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0 LETTRE AUX AUMÔNERIES AUMÔNERIE CATHOLIQUE DES PRISONS JUILLET - AOUT - SEPTEMBRE 2002 95

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LETTREAUXAUMÔNERIES

AUMÔNERIE CATHOLIQUE DES PRISONS

JUILLET - AOUT - SEPTEMBRE 2002

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JUILLET - AOUT - SEPTEMBRE 2002

SOMMAIRE

EDITORIAL, Jean-Hubert VIGNEAU......................................................................... 3

TEXTE D'ORIENTATION - "GRILLE" DE TRAVAIL, Equipe Nationale..................... 5

Déjà publié dans la Lettre n° 93… Il s'agit d'un outil de travail. Nous le remettons dans cenuméro, histoire de rappeler que le texte d'orientation est toujours d'actualité…

L'ETRE HUMAIN, Marie De HENNEZEL ………………………………………………..8

EVOLUTION DES MENTALITES EN PRISON, M. ARIOLI ...................................... 9

Ancien surveillant chef à la Maison d'Arrêt de Toulon, il nous parle de son expérienceprofessionnelle (extraits de son intervention à la session régionale de Toulouse).

LA FAUTE, Henri COULAUD .................................................................................... 13

Henri COULAUD est agrégé de philosophie et anthropologue. Il est aussi visiteur auCDR de Saint-Sulpice-du-Tarn. Il est intervenu aussi à la session régionale de Toulouse.

LA MORT DE YOANNE, Aumônerie de Lannemezan .............................................. 19

"Le temps qui passe… le corps qui vieillit… l'esprit qui s'atrophie… le "longue peine"s'éteint doucement". Cette légende de la carte "L'emmuré vivant" nous la connaissonsbien. Tous ceux qui étaient au Congrès en octobre 2001 se rappelle la statue. Elle estl'œuvre de Yoanne… Le "longue peine" s'est éteint…

DE QUELLE ESPERANCE LES AUMONIERS SONT SIGNES ? Maurice GRUAU. 21

Qu'espérions-nous en entrant dans une équipe d'aumônerie des prisons ? Quelle étaitnotre espérance vis-à-vis des autres et vis-à-vis de nous-mêmes ? Que voulions-nousdevenir ? Ces questions ne sont-elles pas à mettre au présent ? (session régionale deDijon).

VOUS, Charles SINGER …………………………………………………………………..26

LE FONDAMENTALISME, Maurice GRUAU..................................................................27

"… S'en tenir à la lettre d'une première parole, c'est refuser le progrès auquel Dieu lui-même nous invite…".

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ENSEMBLE DE REGLES MINIMA POUR LE TRAITEMENT DES DETENUS(NATIONS UNIES - Département de l'information - New-York, 1985) .......................... 31

L'Ensemble de règles définit les principes et la pratique à observer dans le traitement desdétenus. Elles représentent les conditions minima jugées acceptables par les NationsUnies. Leur but : prévenir tout mauvais traitement, lié plus particulièrement au maintiende la discipline et à l'utilisation d'instruments de contrainte dans les établissementspénitentiaires.

PROGRAMME FORMATION 2002 - 2003................................................................ 39

Notez tout de suite les dates des sessions qui vous concernent… pour ne pas dire "Je nesavais pas… !".

BREVES DE PARLOIR ............................................................................................ 40

DECALOGUE D'ASSISE POUR LA PAIX................................................................. 42

LE SCEJI DIT NON A L'ENFERMEMENT ................................................................ 43

Le Service Catholique Enfance Jeunesse Inadaptée réagit à la décision du garde dessceaux de créer des maisons fermées pour les mineurs délinquants.

JOURNEE NATIONALE DU SECOURS CATHOLIQUE........................................... 44

Nos liens privilégiés avec le "Secours Catholique" nous incitent tout naturellement àpublier ce communiqué de la Commission Sociale des Evêques de France.

COLLECTIF "OCTOBRE 2001" ................................................................................ 45

Pour le 20ème anniversaire de l'abolition de la peine de mort en France, un colloque avaitété organisé" le 6 octobre 2001 à l'Assemblée Nationale.

www.cef.fr ................................................................................................................. 47

Par ce site de l'Eglise de France, vous accéderez à celui de l'Aumônerie Catholique desPrisons.

JOSEPH BARRE, 42 ANS A LA PRISON ! , Paul CONSTANTIN............................. 48

Joseph est décédé le 12 août, à l'âge de 82 ans. Paul CONSTANTIN (aumônier régionaladjoint de Rennes) nous rapporte quelques échos de la célébration de l'"à-Dieu" deJoseph.

NOMINATIONS......................................................................................................... 49

UNE PAROLE QUI LIBERE, Bernard HUBLER ………………………………………..50

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EDITorial

Un an déjà depuis notre Congrès National de Lourdes…Où en sommes-nous de lamise en œuvre du texte d’orientation adopté lors de ce congrès ? Envoyés pourannoncer aux captifs qu’ils sont libres. Dans la Lettre aux Aumôneries n° 93, un plande travail nous était proposé pour la mise en œuvre de ce texte. Vous le retrouverez danscette Lettre, une manière de se rappeler l’actualité de ce texte et la nécessité, en cedébut d’année, de prendre le temps de faire le point en équipe : Où en sommes-nous ?Quelles priorités nous donnons-nous pour une plus grande fidélité à la mission qui nousest confiée par l’Eglise ?

Le climat sécuritaire post-électoral a balayé tous les espoirs que portait le projet deloi pénitentiaire du gouvernement Jospin. Même si au fil des rédactions successives de ceprojet ces espoirs se réduisaient comme peau de chagrin sous la pression de certainscourants, nous pouvions penser que le sentiment humanitaire y aurait une place… Nousavons été associés à l’élaboration de ce projet comme beaucoup d’autres organisationsnon gouvernementales. Nos propositions n’ont pas toutes été prises en compte mais aumoins il y a eu concertation.

Un nouveau projet de loi de programmation de la justice l’a remplacé, voté enhâte cet été, et sans aucune concertation, par l’Assemblée Nationale et le Sénat. C’estregrettable car le sujet méritait un meilleur traitement. Certes, cela aurait demandé dutemps et donc de résister à la pression d’une opinion publique impatiente…et peut êtrerassurée parce que les effectifs de la population carcérale sont en augmentation. Pournotre part, nous sommes plutôt inquiets. Parmi nos motifs d’inquiétude : le placement endétention provisoire des mineurs dès 13 ans, en cas de fugue, dans des centres fermésne peut être la solution. «Un mineur n’est pas un adulte en miniature, mais un être endevenir qui se transforme et qu’il faut accompagner… On dit que la prison est l’école ducrime. Dans le cas des mineurs, c’est vrai, et on ne redouble pas la classe » (RobertBadinter, le 26.07.02 devant le Sénat).

La troisième partie de notre texte d’orientation porte sur l’engagement del’aumônerie envers l’Eglise et envers la Société. Le contexte actuel souligne la nécessitéde prendre très au sérieux cet aspect de notre mission. Mais attention, ne nous érigeonspas en donneurs de leçons. Notre responsabilité c’est d’aider à comprendre, à dépasserles y-a-qu’a et y-faut-que en proposant modestement de partager une expérience quenous vivons et qui nous fait être autrement.

C’est dire que l’année que nous commençons doit être le temps de la nouveauté,de la création : donnons-nous des moyens pour cela. Nous les avons, à nous de nousen servir : rencontres d'équipes, sessions de formation, régionales ou nationales , laLettre…

Au début du mois de septembre, l’équipe nationale (Maurice Gruau, Jean Cachot etmoi) avons participé à Munich à la rencontre européenne de la Commission Internationalede Pastorale Carcérale Catholique en prévision du congrès mondial qui se tiendra àDublin en septembre 2003. L’aumônerie de 20 pays était représentée. Il y a bien sûrd’énormes différences de situations. Dans beaucoup de pays de l’Europe de l’est, dont

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l’économie demeure fragile, les conditions de vie des personnes incarcérées ne sont pasla préoccupation première des gouvernements et l’aumônerie doit souvent pallier auxlacunes de la société pour faire face à des besoins élémentaires et assurer un minimumde décence aux personnes détenues (nourriture, vêtements, soins médicaux). Mais nousavons en commun une même approche des personnes : les visites individuelles, lesrencontres de groupe, les célébrations. Le thème de la rencontre, vers une aumônerieeuropéenne, a souligné l’importance de la formation. Sur ce point, toute modestie gardée,nous ne sommes pas mauvais. Il a été souhaité que l’aumônerie de France soit un peumoteur au niveau européen.

Je vous invite maintenant à vous tourner vers deux personnes que nousconnaissons bien et estimons.

C’est d’abord à Hervé RENAUDIN que je pense. Il est très sensible aux messagesd’amitié qu’il reçoit. Après un temps de repos, il a repris quelques activités. Il doit encorese ménager car la chimiothérapie n’est pas terminée. Il sait que nous pensons bien à lui etlui souhaitons un bon rétablissement.

La seconde personne est Jean-François CANTO. Responsable du départementErrance-Prison du Secours Catholique, Jean-François part en retraite. C’est l’occasion delui dire notre reconnaissance pour son engagement au service des personnesincarcérées. Il a aussi été la cheville ouvrière du tandem "Aumônerie des Prisons / SecCath Errance-Prison". Nous lui souhaitons une bonne retraite qui, le connaissant, ne serasûrement pas inactive.

Il me reste à souhaiter à vous tous une bonne reprise de vos activités en attendantde se revoir à l’occasion des sessions régionales ou nationales.

Jean-Hubert VIGNEAU

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Congrès 2001 - Texte d’orientation“ Envoyés pour annoncer aux captifs qu’ils sont libres ”

“Ne vous occupez pas des prisonniers si vous ne consentez pas à être leurs sujets et leurs élèves. Ceux que nous appelons desmisérables, ce sont eux qui nous doivent évangéliser et convertir. Après Dieu, c’est à eux que je dois le plus”. Saint Vincent de Paul

Le débat national autour de la loi pénitentiaire et celui initié par le Jubilé des Prisons “Libérez les captifs”nous amènent à définir des orientations pour les 5 ans à venir.

1) Constat : “ La prison est broyeuse des personnes… de coupables nous devenons victimes… ” *“ Les prisons, une humiliation pour la République”. Les rapports officiels ont alerté l’opinion sur des

conditions de détention que nous confirment les personnes détenues : le système carcéral infantilise etdéresponsabilise et ainsi il déshumanise. La prison est généralement l’aboutissement d’échecs personnels,familiaux et sociaux.

- La détention provisoire est vécue au-dedans et perçue au-dehors comme une preuve de culpabilité.Elle ne préserve pas la présomption d’innocence.

- Des peines trop longues et les périodes de sûreté incompressibles cultivent la haine, tuentl’indispensable espoir et ruinent toute perspective de réinsertion.

- L’incarcération des mineurs est une impasse.- Le casier judiciaire enferme définitivement la personne dans son passé de délinquance.

2) Mission : “ Par l’aumônerie, l’Eglise me permet de retrouver une espérance …” *Des murs se construisent en chaque être humain au long de son histoire. Ils peuvent l’enfermer. Notre

mission première est d’accompagner des personnes incarcérées pour que, même en prison, elles prennentconscience de ces enfermements et pour les aider à s’en libérer. Disciples du Christ, nous osons reconnaître enchaque être humain, fût-il le plus défiguré, la présence du Ressuscité : l’homme est un peut-être divin ! C’estpourquoi, nous devons privilégier :

- L’attention préférentielle à tous les pauvres de la prison,- L’apprentissage du respect de soi et des autres : « en abîmant l’autre, je me suis défiguré ! »,- L’accueil, l’écoute, la prière et les célébrations comme chemins de libération,- L’expérience d’un pardon toujours offert, toujours à donner, toujours à recevoir. Le pardon est

libération dans tout homme de l’avenir qui est en lui.

3) Engagement : “ L’aumônerie peut être notre voix à l’extérieur, elle peut témoigner de notre détresse …”* Notre proximité avec les personnes détenues nous autorise à alerter l’Eglise et la Société.

* L’Eglise :Des personnes font en prison une expérience de la peine et du pardon et vivent une démarche catéchuménale.

Nous devons en témoigner dans les communautés et réclamer pour elles un accueil approprié lorsqu’elles sontlibérées.

* La Société :La Justice qui condamne des personnes les reconnaît, les restaure comme des sujets de droit. Dans sa

mission de réinsertion la prison doit affirmer de façon exemplaire les valeurs de la République : « Liberté-Egalité-Fraternité ». Quand elle les bafoue, elle est inutile et dangereuse. Aussi nous devons :

- Dire nos convictions essentielles sur le respect dû à tous : personnes détenues, familles, victimes.- Contribuer, à côté des personnels pénitentiaires et avec nos partenaires, à la mise en œuvre des

réformes favorisant les peines de substitution, l’humanisation des conditions de la détention et la réinsertion.- Rappeler et susciter le nécessaire accueil des personnes libérées : elles ne se réduisent pas à être

d’anciens détenus.

Dans cette dynamique, la mission de l’aumônerie catholique ne se conçoit que dans un travaild’équipe, avec une formation permanente de chacun, une évaluation continue des projets et unecollaboration régulière avec les aumôneries des autres cultes.

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Grille pour le texte d’orientation de 2001

La prison est un monde difficile et notre tâche n’y est pas évidente. Si habiles ou expérimentés que noussoyons, nous avons besoin de nous épauler et de nous éclairer les uns les autres. Il y va aussi de notrecrédibilité ou de la vérité de notre engagement que nous nous referions à un projet commun qui se veut fidèleau "cri des détenus".

Le texte d’orientation propose le projet de l’aumônerie des prisons pour les années à venir.Un projet pour toute l’aumônerie, c’est d’abord l’affirmation que, si différents que nous soyons et que soientnos pratiques, nous appartenons, dans l’Eglise, à l’aumônerie nationale et régionale des prisons. Notre tâchen’a de sens que de prendre racine dans cette appartenance commune : comment être ensemble si nous nefaisons pas route commune, c’est-à-dire si nous ne nous fixons pas des priorités communes ?

Nous travaillons dans une institution laïque et républicaine dont nous avons à connaître le fonctionnement etles orientations pour mieux nous situer. Dans ce monde fermé et déshumanisant, nous témoignons del’ouverture à l’infini de l’être humain.

1) Constat : "La prison est broyeuse des personnes…… De coupables, nous devenonsvictimes………"

Des personnes détenues qui fréquentent les aumôneries nous ont dit amplement dans "Libérez les captifs"(Lettre n° 86) ce que sont pour elles l’emprisonnement et la survie en prison : nous les avons entendues (cf.le jeu scénique du Congrès) Nous devons revenir régulièrement à ce que disent celles et ceux qui sontincarcérés : eux savent ce qu’est la prison ! Ils nous empêchent de nous y habituer : ne pas s’habituer à laprison est un des axes de notre travail en équipes d’aumônerie. Nous ne pouvons pas être parmi leurs porte-parole si nous ne les entendons pas scrupuleusement. Le texte d’orientation rappelle quelques pointsessentiels de la vie carcérale qui peuvent guider nos interventions auprès des groupes qui sollicitent notretémoignage. Si nous insistons partout sur les mêmes points, ça peut finir par "porter" et peut-être par"payer » !

2) Mission : "Par l’aumônerie, l’Eglise me permet de retrouver une espérance….."

- Des personnes dÉtenues nous ont dit comment la prison emprisonne les corps et les esprits. D’oùl’importance de notre ministère d’accompagnement : comment prendre conscience de ces enfermements,ceux des personnes détenues et les nôtres, - ceux qu’ils nous révèlent parce que nous sommes pétris de lamême humanité et ceux dans lesquels les institutions quelles qu’elles soient, risquent de nous enfermer,même à notre insu ?

- La prison abÎme les personnes : comment les respecter pour qu’avec nous elles se sachent respectées, ycompris dans leur haine, leur rÉvolte, leur dÉni, leur refus de se reconnaÎtre coupables, leur refus depardonner …?

- Comment nous donner les moyens de rester vigilants et lucides et de nous enraciner dans la fidélité auChrist pour témoigner dans un monde clos de la présence agissante du Ressuscité ? Quelle formationthéologique ?

- Comment signifier dans les relations personnelles et dans les rÉunions ou célébrations la réalité du pardonde Dieu ? Quels signes, quels rites ? Quels sacrements en prison ? Comment rendre possibles les paroles etles gestes du pardon ? Comment accompagner le temps nécessaire au pardon ?

- Comment "gérer" l’habitude des jours, mois, années toujours pareilles et arriver à déceler l’invisible desprogrès humains et spirituels des personnes ; par exemple dans ce qu’ils se disent en aumônerie, ce qu’ils

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nous disent… Mais comment être un écoutant assez respectueux pour que, quand nous les Écoutons, ilss’entendent

- Comme dehors, mais c'est plus choquant, la prison a ses pauvres qu’elle tend à rendre plus pauvres encore,plus gênants: comment ne pas les oublier jusqu’à une attention à eux qu’on voudrait préférentielle ?

- Comment accueillir les délinquants sexuels qui nous sollicitent plus que les autres, peut-être parce quel’aumônerie est pour eux une porte ouverte, souvent la seule ?

2) Engagement:"L’aumônerie peut Être notre voix à l’extérieur, elle peut témoigner de notre détresse…."

* L’Eglise:- Les équipes d’aumônerie, agréées par l’institution pénitentiaire, sont des « pierres vivantes » de l’Eglise :porte-parole des personnes détenues dans la société, en premier lieu dans les communautés chrétiennes :comment témoigner ? Témoigner de quoi ?

