition Modeling, FDM) est à

son tour commercialisée par la société Stratasys.

Ces technologies, d’abord principalement utilisées par les entreprises afin de fabriquer des

prototypes avant de lancer les productions à grande échelle, ont ensuite pu être appliquées au

domaine médical, parallèlement au développement de techniques d’imagerie tridimensionnelle

et notamment de la tomodensitométrie.

En effet, dès 1990, Palser et al.(1) et Mankovich et al.(2) publient sur les possibilités de réaliser

des modèles stéréolithographiques 3D à partir de données d’imagerie tomodensitométriques.

Ces techniques ont par la suite été employées pendant de nombreuses années, notamment en

chirurgie osseuse (chirurgie maxillo-faciale, neurochirurgie, chirurgie orthopédique), mais de

manière relativement limitée. En effet, le principal inconvénient était le coût de chaque modèle,

s’élevant à plusieurs centaines d’euros.

Depuis 2006, et l’entrée des brevets dans le domaine public, apparaissent progressivement des

projets d’imprimante 3D open source permettant d’utiliser les technologies de fabrication

additive à bas coût avec des imprimantes « de bureau ». Le coût des machines FDM et des

consommables a alors considérablement chuté, avec aujourd’hui des centaines de modèles

disponibles, à partir de 350 € et des matières plastiques à environ 20 €/kg. La technique de SLA

est également accessible au grand public avec deux modèles « low cost », avec cependant des

matières premières (résines photopolymérisables) un peu plus onéreuses (135 €/L) (Figure 1).

Enfin, des machines permettant la fabrication 3D par SLS sont commercialisées depuis cette

année à un prix inférieur à 10 000 €.

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Figure 1 : L’imprimante FDM Ultimaker 2 (à gauche) et l’imprimante SLA Formlabs (à droite)

Cette démocratisation du prototypage rapide a permis l’arrivée des imprimantes 3D dans les

services médicaux, en particulier les services de chirurgie osseuse (chirurgie maxillo-faciale,

chirurgie orthopédique, neurochirurgie), afin d’imprimer des modèles stéréolithographiques

des patients pour mieux planifier les interventions chirurgicales et anticiper les gestes

chirurgicaux, voire de préformer des implants. L’intérêt étant d’abord d’optimiser la prise en

charge clinique des malades, il est rapidement apparu un bénéfice sur l’apprentissage et

l’enseignement de l’anatomie et des techniques chirurgicales aux étudiants en médecine et en

chirurgie (Figure 2).

Figure 2 : Modèle stéréolithographique de massif facial.

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Preece et al.(3) et Liew et al.(4) ont montré l’intérêt de l’impression 3D sur les capacités

d’interprétation d’examens d’imagerie médicale chez des étudiants en médecine. Lim et al.(5)

ont quant à eux montré une compréhension significativement supérieure de l’anatomie

cardiaque chez des étudiants ayant eu accès à des modèles stéréolithographiques

comparativement à ceux n’ayant pu étudier que dans des livres.

L’objectif de cette étude était de mesurer expérimentalement l’apport de l’impression 3D sur la

précision de la réalisation d’un geste technique de chirurgie orale simple, l’infiltration

d’anesthésique à l’épine de Spix (Figure 3) – geste réalisé couramment en chirurgie orale et

maxillo-faciale dans le but d’obtenir un bloc tronculaire de toute l’hémi-mandibule et réalisé à

l’aveugle sans guidage –, et de comparer les résultats obtenus sans imagerie, après visualisation

d’une reconstruction tridimensionnelle de la mandibule sur un écran et enfin après manipulation

d’un modèle imprimé en 3D. L’apport subjectif de chacune des modalités a ensuite été recueilli

auprès des étudiants.

Figure 3 : Schématisation du geste d’infiltration anesthésique au foramen mandibulaire (anesthésie tronculaire du nerf

alvéolaire inférieur), et vue réelle en bouche.

