28
1 Approche genre et droits des migrants subsahariens au Maroc Rouduiyata Oumar NIANG (1) & Professeur M. My Ali El Yamlahi RESUME La migration subsaharienne au Maroc, qui revêt des formes diverses, est récemment devenue un fait de société, puisqu’elle a tendance à se généraliser à toutes les composantes ethniques et religieuses des pays subsahariens. Les hommes ont toujours été les protagonistes de ce phénomène migratoire subsaharien, comme en atteste d’ailleurs l’abondance de la littérature consacrée aux études sur la migration au Maroc, contrairement aux femmes qui n’étaient invitées sur la scène migratoire qu’en tant que personnes qui suivent leurs époux. Cependant, depuis une décennie, les femmes émigrent de manière indépendante, notamment en quête d’un travail pour satisfaire leurs besoins essentiels et ceux de leur famille d’origine. La féminisation observée dans les flux migratoires au Maroc peut sans doute en partie s’expliquer par la conséquence de différents problèmes posés par la modification des codes sociaux (effritement des valeurs traditionnelles, perte de l’autorité parentale ou maritale), par la crise économique sans précédent que connaissent les pays subsahariens, par les changements socioculturels (évolution des mentalités) et éducatifs (augmentation du niveau d’instruction des femmes). On est passé d’une migration passive à une migration dans laquelle ces femmes subsahariennes sont de véritables actrices, soumises aux mêmes contraintes que les hommes alors qu’elles en étaient autrefois protégées. Ainsi, nous constatons que certaines femmes migrantes, à l’instar des hommes, ont des difficultés sur le plan de l’insertion sociale (problèmes de logement, d’emploi, de sécurité,…), juridique (séjour illégal) et administratif. Cet article étudie les droits des migrants subsahariens au Maroc, tout en cherchant à comprendre les causes de la migration subsaharienne. Il s’inscrit dans un nouveau champ d’investigation qui prend en compte l’intégration du genre dans les phénomènes migratoires. Mots clés : migration, subsahariens, droits, genre.

article corrigé.docx

Embed Size (px)

Citation preview

Approche genre et droits des migrants subsahariens au Maroc

Rouduiyata Oumar NIANG (1) & Professeur M. My Ali El Yamlahi

RESUMELa migration subsaharienne au Maroc, qui revt des formes diverses, est rcemment devenue un fait de socit, puisquelle a tendance se gnraliser toutes les composantes ethniques et religieuses des pays subsahariens. Les hommes ont toujours t les protagonistes de ce phnomne migratoire subsaharien, comme en atteste dailleurs labondance de la littrature consacre aux tudes sur la migration au Maroc, contrairement aux femmes qui ntaient invites sur la scne migratoire quen tant que personnes qui suivent leurs poux. Cependant, depuis une dcennie, les femmes migrent de manire indpendante, notamment en qute dun travail pour satisfaire leurs besoins essentiels et ceux de leur famille dorigine. La fminisation observe dans les flux migratoires au Maroc peut sans doute en partie sexpliquer par la consquence de diffrents problmes poss par la modification des codes sociaux (effritement des valeurs traditionnelles, perte de lautorit parentale ou maritale), par la crise conomique sans prcdent que connaissent les pays subsahariens, par les changements socioculturels (volution des mentalits) et ducatifs (augmentation du niveau dinstruction des femmes). On est pass dune migration passive une migration dans laquelle ces femmes subsahariennes sont de vritables actrices, soumises aux mmes contraintes que les hommes alors quelles en taient autrefois protges. Ainsi, nous constatons que certaines femmes migrantes, linstar des hommes, ont des difficults sur le plan de linsertion sociale (problmes de logement, demploi, de scurit,), juridique (sjour illgal) et administratif. Cet article tudie les droits des migrants subsahariens au Maroc, tout en cherchant comprendre les causes de la migration subsaharienne. Il sinscrit dans un nouveau champ dinvestigation qui prend en compte lintgration du genre dans les phnomnes migratoires.Mots cls: migration, subsahariens, droits, genre.ABSTRACT Subsaharianmigration in Morocco has become a social fact due to its tendency to be generalized to all ethnic and religious groups to subsaharian countries. According to literature, in Morocco, migration was a phenomenon dedicated to men, Contrary to women, who were usually invited to go with their husbands in migration. However, since a decade, more women enter in the migratory streams. In fact, they migrate independently to look for jobs for their needs that of their native families. This increase of the female participation in migration to Morocco is maybe explained by a consequence of different problems such as modification of socials codes (traditional values erosion, father or husband authority loss), but also by the subsaharian countries economical crisis, by the socio-cultural changes (mentality evolution) and educational (increase of the female learning level), etc. The passive migration becomes an active migration. Nowadays, we notice that migrating women have difficulties of social insertion (employment, housing, security problems), juridical (illegal stay) and administrative plan. This paper aims at studying subsaharian migrants rights in Morocco, to understand the causes of the subsaharian migration. This work opens a new investigation field who takes charge of gender in the migration phenomenon. Key words: migration, subsaharian, right, genderIntroductionLAfrique a vcu ces dernires dcennies un troublant phnomne dimmigration vers lEurope quon attribue souvent aux bouleversements sociopolitiques, aux phnomnes dmographiques comme la surpopulation, la dgradation du niveau de vie des populations, au contraste croissant entre les pays du nord et ceux du sud et la recherche de meilleures ressources. Pour toutes ces raisons, les populations subsahariennes se sont lances sur la route de la migration, quelle soit volontaire ou force. Les Hommes migrent des lieux o les ressources manquent et immigrent vers les lieux o elles sont plus abondantes. Cette rue vers lEurope a pouss les autorits europennes prendre des mesures draconiennes pour juguler le phnomne tout en renforant les moyens de surveillance au niveau de leurs frontires. Un blocage systmatique des portes de lEurope face lacharnement et lengagement des jeunes la recherche de bien-tre a renforc la position du Maroc en tant que pays de transit et daccueil. Ainsi, danne en anne, le Maroc voit arriver beaucoup de gens pour des raisons diverses dont la poursuite dtudes, droit d'asile, exil forc d aux conflits, regroupement familial, recherche de mieux-tre, transit, etc. Ces nouvelles vagues dimmigration ont entrain une confusion sur les profils des immigrs subsahariens au Maroc. En effet, Mehdi Lahlou et Claire Escoffier (2002: pp 15-39) affirment qu partir des annes 90, le Maroc connait une nouvelle forme dimmigration dite de transit, qui au fil du temps a fini mme par devenir elle-mme une immigration. En effet, le choix du Maroc comme terre de transit ou daccueil ne peut tre compris sans ces relations traditionnelles que le Maroc entretenait avec les pays dAfrique , mais aussi de lapprciation que les populations de ces pays ont constamment porte sur le Maroc (.) considr comme un refuge, une terre dune prosprit relative et de mieux-tre.Dans le mme ordre dide, Marfaing et Wippel (2004: p17) avancent que: Le pays tait dj auparavant li lespace subsaharien travers des relations conomiques, politiques et religieuses, caractrises par une mobilit de biens, dides et dindividus.