- Comment faire entendre qu’il y a des chrétiens en prison ? Que ces chrétiens ont des choses importantes àdire ? Qu’ils font une expérience irremplaçable d’un être chrétien dans des circonstances difficiles ? Uneexpérience dont l’Eglise a besoin ?

- Comment également être en prison, l’écho des chrétiens du dehors pour une parole vraie, fraternelle maissans complaisance ?

- Quels liens tisser entre chrétiens du dehors et personnes incarcérées ?

- Comment faire entendre aux chrétiens du dehors que des chrétiens ou catéchumènes qui vont sortir espèrentqu’on pourrait les accueillir dans la communauté chrétienne ?

- Quand on sait, on ne peut pas se taire, et nous avons le devoir de réserve : que pouvons-nous dire du mondecarcéral à l’Eglise ?

* La Société :- Les victimes doivent être entendues. Comment faire droit aux victimes ? Comment faire droit à leursouffrance ?

- Les personnes détenues et leurs familles ont droit au respect. Comment défendre les personnes incarcéréeset leurs familles

- La prison est un monde fermé qui a besoin de s’ouvrir sur l’extérieur. Que dire pour une humanisation de lavie carcérale ?

- Nous avons sans doute quelque chose à dire sur le sens de la peine ?

- Comment travailler avec les partenaires institutionnels de la pénitentiaire pour la réinsertion des personnesqui vont sortir et pour faire avancer les nécessaires réformes ?

- Quels axes prioritaires peut-on se fixer ?

L’équipe nationale, 2 février 2002

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L’être humainNe se réduit pas

A ce que nous voyonsOu croyons voir.

Il est toujours infinimentPlus grand, plus profond

Que nos jugements étroitsNe peuvent le dire.

Il n’a, enfin, jamais dit son dernier mot,Toujours en devenir,

En puissance de s’accomplir,Capable de se transformer.

Marie de Hennezel.

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L'évolution des mentalitésen prison

La prison est un univers professionnel où le plus souvent chacun surveille l'autre et lesuspecte de trahison, où la contradiction existe entre mission de garde et de réinsertion.

La réglementation et les contrôles se sont développés, limitant les pouvoirs des agents etdes directions.

Les conditions de vie matérielle des détenus se sont améliorés.

A l'obligation de silence et à l'interdiction de communiquer entre détenus s'est substituéela parole, favorisant le dialogue entre surveillants et détenus.

La prison apparaît comme une structure ancienne et derrière une impression depermanence ses fonctions ont profondément évolué.

Magistrats, professionnels de la pénitentiaire, bourgeois ou adolescents des ZUP, luiaccordent un sens différent.

Les fonctions traditionnelles de la prisonUne des plus anciennes est la détention préventive. Héritée des romains et desvénitiens.

Les français reprendront cette pratique à l'époque de Richelieu et de Colbert. Les peinesseront développées et beaucoup plus lourdes dans le seul but d'avoir à disposition unemain-d'œuvre servile, pour le maintien d'une flotte militaire.

Les lettres de cachet, par lesquelles nombre de personnes étaient placées en détention,à l'initiative du Roi ou de l'Intendant. Ils étaient emprisonnés par risque de troubler l'ordrepublic. Sa pratique prit fin avec la libération de la Bastille le 14 juillet 1789.

La stigmatisation ou contrainte par corps s'est appliquée jusqu'au milieu du XXème

siècle, dont la fonction était de montrer du doigt un débiteur plutôt que lui donner lapossibilité de rembourser ses créanciers.

La pénalité

Etre en prison apparaît comme une pénalité économique, symbolique et physique.

La rééducation va apparaître au XIXème siècle.

Les personnes sont incarcérées pour rééducation, par solitude et observation, afind'aboutir à la transparence du condamné.

La prison du XIXème siècle sert à dissuader les honnêtes gens du crime. La prison estl'exercice de la contrainte légitime. La prison sert plus aux expérimentations de l'Etat et aumaintien de l'honnêteté des citoyens qu'aux marginaux.Au siècle dernier émerge une réelle réflexion sur la prison, son utilité sociale et surtout lafaçon dont sa fonction peut être "améliorée".

Les grands débats portent sur l'isolement cellulaire, la comparaison bagne-prison ainsique sur deux questions récurrentes : Faut-il "punir" ou "amender" ? Est-ce à la Justice ouà l'Intérieur d'assumer la direction des prisons ?

Le 25 mars 1872, l'Assemblée Nationale crée une commission d'enquête parlementairequi rassemble divers acteurs de justice, pénitentiaires, magistrats, gens d'Eglise, etc...

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Nous constaterons que seulement un siècle plus tard, cette même Assemblée s'interrogesur cette institution.

Les missions de l'Administration PénitentiaireSont toujours celles énoncées par la réforme Amor de 1945, définies par l'article 1er

de la loi du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire. Par contre, lesconditions d'exercice de ces missions ont considérablement évolué.

Passage obligé, la prison fait partie intégrante du système judiciaire actuel.

Selon un processus qui s'est accéléré depuis le milieu des années soixante dix, la prisons'est transformée, même si ses fonctions originelles demeurent inchangées.

Les manifestations les plus visibles de la dépersonnalisation des prisonniers s'effacent, labarrière, entre dirigeants et dirigés, s'estompe.

A l'amendement du détenu par le silence, l'isolement cellulaire, le travail et la discipline sesont substitués de nouveaux objectifs orientés vers la formation, l'aide à la réinsertion etau maintien des liens familiaux.

Le travail n'est plus obligatoire et le respect de la discipline vise moins à redresser lesdétenus qu'à éviter les désordres à l'intérieur de la détention caractérisés par d'incessantsmouvements de circulation.

Ces nouvelles orientations se sont caractérisées par l'entrée de "professionnels" endétention : enseignants, éducateurs, travailleurs sociaux, animateurs, etc… et ontcontribué à ouvrir la prison au monde extérieur et à l'influence de celui-ci.

La plupart des grands changements qui ont concerné la prison traitent principalement del'amélioration de la vie quotidienne des détenus, des régimes de détention, des modalitésd'exécution de la peine. Ils sont interprétés par le personnel comme étant des avancéesexorbitantes, portant atteinte à sa profession, à son autorité, à ses moyens pour exercerson métier.

Les principales réformes1975, réforme conçue dans la hâte, sous la pression de mutineries de 1974, quasimentindiscutée par les responsables pénitentiaires, alors que la prison devait se moderniser etsubir une révolution dans son fonctionnement.

1982, le Garde des Sceaux impose les parloirs sans dispositifs de séparation dans tousles établissements.

1985, l'arrivée des télévisions.

1986, l'arrivée des frigidaires.

L'augmentation des droits des détenus (droit à l'information, droit du consommateur, droitde parler, droits de l'homme), conjuguée à une pratique du recours devant la coureuropéenne tend à inverser le rapport de force personnels / détenus. Là, encore, lepersonnel subit mais ne maîtrise pas.

Une autre composante réside dans la modification profonde de la population pénale : sesstructures, ses attentes et ses réactions.

Population pénale plus difficile à appréhender car elle est déstructurée non seulementsocialement mais psychologiquement.

Elle se positionne plus facilement dans la violence verbale ou physique. Cette remise enquestion de l'autorité qui touche d'autres corps d'état se fait ressentir d'une manière plusforte en détention.

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Le personnel a pris conscience de l'accumulation de tâches nouvelles mais aussi de ladétérioration de son identité professionnelle du fait de la multiplication des interventionsspécialisées qui lui subtilisent le volet valorisant de sa mission.

La loi du 18 janvier 1996 a transféré au service public hospitalier la responsabilitéd'organiser la prise en charge sanitaire de la population pénale.

Psychologiquement, la réforme n'a pas été sans difficulté pour les personnels. Trèsattachés à leur mission et à ses impératifs de secret professionnel, les personnels ontparfois mal compris pourquoi ils ne pouvaient pas être admis dans le secret médicalpartagé, d'autant qu'ils estiment légitimement craindre les risques de transmission dansles situations où il y a possibilité de contact physique avec un détenu pour certainespathologies.

Le décret du 13 avril 1999 crée les services pénitentiaires d'insertion et de probation quise substituent aux services socio-éducatifs des établissements pénitentiaires et auxcomités de probation et d'assistance aux libérés.

Services à compétence départementale, ces nouveaux modes de fonctionnement doiventgarantir une continuité dans le suivi des personnes entre le milieu ouvert et le milieufermé.

Le SPIP participe à la prise en charge des fonctions placées sous la responsabilité du chefd'établissement et relatives à l'accueil, au projet d'exécution de la peine, à la viequotidienne en détention, à lutter contre l'illettrisme et à la lutte contre l'indigence. Ilcoordonne les interventions dans les domaines des activités physiques et sportives, delutte contre les toxicomanies et d'éducation pour la santé.

Les bouleversements qui affectent notre institution ne pourront être mis en œuvre danstoute leur plénitude et efficacement qu'avec la participation effective et professionnelle dupersonnel pénitentiaire.

La grande majorité des personnes incarcérées se recrute dans une frange de populationcumulant les handicaps : carences affectives et éducatives, niveau scolaire très bas, peuou pas de formation professionnelle, emploi hypothétique, personnalité déstructurée.

La population pénale a changé de comportement. Elle a pris conscience de ses droits,voire de sa pression. Loin d'accepter la peine, elle la conteste. Elle rend de ce fait plusmalaisé l'exercice d'une autorité plus que nécessaire.

La prison n'est plus un lieu vraiment fermé, la multiplication des activités y devient le traitdominant avec pour conséquence la multiplication des mouvements et nombred'intervenants extérieurs qui exécutent normalement des prestations qui ne relèvent pasde notre savoir faire mais qui monopolisent, sans le vouloir d'ailleurs, la part noble de lamission pénitentiaire.

Une nouvelle définition des fonctions et des secteurs de compétence, qui tienne comptedes mutations importantes de notre temps (modernisation du service public,déconcentration, bouleversements technologiques, ouverture de la prison sur l'extérieur,refus de l'emprisonnement par la population pénale…) pourrait aboutir à uneresponsabilisation du personnel : celui-ci deviendrait immanquablement le correspondantprivilégié du détenu et des intervenants.

Pour que la prison se désenclave complètement il faut que chacun des partenaires soitutile à l'autre.

La mise en œuvre d'une information détaillée sur les actions entreprises, leur durée et leurfinalité - en associant chacun selon ses compétences, aptitudes et missions respectives -

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serait de nature à modifier, renforcer la communication entre le personnel et les diversintervenants.

Certes, des dysfonctionnements perdurent, dilution des responsabilités, cloison-nementdes services, absence de communication, etc.

S'il est quelqu'un qui connaît très bien ces difficultés, c'est l'aumônier de prison, ballottépar les uns, pas apprécié par les autres, souvent rabroué, alors que son rôle tant auprèsdu détenu que de l'agent est primordial pour apaiser, conseiller, secourir, etc.

M. ARIOLI, ancien surveillant chef à la M.A. de Toulouse (extraits)

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La faute

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Pour parler de la faute - ce que vousm'aviez demandé - j'ai besoin d'aborder,pour bien les distinguer, le mal et lepéché, deux notions qui nous sontproches.

Je voudrais aussi parler de la sanction eten arriver à la plus grande question :"Pourquoi donc la faute ?".

En bref : le mal n'existe pas !le péché existe toujours,incontournable, chronique,

la faute existe quelquefois.

I - LE MAL

"Le mal n'existe pas"

Le mal est du côté du magique, on lepersonnifie. Ainsi, dans le langage cou-rant : "On chasse le mal" (sorcellerie), "Onéloigne le mal", "On combat le mal". Lespossédés étaient envahis par le mal ; àl'endroit du mal, on observe souvent desconduites rituelles.

Le mal a été en quelque sorte concrétisédans son existence propre, il est le thèmede la magie noire. Certaines personnesconsidèrent leur existence de manièrequasi magique : "On leur a jeté unmauvais sort".

Le mal est abstrait : puissance cachée,mystérieuse, qui prend plusieurs figures.On y trouve tous les fatalismes, un mal quis'abat sur nous comme une grande force.

Au plan psychologique, c'est une façon dejeter hors de nous nos pulsions, nosfaiblesses, nos noirceurs. Réaction dedéfense : on a besoin d'un mal extérieur,qui vient du dehors, nous envahit, nousdomine.

Là-dessus, je suis opposé au freudisme.Je reproche à Freud de faire du mal unepuissance originelle, incontournable,enracinée ; je me méfie de tout auteur quiplace le pouvoir de mort, la violencecomme principe initial, presque mystérieuxet qui, du même coup, déresponsabiliseles époques de l'histoire.

Personnellement, je suis plus attiré par lesexplications historiques. Il y a des causes

historiques ponctuelles, précises de laviolence. Ainsi, des historiens montrentque la violence a été inégale dansl'histoire, et certaines périodes porteusesde violence, d'autres non.

- Jacques Le Goff a montré quel'antisémitisme, au Moyen âge,succédait à des disettes et à desépidémies.

- D'autres historiens démontrent que lelynchage des noirs coïncidait avec lamévente du coton.

- Si Jean Valjean a été puni du bagnepour avoir volé du pain, c'est parceque, sous la Restauration, le painmanquait : qui volait du pain en cettepériode était durement châtié.

- Ce qui se passe aujourd'hui à proposde la pédophilie ne peut que renforcerla thèse historique : les époques ne seressemblent pas.

Pour moi, le mal ne pourrait pas exister, ilest contingent à l'histoire : il n'est pas bonqu'une société, un peuple soient troplongtemps frustrés.

Roger Bastide, dans un ouvrageremarquable : "Psychanalyse etsociété" , a fait la psychanalyse dessociétés et montre combien la violencetient à une conjoncture historique précise.Freud ne s'est penché que sur l'histoireindividuelle.

Il est un texte de Saint Augustin, extrait du"Traité du libre arbitre", qui est trèséclairant pour notre propos.

"Mais ce qu'on appelle mal, est-ce autrechose que la privation d'un bien ? Pour uncorps vivant, les maladies et les blessuresne sont rien d'autre que le fait d'être privéde la santé. En effet, lorsqu'on applique untraitement à ces maux, à savoir maladieset blessures, ce n'est pas pour les chasserde là et les transporter ailleurs, mais pourles faire disparaître complètement.

Par conséquent, tous les êtres sont bonspuisque le Créateur de tous, sansexception, est souverainement bon. Mais,parce qu'ils ne sont pas, comme leC r é a t e u r , s o u v e r a i n e m e n t e timmuablement bons, le bien peut diminuerou augmenter en eux.. Or, la diminution du

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bien est un mal, quoique, pour autant qu'ildiminue, il en reste nécessairement, sic'est encore un être, quelque peu qui lefait être. Quelque soit en effet cet être, etsi petit soit-il, on ne saurait détruire le bienqui le fait être à moins de le détruire lui-même…

Tout être est donc un bien, un grand biens'il ne peut se corrompre, un petit s'il lepeut. Nier qu'il soit un bien est absolumentimpossible, sauf à un insensé ou à unignorant. Si la corruption l'anéantit, elle-même ne durera pas, faute d'un être quilui permette de subsister".

Dans sa jeunesse, Augustin avait versédans le manichéisme, lequel enseignaitqu'en face de Dieu, le Bien absolu, setenait une puissance égale, le Mal absolu.Le cœur de l'homme serait le lieu oùs'affrontent ces deux puissances.Manichéisme qui sera repris plus tard parles Cathares : le monde, lieu du mal, estaussi puissant que Dieu.

Augustin se disculpait ainsi : "Pour lemoment, c'est le mal qui gagne".Simplification manichéenne dont a besoinl'enfant : dans les contes, le loup estentièrement méchant, l'agneau ne peutêtre qu'entièrement bon, sans défauts.Simplification d'enfant : le monde est tropdifficile, donc je le simplifie !

Dans certaines conversations avec lesdétenus, j'ai perçu cette représentationmanichéenne. Leur pauvreté consistesouvent en de l'infantilisme, une naïvetéstupéfiante. Mais cela ne se retrouve pasuniquement dans les prisons…

La conversion d'Augustin : il quitte lemanichéisme et rencontre Plotin pour qui iln'y a que le Bien absolu ; notre monde, lui,est imparfait par rapport à cet Absolu.

Pour Augustin :

- Dieu n'a pu créer que le Bien ; l'Amouroccupe tout.

- Le mal n'existe pas en tant quesubstance permanente ; il n'y a pas deSatan : celui-ci en moi est absenced'amour.

- L'homme n'est pas l'objet d'un mal quil'envahirait, il est auteur de ce mal,

responsable. Le mal n'existe que parle sujet qui l'accomplit.

C'est pourquoi certains affirment que pourchasser le mal, il faut supprimer lecoupable, ce qui signifie qu'on identifiel'homme à son acte.

Or, le coupable reste un homme avec sadignité :

- dignité, non du méfait, mais dumalfaiteur,

- dignité, non de la faute, mais ducoupable.

Certains disent : "Pour empêcher laviolence, il faut se retenir d'être violent !"

Là n'est ni la question ni la solution, car lemal ne peut disparaître que si le bienoccupe la place. Le contraire, à savoir :"Le bien est l'absence de mal" n'est pasvrai. Le Bien n'est pas se retenir du mal, lemal est le degré d'amour qui diminue.

Ce texte de Saint Augustin me paraîtfondamental, car on parle aujourd'huid'empêcher, de retenir la violence. Lapulsion irrésistible, irrépressible, elle, estpathologique…

II - LE PECHE

Ce terme a une connotation religieuse.Dans le langage b ib l ique etparticulièrement chez Saint Paul, le péchéest lié souvent à la mort : sauver dupéché, c'est sauver de la mort. Ce n'estpas une abstraction comme le mal. Aupéché est attachée une idée d'intériorité :on le porte en soi (nb 32, 23).