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Matériel et méthodes

Une étude expérimentale a été menée auprès d’étudiants en médecine, internes en chirurgie afin

de déterminer si l’apport de la visualisation du modèle virtuel de la mandibule ou la

manipulation de son équivalent physique obtenu par impression 3D avait une influence sur la

précision du geste lors de la réalisation d’une ponction en direction du foramen mandibulaire.

Pour ce faire, le scanner d’un patient type a été enregistré au format DICOM puis une

segmentation a permis de modéliser la mandibule en 3D. Ce modèle STL ainsi obtenu a ensuite

été imprimé en 3D en 2 exemplaires à l’aide de l’imprimante Formlabs 2 (Formlabs, Somerville,

Massaschussets, Etats-Unis).

Le premier exemplaire a été enveloppé de silicone, à l’exception des dents, afin de reproduire

les reliefs des tissus mous endobuccaux (repères habituellement utilisés afin de réaliser le geste

de ponction). Cela a permis de confectionner le fantôme sur lequel les étudiants ont été amenés

à réaliser les tentatives de ponction.

Figure 4 : Le fantôme utilisé pour l’étude. Modèle stéréolithographique de mandibule obtenu par impression 3D enveloppé de

silicone afin de camoufler les repères anatomiques osseux et reproduire les repères anatomiques de tissus mous, configuration

correspondant à la réalité clinique.

L’expérience a ensuite été menée en 3 étapes séparées de 48 heures auprès des internes :

- La première étape consistait à ponctionner le fantôme en utilisant les repères théoriques

décrits pour tenter de viser au mieux le foramen mandibulaire.

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- La deuxième étape consistait à réaliser le même geste, mais cette fois après avoir eu la

possibilité de visualiser la reconstruction tridimensionnelle virtuelle de la mandibule sur

un écran d’ordinateur (Figure 5).

- Enfin, la troisième étape a consisté à reproduire le geste après avoir pu manipuler un

duplicata brut du modèle stéréolithographique utilisé pour fabriquer le fantôme.

Figure 5 : Le modèle tridimensionnel virtuel qui pouvait être visualisé sur l’ordinateur lors de l’étape 2.

Figure 6 : Le modèle stéréolithographique de mandibule, duplicata de celui utilisé pour la fabrication du fantôme, qui pouvait

être manipulé lors de l’étape 3.

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A chaque étape, la précision du geste a été évaluée par la mesure, en aveugle, à l’aide d’un pied

à coulisse, de la distance entre la pointe de l’aiguille et le foramen mandibulaire à la face interne

du ramus de la mandibule du fantôme.

Enfin, les étudiants ont été interrogés sur leur perception subjective de l’aide qui avait été

fournie par les informations qui leur étaient soumises à chaque étape. Cette évaluation a été

réalisée selon une échelle numérique simple avec cotation de 0 (aide nulle) à 3 (aide très

importante).

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Résultats

Onze étudiants ont participé à l’étude. Il s’agissait d’internes en chirurgie spécialisés en

chirurgie maxillo-faciale et chirurgie orale, en 6ème à 10ème semestre d’internat, ayant une bonne

connaissance de l’anatomie de la tête et du cou, ainsi que les bases théoriques à la réalisation

d’infiltrations anesthésiques à l’épine de Spix.

Les résultats des mesures effectuées sont recensés dans le Tableau 1, elles correspondent à la

distance entre l’aiguille et le foramen obtenue sans imagerie (mesure 1), après visualisation de

la reconstruction tridimensionnelle de la mandibule sur un écran d’ordinateur (mesure 2) puis

après manipulation du modèle stéréolithographique de la mandibule (mesure 3). Ces résultats

sont représentés sous forme de courbes dans le Graphique 1. Ils montrent une diminution de la

distance moyenne après visualisation du modèle virtuel (8 mm avant vs. 5,91 mm après, p =

0,21), et une distance moyenne encore plus faible après manipulation du modèle (5,91 mm vs.

5,91 mm vs. 5,73mm, p = 0,91). L’amélioration de la précision sans aide et après manipulation

du modèle stéréolithographique n’était pas significative (p = 0,07).

Le Tableau 2 répertorie les différences de distances obtenues entre chaque tentative, permettant

d’apprécier l’évolution de la précision après apport de nouvelles informations aux étudiants.

