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Attila : le Fléau de Dieu

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ATTILA

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DU MÊME AUTEUR

Les Procédés de l'homme, Stock, 1977. Économie et Société de la Côte-d'Ivoire, Stock, 1977. Effets économiques et sociologiques de la Coopération, Thèse, 1979. Mirabeau, Encre, 1980. Une volonté d'espérance, Encre, 1983. La France somnambule, France-Empire, 1985. Le Participat (en collaboration avec Y. Bresson), France-Empire,

1986. Nostradamus, l'exploitation séculaire d'un fonds de commerce, RMC

Éditions, 1987. Champollion, l'obstination d'un surdoué romantique, RMC Éditions,

1987. Saint Vincent de Paul, l'ambassadeur des pauvres, RMC Éditions,

1988. Les Mots et les Hommes, Economica, 1988. L'Histoire des Rois de France (en collaboration avec M. Jullian), Per-

rin, 1989. Mots à mots, Robert Laffont, 1990. Un président à abattre, Albin Michel, 1991. Lettre ouverte à tous les Français qui ne veulent plus être pris que

pour des cons, Albin Michel, 1992. Jules Ferry, Albin Michel, 1992. Les Dessous de la communication, Presses du management, 1993. Alexandre le Grand, France-Empire, 1993. La République des clones, Albin Michel, 1994.

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PHILIPPE GUILHAUME

le fléau de Dieu

ÉDITIONS FRANCE-EMPIRE 13, rue Le Sueur

75116 Paris

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Vous intéresse-t-il d'être au courant des livres publiés par l'éditeur de cet ouvrage?

Envoyez simplement votre carte de visite aux

ÉDITIONS FRANCE-EMPIRE Service « Vient de paraître »

13, rue Le Sueur, 75116 Paris.

Et vous recevrez régulièrement, et sans engagement de votre part, nos bulletins d'information qui présentent nos différentes collections

que vous trouverez chez votre libraire.

© Éditions France-Empire, 1994.

ISBN 2-7048-0744-2.

Tous droits de reproduction et d'adaptation réservés pour tous les pays.

IMPRIMÉ EN FRANCE

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PROLOGUE

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Ravenne, 21 janvier 449

Indifférents aux rafales de pluie froide qui cinglaient leur visage, Junius Sidonius et Flavius Cérialis conti- nuaient de se disputer dans la longue barque à fond plat qui les conduisait au sénat de Ravenne où devait se tenir une réunion exceptionnelle, provoquée par l'empereur Valentinien. Que pouvait-on faire, que devait-on faire pour convaincre Attila, le roi des Huns, de cesser de rava- ger les terres d'Empire?

Junius Sidonius, qui avait jadis commandé des légions contre les Suèves en Germanie, et qui évoquait volontiers des victoires dont nul ne paraissait se souvenir, en tenait pour la manière forte. Après tout, ces nouveaux barbares ne tiendraient pas longtemps contre une armée romaine, pour peu qu'on voulût bien la rassembler et la confier à un vrai chef, pourquoi pas cet Aetius qui lui avait fait bonne impression? Quel besoin avait-on de préparer une expédition en Afrique du Nord contre les Vandales de Genséric qui ne menaçaient personne?

Junius Sidonius radotait un peu... c'était l'âge, et sans doute les suites d'une mauvaise blessure reçue des Ala- mans sur les bords du Danube, vingt ans plus tôt. Depuis peu sénateur, héritier d'une lignée de bureaucrates, Fla-

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vius Cérialis avait peu de goût pour les expéditions mili- taires et, terrifié par la réputation d'épouvante qui précé- dait Attila, n'imaginait pas qu'on pût lui résister avec quelque chance de succès :

- As-tu donc oublié, sénateur Junius Sidonius, ce que sont ces Huns, devant lesquels s'enfuient tous les autres Barbares? As-tu oublié Singidinum, Sirmium, Naissus, réduites en cendres, et nos légions en fuite? Que dis-je en fuite, en déroute!