On pèche contre Dieu et contre ses frères,on manque à l'Alliance : il s'agit donc dudomaine du relationnel. Ainsi, dans lepéché, il faut être deux ! On ne répond pascomme on nous donne… Ainsi, onmanque aussi à soi-même, on se fait mal :de là naît le sentiment de culpabilité.

Le péché est une réalité chronique. Eneffet, il existera toujours, car nous neserons jamais en mesure, créaturesfaibles, de répondre également à l'alliancequi nous est proposée. C'est pourquoi onparle d'"état de péché", différent de lafaute qui, elle, est ponctuelle parce que

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manquement à une règle, une loi.L'Alliance est au-delà de la règle : lepéché est ainsi un état, presqueconstitutionnel.

Dans son livre "Finitude et culpabilité",Paul Ricoeur distingue entre le péché(état) : nous naissons créatures, jamais àla mesure de notre Créateur, et le pécher(acte) qui est un acte de révolte (Lucifer).

Pour Paul Ricoeur, le véritable péchéoriginel, ce n'est pas se battre dans leslimites de sa condition, c'est se battrecontre sa condition limitée. Le péchéoriginel peut encore avoir l ieuaujourd'hui…

Dans le livre de la Genèse, Dieu crée enséparant ; créer, c'est instaurer de ladifférence. L'enfant doit s'éloigner dufusionnel non dans la solitude ou l'hostilité,mais dans la différenciation. Maisauparavant, il devra avoir sa dose defusionnel, sinon il la réclamera et lacherchera plus tard.

Le père est celui qui instaure une situationtriangulaire ; il ne vient pas sanctionner uninceste entre mère et enfant, mais établirce qui est la souche de toutes les relationsfutures, l'aptitude relationnelle.

Nous trouvons souvent en prison cettefixation à la mère, ce fusionnel parabsence du père…

III - LA FAUTE

Il ne s'agit pas, ici, d'une rencontre, maisde la relation avec la loi : il n'y aurait pasde faute s'il n'y avait ni règle ni institution.

Il existe une hiérarchie des fautes suivantce qu'elles atteignent : certaines fautesconcernent les choses, d'autres lespersonnes.

La faute est différente du mal, car nimystérieuse ni magique, mais précise etvisible : on peut la décrire, la situer dans letemps et dans un lieu.

Elle est différente du péché, car elle estponctuelle, non permanente. La faute peutêtre un acte ou une omission. Elle estimputable à un auteur : "A qui la faute ?".

Elle engendre le remords : la faute passéepèse sur le présent et l'envahit. Le travaildu psychanalyste consiste à replacer lepassé dans le passé, à faire prendre de ladistance. Nous pourrions dire que nousaidons les détenus à faire un travail demémoire.

Avec la faute, nous trouvons la notion deculpabilité. Nous sommes héritiers detoute une primitivité en nous : la notion deresponsabilité personnelle, individuelle estrécente.

Nous sommes héritiers du "crime primitif"qui n'est pas une faute, un acte commispar quelqu'un, mais un événement (evenit,ça arrive). Cet événement, la victime et lestémoins y sont tout autant mêlés.

Ce crime primitif, les sociologues lenomment : souillure. Ainsi, les témoinsdoivent être chassés, le couteau doit êtrebrûlé, le lieu et la date doivent êtreoubliés, effacés. Et il faut des sacrificesd'êtres innocents, purs - les sacrificesd'enfants au Dieu Maloch - pour effacer lasouillure, ce qui n'est pas innocent.

Aujourd'hui encore, nous rencontrons cemagique : lieux et périodes maudites oubénéfiques. Dans certaines conversations,nous retrouvons ces é lémentssuperstitieux. Le magique est toujoursactuel. La responsabilité personnelle estune donnée récente…

L'enfant ne parvient pas tout de suite àl'intention : cette notion ne lui est pasaccessible dans les premiers temps, il nevoit que les conséquences de ses actes. Apreuve ce que disent les enfants : "Si tusavais ce qu'il a fait !". L'intentionn'apparaît comme notion concevable quevers l'âge de 7-8 ans.

Notre justice n'est-elle pas puérile ? Nereste-t-elle pas fixée sur les conséquen-ces ? Est-elle toujours portée à examinerla qualité de l'intention ?

La justice ne paraît pas toujours adulte.Ainsi les délits de pédophilie ont un impactémotionnel très fort sur l'opinion publique,car il s'agit d'enfants. Or, il est questiond'une perversité, le plaisir éprouvé à fairesouffrir un innocent, et donc d'unepathologie. Il semble que ce qui a le plus

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d'impact sur l'opinion publique soit le pluspathologique.

Ainsi reste-t-on fixé sur les conséquences,qui ne sont pas à négliger. Mais on nepeut en demeurer là : se poseimpérativement la nécessité de ladistinction entre le normal et lepathologique. La massivité des dégâtscommis ne doit pas retenir l'attention surelle seule.

IV - LA SANCTION

La sanction a le sens de punition commede récompense.

Problème moral de la sanction

C'est le stoïcien Marc Aurèle qui dénonçaitl'éducation fondée sur récompense oupunition comme immorale parce qu'elledéplace l'attention de l'acte vers lesconséquences : l'acte n'est plus considéréen lui-même, mais en ce qui en découle,récompense ou punition.

La prison est une sanction qui veut "retenirde la faute", une punition qui doit donnermauvais goût à la faute. Or, lespsychologues affirment qu'au moment ducrime, on ne se représente pas la sanctionqui peut être encourue : la punition n'estpas dissuasive, elle ne sera découvertequ'après. De plus, la punition accomplie,laisse un sentiment de non-redevance :"On ne doit plus rien"…

Origine de la sanction

La sanction peut avoir deux finalités :

- soit protéger la société,

- soit restaurer le coupable.

A l'origine, la sanction avait pour but deprotéger la société. C'est ce qu'affirmeDurkheim, le maître de la sociologie dudébut du XXème siècle : primitivement, lasanction avait été créée pour le maintiendu groupe. Le crime menaçait le groupe, ilfallait économiser le sang, ne pas legaspiller : le crime devait donc être puni.

La prison : des sociologues la présentecomme une sanction visant l'extériorité,mais atteignant l'intériorité par une lente

imprégnation ; le prisonnier va finir par sesentir coupable.

Camus, dans l'étranger, proteste contrecette thèse. Pour lui, le sentiment deresponsabilité est en l'homme et ne vientde la sanction qui lui est imposée.

Meursault va être condamné à mort. Maispour le condamner, la justice a besoin d'unpersonnage qui aurait été toujoursmauvais et incapable de bons sentiments,même d'amour filial : elle va donc créer cepersonnage artificiel pour parvenir à sesfins.

On rencontre certains détenus qui nerefusent pas leur culpabilité, mais neveulent pas de la responsabilité que lajustice voudrait leur faire endosser. Cettedernière a créé un personnage aveclequel ils ne coïncident pas, un autrehomme dans lequel i ls ne sereconnaissent pas.

La peine de mort est un besoin de l'Etatpour asseoir et affermir son pouvoir ; ellene rend service qu'à l'Etat, non à la justice.

La violence naît de l'étrangeté, on instaureune situation de guerre en créant del'étrangeté. On ne tue que ce qu'on neconnaît pas, l'indifférence libère touteconduite violente. L'Etat doit donc créer unétranger, un ennemi, empêcher surtout leshommes de se connaître, de se fréquenteret de fraterniser.

Ainsi, l'étanchéité entre les générations estune affaire grave aujourd'hui, car c'est lasolitude qui rend violent : les jeunesagressent et tuent les vieillards, maisceux-ci peuvent aussi se montrer violentset aller jusqu'à tirer sur des jeunes qu'ilsne rencontrent plus véritablement.

On a inventé une société de ghettos : ilfaut tout faire pour éviter l'étrangeté entreles êtres !

Notre travail : trouver la vraie forme deresponsabilité. Car la faute a un auteur etil faut "honorer" l'auteur. Ce qui est le pire,disait encore Albert Camus, ce n'est pas lasanction légale : elle connaît son terme,mais la sanction diffuse (l'opinion, larumeur) : celle-ci continue et perdure (le

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détenu sort de prison, mais ellel'accompagne jusqu'au bout…).

On fige la personne dans sa situationactuelle. Il faut donc favoriser ce que PaulRicoeur appelle l'"identité narrative", quipermet de raconter sa vie, son histoire etqui n'arrête pas le temps.

"L'histoire de chacun est une longuephrase, il n'y a que des virgules, jamais depoints". (P. Ricoeur)

Il ne faut pas enfermer dans le délit. Aucontraire, il nous faut faire sortir la totalité,la trajectoire d'une vie pour libérer de lafaute et dégager un autre : "Je" est unautre ! Ainsi, faire raconter aux détenusdes événements heureux qu'ils ontéventuellement vécus peut aider…

On a besoin d'une marge : on n'acceptepas d'être seulement ce qu'on est, oncherche toujours à être ce qu'on n'est pas."L'homme l ibre n'est jamais lecontemporain de lui-même, il faut qu'il soitailleurs".

L'homme a besoin qu'on ait besoin de lui !C'est également vrai en prison : ce n'estpas en améliorant les conditions de vie,mais en demandant quelque chose audétenu, en le rendant utile, qu'on peutl'aider à se remettre debout, à se mettreen marche. Le suicide est souvent tentantlorsqu'on se sent inutile.

V - POURQUOILA FAUTE ?

Il ne s'agit pas ici des pathologies, despulsions irrépressibles.

Platon disait : "Nul n'est méchantvolontairement". Il ne s'agit pas d'un refusde responsabilité ("C'est le milieu social","C'est la faute de…."), le vrai sens : Platonpense que le bien et le bonheur seconfondent. Qui fait le mal ne peut vivreque malheureux. Personne ne veut lemalheur, ne décide d'être malheureux.L' idée ant ique, repr ise par lapsychanalyse, est que dans la violence, ily a un mal et un malheur, à savoir unedisharmonie de l'âme. La justice, c'est

l'harmonieux. Les hommes justes sontceux qui sont en paix avec eux-mêmes.

Il y a souvent un malheur à l'origine dumal, de la violence. Il n'est pas bon qu'unesociété subisse trop longtemps une criseéconomique. Ainsi, les années 30,difficiles socialement et économiquement,ont vu la montée des fascismes : lorsqueHitler prend le pouvoir, il y a six millions dechômeurs.

Quand quelqu'un est agressif, on peut sedemander où a-t-il mal ? Cela ne signifiepas qu'une personne comblée ne peut pasêtre violente : la disharmonie ne dépendpas de la condition sociale, elle peutexister au milieu des richesses.

Faut-il changer les institutions ou lespersonnes ? La réponse platonicienneest : changer les personnes, l'harmonie dela société dépendant de celle desindividus.

La véritable harmonie existe lorsque le"nous" (la raison) l'emporte sur le "thumos"(le courage, qui doit être dirigé), et sur les"épithumia" (les passions qui doivent êtrenon détruites, mais maîtrisées).

Une autre idée, qui présente de l'intérêtpour notre sujet, nous la trouvons chezSaint Thomas d'Aquin - J'en veux auxthomistes qui se servent de Saint Thomaspour faire le procès du monde actuel et lecritiquer - Pour Saint Thomas, un mal n'estjamais absolu et en tout mal il y a un bien.Il n'y a du bonheur qu'en Dieu, mais leshommes se trompent : ils prennent pourde l'absolu ce qui est du relatif.

Un passage du "Contra Gentiles" estéclairant : "A l'état vague et confus, laconnaissance de l'existence de Dieu estinnée naturellement en nous en tant queDieu est le bonheur de l'homme.L'homme, en effet, désire naturellement lebonheur, et, ce qu'il désire naturellement,il le connaît naturellement. Mais ceci n'estpas, à proprement parler, connaîtrel'existence de Dieu ; tout comme on peutconnaître que quelqu'un arrive sansconnaître Pierre, alors que c'est Pierre quiarrive. En effet, beaucoup mettent dansles richesses le souverain bien del'homme qui est le bonheur ; d'autres lemettent dans les plaisirs, d'autres ailleurs".

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Saint Thomas veut signifier que dans lemal, il y a toujours un bien éprouvé, unplaisir. Mais "il y a du mouvement dereste".

Des détenus reconnaissent qu'ils auraientpu faire plus ; ils ont cru tout avoir, à tort,et ils n'ont eu que….

Saint Thomas écrit encore : "La liberté estplutôt un défaut de la volonté qu'une forcede son agir".

Ainsi, l'homme ne peut vouloir que le bienet, lorsqu'il fait le mal, c'est qu'il ne veutpas suffisamment le bien absolu qui estson bonheur. Le bonheur absolu n'estqu'en Dieu, il croit le trouver ailleurs.

Vision optimiste ! Vouloir la faute, ce seraitvouloir le malheur et on ne peut pasvouloir le malheur : la faute est souventune erreur. Cela n'enlève pas laculpabilité, car il faut discerner, savoir oùest le vrai bonheur.

Repenser la prison, ce serait repensertoute cette rééducation qui consiste àcorriger l'erreur.

A propos de la parole liquidatrice.Il y a une certaine joie dans la paroleliquidatrice, une satisfaction de l'aveu,mais je ne suis pas certain que le maladese guérisse en se racontant et que celaévite la récidive.

On ne pourrait éviter la récidive que dansla prise de conscience de l'erreur que l'oncommet en prenant pour de l'absolu ce quin'est qu'éphémère et relatif.

Henri Coulaud, Rocamadour

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De la mort de Yoanne…

Au début de cet été, un détenu s'est donné la mort à la Centrale pénitentiaire deLannemezan : il a été retrouvé pendu dans sa cellule, en milieu d'après-midi.

Nous ne voudrions pas que cet acte de désespérance passe totalement inaperçu et nerencontre qu'indifférence et fatalisme, ou qu'il suscite des commentaires approbateurs etcyniques, du genre : "C'est ce qu'il avait de mieux à faire !". Cela a été entendu…

Ainsi, Yoanne n'a pu envisager d'autre issue à son enfermement et à sa solitude :

- enfermement physique, sans aucune perspective de libération, sinon très lointaine :c'était un "très longue peine" ;

- enfermement moral dans la culpabilité : son délit pesait sur lui d'un poids écrasant etcroissant ;

- isolement affectif : sa famille l'avait rejeté et ne lui donnait aucun signe de vie ;

- isolement social : beaucoup de co-détenus l'évitaient.

Cette "douleur trop vive", cette dégradation inexorable, ce rejet des siens et de sessemblables, cette imploration qui l'habitait, Yanne avait exprimé tout cela, voici deux ans,non avec des mots, mais par une œuvre bouleversante de vérité : une statue, "L'emmurévivant", que beaucoup d'entre vous connaissent pour l'avoir vue exposée à Lourdes ou endivers lieux du département. Il en était l'un des auteurs et, sans doute, le principal artisan.

Ce qui nous reste aujourd'hui, c'est une impression de non-sens, un goût amer decendres. C'est, aussi, le constat de la faillite du système carcéral qui ne relève pas, mais, aucontraire, enfonce, marque le coupable au fer rouge, imprime en caractères indélébiles ledélit, comme un vêtement définitif. C'est, enfin, ceux qui rencontraient Yoannequotidiennement ou occasionnellement. Seules, les rencontres régulières, génératricesd'espérance, avec sa visiteuse ont pu le retenir jusque là dans sa décision de partir.

Non, nous ne croyons pas qu'il n'avait rien de mieux à faire, que cette porte de sortieouvrait, seule, sur la liberté.

Nous ne croyons pas qu'un homme ne puisse pas se relever et se regarder lui-même,s'il est regardé et accompagné avec humanité et sollicitude.

Nous ne croyons pas que la vengeance pénale, dictée par la haine, honore qui quece soit, la société, la justice et même et surtout les victimes : le langage de la violence negrandit personne.

Nous ne croyons pas qu'on en fait trop pour ceux qui sont en prison : au contraire,nous n'en ferons jamais assez.

Nous croyons que le Père a ouvert ses bras à Yoanne avec la tendresse infinie deson pardon, et que celui-ci vit, enfin, libre, heureux, "envisagé" par le regard divin qui voit aufond des cœurs.

L'aumônerie de Lannemezan

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Emmuré vivant

Le temps qui passe,Le corps qui vieillit

L’esprit qui s’atrophie,Le « longue peine » s’ éteint doucement

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De quelle espérance les aumôneries peuvent-ellesdevenir signe ?

Nous pourrions nous demander ce quenous espérions en acceptant de deveniraumônier(e) dans une prison. Quelle étaitnotre espérance vis-à-vis des autres etvis-à-vis de nous-mêmes ? Que voulions-nous devenir ?

un signe de l’attention que le monde dudehors porte aux personnes détenuesquelles que soient leur origine et leurreligion ?

un signe de l’attention que l’église dudehors porte aux personnes détenuesquelles que soient leur origine et leurreligion ?

un porteur de la grâce des sacre-ments ?

un porteur de la force que peut apporterla prière ?

une aide pour celles et ceux quicherchent à donner sens à leur vie dedétenus ?

quelqu’un qui cherche à répondre àl’attente des personnes détenues ?

un témoin du message d’amour et depardon proposé par Jésus dans l’évan-gile ?

On peut continuer l’énumération. Toutesces phrases-là ont été dites par les unesou les autres. Notre présence dansl’aumônerie peut correspondre à un projet,à un concours de circonstances, à unecuriosité, à un désir d’apporter de l’aide àdes hommes et des femmesparticulièrement éprouvés ou rejetés. Ilserait sans doute utile que nouscherchions à retrouver ce qui nous aconduit en prison et pourquoi nous yrestons aujourd’hui, ce que nousespérons y apporter, et y trouver.

