Approche du patient incontinent à l’officine

Actualités pharmaceutiques

• n° 533 • février 2014 •32

Incontinence urinaire : pour un conseil effi cace en offi cine

dossier

Mots clés - conseil ; incontinence urinaire ; protection ; sujet âgé

Keywords - advice; elderly person; protection; urinary incontinence

Approche du patient incontinent à l’officine L’officine constitue le pôle de santé de proximité par excellence. Avec le vieillissement de

la population, le nombre de personnes atteintes d’incontinence croît. Ces dernières seront

soulagées si un professionnel de santé aborde leur problème et leur propose des solutions.

Toutefois, ce sujet reste particulièrement délicat.

The approach to adopt with incontinent patients in the community pharmacy. The pharmacy is the local healthcare centre par excellence. As the population is ageing, the number of people affected by incontinence is growing and they are relieved when a healthcare professional addresses their problem and offers them solutions. It nevertheless remains a particularly sensitive subject.

C ontrairement aux idées reçues, l’incontinence concerne toutes les périodes de la vie puisque l’âge moyen des personnes intéressées est de

51 ans, même si les deux tiers sont des femmes de moins de 55 ans. À 60 ans, 5 % des hommes souffrent d’incontinence et 20 % à 80 ans. Nombre de personnes incontinentes préfèrent se taire au lieu d’en discuter avec un professionnel de santé, souvent mues par un sentiment de honte. Elles souffrent d’un point de vue physiologique (inconfort, gêne), moral (dévalorisation, diminution, honte) et social (repli sur soi allant jusqu’à la désocialisation). La difficulté des équipes officinales à aborder le sujet est réelle.

Lever le tabou de l’incontinence Pour aborder ce sujet délicat, les laboratoires Hartmann ont développé une méthode appelée D.A.C. (Détecter, Aborder et Conseiller) validée par un comité multi-disciplinaire (urologue, gynécologue, psychiatre, kiné-sithérapeute, pharmacien, infirmière et ethnologue).

F Des préalables sont nécessaires avant d’aborder le sujet avec un patient : instaurer un climat de confiance pour déclencher le dialogue, être et montrer, par la visi-bilité et l’accessibilité, sa compétence et enfin assurer une confidentialité totale. Une équipe formée et convaincue est une équipe convaincante.

F Idéalement, nommer un ou deux “référents”

facilite l’abord. Il est plus aisé à un homme de parler de son incontinence à un autre homme et une femme à une autre femme.

F Pour créer de la visibilité, il est indispensable de disposer des produits dans l’espace de vente pour

susciter les questions. Si les locaux le permettent, deux espaces séparés peuvent être instaurés : un premier sera dédié à l’incontinence légère, à côté des produits d’hygiène féminine, et un second sera dévolu à l’incon-tinence moyenne à lourde dans une zone conseil.

F Mettre à disposition des supports d’information et des échantillons apporte un réel plus, notamment par rapport à la grande distribution.

Détecter un patient incontinent Afficher son savoir-faire “incontinence” signifie aussi savoir de quoi il est question.

F L’incontinence d’effort ou faiblesse urinaire est due à un affaiblissement du périnée et du sphincter urinaire. Elle se caractérise par une fuite involontaire d’urine, non précédée du besoin d’uriner, qui survient à l’occasion d’efforts (toux, rire…). Le volume d’urine reste faible (quelques gouttes de temps en temps).

F L’incontinence par regorgement est une perte involontaire d’urine associée à une distension vésicale ou rétention vésicale chronique, caractérisée par un goutte-à-goutte fréquent ou continu.

F L’incontinence par instabilité vésicale constitue une perte involontaire d’urine en jet, précédée d’un besoin urgent et irrépressible d’uriner, d’origine inflam-matoire ou neurologique.

F L’incontinence réflexe a pour origine certaines maladies neurologiques affectant la moelle épinière ou le cerveau qui ont pour conséquence de faire travailler la vessie de façon réflexe.La lecture d’ordonnance, l’observation et une bonne connaissance de sa clientèle permettent au pharmacien

© 2013 Publié par Elsevier Masson SAS

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Yannick FRULLANIPharmacien

Adresse e-mail : [email protected]

(Y. Frullani).

