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7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
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Dominique GouxMonsieur ric Maurin
Les entreprises, les salaris et la formation continueIn: Economie et statistique, N306, Juin 1997. pp. 41-55.
Citer ce document / Cite this document :
Goux Dominique, Maurin ric. Les entreprises, les salaris et la formation continue. In: Economie et statistique, N306, Juin
1997. pp. 41-55.
doi : 10.3406/estat.1997.2571
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_estat_1842http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_estat_523http://dx.doi.org/10.3406/estat.1997.2571http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571http://dx.doi.org/10.3406/estat.1997.2571http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_estat_523http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_estat_18427/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
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Rsum
Les entreprises, les salaris et la formation continue
Depuis 1 971 , la France a mis en place un systme original de formation continue de type formez ou
payez . Chaque entreprise est tenue d'allouer une partie de sa masse salariale la formation continue.
A dfaut de raliser cet effort minimum, elle doit verser un fonds public les sommes correspondantes.
Les contraintes et les cots d'un tel systme amnent s'interroger sur les effets rels d'une telle
politique la fois sur le fonctionnement de l'entreprise et sur les avantages qu'en retirent les salaris.
partir d'une analyse des rsultats d'une enqute de Nnsee sur la format ion et la qualif ication
professionnelle, il ressort que la formation continue en entreprise n'a pas d'effet propre trs important
sur les salaires de ceux qui en bnficient. En revanche, elle accrot de faon significative la stabilit
des emplois de ceux qui en ont profit. Cet effet positif reste cependant ingalement rparti parmi les
salaris et ce sont finalement ceux qui auraient le plus besoin de renforcer leurs liens avec le march
du travail qui accdent le moins ce dispositif.
Abstract
Companies, Employees and In-Service Training
In 1971, France introduced an original "train or pay" in-service training system. Companies are bound toallocate part of their payroll to in-service training. If they do not make this minimal effort, they have to
pay the corresponding sums to a public fund. The constraints and costs of this system raise questions
about the real effects of such a policy on the way in which companies operate and the advantages for
employees.
An analysis of the results of an INSEE survey on training and professional qualifications f inds that in-
service training alone does not have a very strong effect on the wages of those given the training.
However, it significantly improves job stability. Nevertheless, this positive effect remains unevenly
distributed among employees. When all is said and done, it is the individuals who normally need most to
strengthen their ties with the labour market who have the least access to this mechanism.
ZusammenfassungUnternehmen, Arbeitnehmer und berufliche Weiterbildung
Seit 1971 hat Frankreich ein originelles System der beruflichen Weiterbildung geschaffen, das nach der
Devise "ausbilden oder zahlen" funktioniert. Jedes Unternehmen muB einen Til seiner Lohn- und
Gehalts- masse fur die berufliche Weiterbildung aufwenden. Wenn ein Unternehmen dise
Mindestanstrengung nicht unternimmt, muB es die entsprechenden Betrge an einen ffentlichen
Fonds zahlen. Aufgrund der Zwnge und Kosten eines solchen Systems stellt sich die Frage nach den
tatschlichen Auswirkungen einer solchen Politik, und zwar sowohl hinsichtlich der Funktionsweise des
Unternehmens als auch hinsichtlich der Vorteile, die sich fur die Arbeitnehmer daraus ergeben.
Aus einer Analyse der Ergebnisse einer INSEE-Erhebung ber die Ausbildung und die berufliche
Qualifikation geht hervor, daB die berufliche Weiterbildung im Unternehmen an sich keine sehr groBen
Auswirkungen auf die Lhne derjenigen hat, die sie in Anspruch nehmen. Dagegen trgt sie erheblichzur Sicherung der Arbeitspltze derjenigen bei, die sie genutzt haben. Dise positive Auswirkung ist
allerdings nach wie vor ungleich unter den Arbeitnehmern verteilt; und letztendlich haben diejenigen, die
ihre Beziehungen zum Arbeitsmarkt am meisten verstrken mBten, am wenigsten Zugang zu diesem
System.
Resumen
La empresa, los salarios y la formacin continua
Desde 1 971 , Francia ha establecido un sistema original de formacin continua de tipo " Formen o
paguen ". Cada empresa se ve obligada a dedicar parte de su masa salarial a la formacin continua.
De no cumplir con ese esfuerzo mmimo, debe abonar en un fondo pblico la cantidad correspondiente.
Las obligaciones y los costes de semejante sistema nos invitan a examinar los efectos reaies de esta
poltica tanto sobre el funcionamiento de la empresa como sobre la ventajas que van sacando de l los
asalariados. Apartir de un anlisis de los resultados de una encuesta del Insee sobre formacin y
cualificacin profesional, se Ilega a la conclusion de que la formacin continua en empresa no tiene
efectos propios muy notables sobre los salarios de aquellos que se benefician de ella. En cambio,
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aumenta de manera relevante la estabilidad de los empleos de aquellos que la aprovecharon. Ese
efecto positivo sigue siendo mal repartido entre los asalariados y finalmente aquellos a quienes ms les
h a n'a falta reforzar sus vi'nculos con el mercado de trabajo, son los que menos acceden a este
dispositivo.
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MOBILITE
SOCIALE
Les
entreprises,
les salaris
et
la
formation
continue
Dominiqueoux et
ric
Maurin*
'Dominique
Goux
ap
partient au Dpartement
des tudes
conomi
ques
'ensemble de
l'Insee et ric
Maurin
est
chef
de la division
Conditions de vie des
mnages de
l'Insee.
Les
auteurs
remercient
deux
rapporteurs
anony
mes
our leurs comment
airesonstructifs.
Depuis
1971,
la
France
a
mis en
place
un
systme
original de
formation
continue
de type
formez ou
payez .
Chaque
entreprise est tenue
d'allouer une
partie
de
sa
masse
salariale
la formation continue.
A
dfaut
de raliser cet effort
minimum,
elle doit
verser un fonds public
les
sommes correspondantes.
Les
contraintes
et les
cots d'un
tel
systme
amnent
s'interroger sur
les effets
rels d'une telle politique la
fois sur
le
fonctionnement
de l'entreprise
et sur
les avantages
qu'en retirent
les salaris.
partir d'une
analyse
des rsultats d'une
enqute
de l'Insee sur la formation et
la qualification professionnelle, il ressort que la formation continue en entreprise
n a
pas d'effet propre trs important sur
les salaires de ceux
qui en bnficient.
En revanche,
elle
accrot de
faon significative la stabilit des emplois
de ceux
qui
en ont
profit.
Cet
effet
positif
reste
cependant
ingalement
rparti
parmi
les salaris
et
ce sont finalement
ceux qui auraient
le
plus besoin de renforcer
leurs liens avec le march
du
travail qui accdent le moins ce dispositif.
Les noms et dates entre
parenthses
renvoient
la bibliographie
en
fin
d'article.
Pour timuler l'effort de formation dans les
entreprises,
la France a mis en place depuis
1971 un systme original de type
formez
ou
payez
: chaque entreprise de plus de dix sala
ris
doit
affecter chaque anne
une
fraction
minimum
de
sa
masse salariale
la
formation
de ses
salaris.
Si
l'employeur
ne peut justifier
avoir fourni l'effort minimum, il
verse
le compl
ment
des organismes
publics prestataires de
formation. La
France tire
partie
de
la
capacit
de son
administration
centrale
contrler le
respect d'un dispositif
lgal
contraignant pour
les
entreprises et difficile imaginer dans des
pays beaucoup moins centraliss comme les
tats-Unis par exemple. Initialement fixe
0,8 de la masse salariale en 197
1
la
contribu
tioninimum demande aux entreprises a
progressivement augment
au
cours
des
vingt
dernires
annes
pour atteindre
aujourd'hui
1,5 de la
masse salariale.
L'une
des justifications d'un systme contrai
gnant'ensemble des entreprises pourrait tre
la suivante : quand bien mme la formation
continue serait un investissement
rentable,
au
cune entreprise
n'a
intrt
prendre
l'initiative
de
le
financer,
car
rien
ne
lui
garantit
que
ses
concurrentes ne
vont
pas
recruter
les salaris
qu'elle
aura contribu
rendre
plus productifs.