Nous avons tenté de dire au Congrès deLourdes que nous voudrions annoncer auxcaptifs qu’ils sont libres suivant en cela la

mission que Jésus se reconnaissait :"l’Esprit du Seigneur est sur moi. Il m’aenvoyé annoncer la bonne nouvelle auxpauvres, proclamer aux captifs qu’ils sontl ibres…" (Lc 4, 18 sq) Nous voudrionsdevenir dans les lieux de détention etd’enfermement des témoins de l’amourlibérateur de Jésus, un amour capable deconduire jusqu’au pardon : nous espéronsaider les personnes détenues à demanderet à obtenir le pardon, leur permettre de separdonner le mal fait à elles-mêmes, àleurs proches, à leurs victimes et mêmeles aider à pardonner le mal qui leur estfait en prison.

Qu’est-ce qui peut permettre d’accéder àcette liberté ? La seconde lettre de Pierre,parlant des mauvais prédicateurs, écrit :"Ils promettent la liberté, mais ils sont eux-mêmes esclaves" (2 P 2, 19). Jésus,s’adressant à ceux qui veulentcharitablement aider leur frère, dit :"Hypocrite, ôte d’abord la poutre de tonœil, et alors tu verras clair pour ôter lapaille de l’œil de ton frère" (Mt 7, 1-5).Cette liberté que nous voudrions apporteraux personnes détenues, il convient quenous parvenions à la recevoir nous aussi,non pas à la conquérir mais à la recevoirde celui qui est capable de libérer nosfrères et de nous libérer nous aussi :"C’est pour que nous soyons vraimentlibres que le Christ nous a libérés" (Gal 4,31 - 5, 1). Quand nous parlons de libérerles captifs, il ne s’agit pas seulement desautres captifs mais aussi de nous : pourêtre libérateurs, il faut d’abord être libérés.

L’A.P. n’apparaît pas, à première vue,comme une entreprise de libération maisl’église non plus et l’aumônerie ne peutpas facilement prétendre devenir cetespace où des détenus pourront retrouverdes chemins de liberté. Nous sommesnous-mêmes enveloppés dans les

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préjugés de notre région, de notre religion,de notre classe sociale, de notre culture etde notre propre histoire personnelle… Il ya encore assez de poutres dans nos yeuxpour nous empêcher de voir les pailles quisont dans les yeux de nos frères détenus.La recherche et l’identification de cespoutres supposent deux démarches : l’unequi nous sera personnelle, intime, etl’autre qui sera plus communautaire.

Après une rencontre avec quelqu’un, quece soit un détenu, un surveillant ou quelqu’autre intervenant, il est légitime denous poser des questions : "Pourquoi m’a-t-il (ou elle) posé telle question ou affirmételle chose ? Qu’est-ce qu’il avait derrièrela tête ?". Mais il est non moins nécessairede nous poser aussi l’autre question :"Pourquoi ai-je ainsi accueilli cettepersonne et pourquoi lui ai-je ainsirépondu ? Qu’ai-je entendu de sondiscours et de ses appels ? Qu’est-ce qui,en moi, fait que je réagis ainsi ? Qu’ai-je,moi aussi, derrière la tête ou derrière lecœur ?". Ces questions sont la suite decelles que nous posions tout à l’heure :"Que suis-je venu chercher en prison ?Qu’ai-je envie d’entendre ou qu’est-ce queje refuse d’entendre ?". N’oublions pas lesremarques de Jésus : "Ils ont des oreilleset ils n’entendent pas !" (Mc 4, 12).

Vous entendez des gens dire, enapprenant que vous intervenez dans lesprisons : "Je ne serais pas capable de metrouver en face de quelqu’un dont jesaurais qu’il a tué ou violé. Je nesupporterais pas !". Puisque nous y allons,c’est que nous avons été capables, d’unemanière ou de l’autre, de supporter,capables de nous rendre compte que nousétions frères ou sœurs de ces personnes,quoi qu’elles aient fait. Il n’est pas inutilede reprendre conscience que nous avonsaccompli une démarche que d’autresn’arrivent pas, pour le moment, àparcourir. Mais il nous reste sans douteencore un grand pas à franchir pourpouvoir relire paisiblement la parabole dupharisien et du publicain : "Seigneur, je terends grâce de ce que je ne suis pas…comme ce publicain…". Remarquons lasincérité du pharisien. Ce que Jésus luireproche c’est sans doute d’abord son

inconscience : il ne se rend pas compte.Jésus, dans les évangiles, épingle souventles inconsciences. Relisez la parabole deLazare et du riche. C’est la même chose :le riche ne se rend pas compte et, dans saprière à Abraham, il dit bien que ses frèreseux non plus ne se rendent pas compte.

Comme nous le disions tout à l’heure, ils’agit là d’un travail personnel, d’une prisede conscience que nous cherchons àatteindre. D’autres peuvent nous y aidermais c’est tout de même un chemin intime,au plus profond de nous-mêmes. L’autredémarche va, au contraire, être davantagedirigée vers les structures et lesinstitutions dans lesquelles nous vivons ettentons d’agir mais qui, d’une manièreplus ou moins claire, ont aussi unretentissement sur nous et, parfois à notreinsu, modèlent notre comportement et nospensées.

Je voudrais ici insister sur cette partinconsciente de notre vie, de notre action,de nos paroles. La session sur l’écouteavait ce grand avantage d’être animée parune psychanalyste qui pouvait nous aiderà percevoir une part inconnue de nous-mêmes. Nous n’écoutons pas seulementavec notre conscience mais aussi avecnotre inconscient et c’est aussi avec l’un etl’autre que nous élaborons nos réponsesou nos propositions d’action. L’autre nousparle avec sa conscience mais égalementavec cette épaisseur insoupçonnable deson inconscient. Il y a sans doute desmoments où nous ne pouvons plus savoirqui parle à qui, ni qui écoute qui. De cela iln’est pas souvent question dans la vieordinaire ni sans doute dans noséchanges entre aumônier(e)s. Nous avonspeu de lieux où trouver les moyens denous mettre au clair là dessus. Il faudraiten chercher car c’est dans la mesure oùnous serons assez libres vis-à-vis de nospulsions que nous pourrons annoncer auxcaptifs qu’ils peuvent se libérer des leurs ;c’est dans la mesure où nousparviendrons à ce que les mystiquesnomment les purifications nécessaires denotre charité que nous éviterons ce quePatrick Declerck dans “Les Naufragés”nomme une charité hystérique. Pour êtreauthentique, l ’amour suppose un

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désintéressement, une distance, uneliberté profonde qui n’est pas si facile àaccueillir. Pouvoir nous dire que nousallons dans les lieux de détention pourdevenir les témoins du message d’amouret de pardon de Jésus dans l’évangilesuppose un profond travail humain etspirituel. Peut-être, tout à l’heure, dansnos échanges, pourrions-nous essayer departager ce que nous en devinons dansles démarches des autres et dans lesnôtres.

Il ne s’agit pas seulement de nousreconnaître membres de ce que Bernanosnommait “la communion des pécheurs”par opposition à la communion des saints.Il s’agit d’entreprendre une interrogationsur notre pratique collective etparticulièrement sur cette part de notrepratique collective dont nous n’avons pasune conscience claire. La première fois oùje suis entré en maison d’arrêt, j’ai étéfrappé de voir une frontière entre lesdétenus et leurs visiteurs d’un côté et, del’autre, les fonctionnaires de l’A.P.Certaines familles semblaient avoirconscience d’être du mauvais côté de labarrière. Annoncer aux captifs qu’ils sontlibres, c’est travailler sur cette barrière :est-il possible de la déplacer, de ladétruire, de modifier son expression ?Nous retrouvons ici la mission que Jésus areçue du Père et qu’il nous a transmisepour que, dans l’Esprit, nous puissions lapoursuivre : le Christ a démoli le mur quiséparait les juifs des païens, la haine (Ep2, 14). Mais il y a aujourd’hui tant demurailles invisibles et pourtant agissan-tes ! Tant de murailles à découvrir avantde nous y attaquer !

Une institution pénitentiaire, ecclésiale ouautre peut, par sa simple existence, êtresource de libération ou d’esclavage pourles gens qu’elle atteint. Travailler dans unlieu d’enfermement présente des risquesdont nous avons avantage à devenirconscients. Relisez saint Paul et vousverrez combien il a une vive consciencedu handicap que représente le judaïsmede son temps. Il dit, après Jésus, que leshommes ont changé le message initial deDieu à son peuple. Il est notable que, dansl’évangile de Marc, Jésus n’attaque pas

d’abord la doctrine des pharisiens. Il s’enprend à leurs manières de table. Vousretrouvez cela au chapitre 2, 15 sq lors durécit de l’appel de Lévi et du repas qui suitoù Jésus partage la table des publicains etdes pécheurs. Il mange avec eux sansfaire de déclaration. à la suite, Marc aajouté l’explication : le tissu neuf sur levieux vêtement, les vieilles outres et le vinnouveau. Plus loin, au chapitre 7, 1 sq,vous retrouvez la querelle entre Jésus etles pharisiens toujours à propos desmanières de table : les lavages de coupes,de cruches et de plats. Les pratiquesinduites par nos institutions peuvent nousenfermer et nous conduire à enfermer lesautres plus que nos discours. En relisantle Coran, on trouve aussi souvent cetteaffirmation : Dieu a envoyé des prophètesmais personne ne les a écoutés. Il y avaitdans leur message tout ce qui étaitnécessaire pour permettre aux hommesde trouver le salut mais les générationssuccessives ont laissé se perdre lemessage. C’est aussi le sens de laparabole des vignerons homicides : Dieuenvoie des messagers qui, au lieu d’êtreécoutés sont maltraités ou mis à mort.

Il se trouve que l’institution pénitentiaire afait l’objet d’un nombre restreint d’études.Les études existantes jusqu’à cesdernières années portaient presqueuniquement sur les détenus mais peu surl’institution elle-même, sur les personnelsde l’A.P., sur les intervenants extérieurs.C’est sans doute ce qui explique le succèsdu livre de la docteur Vasseur. Remarquezque jusqu’à maintenant, sauf erreur ouomission, personne ne s’est intéressé auxrôles des aumôniers. Vous avez un étatdes recherches publiées sur ces questiondans le livre apparemment bref dePhilippe Combessie : Sociologie de laprison, (ed de la Découverte). L’une desremarques de ce livre est de souligner, àplusieurs reprises, combien les études quiportent sur les prisons sont difficiles tantles données sont divergentes etaléatoires. On n’arrive pas, par exemple, àse mettre d’accord sur la notion derécidive : certains vont classer commerécidivistes tous ceux qui font l’objet d’unenouvelle condamnation ; d’autres fontremarquer que le criminel libéré qui, il y a

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encore quelques années, pouvait êtrecondamné pour avoir émis un chèquesans provision, ne pouvait pas êtreconsidéré comme récidiviste. Unerecherche sérieuse sur la structure et lefonct ionnement de nos groupesd’aumônerie nous permettrait sans douted’entrevoir que notre action commencebien avant que nous bougions : la simpleexistence de ce lieu où, par nous, Dieudonne rendez-vous à ceux qui l’acceptentest significative. La relative indifférence dureste de nos communautés paroissialesou diocésaines vis-à-vis des prisonniersl’est aussi. Jadis, la prière pour lesprisonniers faisait toujours partie de ce quiremplaçait la prière universelle : au prônenous étions invités, tous les dimanches, àprier pour “les prisonniers, les voyageurs,les femmes enceintes, les malades et lesagonisants”. Et maintenant ? La seconderecherche que nous pourr ionsentreprendre serait de nous demander cequ’il y a d’évangélique ou de non-évangélique dans nos pratiques en prison.

De tout cela nous pourrions tirer quelquesconclusions :

D’abord, nous ne sommes plusseulement, ni même surtout, des ministresdu culte au sens où l’Eglise et laRépublique l’entendaient dans la loi deséparation des églises et de l’état : nousne sommes plus là seulement pouradministrer les sacrements et célébrer lamesse. Au passage, il faut bienreconnaître que ce changement concernesurtout les aumôniers catholiques car lesautres aumôniers ont toujours donné uneplace plus importante à l’annonce de laparole - ce que l’écriture nomme leKérygme - et à la prière. Nous manquonsde prêtres pour célébrer mais aussi nousprenons conscience d’une nécessairedémarche catéchuménale qui acheminevers Dieu au lieu de commencer parcélébrer une rencontre encore enespérance. Nous sommes peut-être entrain de nous libérer d’une part tropcultuelle de notre présence en prison.Mais nous sommes sans doute, par là,renvoyés à un rôle plus humain où lesdistinctions confessionnelles ont moins de

place : la présence de nos collèguesprotestants ou musulmans ne l’annonce-t-elle pas ? Alors, revenant à notre questioninitiale, n’allons-nous pas devoir lanuancer ? Certains vont pouvoir dire eneffet que c’est le message chrétien oumusulman qu’ils viennent apporter.D’autres, même envoyés par une égliseou une confession religieuse, ne vont-ilspas dire : "Je viens, comme un frère,essayer, par un modeste partage, de nousaider toi détenu et moi aumônier, à nousreconnaître frères en marche sur unemême route" ?

Nous ne pouvons pas prêcher l’amouret le pardon sans lutter pour que lesconditions nécessaires à leur venue soienten voie de réalisation. Si la vie endétention change des hommes et desfemmes en fauves, le message d’amour etde pardon est impossible. Nosprédécesseurs - et nous-mêmes aussipeut-être - avons condamné la lutte desclasses comme contraire à la charité sanstoujours voir que des hommes et desfemmes subissaient des conditions de viecontraires à la justice. Nous ne sommes nileaders politiques ni responsablessyndicaux. Si nous souhaitons mener uneaction de ce genre-là, il nous faudra sansdoute envisager de quitter l’aumônerie.Mais si nous ne disons rien, si nous nefaisons rien pour aider à une prise deconscience de l’injustice et de l’inhumanitéde certaines dispositions carcéraleslégales, nous nous privons du droit dedélivrer le message essentiel d’amour etde pardon.

La question de notre spécificité est entrain de bouger : d’abord, la penséeunique ne peut plus exister dans nosaumôneries. Il y a parmi nous ceux quipréconisent des méthodes éprouvéesdans les siècles passés et ceux quivoudraient bien trouver des cheminsnouveaux. Mais l’expérience ne nousenseigne-t-elle pas à tous qu’il y a aussi,dans notre clientèle des aspirationsdifférentes, voire inattendues. Nous nesommes pas tenus d’approuver mais nousdevons tenir compte de l’existence dedivers courants. Personnellement je ne mesens pas proche du bon Larron. J’ai sans

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doute plus de sympathie pour le mauvaismais je trouverais désastreux que l’onassassine trop tôt le bon.

La question de notre spécificité estencore battue en brèche par la fonte ducorps des prêtres catholiques. Je neremets pas en cause ici la doctrineperpétuellement réaffirmée par lespontifes romains de la différence entre lesprêtres et les laïcs et de la potestas sacrasouvent redite par l’actuel évêque deRome. Je dis seulement que, pour lemoment, les prêtres disparaissent et quedans trois ans il va y avoir une chuteverticale du nombre des prêtres enactivité. Nous nous y préparons et lenombre des messes célébrées dans lesprisons françaises est sans commune

mesure avec celui d’il y a vingt ans. Celaveut dire que la visibilité d’une présencechrétienne est en train de changer deforme et qu’il nous incombe d’y êtreattentifs. Nous avons la redoutable chargede construire sinon un monde nouveau aumoins une aumônerie nouvelle et uneéglise nouvelle. Il est devenu banal de direque les diacres et les laïcs y tiendront uneplace prépondérante mais on peut aussise demander de quelle manière nouspourrions aider des personnes détenues àdevenir pour leurs compagnons dedétention, un secours contre ladéshumanisation ? un appui pour resterdebout ? une force pour garder oudécouvrir une forme de spiritualité ?

Maurice Gruau

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VOUS

Vous tous qui tenez bonDans les vents et les ténèbres,

Laissez-vous saisir de pitié,Donnez

A ceux qui toujours titubentDans l’indécision et le découragement.

Vous tous qui croyez au Christ,Donnez vous mêmes sans compter,

Rompez et multipliezVotre amour et votre présence,

Votre nourriture et votre consolationA ceux qui attendent,

Affamés à vie !

Vous tous qui aimezEt qui puisez aux sources

De la tendresse quotidienne,Donnez

A ceux qui traversent les désertsDe l’abandon et de la solitude.

Vous tous qui mangez chaque jour à satiété,Ne renvoyez personne,

DonnezA ceux qui crient de faim

A votre porte et à votre cœur.

Charles SINGER

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Qu’est-ce que le fondamentalisme ?

Le mot "fondamentalisme" estrécent dans le dictionnaire. C’est presqueun mot technique. Il est né aux Etats-Unisvers 1920 et désignait alors un groupe deProtestants conservateurs. Dans ledomaine religieux actuel, il sembledésigner des courants conservateursattachés à une manière de lire les textesfondamentaux au premier degré, "à lalettre".

Jésus s’est affronté auxfondamental istes de son temps quilisaient ainsi la Loi et les prophètes. Unjour de sabbat, il traverse les champs etses disciples, chemin faisant, arrachentdes épis. Les pharisiens disaient :"Regarde ce qu’ils font un jour de sabbat.Ce n’est pas permis". Jésus leur rappelleque, David et ses compagnons ayant faim,avaient mangé les pains offerts à Dieuréservés aux prêtres. Il ajoute ensuite "Lesabbat a été fait pour l’homme et nonl’homme pour le sabbat" (Mc 2, 23-28).Une autre fois, après avoir guéri unmalade pendant le sabbat, Jésus dit :"Lequel d’entre vous, si son fils ou sonbœuf tombe dans un puits, ne l’en retireraaussitôt, même un jour de sabbat ?" (Lc14, 1-6). L’Apôtre Paul va dans le mêmesens : "Nous avons été affranchis de laLoi, de sorte que nous servons sous lerégime nouveau de l’Esprit et non plussous le régime périmé de la lettre" (Rm 7,6) et "La lettre tue, l’Esprit donne la vie" (2Co 3, 6).

