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ÉDITIONS UNESCO Aux origines de la métallurgie du fer en Afrique Une ancienneté méconnue Afrique de l’Ouest et Afrique centrale Directeur de la publication : Hamady Bocoum

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Aux origines de la métallurgie du fer en Afrique

Une ancienneté méconnueAfrique de l’Ouest et Afrique centrale

Directeur de la publication : Hamady Bocoum

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2 J.F. Jemkur

Dans la même collection :

L’affirmation de l’identité culturelle et la formation de la conscience nationale dansl’Afrique contemporaineLa christianisation de la Russie ancienneContact de civilisations en Martinique et en GuadeloupeDestins croisés : cinq siècles de rencontres avec les AmérindiensLes routes de la soie : patrimoine commun, identités pluriellesSpécificité et dynamique des cultures négro-africainesSpécificités et convergences culturelles dans l’Afrique au sud du SaharaLa chaîne et le lien : une vision de la traite négrièreLes abolitions de l’esclavageL’Afrique entre l’Europe et l’Amérique

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 3

Aux origines de la métallurgie du feren Afrique

Une ancienneté méconnueAfrique de l’Ouest et Afrique centrale

Directeur de la publication : Hamady Bocoum

M é m o i r e d e s p e u p l e s

Édit ions UNESCO

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4 J.F. Jemkur

Les auteurs sont responsables du choix et de la présentation des faits figurant dans cetouvrage ainsi que des opinions qui y sont exprimées, lesquelles ne sont pas nécessaire-ment celles de l’UNESCO et n’engagent pas l’Organisation.Les appellations employées dans cette publication et les données qui y figurent n’impli-quent, de la part de l’UNESCO, aucune prise de position quant au statut juridique despays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontièresou limites.

Publié en 2002 par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture7, place de Fontenoy, 75732 Paris 07 SP

Composé par Desk, F-53940 Saint-BerthevinImprimé par Sagrafic, BarcelonePhoto de couverture : © J. Meniaud, Paris, É. Larose, 1912

ISBN 92-3-203807-2© UNESCO 2002

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 5

Préface

Le Dialogue des cultures et des civilisations comme fondement durable de lapaix est une des plus fécondes intuitions des pères fondateurs de l’UNESCO. Cedialogue constitue un axe central pour, selon l’Acte constitutif de l’UNESCO,« bâtir la paix dans l’esprit des hommes ».

L’urgence de promouvoir le dialogue des cultures et des civilisations s’imposeà l’UNESCO, notamment comme réponse à la théorie sur le clash des civilisa-tions de Samuel Huntington. Le moment est donc venu d’une réflexion critiqueet prospective sur la notion de civilisation qui a trop souvent fait l’objet de mani-pulations intellectuelles et historiques destinées à légitimer toutes sortes dedominations politiques et de discriminations. C’est dans ce contexte que sesituent la signification profonde et la portée du projet des Routes du fer en Afri-que. Ce dont il s’agit, en dernière analyse, c’est, par une approche scientifiquerigoureuse, interdisciplinaire et internationale, de restituer au continent africain,ce marqueur lourd de la civilisation qui lui a été nié jusqu’à présent : le fer.Connaissance scientifique, science, savoir, et savoir-faire, technologie, société,mythe, cosmogonie… tous ces « champs », dans le sens « bourdieusien » duterme, sont structurés et signifiés par le fer. Les enjeux essentiels sont pour l’Afri-que, vérité historique, reconnaissance de son patrimoine et ressourcement à tra-vers ses capacités endogènes de maîtrise et de connaissance du fer.

L’Histoire générale de l’Afrique – contribution majeure de l’UNESCO à unerelecture objective de la mémoire longue du continent –, dans différents chapi-tres relatifs à la métallurgie africaine du fer et aux recherches archéologiquesrécentes, avait cependant étudié de nouveaux sites et fourni de nouvelles data-tions dont l’exploitation renouvelait considérablement nos connaissances surl’ancienneté, la diversité et l’extrême longévité du complexe sidérurgique afri-cain. Lors de sa première session (Abuja, 23-27 février 1995), le Comité scienti-fique international du projet des Routes du fer en Afrique avait recommandé auDirecteur général de l’UNESCO de publier un ouvrage consacré à la métallurgieafricaine du fer et d’y inclure, notamment, le document présenté par le Nigériaà cette réunion (Vingt-cinq siècles de travail du fer au Nigéria).

C’est également pour rendre compte de l’évolution de la recherche que leprésent ouvrage, au-delà des documents d’Abuja, accueille des contributionsultérieures qui participent toutes de l’exigence permanente de mise à jour chère

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6 Préface

à l’UNESCO. Dans cette perspective, les communications présentées sur cethème à l’occasion des rencontres scientifiques organisées au Siège de l’UNESCO,le 12 novembre 1999, pendant la 30e session de sa Conférence générale, parMM. Hamady Bocoum, Pierre de Maret, David Aremu, Gérard Quéchon etBruno Martinelli, ont permis d’élargir considérablement la portée de l’ouvragequi dépasse les frontières du Nigéria et rend aussi compte du développement desrecherches au Niger et, partiellement, en Afrique centrale, voire australe.

À cette série de documents issus de l’UNESCO et dans un souci d’équilibre,nous avons jugé utile d’ajouter deux contributions. En effet, bien que le livre soitconsacré à l’Afrique de l’Ouest et à l’Afrique centrale, des contingences diversesont fait que l’essentiel des contributions recueillies porte sur l’Afrique de l’Ouest,à l’exception notable du brillant tour d’horizon du professeur de Maret qui atraité aussi bien de l’Afrique centrale que de l’Afrique australe. Aussi, le texte duprofesseur Essomba, même s’il ne traite que du seul Cameroun remédie partiel-lement au déséquilibre noté et marque la volonté de l’Organisation de revisitertous les espaces couverts par les Routes du fer en Afrique.

L’ouvrage a enfin été enrichi par la contribution de M. Fluzin, directeur derecherche au CNRS, qui apporte son expertise dans le domaine de l’analyse de lachaîne opératoire technique du fer illustrée par des exemples africains. Son textepermet à la fois de se rendre compte de l’universalité des procédés physico-chi-miques associés au développement de la sidérurgie et de la spécificité, même rela-tive, des observations effectuées sur le continent. À cet égard, l’intérêt quel’UNESCO porte à l’étude de la métallurgie du fer en Afrique, au-delà de ladimension chronologique, dont le réexamen est absolument indispensable, viseégalement à réhabiliter la contribution des métallurgistes africains au patrimoinetechnologique de l’humanité.

En publiant l’ensemble de ces textes, nous sommes cependant conscients dene pas présenter un ouvrage exhaustif. L’urgence de corriger les thèses qui,jusqu’à nos jours, reléguaient l’Afrique subsaharienne au rang de simple récipien-daire d’une technologie aussi importante que celle du fer nous a cependantconduits à aller de l’avant, en gardant à l’esprit l’objectif d’enrichir ce travail ulté-rieurement par de nouvelles contributions portant sur d’autres régions de cecontinent. Il est en effet certain que l’immense champ de recherche ouvert parles Routes du fer en Afrique permettra à l’UNESCO de renforcer son pari stra-tégique sur le dialogue des cultures à travers une meilleure reconnaissance de lacontribution de chaque peuple au patrimoine universel de l’humanité.

Doudou DièneDirecteurDivision du Dialogue interculturelUNESCO

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 7

Sommaire

Préface 5

Introduction générale, Hamady Bocoum 9

Première partieVingt-cinq siècles de travail du fer au Nigéria – Contribution du

Nigéria à la première session du Comité scientifique international (Abuja, 23-27 février 1995)

Introduction 21

Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest, J. F. Jemkur 23

La réduction du fer dans les bas fourneaux — Une industrie vieille de2 500 ans au Nigéria, E. E. Okafor 35

L’impact du fer en Pays yoruba, I. A. Akinjogbin 49

Deuxième partieRencontres sur la métallurgie du fer en Afrique (UNESCO, Paris

12 novembre 1999)

La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés.Apport des études métallographiques, P. Fluzin 59

La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource auservice du développement, H. Bocoum 93

Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) : leur fiabilité,leur signification, G. Quéchon 105

Données chronométriques et chronologiques de la métallurgie à Termit— Matériaux graphiques pour l’étude des âges anciens du fer, A. Person, G. Quéchon 115

L’Afrique centrale : le « savoir-fer », P. de Maret 123

Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional,J.-M. Essomba 133

Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria, D. A. Aremu 147

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8 Sommaire

Au seuil de la métallurgie intensive — Le choix de la combustion lentedans la boucle du Niger (Burkina Faso et Mali), B. Martinelli 165

Bilan des datations des vestiges anciens de la sidérurgie en Afrique— L’enseignement qui s’en dégage, L.-M. Maes-Diop 189

Bibliographie 195

Annexes

• Liste des auteurs 217

• Consultation internationale de spécialistes (Maputo, 10-13 décembre1991) – Extraits du rapport 219

• Membres du Comité scientifique international du projet « Les routesdu fer en Afrique » 225

Index

• Spécialistes 229

• Sites 233

Table des illustrations 239

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 9

Introduction générale

Hamady Bocoum

À l’instigation de la Commission nationale du Mozambique pour l’UNESCO setenait à Maputo, du 10 au 13 décembre 1991, la première réunion consultativedes experts pour le lancement du projet « Les routes du fer en Afrique ». Il s’agis-sait de faire le point sur les connaissances acquises dans ce domaine depuis laparution de l’Histoire générale de l’Afrique et de lancer éventuellement de nouvel-les initiatives en fonction des priorités établies par le Comité scientifique du pro-jet dont les membres étaient dispersés à travers le monde.

Il a fallu, pour arriver à la parution du présent ouvrage, un important travailde coordination que nous devons à Suzanne Diop, responsable du programme1,qui, sous la direction de Doudou Diène, directeur de la Division du dialogueinterculturel de l’UNESCO, s’est posée en véritable « liant » entre des spécialistesaux profils fort différents. Elle a su, avec une rare lucidité, comprendre les préoc-cupations des chercheurs, négocier les copyrights avec les éditeurs et faire trans-crire, dans des conditions parfois difficiles, les communications aux Rencontressur la métallurgie du fer en Afrique tenues au siège de l’UNESCO le12 novembre 1999. Il faut enfin signaler à son actif la coordination du laborieuxtravail de collecte des documents fondateurs du projet, dont le directeur de lapublication avait souhaité la parution. Ces précautions étaient en effet indispen-sables car les contributions qui suivent sont, avant tout, la somme d’efforts par-fois collectifs, parfois solitaires, mais tendant tous vers un objectif commun : unemeilleure connaissance de la sidérurgie africaine. Ainsi, dès l’amorce du projet, ila été certes, comme à l’accoutumée, question de diffusion de données techniques,

1. De 1991 à 1997, Mme Ana Elisa Santana Afonso, actuellement membre du person-nel de l’UNESCO, puis M. Sedate Jobe, membre du Gouvernement de Gambie,avaient successivement, avec l’aide de Mme Marie-Florette Lengue, assuré la miseen œuvre du projet.