De
fait,
la monte en puissance
du
formez ou
payez
franais
a
lgitim
l'entreprise comme
lieu de
formation et s'est accompagne d'un
accroissement
assez
considrable de
l'effort
global de formation
continue. En 1991, les
entreprises
dpensent, en moyenne,
3,2 de
leur
masse salariale
brute
en formation,
contre
seulement
2
en 1982
et
1,6 en 1974
(Berton
et Podevin, 1991). Chaque anne
les
entreprises
franaises forment
une
partie de leur salariat
deux
fois
plus
importante
que
les
entreprises
anglaises ou
amricaines
(Lynch, 1994).
CONOMIE ET
STATISTIQUE
N 306,
1997-6
41
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L'analyse de la distribution de l'effort de
for
mation
montre
cependant
que le systme
actuel
fonctionne comme
une
taxe pour beaucoup de
petites
entreprises (elles prfrent payer plutt
que former) tandis que la plupart des grandes
entreprises dpensent spontanment
beaucoup
plus
que
le minimum requis
par
la
loi
(Santoni,
1993). Par ailleurs,
selon l'Inspection
gnrale
des affaires sociales,
les
organismes chargs de
la gestion des fonds
correspondant
la
taxe
de
formation ont des
cots
de fonctionnement
bien
plus levs que
ceux prvus
par
la loi. En 1990,
les
frais de
fonctionnement reprsentaient
9
10
des dpenses
de
formation
de
ces
organis
meslors que selon
le projet
de loi de finances
ils
ne devaient pas dpasser
1,2
(Mda
et
Lajoumard, 1992).
Au
total,
le
dispositif
de formation continue la
franaise incite
aujourd'hui
les entreprises
fournir un
effort
de
formation
qui situe la
France dans
la trs bonne moyenne des pays
industrialiss, mais
ce dispositif
apparat
simultanment lourd et
coteux
grer (pour
une
prsentation des systmes de
formation
trangers,
cf. encadr 1). La question
essent
ielle st
alors de savoir
si, au-del
de ses cots,
le
dispositif amliore
la
productivit
et
les
salaires des salaris et s'il
augmente
la dure de
vie
des
emplois.
Un
impact rel encore
difficilement
valuable
S
'agissant
de la productivit et des salaires, on
sait
encore
peu
de
choses sur l'impact
de la fo
rmation
continue telle
qu'elle se
pratique
en
France. Toutefois, exploitant
les dclarations
administratives
faites
par les
employeurs pour
justifier leurs prestations
de
formation
conti
nue,Delame et Kramarz (1994) suggrent que
Encadr
1
LES
PRINCIPAUX SYSTMES
DE
FORMATION CONTINUE
L'TRANGER
La formation des salaris
en cours
de carrire repr
sente un
investissement dont
il
est difficile de prvoir
l'avance
si
c'est
le
salari qui en
tirera le plus
grand profit ou l'entreprise pour
laquelle
il
travaille,
voire une
entreprise
concurrente (Bishop, 1994). Il
peut
en
rsulter
un
effort global de formation tout
fait infrieur
celui dont
pourraient
profiter,
l 'optimum,
l'ensemble des salaris
et
de
leurs
em
ployeurs.
Pour contourner cette
difficult, les principaux
pays
industrialiss ont adopt
des
stratgies
assez
varies, chacun
essayant
de tirer partie de ses atouts
culturels et institutionnels propres (Lynch, 1994).
L'Allemagne peut s'appuyer sur
l'implication
trad
itionnellement forte des
entreprises
dans
la
formation
des
jeunes
et
sur la
capacit des organisations pa
tronales locales et
sectorielles
garantir
la proprit
de l'effort de formation aux entreprises qui
le
ral
isent. En outre, les programmes de formation font
l'objet de discussions et d'accords entre les trois
partenaires que
sont
les
syndicats,
les
entreprises
et
l'tat.
Il
en rsulte une
grande confiance
des
salaris
dans la formation
dispense
par les entreprises : la
trs grande
majorit
des
jeunes
salaris allemands
passent
dans ce dispositif, durant lequel ils accept
ent 'tre pays
comme
des apprentis
c'est--dire
beaucoup moins que
le
niveau auquel
leur
formation
gnrale pourrait leur permettre de prtendre. Enfin,
une
majorit
de formations sont sanctionnes par
des diplmes reconnus au
niveau
national.
Aux tats-Unis comme en Allemagne, le systme de
formation continue est
un
peu
l'image
du systme
de formation initiale,
en
l'occurrence flexible, vari,
compltement dcentralis. Cependant, le
systme
amricain n'a
pas
de
vritable pouvoir
de
certifica
tion.
ux
dbuts
des annes
quatre-vingt-dix,
le
nombre de salaris
amricains
forms
chaque
anne
est
toutefois
deux
fois
plus
faible qu'en France
et
c'est
actuellement
un
sujet
de
proccupation
pour
les Amricains de trouver
un
cadre
institutionnel
sus
ceptible
d'encourager les entreprises
davantage
former
leurs
employs.
Au
Japon,
les
relations
entre
salaris
et
employeurs
sont traditionnellement beaucoup
plus
stables
qu'aux tats-Unis. Le rendement salarial de l'ancien
net
st peu prs quatre
fois
plus
grand
au Japon
qu'aux
tats-Unis : les
employs sont
donc
peu
incits
changer d'entreprise en cours de carrire.
Et les entreprises ne sont gure
dissuades
de former
intensivement leurs
salaris tout au
long
de leur car
rire d'une faon souvent
informelle.
La formation
continue
est
pour
l'essentiel
prise en main par
les
seniors
de l'entreprise.
En
Grande-Bretagne,
jusqu'au dbut des annes
quatre-vingt, les
structures
de formation professionn
elle
nt
permis
une
partie importante
des
jeunes
de
suivre
une
formation
continue ou
d'entrer en
ap
prent iss ge : instaurs en 1964, les comits de
formation de l'industrie {Industrial Training Boards)
avaient en
charge
la
promotion du dveloppement
des
qualifications
de
la
main-d'uvre et ont
fort
ement contribu l'expansion des structures de
formation et d'apprentissage, grce
d'importants
soutiens financiers.
Le fonctionnement
des
ITB
se
rvlait
assez
proche
du modle germanique,
crant
un
lien
fort
entre les entreprises et les coles. Sup
prims
au
cours des annes quatre-vingt,
les
ITB
ont t
remplacs par
le
programme Youth Training
Scheme,
construit sur le
modle
amricain. ap
prentis s age
et
la
formation
en
entreprise ont ds lors
beaucoup
diminu
en
Angleterre
(Blanchflower
etLynch,
1994).
42 CONOMIE ET STATISTIQUE N 306,
1997-6
7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
6/18
les dpenses en formation continue ont un im
pact
significatif
et
positif sur
la productivit des
entreprises, ds lors
que
cette
dpense
est
volontaire,
c'est--dire au-del du
seuil
impos
par la
rglementation.
La
source statistique
uti
lise
par
ces deux auteurs reste cependant
trs
fragile,
une
partie
des employeurs
ne
dclarant
leurs efforts de formation qu' hauteur du min
imum
requis
par
la loi (Delame et Serfaty,
1990).
Par ailleurs, Goux (1994)
montre
qu' niveau
de formation donn et
exprience
gale, les
salaris ayant reu
une
formation entre 1988 et
1993 reoivent, en moyenne en 1993, un salaire
environ 10 plus lev que les autres. Aux
tats-Unis, les tudes disponibles
valuent
galement 5-10 , les diffrences de salaires
une date donne
entre
salaris
forms
et
non
forms. Les
valuations sont assez remarqua
blement proches pour
des pays comme
le
Royaume-Uni,
la
Hollande ou
l'Australie (pour
une revue
de
ces rsultats,
voir
Lynch, 1994).
Cependant,
la
plupart
des tudes existantes n e
dterminent
pas dans
quelle
mesure les diff
rent ie ls salariaux refltent
l'impact
rel de la
formation
continue
ou
s'ils
signifient que
seuls
ont
eu
accs cette prestation ceux qui,
avant
mme la formation, taient dj
jugs
plus eff
icaces
dans
leur
travail.
De
mme,
aucune
tude
ce jour ne permet de faire le dpart entre le
bonus
salarial
propre de la formation continue
et la
gnrosit
salariale particulire des entre
prises
qui consentent le plus grand effort de fo
rmation.
Les
salaris bnficiant de formation
continue
sont
mieux pays que la moyenne des
salaris,
mais
sont-ils
mieux
pays
que leurs
collgues d'entreprise
n'ayant
pas suivi
de fo
rmation
?