Le terme de “fondamentaliste”n’est réservé à aucune religion. Onparle de fondamentalistes juifs, chrétiens,musulmans et autres. Un des traitscommuns à tous ces croyants est leurmanière de lire les textes fondateurs deleur religion ou, plus souvent, leur choixd’un groupe et/ou d’un clergé qui pratiqueune manière littérale de lire les textesreligieux. On m’a cité le cas d’un juiforthodoxe, c’est à dire très pratiquant etfondamentaliste. Il lit les prescriptions del’Ancien Testament sur le Sabbattellement à la lettre qu’il lui est impossible

d’appuyer sur un bouton pour sonner àune porte ou pour allumer. On sait aussicomment les témoins de Jéhovah lisentles textes qui interdisent de verser le sang.Un de mes vieux paroissiens m’a rapportéles recommandations de sa mère quandils allaient le dimanche à la messe partemps de pluie. Elle lui recommandait debien fermer la bouche de crainte d’avalerune goutte de pluie qui l’aurait empêchéd’être à jeun et donc de communier ! Il aquand même fallu un document de Pie XIIpour dire que l’eau pure ne rompait pas lejeûne ! Pendant la deuxième guerremondiale une lettre de la Commissionbiblique pontificale adressée au cardinalSuhard rappelle que seule la lettre del’écriture est inspirée. Autrement dit,l’attitude fondamentaliste n’était pascomplètement absente dans lecatholicisme officiel au XX° siècle.

Quelles sont les choses fonda-mentales dans la religion ?

Les conflits naissent, dans toutesles religions, entre les diverses tendances,quand il s’agit de déterminer ce qui estfondamental et ce qui ne l’est pas. Dansun passé récent, des catholiques se sontopposés sur des questions de langue :fallait-il continuer de prier en latin ou était-il possible d’employer des langues dites“vulgaires”, c’est-à-dire “communes”,utilisée par le commun des mortels ?Après des moments de tension, le papeJean-Paul II a jugé, en 1984, qu’il étaitpossible de célébrer dans les languesusuelles et en latin remettant ainsi cettequestion à sa juste place, qui estsecondaire. L’église chrétienne avait déjàconnu ce type de conflit aux troisième etquatrième siècles quand à partir du papeCorneille on a commencé à remplacer legrec, qui était la langue de l’égliseprimitive, par le latin devenu pluspopulaire. Ces conflits linguistiquesmontrent que l’opposition entre lesfondamentalistes et les autres porte sur la

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définition de ce qui est fondamental et dece qui ne l’est pas. Pie XII avait jugé quela conservat ion du lat in étai tfondamentale. Jean XXIII, dans un derniersursaut avait légiféré dans le même sensen publiant la constitution “Ve te rumSapientia”. Ensuite, le concile a jugé quele latin n’était pas un élément fondamentalet intangible. Il a permis qu’une évolutionse fasse selon les besoins des chrétiens. Ilest sans doute dommage que Paul VI,dans un souci d’unité, ait tenté d’obligertous les catholiques à s’aligner sur lemême modèle, comme si la langueliturgique était un élément fondamental dela vie chrétienne. Mais il est certain queles réformes initiées par Vatican II ontmontré que bien des pratiques quiparaissaient fondamentales étaient en faitdépendantes des diverses cultures, desdiverses époques et qu’il y avait danger àsacraliser des pratiques qui n’étaient pasnécessairement liées à la foi chrétienne.Les fondamentalistes ont alors regrettéque des choses jadis tenues pourfondamentales ne le soient plus. Là, sansdoute, se trouve la différence.

Un problème de traduction

Des Témoins de Jéhovah m’ontproposé de lire un passage d’évangileavec eux. Ils ont ouvert leur Bible et ontcommencé la lecture. Ils avaient bienchoisi leur passage mais la traductionqu’ils utilisaient me paraissait un peutendancieuse. Je leur ai donc demandé deme laisser le temps d’aller chercher mapropre Bible et je suis revenu avec leNouveau Testament grec. Leur surprisevenait semble-t-il de ce qu’ils nes’attendaient pas à voir remis en questionle texte “officiel” qu’ils utilisaient d’ordinaireet de se voir opposer non pas une autretraduction mais le texte originel. Ilsn’avaient pas pensé que les évangilesn’ont pas été écrit en français. Pour eux, laréférence était la Bible utilisée par leurgroupe. Un autre jour, des catholiquestraditionalistes ont exprimé une semblablesurprise car, pour eux, il était évident quele texte officiel des évangiles était en latin.Ils ont paru quelque peu déstabilisés enapprenant que le texte latin de la Bible que

nous utilisons est une traduction réaliséepar saint Jérôme entre 390 et 405. Mais,même quand on lit les évangiles dans lalangue grecque où trois d’entre eux (Marc,Luc, Jean) au moins ont été écrit, nousn’atteignons pas les paroles même deJésus car il ne parlait pas grec maisaraméen ou hébreu. Une vieille traditionaffirme que Matthieu fut le premier àrecueillir les paroles des Jésus mais cepremier évangile en hébreu ou enaraméen ne nous est pas parvenu. Nousn’en possédons que la traduction grecqueconsidérablement modifiée. La presquetotalité de l’Ancien Testament fut écrit enhébreu et, comme je ne connais pasl’hébreu, il me faut recourir à l’une destraductions. La plus ancienne, sans doute,est celle, en grec, que l’on nomme laSeptante qui fut entreprise en Egypte àpartir du III° siècle avant Jésus-Christ.

Tout cela pour dire qu’il y a unedistance entre les textes originaux del’Ancien comme du Nouveau Testament etce que nous en lisons aujourd’hui dansnos Bibles. “Nos Bibles” car il faut bienmettre cela au pluriel puisqu’il y a le choix,en français, entre diverses traductions : laBible de Jérusalem, la T.O.B. (traductionœcuménique de la Bible), la Bible deChouraqui, la Bible en Français courant, laBible de Segond, la Bible de la Liturgiecatholique, la Bible de Crampon, la Biblede la Pléiade, la Bible de la Colombe etc…Cela veut dire que devant le texte sacré,chaque personne peut essayer decomprendre mais qu’il y a plusieursmanières de comprendre. George Steinerécrit : "Comprendre c’est traduire". Lestraducteurs conscients savent que traduirec’est à la fois “dire la même choseautrement” et “partir du message originelpour dire quelque chose qui l’évoque fautede pouvoir le dire exactement”. Le mythede la Tour de Babel nous rappelle qu’il y acomme un mur entre les langues. Onn’arrive pas à franchir ce mur mais, entraduisant, on parvient à se faire dessignaux par dessus le mur pour se fairecomprendre de ceux qui sont de l’autrecôté. Malgré tout, ils restent de l’autrecôté. Ils restent étrangers. Il ne manquepas de bonnes âmes pour tenter d’effacerles signes qui font de l’autre un étranger.

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Sous prétexte d’antiracisme ou de charitéchrétienne, on tente une assimilation(assimiler veut dire rendre similaire) qui nerespecte pas la différence de l’autre.Certaines formes de piété tentent aussid’en faire autant vis à vis de Dieu quipourtant demeure le tout Autre. "Quandles temps furent accomplis, il a envoyéson Fils, né d’une femme…" (Ga 4, 4). "LeVerbe s’est fait chair et il a planté sa tenteau milieu de nous" (Jn 1, 14). Dieu venuchez nous est devenu ce qu’on nomme“un particulier” : c’était un homme, un juif,habitant une obscure contrée, parlant undialecte peu répandu etc… Bien des gensqui l’ont rencontré n’ont rien compris à cequ’il disait car ils ne parlaient pas salangue. L’un des premiers soucis despremiers prédicateurs de l’évangile fut del’annoncer dans la langue la plusrépandue à l’époque : le grec. La parolede Dieu n’est pas directement accessible.Elle s’est exprimée d’abord dans desdialectes ou une langue qui ne nous sontpas facilement compréhensibles. Il fauttraduire et se souvenir que le texte dontnous disposons n’est qu’une traduction.

Ces textes n’ont pas été écrits pournous mais pour des destinataires précistrès différents de nous, vivant sousd’autres cieux et à des époques bienéloignées des nôtres. Pour entendre ceque Dieu peut encore nous dire au traversde ces textes, il faut d’abord les remettredans leur contexte, essayer de rejoindre,autant que faire se peut, le sens qu’ilspouvaient avoir lorsqu’ i ls furentprononcés. C’est d ’a i l leurs larecommandation de Pie XII dans “Divinoafflanre Spiritu”. Prenons un exempleconnu et qui n’est pas sans rapport avecnotre ministère près de ceux que laJustice condamne : la loi du Talion. Cetteloi est énoncée dans un curieux passagedu livre de l’Exode (21, 12-36) où sontrassemblées des lois pénales en vigueuren Israël sans doute à des périodesdifférentes. On lit "Qui frappe son père ousa mère devra être mis à mort …quiinsulte son père ou sa mère sera mis àmort" (Ex 21, 15 & 17) et "Qui frappe unhomme doit mourir" (Lv 24, 21). Mais untexte archaïque de la Genèse disait "J’aitué un homme pour une blessure, un

enfant pour une meurtrissure. C’est ainsique Caïn est vengé sept fois mais Lameksoixante-dix sept fois" (Gn 4, 23-24). Parrapport à la dureté de ces lois, la loi dutalion représente donc un progrèspuisqu’elle limite la punition à la dimensionde la faute : "Tu donneras vie pour vie, œilpour œil, dent pour dent, main pour main,pied pour pied, brûlure pour brûlure,meurtrissure pour meurtrissure, plaie pourplaie" (Ex 21, 23-25 ; Lv 24, 19-20 ; Dt 19,21). Mais on mesure alors la portée de laparole de Jésus rapportée par Matthieu :"Vous avez appris qu’il a été dit : ‘œil pourœil et dent pour dent’. Eh bien ! moi jevous dis de ne pas tenir tête au méchant ;au contraire si quelqu’un te gifle sur lajoue droite, tends-lui aussi l’autre" (Mt 5,38-39). Lorsque Pierre demande à Jésuscombien de fois il devra pardonner à sonfrère, la réponse de Jésus est visiblementinspirée par la parole vengeresse deLamek dans la Genèse : "Lamek seravengé soixante-dix fois sept fois" puisqueJésus dit: "Je ne te dis pas jusqu’à septfois mais jusqu’à soixante-dix fois septfois" (Mt 18, 22).

Oser inventer

Dans ce cas, Jésus nous montrecomment lire les écritures. La parole deDieu invite l’homme à poursuivre sonchemin, son progrès. S’en tenir à la lettred’une première parole, c’est refuser leprogrès auquel Dieu lui-même nous invite.Nous avons un autre exemple de cetteinvitation au progrès dans la conversationde Jésus avec la Samaritaine : "La femmelui dit : ‘Seigneur, je vois que tu es unprophète. Nos pères ont adoré sur cettemontagne et vous vous dites que c’est àJérusalem qu’on doit adorer’. Jésus lui dit :‘Crois-moi, femme, l’heure vient où cen’est ni sur cette montagne ni à Jérusalemque vous adorerez le Père. L’heure vient,et nous y sommes, où les vrais adorateursadoreront le Père en esprit et en vérité’ "(Jn 4, 19-24).

Depuis deux mille ans, deschrétiens ont pris le risque de suivre lecheminement progressif indiqué par Jé-sus : "Celui qui croit en moi fera lesœuvres que je fais. Il en fera même de

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plus grandes" (Jn 14, 12). Mais c’estprendre un risque, le risque de traduire,d’interpréter, d’adapter aux circonstancesprésentes les paroles anciennes. C’estsans doute là que se trouve le problèmedes fondamentalistes. Ce sont des genssérieux, souvent des croyants trèscroyants, des pratiquants très pratiquants.Ils ont peur de ne pas être assez fidèlesou peur que le prêtre et l’église setrompent. Ils craignent que, la traditionancienne n’étant pas respectée, on metteen péril le salut du monde en cherchant àadapter un message qu’ils jugent nejamais devoir changer. Parmi lescatholiques fondamentalistes, certains sedemandent si “la nouvelle messe” estvalide et si le Christ s’y rend vraimentprésent. D’autres ont peur de ne pas êtrevraiment pardonnés si l’absolution ne leurest pas donnée selon la formule ancienneet en latin. La peur ne se commandeguère et ne se guérit pas facilement.Admonester quelqu’un parce qu’il a peur

aggrave la situation. Le meilleur remèdeserait un climat fraternel mais nous nepouvons, nous-mêmes devenir fraternelsque si nous n’avons pas peur desquestions de nos frères fondamentalistes.

Notre expérience dans les prisonsnous montre que parfois il est bien difficiled’aider une personne détenue à quitter sapeur, à reprendre confiance. On comprendle pape qui redit la parole de Jésus à sesdisciples, après la résurrection : "N’ayezpas peur !" (Lc 24, 36). Il ne peut pass’agir, pour nous, de lutter contre lesfondamentalistes. Ce serait inutile et ceserait tomber dans le même piège : nouscroire assurés de posséder les chosesfondamentales. Dieu est mystère. Noussommes en marche vers lui sans tenird’autre certitude que celle de son amour,un amour mystérieux qui dépasse tout ceque nous pouvons concevoir.

Maurice Gruau

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Ensemble de règles minimapour le traitement des détenus

Observations préliminaires1. Les règles suivantes n'ont pas pourobjet de décrire en détail un systèmepénitentiaire modèle. Elles ne visent qu'àétablir, en s'inspirant des conceptionsgénéralement admises de nos jours et deséléments essentiels des systèmescontemporains les plus adéquats, lesprincipes et les règles d'une bonneorganisation pénitentiaire et de la pratiquedu traitement des détenus.2. Il est évident que toutes les règles nepeuvent pas être appliquées en tout lieu eten tout temps, étant donné la grandevariété de conditions juridiques, sociales,économiques et géographiques que l'onrencontre dans le monde . Elles devraientcependant servir à stimuler l'effortconstant visant à surmonter les difficultéspratiques qui s'opposent à leur application,en ayant à l'esprit le fait qu'ellesreprésentent, dans leur ensemble, lesconditions minima qui sont admises parles Nations Unies.3. D'autre part, ces règles se rapportent àdes domaines dans lesquels la pensée esten évolution constante. Elles ne tendentpas à exclure la possibilité d'expérienceset de pratiques, pourvu que celles-cisoient en accord avec les principes et lesobjectifs qui se dégagent du texte del'Ensemble des règles. Dans cet esprit,l'administration pénitentiaire centrale seratoujours fondée à autoriser des exceptionsaux règles.4. 1) La première partie de l'Ensemble derègles traite des règles concernantl'administration générale des établisse-ments pénitentiaires et est applicable àtoutes les catégories de détenus, criminelsou civils, prévenus ou condamnés, ycompris les détenus faisant l'objet d'une

mesure de sûreté ou d'une mesure ré-éducative ordonnée par le juge.2) La deuxième partie contient des règlesqui ne sont applicables qu'aux catégoriesde détenus visés par chaque section.Toutefois, les règles de la section A,applicables aux détenus condamnésseront également applicables auxcatégories de détenus visés dans lessections B, C et D, pourvu qu'elles nesoient pas contradictoires avec les règlesqui les régissent et à condition qu'ellessoient profitables à ces détenus.5. 1) Ces règles n'on pas pour dessein dedéterminer l'organisation des établis-sements pour jeunes délinquants(établissements Borstal, instituts derééducation, etc.). Cependant, d'une façongénérale, la première partie de l'Ensemblede règles peut être considérée commeapplicable également à ces établis-sements.2) La catégorie des jeunes détenus doitcomprendre en tout cas les mineurs quirelèvent des juridictions pour enfants. Enrègle générale, ces jeunes délinquants nedevraient pas être condamnés à despeines de prison.

PREMIERE PARTIE

Règles d'application générale

Principe fondamental6. 1) Les règles qui suivent doivent êtreappliquées impartialement. Il ne doit pasêtre fait de différence de traitement baséesur un préjugé, notamment de race, decouleur, de sexe, de langue, de religion,d'opinion politique ou de toute autreopinion, d'origine nationale ou sociale, defortune, de naissance ou de toute autresituation.

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2) Par contre, il importe de respecter lescroyances religieuses et les préceptesmoraux du groupe auquel le détenuappartient.

Registre7. 1) Dans tout endroit où des personnessont détenues, il faut tenir à jour unregistre relié et coté indiquant pour chaquedétenu :a) Son identité ;b) Les motifs de sa détention etl'autorité compétente qui l'a décidée ;c) Le jour et l'heure de l'admission etde la sortie.2) Aucune personne ne peut être admisedans un établissement sans un titre dedétention valable, dont les détails aurontété consignés auparavant dans le registre.

Séparation des catégories8. Les différentes catégories de détenusdoivent être placées dans des établis-sements ou quartiers d'établissementsdistincts, en tenant compte de leur sexe,de leur âge, de leurs antécédents, desmotifs de leur détention, et des exigencesde leur traitement. C'est ainsi que :a) Les hommes et les femmes doiventêtre détenus, dans la mesure du possible,dans des établissements différents ; dansun établissement recevant à la fois deshommes et des femmes, l'ensemble deslocaux destinés aux femmes doit êtreentièrement séparé.b) Les détenus en prévention doiventêtre séparés des condamnés.c) Les personnes emprisonnées pourdettes ou condamnées à une autre formed'emprisonnement civil doivent êtreséparées des détenus pour infractionpénale.d) Les jeunes détenus doivent êtreséparés des adultes.