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10 Hamady Bocoum

mais on s’est bien vite rendu compte que le plus important n’était pas seulementde savoir d’où venait la sidérurgie africaine ; il s’agissait surtout, et c’est peut-êtreici que se trouvait l’essentiel, de savoir quelles étaient les caractéristiques techni-ques de ce véritable corps de métier que la science moderne pouvait encoreobserver in vivo comme une machine à remonter l’histoire des techniques surplusieurs millénaires. Il s’agissait également de chercher à comprendre quellesconséquences sociales, économiques et culturelles une innovation techniqueaussi impressionnante avait engendrées. Car, plus que toute autre analogie, ellerend compte de l’issue, sans surprise, du choc entre le pot de terre et le pot de fer,tant il est vrai que les sociétés qui ont adopté le fer — ou auxquelles le fer s’estimposé — ont subi de profondes mutations.

À certains égards, les contributions rassemblées dans cet ouvrage tentent,chacune à sa manière, d’apporter une réponse à l’une ou l’autre des questionsposées. Ces réponses nécessairement en devenir, tant est soutenu le rythmeauquel se font les découvertes et les remises en cause, doivent donc être considé-rées comme autant d’étapes qui n’ont de signification que par rapport auxcontextes, parfois déjà anciens, qui présidèrent à leur production. Depuis dix ansen effet, beaucoup d’encre a coulé à propos du fer en Afrique et dans le monde,et bien des schémas diffusionnistes ont succombé sous le poids des évidences. Lespublications parues depuis la mise en place de ce projet rendent parfaitementcompte de cet engouement pour la métallurgie africaine et pour les métiers dufeu en général ; elles polarisent une bonne partie des publications archéologiqueset anthropologiques, témoignant de multiples bouleversements en cours2. Parmiles nombreux chantiers ouverts, certains méritent cependant un regard trèsattentif, car il ne fait pas de doute qu’ils seront à l’origine de points d’inflexionsignificatifs dans la conduite des recherches pour les années à venir. À cet égard,on peut citer la chronologie, l’histoire technique de la sidérurgie et le renouvel-lement du discours anthropologique qui n’a que trop souffert de comparaisonsde mauvais aloi.

Mais de toutes ces directions de recherche, c’est certainement dans ledomaine de la chronologie que les révélations de l’archéologie prennent place, etce dans une ambiance presque toujours suspicieuse. Il y a manifestement, sur ceterrain, une difficulté à envisager ou à accepter une remise en cause d’hypothèsesdiffusionnistes qui, paradoxalement, bien que posées il y a plus d’un demi-siècle,ne trouvent pas encore la moindre confirmation. Il y a peut-être aussi une résis-tance culturelle à accepter l’évidence alors que, à l’inverse, le fait de revisiter laproduction anthropologique soulève moins de passions (McNaughton, 1988 ;

2. À côté des bibliographies de l’UNESCO (Bocoum, 1995 ; Killick, 1995 ; Miller etMaggs, 1998), on note de nombreuses publications récentes qui accompagnent lescontributions publiées dans cet ouvrage et qui rendent compte du dynamisme desrecherches sur la sidérurgie africaine.

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Introduction générale 11

Herbert, 1993 ; Tamari, 1997, par exemple). De ce fait, la chronologie du fer enAfrique continue de tirer, comme un boulet, cet avatar qu’est le diffusionnismeet qui apparaît historiquement comme un instrument de négation des culturesque l’Europe conquérante rencontra sur son chemin. Celles-ci étaient ainsi pres-que partout soit trop jeunes, soit trop rustiques ou encore insuffisamment raffi-nées pour supporter la comparaison.

L’Afrique des ténèbres, cul-de-sac dans les bonnes traditions évolutionnistes,devait tout au reste du monde, cela allait de soi, même si aucun argument crédi-ble, aucune preuve ne venait soutenir la thèse. La plupart des précurseurs del’archéologie africaine ont donc buté sur cet obstacle sans que leurs positionssoient explicitement idéologiques ou objectivement conscientes. Ce fut le cas deMauny (1952, 1953 et 1971), d’Huard (1960, 1964 et 1969), d’Arkell (1966)et même de Shinnie (1971). Aujourd’hui encore, malgré le poids des preuves, lethème des origines du fer en Afrique soulève quelques interrogations qui trans-paraissent dans certaines publications.

C’est dans cette perspective qu’il faut placer les contributions rassembléesdans cet ouvrage qui se compose de deux parties. La première est consacrée pres-que tout entière au Nigéria qui, après la consultation internationale de spécialis-tes organisée par le Mozambique, abrita la première rencontre du Comitéscientifique du projet ; au cours de cette rencontre, la délégation nigériane fit lepoint sur l’état des recherches dans ce pays. C’était avant que des publicationsdécisives ne viennent préciser des questions dont les réponses étaient encore assezprudentes. Mais déjà les bonnes questions étaient posées. L’étude de Jemkur,« Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest », alors que les dernièresdécouvertes de la recherche en Afrique centrale et au Niger, voisin du Nigéria,étaient encore assez peu diffusées, indiquait déjà très clairement les limites objec-tives de toutes les hypothèses diffusionnistes, qu’elles soient nord-africaines ouméroïtiques. Jemkur précisait aussi, et ce n’est pas rien, que la filiation techniqueentre le bronze et le fer n’était pas nécessairement pertinente pour l’Afrique.

Plus technique dans son objet, la synthèse d’Okafor, « La réduction du ferdans les bas fourneaux — Une industrie vieille de 2 500 ans au Nigéria », est unerevue des différents modes opératoires mis au point par les métallurgistes desrégions étudiées sur plus de deux millénaires. C’est une remarquable contribu-tion à l’histoire technique de la sidérurgie nigériane. À ce propos, la divisionadministrative de Nsukka apparaît comme un laboratoire particulièrement pro-pice à l’étude de l’évolution des procédés techniques, en raison de la séquencechronologique très longue couverte par son fonctionnement : plus de deux mil-lénaires et demi, entre 760 av. J.-C. et 1950 apr. J.-C. L’auteur, à la suite d’uneanalyse minutieuse des produits postréduction, parvient de manière pertinente àidentifier trois stades dans le développement des procédés sidérurgiques mis aupoint par les métallurgistes de cette région, procédés qui se sont révélés êtreautant de perfectionnements techniques. Partant du taux de wustite à l’état libre

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12 Hamady Bocoum

dans les scories étudiées, l’auteur constate qu’il était très élevé durant le premierstade et pratiquement absent dans le deuxième, ce qui suggère une améliorationde la maîtrise technique et du rendement. Cette maîtrise ira se renforçant avecl’utilisation de fondants et le perfectionnement de la soufflerie qui permettront,d’une part, de réussir d’excellentes réductions avec les plus basses températurespossibles — entre 1 150 et 1 280 °C — et, d’autre part, de réaliser une économieconsidérable de main-d’œuvre, les fourneaux fonctionnant désormais à induc-tion naturelle. Ces observations sont révélatrices de l’état d’esprit des métallur-gistes qui, loin d’être de simples imitateurs, étaient résolument tournés vers leperfectionnement, ce qui suppose des capacités d’observation, de comparaison,de déduction et d’anticipation, autant de marqueurs de l’esprit scientifique. Faireparler le matériau postréduction conduit ainsi parfois à de surprenantes rencon-tres qui remettent en cause bien des convictions.

Il est tentant, sur ce point, de rompre avec l’ordre chronologique de présen-tation des contributions de cet ouvrage pour introduire celle de Fluzin sur « Lachaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés. Apportdes études métallographiques » qui est un complément naturel du travail d’Oka-for. Fluzin aborde ici la sidérurgie, et la sidérurgie directe en particulier, sous unangle totalement nouveau. L’ingénieur, au contact des dimensions culturelles etethnographiques de la sidérurgie directe, a affiné sa démarche en montrant toutl’intérêt qu’il y a à développer les synergies entre archéologues et ingénieurs dufait de la complexité des questions posées par la sidérurgie ancienne.

Ainsi, la réduction, l’épuration et l’élaboration apparaissent comme troisniveaux techniques qui laissent chacun une signature au cœur du produit final,qu’il soit scorie, objet ou simple battiture. L’archéométrie des vestiges sidérurgi-ques, qui permet l’élaboration et la mise en œuvre des instruments méthodolo-giques indispensables à ce type de recherche, est une discipline en pleineexpansion. Elle permet une discrimination de plus en plus fine des indices deréduction, d’épuration et d’élaboration, et contribue déjà à une meilleure inter-prétation fonctionnelle non seulement des espaces techniques mais également del’efficacité des procédés mis en œuvre par les artisans, compte tenu, d’une part,de la qualité et de la quantité des matières premières disponibles et, d’autre part,des contextes sociopolitiques. Les articles d’Okafor et de Martinelli, dans le pré-sent ouvrage, rendent compte de la fécondité de cette approche, ce qui fait de lacontribution de Fluzin, un véritable « discours de la méthode ».

Après les aspects chronologiques et techniques, le travail d’Akinjogbin, ens’organisant autour de « L’impact du fer en Pays yoruba », achève de donner dela cohérence à la contribution du Nigéria. Celle-ci touche ainsi à tous les aspectsde la sidérurgie, même si, pour des raisons évidentes de moyens et de temps, toutle pays n’a pas pu être couvert. Chez les Yoruba, il semble incontestable que l’uni-fication du pays sous la férule des partisans d’Oduduwa s’explique en très grandepartie par une supériorité militaire due à l’usage du fer, la forge devenant elle-

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Introduction générale 13

même, par la présence d’Ogun Laadin dans le palais de l’ooni, un symbole de laroyauté. Du reste Ogun, dieu du fer, était aussi le dieu tutélaire de la royautéyoruba, ce qui en dit long sur le rôle de la sidérurgie dans cette société où,aujourd’hui encore, tous ceux qui ont un métier lié au fer et, par extension, à lamécanique reconnaissent Ogun comme saint patron. De plus, comme dans denombreuses sociétés africaines, Ogun et la forge, notamment l’enclume, sontinvoqués au cours des épreuves destinées à la manifestation de la vérité.

La deuxième partie de cet ouvrage, introduite sous le thème « Rencontres surla métallurgie du fer en Afrique », est la synthèse des efforts produits parl’UNESCO pour organiser les rencontres du 12 novembre 1999 au cours des-quelles les contributeurs ont revisité les contours chronologiques et le renouvel-lement des textes techniques et sociologiques que les recherches des dix dernièresannées ont apportés à la connaissance du fer en Afrique3.

En Afrique de l’Ouest, notamment au Niger, Quéchon, dans sa contributionintitulée « Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) : leur fiabilité,leur signification », fait le point des recherches conduites aussi bien à Termit qu’àÉgaro et note, avec raison, la forte récurrence des dates qui exclut toute méprisesur les contextes culturels associés aux premiers objets en fer dans ces régions.L’ancienneté des objets en cuivre et en fer remonte à 1 500 ans avant l’ère chré-tienne dans cette région où des installations techniques (fourneaux) ont étédatées de 800 av. J.-C.