Les
donnes issues
de l'enqute
Formation et Qualification
Professionnelle
(FQP) permettent d'apporter quelques l
ments de rponses originaux ces questions.
de
s'affranchir
d'une bonne partie de l'ambi
gut
ffectant
les valuations s' appuyant
sur
de simples photographies
des
individus,
une
date
donne,
aprs
leur
passage dans le dispositif.
Ainsi parmi
les
salaris n'ayant pas chang
d'entreprise
entre
1988
et
1993, une personne
ayant bnfici de
formation
continue sur
cette
priode gagne,
en
moyenne,
en 1993,
5
de plus qu'un salari qui tait dans la mme
situation en 1988
(mmes
diplme, secteur
d'activit,
mtier,
exprience professionnelle,
anciennet,
etc.), mais qui n'a bnfici ensuite
d' aucune formation de la
part
de son
employeur
(cf. tableau
1)(1).
Un impact
de 5
se
situe
dans
la
fourchette
habituelle
des valuations
ralises
au
niveau
international
partir
de
donnes comparables.
Comparant les salaires reus 25
ans
par un
chantillon
de
jeunes
amricains avec
ceux
qu'ils
recevaient
20 ans, Blanchflower et
Lynch (1994) constatent un avantage
de
12
pour
ceux qui ont
reu une formation
compl
mentaire de
la
part de
leur entreprise.
tudiant
l'volution
des rmunrations des
salaris all
emands sur la priode
1986-1989, Pischke
(1996)
constate
que
les
hommes
(resp. les
fem
mes) ayant bnfici d'une formation
reoivent
environ 2
(resp.
5 ) de plus que
les autres.
Mme
s'il
reste
dans la
fourchette habituelle,
un bonus de
5
est
assez considrable : il
est
du mme ordre de grandeur que l'impact sur le
salaire d'une demi-anne
complte
de scolarit
(Goux
et
Maurin, 1994)
alors que
les actions
de
formation continue ne durent gnralement pas
plus d'une
semaine.
Il est mme tellement
considrable que
l'on est encore fond se
demander s'il
reflte
l'impact rel de la
forma
tionontinue
ou s'il ne traduit pas l'effet
de
mcanismes
cachs
expliquant simultanment
les
salaires et la formation continue.
Un
impact apparent
important
sur
les
salaires
L'un des premiers atouts de l'enqute FQP
tient
dans la connaissance qu'elle donne de la situa
tion des salaris
non
pas seulement en 1993,
mais
galement en 1988,
cinq ans
plus
tt
(cf.
encadr 2).
Ces
informations permettent
d'tu
dier
'impact
des actions de formation menes
entre 1988 et
1993
sur des
sous-populations
dont
les
membres taient
dans
une situation
similaire avant leur
passage ventuel
dans le
dispositif
de formation.
L'enqute
permet ainsi
Un
effet
propre
diminu de
moiti en
tenant compte des pratiques salariales
Supposons par exemple qu'une
politique
ambit
ieuse de formation continue et des salaires
le
vs soient des choix communs aux entreprises
les plus
innovantes
des diffrents secteurs d ac
tivit. Dans
ce
cas de figure, le bonus salarial
dont semblent bnficier les salaris
forms
au
/.
Les modles conomtriques
utiliss
sont prsents dans
l'encadr 3.
CONOMIE ET STATISTIQUE N 306,
1997-6
43
7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
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Tableau
1
Impact
de la formation continue sur
les
salaires
Variable
explique : Logarithme du
salaire
de 1993
Variable explicative
Constante
Lieu
de rsidence
-
Paris
-
Province
Taille
de
l'entreprise
de
1988
- 0
9
salaris
1 0
49
salaris
50
499
salaris
-
500 salaris
ou
plus
-
Inconnue
Profession en 1 988
Cadre
-
Profession intermdiaire
-
Employ administratif
- Employ de
commerce
ou
de
services
-
Ouvrier
qualifi
- Ouvrier
non
qualifi
Sexe
-
Homme
-
Femme
Exprience en
1
988
(Exprience
en
1988)2*10-2
Anciennet
en 1988
(Anciennet
en
1988)2*10-2
Diplme
dont:
Sans diplme
CAP,
BEP
ou
quivalent
Baccalaurat
-
Grande
cole
A reu
une
formation
en
entreprise
entre 1 988 et
1993
R2
Nombre de
paramtres
Nombre
d'observations
Hommes
11,239
(0,041)
rf.
-0,119 (0,014)
-0,094 (0,017)
-0,050 (0,018)
-0,005 (0,016)
rf.
0,014
(0,059)
0,698 (0,028)
0,308 (0,023)
0,191
(0,026)
0,168 (0,053)
0,101 (0,020)
rf.
:
0,020 (0,003)0,037 (0,006)
0,005 (0,003)
-0,002
(0,008)
-0,146 (0,017)
rf.
0,087 (0,026)
0,385
(0,037)
0,045 (0,013)
0,532
43
3
263
Femmes
10,984 (0,048)
rf.
-0,129 (0,016)
-0,027
(0,019)
-0,018
(0,023)
0,012 (0,019)
rf.
-0,045
(0,60)
0,716 (0,040)
0,464 (0,030)
0,280 (0,026)
-0,015 (0,030)
0,142 (0,036)
rf.
:
0,014 (0,003)0,036 (0,006)
0,005 (0,004)
0,014
(0,009)
-0,074
(0,023)
rf.
0,055 (0,027)
0,489
(0,086)
0,034 (0,015)
0,507
43
2
489
Ensemble
11,029
(0,031)
rf.
-0,120 (0,010)
-0,061 (0,012)
-0,038 (0,014)
0,001 (0,012)
rf.
-0,026 (0,042)
0,711
(0,023)
0,369 (0,018)
0,231 (0,018)
-0,027
(0,023)
0,126 (0,017)
rf.
0,164
(0,010)
rf.
0,017 (0,002)
-0,037 (0,004)
0,005 (0,002)
0,005 (0,006)
-0,122 (0,014)
rf.
0,078 (0,019)
0,410
(0,034)
0,040 (0,010)
0,534
44
5
752
Note :
les autres
variables
explicatives
sont
la
nationalit (franaise, trangre), le secteur d'activit de l'entreprise de 1988 (NAP15) et
le
diplme
(15
indicatrices).
Les
carts-types
sont
ndiqus
entre
parenthses.Champ
:
salaris
en
1988
et en
1993,
n'ayant
pas
chang
d'entreprise.
Source
enqute
FQP 1993 (Insee).
44 CONOMIE ET
STATISTIQUE N 306, 1997-6
7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
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sein des diffrents secteurs d'activit n'est que
le reflet des pratiques salariales particulire
ment
avorables aux travailleurs dans certaines
entreprises. Il ne
doit
rien en
propre
au disposit
if
e formation lui-mme.
Pour
tester
ce
type
d'hypothse,
il
faut
pouvoir
comparer les rmunrations de salaris
forms
et non forms appartenant
non
seulement au
mme
secteur, mais appartenant galement la
mme entreprise.
C'est cette seule condition
que
l'on peut
avoir une
chance d'valuer
l'effet
propre
de la
formation continue.
ce
jour
aucune
tude ne
s'est
encore
livre
ce
genre
de
comparaisons.
La diversit intrinsque
des
politiques
salariales des entreprises est
pour
tant
de mieux
en mieux tablie
et il semble de
plus
en
plus hasardeux de la ngliger (Abowd
et
al,
1996
;
Goux etMaurin,
1996).
L encore, l'enqute FQP
1993
apporte quel
ques
clairages
originaux
puisque
son
proto
cole prcisment permis de
reconstituer
le
numro
d'identit de l'entreprise
employeuse
pour 80 des personnes enqutes. S
agissant
des personnes n'ayant
pas
chang d'entreprise
entre 1988 et 1993, plus de
3 500
entreprises
peuvent
ainsi
tre identifies. Parmi
elles,
plus
de
500 emploient
au moins deux salaris de
l'chantillon
de l'enqute FQP, pour un
total
de
plus de
1
800 observations. Trs rare, ce type de
donnes permet de comparer les rmunrations
de
salaris forms et
de
salaris
non
forms
appartenant aux mmes entreprises.