Locaux de détention9. 1) Les cellules ou chambres destinées àl'isolement nocturne ne doivent êtreoccupées que par un seul détenu. Si pourdes raisons spéciales, telles qu'unencombrement temporaire, il devientnécessaire pour l'administration péniten-tiaire centrale de faire des exceptions àcette règle, on devra éviter de loger deux

détenus par cellule ou chambreindividuelle.2) Lorsqu'on recourt à des dortoirs, ceux-cidoivent être occupés par des détenussoigneusement sélectionnés et reconnusaptes à être logés dans ces conditions. Lanuit, ils seront soumis à une surveillancerégulière, adaptée au type d'établissementconsidéré.10. Les locaux de détention et, enparticulier, ceux qui sont destinés aulogement des détenus pendant la nuit,doivent répondre aux exigences del'hygiène, compte tenu du climat,notamment en ce qui concerne le cubaged'air, la surface minimum, l'éclairage, lechauffage et la ventilation.11. Dans tout local où les détenus doiventvivre ou travailler,a) Les fenêtres doivent êtresuffisamment grandes pour que le détenupuisse lire et travailler à la lumièrenaturelle ; l'agencement de ces fenêtresdoit permettre l'entrée d'air frais, et ceciqu'il y ait ou non une ventilation artificielle ;b) La lumière artificielle doit êtresuffisante pour permettre au détenu de lireou de travailler sans altérer sa vue.12. Les installations sanitaires doiventpermettre au détenu de satisfaire auxbesoins naturels au moment voulu, d'unemanière propre et décente.13. les installations de bain et de douchedoivent être suffisantes pour que chaquedétenu puisse être mis à même et tenu deles utiliser, à une température adaptée auclimat et aussi fréquemment que l'exigel'hygiène générale selon la saison et larégion géographique, mais au moins unefois par semaine sous un climat tempéré.14. Tous les locaux fréquentésrégulièrement par les détenus doivent êtremaintenus en parfait état d'entretien et depropreté.

Hygiène personnelle15. On doit exiger des détenus la propretépersonnelle ; à cet effet, ils doivent dispo-ser d'eau et des articles de toilettenécessaires à leur santé et à leurpropreté.16. Afin de permettre aux détenus de seprésenter de façon convenable et deconserver le respect d'eux-mêmes, desfacilités doivent être prévues pour le bon

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entretien de la chevelure et de la barbe ;les hommes doivent pouvoir se raserrégulièrement.

Vêtements et literie17. 1) Tout détenu qui n'est pas autorisé àporter ses vêtements personnels doitrecevoir un trousseau qui soit approprié auclimat et suffisant pour le maintenir enbonne santé. Ces vêtements ne doiventen aucune manière être dégradants ouhumiliants.2) Tous les vêtements doivent êtrepropres et maintenus en bon état. Lessous-vêtements doivent être changés etlavés aussi fréquemment qu'il estnécessaire pour le maintien de l'hygiène.3) Dans des circonstances excep-tionnelles, quand le détenu s'éloigne del'établissement à des fins autorisées, il doitlui être permis de porter ses vêtementspersonnels ou des vêtements n'attirantpas l'attention.18. Lorsque les détenus sont autorisés àporter leurs vêtements personnels, desdispositions doivent être prises au momentde l'admission à l'établissement pourassurer que ceux-ci soient propres etutilisables.19. Chaque détenu doit disposer, enconformité des usages locaux ounationaux, d'un lit individuel et d'une literieindividuelle suffisante, entretenue conve-nablement et renouvelée de façon à enassurer la propreté.

Alimentation20. 1) Tout détenu doit recevoir del'administration, aux heures usuelles, unealimentation de bonne qualité, bienpréparée et servie, ayant une valeurnutritive suffisant au maintien de sa santéet de ses forces.2) Chaque détenu doit avoir la possibilitéde se pourvoir d'eau potable lorsqu'il en abesoin.

Exercice physique21. 1) Chaque détenu qui n'est pasoccupé à un travail en plein air doit avoir,si le temps le permet, une heure au moinspar jour d'exercice physique en plein air.

2) Les jeunes détenus et les autresdétenus dont l'âge et la condition physiquele permettent, doivent recevoir, pendant lapériode réservée à l'exercice, une éduca-tion physique et récréative. A cet effet, leterrain, les installations et l'équipementdevraient être mis à leur disposition.

Services médicaux22. 1) Chaque établissement pénitentiairedoit disposer au moins des services d'unmédecin qualifié, qui devrait avoir desconnaissances en psychiatrie. Lesservices médicaux devraient êtreorganisés en relation étroite avecl'administration générale du service desanté de la communauté ou de la nation.Ils doivent comprendre un servicepsychiatrique pour le diagnostic et, s'il y alieu, le traitement des cas d'anomaliementale.2) Pour les malades qui ont besoin desoins spéciaux, il faut prévoir le transfertvers des établissements pénitentiairesspécialisés ou vers des hôpitaux civils.Lorsque le traitement hospitalier estorganisé dans l'établissement, celui-ci doitêtre pourvu d'un matériel, d'un outillage etdes produits pharmaceutiques permettantde donner les soins et le traitementconvenables aux détenus malades, et lepersonnel doit avoir une formationprofessionnelle suffisante.

3) Tout détenu doit pouvoir bénéficier dessoins d'un dentiste qualifié.23. 1) Dans les établissements pourfemmes, il doit y avoir les installationsspéciales nécessaires pour le traitementdes femmes enceintes, relevant decouches et convalescentes. Dans toute lamesure du possible des dispositionsdoivent être pr ises pour quel'accouchement ait lieu dans un hôpitalcivil. Si l'enfant est né en prison, il importeque l'acte de naissance n'en fasse pasmention.2) Lorsqu'il est permis aux mèresdétenues de conserver leurs nourrissons,des dispositions doivent être prises pourorganiser une crèche, dotée d'unpersonnel qualifié, où les nourrissonsseront placés durant les moments où ils

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ne sont pas laissés aux soins de leursmères.24. Le médecin doit examiner chaquedétenu aussitôt que possible après sonadmission et aussi souvent que cela estnécessaire ultérieurement, particulière-ment en vue de déceler l'existencepossible d'une maladie physique oumentale, et de prendre toutes les mesuresnécessaires ; d'assurer la séparation desdétenus suspects d'être atteints demaladies infectieuses ou contagieuses ;de relever les déficiences physiques oumentales qui pourraient être un obstacleau reclassement et de déterminer lacapacité physique de travail de chaquedétenu.25. 1) Le médecin est chargé de surveillerla santé physique et mentale des détenus.Il devrait voir chaque jour tous les détenusmalades, tous ceux qui se plaignent d'êtremalades, et tous ceux sur lesquels sonattention est particulièrement attirée.2) Le médecin doit présenter un rapport audirecteur chaque fois qu'il estime que lasanté physique ou mentale d'un détenu aété ou sera affectée par la prolongation oupar une modalité quelconque de ladétention.26. 1) Le médecin doit faire desinspections régulières et conseiller ledirecteur en ce qui concerne :a) La quantité, la qualité, lapréparation et la distribution des aliments ;b) L'hygiène et la propreté del'établissement et des détenus ;c) Les installations sanitaires, lechauffage, l'éclairage et la ventilation del'établissement ;d) La qualité et la propreté desvêtements et de la literie des détenus ;e) L 'observa t ion des règ lesconcernant l'éducation physique et sporti-ve lorsque celle-ci est organisée par unpersonnel non spécialisé ;2) Le directeur doit prendre enconsidération les rapports et conseils dumédecin visés aux règles 25, paragraphe2, et 26 et, en cas d'accord, prendreimmédiatement les mesures voulues pourque ses recommandations soient suivies ;en cas de désaccord ou si la matière n'estpas de sa compétence, il transmettraimmédiatement le rapport médical et ses

propres commentaires à l 'autoritésupérieure.

Discipline et punitions27. L'ordre et la discipline doivent êtremaintenus avec fermeté, mais sansapporter plus de restrictions qu'il n'estnécessaire pour le maintien de la sécuritéet d'une vie communautaire bienorganisée.28. 1) Aucun détenu ne pourra remplir,dans les services de l'établissement, unemploi comportant un pouvoir disciplinaire.2) Cette règle ne saurait toutefois faireobstacle au bon fonctionnement dessystèmes à base de self-government. Cessystèmes impliquent en effet que certainesactivités ou responsabilités d'ordre social,éducatif ou sportif soient confiées, souscontrôle, à des détenus groupés en vue deleur traitement.29. Les points suivants doivent toujoursêtre déterminés soit par la loi, soit par unrèglement de l'autorité administrativecompétente :a) La conduite qui constitue uneinfraction disciplinaire ;b) Le genre et la durée des sanctionsdisciplinaires qui peuvent être infligées ;c) L'autor i té compétente pourprononcer ces sanctions ;30. 1) Aucun détenu ne peut être puni queconformément aux dispositions d'une telleloi ou d'un tel règlement, et jamais deuxfois pour la même infraction.2) Aucun détenu ne peut être puni sansêtre informé de l'infraction qu'on luireproche et sans qu'il ait eu l'occasion deprésenter sa défense. L'autoritécompétente doit procéder à un examencomplet du cas.3) Dans la mesure où cela est nécessaireet réalisable, il faut permettre au détenude présenter sa défense par l'intermédiaired'un interprète.31. Les peines corporelles, la mise aucachot obscur ainsi que toute sanctioncruelle, inhumaine ou dégradante doiventêtre complètement défendues commesanctions disciplinaires.32. 1) Les peines de l'isolement et de laréduction de nourriture ne peuvent jamaisêtre infligées sans que le médecin n'aitexaminé le détenu et certifié par écrit quecelui-ci est capable de les supporter.

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2) Il en est de même pour toutes autresmesures punitives qui risqueraientd'altérer la santé physique ou mentale desdétenus. En tout cas, de telles mesures nedevront jamais être contraintes au principeposé par la règle 31, ni s'en écarter.3) Le médecin doit visiter tous les jours lesdétenus qui subissent de telles sanctionsdisciplinaires et doit faire rapport audirecteur s'il estime nécessaire de terminerou modifier la sanction pour des raisonsde santé physique ou mentale.

Moyens de contrainte33. Les instruments de contrainte tels quemenottes, chaînes, fers et camisoles deforce ne doivent jamais être appliqués entant que sanctions. Les chaînes et les fersne doivent pas non plus être utilisés entant que moyens de contrainte. Les autresinstruments de contrainte ne peuvent êtreutilisés que dans les cas suivants :a) Par mesure de précaution contreune évasion pendant un transfèrement,pourvu qu'ils soient enlevés dès que ledétenu comparaît devant une autoritéjudiciaire ou administrative ;b) Pour des raisons médicales surindication du médecin ;c) Sur ordre du directeur, si les autresmoyens de maîtriser un détenu ontéchoué, afin de l'empêcher de porterpréjudice à lui-même ou à autrui ou decauser des dégâts ; dans ce cas ledirecteur doit consulter d'urgence lemédecin et faire rapport à l'autoritéadministrative supérieure.34. Le modèle et le mode d'emploi desinstruments de contrainte doivent êtredéterminés par l'administration péniten-tiaire centrale. Leur application ne doit êtreprolongée au-delà du temps strictementnécessaire.

Information et droit de plainte desdétenus35. 1) Lors de son admission, chaquedétenu doit recevoir des informationsécrites au sujet du régime des détenus desa catégorie, des règles disciplinaires del'établissement, des moyens autoriséspour obtenir des renseignements etformuler des plaintes, et de tous autrespoints qui peuvent être nécessaires pourlui permettre de connaître ses droits et ses

obligations et de s'adapter à la vie del'établissement.2) Si le détenu est illettré, ces informationsdoivent lui être fournies oralement.36. 1) Tout détenu doit avoir chaque jourouvrable l'occasion de présenter desrequêtes et des plaintes au directeur del'établissement ou au fonctionnaireautorisé à le représenter.2) Des requêtes ou plaintes pourront êtreprésentées à l'inspecteur des prisons aucours d'une inspection. Le détenu pourras'entretenir avec l'inspecteur ou tout autrefonctionnaire chargé d'inspecter hors laprésence du directeur ou des autresmembres du personnel de l'établissement.3) Tout détenu doit être autorisé àadresser, sans censure quant au fondmais en due forme, une requête ou plainteà l'administration pénitentiaire centrale, àl'autorité judiciaire ou à d'autres autoritéscompétentes, par la voie prescrite.4) A moins qu'une requête ou plainte soitde toute évidence téméraire ou dénuée defondement, elle doit être examinée sansretard et une réponse donnée au détenuen temps utile.

Contact avec le monde extérieur37. les détenus doivent être autorisés,sous la surveillance nécessaire, àcommuniquer avec leur famille et ceux deleurs amis auxquels on peut faireconfiance, à intervalles réguliers tant parcorrespondance qu'en recevant desvisites.38. 1) Des facilités raisonnables pourcommuniquer avec leurs représentantsdiplomatiques et consulaires doivent êtreaccordées aux détenus ressortissants d'unpays étranger.2) En ce qui concerne les détenusressortissants des Etats qui n'ont pas dereprésentants d ip lomat iques ouconsulaires dans le pays ainsi que lesréfugiés et les apatrides, les mêmesfacilités doivent leur être accordées des'adresser au représentant diplomatiquede l'Etat qui est chargé de leurs intérêts ouà toute autorité nationale ou internationalequi a pour tâche de les protéger.39. Les détenus doivent être tenusrégulièrement au courant des événementsles plus importants, soit par la lecture dejournaux quotidiens, de périodiques ou de

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publications pénitentiaires spéciales, soitpar des émissions radiophoniques, desconférences ou tout autre moyenanalogue, autorisés ou contrôlés parl'administration.

Bibliothèque40. Chaque établissement doit avoir unebibliothèque à l'usage de toutes lescatégories de détenus et suffisammentpourvue de livres instructifs et récréatifs.Les détenus doivent être encouragés àl'utiliser le plus possible.Religion41. 1) Si l'établissement contient unnombre suffisant de détenus appartenantà la même religion, un représentantqualifié de cette religion doit être nomméou agréé. Lorsque le nombre de détenusle justifie et que les circonstances lepermettent, l'arrangement devrait êtreprévu à plein temps.2) Le représentant qualifié, nommé ouagréé selon le paragraphe 1, doit êtreautorisé à organiser périodiquement desservices religieux et à faire, chaque foisqu'il est indiqué, des visites pastorales enparticulier aux détenus de sa religion.3) Le droit d'entrer en contact avec unreprésentant qualifié d'une religion ne doitjamais être refusé à aucun détenu. Parcontre, si un détenu s'oppose à la visited'un représentant d'une religion, il fautpleinement respecter son attitude.42. Chaque détenu doit être autorisé, dansla mesure du possible, à satisfaire auxexigences de sa vie religieuse, enparticipant aux services organisés dansl'établissement et en ayant en sapossession les livres d'édification etd'instruction religieuse de sa confession.

Dépôt des objets appartenant auxdétenus43. 1) Lorsque le règlement n'autorise pasle détenu à conserver en sa possessionl'argent, les objets de valeur, vêtements etautres effets qui leur appartiennent, ceux-ci doivent être placés en lieu sûr, lors deson admission à l'établissement. Uninventaire de ces objets doit être dressé etil doit être signé par le détenu. Desmesures doivent être prises pourconserver ces objets en bon état.

2) Ces objets et l'argent doivent lui êtrerendus à sa libération, à l'exception del'argent qu'il a été autorisé à dépenser,des objets qu'il a pu envoyer à l'extérieurou des vêtements qui ont dû être détruitspar raison d'hygiène. Le détenu doitdonner décharge des objets et de l'argentqui lui ont été restitués.3) Les valeurs ou objets envoyés del'extérieur au détenu sont soumis auxmêmes règles.4) Si le détenu est porteur demédicaments ou de stupéfiants aumoment de son admission, le médecindécidera de l'usage à en faire.

Notification de décès, maladie,transfèrement, etc.44. 1) En cas de décès ou de maladiegrave, d'accidents graves ou de placementdu détenu dans un établissement pourmalades mentaux, le directeur doit eninformer immédiatement le conjoint si ledétenu est marié, ou le parent le plusproche et en tout cas toute autre personneque le détenu a demandé d'informer.2) Un détenu doit être informéimmédiatement du décès ou de la maladiegrave d'un proche parent. En cas demaladie dangereuse d'une telle personne,lorsque les circonstances le permettent, ledétenu devrait être autorisé à se rendre àson chevet, soit sous escorte, soitlibrement.3) Tout détenu aura le droit d'informerimmédiatement sa famille de sa détentionou de son transfèrement à un autreétablissement.

Transfèrement des détenus45. 1) Lorsque les détenus sont amenés àl'établissement ou en sont extraits, ilsdoivent être exposés aussi peu quepossible à la vue du public, et desdispositions doivent être prises pour lesprotéger des insultes, de la curiosité dupublic et de toute espèce de publicité.2) Le transport des détenus dans demauvaises conditions d'aération ou delumière, ou par tout moyen leur imposantune souffrance physique, doit être interdit.3) Le transport des détenus doit se faireaux frais de l'administration et sur un piedd'égalité pour tous.