Particulièrement didactique dans l’approche chronologique est la contribu-tion commune de Person et Quéchon, « Données chronométriques et chronolo-giques de la métallurgie à Termit — Matériaux graphiques pour l’étude des âgesanciens du fer ». Il s’agit d’une visualisation graphique des paquets de dates dis-ponibles sur les sites les plus anciens de l’âge du fer, qui complète et amplifie lesconclusions de Quéchon. Les auteurs montrent de manière concluante l’homo-généité de la série de Termit où l’on note une forte cohérence dans le recouvre-ment des dates, entre 3300 et 1400 BP, en association avec une remarquablecontinuité culturelle. Toujours dans le domaine chronologique, les données dis-ponibles pour la région de l’Afrique centrale (Clist, 1995 ; de Maret, 1996 ;Woodhouse, 1998) sont aussi anciennes que celles obtenues en Afrique del’Ouest, alors que le Gabon et le Cameroun présentent aussi des configurationsd’une grande ancienneté. La conclusion logique de cette présentation est queni l’Afrique du Nord ni Méroé ne peuvent être retenus comme points de pas-sage pour la transmission du fer en Afrique, lequel, en raison des cohérences

3. Les rencontres du 12 novembre 1999 ont réuni, au siège de l’UNESCO, les auteurssuivants : David Aremu, Hamady Bocoum, Pierre de Maret, Bruno Martinelli,Alain Person et Gérard Quéchon. À ce groupe d’intervenants il faut ajouter ceuxqui, bien que programmés, n’ont pu présenter leur contribution lors de cette ren-contre, mais ont eu l’amabilité de la faire parvenir à l’UNESCO. Il s’agit de Louise-Marie Maes-Diop, de Joseph-Marie Essomba et de Philippe Fluzin.

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14 Hamady Bocoum

chronologiques et culturelles relevées, est d’une ancienneté qui autorise l’hypo-thèse d’une invention autonome.

Toujours dans le domaine de l’exploitation des données chronologiques,Maes-Diop, qui avait déjà entrevu l’autonomie du foyer sidérurgique africaindans un travail d’une grande rigueur méthodologique (Maes-Diop, 1968), tiretout simplement la conséquence de l’accumulation des faits qui ne peut plus êtreattribuée au hasard. Le Niger oriental a produit, à lui seul, près de la moitié desdates antérieures à 1500 av. J.-C., lorsque le reste se répartit entre l’Anatolie,l’Égypte et la Mésopotamie. Juste après le Niger, la région du lac Victoria-Nyanza (Van Grunderbeek, 1982) se situe entre 1400 et 1200 av. J.-C., ce quien fait un foyer quasiment contemporain du Niger oriental, d’où une autonomieprobable. Suivent le Cameroun, la République centrafricaine et le Gabon, bienavant Méroé et le monde carthaginois. Tirant toutes les conséquences d’une tellerépartition et s’appuyant sur la véracité des échanges anciens entre la vallée duNil et le reste de l’Afrique (expéditions d’Herkouf vers 2400 av. J.-C., par exem-ple), l’auteur n’exclut plus la possibilité d’une introduction précoce du fer enÉgypte à partir du Soudan occidental et central par l’Ennedi. Pour Maes-Diop,la moralité de cette inversion de la perspective est que toutes les dates trop rapi-dement rejetées, parce que non conformes à ce que l’on attendait, devraient êtrereprises et les résultats des nouvelles recherches diffusés, ce à quoi le présentouvrage répond en partie.

Dans « La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource auservice du développement », Bocoum fait le point sur les conceptions diffusion-nistes à propos du fer en Afrique, du double point de vue culturel et technique,pour relever qu’aucun des arguments avancés pour contester l’autonomie dufoyer sidérurgique africain ne repose sur un corpus scientifique fiable. Les suspi-cions possibles sur la fiabilité de certaines mesures restent des cas isolés et maîtri-sables tandis qu’en face, il existe des faisceaux convergents de dates et decontextes qui couvrent l’Afrique de l’Ouest et centrale ainsi que la région desGrands Lacs. Il n’existe aucune série comparable de par le monde à cette périodeantique. La cause de l’autonomie du foyer sidérurgique africain semble enten-due, même si des efforts considérables sont encore nécessaires pour en étudier lesaspects techniques, l’héritage contemporain et l’instrumentation ayant servi audéveloppement du continent.

La contribution de De Maret, « L’Afrique centrale : le “savoir-fer” », est uneapproche transversale qui touche aux aspects aussi bien techniques que culturels.En effet, par-delà la finesse du jeu de mots, l’auteur relève une série de lignes decohérence particulièrement forte dans le domaine du parallélisme symbolique,qui balisent les routes du fer à travers le monde et renvoient simplement auxcatégories universelles de l’esprit humain. Il s’agit d’une leçon d’humilité endirection des constructions qui ne voient, au travers des convergences, que lebinôme initiateurs-disciples. Sur le plan technique, l’auteur montre aussi, à tra-

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Introduction générale 15

vers l’exemple des Luba, que les artisans-métallurgistes de ce groupe savaientproduire volontairement et affiner la fonte. Cette révélation est un apportimportant à l’étude de la sidérurgie africaine où, jusqu’à une période récente,l’on admettait, a priori, que les métallurgistes ne savaient pas fondre le fer maisseulement réduire ses oxydes. Il se confirme donc que la sidérurgie africaine nousréserve encore bien des surprises. Mais il est urgent d’agir avant qu’il ne soit troptard.

Comme pour faire écho à cet appel, Essomba, auteur de l’article « Bilan del’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional », fait le point des résultatsacquis dans le sud du Cameroun, dans le cadre d’un programme systématiquealliant inventaire, fouilles, analyse, formation et restitution. Au bout de dix ansde recherche, les résultats sont éloquents, avec la mise en évidence d’un âge dufer daté du premier millénaire avant l’ère chrétienne et des indices de sédentarisa-tion et de production alimentaire, le tout dans une ambiance culturelle au carre-four des migrations bantu. Toutefois, malgré ces acquis, l’auteur note, avec justesse,que beaucoup reste encore à faire pour arriver à une compréhension suffisantedes peuples et des cultures de l’âge du fer au Cameroun central et méridional.

Avec quelques années de décalage, la contribution d’Aremu, « Les routes dufer en Afrique : une contribution du Nigéria », est une actualisation qui confirmela pertinence des données livrées en 1995. Le Nigéria apparaît comme une zoned’activité métallurgique ancienne (VIIIe siècle av. J.-C.) avec une continuitéremarquable car, de nos jours encore, les artisans du fer jouent des rôles actifsdans la vie économique, sociale et culturelle du pays. Toutes les régions du paysrenferment des sites dont certains ont fait l’objet de recherches poussées. Aremuconfirme ainsi, comme le montraient déjà les études précédentes, que le Paysyoruba est une fenêtre de lecture idéale pour comprendre les cultures métallurgi-ques ainsi que les implications sociales, culturelles, économiques et politiques del’activité sidérurgique.

« Au seuil de la métallurgie intensive — Le choix de la combustion lentedans la boucle du Niger (Burkina Faso et Mali) », introduit par Martinelli, est àla fois une illustration du grand potentiel scientifique de la sidérurgie africaine etune mise au point méthodologique. L’auteur montre en quoi les dérives autourdu mythe du forgeron ont constitué un obstacle à l’étude de l’univers, autrementplus complexe, de la sidérurgie africaine qui, aussi longtemps que remontent nosconnaissances, a toujours été et reste un espace d’innovations et de perfectionne-ments. Dans ce domaine, l’Afrique est un laboratoire sans équivalent. Le choixde la combustion lente illustre parfaitement cette assertion, en ce sens que lesmétallurgistes du Yatenga, tout comme leurs homologues du Nigéria (voir lacontribution d’Okafor dans cet ouvrage), en optant pour la combustion lente etl’induction naturelle, ont fait le choix de l’efficacité pratique et de l’économie dela main-d’œuvre qu’aurait nécessitée l’usage d’une soufflerie artificielle. La pers-pective ouverte par Martinelli est, de plus, intéressante par son parti pris théorique

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16 Hamady Bocoum

qui induit que la combustion lente est la résultante de mutations sociales dontelle illustre les enjeux techniques, culturels et politiques.

Au terme de cette introduction, le lecteur se sera rendu compte, nous l’espé-rons, de l’importance du chemin parcouru et du renversement de la perspectivequ’il induit. Il semble en effet établi qu’il n’est plus possible, sur cette question,de continuer à penser que les Africains n’ont été que de simples consommateurs,car, manifestement, il y a eu innovations. Des innovations multiples touchant àtous les aspects de la chaîne opératoire technique (combustion lente, inductionnaturelle, multiplicité des conceptions architecturales et des matériaux supports,etc.). En réalité, aucun continent ne présente autant de variations dans la conduitede la chaîne opératoire de la réduction directe que l’Afrique où les artisans ontpoussé l’ingéniosité jusqu’à produire du fer dans des fourneaux faits de troncs debananiers (Celis, 1991b).

C’est pourquoi, si la revue des textes anciens consacrés à cette question indi-que clairement que leurs auteurs n’ont pas pu éviter le recours commode à la pro-jection diachronique pour poser comme postulat que les Nègres, esclaves desBerbères, ne pouvaient être des initiateurs4, les publications récentes prouventque les bouleversements en cours sont la conséquence d’un renversement radicalde perspective. Les archéologues africains, comme leurs collègues du reste dumonde, sont de plus en plus libérés des pesanteurs idéologiques, et une plusgrande harmonisation des méthodes de travail est en train de créer un contextenouveau fait de rigueur et d’expérimentations de toutes sortes sur la sidérurgieancienne. Des convergences très fortes, reposant sur une meilleure maîtrise desdonnées, autorisent à accréditer l’hypothèse de l’existence d’un ou de plusieursfoyers d’invention de la sidérurgie en Afrique de l’Ouest et du Centre, ainsi quedans la région des Grands Lacs.

En élargissant cette perspective, en rapport avec l’évaluation de la sidérurgiedans le monde, il apparaît que l’histoire technique, où le génie de l’hommeprime sur toute autre considération, est fondamentalement différente de l’his-toire biologique où la force des contingences détermine et encadre les passagesd’un stade à un autre. Sous ce rapport, le diffusionnisme, en tant que seule expli-cation de la vulgarisation du progrès technique, trouve ici ses limites car le pos-tulat de l’origine unique de la sidérurgie et celui, encore plus fonctionnaliste, dupassage obligé par la métallurgie du cuivre pour accéder à celle plus complexe dufer ne reposent, en fait, que sur des hypothèses non vérifiables, de simples fabri-cations supposées logiques et nécessaires. Se libérer de cette forme de scientismeétait assurément le premier tabou à dépasser et c’est bien ce qui semble être encours car, avec le recul, l’enseignement principal de l’histoire de la sidérurgie est

4. En réalité, tout cela relève de l’ambiance culturelle d’une époque où les colonisés, àqui on indiquait la direction à suivre, ne pouvaient être perçus, en général, quecomme des consommateurs (Mauny, 1953).

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Introduction générale 17

d’avoir établi que de par le monde, dans des contextes très différents, des com-munautés humaines ont pu répondre avec efficacité aux questions posées par ledéveloppement technique de leurs sociétés.

Au moment où nous terminons cette introduction, nous ne pouvons nousempêcher d’émettre le souhait que l’UNESCO, en rapport avec la communautéscientifique, maintienne et renforce « Les routes du fer », car les enseignementsprésents et à venir de la sidérurgie africaine contribueront fortement, nous ensommes persuadés, à l’enrichissement du patrimoine scientifique de l’humanité.La petite fenêtre ouverte par ce volume ne fait que lever un coin du voile.

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Première partie

Vingt-cinq siècles de travail du ferau Nigéria

Contribution du Nigéria à la première sessiondu Comité scientifique international(Abuja, 23-27 février 1995)

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 21

Introduction

Cette première partie est divisée en trois grands exposés consacrés à la réductiondu fer au Nigéria pendant près de 3 000 ans.