Sept étudiants ont amélioré leur score après visualisation sur écran par rapport à l’absence

d’imagerie (mesure 2 – mesure 1), avec une différence moyenne de –2,09 mm [–9;+8]. Quatre

étudiants ont amélioré leur score après manipulation du modèle par rapport au score obtenu

après visualisation sur écran (mesure 3 – mesure 2), avec une différence moyenne de –0,18 mm

[–13;+6]. Au total, sept étudiants ont amélioré leur score après manipulation du modèle par

rapport à l’absence d’imagerie (mesure 3 – mesure 1), avec une différence moyenne de –2,27

mm [-9;+4]. Deux étudiants ont amélioré leur score à la fois après visualisation sur écran et

après manipulation du modèle stéréolithographique.

L’analyse statistique réalisée par t-test apparié de chaque série n’a pas retrouvé de différence

significative entre les différentes moyennes.

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Etudiant Mesure 1 Mesure 2 Mesure 3

1 9 17 4

2 3 5 7

3 11 11 11

4 9 5 4

5 13 4 8

6 7 1 6

7 2 6 4

8 13 10 4

9 8 0 6

10 5 3 5

11 8 3 4 Tableau 1 : Mesures des distances à la cible de chaque étudiant lors des différentes tentatives (en millimètres)

Graphique 1 : Représentation graphique des mesures obtenues par étudiant et par tentative.

Etudiant Mesure 2 – mesure 1 Mesure 3 – mesure 2 Mesure 3 – mesure 1

1 +8 -13 -5

2 +2 +2 +4

3 0 0 0

4 -4 -1 -5

5 -9 +4 -5

6 -6 +5 -1

7 +4 -2 +2

8 -3 -6 -9

9 -8 +6 -2

10 -2 +2 0

11 -5 +1 -4 Tableau 2 : Evolution de la précision entre les différentes tentatives (en millimètres)

0

2

4

6

8

10

12

14

16

18

1 2 3

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11

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Enfin, le Tableau 3 représente l’aide apportée par la visualisation du modèle virtuel puis par la

manipulation du modèle stéréolithographique estimée de manière subjective par chaque

étudiant, coté de 0 (nulle) à 3 (très importante). Tous les étudiants ont ressenti un bénéfice à la

visualisation du modèle de la mandibule sur écran : un de manière faible, 6 de manière

importante et 4 de manière très importantes (moyenne : 2,27). Deux étudiants n’ont pas ressenti

d’intérêt à manipuler le modèle imprimé en 3D. Quatre ont perçu un intérêt faible, deux un

intérêt important et deux un intérêt très important (moyenne : 1,45). La différence n’était pas

significative selon le test t de Student (p = 0,08).

Etudiant Modèle virtuel Modèle stéréo

1 2 2

2 3 1

3 2 0

4 3 0

5 2 3

6 1 2

7 2 1

8 2 3

9 3 2

10 2 1

11 3 1 Tableau 3 : Mesure de l’intérêt ressenti de l’apport de la visualisation du modèle virtuel et de la manipulation du modèle

stéréolithographique de chaque étudiant.

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Discussion

Les résultats de notre étude ne permettent pas de conclure sur un avantage de l’impression 3D

sur la précision de la réalisation d’un geste simple et courant de chirurgie orale et maxillo-

faciale : l’infiltration du nerf alvéolaire inférieure à son entrée dans la mandibule, au niveau du

foramen mandibulaire. Bien que les résultats montrent une diminution de la distance entre la

pointe de l’aiguille et le foramen après manipulation du modèle stéréolithographique de la

mandibule, les résultats ne sont pas statistiquement significatifs. L’évaluation subjective de

l’aide apportée par chacune des modalités (modèle virtuel vs. modèle stéréolithographique) était

en faveur de la visualisation virtuelle, mais de manière non significative également.