Actuellement, on note dans cet exode la prsence non seulement accrue des femmes, mais aussi leur participation en tant qu actrices de ces flux migratoires. Ainsi, on assiste la prise en compte de plus en plus significative de leur prsence, de limpact sur leurs conditions de vie, sur les rapports sociaux de sexe dans la famille, leurs positions dans la communaut et la socit dans sa globalit. Toutefois, leur rle et leur place ont t toujours sous-estims, tant par les chercheurs de toutes disciplines confondues que par le systme patriarcal de certaines socits africaines qui considre que les femmes sont dpendante des hommes, principaux supports conomiques et dtenteurs de lautorit de la famille. Les femmes migrantes apparaissaient auparavant conomiquement inactives et donc non digne dintrt en tant quobjet dtude ou sujet politique. Cest en ce sens que Oso (2000) souligne que laspect invisible de la migration internationale fminine sexplique en premier lieu par lexistence dun vide thorique dans le domaine de la littrature sur les mouvements de population . Ainsi, abordant cette invisibilit des femmes migrantes, Gaspart (1996) va plus loin en parlant mme de leur instrumentalisation.La dficience en statistiques contribue la relgation des femmes dans des rles passifs alors qu'elles sont au contraire les vritables actrices de la migration, soit en supplant le mari migr dans le rle de matre de maison au niveau du foyer de dpart, soit comme femmes migrantes. Un tel constat pose la question de lintgration du genre dans les tudes sur la migration. Le genre sapplique aux hommes et aux femmes, ainsi quaux rapports sociaux qui les unissent dans les socits. Une analyse rtrospective de la question migratoire rvle lexistence dune production de travaux et de recherches. Mais rares sont celles o la femme apparat comme protagoniste active de la migration. Charef (2002) signale que sur les 11202 rfrences bibliographiques disponibles au centre de recherches Migrinter de Poitiers, seules 544 abordent de manire succincte la question migratoire au fminin . Apprciant mieux le rle conomique des femmes, les chercheurs se doivent de les introduire leurs modles thoriques et de ne plus les considrer comme une migrante passive, qui suit son mari, mais plutt comme une migrante active motive par des forces conomiques et actrice de son destin, autonome par rapport aux hommes. De fait, pouss par la ralit, les pays daccueil commencent admettre de plus en plus limportance des migrations fminines.Nous avons constat quau Maroc les migrants subsahariens, ou certains dentre eux, vivent dans des conditions extrmement difficiles, et que la prsence des femmes migrantes dans les grandes villes marocaines est en hausse sensible. Cette problmatique mrite dtre tudie et analyse pour en comprendre les causes profondes et apprhender limpact des organisations de la socit civile ddies leur accueil ou de dfense des droits des migrants sur leurs conditions dexistence et leur cadre de vie. La premire partie est consacre ltude du cadre thorique et mthodologique, savoir la justification du choix du sujet et du milieu, lobjectif gnral, les objectifs spcifiques, la dfinition des termes du sujet, la problmatique, les hypothses de recherche, la revue de la littrature, le modle thorique, etc.Dans la seconde partie, nous prsentons le cadre gnral de ltude savoir les conditions de migration des hommes et des femmes des pays dorigines vers le Maroc, les conditions dexistence des migrants subsahariens au Maroc, et ltude du genre et des droits des migrants subsahariens au Maroc.La troisime partie est consacre aux analyses et aux interprtations des rsultats de lenqute travers la transcription et linterprtation des entretiens et des donnes recueillies. Enfin, notre conclusion gnrale prsente une synthse et quelques recommandations en vue de renforcer la place des femmes subsahariennes dans les phnomnes migratoires au Maroc.Chapitre I: Des travaux scientifiques qui ne prennent pas compte les femmes dans la migrationLe choix de notre sujet nous est venu dabord d'un constat de dficit en travaux scientifiques sur cette question. La raret des tudes oppose lactualit grandissante de la problmatique tmoignent dun paradoxe surmonter. En effet, limmigration subsaharienne revt une importance capitale et fondamentale surtout dans les socits subsahariennes en qute urgente de mieux-tre. Larrive de migrants au Maroc a pris une ampleur extraordinaire ces dernires annes, occasionnant des perturbations de la migration rgulire. Ainsi entre le 01/10/2010 et 24/12/2010, 366 migrants dont des femmes provenant de quatorze pays dAfrique noire ont t reus dans un seul centre (rapport CAM 2010 trimestre 4). Le Royaume du Maroc, de par sa tradition de pays daccueil des migrants subsahariens, de par sa stabilit politique et sa situation de mieux-tre relatif, mais aussi de par sa proximit avec lEurope, ne cesse de devenir un carrefour o se croisent de nombreux migrants venant dAfrique noire, aux origines et statuts socio-juridiques diffrents. Malgr tous les efforts fournis par les chercheurs il y a peu dinformations sur le genre et les droits des migrants subsahariens au Maroc car lvolution du phnomne sest opre de faon exponentielle.La particularit de lapproche genre et droits des migrants subsahariens au Maroc, constitue une ouverture du sujet ncessaire en particulier en raison des modifications des caractristiques des migrations au Maroc, qui permet de mettre en vidence l'ingalit des droits dont sont victimes les subsahariens selon leur sexe. Ce travail pourrait servir galement de base une rflexion plus gnrale sur limmigration subsaharienne dans les pays daccueil.Intensification du phnomne migratoire et durcissement des mesures de scurit aux frontires de lEurope.

Le royaume du Maroc est connu comme une terre daccueil des migrants subsahariens pour leur formation ou en vertu des relations historiques et cela bien avant la colonisation. Il nen reste pas moins que bon nombre de travaux de recherche sur les migrations subsahariennes situent les mouvements migratoires massifs des subsahariens au Maroc partir des annes 1990. Au dbut des annes 2000, les mouvements migratoires de lAfrique subsaharienne vers le Maroc prennent de lampleur. Les drames de Ceuta et Melilla, enclaves espagnoles au Maroc, de lautomne 2005[footnoteRef:1] constituent un moment historique de ces migrants (Migreurop, 2006). En effet, avec le durcissement des mesures de scurit aux frontires de lEurope, on observe leur reflux, par vagues successives, vers certaines grandes villes marocaines. Pour bon nombre dentre eux, le Maroc devient par dfaut un pays daccueil o le projet migratoire est envisageable. De faon classique, des regroupements soprent toujours sur la base nationale: Maliens, Bissau guinens, Sngalais, Guinens de Conakry, Gambiens, Ivoiriens, Congolais etc., dveloppent des mobilits intercommunautaires, les fameuses filires, et sont contraints vivre dans des lieux invisibles (banlieue, quartiers dfavoriss,) et dans la prcarit. Dans certains de ces lieux invisibles se trouvent parfois des sous- tats-majors aux usages multiples: squestration de femmes, tribunal, rtention dun ou plusieurs membres de la communaut en cas de trahison. On note aussi, de plus en plus, le caractre corvable merci, bon march et docile de la main duvre, le contrle exerc sur les travailleurs au niveau certaines entreprises et usines au point de les empcher de stirer une ou deux minutes, sans tre blms ou mme radis. [1: Les vnements de Ceuta et Melilla ont entran la mort de plus de 11 personnes reconnues officiellement comme victimes de cet pisode de la guerre que livre lU.E aux ressortissants de pays pauvres du Monde en gnral et en particulier ceux de lAfrique sub-sahariens.]