Le premier exposé résume la genèse de la métallurgie du fer en Afrique avecune référence particulière à la situation qui a prévalu au Nigéria. Il récapitule lesthéories soutenues par les deux écoles de pensée sur la question des origines dutravail du fer en Afrique, à savoir l’école « diffusionniste » et l’école « autochtone ».Vient ensuite un résumé des témoignages obtenus sur le Nigéria, à partir de laculture nok. Des exemples d’activités métallurgiques plus tardives sont égale-ment mis en relief. Ils concernent d’autres régions du nord du Nigéria (depuisDaima et Samaru Ouest). Certains résultent de témoignages ethnographiquesactuels.

Le deuxième exposé décrit en détail les techniques de réduction du fer dansdes bas fourneaux au Nigéria, avec une référence plus particulière à la région deNsukka où subsistent encore de nombreux vestiges. Ces techniques ont été étu-diées au cours de recherches archéologiques et ethnographiques. Les résultats desmicroanalyses et des macroanalyses effectuées sur des résidus de fusion montrentque la réduction du minerai de fer a été pratiquée, dans cette région, de 760 cal.1

av. J.-C. environ, à 1950 cal. apr. J.-C. environ, soit pendant plus de 2 500 ans,ce qui fait de la région de Nsukka l’un des centres les plus anciens de la métallur-gie du fer en Afrique. En outre, ces résultats mettent au jour les constituantsminéraux des scories, leur basicité et leur viscosité, ainsi que les températuresauxquelles fonctionnaient les fourneaux. En dernier lieu, ils indiquent la propor-tion de fer extraite de ces anciens résidus de minerai.

Le troisième exposé traite de l’impact sociopolitique des techniques du fer auNigéria en prenant cette fois comme exemple le Pays yoruba. Chacun comprendra,

1. Cal. = date calibrée

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22 Introduction

nous l’espérons, que cet impact sociopolitique plus particulièrement mis enlumière dans le Pays yoruba concerne également, mutatis mutandis, toutes lesautres régions du Nigéria.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 23

Les débuts de la métallurgie du feren Afrique de l’Ouest

Joseph Fazing Jemkur

Origine et expansion

Comparée à d’autres régions du continent africain, c’est incontestablement l’Afri-que de l’Ouest qui, de l’époque du Mungo Park (1813) à nos jours, a fait l’objetdes recherches ethnographiques et archéologiques les plus nombreuses et les plusfructueuses tant de la part des chercheurs européens que de celle des chercheursafricains. Une foule de données concernant les techniques métallurgiques del’Ouest africain ont été réunies (Jemkur, 1989 ; Okafor, 1992a et b ; Tylecote,1975). Les chercheurs considèrent depuis longtemps la région comme une zoneparticulièrement propice à la métallurgie du fer (Lhote, 1952, p. 270). Toutefois,jusqu’à la reconnaissance de la culture nok au centre du Nigéria, il n’existait quetrès peu d’informations archéologiques à partir desquelles on pouvait établir unequelconque échelle chronologique pour cette industrie, même si l’on supposaitque la production de fer en Afrique de l’Ouest remontait à des temps très anciens.

Les figurines de terre cuite retrouvées dans la vallée de Nok étaient mélan-gées, dans les dépôts alluviaux, à d’autres matériaux tels que des haches en pierrepolie et des fragments de fer (Fagg, 1969). Des datations ultérieures de cesdépôts au carbone 14 (14C) font remonter ces matériaux à une époque compriseentre 500 av. J.-C. et 200 apr. J.-C. (Barendson et al., 1965). Le contexte archéo-logique dans lequel ils ont été découverts était, bien entendu, discutable, car iln’était pas avéré qu’ils appartenaient à la même période tant qu’un lien entre euxn’était pas établi in situ. C’est ce qui arriva en 1960, avec les fouilles de Taruga etla découverte de fer, de terres cuites nok et de débris d’objets domestiques bienassociés, datés de la fin du premier millénaire av. J.-C. (Fagg, 1969). Il est certainque cette région (Fagg, 1969 ; Tylecote, 1975) produisait son propre fer depuisau moins le IVe siècle av. J.-C., les dates 400 ± 140, ± 100, 280 ± 120, 210 ± 95av. J.-C. ayant marqué des étapes déterminantes.

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Ces dates précoces placent sans aucun doute (jusqu’aux datations d’Opi,Okafor, 1991) les fourneaux de réduction du fer de Taruga parmi les plusanciens découverts en Afrique de l’Ouest. Certains spécialistes de la question yont vu la preuve d’une invention indépendante de la métallurgie du fer enAfrique de l’Ouest (Davies, 1966 ; Maes-Diop, 1968 ; Andah, 1979). Maisd’autres, qui en ont étudié les aspects techniques, ont fait valoir qu’une telleinvention était peu probable puisque, à l’exception de la Mauritanie, l’Afrique del’Ouest n’avait pas connu d’âge du bronze. Partout ailleurs dans l’Afrique subsa-harienne, l’utilisation du fer succède à l’utilisation de la pierre pour l’outillage,les ustensiles ménagers et les armes. En l’absence d’une métallurgie intermédiairedu cuivre et du bronze, l’on voit mal comment, à la fin de l’âge de la pierre, cer-tains peuples auraient pu découvrir par eux-mêmes l’utilisation du fer et la maî-triser si rapidement sans aucune influence extérieure (Coghlan, 1941 ; Shinnie,1967 et 1971 ; Tylecote, 1975b). Certains soutiennent néanmoins que celaaurait pu se produire accidentellement, du fait des températures obtenues lors dela cuisson des poteries et de l’inclusion accidentelle de minerai de fer dans le feu.Mais dans une telle éventualité, il n’y aurait certainement pas eu productiond’une loupe de fer puisque les températures de cuisson de la poterie ne sont com-prises qu’entre 600 et 800 °C, et que l’on n’utilise, pour les atteindre, ni charbonde bois, ni fourneau, ni ventilation (Coghlan, 1942).

Désormais, les archéologues qui travaillent dans la région du Nigéria s’inté-ressent moins à la théorie diffusionniste qu’au degré exact de perfectionnementde la métallurgie dans un groupe donné. L’étude des méthodes de production dufer de diverses sociétés peut permettre de mieux préciser certaines similitudes etcontacts culturels à travers tout le continent africain. Toutefois, aux fins duprésent article, nous présentons ci-après les arguments pour et contre la diffusionde la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest et en Afrique subsaharienne engénéral (Jemkur, 1992).

Les liens avec Méroé

Ce sont les Calybes d’Arménie, sujets de l’Empire hittite, qui auraient découvertle fer et l’acier vers la fin de la première moitié du deuxième millénaire av. J.-C.et la connaissance du travail du fer dans l’ensemble de l’Europe et de l’Asie occi-dentale remonte, en dernière analyse, à cette source. Dès le Ier siècle av. J.-C., cesavoir s’était plus ou moins généralisé à l’ensemble du Sud-Ouest asiatique(Hawkes et Woolley, 1963, p. 564). En revanche, il fallut beaucoup plus long-temps pour qu’il se propage en Égypte. « Avant le VIIe siècle av. J.-C., le fer sem-ble avoir été rare en Égypte et utilisé essentiellement à des fins magiques ouornementales » (Trigger, 1969, p. 34). Ce n’est qu’à l’époque saïte (665-525 av. J.-C.) que la réduction du minerai de fer est attestée en Égypte. Ce métal

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est ensuite couramment utilisé dans le pays au Ve siècle av. J.-C. (Trigger, 1969,p. 36).

Dans la partie du Soudan drainée par le Nil, le travail du fer semble avoirdébuté sous le règne d’Harsiyotef, qui gouverna la région de 416 à 398 av. J.-C.(Trigger, 1969, p. 43 ; Arkell, 1966, p. 452). De 450 av. J.-C. jusqu’au IVe siècleapr. J.-C., il existe pour Méroé une séquence archéologique complète, reposantessentiellement sur les fouilles effectuées dans des nécropoles royales. Les objetsen fer datés d’environ 750 à 400 av. J.-C. sont plutôt rares et de petite taille. Surles 1 550 sépultures de Napata antérieures à 400 av. J.-C., 18 seulement contien-nent des objets en fer (Arkell, 1966, p. 452). Trigger (1969, p. 42) pense que laprésence de tels objets à cette époque témoigne d’échanges commerciaux car iln’existe aucun indice concret de production de fer. Ce n’est qu’après la chute dupouvoir méroïtique, en 350 apr. J.-C., que les objets changent de nature. Lesbijoux en fer deviennent rares. De nombreux objets lourds apparaissent pour lapremière fois, tandis que le nombre de types d’objets à caractère utilitaire aug-mente. L’ensemble des outils découverts comprend des couteaux, des épées, desmors pour chevaux, des haches, des houes et des marteaux. Un grand nombre deces objets sont emboîtés, contrairement aux outils pédonculés de la périodeméroïtique. Il semblerait que ce soit seulement après la chute du royaume deMéroé que la métallurgie du fer se soit orientée vers la fabrication d’outils et laproduction à grande échelle, entraînant une augmentation de la productivité(Trigger, 1969, p. 49). Trigger émet quelques réserves quant à cette interpréta-tion, car les fouilles portent presque uniquement sur des sépultures et non surdes sites habités. La représentativité des objets trouvés dans les tombeaux reste àdéterminer car ils peuvent être le reflet d’une panoplie d’outils ordinaire.

D’après une publication de Phillipson (1970, p. 5), un morceau de charbonde bois trouvé en même temps que des fragments et scories de fer, ainsi que desdébris de poteries à la base du plus grand tas de scories, ou « Birmingham 97 »,remonterait à 514 ± 73 av. J.-C. À son avis, c’est à cette époque que les Méroïtescommencèrent à produire du fer. D’après Tylecote (1975b, p. 5), le premier âgedu fer à Méroé est représenté par de petits fourneaux bruns, retrouvés immédia-tement au-dessus d’un niveau daté de 280 ± 120 av. J.-C., qui diffèrent tout àfait des fourneaux à cuve de Taruga. Les conclusions de Trigger sur la successiondes techniques de la métallurgie du fer à Méroé, de la datation du travail du ferà Taruga et à « Birmingham 97 », ajoutées aux différences entre les fourneaux deTaruga et les premiers fourneaux méroïtiques utilisés pour réduire le minerai defer, rendent improbable le fait que Méroé ait été un centre de diffusion de lamétallurgie du fer vers l’Afrique de l’Ouest. En fait, Shinnie (1967, p. 14, et1971, p. 99) estime que la culture méroïtique était exclusivement tournée vers leNil puisque l’on ne retrouve pas de matériaux méroïtiques plus à l’ouest que lesrives du ce fleuve. En outre, d’après Trigger (1969, p. 26), la première preuved’un contact entre les cultures nilotiques et du Darfur date de 550 apr. J.-C.