C'en était trop pour Junius Sidonius qui, à l'évocation des défaites des légions, les fameuses légions romaines qui avaient conquis un empire et pacifié le monde connu, explosa :

- C'est la corruption qui règne à la cour qui a vaincu nos armées, abandonnées sans solde et sans directives. Dis-moi, sénateur Flavius Cérialis, ne sais-tu pas qu'une bonne armée romaine pourrait rosser ces petits bons- hommes jaunes, et les raccompagner l'épée dans les reins jusque dans leurs steppes de Mongolie? Il faut commen- cer par redresser l'État, réveiller l'esprit de civisme et de sacrifice, en finir avec le féminisme, l'arianisme, le cos- mopolitisme...

- Peut-être, sénateur, peut-être. Mais tout cela prendra du temps, et les Huns sont aux portes de l'Istrie. Moi, j'en tiens pour la négociation. Que l'empereur gagne du temps, et envoie une ambassade au roi barbare. Et que, parmi les présents que lui portera l'ambassade, on pré- voie une jolie Romaine de bonne famille. Quel barbare ne succomberait pas aux charmes d'une belle Romaine?

On approchait du Sénat. Sous la bourrasque de pluie qui redoublait, Junius Sidonius parut s'étouffer d'indi- gnation.

- Honte à Rome, honte au Sénat, honte à toi qui ima- gines comme un infâme proxénète de livrer une vierge romaine à un barbare puant.

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- Allons sénateur, c'est toi qui évoques sans cesse la gloire de Rome? Je croyais que tu connaissais mieux notre histoire. Quelle famille romaine se déroberait, quelle femme romaine refuserait de se sacrifier quand Rome est en danger de mort?

« Et qui te parle d'envoyer une vraie vierge au roi Attila? Il faut au contraire joindre à l'ambassade une jeune patricienne, belle, intelligente, et réputée avoir une bonne expérience des gestes de l'amour. Seule une telle femme saura séduire et retenir le Barbare. J'en connais, toi aussi sans doute... Et j'en sais, dont l'ambition égale la curiosité, auxquelles la proposition ne déplairait pas.

L'idée fit rapidement son chemin. Sur la cinquantaine de belles jeunes femmes que l'on sélectionna, quatre refu- sèrent tout net et s'enfuirent épouvantées; les autres se firent un peu prier. Il revint à Valentinien, empereur d'Occident, de choisir et doter celle qui porterait les cou- leurs de la cour de Ravenne sous la tente ronde d'Attila.

12 février 449, Constantinople

Théodose II, empereur d'Orient, tenait conseil secret en un cabinet retiré de son palais. Autour de lui siégeaient quelques hauts dignitaires et, parmi eux, l'eunuque Chry- saphius, chambellan porte-épée dont l'influence était grande sur l'empereur; invisible, Pulchérie, la sœur de Théodose, était sûrement présente car chacun savait qu'elle écoutait et entendait tout ce qui se disait d'impor- tant au palais. Et que pouvait-il y avoir de plus important que ce conseil secret qui devait décider de la réponse à faire aux nouvelles exigences d'Attila : doublement du tri-

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but annuel porté à deux mille cent livres d'or, cession de la rive droite du Danube sur une profondeur de cinq jour- nées de marche, et envoi immédiat auprès du roi hun d'une ambassade de haut rang pour reconnaître la nou- velle frontière.

Il convenait de rendre réponse avant le soir aux ambas- sadeurs du roi hun, Oreste, un Pannonien rallié aux Huns par dépit de l'ingratitude romaine, et Édecon, cousin du roi, qui était de pure souche mongole. Contre l'avis de ses conseillers, Théodose paraissait s'obstiner à refuser. D'habitude essentiellement préoccupé de ses travaux d'écriture - qui lui avaient valu le noble surnom de Calli- graphe -, l'empereur aujourd'hui refusait d'abandonner la majeure partie de la Thrace et de la Mésie, provinces marches de l'Empire, essentielles à sa protection.