On assiste galement, ces dernires annes, une intensification du phnomne de la migration dite de transit. La procdure dasile mise en place en 2005 par le bureau du HCR Rabat napporte pas de relle protection aux rfugis en ayant fait la demande, qui ne bnficient ni dune protection juridique efficace ni daucun droit spcifique. Ils continuent, comme tous les autres migrants, tre arrts et refouls au mpris de lobligation de non-refoulement de la Convention de Genve. Il ne leur est remis aucun titre de sjour ni document de voyage, ce qui les contraint rester au Maroc sans pour autant y bnficier dun sjour rgulier et donc sans pouvoir accder un travail ni bnficier dun rel accs aux soins. Il se pose, pour l'accueil des migrants subsahariens, de nombreux problmes lis notamment l'accs au logement, l'emploi, l'cole pour leurs enfants. Tous ces problmes engendrent des discriminations, et celles-ci ne sont ni plus, ni moins que des ingalits, des injustices dont sont le plus souvent victimes les migrants subsahariens au Maroc.Aujourdhui, on assiste en outre une fminisation de la migration. Auparavant la mobilit des femmes tait limite des mouvements migratoires via le mariage ou le regroupement familial, ce qui les rendait trs dpendantes de leur statut familial. Dornavant, on constate une mancipation certaine : de plus en plus de femmes, jeunes clibataires, ou ayant dj une famille en charge, partent seules ltranger pour trouver du travail et sy installer plus ou moins durablement. Ce changement sexplique par le fait que les femmes ont une aspiration gagner plus dindpendance travers limmigration, par le fait aussi que les femmes soient plus qualifies que les hommes pour travailler dans des secteurs o les pnuries de main-duvre sont fortes, comme les services aux particuliers ou dans laction sociale (Daouda Dianka, 2007: thse fatou-fatou).Lampleur et la fminisation du phnomne, de plus en plus remarquable, suscitent des interrogations notamment sur la prise en compte effective des droits de ces migrantes subsahariennes: quelles sont les vritables causes de la migration subsaharienne? Pourquoi les subsahariens choisissent-ils de migrer ltranger et plus particulirement vers le Maroc? Auparavant les familles subsahariennes nacceptaient pas que leurs filles migrent pour un lieu quelconque en dehors des liens conjugaux, pourquoi aujourdhui, ces familles ne sopposent-elles plus au dpart des femmes, voire lencouragent au contraire ? Cette migration exprime-t-elle un dsir dacqurir une certaine autonomie, une quelconque mancipation qui serait le produit dun changement socioculturel et ducatif not chez les femmes subsahariennes? Sagit-il dune remise en cause du systme patriarcal, ou de ladoption de nouveaux comportements dans les socits africaines?

Lobjectif principal de cette tude est dapprhender les impacts du phnomne migratoire en termes de respect des droits des migrants subsahariens et de gestion de la fminisation de la migration au Maroc. Pour cela, nous nous sommes attach tudier les causes lorigine de la migration subsaharienne au Maroc; expliciter les conditions de migration aussi bien dans les pays dorigine que dans le pays daccueil; comprendre les principales raisons de lvolution du phnomne de la migration et la prise en compte des droits des migrants subsahariens. Apprhender les consquences de la migration surtout chez les femmes subsahariennes et comprendre les mcanismes daction et les rsultats des organisations daccueil ou de dfense des droits de migrants subsahariens ont galement fait partie de nos proccupations.Pour atteindre ces diffrents objectifs, nous adoptons la dmarche partant des hypothses suivantes :La migration subsaharienne au Maroc depuis son dclenchement na cess de samplifier de jour en jour. Ce constat part du principe que ce phnomne est li la crise conomique que traverse lAfrique Subsaharienne. Cette crise, du fait de la dgradation progressive et continue des activits conomiques, ne cesse de saggraver. Mais la migration subsaharienne au Maroc a pris une telle ampleur quelle ne peut tre explique par les seules difficults conomiques. Elle est aussi favorise par le contexte sociodmographique et politique, les conflits interethniques de certains pays dAfrique noire et aussi la russite des premiers candidats.

Hypothses secondaires Le sous-emploi et labsence de ressources conomiques dans les pays dAfrique noire est la principale cause de la migration subsaharienne. La fminisation de plus en plus manifeste du phnomne de la migration subsaharienne est due au fait que les femmes ont une certaine responsabilit familiale, mais aussi au relvement de leur niveau dinstruction. La russite socioconomique de certains immigrs est la source de motivation pour dautres candidats lmigration. La politique d'immigration au Maroc ne semble pas se proccuper de la situation des migrants subsahariens. Les associations qui uvrent pour lamlioration des conditions de vie et la dfense des droits des migrants subsahariens ne semblent pas avoir assez de moyens matriels et financiers pour une meilleure prise en charge.II-Mthodologie adopte. Notre mthodologie repose principalement sur la recherche documentaire et les techniques dinvestigation pour la collecte de donnes fiables, savoir les enqutes et les entretiens auprs dun chantillon reprsentatif de la communaut des migrants subsahariens au Maroc, plus prcisment Rabat et Casablanca. Cette dmarche nous permet de recueillir le maximum dinformations et davoir des lments dapprciation objectifs afin de tirer les conclusions qui simposent. Comme techniques dinvestigation utilises pour la collecte des informations: le questionnaire qui portait sur 100 personnes (50 femmes et 50 hommes) et ralis 70 % Rabat et 30% Casablanca grce au CAM de Rabat et les associations de migrants. Nous avons ralis 10 entretiens auprs des personnes ressources, autrement dit des personnes ayant des opinions et des expriences diverses concernant la migration subsaharienne de manire gnrale, et en particulier au Maroc. Ces enqutes se sont droules de mai juillet 2012 au niveau de Casablanca et rabat en alternance. Les entretiens se faisaient en franais, langue plus ou moins matrise par la majeure partie des migrants. Lidentification des migrants subsahariens et le droulement des enqutes ont t rendus possibles grce aux responsables des associations de migrants malgr la mfiance et la rticence de certains migrants collaborer. Ainsi, les fiches denqute ont t dpouilles et traites par types dinformation recherche grce Excel. Nous avons utilis le tableau crois dynamique pour ressortir les informations par rapport aux variables hommes et femmes (genre). Ainsi les rsultats de notre travail sont prsents sous forme de tableaux accompagns parfois de figure, suivis danalyse et dinterprtation.Alors les enqutes effectues sur les migrants subsahariens ont concern douze nationalits et des hommes et des femmes. On trouve dautres nationalits, mais lessentiel de notre tude sera axe sur ces pays. Le Choix des enquts est alatoire, ce qui fait quon na pas le mme nombre pour les 12 nationalits touches par lenqute.Tableau 1: Rcapitulatif des enqutes