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Personnel pénitentiaire46. 1) L'administration pénitentiaire doitchoisir avec soin le personnel de toutgrade, car c'est de son intégrité, de sonhumanité, de son aptitude personnelle etde ses capacités professionnelles quedépend une bonne gestion desétablissements pénitentiaires.2) L'administration pénitentiaire doits'efforcer constamment d'éveiller et demaintenir dans l'esprit du personnel et del'opinion publique la conviction que cettemission est un service social d'une grandeimportance ; à cet effet, tous les moyensappropriés pour éclairer le public devraientêtre utilisés.3) Afin que les buts précités puissent êtreréalisés, les membres du personneldoivent être employés à plein temps enqualité de fonctionnaires pénitentiaires deprofession, ils doivent posséder le statutdes agents de l'Etat et être assurés enconséquence d'une sécurité d'emploi nedépendant que de leur bonne conduite, del'efficacité de leur travail et de leur aptitudephysique. La rémunération doit êtresuffisante pour qu'on puisse recruter etmaintenir en service des hommes et desfemmes capables ; les avantages de lacarrière et les conditions de servicedoivent être déterminés en tenant comptede la nature pénible du travail.47. 1) Le personnel doit être d'un niveauintellectuel suffisant.2) Il doit suivre, avant d'entrer en service,un cours de formation générale et spécialeet satisfaire à des épreuves d'ordrethéorique et pratique.3) Après son entrée en service et au coursde sa carrière, le personnel devramaintenir et améliorer ses connaissanceset sa capacité professionnelle en suivantdes cours de perfectionnement qui serontorganisés périodiquement.48. Tous les membres du personneldoivent en toute circonstance se conduireet accomplir leur tâche de telle manièreque leur exemple ait une bonne influencesur les détenus et suscite leur respect.49. 1) On doit adjoindre au personnel, unnombre suffisant de spécialistes tels quepsychiatres, psychologues, travailleurssociaux, instituteurs et instructeurstechniques.

2) Les services des travailleurs sociaux,des instituteurs et des instruc-teurstechniques doivent être assurés d'unefaçon permanente, mais sans exclure lesservices des auxiliaires à temps partiel oubénévoles.50. 1) Le directeur d'un établissement doitêtre suffisamment qualifié pour sa tâchepar son caractère, ses capacitésadministratives, une formation appropriéeet son expérience dans ce domaine.2) Il doit consacrer tout son temps à safonction officielle ; celle-ci ne peut êtreaccessoire.3) Il doit habiter l'établissement ou àproximité immédiate de celui-ci.4) Lorsque deux ou plusieursétablissements sont sous l'autorité d'unseul directeur, celui-ci doit les visiterchacun à de fréquents intervalles. Chacunde ces établissements doit avoir à sa têteun fonctionnaire résidant responsable.51. 1) Le directeur, son adjoint et lamajorité des autres membres dupersonnel de l'établissement doivent parlerla langue de la plupart des détenus, ouune langue comprise par la plupart deceux-ci.2) On doit recourir aux services d'uninterprète chaque fois que cela estnécessaire.52. 1) Dans les établissementssuffisamment grands pour exiger leservice d'un ou de plusieurs médecinsconsacrant tout leur temps à cette tâche,un de ceux-ci au moins doit habiterl'établissement ou à proximité immédiatede celui-ci.2) Dans les autres établissements, lemédecin doit faire des visites chaque jouret habiter suffisamment près pour être àmême d'intervenir sans délai dans les casd'urgence.53. 1) Dans un établissement mixte, lasection des femmes doit être placée sousla direction d'un fonctionnaire fémininresponsable qui doit avoir la garde detoutes les clefs de cette section del'établissement.2) Aucun fonctionnaire du sexe masculinne doit pénétrer dans la section desfemmes sans être accompagné d'unmembre féminin du personnel.3) Seuls des fonctionnaires fémininsdoivent assurer la surveillance des

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femmes détenues. Ceci n'exclut pascependant que, pour des raisonsprofessionnelles, des fonctionnaires dusexe masculin, notamment des médecinset des instituteurs, exercent leurs fonctionsdans les établissements ou sectionsréservées aux femmes.54. 1) Les fonct ionnaires desétablissements ne doivent, dans leursrapports avec les détenus, utiliser la forcequ'en cas de légitime défense, de tentatived'évasion ou de résistance par la force oupar l'inertie physique à un ordre fondé surla loi ou les règlements. Les fonctionnairesqui recourent à la force doivent en limiterl'emploi au strict nécessaire et faireimmédiatement rapport de l'incident audirecteur de l'établissement.2) Les membres du personnelpénitentiaire doivent subir un entraînementphysique spécial qui leur permette demaîtriser les détenus violents.

3) Sauf circonstances spéciales, lesagents qui assurent un service les mettanten contact direct avec les détenus nedoivent pas être armés. Par ailleurs, on nedoit jamais confier une arme à un membredu personnel sans que celui-ci ait étéentraîné à son maniement.

Inspection55. Des inspecteurs qualif iés etexpérimentés, nommés par une autoritécompétente, devront procéder àl'inspection régulière des établissementset services pénitentiaires. Ils veilleront enparticulier à ce que ces établissementssoient administrés conformément aux loiset règlements en vigueur et dans le butd'atteindre les objectifs des servicespénitentiaires et correctionnels.

(A suivre)

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Formation

1 - Session pour les équipes d'aumônerie de Guadeloupe, Guyane etMartinique, à Fort-de-France les 27, 28 et 29 septembre 2002C'est une première ! Lors du Congrès d'octobre 2001, plusieurs membres des aumôneries desDOM ont souhaité des sessions de formation sur place pour permettre à un plus grand nombre d'yparticiper.

2 - Session des aumôneries de Centrales et Centres de détentionChevilly-la-Rue les 15, 16 et 17 novembre 2002"On sort de prison, mais s'en sort-on vraiment ?"

La prison ne laisse personne indemne, surtout si ça dure !

C'est évident pour les personnes détenues, et nous chercherons comment contribuer à ce qu'elless'en sortent.

C'est évident aussi pour nous, intervenants des aumôneries, et nous verrons comment tenir faceau découragement, la désillusion et l'échec…

Madame Anne-Marie MARCHETTI ("Perpétuités" - Terre Humaine - Plon) et Monsieur MichelTRIGNOL (SPIP du CD d'Uzerches) seront de la partie.

3 - Session des nouveaux aumôniers (SNAP) - Paris - 106 rue du Bac - 18 - 19janvier 2003.Celles et ceux qui interviennent nouvellement dans les aumôneries ont des tas de questions àposer… Des aumôniers régionaux et l'équipe nationale, des personnels de l'A.P., desresponsables de visiteurs de prison (ANVP) et du Secours Catholique seront là pour répondre.

Une formation indispensable à qui entre dans l'aumônerie des prisons et une excellente manièred'y faire des connaissances fructueuses.

4 - Session nationale "Ecoute" - Orsay - 21, 22 et 23 février 2003.Après la session "Ecoute" de 2002, on apprendra cette année l'écoute en groupe. Il n'est pasnécessaire d'avoir suivi la session de 2002 qui concernait l'écoute individuelle.

L'Institut Catholique de Paris assurera l'animation de cette session.

"Toute l'activité au service de l'autre, et à plus forte raison de ceux qui sont les exclus denotre monde, demande une sérieuse formation à l'écoute" (Jean-Hubert Vigneau, Rapportmoral, Congrès de Lourdes)

"La formation n'est pas facultative : elle fait partie de la lettrede mission de tout aumônier et animateur d'aumônerie"(Conseil Nation de juin 1998).

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BREVES DE PARLOIR…

Le Journal Officiel du 29 juin 2002 nous apprend que la médaille pénitentiaire est conféréeà :

Jacques ARBERET, aumônier à la M.A. de Carcassonne (R.P. de Toulouse). Bernard BASSELIN, ancien aumônier à la M.A. de Metz et ancien régional (R.P. deMetz). Gaston BORGES, ancien aumônier à la M.A. d'Auxerre (R.P. de Dijon). Léo DIARD, aumônier à la M.A. de Nanterre (R.P. de Paris). Robert DUPUPET, ancien aumônier à la M.A. de Bonneville et ancien régional (R.P. deLyon). Dominique HOUEL, aumônier au C.D. d'Eysses et ancien régional (R.P. de Bordeaux). Jean-Claude VALY, ancien aumônier au CP de Lorient (R.P. de Rennes).

Toutes nos félicitations aux récipiendaires. Nul doute que ce sont leurs mérites personnelsqui sont honorés… Ces distinctions sont aussi une reconnaissance officielle du rôle del'aumônerie catholique des prisons auprès des personnes incarcérées.

3.283 mineurs ont été incarcérés en France au cours de l'année 2001. La part desmineurs âgés de plus de 13 ans dans l'ensemble de la population carcérale était de 5,1 %.La durée moyenne de leur détention était de deux mois et six jours.

Violences et troubles mentaux. Comprendre, traiter, prévenir ? Rencontre nationaleorganisée par l'Association Française de Psychiatrie et de Psychologie légales. Cela peutêtre utile pour des membres de l'aumônerie qui interviennent dans les S.M.P.R. Si vousêtes intéressés, demander la fiche d'inscription au secrétariat de l'aumônerie.

Une part de ciel, un film de Bénédicte Liénard. Sélection officielle "Un certain regard",festival de Cannes 2002. Sortie nationale en salle le 18 septembre. Une part de cielraconte la résistance de femmes détenues et d'un groupe d'ouvrières en usine. Il proposede nous interroger sur les limites et les compromis qui enferment nos vies. Un film pourdépasser le constat et oser un cinéma qui voudrait transformer le monde… avec vous !

Prisons et société, c'est le thème de la Lettre aux Communautés de la Mission de Francen° 215 de juillet-août 2002 (5,79 €). On peut se la procurer à la Mission de France - BP101 - 3, rue de la Pointe - 94170 Le Perreux-sur-Marne - Tél. 01.43.24.95.95.Journée Nationale Prison. Elle aura lieu le samedi 30 novembre. A l'origine initiative dela FARAPEJ, cette journée est maintenant placée sous le "patronage" de l'ANVP, l'Arméedu Salut, les Aumôneries Catholique et Protestante, la Croix Rouge, le GENEPI, laFARAPEJ et le Secours Catholique. Se rapprocher des organisations citées ci-dessus etprésentes dans vos régions.

Meeting contre la double peine. La campagne nationale contre la double peine, lancée àl'automne 2001, réunit un nombre important d'organisations nationales et locales. L'Eglisey est bien impliquée : l'ACAT, le CCFD, la Pastorale des migrants, l'Aumônerie catholique

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des prisons. Ce meeting contre la double peine et pour changer la loi se tiendra le 26octobre prochain (cf. le tract joint à La Lettre).

825, c'est l'effectif total des aumôneries de prison dont voici la répartition par confession : 478 catholiques (177 indemnisés) 233 protestants (82 indemnisés) 59 musulmans (31 indemnisés) 47 israélites (30 indemnisés) 3 orthodoxes (1 indemnisé) 2 adventistes du 7ème jour 1 bouddhiste.(source : les chiffres de l'administration pénitentiaire - juillet 2002).

Quelle prison veut-on faire aujourd'hui ? Le Secrétaire d'Etat aux programmesimmobiliers de la Justice, Pierre Bédier, a mis en place une mission de réflexion sur laprison concernant "tous les aspects matériels et immobiliers". Cette mission devra rendreses conclusions à l'horizon fin 2002 / début 2003. Question : Va-t-on consulter les usagers(personnes détenues, personnels, intervenants) ?

Annuaire 2003 de l'aumônerie. Sa sortie est prévue pour octobre 2002. Vous le recevrezpersonnellement. Sa présentation a été revue pour une meilleure utilisation. N'hésitez pasà faire part de vos réactions et remarques au secrétariat

L'annuaire contient les adresses personnelles de tous les membres de l'aumônerie… Iln'est donc pas à mettre entre toutes les mains, question de respect de la vie privée dechacun !

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"Le Décalogue d'Assisepour la Paix"

1. Nous nous engageons à proclamer notre ferme conviction que la violence et le terrorismes'opposent au véritable esprit religieux et, en condamnant tout recours à la violence et à laguerre au nom de Dieu ou de la religion, nous nous engageons à faire tout ce qui est possiblepour éradiquer les causes du terrorisme.

2. Nous nous engageons à éduquer les personnes au respect et à l'estime mutuels, afin que l'onpuisse parvenir à une coexistence pacifique et solidaire entre les membres d'ethnies, decultures et de religions différentes.

3. Nous nous engageons à promouvoir la culture du dialogue, afin que se développement lacompréhension et la confiance réciproques entre les individus et entre les peuples, car tellessont les conditions d'une paix authentique.

4. Nous nous engageons à défendre le droit de toute personne à mener une existence digne,conforme à son identité culturelle, et à fonder librement une famille qui lui soit propre.

5. Nous nous engageons à dialoguer avec sincérité et patience, ne considérant pas ce qui noussépare comme un mur insurmontable, mais, au contraire, reconnaissant que la confrontationavec la diversité des autres peut devenir une occasion de plus grande compréhensionréciproque.

6. Nous nous engageons à nous pardonner mutuellement les erreurs et les préjudices du passéet du présent, et à nous soutenir dans l'effort commun pour vaincre l'égoïsme et l'abus, lahaine et la violence, et pour apprendre du passé que la paix sans la justice n'est pas une paixvéritable.

7. Nous nous engageons à être du côté de ceux qui souffrent de la misère et de l'abandon, nousfaisant la voix des sans-voix et oeuvrant concrètement pour surmonter de telles situations,convaincus que personne ne peut être heureux seul.

8. Nous nous engageons à faire nôtre le cri de ceux qui ne se résignent pas à la violence et aumal, et nous désirons contribuer de toutes nos forces à donner à l'humanité de notre tempsune réelle espérance de justice et de paix.

9. Nous nous engageons à encourager toute initiative qui promeut l'amitié entre les peuples,convaincus que, s'il manque une entente solide entre les peuples, le progrès technologiqueexpose le monde à des risques croissants de destruction et de mort.

10. Nous nous engageons à demander aux responsables des nations de faire tous les effortspossibles pour que, aux niveaux national et international, soit édifié et consolidé un monde desolidarité et de paix fondé sur la justice.

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Le SCEJI dit non à l'enfermement"Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu" (Mathieu 7 - 9)

En charge de la pastorale des enfants, des jeunes et des adultes handicapés et en difficultéssociales, le Service Catholique de l'Enfance et la Jeunesse Inadaptées dit non à la mise en placede maisons fermées pour les mineurs délinquants : au nom de l'Evangile où le Christ a toujoursouvert un chemin nouveau à toute personne en détresse, au nom aussi de l'expérience enracinéedans les nombreux établissements d'inspiration chrétienne qui, depuis plus d'un siècle, ont pris encharge ces jeunes en grandes difficultés avec la société.

Partout où ils vivent, en famille, à l'école, sur les terrains de sport et autres lieux de loisirs ouencore dans la rue, les mineurs inquiètent et préoccupent leurs aînés, par la violence de quelques-uns, par le mal-être de quelques autres ou encore par l'instabilité affective d'un grand nombre.

Ces derniers mois, la campagne électorale a mis au premier plan l'insécurité et son corollaire, larépression, allant jusqu'à remettre en cause l'ordonnance de 1945 qui, au lendemain de laseconde guerre mondiale, établit et organise une juridiction particulière pour les délinquants àtravers une prise en charge éducative.

Le SCEJI veut rappeler que la violence aujourd'hui n'est pas le propre de la jeunesse, dont onvoudrait faire un bouc émissaire. Cependant, dans le contexte du passage à l'acte violent decertains jeunes, le SCEJI s'interroge sur le sens de cette violence et sur les moyens à mettre enœuvre pour que ces jeunes trouvent un autre langage.

D'aucuns rêvent d'une intervention répressive pour contenir ce phénomène et réclament dessanctions fortes, voire la prison. Aujourd'hui, le gouvernement prône des centres éducatifs ferméset la tolérance zéro, c'est-à-dire, l'intolérance.

Le SCEJI rappelle avec force que les comportements déviants des jeunes sont, dans la plupartdes cas, l'expression d'un mal être et d'un mal vivre, et qu'il est indispensable de décoder lescomportements et de proposer des réponses adaptées. Ce serait un non sens que de répondre àleur agressivité par de l'agressivité, à leur violence par la violence, à leur fragilité par de la force, àleur difficulté à communiquer par de l'autoritarisme.

Tout jeune est un être de droit qui doit pouvoir accéder peu à peu à une certaine capacité dedevoirs. C'est pourquoi le SCEJI demande : que soit mis fin à la pénalisation de la souffrance, de la carence affective, de la précarité et de lamisère, que soient respectés les parents souvent démunis devant le comportement de leur enfant et quiconnaissent eux-mêmes bien des difficultés matérielles et morales, que soient mis en place les moyens nécessaires pour la prévention et ce, dès l'école maternelle, que l'on dote en personnel spécialisé suffisant les différentes structures qui accueillent déjà cesjeunes,que les juges des enfants travaillent en équipe avec l'ensemble des partenaires, dans le respectdes uns et des autres pour une action coordonnée et concertée,qu'aucune violence ne s'exerce à l'égard du jeune pour le soustraire à sa famille,que tout enfermement soit proscrit et que soient proposées des alternatives dignes etrespectueuses pour les jeunes qui mettent en danger leurs concitoyens.

"C'est la paix que je vous laisse, c'est ma paix que je vous donne ;ce n'est pas à la manière du monde que je vous la donne" (Jean 14 - 27).

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Commission Sociale des Evêques de France

Journée Nationale du Secours CatholiqueDimanche 17 novembre 2002

Donnez-nous les moyens d'agir !

"Donnez-nous les moyens d'agir !"

C'est un appel clair et direct que le Secours Catholique adresse à l'occasion de sa journéenationale. En cela, il poursuit ce courant fondamental qui traverse toute la Bible : "Tu dois ouvrirta main à ton frère".