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Enfin, Daima est l’un des rares sites archéologiques du Nigéria assez large-ment décrit dans des publications. Il se trouve à proximité du corridor formé parle lac Tchad et les monts de Mandara, par lequel des contacts est-ouest se sontsans doute produits dans la région soudanaise. À ce jour, Daima est le seul siteconnu au Nigéria à couvrir la transition entre l’utilisation de la technique dela pierre — et de l’os — et la métallurgie du fer. Les couches archéologiquesqui y sont associées ont été datées comme suit : 980 ± 650 apr. J.-C. et 450± 95 av. J.-C (Fagan, 1967, p. 518 ; Shaw, 1969 ; Connah, 1981). L’abondancedes assemblages de pierre polie qui y ont été retrouvés indique une structure néo-lithique. Dans cette séquence, le morceau de fer le plus ancien a été découvert àune profondeur de 6,5 m et devrait donc remonter au Ve siècle apr. J.-C. Troisautres datations ont été publiées ultérieurement (Fagan, 1969, p. 153 ; Connah,1981) : 1060 ± 90 apr. J.-C., 630 ± 190 apr. J.-C. et 570 ± 100 av. J.-C. En sefondant sur l’avant-dernière date, Connah a révisé l’estimation qu’il avait faite del’introduction d’objets en fer dans la région, la repoussant du Ier au Ve siècleapr. J.-C. Daniels a ultérieurement effectué une analyse statistique de l’ensembledes dates concernant le site et en a conclu que le fer y aurait été introduit entrele Ve et le VIe siècle apr. J.-C. (Willett, 1971, p. 355-356).

Si la métallurgie du fer était vraiment arrivée en Afrique de l’Ouest à partirde Méroé, elle aurait dû transiter par Daima. Dans ce cas, il devrait y avoir destémoignages de l’utilisation du fer à Daima à une date très antérieure à celle dusite de Taruga, appartenant à la culture nok, et qui se trouve à près de1 000 kilomètres au sud-ouest. Or, aucun indice ne va actuellement dans ce sens.En fait, les éléments disponibles semblent indiquer que l’on pratiquait la réduc-tion du fer à Taruga quelque 600 à 800 ans avant que ce dernier fasse son appa-rition à Daima. Ce dernier point et le fait qu’à Méroé les scories étaient couléesà la romaine (Tylecote, 1975) sembleraient indiquer que, contrairement à ce quel’on a souvent suggéré, il n’y a eu de diffusion vers les régions appartenant à laculture nok ni d’objets en fer ni de la technique du travail du fer de Méroé(Clark, 1969).

Les liens avec Carthage

D’aucuns considèrent que la métallurgie du fer aurait suivi une autre route, par-tant de Carthage et traversant le Sahara, pour atteindre l’Afrique de l’Ouest(Mauny, 1952, 1971 et 1978 ; Shaw, 1969, 1978 et 1981, entre autres). Car-thage a été fondée vers la fin du IXe siècle av. J.-C. par les Phéniciens, qui avaientdéjà établi des comptoirs sur la côte méditerranéenne de l’Afrique à partir de1100 av. J.-C. environ. Les premiers objets en fer apparaissent dans leurs tombesdès le VIe siècle av. J.-C. et, dès le IIIe siècle av. J.-C., Carthage était devenue unimportant centre de métallurgie et de commerce du fer. L’influence carthaginoise

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s’est fortement exercée sur la côte d’Afrique du Nord, le long du golfe de Gabès,là où, à l’intérieur des terres, vivait la puissante tribu des Garamantes. Les Car-thaginois ont également exploré la côte africaine à l’ouest du détroit de Gibraltaret l’on pense que c’est par le biais de leurs contacts avec les autochtones que lestechniques du travail du fer se sont progressivement répandues à travers le Saharajusqu’aux centres situés en Afrique de l’Ouest (Mauny, 1952 ; Shaw, 1969).

La connaissance des techniques métallurgiques pourrait s’être propagée le longde deux routes qui traversent le Sahara et atteignent l’Afrique de l’Ouest. La pre-mière part du golfe de Syrte pour rejoindre la boucle du Niger à Gao ; elle auraitprobablement trouvé son point de départ dans la région sous influence carthagi-noise, la connaissance du fer arrivant alors jusqu’au Nigéria par l’intermédiaire desGaramantes qui longeaient les rives du fleuve avec leurs chariots. La seconde routepart du sud du Maroc et traverse la Mauritanie en longeant l’escarpement desdahrs Tichitt et Oualata jusqu’au cours moyen du Niger. Des peintures rupestresdécouvertes le long de ces deux routes attestent que des chariots tirés par des che-vaux ont emprunté ces itinéraires plus de 1 000 ans av. J.-C. (Mauny, 1971).

Il a été déduit de ce qui précède que, après avoir appris la métallurgie auprèsdes Carthaginois, les peuples du désert de langue berbère l’ont eux-mêmes trans-mise aux peuples du Sud parcourant ces routes (Mauny, 1971, p. 66-87). Il res-sort des recherches archéologiques récentes menées en Afrique de l’Ouest pourdéterminer à quel moment le travail des métaux est apparu dans cette région queces explications sont beaucoup trop simplistes. On sait déjà, par les travaux deLambert dans le sud-ouest du Sahara, que le minerai de cuivre était extrait et tra-vaillé aux environs d’Akjoujt, en Mauritanie, au milieu du premier millénaireav. J.-C., voire avant (Lambert, 1971, p. 9-12). Des indices découverts il y a peudans d’autres régions de l’Afrique de l’Ouest, en particulier au Niger, conduisentégalement à penser que le cuivre y est apparu avant le fer. On aurait daté aucarbone 14 des ouvrages en cuivre remontant au premier millénaire av. J.-C., etmême plus tôt, dans les régions de Sekkiret et d’Azelik au Niger (Calvocoressi,1971). Il semblerait donc qu’au Niger, comme dans la région d’Akjoujt, en Mau-ritanie, le minerai de cuivre ait été exploité dès le début du premier millénaireav. J.-C. Les techniques métallurgiques pratiquées dans la région d’Azelikauraient donc pu, en quelque sorte, préparer à l’apprentissage des processus pluscomplexes de réduction du minerai de fer.

Des éléments attestant l’existence du premier âge du fer au Nigéria ont éga-lement été signalés. Trois datations au carbone 14 indiquent l’utilisationancienne du fer dans la région du massif de Termit, au sud-est du Niger, à la findu premier millénaire av. J.-C. (Posnansky et MacIntosh, 1979, p. 184). Selontrois autres datations au carbone 14, effectuées dans les mêmes régions du Niger,la métallurgie du fer remonterait aux trois derniers siècles av. J.-C. à Teguefn’Agar. Ces dates semblent confirmer l’opinion selon laquelle elle serait arrivéeen Afrique de l’Ouest par le nord.

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Enfin, des datations au carbone 14 du premier âge du fer ont également étésignalées dans la zone de savane et, plus particulièrement, à Jenne-Jeno dans ledelta intérieur du Niger, au Mali. Ce site a fait l’objet de fouilles en 1977(McIntosh et McIntosh, 1981, p. 1-22). On y a découvert des preuves de l’utili-sation et de la fabrication du fer par la population qui l’occupait au IIIe siècleav. J.-C. Les niveaux les plus anciens contenaient du fer et des scories, ainsi quede grandes quantités de débris d’objets utilitaires. Six datations au carbone 14ont été effectuées sur le site, dont deux — 210 av. J.-C. ± 50 ans —, qui concer-naient les niveaux situés à la base, contenaient du fer et des scories. La présencede scories à Jenne-Jeno a conduit les chercheurs à conclure que le minerai devaitavoir été importé dans la région puisque le site se trouve dans une plaine alluvialedépourvue de pierres et de fer. Celui-ci pourrait y avoir été transporté via la routedu Sahara occidental, ce qui indiquerait que les régions du delta du Niger onttrès tôt participé à des échanges interrégionaux.

Les éléments actuellement disponibles semblent donc indiquer que le cuivreétait au moins travaillé dans deux centres importants au sud du Sahara, en Mau-ritanie et au Niger, au premier millénaire av. J.-C. Il est possible que le centremauritanien se soit développé grâce à une technique importée de la région médi-terranéenne par les Berbères libyens, à l’initiative des Phéniciens et des Carthagi-nois qui cherchaient de nouvelles mines à exploiter dans le sud du Maroc(Mauny, 1978). Le même processus a également pu s’être produit dans le Saharacentral, à partir de Carthage vers la boucle du Niger, à proximité de Gao, en don-nant naissance, au Mali et au Nigéria, à une métallurgie du fer plus tardive maisappartenant encore au « premier âge du fer ». Par ailleurs, le centre de la métal-lurgie du cuivre de la région d’Azelik, au Niger, pourrait bien avoir facilité la dif-fusion du fer au Nigéria, ce qui suggère une deuxième route de diffusionpossible. D’après la datation du travail du fer à Taruga et d’après celles, récentes,effectuées au Niger et dans d’autres parties du Sahara, la route transsaharienneest probablement, mais pas nécessairement, plus plausible que celle passant parMéroé. La question de la façon exacte dont la métallurgie du fer est apparue dansle sud du Sahara n’est pas encore éclaircie. Les nouveaux éléments qui tendent àprouver que le travail du cuivre a précédé celui du fer au Niger pourraient serévéler déterminants, mais nous sommes encore loin de comprendre le contextesocio-économique qui a précipité cette transformation technologique décisive.

Les liens locaux

Il apparaît maintenant de plus en plus clairement que la théorie diffusionnistetelle qu’elle est présentée ci-dessus est beaucoup trop simpliste et, dans la plupartdes cas, dénuée de preuves concrètes pour l’étayer. À la lumière des travauxarchéologiques récemment entrepris sur ce sujet en Afrique subsaharienne, appa-

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 29

raît aujourd’hui une école de pensée selon laquelle la métallurgie du fer peutavoir débuté de façon indépendante en Afrique de l’Ouest (et, à dire vrai, end’autres endroits de l’Afrique subsaharienne). Les auteurs de cette théorie(Lhote, 1966 ; Maes-Diop, 1968 ; Trigger, 1969 ; Schmidt et Avery, 1978 ; Rus-tad, 1980 ; Andah, 1979 et 1981) ont souligné les nombreuses lacunes de lathèse diffusionniste. Par exemple, certains de ces savants (Maes-Diop, 1968 ;Andah, 1979) s’accordent sur le fait que la réduction du minerai de fer ne néces-site pas une température très élevée (de 1 100 à 1 300 °C) et que, par consé-quent, la métallurgie du fer peut s’être développée directement à partir destechniques de cuisson de la poterie (Okafor, 1992a et b). Le fait qu’aucun élé-ment n’atteste l’antériorité de la connaissance de la métallurgie sur celle de lamétallurgie du fer dans les régions appartenant à la culture nok et opi ne peutêtre utilisé comme argument pour réfuter la théorie du développement local dela technique du travail du fer dans la région. Il a également été observé que lalatérite ferrugineuse est largement répandue en Afrique de l’Ouest, soit qu’elleaffleure à la surface du sol, soit qu’elle forme des gisements souterrains quiauraient pu être connus et exploités il y a longtemps (Okafor, 1992a). Il est doncpossible qu’un âge du fer se soit développé sans avoir été précédé par un âge ducuivre et du bronze. Les informations recueillies sur le terrain laissent à penserque la métallurgie du fer était largement répandue dans de nombreuses régionsd’Afrique. Les quelques dates disponibles à cet égard pour certaines régions del’Afrique subsaharienne sont aussi anciennes, voire plus anciennes, que cellesobtenues pour les régions « donatrices ». Par exemple, en dehors de la région dela culture nok pour laquelle on sait que la métallurgie du fer a été pratiquée aumoins dès le IVe ou le Ve siècle av. J.-C., d’autres datations anciennes, remontantau Ve siècle environ av. J.-C. ont été obtenues en Éthiopie, à Matara, ainsi quedans la région bahaya du lac Victoria, où la datation au carbone 14 semble indi-quer qu’elle existait en 500 av. J.-C. (Schmidt et Avery, 1978).

