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Autour de Guernica « La guerre d’Espagne est la bataille de la réaction contre le peuple, contre la liberté. Toute ma vue d’artiste n’a été qu’une lutte continuelle contre la réaction et la mort de l’art. Dans le panneau auquel je travaille et que j’appellerai Guernica, j’exprime clairement mon horreur de la caste militaire qui a fait sombrer l’Espagne dans un océan de douleur et de mort ». C’est par ces mots que Picasso explique les raisons et le sens d’un de ses tableaux les plus célèbres : Guernica, conservé aujourd’hui à Madrid, au musée Reina Sofia. Si le tableau sera bien sûr expliqué, il convient d’abord de le contextualiser de façon assez précise. Nous allons donc évoquer la Guerre d’Espagne (1936- 1939) qui a débouché sur la dictature de Franco (1939- 1975) en faisant le lien avec des concepts et des éléments reliés au programme d’histoire de première. Nous nous intéresserons ensuite à Picasso et à la réalisation de cette œuvre. Je proposerai enfin des éléments pour interpréter ce tableau. L’interprétation ne sera en aucun cas exhaustive (j’expliquerai pourquoi). L’intérêt sera néanmoins de voir quelques points de méthode qui s’insèrent dans l’histoire des arts.

Autour de guernica

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Autour de Guernica« La guerre d’Espagne est la bataille de la réaction contre le peuple, contre la liberté.   Toute  ma   vue   d’artiste   n’a   été   qu’une   lutte   continuelle   contre   la réaction   et   la   mort   de   l’art.   Dans   le   panneau   auquel   je   travaille   et   que j’appellerai Guernica, j’exprime clairement mon horreur de la caste militaire qui a fait sombrer l’Espagne dans un océan de douleur et de mort ».

C’est  par   ces  mots  que  Picasso  explique   les   raisons  et   le   sens  d’un  de   ses tableaux les plus célèbres : Guernica, conservé aujourd’hui à Madrid, au musée Reina Sofia.

Si le tableau sera bien sûr expliqué, il convient d’abord de le contextualiser de façon assez précise.

Nous allons donc évoquer la Guerre d’Espagne (1936-1939) qui a débouché sur la dictature de Franco (1939-1975) en faisant le lien avec des concepts et des éléments reliés au programme d’histoire de première.

Nous nous intéresserons ensuite à Picasso et à la réalisation de cette œuvre. 

Je proposerai enfin des éléments pour interpréter ce tableau. L’interprétation ne   sera   en   aucun   cas   exhaustive   (j’expliquerai   pourquoi).   L’intérêt   sera néanmoins de voir quelques points de méthode qui s’insèrent dans l’histoire des arts.

I) Une  œuvre   qui   s’insère   dans   le   contexte   de   la guerre d’Espagne (1936-1939)

à Bref panorama de l’Histoire de l’Espagne jusqu’en 1936

L’Espagne fut jadis la première puissance du monde.  Cette époque est appelée le « Siècle d’Or » et s’étend de 1492 à la mi XVIIe siècle.

« Sur mon Empire, le soleil ne se couche jamais » (Charles Quint, 1516-1556)

A partir de 1650, s’ouvre une période de déclin progressif.

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Le XIXème siècle est, pour l’Espagne, très tourmenté.

Sur  le plan extérieur,  elle perd dans  le premier tiers du XIXème siècle ses possessions en Amérique du Sud. A la fin du siècle, elle doit abandonner Cuba, Porto-Rico et les Philippines.

Sur   le   plan   intérieur,   elle   connaît   une   forte   instabilité politique. Cette monarchie connaît -occupation napoléonienne

-crise   dynastique   qui   débouche   sur   une   guerre   civile (1833-1840)

-une brève république (1873-74)

-En 1876 est instaurée une monarchie constitutionnelle

Cette   instabilité  explique  en  partie   son  « retard   industriel »   face  aux  autres puissances européennes.

Des violences sont exercées par des mouvements autonomistes (ex : Catalogne) ou anarchistes (Mano Negra)

Le pays reste neutre durant la Première Guerre mondiale mais est touché par l’épidémie de Grippe de 1918 (dite grippe espagnole).