Pharmacie de la Cere, 103 avenue de la République, 46130 Biars-sur-Cere, France

© 2013 Publié par Elsevier Masson SAS

http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2013.12.008


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de repérer facilement une personne incontinente. Le problème reste insoluble si la question n’est pas abordée.

Parler de l’incontinence Comme dans toute relation humaine, le premier contact constitue une étape cruciale. Le sourire, l’accueil et l’écoute en sont les bases.

F Le choix des mots est également très important.

Lors des entretiens avec les personnes concernées, il est apparu que le terme autour duquel se noue le plus facilement la relation est celui de “fuite urinaire” alors que le mot “incontinence” évoque la “fin de vie”. Pour parler des protections, il est conseillé de ne pas utiliser le mot “couche”, trop infantilisant, mais plutôt les termes de “sous-vêtements absorbants” ou “protections absorbantes”.

F L’abord du patient incontinent se décompose en cinq étapes clés :• mettre à l’aise en affichant compréhension et

expertise, de façon simple, presque familière, tout en restant professionnel : « Il est possible que votre traitement entraîne des effets secondaires et des fuites urinaires. Avez-vous déjà rencontré ce problème ? » ;

• énoncer qu’il n’est pas seul ; si la réponse est positive, il faut proposer un entretien plus poussé dans une zone de confidentialité pour le rassurer et le

réconforter ; si la réponse est négative, il est bon de l’informer ou de le sensibiliser en lui remettant une brochure d’information ;

• recueillir les informations cliniques ;

• tenter de mieux connaître le vécu du patient ;

• apporter une solution en proposant une protection ou évoquer les alternatives que sont la rééducation périnéale, les traitements médicamenteux ou chirurgicaux.

Conseiller un sujet incontinent F Le premier conseil est primordial. Là aussi, cinq

étapes peuvent être détaillées : • définir l’échantillon adapté au patient ;• montrer l’échantillon ;• informer sur les bénéfices attendus ;• délivrer l’échantillon dans un sachet non transparent

remis discrètement ;• réaliser le suivi.

F Actuellement, de nombreux produits sont propo-sés sur le marché. Les laboratoires Hartmann, Tena et Alvita disposent ainsi d’un large panel de protections (tableaux 1, 2 et 3) qui peuvent être classées selon deux critères : le type d’incontinence et le degré de la gêne occasionnée.

F Il est, par ailleurs, essentiel de conseiller aux

patients quelques mesures simples à mettre en œuvre

Tableau 1. Les produits Hartmann.

Types d’incontinence Gêne Protections adaptées Types de protection

Incontinence d’effort ou faiblesse urinaire Faible volume d’urine Confi ance® protège-slip Protège-slip

Confi ance® Sensitive Petite protection anatomique

Confi ance® slip Sous-vêtement absorbant

Incontinence par regorgement Perte d’urine en goutte-à-goutte, en continu Confi ance® for men Protection spécifi que pour hommes

Incontinence par instabilité vésicale Perte d’urine en jet Confi ance® Secure Grande protection anatomique

MoliCare mobile® Sous-vêtement absorbant

Incontinence réfl exe Vidange involontaire et incontrôlée de la vessie et/ou incontinence fécale

MoliCare® Change complet

Tableau 2. Les produits Tena.


Incontinence d’effort ou faiblesse urinaire Faible volume d’urine Tena® LadyTena® Protective Underwear

Protège-slipSous-vêtement absorbant

Incontinence par regorgement Perte d’urine en goutte-à-goutte, en continu Tena® men Protection spécifi que pour hommes

Incontinence par instabilité vésicale Perte d’urine en jet Tena® ComfortTena® Pants

Petite protection anatomiqueSous-vêtement absorbant


Tena® Slip Tena® Flex

Change complet


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de façon à limiter au mieux les désagréments liés à l’incontinence urinaire :• réduire la consommation de boissons excitantes ;• aller très régulièrement aux toilettes (sans attendre

l’envie d’uriner) ;• consulter en cas de fuites urinaires ;• répartir les boissons dans la journée en limitant leur

prise après dix-huit heures ;• perdre du poids ;• lutter contre la constipation ;• porter des vêtements faciles à ouvrir ;

• arrêter de fumer ;• consommer régulièrement des légumes et du pain.L’ensemble de ces mesures, associées à une prise en charge thérapeutique globale, permettra au patient de retrouver confiance en lui et de renouer avec une vie sociale normale. w

Tableau 3. Les produits Alvita.