SexeSNRDCCG.TdGN.MT.MLBFC.ING.CRGBTotal

Homme

15116621438350

Femme

195118553300050

Total346211411747383100

Source: Enqute de terrain juin 2012SN: Sngal; RDC: Rpublique dmocratique de Congo; CG: Congo; TD:Tchiad; GN: Guine Conakry; MT: Mauritanie; ML: Mali; BF: Burkina Fasso; CI: Cte dIvoire; NG: Nigria; CR: Cameroun; GB: Gambie;

Chapitre VI: Conditions de vie et dexistence prcaires, droits des migrants non respects et des femmes victimes de discrimination et dinjustice.Rpartition selon lge et le sexeLe tableau ci-dessous nous donne une rpartition selon lge des migrants pour les deux sexes confondus. Les statistiques montrent que la tranche la plus importante concerne les jeunes dau plus 30 ans, reprsentant 70% des enquts. La seconde tranche moins jeune adulte (31 50 ans) reprsente 28%, et environ 2% pour les plus de 50 ans Ceci nous permet de dire que limmigration intresse plus les jeunes garons et filles dau plus 30 ans. On constate que dans cette tranche dge, les femmes reprsentent 54.3% de leffectif. Cest une proportion relativement leve par rapport aux annes antrieures.Tableau2: Rpartition selon lge et le sexe Tranchedge15 30 ans31 50 ans50 ans et plus

Hommes 321701

Femmes 381101

Total702802

Source: Enqute de terrain juin 2012

Que lon se rfre larticle paru dans l'dition du 07.04.10 du quotidien le Monde qui disait que 49 % des migrants seront des femmes en 2010. Selon les Nations unies, les femmes reprsenteront 49 % des migrants en 2010, contre 49,4 % en 2000. C'est en Europe que leur part est la plus leve (52,3 %), suivie de l'Ocanie (51,2 %) et du continent amricain et des Carabes (50,1 %). En Afrique en revanche, la migration concerne en majorit les hommes, les femmes ne sont que 46,8 % -, comme en Asie (44,6 %) o il existe cependant de fortes disparits : plus de 70 % des migrants en Indonsie sont des femmes. Ce qui est certain, avec ce rythme, cest que la migration des femmes en Afrique dpassera sous peu les 50% comme dans les autres continents. Monsieur DIANKA dans sa thse sur la migration fminine internationale: le cas des Fatou-Fatou disait que: ces changements nont pas toujours t bien perus par le milieu de dpart, ni pris en considration par les textes rgissant les migrations. Les rglements ont continu traiter automatiquement les femmes comme des personnes charge. Aujourdhui, la migration internationale sngalaise en plus dtre le rsultat des initiatives individuelles intgre aussi des stratgies familiales, ethniques ou confrriques. Au dpart, conjoncturelle, elle est devenue, depuis le dbut des annes 1970 et 1980, une composante structurelle. Cette gnralisation du phnomne migratoire toutes les composantes de la socit sngalaise explique aujourdhui, le nouveau visage de sa migration internationale. Cest ce que lon constate aujourdhui: limmigration est surtout luvre de trs jeunes personnes, garons et filles, maris et clibataires, des adultes de moins de trente ans surtout.

Figure 2: Rpartition selon lge et le sexeRcapitulatif des professions selon le sexe Lhistogramme met en exergue les diffrentes catgories socioprofessionnelles des migrants subsahariens des deux sexes et au sein des femmes ellesmmes de notre chantillon. Comme indiqu ci-dessous (tableau 2), nous avons quatre catgories: les migrants sans profession ou qualification (19%), ceux qui possdent un mtier (45%), les tudiants et stagiaires (30%) et les cadres/techniciens (6%). Lanalyse comparative nous montre que les femmes qui nont pas de qualification reprsentent 36.8% des migrants dans cette catgorie, 44,4% pour les mtiers (coiffure, maonnerie, restauration, commerce,), 70% des tudiants/Stagiaires et 33% des cadres/techniciens.Tableau3: rcapitulatif des professions selon le sexeSexePas de professionMtiers /autres professionsEtudiant/StagiaireCadre /TechnicienTotal gnral

Homme12259450

Femme72021250

Total gnral1945306100

Source: Enqute de terrain juin 2012On constate que les migrants rencontrs ont pour la majeure partie dentre eux, une profession ou sont inscrit dans un cursus universitaire. Parmi eux, les femmes sont bien reprsentes. Si on regarde de plus prs pour la catgorie mtier, on retrouve la coiffure, le commerce, la restauration, la couture qui sont pratiqus par les femmes, et pour les hommes nous avons le commerce, la maonnerie, lectricit, ferraillerie, entre autres. Pour ces mtiers on note labsence de diplmes ou certificats de qualification. Nous avons aussi des professions tel que le football et lebasket-ball.