En 1923, Primo de Rivera, général,  prend le pouvoir par la force ce qui contraint  le roi (Alphonse XIII)  à  le nommer Premier ministre. Il   instaure une dictature en s’inspirant du tout nouveau modèle fasciste italien mis en place par Mussolini.

La montée des contestations obligent Rivera puis le Roi à l’exil. En 1931, la Deuxième   république   est   instaurée.   Elle   n’ouvre   en   aucun   cas   le   pays   à   la stabilité mais au contraire exacerbe et renforce haines et rivalités. C’est dès sa création   un   régime   en   difficulté,   les   courants   monarchiste,   catholique traditionnaliste puis fasciste étant puissants.

Page 3: Autour de guernica

à Les élections législatives de février 1936 et le début de la guerre civile

En février 1936 ont lieu des élections législatives qui opposent deux coalitions politiques : 

-Frente Popular  (coalition   de   gauche   très   hétéroclite   allant   des socialistes aux communistes staliniens)

-Frente Nacional (coalition de partis de droite et de partis fascistes)

NB :   Staline,   inquiet   par   la   montée   du   fascisme   en   Europe,   encourage   la formation d’alliances politiques entre communistes et gauche non communiste. Front populaire=front antifasciste.

Le  Frente Popular  gagne les élections (de justesse) ce qui ouvre le pays à une nouvelle   période   de   tensions.   Le  Frente Nacional  craint   l’instauration   du communisme, le Frente Popular craint quant à lui un coup d’Etat nationaliste et fasciste.

Le mois de Juillet 1936 marque un basculement.

Le 13 juillet, un député monarchiste est assassiné (José Calvo Sotelo) par des   républicains,  en   représailles  d’un assassinat  contre  un membre  du Parti socialiste espagnol.

NB : Dolorès Ibarruri, figure républicaine, l’a publiquement menacé.

Le  17  juillet,  un soulèvement militaire de  la garnison de Mellila (Maroc espagnol) se produit à la tête duquel se retrouve rapidement le général Franco.

La nouvelle de ce soulèvement se répand dans le reste du pays. 

Le reste de l’armée est divisée sur l’attitude à adopter. Ce mouvement reçoit toutefois le soutien des milices carlistes (monarchistes et catholiques fervents).

Très   vite,   dès   la   fin   juillet   1936,   plusieurs   territoires   sont   aux  mains   des franquistes. 

L’Espagne est coupée en deux et rentre dans une guerre meurtrière.

Les républicains résistent de façon efficace et repoussent les franquistes devant Madrid en novembre 1936.

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Transition : Dès lors, la guerre civile se prolonge pendant deux ans et demi.

Chaque camp compte une armée d’environ 800 000 hommes avec chacune le soutien de puissances étrangères. La guerre d’Espagne dépasse en effet le cadre du pays.

à Totalitarismes et démocraties face à la guerre d’Espagne

Au début du conflit, totalitarismes comme démocraties défendent le principe de non intervention.

Les grandes démocraties : R-Uni et France n’interviennent pas directement.

La France laisse passer des armes pour les troupes républicaines.

Le R-Uni, par anti communisme, souhaite largement le succès de Franco.

Seuls   les   volontaires   des   Brigades   Internationales   se   battent   aux   côtés   des républicains.  Ces  engagés  volontaires  sont   le  plus  souvent  des  communistes français, allemands, Italiens, pays d’Europe centrale ainsi que des démocrates anglo-saxons.

Ex :  Pierre  Georges   (dit   le  Colonel  Fabien) ;  André Malraux   (l’Espoir) ;  Ernest Hemingway

Pour   les   totalitarismes,   l’Espagne   est   un   lieu   d’affrontement   idéologique indirect.

-L’URSS  de  Staline   soutien   les   républicains.  Elle  envoie  des  armes,  des cadres. Elle espère l’instauration du communisme d’obédience stalinienne en Espagne…elle participe donc à l’élimination des « mauvais républicains ».

-L’Italie  Fasciste  et   l’Allemagne  Nazi  ont  une  participation  plus  directe. Elles envoient des troupes et du matériel pour soutenir les franquistes. Le but étant d’éviter l’instauration du communisme en Espagne.

La   légion   Condor :   légion   allemande   d’aviation   qui   profite   de   la   guerre d’Espagne pour tester ses armes, Hitler étant déjà dans une marche à la guerre.