Lorsqu'on
reproduit
sur
ce sous-chantillon
l'analyse conomtrique prcdente
(c'est--
dire
sans
prendre en compte l'information
sur
l'identit des employeurs),
l'impact salarial
de
la formation continue est de
nouveau
valu
4-5 ,
soit
le
mme
bonus apparent que celui
obtenu
sur
l'ensemble
de
l'chantillon. En
r
evanche lorsque sur ce mme sous-chantillon
on neutralise la
diversit
des politiques
salaria
les
es entreprises (en
utilisant
l'information
spcifique
contenue dans FQP),
le
bonus sala
rial ombe
2 . En d'autres
termes,
la prise
en
compte
de
l'htrognit
des
pratiques
sala
riales
conduit rvaluer la baisse l'impact
salarial propre
la
formation continue
: entre
deux salaris appartenant la mme entreprise,
ayant le mme niveau de formation
initiale
et la
mme situation professionnelle en
1988,
l'un
ayant
bnfici
de formation continue, l'autre
pas, l'cart
moyen
de rmunration en 1993
n'est
pas
de
5
, mais moiti plus faible (cf. t
ableau
2,
ligne
2). La moiti des carts de
rmu
nrations attribus habituellement
(c'est--dire
Tableau 2
Impact de la formation continue sur
les
salaires
Modles
avec effets fixes
entreprises
et prise en
compte
des effets de slection
Modle
MCO
Effets fixes
entreprises
Effets fixes entreprises et correc
tion
e
la
slection
dans la
format
ion
MCQG)
Nombre d'entreprises
Taille de l'chantillon
Niveau de
formation
CEP
ou
sans
diplme
0,150 (0,040)
0,080 (0,042)
-0,099
(0,176)
118
367
CAP, BEP,
BEPC
ou quivalent
0,009 (0,022)
0,000 (0,023)
-0,103 (0,102)
156
541
Suprieur ou
gal
au baccalaurat
0,037 (0,039)
0,022 (0,046)
0,006
(0,174)
112
360
Ensemble
(hommes
et
femmes)
0,050 (0,015)
0,021
(0,016)
-0,036
(0,084)
507
1 819
Lecture : chaque
coefficient
correspond
une
rgression. Les autres variables
explicatives
sont l'exprience en 1988 et
son
carr, l a
n cienn et en 1988 et son
carr, la
nationalit (franaise.trangre), le lieu de rsidence en 1988 (Paris, Province), le
secteur
d'activit de
l'entreprise de 1988 (NAP15), la taille de l'entreprise de 1988 (5 indicatrices), la
catgorie
socioprofessionnelle en 1988 (6 postes) et un
ratio
caractrisant la participation
la formation. Dans la rgression sur
l'ensemble
des hommes et
femmes, on a
ajout
le
diplme (15
indicatrices). Les carts-types
sont
indiqus entre
parenthses.
La slection
dans les stages
de
formation continue
est modlise par un modle Probit.
Les
variables
explicatives
sont
la
nationalit
(franaise,
trangre), le
type d'unit urbaine du lieu de rsidence en 1988 (5 indicatrices),
le
nombre
d'enfants pour
les
femmes
(sans,
un,
deux et
plus), le
sexe crois avec
le
secteur d'activit de l'entreprise de 1988 (NAP15),
le
sexe crois avec la catgorie socioprofes
sionnelle
e 1988 (6
postes), le
sexe crois avec
le
diplme (6 diplmes),
le
sexe crois avec l'exprience
en
1988 et
son
carr,
le
sexe
crois
avec
la
taille
de l'entreprise de
1988 (5
tailles)
et le
sexe crois
avec
une
activit
temps
partiel.
Champ
salaris
en
1988
et en
1993
qui n'ont
pas
chang
d'entreprise. L'chantillon
est
restreint
aux
rpondants
dont
l'entreprise
est
identifie
d'une
part, et
pour
lesquels
un
autre
employ
de
l'entreprise
est
galement
prsent
dans
l'chantillon
de
l'enqute
d'autre part
(autre employ ayant
le
mme
niveau
de formation
pour
les
trois
premires
colonnes
du
tableau).
Source : enqute FQP 1993
(Insee).
CONOMIE ET STATISTIQUE N 306, 1997-6 45
7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
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Encadr
2
L'ENQUTE FQP
1993
ET LA FORMATION
CONTINUE
Les donnes sur lesquelles s'appuie
cette tude
sont
issues
de
la dernire enqute
sur
la
Formation et
la
Qualification Professionnelle
(FQP) ralise par
l'Insee
en
1993.
Cette
enqute
a
t
mene
auprs
d'un
chantillon de
18
000
individus
reprsentatifs de
la
population de
20
64
ans
rsidant
dans des
mnages
ordinaires situs
en
France mtropolitaine.
Les
person
nessidant
dans
des foyers,
en
prison ou
sans
abri au
moment
de l'enqute sont en dehors du champ. L'en
qute permet de disposer de l'ensemble des
variables
habituellement prsentes dans la
plupart
des enqutes
menes par l'Insee :
ge,
sexe, nationalit, situation mat
rimoniale nombre d'enfants,
niveau
de
formation
initiale.
Pour
les actifs et anciens
actifs,
ces informations sont
compltes
par
la date
d'entre
sur
le
march
du travail,
la situation professionnelle (chmage
ou emploi),
la
pro
fession
exerce (nomenclature
PCS
en
455
postes), la
taille de l'entreprise
employeuse
et
le
secteur d'activit
(nomenclature en
600
postes) au
moment
de l'enqute.
Pour
les chmeurs et les anciens
actifs,
les informa
tions
ortent
sur la dernire profession, la
dernire
entreprise et
le
dernier secteur d'activit frquent.
L'enqute
permet
galement
de reconstituer
la
situation
vis--vis
du march du
travail
cinq
ans avant
l 'enqute
(en l'occurrence
1
988) ainsi que,
le cas
chant, la
pro
fession
exerce, la
taille
et
le
secteur de l'entreprise
laquelle
l'individu appartenait cette date. Ces informa
tionsont de
l 'enqute
FQP
un outil
privilgi d'analyse
de
la mobilit
professionnelle.
L'enqute
FQP est
aussi l'une
des trois
sources es
sentielles
avec
les
dclarations
administratives
obligatoires
des entreprises
(formulaire
fiscal 2483)
et
celles
des
organismes
conventionns,
qui
permett
ent
'valuer
le
dispositif
de
formation
continue
en
France. Elle est
la seule
qui
permette
de
reprer
et
d'analyser le nombre de salaris passant
dans
le dis
positif sur une priode
de temps donne. Les
autres
sources
disponibles
correspondent
aux
dclarations
des
institutions
dispensant ou finanant la formation
et
ne
comptabilisent
que
les stages dispenss (et
non
pas les stagiaires).
Les rpondants l'enqute FQP dclarent
s'ils
ont
reu
une formation
au
cours
des
cinq dernires
annes.
Le cas chant, ils
indiquent
la date et
la
dure de
la dernire formation reue ainsi que
le
domaine sur
lequel portait l'effort de formation (nomenclature de
spcialits
en
9
postes).
Une des originalits du
questionnaire de
1993
est
qu'il permet d'identifier le numro Sirne de l em
ployeur
en
1993
et
en
1988. Le questionnaire permet
ainsi de
dterminer
si le
salari
a
chang d em
ployeur
depuis
le
moment
o
il
a reu
sa dernire
formation.
Le tableau suivant prsente quelques
statistiques
dcrivant l'accs au dispositif de formation continue
tel
que
le
repre l'enqute FQP.
