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Enquête Assistant(e) dentaire, mon métier Elles sont environ 22 000 à pratiquer le métier d’assistant(e) dentaire en France avec quasiment autant de modes d’exercice qu’il y a de chirurgiens-dentistes. Les représentants de la profession aspirent d’ailleurs à une définition plus précise des missions de ces auxiliaires médicaux, afin notamment de standardiser la pratique sur le territoire. Une enquête et des témoignages dévoilent les envies des assistantes dentaires, leur souhait d’une plus grande reconnaissance et d’une évolution de leurs compétences. Laure Martin Clinic 2018 ; 39 : xxx-xxx 2

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Enquête

Assistant(e) dentaire,mon métier

Elles sont environ 22 000 à pratiquer le métier d’assistant(e) dentaire enFrance avec quasiment autant de modes d’exercice qu’il y a de

chirurgiens-dentistes. Les représentants de la profession aspirentd’ailleurs à une définition plus précise des missions de ces auxiliaires

médicaux, afin notamment de standardiser la pratique sur le territoire.Une enquête et des témoignages dévoilent les envies des assistantes

dentaires, leur souhait d’une plus grande reconnaissance et d’uneévolution de leurs compétences.

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Assistante dentaire : un second métierLes trois quarts des assistantes ayant répondu à l’enquête ont auparavant exercé un autre métier : 21 %étaient secrétaires, 15 % travaillaient dans la vente ou lecommerce et 14 % dans la santé (aide-soignante, infirmière,ambulancier, opticienne, etc.).

52% ont moins de 10 ans d’expérienceDu fait de cet autre métier qui a précédé et dereconversions, plus de la moitié de la profession (52%) amoins de 10 ans d’expérience, selon l’enquête. Lesassistantes dentaires qui ont plus de 20 ans d’expérience nesont plus que 14% en activité. C’est donc un métier qui pour

un grand nombre n’est pas exercé pendant toute une vieprofessionnelle. Les assistantes montrent une certaine fidèlité au cabinetdentaire dans lequel elles exercent : 68% n’ont exercé quedans un ou deux cabinets. Mais 12% d’entre elles ont exercédans quatre cabinets différents ou plus.

93% ont suivi une formation Sur l’ensemble des assistantes qui ont répondu, seules 7 %n’ont pas suivi de formation. Quand elles se sont formées(93%), les deux tiers des assistantes ont suivi la formation dela Commission nationale de qualification des assistants enodonto-stomatologie (CNQAOS).

LLes activités au sein du cabinetdentaire sont variées. Selon le chirurgien-dentiste dont elle dé-pend, l’assistant(e) dentaire va enassurer plusieurs de façon plus oumoins importante. Mais l’enquêtemontre que, dans leur grande majorité, les assistantes dentairesorganisent leur temps de travailentre 4 tâches : le secrétariat etl’acceuil du patient, le travail àquatre mains, la stérilisation et lapréparation du plateau. Et cha-cune de ces activités occupe en-tre 10 et 30% de leur temps. De toutes ces activités, le travailà quatre mains arrive très large-ment en tête de celles que pré-fèrent les assistantes dentaires. Ilest plébicité par 61% d’entre elles.L’accueil du patient vient endeuxième position des activitésfavorites pour 30% des assis-tantes dentaires, devant la pré-sentation du plan de traitement,la prophylaxie, la stérilisation etles tâches administratives.Lorsqu’on leur demande cequ’elles préfèrent au quotidien, laplupart se prononcent pour lesrelations avec le patient et citent

Les assistantes dentaires et leurs aspirationsTravail à quatre mains, accueil et accompagnement du patient, mais aussi évolution descompétences… Pour exercer leur métier de façon optimale, les assistantes pointent les fonctionsqu’elles apprécient dans leur métier et font part de leurs aspirations dans une enquête lancée parClinic et à laquelle 460 assistantes dentaires ont répondu entre le 25 janvier et le 14 février.

le fait de « rassurer », « redonnerle sourire », « mettre en confiance», « réconforter le patient » et «être en contact avec le patient ».

Hygiéniste dentaire :le rêve de 91% desassistantes Interrogées sur la possibilité de sui-vre une formation pour devenir hy-giéniste dentaire si cela était pos-sible, 90,7 % des assistantesdentaires qui ont répondu au ques-tionnaire affirment être intéressées.D’ailleurs le détartrage, le scelle-

ment de sillons, le re-scellement decouronne, la prophylaxie ou encorela prise d’empreintes font partiesdes actes qu’elles aimeraient pou-voir prendre en charge si elles enavaient les compétences.Concernant leur évolution de car-rière de manière plus générale,32% des répondantes aimeraientpouvoir faire une formation (spé-cialisation, autonomie, améliora-tion), 25 % souhaiteraient devenirformatrices, 25 % n’envisagentaucune évolution et 7 % pensentmême à une reconversion profes-sionnelle.