Il a également été observé que l’argument en faveur d’une diffusion à partirde l’Afrique du Nord repose uniquement sur la datation des cultures phéni-cienne et carthaginoise dans cette région. Or, aucun matériau provenant de Car-thage ou d’Utique, ni aucun site comportant des matériaux phéniciens, n’estantérieur au VIIIe siècle av. J.-C. (Warmington, 1969). Bien que les Carthaginoisaient produit à grande échelle des armures dès le IIIe siècle av. J.-C., selon Mauny(1971), « c’est seulement à partir du VIe siècle av. J.-C. que le fer apparaît dansleurs tombes ; à partir du IIIe siècle, il remplace nettement le bronze commematériau d’usage courant ». Les 100 à 200 ans qui séparent la présence de latechnique du travail du fer à Carthage de son apparition dans la région apparte-nant à la culture nok rendent sa diffusion possible mais néanmoins improbableen raison de la brièveté de cet intervalle (Diop, 1973 ; Andah, 1979).

Étant donné que nous manquons actuellement d’indices concrets pour daterles « débuts » de la métallurgie du fer dans la plupart des régions de l’Afrique

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30 Joseph Fazing Jemkur

subsaharienne et que nous sommes conscients de ne savoir encore que peu dechose sur l’époque et la façon dont elle a commencé en Afrique subsaharienne, ilnous est difficile de soutenir à tout prix la théorie selon laquelle il s’agit d’unsavoir-faire exogène.

Le début de la métallurgie du fer au Nigéria

L’on s’est aperçu que les vestiges de fourneaux de Taruga appartenaient à desfourneaux à cuve où l’on ne pratiquait pas la coulée des scories fondues (Tyle-cote, 1975a et b). Tous possédaient des cuves aux fines parois de boue surplom-bant des fosses peu profondes. Tylecote a estimé que la hauteur totale desfourneaux variait de 1 à 2 mètres ou davantage pour les plus grands, qu’ils étaientindépendants les uns des autres car l’on a relevé la présence de plusieurs tuyèresà proximité de leur base (Tylecote, 1975b, p. 5). Ces dernières avaient un diamè-tre de 20 à 30 centimètres environ mais étaient plus courtes que celles des four-neaux méroïtiques. Tylecote a établi une distinction entre les fourneaux deTaruga, qui sont à fosse, et ceux où l’on coule les scories fondues. Comme il avaitauparavant laissé entendre que la coulée constituait un progrès technique (Tyle-cote, 1965, p. 193), on peut considérer que les fourneaux de Taruga représententl’une des premières étapes du développement de la métallurgie du fer en Afriquede l’Ouest. On les considère comme appartenant au type B. De par leur datationentre le Ve et le IIIe siècle av. J.-C., ils sont contemporains de ceux retrouvés dansles fouilles méroïtiques. Tylecote en a conclu que le Nigéria ne tenait manifeste-ment pas sa technique du travail du fer du Soudan mais d’ailleurs (Tylecote,1975b, p. 4).

Il y a peu de temps encore, même les dates définies pour la zone de culturenok semblaient sujettes à caution par rapport au reste des indices archéologiquesrassemblés, car il semblait exister un long hiatus entre la tradition nok du fer etles témoignages ultérieurs, au Nigéria ou ailleurs (fin du premier millénaire ouaprès). Comme on l’a toutefois fait observer précédemment, les premières piècesde fer provenant du tertre de Daima, au nord-est du Nigéria, ont été datées de630 ± 190 apr. J.-C. (Connah, 1971, p. 71). Les vestiges de fourneaux de réduc-tion du fer exhumés sur la colline de Dala, dans la ville de Kano, sont eux aussidatés de 635 ± 95 apr. J.-C. (Willett 1971, p. 368). Cette date semble corres-pondre étroitement à celle des sites de Daima et de Zaria dans la vallée deKubanni. On a trouvé dans cette dernière, à Samaru Ouest, des vestiges de plu-sieurs fourneaux datés de 685 ± 80 apr. J.-C., 750 ± 155 apr. J.-C., 930 ± 95apr. J.-C. et 940 ± 75 apr. J.-C. (Sutton, 1976, p. 18). Ces ruines étaient accom-pagnées de tas de scories, de fragments de tuyères et de ce qui semblait être desfosses de coulée de scories. L’un des fourneaux a été complètement exhumé avantd’être emporté pour être exposé. Il possédait une cuve cylindrique ressemblant à

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 31

un baril d’environ 1 mètre de haut et de moins de 1 mètre de diamètre (Sutton,1976, p. 4). Une autre caractéristique de ces fourneaux était une buse cylindriquesortant d’environ 20 centimètres de la base du mur. D’un calibre de 35 centi-mètres de haut et de 25 centimètres de large, cette buse était inclinée vers le basen direction d’une fosse à scories. Sutton a suggéré qu’elle pouvait avoir servi deconduit d’admission des orifices des tuyères dans le reste du fourneau.

Sutton a identifié deux types de tuyères dans la région : les unes, en prove-nance de Samaru Ouest, étaient coniques et massives, d’un diamètre de5 centimètres à une extrémité et de 12 centimètres à l’autre, leur diamètre exté-rieur pouvant atteindre 30 centimètres. Elles contrastaient avec les tuyères plusfines trouvées à Tsauni Nord et à Makera (Sutton, 1976, p. 5), d’un diamètre de3 à 5 centimètres et de 10 centimètres seulement au maximum à l’extérieur.Étant donné que les fourneaux de Samaru avaient environ 1 mètre de hauteur,ils pourraient bien avoir appartenu au type C et l’on pourrait, par conséquent,penser qu’ils étaient associés à des tuyères massives. Si toutefois la distinctionentre les deux types de tuyères représente à la fois un changement dans le tempset une évolution technique, alors les indices provenant de Samaru et de Tarugapourraient fournir des preuves de l’évolution progressive des fourneaux d’Afri-que de l’Ouest du type B vers le type C.

De récentes études ethnographiques et historiques sur les techniques métal-lurgiques dans les États actuels de Kaduna et du Plateau tendent à confirmer cequi précède. On y observe en effet très nettement la présence de fourneaux équi-pés de tuyères massives (Jemkur, 1989), très semblables à ceux décrits à SamaruOuest par exemple. Ce type de fourneau (indépendant) est largement répandudans le sud de l’État de Kaduna où il existe des centaines de vestiges de ce genre.À en juger par le nombre de fourneaux et la forte concentration de déchets, il estévident que la région a connu dans un passé récent une activité métallurgique àgrande échelle. Les fourneaux indépendants que l’on y rencontre sont toujoursdans un mauvais état de conservation et se trouvent le plus souvent à l’air libre,dans des vallées sablonneuses proches d’une rivière. Aujourd’hui, on y distingueà peine, au niveau du sol, des cercles ne dépassant pas, pour la plupart, de 10 à40 centimètres de haut. Dans certains endroits, ils couvrent une très large éten-due de terrain et sont généralement regroupés par 6 ou 8. Cette configuration estcommune à de nombreuses régions du Nord du Nigéria et en particulier auxÉtats de Bauchi, du Plateau, de Kano, de Katsina et de Sokoto.

Les fourneaux encastrés constituent le second type de fourneaux de la région.Ils sont mieux préservés puisque la plupart d’entre eux sont presque intacts. Ilsétaient construits le long des berges des cours d’eau, l’arrière étant naturellementformé par la berge, parfois légèrement creusée, et l’avant par un mur ventru.Cette préservation quasi parfaite s’explique par l’absence de l’activité animale ethumaine, à l’exception de celle des rongeurs, et de l’action de l’érosion. Ces four-neaux mesuraient généralement 1 mètre de haut et chacun d’eux comportait

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deux ouvertures. À de légères différences près dans les détails, les procédés utiliséset le matériel de réduction du minerai collecté sur le terrain semblent être iden-tiques dans la majeure partie de la zone de savane du Nigéria. On trouvera ci-après la description des procédés gardés en mémoire par les anciens de KurminMazuga, de Nok et d’Ashafa (tous dans le sud de l’État de Kaduna). KurminMazuga et Ashafa sont habités par le peuple ikulu (bakulu), alors que Nok esthabité par les Jaba (Ham), groupes ethniques qui ont la réputation d’être desexperts en métallurgie dans la région et auxquels la plupart des autres groupesethniques achètent du fer malléable.

Le fer était généralement produit par réduction du minerai, lequel provenaitessentiellement de mines peu profondes qui, cependant, ont pu parfois atteindreplus de 10 mètres de profondeur. On localisait le minerai riche en fer en obser-vant le type de sable déposé par les eaux de ruissellement le long des chemins,dans les fermes, le long des cours d’eau, etc. Le minerai de fer, qui se présentaitgénéralement sous la forme d’une roche relativement tendre, était concassémanuellement à l’aide d’outils de pierre. Le minerai écrasé était alors mélangéavec du charbon de bois qui fournissait la chaleur nécessaire à la réductiondirecte. Ce charbon de bois était habituellement fabriqué à partir de bois durcomme l’acacia ou le bishiya (chez les Hawsa), espèces que l’on trouve couram-ment dans la région. Le mélange de minerai et de charbon de bois était alorsversé dans les fourneaux de réduction où il était allumé. Les fourneaux étaientventilés par la base. Une fois que le fourneau avait atteint une température éle-vée, le métal fondu s’écoulait doucement par un trou pratiqué dans la paroi dufourneau jusqu’au moule situé dans le sol. Celui-ci était une simple cavité creu-sée en dessous du fourneau. On laissait alors le fer fondu se solidifier sous formede lingot (fer malléable) qui servait ensuite à fabriquer divers articles comme dumatériel et des outils agricoles. Les instruments utilisés pour le travailler et letransformer en outils étaient tous en granit solide jusqu’à l’arrivée des Européensqui en introduisirent de plus perfectionnés. Les différentes étapes de la réductiondu minerai de fer s’accompagnaient de nombreux rituels chez les Ikulu et lesJaba. Les préparatifs exigeaient que l’on tienne compte de croyances selon les-quelles certaines personnes auraient été susceptibles d’affecter spirituellement leprocessus. Ces peuples préféraient construire leurs fourneaux sur les berges descours d’eau. Aux dires de l’un de leurs anciens : « Notre peuple fondait le fer prèsdes rivières et obtenait un métal différent de celui des Hawsa. Ces derniers cons-truisaient leurs fourneaux comme des fourneaux à briques et ne les édifiaient passur les berges des cours d’eau. »

Il ressort de nos recherches que dans la zone de savane du nord du Nigériaet, en fait, dans la plupart des régions du Nigéria et de l’Afrique de l’Ouest engénéral, la métallurgie du fer était largement répandue et a prospéré pendantplus de 2 500 ans avant l’arrivée des Européens, contrairement à ce que préten-dent certains des premiers ouvrages européens selon lesquels les Africains de

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l’Ouest ne connaissaient pas le fer avant l’arrivée des Blancs (McPhee, 1926). Leslatérites de la plupart des régions de l’Afrique de l’Ouest se prêtaient à l’exploita-tion du fer dans le passé, comme en témoignent les vestiges métallurgiques quel’on peut observer. Le fer avait une grande importance économique dans cesrégions ; il était largement commercialisé jusque dans des contrées lointaines. Parexemple, selon un entretien qui s’est déroulé à Daura (État de Katsina), la réduc-tion directe a été pratiquée dans la région jusque dans les années 1940, époqueoù il a fallu la stopper de force, alors qu’auparavant Daura vendait des quantitésconsidérables de fer au Territoire français.