L'effort
de
formation
continue
augmente avec
la
taille
de l'entreprise
En
Salaris
ayant suivi une formation
continue
en entreprise
entre
1 988
et
1 993
Taillede
l'entreprise
de 1993
09
salaris
1049
salaris
50 499
salaris
500
salaris
ou
plus
Ensemble
priv
Public Ensemble
Sexe
-
Homme
- Femme
17,6
18,5
20,9
23,5
32,6
24,4
41,0
36,7
26,6
23,8
34,5
31,6
28,1
26,3
Catgorie socioprofessionnelle en 1988
Cadre
Profession
intermdiaire
Employ
administrat if et
du
service
public
Employ
de
commerce
et
service
-
Ouvrier qualifi
Ouvrier
non
qualifi
18,8
28,1
26,6
8,0
11,0
4,4
33,1
30,631,2
15,0
13,2
10,2
47,1
42,631,8
18,5
25,1
10,9
47,3
52,738,0
20,6
27,8
21,9
33,4
38,230,6
12,4
18,4
10,4
33,2
42,635,4
15,4
21,9
5,9
33,3
39,5
32,1
13,1
18,7
9,8
Diplme
-
Suprieur baccalaurat
+ 2
ans
- Baccalaurat
+ 2
ans
Baccalaurat
ou quivalent
CAP, BEP
ou quivalent
- BEPC
seul
- CEP ou sans diplme
17,7
26,3
30,8
17,6
28,9
8,7
41,8
37,5
30,8
21,7
27,2
12,0
43,3
45,3
46,6
31,7
34,2
16,5
46,9
55,1
52,5
38,8
41,2
25,5
32,1
40,7
38,9
25,9
31,6
14,2
32,0
50,9
40,7
33,0
39,9
15,5
32,1
44,2
39,5
27,1
33,9
14,4
Ensemble 18,0 21,8 29,4 39,5 25,5 32,9 27,3
Champ
:
salaris
en
1988
et
1993,
gs
de
20
64 ans.
Source :
enqute
FQP 1993 (Insee).
46 CONOMIE ET
STATISTIQUE N 306, 1997-6
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lorsque
l'employeur n'est pas identifi) la
fo
rmation continue traduisent ainsi
l'existence de
pratiques
salariales gnreuses dans les entre
prises qui
fournissent
par ailleurs
l'effort
de
formation le plus soutenu.
D'aprs
plusieurs analyses
complmentaires
menes
sur
des
sous-chantillons de salaris
dfinis par
leur
niveau de formation initiale,
c' est
au sein de la
population
la
moins
diplme
que l'effet de la formation continue
est
le plus
perceptible. Pou r deux salaris
sans
diplme
appartenant la mme entreprise et
ayant
la
mme
situation professionnelle en 1988, celui
des deux qui bnficie d'une
formation
conti
nuentre 1988
et
1993
reoit
en moyenne
8
de plus que son
collgue
non
form. Pour
les diplms, les impacts salariaux sont plus
faibles,
et
statistiquement
non diffrents
de
zro.
Les
entreprises forment
les salaris
qu'elles jugent les meilleurs
Pour
bien valuer un dispositif
comme celui
de
la formation continue, il
faut
tenir
compte du
fait que les
meilleures
entreprises, du
point
de
vue
du
niveau
des
salaires, sont galement
celles qui
forment le
plus. Il
faut
galement
se
demander si les
meilleurs
salaris,
aux
yeux
de
l'entreprise, ne
sont
pas
ceux qui
ont
simul
tanment le
plus de chances d'tre
les
mieux
pays d'une
part
et de bnficier des stages de
formations
complmentaires
d'autre
part.
Supposons que
les
divers employeurs slec
tionnent
les
futurs bnficiaires de
formation
continue au sein de leur propre main-d'uvre
selon des critres en partie non mesurs dans
les
enqutes et que ces
critres
de slection non
mesurs (la sant, la force physique, l'intell
igence, tc.) sont
galement
des dterminants de
la
rmunration des
salaris.
Sous ces
hypoths
ese bonus salarial dont semblent
bnficier,
au sein de
leur
entreprise, les salaris forms
n'est
pas d en propre la formation continue,
mais
plus simplement toutes leurs qualits
non mesures
dans les enqutes
qui
expliquent
simultanment
leur
slection dans le dispositif
et leur
salaire
lev.
Pour
tester ce type d'hypothse
et
amliorer la
qualit
des
diagnostics,
il
est
d'usage de proc
dern deux tapes : dans un premier temps,
on
ajuste
un
modle
dcrivant
la slection dans
le
dispositif
tudi,
en l'occurrence le
dispositif
de
formation
continue (cf. tableau 3). Cette
analyse
prliminaire permet
d'valuer, pour
chaque salari,
les qualits non
mesures qui
ont favoris (ou frein) sa
slection
dans le dis
positif tudi
(2).
Dans une
seconde
tape, on
restreint les
comparaisons de salaire des indi
vidus ayant non
seulement
des caractristiques
observes
identiques (diplme,
exprience,
etc.),
mais
proches galement du
point
de vue
des
caractristiques non
mesures estimes (cf.
encadr
3
pour
une
prsentation plus
dtaille
du modle
conomtrique).
En procdant
ainsi deux
rsultats intres
sants
pparaissent
:
d'une
part, la variable
qualit
non
mesure
constitue bien
un
dte
rminant
part entire
des rmunrations obser
ves d'autre part, qualit
non
mesure
gale, aucune diffrence entre les rmunrat
ions
eues
par
les
salaris
forms
et
ceux qui
ne le sont pas, mme chez les
sans
diplme,
n'est discernable (cf. tableau 2, ligne 3).
Au total, l'essentiel des diffrences de salaire
observes une date donne entre les person
nels
orms et
les
non forms
au sein des diff
rentes
entreprises
est
d pour
moiti au
fait
que
les entreprises formant le
plus
sont galement
celles
qui pratiquent
les salaires les
plus
levs
(effet
de
composition),
et pour
moiti des
fac
teurs
expliquant simultanment la
slection
dans le
dispositif de
formation continue
et
le
niveau
de rmunration
individuel
(effet
de
slection).
De tels
rsultats invitent
d'ores et dj
relativiser
la porte des valuations
accordant
un rle significatif la formation
continue
dans
les
mcanismes de formation des salaires.
Ds
l'instant o la
formation
est finance par
les
employeurs et accrot
les
seules comptences
dont ils ont spcifiquement besoin, il n'est
gure surprenant
qu'elle
ne contribue pas part
iculirement accrotre
les
salaires. Spcifique,
elle n'augmente pas la valeur du salari
l'extrieur de son
entreprise (et
ne contraint
donc
pas
cette
dernire lui
verser
un
salaire
particulirement
lev pour le retenir).
Finan
ce ar
l'employeur, elle
ne justifie,
par
ailleurs, aucune compensation
particulire
de
sa
part.
2. Dans cet article, pour
ne pas
compliquer l'approche, nous
supposons que les facteurs inobservs expliquant la mobilit
interentreprises
sans
expliquer
la
formation
sont
exognes.
L'exognit des
dterminants
propres
de
la mobilit
est
tudie dans Fougre,
Goux
et Maurin (1997) oudans
Goux
et
Maurin
(1997).
CONOMIE ET
STATISTIQUE N
306,
1997-6
47
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11/18
Les salaris
forms
quittent
rarement
leur employeur
Les
valuations prcdentes portent
sur
la
fo
rmation continue
comme instrument
de promot
ion alariale au sein
des
entreprises dans
lesquelles
on
la reoit. En
effet,
pour
viter
toute
ambigut
dans la lecture
des rsultats,
seuls
les
salaris qui n'avaient
pas
chang
d'employeur
entre
1988 et
1993
ont
t
retenus.
Ces
valuations laissent
donc
entire
la
ques
tionde la formation continue
comme
atout dont
les salaris peuvent
tirer
parti chez d'autresem
ployeurs que ceux
qui
les ont
forms.
La format
ionontinue favorise-t-elle la
carrire de
ceux
qui changent d'employeur
aprs
avoir
t fo
rms
?
L'enjeu
que
reprsente
le
dispositif
de
formation
continue
pour les
employeurs et
leurs salaris
dpend
beaucoup de
la rponse
cette question.
Tableau 3
L'accs au dispositif
de
formation continue
Variable
explique
: avoir
suivi une.formation continue
en entreprise
entre
1988
et
1993
Variable explicative
Constante
Taille
de
l 'entreprise
de
1988
0
9
salaris
-
1
0
49
salaris
-
50
499
salaris
-
500
salaris ou
plus
-
Inconnue
Catgorie socioprofessionnelle en 1988
- Cadre
-
Profession intermdiaire
-
Employ
Administratif
- Employ de
commerce ou
de
services
- Ouvrier
qualifi
- Ouvrier
non
qualifi
Exprience
en
1988
(exprience en
1988)2*10-2
Anciennet
en 1988
Diplme
-
Suprieur
baccalaurat
+ 2
ans
- Baccalaurat
+ 2
ans
-
Baccalaurat
ou
quivalent
-
CAP, BEP ou quivalent
-
BEPC
seul
-
CEP ou sans diplme
-2LogL/Lo
Nombre
de
paramtres
Nombre
d'observations
-1,72 (0,78)
Hommes
-
0,50
(0,22)
- 0,36
(0,25)
0,03 (0,21)
rf.