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DDepuis la loi de modernisation denotre système de santé du26 janvier 2016, la profession d’as-sistante dentaire est inscrite auCode de la santé publique. Au-jourd’hui, les 22 000 assistantesdentaires françaises sont desauxiliaires médicales, au même ti-tre que les aides-soignantes oules ambulanciers. Avec cette évolution, il est impor-tant pour Dominique Munoz, pré-sidente de l’Union française desassistantes dentaires (UFAD),que la profession « soit cadrée »par un diplôme d’État, « indispen-sable pour sa reconnaissance »,et non plus uniquement par uncertificat de qualification. Elleplaide aussi pour qu’une fiche deposte détermine les compé-tences et les actes de l’assistantedentaire. « Pour certains chirurgiens- dentistes, elles sont de vraies collaboratrices », témoigne KathyDenys, assistante dentaire et for-matrice. « Ils estiment que même,si elles ne soignent pas, il relèvede leur responsabilité de savoirce que le praticien effectue dansson acte, de l’anticiper et de l’ex-pliquer au patient. D’autres pra-ticiens les considèrent moins... » !Les assistantes dentaires souffred’un manque de reconnaissanceet de considération. « Elles sontnombreuses à réclamer un modede travail commun et standardiséau sein de tous les cabinets den-taires ».

Les différents niveauxd’exercice du métierCe manque de cohésion et destabilité s’explique notammentparce que « les praticiens ne s’en-

Vers une standardisation du métier ? Le métier d’assistant(e) dentaire est en pleine phase de changement. Des discussions entre leministère de la Santé, les représentants des chirurgiens-dentistes et des assistant(e)s dentairesvisent à faire évoluer la profession. Mais quel chemin prendre ?

tendent pas sur ce que constituele métier d’assistante dentaire »,poursuit Kathy Denys. « Il faudraitavoir une vraie définition duposte. » Pour elle, l’assistantedentaire est celle qui comprendavant de faire, qui est capabled’anticiper et qui est connectéeavec la technique mais sans laréaliser avec ses mains. «Une as-sistante dentaire peut très bienaimer ne faire que du fauteuil oul’administratif, mais il faut quecela soit clair ». Aussi Kathy De-nys souhaiterait la mise en placede différents niveaux de pratiquedu métier. La secrétaire dentairese limiterait au travail administra-tif ; l’aide-opératoire assurerait lessoins à quatre mains au fauteuilet l’aide-dentaire associerait lesdeux activités. L’évolution du travail des assis-tantes dentaires ne passe pas uni-quement par les textes, elle dé-pend aussi de l’état d’esprit dupraticien. « Si, après une forma-tion à quatre mains avec son as-sistante dentaire, le praticien neveut pas embaucher de secrétairepour répondre au téléphone, c’estproblématique car l’assistantedentaire n’est pas Shiva, elle nepeut pas tout faire », ajoute t-elle.

De nouvellescompétences Nombreuses sont d’ailleurs lesassistantes dentaires qui souhai-tent voir leurs compétences évo-luer. Elles revendiquent l’accès àune formation d’hygiéniste, mé-tier qui existe aux États-Unis, auCanada, en Allemagne et enSuisse. L’hygiéniste assure la prised’empreintes primaires, le détar-trage simple, la prévention ca-

drée. « Le métier d’hygiénisten’est pas l’aboutissement pourl’assistante dentaire mais bienune autre profession à cadrer »,estime Dominique Munoz. Selonla présidente de l’UFAD, l’évolu-tion de la profession passe da-vantage par la délégation detâches au sein du cabinet den-taire. « Cela permettrait aux as-sistantes dentaires de se spécia-liser par rapport à la pratique duchirurgien-dentiste. » Pourquoine pas également leur donner lapossibilité de se former à la colo-rimétrie, aux composites ou à laradiologie. Elles pourraient aussifaire de la prévention, même dansles écoles. Autre évolution inté-ressante, d’après Dominique Mu-noz, leur offrir la possibilité d’êtreauto-entrepreneurs, statut au-jourd’hui interdit. Les assistantesdentaires veulent des évolutionsprofessionnelles, mais aussi sala-riales, alors qu’elles n’ont pas lapossibilité d’y prétendre. « Ellesne veulent plus être considéréescomme des petites mains maiscomme des collaboratrices »,conclut Kathy Denys. « Les chirurgiens-dentistes doiventavoir en tête que le fait d’impli-quer leur assistante dans la qua-lité du service et du soin leur rendaussi un vrai service ! »

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« J’aimerais une vraieréglementation pournotre profession »J’assiste un praticien libéral aveclequel je travaille au fauteuil à qua-tre mains. Je ne gère ni les factu-rations ni les appels, assurés parson épouse. Pour moi, le rôle pro-pre de l’assistante dentaire, métierque j’exerce depuis 1989, est d’êtreau fauteuil, s’occuper du patient,gérer les consommables et le suivides prothèses dentaires. Mais uneassistante dentaire qui est seulepour tout faire ne peut pas être aufauteuil. J’aimerais qu’il y ait unevraie réglementation pour notreprofession et que chaque chirur-gien-dentiste ait une assistantedentaire diplômée à ses côtés. Ilfaudrait que nous puissions êtreformées dans des écoles commeles infirmières et que nous soyonsrattachées aux facultés dentaires.Cela permettrait aux futurs prati-ciens de comprendre notre métieret de se rendre compte de l’intérêtde travailler avec une assistantedentaire. Isabelle Vincelot