Fig1: catgories socioprofessionnelles / sexeCe qui est relever, en outre, cest lemploi de beaucoup de personnes dans des entreprises marocaines comme temporaires ou journaliers. Par rapport leurs statuts on peut aisment comprendre que les migrants soient confronts la difficult de subvenir correctement leurs besoins, car la frquence dobtention de travail comme permanent est trs faible. Conditions de dpart du pays dorigineIl sagit ici de relever les principales raisons de dpart des migrants de leur pays dorigine. La somme des raisons autres que politiques, conomiques et sociales reprsente 44% et concerne principalement des raisons dtudes, de sant, de guerre, dinstabilit, dinscurit, entre autres. Laspect conomique est la principale raison pour 32% des enquts, ensuite les raisons sont politiques (12%) et sociales (12%). Le facteur conomique renvoie la crise conomique et le sous-emploi qui svissent de manire gnrale dans plusieurs pays subsahariens, depuis ces dix dernires annes. La crise alimentaire de 2008, a occasionn la flambe des prix des denres de premire ncessit, provoquant du coup la chute du pouvoir dachat des populations. La faiblesse, ou mme labsence de moyens financiers chez certains, les oblige au dpart vers dautres horizons la recherche de mieux-tre (plus 30% des enquts, rapport stage Rouduiyata Niang). Nous notons aussi des dparts attribus par les migrants des raisons sociales. Les ingalits sociales au sein dune mme population sont lorigine de plusieurs dparts. Les premiers qui ont vcu limmigration et qui lont russie, ont fortement impact sur ceux qui sont rests au pays. De ce fait, cest la famille qui se mobilise pour mettre en place les fonds ncessaires pour faire partir leur enfant ltranger. Ds lors, le candidat limmigration porte lespoir de toute une famille. Il lui revient dhonorer sa famille, do lacharnement des migrants russir tout prix. La russite sociale de ces migrants devient la principale motivation pour dautres candidats limmigration (Daouda Dianka, 2007).Dautres problmes provoquant le dpart ont t voqus tels que les incomprhensions entre membres dune mme famille, les conflits internes (instabilit en Afrique centrale comme la RDC, et en Afrique de louest avec la Cte divoire) ou encore les problmes dmancipation des uns des autres, etc., qui semblent avoir jou un rle important dans la dcision de quitter le pays dorigine pour les personnes rencontres.La situation de guerre que ces pays ont subie (pays), a engendr des dplacements en masse des populations vers dautres pays beaucoup plus stables, dont fait partie le Maroc. On note parmi ces migrants une bonne partie de femmes qui reprsentent 59 % de notre chantillon. Cette proportion de femmes dans leffectif total des populations en dplacement pour des raisons de guerre est tout fait habituelle, car, et cela est dsormais bien connu, en cas dinscurit, les femmes et les enfants sont les plus vulnrables. Toutes ces raisons voques ont t dveloppes par certains, comme Sandrine (ge, arrive au Maroc depuis X mois de PAYS et travaille dans telle chose, ou suit telles tudes) qui soutient que: Les principaux facteurs de la migration sont entre autres: une croissance conomique faible, une rpartition des revenus, une surpopulation troitement lie une forte croissance dmographique, des taux levs de chmage, des conflits arms et les purations ethniques, les violations des droits de lhomme, les perscutions, les catastrophes naturelles (la dgradation de lenvironnement en gnral), ainsi quun faible niveau de gouvernance. Lvolution dun pays en voie de dveloppement peut, dans un premier temps, renforcer les migrations internationales parce quun nombre de personnes acquiert les moyens dimmigrer mais ils ne trouvent pas encore des perspectives satisfaisantes dans leur pays. Pour les migrants interviews et qui sont au Maroc pour des raisons dtudes, on note une proportion leve de femmes (environ 70 % des tudiants et stagiaires). Ils sont de plus en plus nombreux grce aux bourses octroyes par lAMCI, lAgence Marocaine de coopration Internationale, qui a t cre en 1986 dans le but den faire un outil simple, rapide et efficace dexcution de la politique de coopration que se fixe le gouvernement marocain. LAMCI, place le capital humain au cur de sa stratgie de partenariat en faveur dun dveloppement conomique et social durable de coopration sud-sud du Royaume. LAgence reflte la politique marocaine douverture et dpasse le cadre de coopration avec les seuls pays de lAfrique subsaharienne, mme si de nos jours, la proportion des tudiants des ces pays dpassent de loin les tudiants issus dautres contres ou continents. Les tudiants bnficiaires de cette bourse de coopration, sont regroups en groupe de pays pour faciliter leur catgorisation. Ainsi, quatre groupes de pays se dgagent: 1- le groupe des pays dAfrique subsaharienne, 2- le groupe de pays darabes et 3- le groupe de pays Asiatiques, europens et amricains. De tous ces groupes de pays, celui dAfrique subsaharienne dtient la proportion la plus largie par rapport au quota officiel des inscrits annuellement comme le montre une publication, cite par Amadou Hamet Sally Niang: Evolution des quotas officiels des bourses accords aux pays partenaires au titre de lanne acadmique 2003-2008, rpartition par groupe de pays: Pour lanne universitaire 2003-2004, lAgence a accueilli 1226 tudiants, le groupe de pays dAfrique subsaharienne occupe 75%, pour le groupe de pays arabes 21% contre 4% pour le groupe de pays asiatiques, europens et amricains. Lanne universitaire 2004-2005, sur un effectif de 1351 tudiants trangers boursiers, le groupe de pays dAfrique dtient 77%, et 17% pour le groupe de pays arabes pour 6% quant au groupe de pays asiatiques, europens et amricains. En 2005-2006 pour un effectif de 1426 tudiants, nous avons 70% des tudiants appartenant au groupe de pays de lAfrique subsaharienne, avec 23% pour le groupe de pays arabes et 7% pour le groupe de pays asiatiques, europens et amricains. Lanne universitaire de 2006-2007 lAgence a accueilli un effectif de 1411 dont les 76% cest pour le groupe de pays de lAfrique subsaharienne, et 16% pour le groupe de pays arabes contre 8% pour le groupe de pays asiatiques, europens et amricains. Et enfin pour lanne universitaire 2007-2008, leffectif des tudiants boursiers de lAgence est de 1546 dont le groupe de pays de lAfrique subsaharienne dtient un taux de 73%, avec un taux de 18% pour le groupe de pays arabes contre 9% pour le groupe de pays asiatiques, europens et amricains.On peut retenir partir de ces donnes que le taux des tudiants du groupe de pays asiatiques, europens et amricains crot lentement, mais de faon continue.Cependant, il existe plusieurs tudiants et stagiaires qui sont venus au Maroc par leurs propres moyens et tudient dans les tablissements privs le plus souvent, parmi lesquels on dnombre beaucoup de femmes (Amadou Hamet Sally Niang) Signalons que certains pays, pendant ces rcentes annes, ont men une politique dducation pour tous et de maintien des filles lcole (Sngal, Mali,), ce qui pourrait justifier le nombre lev de filles. Aprs avoir trait ce point, nous essayerons de voir les moyens de transport utiliss par les migrants pour se rendre au Maroc.Nous avons remarqu que 51% des migrants ont eu des informations sur le Maroc avant leur dpart. Cependant 48% dentre eux nen ont eu aucune. Les sources dinformations leur proviennent en gnral des parents immigrs au Maroc depuis longtemps, des amis, entre autres. Ils font partie des migrants qui trouvent souvent un tuteur ds leur arrive au Maroc (au fait, cela sappelle des filires dimmigration!).Un parcours migratoire difficile76 % des enquts ont accd au Maroc par la voie lgale, et 24% sont entrs par la voie clandestine. Certaines personnes venues par la voie lgale ne sont plus ou ne rsident plus lgalement au Maroc. Nombreux parmi eux, une fois lintrieur, restent dans la clandestinit avant davoir des papiers lgaux pour y rester. Depuis 2003, le Maroc sest dot dune lgislation fortement rpressive avec la loi 02-03-03 qui fait du sjour irrgulier sur le sol national un dlit: elle a transform limmigrant en situation irrgulire en un dlinquant susceptible de troubler lordre public. Est-ce que les droits fondamentaux de ces migrants auxquels sapplique cette loi ont t pris en compte? Peru et devenu juridiquement un lment de trouble lordre public, ltranger en situation irrgulire fait, depuis lors, lobjet de chasses lhomme permanentes. Ainsi, on assiste, en milieu de journe, des courses poursuites entre forces de lordre et migrants dnoncs (Jean-louis Edogue Ntang et Michel Peraldi: ltablissement des migrations dans la capitale marocaine). Les femmes reprsentent 60% des migrants entrs par voie lgale, contre 17% pour ceux qui sont venus par la voie illgale. Ces analyses nous permettent de dire que les femmes migrent gnralement par la voie lgale, et respectent donc, plus que les hommes, les procdures administratives en matire dimmigration. Il nen demeure pas moins que certaines dentre elles empruntent la voie clandestine pour accder dans le pays hte. Il faut noter que la plupart des personnes entres par la voie illgale ont eu un parcours migratoire difficile avec des problmes de tous ordres au niveau des frontires. Une fois lintrieur aussi, elles ont du mal trouver un endroit o habiter. Ce qui nous amne nous poser les questions suivantes: avaient-elles des informations du pays? Navaient-elles pas de tuteurs potentiels au Maroc? Cest ces interrogations que nous tenterons de trouver une rponse travers lanalyse des rsultats. On constate que le quart des migrants possde un tuteur (personne qui donne lhospitalit) au Maroc et les 73% dentre eux sont des femmes. Ce qui est un taux dinsertion plus satisfaisant chez les femmes que chez les hommes. Le tutorat procure des avantages significatifs pour linsertion et lobtention dun travail correct. Cest ce que Dianka, dans sa thse Migration fminine internationale: le cas des Fatou-Fatou, dmontre. Les moyens utiliss par 86 des 147 femmes enqutes (Dianka, 2007) qui ont accept de dire comment elles ont procd pour trouver un emploi et sinsrer sur le march du travail. Les 37 femmes qui dclarent avoir trouv du travail grce laide dune parente proche ou lointaine reprsentent 43,02 %. A ce niveau, cest la solidarit qui se manifeste, puisque les plus anciennes utilisent leur rseau (amies, anciens ou nouveaux employeurs, etc.) pour placer les nouvelles arrivantes. Cest presque la mme situation pour les migrants de manire gnrale ici au Maroc. Moyens de subsistance au MarocOn voit, travers le tableau ci-dessous (figure 6), que 56% des interviews dclarent vivre des revenus de leur travail, 22% du soutien des parents, 19% des centres daccueil, 1% de la mendicit et 2% de la prostitution. 82% des femmes vivent de leur travail et du soutien des parents et 16% dpendent des centres daccueil. Cette situation sexplique par le fait que les femmes qui choisissent le Maroc comme pays daccueil ont, pour la plupart, une qualification qui leur permet dexercer un travail. Ce qui est trs diffrent pour les hommes chez lesquels on note un pourcentage lev de personnes sans qualification. Ils sont dailleurs souvent employs au dchargement des camions de lgumes, tt le matin. Certains sont embauchs pour la vente au niveau des stands du march, pour un salaire denviron 20 dirhams (1,8 euros) la journe (daprs Jean-Louis Edogue Ntang et Michel Peraldi, ). Labsence de qualification a t voque par 13 % des interviews comme tant un lment bloquant linsertion sociale. On nessaie pas de montrer limportance dune qualification mais certains pensent quavant tout il faut avoir une profession pour esprer avoir un travail. Sachant toute la difficult pour les gens qualifis de trouver un emploi, on peut deviner aisment le dsespoir de ceux qui nen ont pas. Linsertion est beaucoup plus difficile pour les migrants sans qualification, ni professionCependant certains sont employs dans les industries, les hammams... dautres enfin sont recruts dans les chantiers de btiments, de jardinage, etc. Les femmes qui nexercent pas un mtier (coiffure, commerce, ) sont, quant elles, souvent employes comme domestiques dans les quartiers aiss de la ville. Signalons enfin que les immigrants qui bnficient du soutien de leurs parents sont pour la plupart des tudiants ou stagiaires au Maroc (rsultats enqutes 2012).