- 0,63 (0,90)
0,58
(0,41)
0,75
(0,35)
0,74 (0,38)
0,62 (0,77)
0,35 (0,32)
rf.
0,011 (0,035)
- 0,08 (0,08)
0,017
(0,013)
0,08
(0,39)
0,46
(0,38)
0,40 (0,29)
0,24 (0,21)
0,16 (0,33)
rf.
Femmes
-
0,26
(0,25)
-0,11 (0,32)
0,00 (0,27)
rf.
0,04
(0,84)
0,03 (1,22)
0,15
(1,16)
0,02
(1,13)
-0,24 (1,17)
-0,44
(1,24)
-0,89
(1,21)
0,021
(0,042)
-0,09
(0,10)
0,017
(0,016)
0,26
(0,52)
0,50
(0,40)
0,35
(0,34)
0,25 (0,29)
0,26 (0,36)
rf.
84,2
71
5
910
Lecture :
les
autres
variables
explicatives
sont
la
nationalit franaise, trangre), le
lieu de
rsidence en 1988 Paris,
province),
le type
d'unit urbaine
du
lieu de rsidence en 1988 (5 types), le
nombre
d'enfants pour
les femmes
(sans, un,
deuxetplus),
le secteur d'activit
de l'entreprise de 1988
(NAP15) crois
avec
le
sexe et
le
travail temps partiel
crois
avec
le
sexe.
Les carts-types sont indiqus entre
parenthses.
Champ
:
salaris
en
1988
et en
1993
qui
n'ont
pas
chang
d'entreprise.
Source:
enqute
FQP 1993 (Insee).
48 CONOMIE
ET STATISTIQUE N 306, 1997-6
7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
12/18
Encadr 3
MODLISATION CONOMTRIQUE
L'impact de la formation
continue
sur les salaires
Les modles
de salaire estims dans
cet
article
co
rrespondent
des
analyses
de
la
variance trs
classiques. Le
salaire
w. de l'individu / est
suppos
dpendre
de ses caractristiques mesures ainsi
que
de celles de son poste
selon un
modle multi
plicatif standard
:
= Y
5
/i1988| + F, oc + e
(1)
o Yj reprsente les caractristiques permanentes
de l ' individu / susceptibles
d'expliquer
son salaire
(diplme, sexe,
nationalit,
gnration, etc.),
Xj 1988 reprsente
l'ensemble des
variables caract
ristiques de la situation professionnelle de / en
1988
et
susceptibles
d'expliquer
sa
carrire
salariale
ult
rieure
(exprience
professionnelle, secteur,
taille
de
l'entreprise,
rgion,
etc.)
et
F - une
variable indica
trice alant
1 si le salari
en question
a
reu une
formation en entreprise entre
1988
et
1993
et
0
sinon.
La qualit des estimations issues du modle (1)
r
epose
sur l'hypothse d'exognit
des dterminants
inobservs du
salaire F,-
orthogonal e().
Supposons maintenant
que la
slection des em
ploys
se fasse
selon
le processus
suivant
:
F, =
1
si
Z,y
+ u, >
0
F:
=
0
sinon
(2)
o
Uj
est
un dterminant inobserv suppos
norma
lement et
identiquement
distribu, tandis que Z(
reprsente
les variables observes
susceptibles
d'expliquer
que
le
salari / ait t
slectionn
par
son employeur
pour
suivre
un
stage de formation
continue sur la priode 1988-1993 (son
diplme, son
sexe,
son
exprience professionnelle en 1988,
son
mtier
cette
date, ainsi
que
son secteur d'activit,
la taille de son
entreprise, etc.).
Soit
maintenant p le coefficient de
la rgression
de
,. sur
ur
Si
l'entreprise
a
tendance
slectionner,
au
sein
de
chaque
grande
catgorie
de
salaris,
ceux
dont
elle
juge
le travail le plus
efficace
(c'est--dire p *
0),
alors le
modle suivi par les
rmunrations
obser
ves 'crit :
Lfrvv
/.1993
/a
+
P (3)
Dans ce
cadre,
l'estimation directe du modle
(1)
omet
le
terme
endogne
pu(. et
se trouve potentie
llement biaise,
u t
tant
corrl avec
F.. Par
construction nous n'observons pas u,
et
ne
pouvons
l'introduire
dans le
modle, mais
nous pouvons
tirer
parti de l 'estimation du
modle
(2) pour obtenir une
prdiction de sa valeur
pour
les salaris
forms
d'une
part
et
non forms
d'autre
part,
c'est--dire
une prdiction de la
variable
E(u/Ft), la seule
dont
la
connaissance
soit ncessaire l 'estimation
du modle (3). Si l'on convient de noter y l'estima
tion
issue
du
modle
(2)
on peut en
effet
crire
:
q, =
E(u/F,)
= F^i + (1 -
F,)ylt
avec q>; =
E(u/u, )
-Z,y)
et Vi
=
E{u/uj
7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
13/18
Un premier lment de rponse se trouve dans
la faiblesse des
effectifs
quittant
leur
em
ployeur aprs avoir t forms : les salaris
ayant
chang
d'entreprise
entre 1988
et
1993
aprs avoir suivi une formation ne reprsentent
ainsi que 2,4 de
l'ensemble
des salaris
ayant
chang d'entreprise
sur
cette
priode.
En
d au
tres
termes,
au cours de ces cinq annes, il y a
dix fois moins
de bnficiaires de
formation
parmi
les
salaris mobiles que
parmi ceux
qui
restent
chez leur employeur.
La
formation
continue s'adresse en
premier lieu
aux
salaris
les
mieux insrs
dans
leur en treprise. En
second lieu, lorsqu'on
compare les
salaires
reus
en
1993
par les
individus ayant chang
d'employeur
aprs
avoir t forms
(et
n'ayant
pas
reu de
formation
depuis) avec les salaires
d'individus comparables (du
point
de vue de
1988),
ayant
galement
chang d'employeur,
mais sans
avoir
t
forms
au
pralable, aucune
diffrence statistiquement
significative
n'appar
at.u total, les salaris changeant d'entre
prise
prs avoir t
forms par leur
employeur
sont trs
peu
nombreux et
ne semblent pas
bnficier
d'avantages salariaux dans leur
carrire
ultrieure.
Ces rsultats suggrent deux types
d'interpr
tation
d'une part,
la formation continue
tant
un
capital
susceptible
d'tre monnay ailleurs
que l o
il a
t
reu, les entreprises
rserve
raienteurs actions formatrices
ceux de leurs
employs
dont elles
anticipent la fidlit ; d'autre
part,
les
entreprises
se concentreraient
sur des
actions de formation
trs
spcifiques, impossi
bles
valoriser ailleurs que sur le site o elles
ont t reues et qui
renforcent
la qualit des
liens employeurs/employs. Choisir
entre
ces
deux
hypothses ncessite d'analyser plus spci
fiquement
l'impact
de
la
formation
sur
la
mobilit.
Tableau 4
Impact
de
la formation
continue
sur
la
mobilit entre entreprises
Variable
explique
: a
chang
d'entreprise entre 1 988
et
1 993
Variables
explicatives
Constante
Femme
tranger
Taille
de
l 'entreprise
de 1988
- 0
9
salaris
-
1
0
49 salaris
-
50
499
salaris
Inconnue
-
500 salaris ou plus
Nombre d'enfants en 1988
-
Un
enfant
-
Deux enfants
ou
plus
- Sans enfant
Anciennet
en 1988
(Anciennet
en
1
988)2*1
02
A suivi une formation
entre
1988
et
1993
(avant
mobilit)
E(,)
2LogL/Lo
Nombre
de paramtres
Nombre
d'observations
Modle
(1)
0,604
(0,227)
-0,055 (0,107)
0,177
(0,219)
0,240 (0,157)
0,281 (0,176)
0,190 (0,169)
0,207 (0,511)
-0,206 (0,147)
-0,304 (0,125)
-0,124 (0,026)
0,225 (0,075)
-1,132 (0,154)
-
181,1
11
8
358
Modle
(2)
0,589 (0,253)
-0,054 (0,107)
0,186
(0,229)
0,248 (0,168)
0,288 (0,186)
0,194 (0,171)
0,216 (0,516)
-0,204 (0,148)
-0,302
(0,126)
-0,125 (0,027)
0,226 (0,076)
-1,080
(0,425)
-0,034 (0,256)
181,1
12
8
358
Champ
:
salaris
en
1988
et en 1993.