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à 26 avril 1937 : Guernica est bombardée

Au printemps  1937,   le  Pays  Basque  et  plus  particulièrement   la  province  de Biscaye est  une  forte  zone de tension entre   les  belligérants.  Les   franquistes gagnent de plus en plus de terrain.

31 mars 1937, la ville de Durango est bombardée par l’aviation italienne=près de 300 morts.

La ville de Guernica, un point stratégique ? Le 25 avril, les troupes républicaines traversent la ville pour se diriger vers Bilbao.

Cette ville de 7000 habitants est le symbole des libertés basques (chêne où se réunissaient   au  Moyen  Age   les   représentants   du  peuple   basque).   Jadis,   les représentants de la couronne réaffirmaient le serment de respecter les libertés basques…   ce  qu’a   à  nouveau   fait   le   pouvoir   républicain  du  Frente Popular. Franco avait-il un ressentiment particulier contre cette ville symbolique ?

Guernica=ville où il y a des usines d’armement.

Le 26 avril 1937,  de 16h30 à 18h, pendant le marché, 33 bombardiers de la légion Condor lâchent des bombes explosives et incendiaires qui détruisent la quasi-totalité de la ville (bcp d’habitations en bois)

Franco était-il au courant ?

Episode peu explicable : le chêne et les industries n’ont pas été touchés !

Nombre de victimes=débat. Le gouvernement basque  fait état de plus de 1600 mort et de 800 blessés.

Point   fondamental :   les   victimes   sont   des   civils.   Çela   annonce   la   guerre d’anéantissement (victimes civiles plus nombreuses que victimes militaires) qu’a été par la suite la Seconde Guerre Mondiale avec l’utilisation systématique des bombardements de terreur par les nazis (utilisés notamment sur Londres).

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II) Picasso, un artiste engagé ?àPicasso et le cubisme

Picasso est né à Malaga en 1881. Encouragé par son père, il peint dès 8 ans.

Son premier « tableau », à 8 ans : Le petit Picador jaune

En 1895, il entre à l’école des Beaux Arts de Barcelone. 

Il se tourne d’abord vers de la peinture « académique » (portrait de sa mère) puis a par la suite différentes « périodes » : bleue, rose.

Après quelques voyages à Paris, il  s’y installe définitivement en 1905. C’est à Paris qu’il peint ce qui est considéré comme le premier tableau cubiste.

Cubisme :   mouvement   artistique   employant   des   nouveaux   modes   de construction plastique. Le cubisme est en rupture avec les courants précédents (Renaissance   à   l’impressionnisme)   puisqu’il   y   a   une   recherche   dans   la représentation   qui   tend   à   l’abstraction.   Les   objets   et   les   figures   sont décomposés en couleurs et éléments géométriques simples (cônes, cylindres et cubes).

2 artistes sont considérés comme les « premiers cubistes »

-Georges Braque (Le grand nu)

-Pablo Picasso avec les Demoiselles d’Avignon

-il n’y a plus d’effets pleins-vides

- L’objet, qu’il s’agisse d’une nature morte ou d’un visage,  est  disséqué, présenté sous tous ses angles, décomposé en facettes et en angles brisés

- espace pictural peu profond

Voyons désormais quels rapports le peintre entretient-il avec son pays natal.

àPicasso et l’Espagne

En 1937, lorsqu’il réalise Guernica, cela fait plus de 30 ans qu’il réside en France.

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Ces années sont dédiées à l’art et Picasso a laissé de côté la politique et  les affaires   intérieures   de   son   pays.   Il   n’a   jamais   montré   un   positionnement idéologique clair dans ses œuvres.

L’avènement de la République en 1931 va un peu renforcer son intérêt pour l’Espagne  même   si   les   pouvoirs   conservateurs   (Eglise   par   exemple)   encore puissants limitent l’ouverture de la jeune démocratie aux nouvelles influences artistiques.

Le rapport de Picasso à l’Espagne oscille donc entre « froideur » et « tiédeur ».

La   Guerre   civile   va   considérablement   changer   la   donne   d’autant   que   les républicains cherchent assez vite en Picasso un allié d’exception puisqu’il est, en 1936, un peintre à la renommée mondiale. Picasso est d’autant plus un allié important que l’exposition universelle prévue en juin 1937 se tient à Paris.