« Le relationnel avec lepatient m’intéresse leplus »J’exerce mon métier avec passiondans le même cabinet depuis18 ans. C’est le relationnel avec lepatient qui m’intéresse le plus.J’assure les soins à quatre mainsau fauteuil, ainsi que le secrétariat.Nous avons essayé d’avoir unesecrétaire médicale mais les pa-tients me connaissent et deman-dent généralement à me parler.J’ai le temps de tout faire, c’estune question d’organisation et degestion. Récemment, j’ai terminéun diplôme universitaire sur laprise en charge de la santé oraledes patients en situation de han-dicap. Mon praticien m’a soute-nue dans ce choix. D’ailleurs, nousnous formons actuellement ensemble en implantologie. Pour

Paroles d’assistant(e)smoi, l’évolution du métier passepar ces formations complémen-taires qui permettent d’accueillirau mieux tous les patients au cabinet. Mounia Santou

« L’assistante dentaireest la clé du cabinet »Je travaille depuis 8 ans avec uneautre assistante dentaire pourdeux chirurgiens-dentistes etleurs deux collaborateurs. Nor-malement, je suis censée être ex-clusivment au fauteuil. Nousavons cherché une secrétaire mé-dicale mais nous n’en avons pastrouvé. Nous sommes donc po-lyvalentes. Mais nous aurions vrai-ment besoin d’une secrétairepour pouvoir dégager du temps,être complémentaires des chirur-giens-dentistes et permettre aupatient d’être reçu dans desconditions optimales pour sessoins. Je considère vraiment quel’assistante dentaire est la clé ducabinet. J’aimerais d’ailleurs quenotre métier évolue, notammentpar rapport au diplôme, que nousayons une vraie reconnaissance àBac + 2. Il y aurait un meilleur pro-fessionnalisme avec un accès plussélectif au diplôme. Car notre mé-tier n’est pas aussi simple qu’on veutle faire croire. Marie-Élodie Belot

« Nous assurons lacontinuité des soins »Je travaille au sein d’un cabinetlibéral où exercent quatre chirur-giens-dentistes qui ont chacunleur assistante. J’assiste le prati-cien au fauteuil et j’assure égale-ment le travail administratif : fac-turation, télétransmission desactes à la sécurité sociale, prisedes rendez-vous. La partie admi-nistrative n’est pas celle que jepréfère mais je considère quecela fait partie intégrante du mé-tier. J’apprends tous les jours, jene reste pas sur mes acquis. J’aid’ailleurs suivi une formation en

prophylaxie. C’est important carnous intervenons dans ce do-maine auprès de nos patients.Nous assurons la continuité dessoins du praticien en donnantdes conseils aux patients. J’aime-rais que notre profession puisseévoluer vers un rôle d’hygiénisteavec bien entendu une formationcomplémentaire. Ce serait unplus pour nous et cela permet-trait aussi de décharger le prati-cien. Nawal Belaïd

« On est traité de lamanière dont onaccepte d’être traité »Je suis assistant dentaire depuis8 ans et j’exerce dans un cabinetde ville depuis 5 ans. J’assuretoutes les fonctions : l’accueil, lastérilisation, le fauteuil. Tout sepasse très bien car mon praticiensait pourquoi je suis là, même sides mises à jour sont parfois né-cessaires. Et si quelque chose neva pas, il faut en parler. Être unhomme dans ce métier nechange pas vraiment mes rap-ports avec les praticiens. On esttraité de la manière dont on ac-cepte d’être traité. Concernant lareconnaissance de notre métier,elle est actée par la loi mais dansles faits, j’estime qu’il faudrait cla-rifier le rôle de l’assistante den-taire en fonction du type d’acteeffectué par le chirurgien-den-tiste. Par exemple, un assistantdentaire qui travaille a 4 mainsavec un implantologiste exclusifaura une activité plus stressantequ’avec un omnipraticien. Je nepense pas que la création d’au-tres métiers soit possible pour lemoment car nous ne sommespas qualifiés et il ne faut pas ou-blier les responsabilités qui vontaller avec. Néanmoins, pour laprise d’empreintes et les radios,il est temps que ce soit inscritdans notre fiche de poste.

Loïc Beuriot-Bayeux

IsabelleVincelot, Paris

Marie-ÉlodieBelot, Arras(Pas-de-Calais)

Mounia Santou,Besançon(Doubs)

Nawal Belaïd,Malakoff(Hauts-de-Seine)

Loïc Beuriot-Bayeux, Lyon(Rhône)