Incontinence d’effort ou faiblesse urinaire Faible volume d’urine Alvita® Culotte absorbante Protège-slipSous-vêtement absorbant

Incontinence par regorgement Perte d’urine en goutte-à-goutte, en continu Alvita® Protection anatomique men Protection spécifi que pour hommes

Incontinence par instabilité vésicale Perte d’urine en jet Alvita® Protection anatomique Petite protection anatomiqueSous-vêtement absorbant


Alvita® Change complet Change complet

Aborder l’incontinence au comptoir : les conseils d’Yves Carlet, pharmacien d’officine

F L’incontinence est encore, hélas, un sujet tabou. De manière générale, la patientèle ressent beaucoup de difficultés à en parler. Pourtant, il est important d’aborder cette problématique et d’accompagner les patients chez lesquels il est soupçonné une incontinence.

F Chaque patient est un cas unique et doit être traité avec sérieux, tact et prudence. L’incontinence est vécue différemment d’une personne à une autre. Certaines vont aborder le sujet avec dérision, d’autres avec beaucoup de pudeur. Il a été constaté que les personnes souffrant d’incontinence suite à une intervention chirurgicale ou un accouchement acceptaient mieux la situa-tion car elle était transitoire. C’est pourquoi, le pharmacien doit appréhender chacun en fonction de son attitude et de son ressenti.

F L’officinal doit être sensibilisé au sujet de l’incontinence et maîtriser le large panel de produits disponibles sur le marché pour exercer pleinement son rôle de conseil et répondre à la demande en proposant les meilleures solutions.

F Déceler un cas d’incontinence au comptoir se révèle être un exercice complexe. Néanmoins, quelques signes peuvent amener le pharmacien à engager une discussion : l’achat de serviettes périodiques de la part d’une femme a priori ménopausée, la dispensation de certains traitements dont les fuites urinaires constituent un effet secondaire, etc.

F Le pharmacien doit être à l’écoute, faire preuve d’une grande discrétion et diriger, s’il y a lieu, son patient vers un espace de confidentialité afin de le placer dans des conditions

de dialogue. Au cours de cet échange, il doit être vigilant aux expressions qu’il emploie. Il est préférable d’éviter certaines formules, telles que "faire pipi au lit", "couches" "salir le lit", qui risquent d’infantiliser la personne et de lui faire ressentir sa situation comme étant dégradante. Il faut bâtir son discours avec des mots simples et adaptés. L’objectif est finalement de faire comprendre au patient que sa situation n’est pas sans issue et qu’il est essentiel de l’accepter et d’en parler afin de trouver les solutions les plus satisfaisantes.

F Sur le marché, il existe de nombreux produits adaptés à chaque type d’incontinence. Avant d’orienter un patient vers l’un d’entre eux, il est conseillé de lui donner des échantillons afin de sélectionner la protection qui lui conviendra le mieux.

F Les protections présentent de nombreux avantages, tant pour le client que pour les aidants (personnel soignant, aide-ménagère et famille). En effet, ces produits permettent d’amé-liorer les conditions d’hygiène et de confort ainsi que la qualité du sommeil, en évitant les réveils nocturnes répétés. Ils offrent la possibilité "d’être au sec", évitent les troubles cutanés et les odeurs. Ainsi, les patients retrouvent une véritable autonomie et une vie sociale normale. Enfin, les produits pour incontinence urinaire sont devenus techniquement performants, de bonne qualité et discrets. Le rapport qualité/prix reste raisonnable et abordable même si cela reste onéreux pour certaines bourses.

Yves CarletPharmacien titulaire et adhérent Alphega

Pharmacie du Bargi, 74460 Marnas

Déclaration d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir

de confl its d’intérêts en relation

avec cet article.

Pour en savoir plus• www.alphega-pharmacie.fr/web/consumer-facing/alvita-incontinence

• www.hartmann.fr/wps/portal/hartmann/accueil/#&panel1-2&panel2-1

• www.tena.fr/

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