Pour   les   Républicains,   c’est   l’occasion   de   médiatiser   leur   combat.   Ils commandent un tableau au peintre.

Les   expositions   universelles   ont   été   créées   pour   présenter   les   réalisations industrielles des différentes nations. Celle de 1937 est basée sur les  « Arts et Techniques dans la Vie moderne ».

A partir de cette commande du gouvernement légal, Picasso va travailler à la réalisation d’un œuvre qui vise à soutenir le gouvernement légal républicain.

En janvier 1937, il grave la série Songe et Mensonge de Franco, première oeuvre antifranquiste, qui doit être vendue sous forme de cartes postales pour soutenir le gouvernement républicain. Le fond est largement satirique et caricatural.

S’attarder sur le taureau qui ici est vu comme figure d’opposition à Franco.

L’inspiration semble toutefois lui faire défaut pour le tableau qu’il doit exposer à l’exposition universelle.

Le drame de Guernica va stimuler le peintre. Le 1er mais il commence une première esquisse. 60 autres ont suivi. Moins d’un mois après, l’œuvre est achevée et exposée.

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III) Mises en perspective de GuernicaQuelques remarques : Guernica est une des œuvres qui a fait l’objet (voire a parfois subi) le plus d’interprétation. Les éléments proposés ici ne sont en aucun cas exhaustifs et sont tout à fait critiquable.

De  manière  générale,   toute   interprétation  de   tableau  est   critiquable   car  en partie subjective.

Je propose ici de faire le parallèle entre Guernica et d’autres œuvres picturales ou artistiques.

à Aspects généraux du tableau

Guernica est une huile sur toile aux dimensions importantes. 3m50 de hauteur ; 7,5m de longueur

La gamme des couleurs utilisées est réduite. Noir et Gris dominent. Pourquoi ? C’est par la presse que Picasso reçoit les premières images du drame, avec des photos en Noir et Blanc. De plus le choix de ces couleurs peut s’expliquer par la volonté de faire de Guernica « un tableau de deuil ».

Vous pouvez voir le tableau tel qu’il a été exposé puisque cette photo a été prise en   1937   dans   le   pavillon   espagnol   de   l’exposition   universelle.   Pour   bien expliquer un tableau, il est fondamental, lorsqu’on le peut, de l’étudier dans son cadre originel d’exposition.

On peut s’apercevoir que la carrelage de la salle se retrouve dans le tableau et est globalement dans sa continuité. Cet effet permet ainsi à Picasso d’inclure le spectateur dans le tableau, le rendant partie prenante de la scène d’horreur qui s’ouvre devant ses yeux.

à Organisation générale et interprétation succincte

On  peut   dégager   dans   le   tableau   des  lignes   de   forces  qui   organisent l’œuvre.

-principales

Organisation du tableau sous la forme d’un triptyque

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Lampe est le point central, c’est la seule source de lumière du tableau.

-secondaires

Guernica est un tableau «      sonore      »  , les bouches ouvertes symbolisant les cris. Les deux femmes, à droite et à gauche, regardent vers le ciel, d’où vient le malheur (bombardements)

Une impression de désordre.

-le soldat (un républicain) est décapité et son corps est éparpillé. Il peut symboliser   la  lutte  inégale dans cette guerre.  Son épée, brisée,  ne peut rien contre les bombes allemandes. La fleur peut laisser supposer un espoir.

-Le désordre est accentué par la difficile localisation de la scène.

L’Ampoule (qui  peut représenter  le regard de l’artiste qui éclaire,   informe le monde de cet épisode tragique) laisse penser à une scène intérieur alors que la présence de tuiles donne l’impression d’une scène extérieure.

Ce désordre accentue l’idée générale tu tableau : la douleur des civils. A droite, la femme veut rejoindre la lumière de la lampe mais son avancée est contrariée par sa blessure au pied.

-La question du taureau et du cheval

Brièvement, je m’en tiens aux interprétations classiques. Le Taureau symbolise la brutalité (en général) et pas fondamentalement le fascisme.

Le Cheval, criant de douleur car atteint par une lance, symbolise la souffrance des espagnols face à la violence franquiste.

 

à Mise en perspective avec d’autres artistes

On peut essayer de mettre Guernica en perspective avec 2 autres tableaux (que nous verrons au musée du Prado).