L’instauration de l’autorité britannique au Nigéria mit fin à cette industrielocale autrefois prospère. Partout les habitants furent contraints d’abandonnerl’art de la métallurgie traditionnelle et leur production fut remplacée par du fermoins coûteux importé d’Europe. L’arrivée des Britanniques a réussi à détruireles fondements industriels tellement nécessaires à notre développement culturelet technique. En effet, le niveau de développement technique influe considéra-blement sur la culture d’un peuple et constitue, par conséquent, l’un des aspectsde son développement culturel.

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La réduction du fer dans les bas fourneaux

Une industrie vieille de 2 500 ans au Nigéria

Edwin Eme Okafor

Comme le montre bien la première partie de cette exposition1, 2 500 ans se sontécoulés depuis le début de la production, par les peuples d’Afrique, d’outils enfer à partir de minerai qu’ils fondaient eux-mêmes. Ceci n’avait rien d’accidentelpuisque partout sur le continent africain, d’est en ouest et du nord au sud(Andah, 1979), on trouve ce minerai de fer qui, quantitativement parlant, seplace au troisième rang des ressources minérales de ce continent après la silice etl’alumine. Il existe sous forme d’oxydes : l’hématite, la sidérite, la goethite et lamagnétite (Tylecote, 1987). Chacun de ces oxydes a été exploité et réduit par-tout où l’on en trouvait en Afrique (Okafor, 1984a, b et c). L’argile réfractaire,autre élément nécessaire au travail du fer, qui servait à fabriquer les tuyères, lesfourneaux et le foyer, est elle aussi très répandue dans cette région du monde(Childs, 1984). Le combustible, essentiellement du bois et/ou du charbon debois, était facilement disponible. Enfin, la main-d’œuvre n’était pas difficile àtrouver, notamment pendant la période qui a précédé la traite négrière transatlan-tique (Okafor, 1992a).

Tous les éléments nécessaires à cette industrie étant facilement disponiblesen Afrique, il n’est pas étonnant que l’on y observe une grande diversité et une largevariété de techniques et de matériels destinés à sa pratique (Schmidt, 1977). Aucunautre continent n’abrite une telle diversité de fourneaux, aux fonctions aussi variées(Kense, 1983 ; Pole, 1985 ; Sutton, 1985). On observe la même diversité dans letraitement et la production du combustible. Mais, point important, ce n’est qu’enAfrique que l’on peut observer une production d’acier à forte teneur en carbonedans des bas fourneaux (Schmidt et Avery, 1978 ; Bellamy et Harbord, 1904).

1. À l’occasion de la première réunion du Comité scientifique des routes du fer àAbuja, le Comité d’organisation avait présenté une remarquable exposition sur lefer au Nigéria, des origines à l’époque industrielle.

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Pratiquement toutes les divisions administratives du Nigéria recèlent des ves-tiges de réduction du minerai de fer dans des bas fourneaux. Ces vestiges ont faitl’objet de relevés cartographiques et ont été étudiés notamment à Argungu,Daura, Katsina, Zaria, Maïdi, Chawai, Ashafa, Kurmin Mazuga, Zagomida,Nok, Taruga, Birom et Combe dans le Nord (Jemkur, 1989). Dans l’Ouest, onen trouve à Oyo, Ola Igbi (Bellamy et Harbord, 1904), Igbira, Ogbomoso etEsie (Aremu, 1990). De tels vestiges ont également été étudiés et cartographiés àAwka (Okafor, 1976), Ukehe (Ekechukwu, 1989), Aku (Njoku, 1986), Opi,Abakaliki, Orba, Umundu, Owerre-Elu, Lejja, Abiriba, Awgu et Okigwe (Oka-for, 1984b et 1992a).

Bien que des vestiges de l’activité métallurgique du fer aient été trouvés dansdes régions du Nigéria autres que la division administrative de Nsukka (Bellamyet Harbord, 1904 ; Effah-Gyamfi, 1981 ; Fagg, 1969 ; Nicklin, 1981 ; Okafor,1983 ; Sassoon, 1964 ; Sutton, 1976 ; Tylecote, 1975), aucun ne peut être com-paré à ceux de Nsukka, que ce soit en quantité ou du point de vue de la variétédes techniques employées. Dans la division administrative de Nsukka, des ter-tres, des agrégats et des blocs cylindriques de scories datant du début de l’âge dufer ont été découverts à Owerre-Elu, Opi, Orba, Umundu, Lejja, Aku et Ukehe.Les recherches ethnographiques, ethno-archéologiques et archéologiques effec-tuées par Njoku (1986), Okafor (1984a) et Onyeke (1986) montrent qu’il exis-tait de nombreux systèmes de réduction du fer comportant des appareils et destechniques différents au sein d’un seul et même groupe ethnique. Malheureuse-ment, la dureté du climat a détruit la plupart des vestiges de cette industrie, sibien que seuls ont pu subsister des tuyères, des fragments de fourneaux et desscories, pratiquement indestructibles (Okafor, 1992b ; Tylecote, 1987). Il estheureux que j’aie pu récemment utiliser les techniques scientifiques les plusmodernes pour étudier la réduction du fer dans des bas fourneaux de la régionde Nsukka (Okafor, 1992a). Les résultats de cette étude serviront de base de dis-cussion sur les procédés employés pour ce travail au Nigéria et dans d’autresrégions d’Afrique.

Le procédé de réduction du minerai de fer au Nigéria

D’après 11 datations au carbone 14, effectuées par l’Accelerator Mass Spectro-metry Laboratory (Laboratoire de spectrométrie de masse par accélérateur) del’Université d’Oxford, la réduction du fer dans la division de Nsukka a été prati-quée probablement sans interruption depuis l’an 760 environ av. J.-C. jusqu’à1950 apr. J.-C. (Okafor, 1992a et 1992b ; Okafor et Phillips, 1992). La datationdes sites de réduction du minerai de fer de Nsukka englobe toutes les dates mesu-rées au carbone 14 acceptées et publiées pour les sites métallurgiques anciensd’autres régions du Nigéria (Anozie, 1979 ; Calvocoressi et David, 1979 ;

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La réduction du fer dans les bas fourneaux 37

Connah, 1968 et 1981 ; Fagg, 1969 ; Shaw, 1969, 1978 et 1981 ; Sutton,1976). Au cours de la longue période où elle a été pratiquée dans la région, cetteindustrie a subi quelques modifications techniques qui l’ont perfectionnée et enont progressivement accru l’efficacité. Durant la période la plus ancienne, lesméthodes d’extraction du fer étaient peu efficaces et exigeaient beaucoup de tra-vail alors que, par la suite, elles sont devenues plus efficaces et ont exigé moins detravail. D’après les données fournies par la recherche actuelle, la réduction duminerai de fer à Nsukka se répartit chronologiquement en trois phases. Chacunede ces phases correspond à un procédé spécifique.

L A P R E M I È R E P H A S E D E L A R É D U C T I O N D U M I N E R A ID E F E R À N S U K K A

La première phase de réduction du minerai de fer à Nsukka est représentée parles sites d’Opi, de Lejja et d’Aku. Trois datations au carbone 14 —2305 ± 90 BP, 2170 ± 80 BP et 2080 ± 90 BP2 — effectuées dans des condi-tions sûres par spectrométrie de masse par accélérateur (Okafor et Phillips, 1992)sont disponibles pour cette phase. Calibrées selon la courbe d’étalonnage deStuiver et Pearson (1986), en utilisant le programme d’étalonnage de Van derPlicht et Mook (1989), ces dates se situent, avec une probabilité atteignant98 %, entre 765 cal. av. J.-C. et 75 cal. apr. J.-C., ce qui correspond à la périodela plus ancienne de réduction du minerai de fer à Nsukka. Le fer était alors fondudans des fourneaux à tirage forcé, reliés par des rigoles à des fosses de coulée desscories. Ces fourneaux mesuraient entre 0,85 et 1,25 m de diamètre et avaient defines parois d’environ 40 millimètres d’épaisseur. Les scories étaient coulées parintermittence dans les fosses par le biais des rigoles de connexion et s’y solidi-fiaient sous forme de blocs cylindriques.

Ces blocs pèsent de 43 à 47 kilos et ont une densité moyenne de 3,89 g aucentimètre cube. Leur couleur varie du brun foncé (MC 7,5 YR 4/4) au brunsoutenu (MC 7,5 YR 5/83). Ils ne sont pas rouillés et certains d’entre eux sontlégèrement magnétiques sur les surfaces fraîchement coupées. Ils ne comportentpas d’inclusions. Les analyses des échantillons prélevés sur ces blocs montrentque leur basicité est très faible, de 0,03 en moyenne, avec un écart type de 0,01.Leur température de fusion varie entre 1 155 et 1 450 °C.

D’après les analyses effectuées au microscope électronique à balayage et avecmicroanalyseur par rayons X à dispersion d’énergie sur des scories provenant dessites de réduction du minerai de fer de Nsukka de la première phase, celles-ci secomposent essentiellement de fayalite. En dehors de la fayalite, les scories desautres grandes phases sont constituées d’hercynite et de wustite. La leucite et les

2. BP : before present, 1950 étant considéré comme l’année 0 (NDLR).3. D’après le code des couleurs de Mursell.

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verres représentent les phases mineures des scories de cette période. Ces phasessont représentées par différentes textures et formes structurelles.

Les scories d’Opi contiennent davantage d’hercynite (22,47 %) que toutesles autres scories en provenance de Nsukka. L’hercynite a une température defusion élevée : 1 780 °C. Par conséquent, toutes les scories d’Opi qui ont uneforte teneur en silice (Al2O3) et qui contiennent de l’hercynite ont des points defusion variant de 1 350 à 1 450 °C. Il semble que pour tenter de liquéfier cettegangue à forte teneur en silice, les fondeurs d’Opi aient produit des scories ayantdes températures de fusion élevées.

Le phénomène s’est produit fortuitement pendant la première phase de réduc-tion du fer à Nsukka. Cette technique de liquéfaction des scories à haute tempéra-ture a été améliorée, lors de la dernière phase, par l’utilisation de silice commefondant pour abaisser le point de fusion de la gangue et extraire davantage de ferdu minerai. La silice formait du silicate de fer et un peu d’oxyde, libérant ainsi dufer réduit. L’opération produisait des scories dépourvues de wustite, caractéristiquede la phase tardive de réduction du minerai de fer à Nsukka étudiée ci-après.