- Ils ont ruiné le trésor, ravagé nos villes et massacré leurs habitants... Ils nous ont humiliés et rançonnés, et toujours nous nous sommes inclinés, nous avons cédé à leur chantage permanent, nous avons cédé à leurs menaces parce que nous voulions éviter la guerre, éviter l'invasion et la destruction de l'Empire. Le temps est venu de la résistance, et de la guerre.

Ces fiers propos surprirent les dignitaires de l'Empire. La guerre? Comment rassembler une armée assez puis- sante pour être opposée aux hordes d'Attila? A qui en confier le commandement? Quels alliés solliciter contre « l'homme du monde le plus haïssable » et le plus craint?

L'eunuque Chrysaphius intervint : - De toute façon, il faut gagner du temps, gagner

l'appui de la cour de Ravenne, nouer des alliances avec les Goths, les Germains, les Burgondes. Mais le plus sûr, c'est de tuer Attila. Lui mort, les tribus des Huns retrou- veront leurs divisions et alors, avec nos alliés, nous pour- rons nous débarrasser de ces barbares arrogants, sans

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morale et sans religion, et cesser de payer le tribut. Oui, il faut tuer Attila, le tuer comme une bête sauvage.

- Qui va le tuer, toi, Chrysaphius? - Je pense qu'Édecon, le cousin du roi, est corruptible.

Il jalouse Attila, il aime l'argent, il est ébloui et plein d'admiration pour nos richesses, nos palais, nos femmes. Il faut acheter Édecon, lui pourra s'approcher d'Attila sans susciter sa méfiance, et le tuer.

Tous étaient sans voix, comme fascinés par ce projet, et conscients du risque terrible pour l'Empire en cas d'échec. Théodose n'eut pas le temps de s'exprimer. Pul- chérie fit une entrée théâtrale dans le cabinet de l'empe- reur et lança d'une voix inspirée : « C'est la volonté de Dieu! et le salut de l'Empire.»

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LES CAVALIERS DU VENT

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C'est dans les années 380 qu'à Rome et à Constanti- nople on commença à parler d'une nouvelle famille de barbares, apparus sur les bords de la Volga. Ils venaient de l'Orient, au-delà du monde connu, et ressemblaient à peine à des hommes, disait-on. C'étaient les Huns.

Ammien Marcellin en avait donné un portrait terrifiant qui s'était inscrit dans les mémoires. Selon les canons grecs et latins ils étaient d'une laideur repoussante. Avec «... un corps trapu et des membres supérieurs énormes, et une tête démesurément grosse qui leur donne une apparence monstrueuse : vous diriez des bêtes à deux pieds, ou encore quelques-unes de ces figures en bois mal charpentées dont on orne les parapets des ponts ou les proues des navires ». Leur habillement était à l'avenant, « une tunique de lin et une casaque de peaux sauvages cousues ensemble. La tunique est de couleur sombre et leur pourrit sur le corps, et ils ne la changent pas qu'elle ne les quitte».

Jamais on avait vu des barbares aussi laids. Des bar-

bares qui ne pouvaient être que malfaisants et qu'on aurait dit « cloués sur leurs petits chevaux, laids eux aussi, mais infatigables et rapides comme l'éclair ». Car ces barbares, cruels et imprévisibles, tirant de l'arc avant toute conversation, passent leur vie à cheval, tantôt à cali- fourchon, tantôt assis de côté, à la manière des femmes :

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ils y tiennent leurs assemblées, ils y achètent et vendent, ils y boivent et mangent, ils y dorment même, inclinés sur le cou de leur monture.

Détail significatif de l'état demi-sauvage de ces primi- tifs terrifiants, on racontait, ce qui horrifiait les civilisés de l'Empire, qu'ils ne connaissaient pour leurs aliments ni les assaisonnements ni le feu : ils buvaient, disait-on, du lait de jument, et mangeaient des racines de plantes sau- vages et de la viande crue qu'ils rendaient moins dure en la mortifiant entre leurs cuisses et les flancs de leurs che- vaux. Vraie ou fausse, cette histoire de viande mortifiée se transmettra, de génération en génération, pendant quinze siècles.