-Velasquez : La reddition de Breda

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-Goya : Tres de Mayo

Si chez Velasquez les « victimes » ou les « perdants » sont dignes, honorables, Goya fait de la victime le thème central de son tableau, ce qui est accentué par le   contraste   Noir/Blanc.   La   victime   est   pareille   à   une   figure   christique.   La position des bras expriment la détresse et la souffrance.

De   façon   générale,   dans  Guernica,   on   retrouve   le   thème  du  Massacre   des innocents (enfants massacrés par Hérode, roi des Juifs).

Mise en perspective avec le tableau de Prud’hon (voir power-pont)

La pietà de Guernica : 

Symbole universel de la douleur d’une mère qui perd son enfant.

Bilan : Massacre des Innocents de Poussin (tableau qu’a étudié Picasso dans les années 1920’s). Pour certains historiens de l’art, Guernica est une des dernières représentations évoquant le thème du massacre des inoocents.

Picasso utilise des références classiques, connues de tousàcela lui permet de donner à cet outrage spécifique une dimension universelle

à Guernica , une œuvre inspirée d’un film?

Le photographe espagnol José Luis Alcaine a avancé la thèse selon laquelle Picasso c’était inspiré du film de Frank Borzage Adios a las armas (1932)

Sur   le   fond,  pourquoi  pas.   L’Adieu  aux  armes  est  au  départ  un   roman d’Ernest Hemingway qui se déroule pendant la Première Guerre mondiale sur le front italien. Ce roman est adapté en film par Borzage qui en fait une œuvre anti bellicistes. 

On   sait  par  ailleurs  qu’Hemingway  a  été   journaliste  pendant   la  guerre d’Espagne.

Alcaine a remarqué, par hasard, tous les éléments présents dans Guernica dans une séquence du Film qui dure à peine 5 minutes.

Il   fait   remarquer   par   ailleurs,   que   pour   lui,   l’aspect   sombre   et   quasi monochrome du tableau est une référence directe au film de Borzage. Durant 

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les   « fameuses   5   minutes »,   les   cènes   se   passent   la   nuit.   A   contrario,   le bombardement de Guernica ne s’est pas du tout déroulé la nuit mais en plein après midi.

Regardons les points similaires entre les deux œuvres : 

Alcaine ne pense pas détenir la vérité. Il nous laisse juges d’apprécier la pertinence de son interprétation.

Guernica est encore vu aujourd’hui comme une œuvre fondamentale. Elle sera encore sujette à de nombreuses interprétations futures.

Conclusion« La peinture n'est pas faite pour décorer les appartements, c'est un instrument de guerre, offensif et défensif, contre l'ennemi. »

Guernica et la guerre d’Espagne a provoqué chez Picasso un changement radical dans la conception de la peinture.

Le peintre-artiste s’est mué en peintre militant. Il adhère au Parti communiste en 1944 tout en réussissant à garder sa liberté. Il ne sera jamais un membre actif pro-stalinien.

Il meurt en 1973. 

Guernica,  œuvre  anti-guerre,  dérange encore  de nos   jours.  Quand en 2003, Colin Powell (secrétaire d’Etat de G.W. Bush) présenta à l’ONU ses « preuves » de   la   présence   d’armes   de   destruction  massive   en   Irak,   le   gouvernement américain mit  une toile  bleue devant  la  reproduction du tableau de Picasso, exposée juste à l’entrée du Conseil de sécurité de l’ONU.

Enfin pour  terminer,   il  est   important  d’avoir  à   l’esprit  que  la  guerre  civile  a débouché sur la dictature de Franco qui ne s’est achevée qu’en 1975.

Conformément aux vœux de Picasso, c’est après la chute de la dictature que Guernica a rejoint l’Espagne, en 1981. (Musée Reina Sofia).

Cette période reste très sensible pour la société espagnole actuelle.

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-Aznar, premier ministre (1996-2004), petit fils d’un journaliste proche de Franco

-Zapatero (2004-2011), petits fils de républicain, qui a voulu réhabiliter les victimes de Franco

Donc lorsque vous logerez dans les familles en Espagne, si vous venez à aborder cette   question,   soyez   prudents,   toutes   les   cicatrices   ne   sont   pas   encore refermées.