Figure 6: Rpartition selon les moyens de subsistance des migrantsLinsertion sociale est juge difficile pour 83 % des interviews contre 17% qui la trouvent facile. Parmi ceux qui jugent difficile linsertion sociale, 49% sont des femmes. Cependant elles reprsentent 52 % de ceux qui pensent linsertion sociale nest pas difficile. Ces donnes nous permettent de jauger les conditions dexistence des migrants. Cependant la connaissance de cette donne ne permet pas une analyse approfondie des principales raisons. Ceci nous a pouss mettre en place un tableau de non-insertion sociale qui nous donne des informations sur les raisons et les avis des diffrentes personnes rencontres.A travers ce tableau (figure 8), on voit nettement que la langue et la couleur de la peau sont largement cites comme des facteurs bloquants quoi?. 48% des interviews considrent que la langue est un lment dintgration et dinsertion. Ceci recoupe trs bien les analyses courantes en matire dimmigration dans la mesure o lon sait que la langue est le premier facteur dintgration et quelle peut faciliter linsertion des individus migrants dans le tissu socio-conomique. Cest ainsi que Jean-Louis Edogue Ntang et Michel Praldi affirment que:Leur position sur le march du travail dpend de leur capacit parler ou pas la langue du pays d'accueil. "Si elles se trouvent en inscurit linguistique, la premire tape sera trs souvent de travailler dans une enclave ethnique." Toutes les communauts possdent l'quivalent de leur "Chinatown" qui distribue le travail dans les entreprises contrles par la diaspora, dans le textile ou la restauration. La "niche ethnique" constitue un pas de plus vers l'intgration. Contrairement aux enclaves, les employeurs sont des nationaux et les populations trangres y sont mixes entre diffrentes nationalits et origines, comme dans les entreprises de nettoyage (anne de publication: page de la citation).La couleur de la peau (33%) vient juste aprs la langue. Pour certains leur difficult sinsrer socialement est notamment due un problme de racisme et/ou de discrimination. Les deux preuves principales voques sont les problmes lis la location dun logement et laccs au travail. En effet, ils dnoncent et tmoignent sur le fait que les marocains refusent dlibrment de louer leurs logements vides des migrants subsahariens. Sils acceptent, cest alors le prix de la location qui est doubl, voire tripl par rapport celui propos un marocain. Dans le cadre du travail aussi, ils jugent discriminatoire le mode de recrutement qui embauche une personne marocaine prioritairement une personne migrante mme si elle est moins comptente que cette dernire. Ils remarquent aussi que la stigmatisation se dveloppe peu peu en pointant le fait que les personnes africaines sont interpelles avec des termes considrs comme trs dprciatifs: azzy , mon ami, camarade sont des termes frquemment entendus. La discrtion des migrants subsahariens conditionne la tolrance de leur prsence. Ainsi, ils ne se promnent jamais en groupe, ne se runissent pas dans les cafs et rasent les murs pour rentrer chez eux. Les subsahariens sont devenus objets de mfiance, de rejet, de prjuger de tout genre, et subissent un racisme violent. Daprs Jean-Louis Edogue Ntang et Michel Praldi, les femmes marocaines sont nettement plus nombreuses que les hommes refuser une union avec des personnes qualifies de noires (64% et 55%) (AMERM, 2009). Pour Nadia, une marocaine de 50 ans, il ne sagit pas simplement dun problme racial: cest plus profond. Cest un sentiment qui sest perptu de gnration en gnration. Il est extrmement rare, par exemple, quune marocaine pouse un noir, mme musulmane. On craint le fameux quen dira-t-on de la famille et/ou de lentourage. La femme en question entendra souvent sa mre ou une proche lui dire quil y a suffisamment de bons Marocains pour ne pas aller chercher un Noir. Toutefois, des alliances matrimoniales ont bien eu lieu, et elles sont de plus en plus frquentes au fur et mesure que se banalise la prsence des subsahariens dans les populations urbaines marocaines. Des couples sngalo-marocains se sont forms (Therrien, 2009, cit par Jean-Louis et Peraldi). A Fs dans le cadre de la confrrie Tijaniyya, dautres couples mixtes sont signals, par nos enquts..