Certes, les gens de la Bible visaient à une société idéale : "Qu'il n'y ait donc pas de pauvreschez toi. Car Yahvé t'accordera sa bénédiction dans le pays que Yahvé ton Dieu te donneraen héritage" (Dt 15, 4). Mais la dure réalité de la vie, avec ses injustices et ses violences, lesamène à nuancer leurs propos et à interpeller les riches pour qu'ils partagent avec ceux qui sontspoliés ou n'ont pas eu de chance. "Certes, les pauvres ne disparaîtront point ; aussi je tedonne ce commandement : Tu dois ouvrir ta main à ton frère, à celui qui est humilié etpauvre dans ton pays" (Dt 15, 11). Cet idéal est d'ailleurs repris dans les Actes des Apôtres :"Entre eux, tout était commun… Aussi nul n'était dans le besoin" (Ac 4, 32-34). Mais aussitôtnous voyons le contre témoignage d'Ananie et de Saphire qui ne jouent pas le jeu de lacommunauté et s'en trouvent donc exclus.

C'est dire la difficulté à donner de bon cœur. Et pourtant, c'est la clef d'entrée au pays que Dieudonne, ce "Royaume de Dieu", ouvert à tous et déjà présent au milieu de nous, qu'annoncel'Evangile de Luc (17, 21).

Cet appel nous invite tous à vouloir une société juste et fraternelle : chacun y apporte ce qu'il amais d'abord ce qu'il est. Ainsi ceux qui ont plus que le nécessaire et ceux qui sont en manquepourront joindre leur voix à celle du sage : "… Ne me donne ni pauvreté ni richesse, laisse-moigoûter ma part de pain, de crainte que, comblé, je ne me détourne et ne dise : "Qui est leSeigneur ?" ou encore, qu'indigent, je ne vole et ne profane le nom de mon Dieu" (Pr 30, 7-9).

Nous n'aurons pas à entendre l'interpellation adressée aux possédants trop durs vis-à-vis dupauvre : "Ne va pas fermer ton visage à ton frère pauvre et ne rien lui donner ; il enappellerait au Seigneur contre toi et tu serais chargé d'un péché" (Dt 15, 9) car ils sontresponsables en le faisant dévier de son chemin. Au contraire, nous lui permettons d'apporter sonexpérience, ses savoirs et ses capacités. A lui aussi s'adresse l'appel "Donnez-nous les moyensd'agir !".

Pas les uns sans les autres. Tous ensemble avec nos diversités et nos richesses, préparons unNoël de justice et de fraternité.

Olivier de BERRANGER, Evêque de Saint-Denis-en-France,Président de la Commission sociale des évêques de France

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Déclaration du collectif "octobre 2001" créé dans la perspective du XXème anniversaire del'abolition de la peine de mort en France

1 - Les formes de sanctions prononcées à l'encontre des délinquants et des criminels traduisent lesvaleurs fondamentales d'une société. Le 9 octobre 1981, l'abolition de la peine de morte fit triompher enFrance le caractère inaliénable du droit à la vie pour chaque individu.

2 - Depuis le 1er mars 1985, le protocole 6 à la Convention européenne des droits de l'homme et deslibertés fondamentales érige cette abolition en obligation juridique de droit international. A l'exception dela Turquie, tous les Etats membres du Conseil de l'Europe ont aujourd'hui signé ce protocole. Seule laRussie ne l'a pas encore ratifié.

3 - L'article 3 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 affirme également le droit à lavie de tout individu et stipule que "nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels".Pourtant, en 1999, 1831 condamnés furent exécutés dans 31 pays et plus de 3800 personnescondamnés à mort dans 63 pays différents1. L'Arabie Saoudite, la Chine, les Etats-Unis, l'Iran et laRépublique Démocratique du Congo sont responsables de 85 % de ces exécutions2.Au cours du seul premier trimestre 2000, les Etats-Unis ont exécuté plusieurs mineurs au mépris dudroit international3. Depuis 1990, outre les Etats-Unis, l'Iran, le Nigeria, l'Arabie Saoudite ou le Yémenont supprimé la vie de personnes condamnées pour un crime commis avant l'âge de 18 ans.

4 - Partout où la peine de mort est appliquée, on relève des disparités de sentence d'une juridiction àl'autre, des irrégularités dans la constitution des jurys et une application arbitraire du droit de grâce. Or,dans une justice par définition relative, comment justifier une peine irréversible4 ?

5 - A la fin du 18ème siècle, Beccaria affirmait déjà : "En donnant aux hommes l'exemple de la cruauté,la peine de mort n'est pour la société qu'un mal de plus (…). La peine de mort n'est pas un droit maisune guerre de la nation contre le citoyen".Une exécution n'est jamais un acte de légitime défense face à une menace de mort immédiate. C'estune agression physique et morale définitive à l'encontre d'une personne que les autorités ont déjàréduite à l'impuissance. Légitimer pour une communauté d'individus la possibilité de supprimer la vie del'un de ses membres, prisonnier sans défense, ne peut avoir d'effet pédagogique sur l'apprentissage durespect de la vie d'autrui. Aucune efficacité dans la prévention de la criminalité n'a jamais pu êtreimputée à la peine de mort.

6 - Si, dans les démocraties, aucun code pénal n'autorise plus à torturer un tortionnaire, à rouer decoups un homme coupable de violences, c'est bien parce que nos sociétés ont compris qu'ellesdevaient bâtir leurs modèles de sanction sur des valeurs différentes de celles qu'elles condamnent.

7 - Alors qu'une majorité de pays dans le monde a aboli la peine de mort, qu'une dynamiqueinternationale est engagée contre cette peine, agissons pour qu'elle disparaisse définitivement dessystèmes juridiques de l'ensemble des pays du monde.

8 - Après avoir écarté les principes de vengeance et d'intimidation, la justice française prétendaujourd'hui mettre la prévention de la récidive par l'amendement au premier rang des objectifs duprononcé de la peine.Affirmer que toute personne est susceptible d'amendement oblige à abolir toute forme de mise à l'écartdéfinitive.

1 "Ces données ne concernent que les cas portés à la connaissance d'Amnesty International", Abolir, n°33, juin 2000, Amnesty International Section Française.2 Des centaines d'exécutions ont également été signalées en Irak, mais il est possible que nombred'entre elles aient revêtu un caractère extrajudiciaire.3 L'alinéa 5 de l'article 6 du Pacte relatif aux droits civils et politiques interdit de prononcer la peine demort pour des personnes âgées de moins de 18 ans et d'exécuter les femmes enceintes. La résolution

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E/CN.4/Sub2/1999 de la commission des droits de l'Homme des Nations Unies condamne le prononcéde la peine de mort pour les condamnés auteurs de crimes commis avant l'âge de 18 ans.4 "Dans une justice par définition relative, il ne saurait y avoir de place pour une peine irréversible",L'exécution, Robert Badinter, Editions Grasset et Fasquelle, 1973.Pourtant, aujourd'hui encore, l'existence des peines de sûreté pour les peines à temps prononcées, oupour les réclusions criminelles à perpétuité, n'a donné lieu qu'à très peu de réflexions

9 - Si l'un des fondements à un possible amendement réside dans l'acceptation de la peine et lareconnaissance de sa légitimité par le condamné, comment un individu peut-il se reconnaître dans unverdict ne lui laissant aucune possibilité de faire valoir une évolution de son comportement ? Un verdictqui le définit comme monstre irrécupérable, qui l'engage à accepter sa propre mort sociale. Quellemotivation pour changer, se soigner, se former, travailler, s'il n'existe aucun moyen d'aménagement despeines prenant ces critères en considération ?

10 - Les incohérences et la faiblesse des moyens accordés à la mission de réinsertion confiée àl'administration pénitentiaire mettent gravement en péril l'exercice de cette mission5, toutparticulièrement pour les détenus soumis à de longues peines et pour ceux qui souffrent de gravessymptômes psychiatriques. Si l'on attend qu'un détenu respecte les règles de la société après salibération, assurons-nous que le fonctionnement de l'institution carcérale lui garantisse l'accès à tousles moyens nécessaires à la préparation individualisée de sa réinsertion, et le respecte à tout momenten tant que sujet de droit.

11 - L'abolition de la peine de mort en 1981 a coïncidé avec la naissance des associations d'aide auxvictimes. Le législateur a ainsi permis que la prise en charge sociale d'un crime ne s'arrête pas auprononcé de la sanction à l'égard de son auteur.Pour aller au-delà, seule une implication de l'ensemble du corps social dans un débat démocratiquepeut aujourd'hui redéfinir les conditions de réintégration dans notre communauté des individus qui ontenfreint ses règles. C'est à cette condition que la qualité de membre à part entière de notre société, desujet de droit, pour chaque individu quelque soit la gravité de son crime, pourra s'affirmer commeinstrument fondamental de l'ordre social.

12 - Appelons à une véritable réflexion comparative, au niveau européen, sur les peines prononcéespour les crimes les plus graves, et ce dans la perspective de définir ce qui devrait être la peinemaximale encourue en Europe.Agissons pour que le XXème anniversaire de l'abolition de la peine de mort, en France, marque lanaissance d'une véritable réflexion collective et démocratique sur le sens de la peine, et les moyensaffectés à son exercice.

Paris, le 21 décembre 2000.

5 Les constats exposés dans plusieurs rapports parlementaires sont particulièrement éloquents à ce sujet : rapport de M. JacquesFloch, fait au nom de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la situation dans les prisons françaises, 2000 ; rapport deM. Guy Cabanel, fait au nom de la commission d'enquête du Sénat : "Prison, une humiliation pour la République", 2000.

Bon de commande du livre"COMMENT SANCTIONNER LE CRIME ?"

Actes du colloque du 6 octobre 2001 à la Présidence de l'Assemblée nationale, organisé par le Collectif "Octobre 2001"à l'occasion du XXe anniversaire de l'abolition de la peine de mort en France, 150 pages, Editions Erès, CollectionTrajets, Direction éditoriale : Sonia Feltesse et Pierre V. Tournier avec la collaboration de Françoise Dixmier.

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Nombre d'exemplaires : ………………. X 15 € = ………………… € (Port gratuit)

Chèque à l'ordre de l'AFC, à envoyer à la commande, à l'adresse suivante :

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Marche à suivre pour consulter le siteInternet des prisons

www.cef.fr

Cliquer sur "Eglise Catholique en France - Ala une aujourd'hui".

Taper dans Rechercher (situer à droite devotre écran) "Prisons".

Cliquer sur la 2ème ligne rouge

Cliquer sur "Liste des aumôneries deprisons" ou tout autre rubrique qui vousintéresse.

Cliquer sur la région de votre choix.

Pour revenir au sommaire, cliquer sur le logode l'Eglise de France (coin en haut à gauche).

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Joseph BARRE, 42 ans à la Prison !

… et il n'y a pas ménagé sa peine. Tout en étant, selon les périodes, curé de paroisse, aumônierdes Forains et Gens du Voyage et autres services de présence et d'accompagnement, Joseph aété aumônier de la Maison d'Arrêt d'Alençon (Orne) de 1957 à fin 1998 et pendant 10 ansaumônier régional.

Il est décédé le 12 août 2002 à l'âge de 82 ans et a été inhumé à Alençon le 16 août.

"Il y aurait de quoi écrire un livre, disait-il à l'occasion de sa succession, mais il faudrait avoir letemps. Et même en préservant l'anonymat des personnes, il y a des choses qui ne peuvent pasêtre dites…".

Une Confiance en toute personne et une Espérance ancrées dans une Foi profonde…

"L'écoute, c'est quelque chose de très difficile, de très fatiguant…Toute cette expérience m'aura appris que l'homme est tout à la fois faible et fragile et qu'il estmalheureusement capable du bien comme du mal. Mais elle m'aura appris qu'il ne faut jamaisdésespérer. Dieu aime tous les hommes. Un être humain n'est jamais perdu".

Rétablir la personne dans ses liens…

"Le plus dur, c'était quand la famille du détenu avait décidé de couper tous les liens avec lui. Alors,quand c'était possible et désiré, je m'arrangeais pour essayer de reconstituer le puzzle".

Une présence, une rencontre dans la durée…

"Il m'est arrivé à plusieurs reprises de marier des anciens détenus. J'ai même ensuite baptisé leursenfants. Ceux-là sont devenus amis… De même avec les personnes de l'administrationpénitentiaire avec qui j'ai toujours entretenu d'excellentes relations".

Paul Constantin, le 26 août 2002

Ces deux textes ont été exprimés au cours de la Célébration d'Inhumation :

Pendant 8 ans, j'ai connu des détenus venant de la Maison d'Arrêt d'Alençon qui, tous, m'ontparlé avec émotion du père Joseph. Je résume leurs propos :"Le père Joseph nous écoutait longuement avec patience. Il nous encourageait, ce qui nousrassurait. Il avait du respect pour nous et nous aidait à regarder en face ce que nous avions fait.Beaucoup d'entre nous ont appris à prier, surtout la Vierge Marie. Il allait voir nos familles ou leurtéléphonait quand elles habitaient trop loin. Nos familles nous disaient qu'il était très délicat etsavait bien les conseiller pour s'adresser aux personnes ou aux services compétents".Personnellement, avant de prendre ma charge d'aumônier du Centre de Détention, je suis allé voirle père Joseph. Son expérience me fut très précieuse et je l'en remercie une nouvelle fois cematin.Lors de nos fréquents échanges, il me confiait ses convictions mûries depuis longtemps commeexprimées avec humilité. Je les résume, elles paraissent évidentes mais atteignent la profondeurd'une longue pratique : "J'ai cherché à ce qu'ils acceptent d'être responsables pour retrouver leurdignité et ainsi devenir ou redevenir des hommes debout".Merci Joseph.

Gérard Bordat, aumônier du C.D. d'Argentan

Père, que la Mission, exercée pendant plus de 40 ans auprès des personnes détenues de laMaison d'Arrêt d'Alençon, ainsi qu'au service de l'Aumônerie Régionale pendant 10 années, puissecontinuer à enrichir l'Eglise et la Société tout entière en nous aidant à découvrir la Force deLibération de l'Evangile dans l'aujourd'hui de nos vies.

Michel Labbé, aumônier de la M.A.d'Alençon

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Nominations officielles

En tant qu'aumônier :

René BATOUL - C.P. de Ducos (DOM)

Jean-Marie JULLIEN - M.A. de Clermont-Ferrand (Lyon)

Bruno BOULANGE - M.A. d'Aix-en-Provence (Marseille)

Isabelle LE BOURGEOIS - M.A. de Fleury-Mérogis (Paris)

Albert EWALD - M.A. de Villepinte (Paris)

Robert CLOAREC - M.A. de Brest (Rennes)

Chantal LEBOUTEILLER - M.A. de Coutances (Rennes)

Bruno de PONCHEVILLE - M.A. de Saint-Malo (Rennes)

Jean-Claude MAUGER - M.A. de Coutances (Rennes)

Michel le DREFF - M.A. de Brest (Rennes)

Maryvonne HAY - M.A. de Brest (Rennes)

Marie-Françoise GAUTIER - M.A. de Rennes (Rennes)

Bénédicte PACAULT - M.A. de Rennes (Rennes)

Jean-Yves HERVAGAULT - M.A. de Rennes (Rennes)

En tant qu'animatrice - animateur

André PEYRARD - M.A. de Saint-Etienne (Lyon)

Daniel SICARD - M.A. de Villepinte (Paris)

Emmanuel DELHOUME - M.A. de Villepinte (Paris)

Gabriel LE DU - M.A. de Rennes (Rennes)

Marie-Christine DAMOUR - M.A. de Toulouse (Toulouse)

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Une parole qui libère

La parole de Jésus est efficace.Il ne parle pas pour ne rien direOu pour dire du mal des autres.Sa parole est force de libération.

« Il commande aux esprit mauvais, et ils lui obéissent ».

Notre parole souvent blesse.Elle enferme l’autre et le tue.

Elle fait du mauvais espritAu lieu de chasserLes esprit mauvais.

La parole de Jésus fait ce qu’elle dit.Elle écoute et s’ajuste

Aux besoins des autres .Elle console et réconforte.

Elle rend responsable.

Notre parole est capableDu meilleur et du pire.

Elle peut donner la mort ou la vie.Elle peut griffer ou caresser.

Elle peut écraser ou mettre debout.

Que notre parole se fasse silence,Pour être efficace comme celle de Jésus.

Bernard Hubler

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JUILLET - AOUT - SEPTEMBRE 2002

SOMMAIRE

EDITORIAL, Jean-Hubert VIGNEAU ........................................................................ 3

TEXTE D'ORIENTATION - "GRILLE" DE TRAVAIL, Equipe Nationale .................... 5

L'ETRE HUMAIN, Marie de HENNEZEL ………………………………………………...8

EVOLUTION DES MENTALITES EN PRISON, M. ARIOLI ...................................... 9

LA FAUTE, Henri COULAUD.................................................................................... 13

LA MORT DE YOANNE, Aumônerie de Lannemezan .............................................. 19

DE QUELLE ESPERANCE LES AUMONIERS SONT SIGNES ? M. GRUAU ......... 21

VOUS, Charles SINGER …………………………………………………………………..26

LE FONDAMENTALISME, Maurice GRUAU ................................................................. 27

ENSEMBLE DE REGLES MINIMA POUR LE TRAITEMENT DES DETENUS(NATIONS UNIES - Département de l'information - New-York, 1985).......................... 31

PROGRAMME FORMATION 2002 - 2003................................................................ 39

BREVES DE PARLOIR............................................................................................. 40

DECALOGUE D'ASSISE POUR LA PAIX................................................................. 42

LE SCEJI DIT NON A L'ENFERMEMENT ................................................................ 43

JOURNEE NATIONALE DU SECOURS CATHOLIQUE........................................... 44

COLLECTIF "OCTOBRE 2001"…………………………………………………………...45

www.cef.fr …………………………….……………………………………………………..47

JOSEPH BARRE, 42 ANS A LA PRISON ! , Paul CONSTANTIN ............................ 48

NOMINATIONS......................................................................................................... 49

UNE PAROLE QUI LIBERE, Bernard HUBLER ………………………………………...50