Leur portrait moral était, considérablement aggravé, celui de tous les barbares : «... Inconsistants, sans foi, mobiles à tous les vents, toujours à la furie du moment. Ils savent, aussi peu que les animaux, ce qui est honnête ou déshonnête... leur langage est obscur, contourné, empli de métaphores, encore que pour le grand nombre la conversation paraisse se résumer à quelques cris, sortes d'aboiements venus du fond de la gorge... quant à la reli- gion, ils n'en ont point, et ne pratiquent aucun culte, leur passion dominante étant la passion de l'or. »

Une bonne part de cette mauvaise réputation leur venait des récits colportés par les Goths de Scandinavie, qu'ils avaient terrifiés au terme de plusieurs sanglants combats, et qui leur inventèrent une origine monstrueuse qu'ils relièrent à leurs propres récits mythologiques : « Filimer, roi des Goths, étant entré dans la terre en Scy- thie trouva parmi son peuple certaines sorcières malfai- santes. La défiance et le dégoût qu'elles lui inspirèrent furent tels qu'il les chassa de son peuple et les condamna à vivre dans les grands déserts de l'est. Mais les esprits immondes qui vaguaient dans les solitudes, les ayant

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vues, s'accouplèrent à elles, se mêlèrent à leurs embrasse- ments maudits et donnèrent le jour à cette race, la plus farouche de toutes... »

On se perdait en conjectures sur les raisons de l'irrup- tion de ces cavaliers du vent aux frontières de l'empire romain. L'Église n'avait pas encore imaginé une explica- tion selon laquelle, instruments de la colère de Dieu, ils auraient été chargés de châtier les péchés des hommes. Et puis, on ne savait rien du pays maudit d'Orient d'où surgissaient leurs hordes.

Plus tard on répandra la légende que quelques-uns d'entre eux, chassant à la limite du grand marais infran- chissable qui les retenait à l'est, aperçurent un daim qui s'y était engagé et paraissait les inviter à le suivre, les entraînant peu à peu jusqu'aux grandes plaines où tous s'engouffrèrent...

A l'autre bout du monde, les Chinois connaissaient bien ces barbares nomades qui, régulièrement, surgissaient du fond des steppes de l'Asie Centrale, cavaliers affamés por- teurs de male mort. Venus pour la rapine, ils massa- craient jusqu'au dernier combattant. Les Chinois les dési- gnaient sous le nom de Xiongnu et les décrivaient « de petite taille, trapus, tête ronde et grosse, visage large, pommettes saillantes, moustache fournie, pas de barbe, oreilles longues et percées » ; ils notaient que ces barbares modelaient le visage des enfants en leur aplatissant le nez par des bandes serrées, et en leur pétrissant la tête pour donner au crâne une forme en pain de sucre.

Les empereurs Qin et Han avaient à plusieurs reprises envoyé de formidables armées aux trousses des hordes venues ravager leurs provinces, mais jamais ces armées n'avaient pu rejoindre et détruire les insupportables nomades qui paraissaient, après chacun de leurs raids dévastateurs, se disperser, insaisissables dans les grandes

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steppes herbeuses. Alors, au III siècle avant notre ère, l 'empereur Han entreprit, pour protéger la vallée du fleuve jaune et les provinces fertiles, de réunir en une seule Grande Muraille les fragments fortifiés qu'avait éle- vés la dynastie des Qin. Cet immense mur fortifié, haut de quinze mètres et épais de neuf, qui serpentait dans les plaines et escaladait les monts sur une longueur de quatre mille kilomètres, du Kansu à la mer, ne put jamais être emporté d'assaut : les cavaliers huns, lorsqu'ils mettaient pied à terre, étaient de piètres combattants.

Mais cette Grande Muraille réputée infranchissable se révéla contournable - comme plus tard la ligne Magi- not - et les barbares continuèrent à s'infiltrer. Le plus souvent ils réussissaient à attirer les armées chinoises hors de leur formidable défense, et les massacraient en rase campagne. Il arrivait alors que les généraux chinois reçoivent la faveur impériale de se suicider honorable- ment.