Figure 8: Raisons de non insertionDes conditions sociales juges pniblesLa majeure partie des migrants rencontrs (65 %) ne sont pas du tout satisfaits de leurs conditions dexistence. Seuls 35 % sont satisfaits de leur situation au Maroc. Et dans ces proportions on voit que les femmes satisfaites sont plus nombreuses que les hommes. Les raisons de non satisfaction voques sont nombreuses et diverses. Dabord, le logement des migrants nest pas des meilleurs. Lessentiel des migrants habite les quartiers populaires des grandes villes marocaines et vit dans des conditions extrmement difficiles. Cest le cas de certains foyers de migrants qui regroupent plusieurs dizaines de personnes, lexemple du quartier Kamra (Rabat) en est une parfaite illustration. Expliquez ici quest-ce que cest que ce quartier, o il est situ dans lagglomration et quelques caractristiques gnrales, et pourquoi la plupart des migrants vivent l, et do vous tenez cette information. Dans leur articleun ancrage discret: ltablissement des migrations subsahariennes dans la capitale marocaine, Jean-Louis Edogue Ntang et Michel Praldi disent ce propos: si marginalits urbaines il y a aujourdhui au Maroc, la migration subsaharienne en est une des figures bien relles et encore bien nigmatique. En effet, si lexistence dune migration subsaharienne est un fait avr, (Pian, 2009; Alioua, 2009; AMERM, 2009) paradoxalement, les migrants subsahariens restent toujours confins un statut de non-existence dans la socit marocaine. Tout se passe comme si leur prsence ne pouvait tre tolre que sous la forme dun transit provisoire et prcaire. Ce caractre provisoire saccompagne invitablement dun phnomne de marginalisation. Cette analyse renforce les avis de certains enquts dans la mesure o ils se sentent abandonns et livrs eux-mmes. Un migrant camerounais trs malade sest prsent au CAM, il a t reu par lassistant social et moi et il dit: je suis malade! Je voulais partir en Espagne finalement jtais pris par les hommes de scurits qui mont frapp, maltrait, dpossd de tous mes papiers et de mes 300 dh qui me restais et mont retourn Oujda. Arriver destination, je ne savais plus quoi faire, jai dcid de marcher de Oujda Rabat, jai fais 20 jours de route et je depuis que je suis arriv je suis dans des difficults, actuellement je me sens trs mal, aidez-moi SVP.En outre, ils naccdent pas un travail et ne bnficient pas dun rel accs aux soins sanitaires. Alors quils ne vivent pas dans la salubrit comme latteste ce passage tir toujours du mme document de Jean-Louis Edogue Ntang et Michel Peraldi Dans les mondes populaires, trouver un espace louer nest pas toujours ais. La demande locale, sans cesse croissante oblige les migrants se rabattre vers un type de logement clandestins et insalubres. Ces logements, le plus souvent situs dans les sous-sols, sont dans un tat de dgradation avanc: absence de fentres, forte humidit, toilettes sommaires, obstruction rgulire des conduits dvacuation, etc. Ainsi, les groupes communautaires sentassent souvent plus de soixante personnes dans une ou deux chambres exiges. Des couvertures tales mme le sol servent de lit, les ustensiles de cuisine sont rcuprs dans les dcharges. Le surpeuplement et ltroitesse du cadre de vie des migrants favorisent la promiscuit, souvent lorigine des pidmies de gale. Dans ces conditions dextrme prcarit, ils ne bnficient que du soutien des organisations tels que le CAM (Centre dAccueil des Migrants Rabat) et le SAM (Service dAccueil des Migrants Casablanca) dpendants de lONG CARITAS (voluant dans les domaines de la sant, du social, de lducation, de la formation), MSF (Mdecins Sans Frontire), ou le Comit dEntraide Internationale (CEI) qui relve de lglise vanglique amricaine. Avez-vous un extrait dentretien que vous avez-vous-mme men pour illustrer ceci, il faut le mettre en valeur ici.Ils ne bnficient galement ni de protection juridique efficace ni de droit spcifique. On peut aussi constater que durant leur sjour, certains dentre eux sont le plus souvent victimes de tracasseries policires, voire mme arrts et refouls parce quils ne possdent aucun titre de sjour (enqutes de terrain 2012). Malgr tout, ils restent toujours dtermins et nont quun seul objectifpour certains : partir en Europe si jamais ils trouveraient les moyens de sy rendre.Droits des migrants ne sont pas toujours respectsNotre enqute montre que 31% ont t victimes dune injustice alors que 69% dclarent ne pas avoir t victimes dune quelconque injustice. Parmi ceux qui ont vcu linjustice on constate que les femmes sont plus nombreuses avec un pourcentage denviron 55%. Elles sont souvent victimes de discrimination sexuelle au travail, traitement ingal de salaire, harclement sexuel, Cette donne vient illustrer la thorie sur la vulnrabilit spcifique des femmes. Dans la mme dynamique, on voit que les hommes subissent moins dinjustice que les femmes dans la migration (45 contre 55%, enqute 2012). Pour avoir des informations concernant la connaissance de leurs droits et devoirs, nous allons dresser quelques tableaux qui rsultent des enqutes de terrain et qui abordent les problmes y affrents.Des migrants qui matrisent plus leurs devoirs que leurs droitsLes rponses obtenues par rapport la question relative la connaissance des droits et devoirs des migrants sont positives pour 71% des enquts, autrement dit, ils connaissent leurs droits et devoirs. Parmi les droits cits, nous recensons le droit la nationalit, la circulation, lgalit des chances, pour la plupart des cas. Pour les devoirs les plus voqus nous avons: le respect des lois et institutions du pays, le respect des cultures et des individus, entrer et rester lgalement au Maroc. Nous constatons que les rponses recenses nont pas fait tat des autres types de droits (travail, sant, ducation), contrairement aux devoirs qui sont cits de manire plus ou moins exhaustive. Daprs les enqutes, les migrants matrisent plus leur devoir que leur droit.Dans cette catgorie, il faut signaler que la majeure partie d`entre eux connaissent davantage leurs devoirs que leurs droits. Ceci est trs perceptible avec les changes pendant linterview. Mettez ici un extrait dentretien.Les femmes reprsentent 53% de ceux qui connaissent leurs droits et devoirs. A linverse, davantage dhommes (58%) figurent parmi ceux qui ne connaissent pas leurs droits et devoirs. Les 29% restants ne connaissent ni leurs droits ni leurs devoirs. Ces informations sont utiles pour linterprtation des donnes et la comprhension de certaines situations des migrants.Lapplication des textes et des conventions ratifis par le Maroc pour une prise en charge effective est ncessaire.Lamigration des femmes sinscrivait uniquement dans le cadre de la politique de regroupement familial. Au mme titre que les migrations masculines, la dcision de partir rsulte gnralement dune stratgie individuelle de survie. La crise conomique qui sest empare des mnages ruraux et urbains, le chmage, les difficults que rencontrent les hommes faire face aux besoins courants des mnages et le dsir grandissant des femmes dacqurir une autonomie ont eu une incidence directe sur lampleur de ce nouveau phnomne. Le dplacement et la dcouverte de nouveaux horizons ont permis lmancipation de la femme migrante, une recomposition des rapports de genre et une destruction des conceptions figes. Maries, clibataires, veuves ou divorces, certaines dentre elles sont devenues de fait des femmes chefs de mnage, ont pris en charge lducation des enfants et acquis un pouvoir dcisionnaire dans le mnage.