Source
enqute
FQP 1993 (Insee).
50 CONOMIE ET STATISTIQUE N 306,
1997-6
7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
14/18
La
formation continue
renforce
la
stabilit
de
l'emploi
Pour valuer le rle de la
formation continue
sur la stabilit de
l'emploi, il
suffit de
compar
er,
ur la priode
1988-1993, les
probabilits
de
changement d'entreprise des
individus
ayant
bnfici de
formation
avec celles des indivi
dusyant
les
mmes qualits
observes, mais
n'ayant
pas
reu de
formation.
Pour chacune des dates
comprises
entre 1988 et
1993, l'enqute FQP permet
d'identifier
ceux
qui
ne recevront pas (ou plus)
de
formation
aprs cette date. Parmi eux, elle permet ensuite
de
distinguer
ceux qui
ont reu
une
formation
avant cette
date
d'une
part,
et ceux
qui
change
ront'employeur aprs cette
date
d'autre part.
En
d'autres
termes,
les
donnes
disponibles
rendent possible la comparaison des probabilits
de
quitter
son employeur aprs une
date
donne
selon que
l'on
a
ou non
suivi
une
formation
avant cette date.
Quand
on
pose
le problme
de
cette
faon,
la
fo
rmation
continue semble renforcer les
liens entre
employeur et employ : entre
1988
et
1993, par
miceux qui
n'ont pas reu
de formation de leur
employeur
une date donne,
3 1 le
quittent
par
la suite, contre
seulement
5 de ceux qui ont
reu
une
formation
avant
cette
date.
Ce
rsultat
rsiste des
investigations
conomtriques plus
pousses : situation observe comparable
en
1988,
avoir t form augmente
considrable
menta probabilit de ne
pas
quitter son entre
prise (cf. tableau 4). Toutes choses gales par
ailleurs,
la
diffrence
entre la mobilit d'un sala
ri
orm et celle d'un salari
non
form
est
par
exemple plus importante que la diffrence exis
tant entre un salari
d'une
entreprise de moins de
50
salaris et un salari
d'une
firme de plus de
500
employs. La diffrence form/non form
appar
at
me comme
nettement
plus
discriminante
que les diffrences lies l'ge
du
salari (la mob
ilit tant pourtant nettement
plus forte
en dbut
de
vie active), au diplme
ou
au
type
d'emploi oc
cup
(cf. tableau
5).
Tableau
5
Impact de
la formation
continue
sur la mobilit
des salaris
selon
le sexe et le niveau
de
formation
Variable
explique
: avoir
chang
d'entreprise entre 1988
et
1993
Variables explicatives
Modle (1)
Anciennet
en 1988
(Anciennet
en 1
988)2*1 02
A suivi une
formation
entre
1 Qftfi et 1
QCn
?OO
61 1 v7?7O
(avant
la
mobilit)
-2LogL/Lo
Nombre de paramtres
Nombre
d'observations
Modle (2)
Anciennet en 1
988
(Anciennet
en 1
988)2*1 02
A
suivi
une
formation entre
1988
et
1993
(avant
la mobilit)
-2LogM_o
Nombre de paramtres
Nombre d'observations
Sexe
Homme
-0,125 (0,034)
0,229 (0,096)
-1,153 (0,201)
110,3
10
4
803
-0,126 (0,035)
0,231
(0,099)
-1,119 (0,544)
-0,022
(0,327)
110,3
11
4
803
Femme
-0,120 (0,040)
0,211 (0,120)
-1,107 (0,239)
71,3
10
3
555
-0,121 (0,042)
0,212 (0,121)
-1,085 (0,660)
-0,014 (0,397)
71,3
11
3
555
Diplme
CEP
ou
sans
diplme
-0,109
(0,044)
0,170 (0,131)
-1,041 (0,363)
46,4
11
2
686
-0,116
(0,045)
0,183
(0,133)
-0,290 (1,195)
-0,432
(0,668)
46,8
12
2
686
CAP,
BEP,
BEPC
ou quivalent
-0,136
(0,041)
0,272 (0,118)
-1,013 (0,233)
74,6
11
3163
-0,133
(0,045)
0,264
(0,123)
-1,190 (0,858)
0,110 (0,513)
74,6
12
3163
Suprieur
ou gal
au baccalaurat
-0,123
(0,051)
0,225 (0,147)
-1,314 (0,257)
60,9
11
2
509
-0,123
(0,054)
0,225
(0,153)
-1,298
(0,878)
-0,011
(0,543)
60,9
12
2
509
Champ
:
salaris
en
1988
et
en 1993.
Source :
enqute
FQP 1993 (Insee).
CONOMIE
ET STATISTIQUE N 306,
1997-6
51
7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
15/18
En appliquant
des mthodes
en
deux
tapes
similaires
celles utilises
pour
mesurer l im
pact sur
les salaires, on vrifie que les personnels
slectionns dans le
dispositif de
formation
sont
galement
ceux qui ont
le moins
de chan
ces
e
quitter leur employeur. Ces effets
de
slection
sont
toutefois
trop
faibles
pour
expli
quer
eux seuls l'impact propre
trs
important
de la formation continue sur la stabilit de
l'emploi.
La formation continue
rduit-elle
les
ingalits
?
la lumire des
rsultats
prcdents, si la fo
rmation continue
n'a
pas d'impact direct trs
important
sur
les
salaires,
elle contribue sans
doute
de
faon significative la stabilit
des
emplois.
En
protgeant
les salaris
d'une
perte
d'emploi, la
formation
continue
leur
permet
aussi d'accumuler de l'anciennet et
favorise
ainsi indirectement la progression
de
leur
salaire.
Pour donner une mesure synthtique de cet
effet
indirect,
il est
possible
de considrer
simultanment
l'ensemble des
personnes
sala
ries en 1988 et 1993 (qu'elles
aient
ou
non
chang
d'entreprise sur la priode) et de
comp
arer
les
salaires reus par
les
forms
et
les
non
forms.
Les
rmunrations reues
en
1993
par
les bnficiaires de formation continue appa
raissent alors, toutes choses gales par ailleurs
et toutes raisons confondues,
environ
2,7
plus leves que les autres. De fait, des estima
tions omplmentaires
valuent
deux ans le
gain d'anciennet moyen en 1993 des salaris
forms
entre 1988
et 1993.
L'analyse mene
sur
les
divers
sous-chant
illonse
salaris dfinis
par
leurs diplmes
montre que
cet impact
indirect de
la formation
continue
est
plus
fort
chez
les sans
diplme
(+ 12 ) et
les personnes
trs diplmes
(+ 7 ) que
chez les
personnes
moyennement
diplmes
(impact non
significatif)-
Un
effort de formation ingalement rparti
En diminuant
les
risques de rupture de contrat,
la formation continue a donc un impact indirect
non ngligeable sur la situation professionnelle
d'une partie importante du salariat. Au-del
de
ce
constat, la
question
est
de
savoir
si
elle
contribue
rduire ou augmenter les
ingali
ts
evant l'emploi et les
salaires.
En effet, l'un
des objectifs
explicites
de
la loi fondatrice de
1971 tait d'offrir
une
seconde chance
ceux qui chouent dans le systme
scolaire,
de
dynamiser la promotion
sociale et
favoriser
l'galit des
chances
professionnelles.
En
premire
analyse,
le
dispositif
ne
semble pas
vraiment atteindre
cet
objectif. Entre
le dbut
1989
et
le dbut 1993,
la moiti
des
personnes
occupant
un emploi de cadre ont
reu une for
mation de
leur employeur
contre
moins
de 10
des personnes
occupant
un emploi d'ouvrier
non
qualifi.
Les personnes travaillant dans
une
entreprise
de moins de 50 salaris
ont, par
ailleurs,
deux fois moins de
chance
d'tre fo
rmes que celles qui
travaillent
dans
une entre
prise
de plus de 500
salaris.
Une
analyse
conomtrique un peu plus
fouille montre
cependant
qu'au
sein de
chaque
grande
catgorie
de
mtiers
et
d'entreprises, il
n'y
a pas
vraiment
d'ingalits
d'accs
entre les trs diplms et
les
moins diplms, entre
les
salaris
les
plus
gs et les plus jeunes,
ce qui
n'est pas, par
exemple, le cas en
Allemagne (Pischke,
1996).