L’apprentissage des gestes techniques en médecine est un sujet en pleine évolution. Bien que

l’enseignement de la médecine et de la chirurgie soit un compagnonnage, il est devenu de moins

en moins admissible et admis par les enseignants et la société qu’un étudiant en médecine

réalise pour la première fois un geste sur un patient. Pendant de nombreuses années,

l’apprentissage préclinique était confiné aux laboratoires d’anatomie. Cependant se pose de

plus en plus le problème du nombre de cadavres disponibles, de leur qualité, du nombre

d’étudiant pouvant apprendre sur chacun et du coût de fonctionnement d’un laboratoire

d’anatomie(6). Plus récemment, grâce aux avancées technologiques ont été commercialisés des

modèles anatomiques en plastique et de simulateurs à destinée pédagogiques. Si ces produits

ont démontré leur intérêt dans de nombreuses spécialités(7), ils présentent cependant certaines

limitations. En effet, leur coût reste important et ils ne tiennent pas compte des variabilités

anatomiques qui peuvent exister entre chaque individu. Ce n’est pas le cas lorsque l’on peut

créer un modèle pour chaque patient que l’on est amené à rencontrer dans les services médicaux.

L’avantage en chirurgie maxillo-faciale (et dans les autres spécialités de chirurgie osseuse) est

que l’os est une structure très facilement identifiable et « segmentable » sur des données

d’imagerie volumiques telles que la tomodensitométrie et le scanner. On peut alors, à l’aide de

logiciel simples, reconstruire et visualiser de manière virtuelle l’anatomie spécifique de chaque

patient. Cela permet à l’étudiant de mieux appréhender l’anatomie d’une part et d’en percevoir

plus facilement les variations. Il lui permet également d’anticiper plus facilement la réalisation

d’un geste(8). Avec la démocratisation des techniques de fabrication additive, il est devenu

possible de générer des modèles anatomiques adaptés à la situation clinique de chaque patient

à un faible coût. L’intérêt en clinique a été aujourd’hui montré par de nombreux auteurs(9). En

revanche, l’intérêt pédagogique, bien que souvent évoqué, n’a que rarement été évalué. Son

intérêt a été prouvé pour l’apprentissage de l’anatomie(10) et en imagerie médicale(11) mais

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peu d’auteurs se sont intéressés à l’impact sur la précision de la réalisation d’un geste technique

selon que l’étudiant ait accès ou non aux technologies d’impression 3D. Notre étude sur

fantôme, même si elle suggère une discrète amélioration de la précision lorsque l’étudiant a pu

manipuler un modèle imprimé en 3D, n’a pas permis de mettre en évidence de différence

significative. Elle soulève également la question de son intérêt lorsque l’étudiant a d’ores et

déjà accès à l’image virtuelle de la pièce anatomique en question, avec une évaluation

subjective plutôt en défaveur.

Une étude plus puissante, contrôlée, randomisée, avec un nombre plus important de sujets, reste

nécessaire pour faire la part entre l’aide apportée par la réalité virtuelle et celle apportée par

l’impression 3D.

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Table des illustrations

Figure 1 : L’imprimante FDM Ultimaker 2 (à gauche) et l’imprimante SLA Formlabs (à droite)

.................................................................................................................................................... 3

Figure 2 : Modèle stéréolithographique de massif facial. .......................................................... 3

Figure 3 : Schématisation du geste d’infiltration anesthésique au foramen mandibulaire

(anesthésie tronculaire du nerf alvéolaire inférieur), et vue réelle en bouche. ........................... 4

Figure 4 : Le fantôme utilisé pour l’étude. Modèle stéréolithographique de mandibule obtenu

par impression 3D enveloppé de silicone afin de camoufler les repères anatomiques osseux et

reproduire les repères anatomiques de tissus mous, configuration correspondant à la réalité

clinique. ...................................................................................................................................... 5

Figure 5 : Le modèle tridimensionnel virtuel qui pouvait être visualisé sur l’ordinateur lors de

l’étape 2. ..................................................................................................................................... 6

Figure 6 : Le modèle stéréolithographique de mandibule, duplicata de celui utilisé pour la

fabrication du fantôme, qui pouvait être manipulé lors de l’étape 3. ......................................... 6