Cependant, force est de reconnaitre que certaines dentre elles nont pas eu cette chance, faisantmme parfois lobjet de rejet de la part de leur famille et de la socit.

Nous avons tent, tout au long de ce document, de dcrire et danalyser les conditions de vie et dexistence, de linsertion sociale et des droits et devoirs des migrants subsahariens au Maroc. Cet exercice nous a permis darriver la conclusion selon laquelle il nexiste pas de relles prises en charge de la migration et que les droits des migrants ne sont pas pris en compte, au regard des migrants victimes dinjustice. Il existe un dcalage entre les textes et les conventions ratifis par le Maroc et la ralit de terrain. Cependant, il existe des organisations daide aux migrants tels que CARITAS (CAM et SAM) et le Comit dEntraide Internationale (CEI) qui relve de lglise vanglique amricaine, ainsi que Mdecins Sans Frontire (MSF), qui uvrent tous pour lamlioration des conditions dexistence des migrants et leur insertion sociale. Ces organisations ne peuvent cependant pas faire face lampleur de ce phnomne et elles voient leurs moyens diminuer danne en anne par leurs bailleurs.

Il est regrettable que dans ce pays quon nest pas de relles politiques migratoires appuyes et veiller mettre en place des politiques dintgration, linstar des pays du Nord, qui leur enseignent la langue, les lments de droit indispensables pour ne pas contrevenir la loi quenul nest cens ignorer; oprationnaliser le dispositif lgislatif, rglementaire, institutionnel et politique visant lintgration de la dimension genre dans les politiques migratoires. Il serait bon de mener un plaidoyer auprs des dcideurs sur la problmatique de limmigration.Il est intressant de continuer tudier, mettre jour encore les causes qui poussent des millions dhommes et de femmes hors de leurs pays, afin de trouver le moyen dinfluer en amont sur ces causes. Il sagit en fait de permettre tout tre humain de vivre dignement dans son propre pays, entour de sa famille et de ses proches. Autrement dit, il faut agir sur les causes des migrations au niveau des pays dorigine ou de dpart. Il sagit ainsi dexplorer les quelques pistes proposes par le PNUD pour agir sur les causes des migrations. Agir sur les causes des migrations cest crer les conditions dune croissance conomique en faveur des pauvres, par le biais dun commerce quitable, de la rduction de la dette des pays pauvres, par lajustement des politiques dagro-exportations qui pour le moment ont pour consquence de dstructurer les circuits alimentaires rgionaux car la production des villages est intgre la production mondiale et les communauts sappauvrissent mangeant ce quelles ne produisent pas et produisant ce quelles ne mangent pas. La pauvret jette sur les routes des hommes, des femmes, des enfants qui cherchent tout simplement survivre. Les aider produire, exporter, vivre de leur travail, rduira les migrations pour sortir de la misre (Sandrine, Centre AVEC). LOMC a aussi un rle jouer car elle peut dfinir des rgles commerciales mondiales qui accroissent les possibilits dexportation et rduisent les cots dimportation pour les pays pauvres, il est important de mener une action politique pour lencourager dans ce sens. Il faut galement lutter contre la discrimination fonde sur le sexe et les violences faites aux femmes (55% cas de victimes dinjustice et violence dans cette tude), lappartenance ethnique ou la race. Des rformes sociales sont ncessaires pour supprimer toutes les formes de discrimination. Les droits de lhomme sont essentiels au dveloppement humain. Les droits de lHomme doivent tre garantis par la loi. La lgislation est une des composantes cl des droits de lhomme et les obligations juridiques cet gard doivent se reflter dans les politiques notamment conomiques. Il est important de renforcer le systme international des droits de lhomme et daider les institutions rgionales promouvoir les droits de lhomme. Enfin, les guerres, les conflits ethniques, linscurit crent des mouvements incessants sur notre plante. Les viter permet de favoriser une vie digne aux populations et agit sur les causes des migrations. Nous sommes loin d'avoir explor exhaustivement ce phnomne de migration subsaharienne au Maroc et sa fminisation croissante. Il serait trs pertinent que dautres tudes relevant de la sociologie et traitant des droits des femmes, de la prostitution chez certaines migrantes, et tant dautres thmes relatifs la migration fminine, soient entreprises. Les rflexions doivent tre menes afin de dtecter les leviers actionner pour sortir ce continent du marasme conomique, de la pauvret et des conflits ethniques. Les femmes africaines ont toute leur place dans cette lutte.Remerciements: A Monsieur Moussa MBODJ pour sa participation la ralisation de ce document, au Directeur du CAM, Monsieur Vincent, la Charge des projets du CAM, Madame Cline, lAssistante sociale du CAM, Madame Sada, pour ne citer que ceux l, de mavoir facilit le travail avec les migrants. Rfrences bibliographiques:

Amadou Hamet Sally NIANG: Immigrs subsahariens qualifis en activit Casablanca : Itinraires migratoires et trajectoires professionnellesCHAREF M., 2002. Les migrations au fminin. In Sud Contact, Agadir, 208 p.Daouda Dianka: Thse La migration internationale fminine partir du Sngal vers la France: le cas des Fatou-Fatou.GASPARD F., 1996. De linvisibilit des migrantes et de leurs filles leur instrumentalisation. Revue Migrants-Formation, n 105, pp 15-30.Jean-louis Edogue Ntang et Michel Peraldi: ltablissement des migrations dans la capitale marocaine. LAHLOU L., CLAIRE E., (2002), Rapport de lenqute migrants mene au Maroc in Limmigration Irrgulire subsaharienne travers et vers le Maroc, Barcelone pp.15-39MARFAING, Laurence; WIPPEL, (2004). Le renouveau des relations marocaines avec lAfrique subsaharienne: la formation dun espace conomique transsaharien? Wippel,Steffen; Marfaing, Laurence : Les relations transsahariennes lpoque contemporaine. Paris : 29-60.Rapport trimestriel Centre dAccueil des Migrants 4me Trimestre 2010 Octobre-Dcembre Repris du rapport mondial sur le dveloppement humain 2003 du PNUD.Rouduiyata Oumar Niang: Rapport de stage(genre et insertion sociale des migrants subsahariens au Maroc: cas du centre daccueil des migrants (CAM)) de Rabat, 2012.Sandrine Dapens, Centre AVEC, fvrier 2005: les causes de migrations: pistes danalyse et action.OSO L., 2000. Limmigration en Espagne des femmes chefs de famille. Cahiers du CEDREF, n 8/9 sur Femmes du Sud, Chefs de famille sous la direction de Bisilliat. Paris, Karthala, pp 73-77.11