Si l'effort de formation est
ingalement rparti,
c'est
avant
tout
entre les
entreprises et
les
emp
lois et beaucoup moins entre
les
salaris qui
occupent le mme type d'emploi dans
une
mme entreprise.
Ces
ingalits d'accs la formation continue
sont-elles
plus
ou moins
fortes
que
ne
le
sont
l'ensemble des autres sources d'inga lits sala
riales ? Pour rpondre cette question il
suffit
de
comparer
la distribution des salaires observs
en 1993 avec
une
simulation de la
distribution
qui
aurait prvalu en
l'absence
de
formation
continue. Cette distribution est construite en
tant la rmunration
des
salaris passs dans
le
dispositif de
formation une estimation
de
l'impact indirect
de
la formation reue
sur
le
salaire.
Conformment
aux
rsultats prcdents, deux
simulations ont t ralises
: la premire en
supposant
que l'impact indirect de la
formation
sur
le
salaire
est le
mme
pour
tous
les
salaris
qui
en
bnficient et
s'lve
2,7 ; la seconde
en
supposant que cet impact indirect est de
12 sur le salaire d'un sans diplme, de 7
sur le salaire d'un
trs
diplm et ngligeable
pour tous
les
autres.
chaque niveau (fractile) de chacune des deux
distributions
est
associ le salaire moyen de ceux
qui
gagnent
moins
que
ce
niveau. L'ensemble
de
ces salaires moyens constitue ce que l'on convient
d'appeler
la courbe de Lorenz gnralise.
Ces
52 CONOMIE ET
STATISTIQUE N 306, 1997-6
7/23/2019 article_estat_0336-1454_1997_num_306_1_2571.pdf
16/18
Graphique
I
Impact de la formation
continue
sur la distribution des salaires relatifs
0
-
0,001
- 0,002
0,003
-
0,004
- 0,005
Note : le graphique
reprsente la
diffrence entre
la
courbe de
Lorenz
de
la distribution des
salaires
observs
et
la
courbe de Lorenz
de la
distribution
des
salaires simuls
(sans
formation
continue). La ligne en
gras
correspond
une
simulation o la participation
une
formation continue donne un bonus salarial de
2, 7
. La ligne en trait
fin
se rapporte
une simulation o la participation aune
formation
continue donne
un supplment de salaire variable selon
le niveau
de formation (voir
texte).
Source
enqute FQP 1993
(Insee).
de supplment salarial avec
formation
Supplement
de
salaire
variable
Graphique
II
Impact de
la formation
continue
sur la distribution des salaires
2 500
2 000
1
500
1 000
500
Supplment
de salaire
variable
2,7 de supplment salarial
avec
formation
Note
:
le
graphique reprsente la diffrence entre la
courbe
de Lorenz
gnralise
de la distribution des salaires
observs
et la courbe
de Lorenz gnralise de la distribution
des salaires simuls
(sans formation continue). La
ligne en
gras
corresponde
une simulation
o
la
participation
une
fondation
continue
donne
un
bonus salarial
de
2, 7
.
La ligne
en
trait
fin
se
rapporte
une
simulation
o
la
participation
une formation
continue donne un
supplment
de salaire variable
selon
le niveau de
formation
(voir texte).
Source
enqute
FQP 1993 (Insee).
CONOMIE ET STATISTIQUE N 306,
1997-6
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3.
Si
les
deux
distribu
tions e coupaient, le
diagnostic
serait moins
facile et moins clair. Pour
classer
les distributions,
il
deviendrait ncessaire
de distinguer (et
pondr
er iffrentes formes
d'ingalits, entre pauvres
et
trs
pauvres, riches et
moins riches, etc.
salaires moyens sont ensuite rapports au
sa
laire moyen de l'ensemble de la population. L en
semble de ces salaires moyens relatifs
est
homologue
ce que l'on
appelle
la courbe de Lo-
renz. La comparaison de ces
diverses courbes
de
Lorenz observes et simules montre que la distr
ibution
observe
est partout
au-dessous
de
celle
correspondant
aux distributions simules (cf. gra
phique I). Si
l'on suppose
que les salaris sont
uniquement sensibles
leur
niveau relatif de
salaire (c'est--dire
leur place
dans la
hirar
chie es salaires) alors une telle domination
uniforme des
courbes
de Lorenz simules signi
fieue la distribution relle
est
plutt moins favo
rable aux salaris que la distribution simule, et
ce
sous
une gamme trs large d'hypothses sur le
lien entre salaire relatif et satisfaction
indivi
duelle (3).
Si
l'on
supposait les salaris uniquement
sensi
bles leurs niveaux
de salaire, alors
on
serait
fond
comparer
les
courbes de Lorenz gnra
lises. La formation
continue
ne supprimant
jamais
de richesse,
la comparaison
tournerait
cette fois uniformment
l'avantage
des distr
ibut ions observes (cf. graphique
II).
Comment rconcilier ces
rsultats
? La
forma
tion
ontinue est un
vecteur
de cration de
richesse dont les salaris les plus dmunis de qua
lifications
bnficient plutt moins
souvent
que
les
autres.
Si
l'on
se
place
du
strict
point
de vue
des ingalits, ce
dispositif
a donc tendance les
accentuer et, dans une
socit qui
serait unique
mentensible aux ingalits, le
principe
de ce
dis
positif serait rformer. Si on
tient compte du fait
que,
mme
ingalement rparti, le dispositif n'en
profite pas moins parfois aux
plus
dmunis,
alors
le diagnostic s'inverse, le
dispositif
doit tre
considr comm e
favorable ce
que
les cono
mistes
appellent
le
bien-tre social .
Un
bilan
mitig
La loi
franaise
impose aux entreprises de
consacrer une
fraction
minimum
de leur masse
salariale la formation continue
de
leurs sala
ris. Un tel
dispositif
peut se justifier dans un
univers concurrentiel
o
les
employeurs
n'ont
pas intrt prendre l'initiative d'un
sement pouvant bnficier plus tard ceux des
concurrents qui auront vit d'en
payer
le cot
et se seront mis en mesure
de proposer des
salaires plus levs. Dans un tel contexte, si les
pouvoirs publics veulent encourager
la
formation
continue,
ils doivent
dfinir des
rgles du
jeu
s'
mposant
de
la mme faon tous les em p
loyeurs.
Cette
ide
fondatrice
semble
assez pertinente.
Tout
porte
en effet penser
que
les entreprises
se concentrent spontanment
sur des
format
ions
pondant
leurs besoins
les
plus
spcifi
quest
vitent le
plus
possible le
risque de
financer des formations
trop
gnrales.
Ainsi
la
formation continue n'accrot-elle gure
les
salaires,
mais
renforce fortement
les
liens
employeurs-employs, autant
de rsultats
qu'il
serait difficile
d'interprter
si
les
salaris
pou
va ient
facilement bnficier
de
leurs format
ions illeurs que dans l'entreprise formatrice.
L'hypothse fondatrice
est
juste
et,
pour autant,
le bilan
actuel
du dispositif reste
mitig. En
mme
temps
que la loi
devenait
plus contrai
gnante, la
formation
continue s'est beaucoup
dveloppe, mais cette volution n'a
pas
contri
burduire les ingalits sur le march du
tra
vail, au contraire. Pour les raisons mmes qui
justifient le dispositif lgal, les employeurs ont
intrt concentrer leurs investissements
de
formation sur
les
salaris
sollicitant
les
compt
ences les plus spcifiques (techniciens, em
ploys
qualifis) et ayant les attaches les plus
fortes
avec l'emploi. Ce sont les salaris
qui au
raient le plus besoin
de
renforcer leurs liens
avec
le march
du travail qui
finalement bnfi
ciente moins
du
dispositif.
Seule
l'valuation de l'impact de
la formation
continue
sur
les
salaires et
la mobilit a
t
en
visage ici. Il reste
encore
mesurer
son
effet sur
les
conditions de travail et
le
statut
professionnel
des
salaris
dans
l'entreprise.
Les
recherches
futures devront galement faire davantage
la
distinction
entre les formations selon
leur dure,
leur
objet ou les certifications auxquelles elles
donnent
lieu. Ce
type d'analyse
peut contribuer
une valuation
plus prcise encore
du
dispositif
de formation continue
et
l'mergence de recom
mandations
concrtes
pour
son avenir.
54 CONOMIE ET
STATISTIQUE
N 306,
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