Les mandarins chinois, nourris de Confucius et de Mencius, maîtrisaient l'art de la politique et de la diplo- matie ; ils avaient installé des yeux et des oreilles dans les campements de Mongolie et travaillaient sans cesse à atti- ser les divisions entre les tribus hunniques. Les Chinois ne pouvaient pas oublier que, deux siècles avant notre ère, les Xiongnu, ayant réuni sous leur autorité l'ensemble des tribus altaïques, avaient humilié les empereurs Han, et que ces derniers, qui croyaient les amadouer en les comblant de présents, n'avaient fait que multiplier leurs convoitises et leurs exigences.

Le danger restait toujours menaçant, mais peu à peu les Xiongnu, qui s'étaient laissé prendre au piège de la vie sédentaire, acquirent quelques traits des mœurs chinoises alors que les tribus du nord et de l'ouest, restées nomades, maintenaient la tradition de raids dévastateurs

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périodiques. On put croire que les Huns sédentarisés, ins- tallés en deçà de la Grande Muraille au Shanxi et au Shaanxi étaient en voie d'assimilation : ils servaient souvent comme mercenaires dans les armées impériales et paraissaient adopter les coutumes chinoises. Puis les troubles qui emportèrent la dynastie des Han réveillèrent leurs appétits : en 308 avant notre ère leur chef Lin Yuan, à la tête d'une armée de cinquante mille hommes, se fit proclamer empereur à Taiyuan. Trois ans plus tard son fils et successeur, Liu Zong, prit et brûla la capitale Loyang, puis attaqua Chang'an et massacra la moitié de la population. Les vieilles habitudes revenaient au galop.

Les Xiongnu restèrent maîtres de la Chine du Nord pendant quarante ans avant d'être chassés et remplacés par d'autres Turco-Mongols. Ce fut la ronde des Muyong, Tangut, Xianbei, Ruanruan, Toba qui deviendront les Wei... et seront finalement tous assimilés par les Han.

Tous les peuples hunniques de Mongolie et d'Asie cen- trale ne s'étaient pas laissé entraîner aux jeux politiques où les Chinois excellaient. Parmi les groupes et les clans dispersés dans les steppes, ceux qui nomadisaient loin à l'occident de la Chine semblaient les moins disposés à renoncer aux grandes chevauchées et aux cités bonnes à prendre et à piller. Ils acceptaient comme tributs naturels les rouleaux de soieries, les jades et les jolis miroirs de bronze, les jolies princesses et les troupeaux qui leur étaient adressés en présents par les Fils du Ciel... mais ne renonçaient pas à leurs incursions ni à leurs pillages.

Les Chinois, exaspérés par ce harcèlement continuel, osèrent s'aventurer au-delà de la Grande Muraille. En 35 et 36 avant notre ère deux armées chinoises commandées

par le général Chen Tang taillèrent les Huns en pièces entre lac Balkhach et mer d'Aral et leur Khan (roi) perdit la vie dans l'affaire. Puis ils les poursuivirent loin vers

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l'ouest dans les steppes, où ils parurent se perdre dans la direction du soleil couchant...

Pendant des siècles, tribu après tribu, tout un peuple hun glissa vers l'ouest, vers la Sibérie, la Sogdiane, vers le Caucase et la Russie, massacrant et incendiant, volant les troupeaux, terrifiant les populations. L'Inde a gardé la mémoire de leur passage dévastateur et une stèle a immortalisé les atrocités commises par Miharakula, « Fils du Soleil », qui se glorifiait de n'avoir jamais laissé un être vivant, hors ses Huns, à portée de son regard. Pendant plus d'un siècle le Dekkan, le Cachemire, la haute vallée du Gange furent ravagés par les Huns. Puis, vers 370, regroupés par leur chef Balamir, ils reprirent leur marche vers le soleil couchant, venant s'établir entre Danube et Dniepr, aux frontières de l'Empire romain décadent.

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LES HUNS AUX MARCHES DE L'EMPIRE

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