La wustite, oxyde de fer à l’état libre, était présente dans tous les échantillonsde scories appartenant à la première phase de réduction du minerai de fer àNsukka (sauf trois). Dans les scories de Nsukka, les oxydes de fer à l’état libre, ouwustite, présentent des structures dendritiques de taille variable. En tantqu’oxyde de fer à l’état libre, la wustite constitue l’avant-dernier stade de laréduction du minerai de fer en fer métal (Morton et Wingrove, 1969, p. 1557),le pourcentage de wustite dans les scories est censé indiquer le degré d’efficacitéd’une opération donnée de réduction du minerai. Plus la teneur en oxyde de ferà l’état libre d’une scorie est élevée, moins l’opération de fusion est efficace(McDonnel, 1986, p. 86). Autrement dit, la teneur en wustite des scories varieraen fonction de l’habileté des fondeurs à en réduire le plus possible le taux résidueldans les scories. Les améliorations techniques intervenues au fil du temps expli-queraient l’efficacité accrue de l’opération et la baisse de la teneur en wustite desscories (Morton et Wingrove, 1972, p. 480). Partant de là, il semblerait que lesfondeurs des sites appartenant à la première phase utilisaient des procédésd’extraction du fer moins efficaces que ceux en usage durant les phases moyenneet tardive dans la division administrative de Nsukka. Bien que la wustite ne repré-sente que 6,2 % des composants minéraux des scories d’Opi, ce pourcentage n’enest pas moins le plus élevé comparé à celui des scories datant des autres phases.

L A P H A S E M O Y E N N E D E L A R É D U C T I O N D U M I N E R A ID E F E R D A N S L E D I S T R I C T D E N S U K K A

La spectrométrie de masse par accélérateur a donné deux datations très précises,1060 ± 69 BP et 570 ± 60 BP, pour la phase moyenne de la fusion du fer àNsukka. L’étalonnage de ces deux datations pour deux écarts types donne une

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fourchette allant de 810 à 1 435 cal. apr. J.-C., ce qui permet de penser que laphase moyenne de réduction du fer à Nsukka s’est probablement déroulée entreces deux dates (Okafor, 1992a et 1992b). Les sites de réduction du minerai defer correspondant à cette phase se trouvent sur l’axe Owerre-Elu-Nru-Isiakpu-Edeoballa. À cette époque, l’opération se faisait encore dans des fourneaux à cuveà tirage forcé. Les scories étaient encore coulées, mais non dans des fosses. On leslaissait s’écouler du fourneau et se répandre sur le sol, tout autour du fourneau,où elles formaient ainsi des scories plates à surface régulièrement ondulée.

Ces scories sont typiques et ont subsisté jusqu’à nos jours sous formed’agglomérés plats pesant de 1,5 à 4,2 kilos. Elles sont très denses, leur densitémoyenne étant de 4,2 g par centimètre cube. Certaines sont faiblement magné-tiques sur les surfaces fraîchement coupées. Elles ne sont pas rouillées et ne com-portent pas d’inclusions. Elles sont entièrement de couleur mixte, brun foncé(MC 7,5 YR 3/4) et noir (MC 7,5 YR 2/10). En coupe, elles ont une couleur grisbleuté et une structure grossièrement vésiculaire à proximité de la surface. Lesrésultats d’analyse des échantillons de ces scories montrent qu’elles ont une trèsfaible basicité (moyenne : 0,02, écart type : 0,01).

La plupart des scories appartenant à cette phase ne contiennent pas de wus-tite à l’état libre, ce qui suggère une amélioration et une bonne maîtrise des tech-niques d’extraction du fer réduit. L’amélioration a également été observée dansla plupart des scories de cette période ayant un point de fusion relativement peuélevé. Soixante-quinze pour cent de la quantité totale des scories analysées decette phase moyenne ont un point de fusion inférieur à 1 200 °C. Les analyseseffectuées au microscope électronique à balayage et au spectromètre à rayons X àdispersion d’énergie sur des scories appartenant à la phase moyenne de la périodede réduction du minerai de fer à Nsukka montrent qu’elles sont constituées defayalite, d’hercynite et de quelques petits morceaux de verre qui se trouvent dansles vésicules. Certaines contiennent également des dendrites blanches de wustite.L’élément minéral le plus abondant dans les scories de la phase moyenne est lesilicate de fer ou fayalite (Fe2SiO4). Selon des calculs volumétriques effectués surles minéraux contenus dans ces scories, la teneur en fayalite est de 76,42 %.

Sur les 12 échantillons de scories provenant d’Owerre-Elu qui ont été étu-diés, 5 seulement contiennent de la wustite. Les 7 autres en sont dépourvus. Lawustite existe sous forme de dendrite et entre, pour 3,92 %, dans la composi-tion minérale des scories de la phase moyenne analysées au cours des présentesrecherches.

Le point où se situent les scories d’Owerre-Elu sur le diagramme de la phaseternaire, FeOAl2O3SiO2, illustre les évidentes variations de composition des sco-ries provenant de ce site. Sept d’entre elles ne contiennent pas de wustite et ontun point de fusion inférieur à 1 150 °C, tandis que les 5 échantillons qui encontiennent ont des points de fusion compris entre 1 150 et 1 325 °C. On com-prendra peut-être mieux les informations fournies par les scories d’Owerre-Elu

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en analysant les indications que l’on peut retirer de la datation radiométrique ducharbon de bois trouvé avec elles sur les sites. D’après les datations aucarbone 14, le site d’Owerre-Elu appartient à la phase moyenne de réduction dufer à Nsukka, laquelle a probablement duré de l’an 800 environ à l’an 1430 cal.apr. J.-C. La phase tardive (représentée par les sites d’Orba et d’Umundu étudiésci-après) a duré de 1430 à 1950 cal. apr. J.-C.

Ces éléments permettent de penser que les scories provenant d’Owerre-Elu,qui ne contiennent pas de wustite et dont le point de fusion est relativement bas(elles sont à ce titre très semblables à celles d’Orba et d’Umundu), appartiennentplutôt à la fin de la phase moyenne, tandis que les autres échantillons, quicontiennent de la wustite et ont un point de fusion plus élevé (elles sont à cetégard analogues aux scories d’Opi), appartiennent au début de la même phase.

L A P H A S E T A R D I V E D E L A R É D U C T I O N D U M I N E R A ID E F E R À N S U K K A

La phase tardive de la réduction du minerai de fer à Nsukka s’étend des environsde l’an 1430 aux environs de 1950 cal. apr. J.-C., selon 6 datations de haute pré-cision réalisées par spectrométrie de masse par accélérateur dans des conditionssûres, soit 200 ± 80 BP, 205 ± 80 BP, 300 ± 90 BP, 215 ± 100 BP et 295 ± 85 BP(Okafor et Phillips, 1992). Les sites appartenant à cette phase sont ceux de larégion d’Orba-Umundu-Eha-Ndi-Agu.

Bien que les fourneaux utilisés à cette époque soient restés des fourneaux àcuve, ils fonctionnaient à induction d’air. Il n’était pas effectué de coulées pen-dant la fusion. L’intégralité de la charge était sortie du fourneau à la fin de l’opé-ration et la loupe de fer était séparée des résidus à l’aide de crocs à feu (Okafor,1984a, b et c). Cette technique réduisait la main-d’œuvre nécessaire mais auxdépens de la durée du procédé. En effet, l’utilisation de fourneaux à cuve àinduction d’air rallongeait la durée de l’opération de réduction, ce qui consti-tuait un avantage pour les fondeurs puisque, comme ils pouvaient charger lefourneau autant de fois qu’ils le souhaitaient, cela leur permettait de produire desloupes de plus grande taille en une seule fournée.

Les scories de fer appartenant à la phase tardive de Nsukka ont subsisté surles sites de réduction du minerai sous forme d’agrégats. Étant donné la façondont elles ont été extraites du fourneau et séparées de la loupe de fer à l’aide decrocs à feu, elles forment des agrégats irréguliers, amorphes, moins denses, com-portant de nombreuses vésicules. La densité moyenne des échantillons de scoriesprovenant d’Orba est de 3,98 g par centimètre cube, tandis que celle des échan-tillons d’Umundu est de 3,6 g par centimètre cube. La couleur de ces scoriesvarie du brun foncé (MC 7,5 YR 3/4) au noir total (MC 7,5 YR 2/10). Quel-ques-unes d’entre elles comportent des inclusions de quartz mais n’ont aucunetrace de rouille. Aucun des échantillons de scories provenant de ces sites n’est

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magnétique. Comme celles d’Opi et d’Owerre-Elu, les scories d’Orba et d’Umundusont faiblement basiques. En moyenne, la basicité des scories d’Orba est de 0,1et celle des scories d’Umundu de 0,02. La température de fusion des échantillonsd’Orba et d’Umundu varie entre 1 150 et 1 280 °C.

L’analyse des scories de la phase tardive des sites de Nsukka au microscopeélectronique à balayage et par rayons X à dispersion d’énergie montre qu’ellessont composées de fayalite, d’hercynite et de verre. Les scories d’Umundu etd’Orba contiennent du verre4 à forte teneur en silice. L’oxyde de fer à l’état libreet la wustite sont totalement absents des scories de la dernière phase, preuve queles fondeurs de Nsukka étaient alors parvenus à extraire le fer avec une trèsgrande efficacité. Comme on l’a observé précédemment, le taux d’oxyde de fer àl’état libre dans les scories semble témoigner de la capacité du maître fondeur àfaire fonctionner son fourneau de façon à laisser le moins possible de fer dans lesscories (Morton et Wingrove, 1969 et 1972, p. 478).

Selon certaines informations ethnographiques provenant de la région, onchargeait du sable dans le fourneau au cours du processus de fusion, peut-êtrepour ajouter du fondant au métal en fusion (Okafor, 1984a, b et c, p. 24-25).Tylecote (1987, p. 108) a fait observer que les minerais à forte teneur en oxydede fer nécessitent un fondant de sable pour améliorer le rendement en fer. Desdocuments concernant de nombreux sites de la première phase de la métallurgieattestent la pratique consistant à ajouter du sable en guise de fondant aux mine-rais réduits dans les bas fourneaux (Fells, 1983, p. 132). Au cours de ses recher-ches sur le site de Nebersdorf, en Autriche, qui appartiennent à la premièrepériode de la métallurgie du fer, Sperl (1980, p. 61-74) a découvert dans les sco-ries qui en provenaient un excès de quartz qui pourrait avoir servi de fondant. EnAfrique du Sud, les fondeurs du site proche de Phalaborwa ajoutaient de la siliceen guise de fondant (Van der Merwe et Killick, 1979, p. 89). Le sable chargédans le fourneau produisait l’excès de silice qui explique la forte teneur en verredes scories provenant des sites d’Umundu et d’Orba. Dans celles d’Umundu, leverre représente 27,33 % des constituants en minéraux et, dans celles d’Orba,27,25 %.

La plupart des scories d’Orba et d’Umundu appartiennent au triangle de lacordiérite fayalite-hercynite-fer, mais certains autres échantillons appartiennentau triangle fayalite-hercynite-wustite, ce qui confirme de manière irréfutable lesrésultats des microanalyses pratiquées sur ces scories, où l’on n’a pas détecté dewustite.

Les températures de fusion des scories de ces deux sites varient, d’après lesestimations, entre 1 150 °C et 1 280 °C. Elles se situent donc dans la fourchettedes températures minimales nécessaires pour réduire le minerai de fer (Van derMerwe, 1969, p. 17 ; Tylecote, 1987, p. 296). Ce qui a contribué à la produc-

4. Il s’agit du phénomène de vitrification (NDLR).

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tion de ces scories sans wustite avec un faible point de fusion, c’est la silice queles fondeurs d’Orba et d’Umundu utilisaient comme fondant. Elle abaissait lepoint de fusion de la gangue et se combinait avec une partie de l’oxyde de ferpour donner du fer réduit à l’état libre.

La phase tardive de la réduction directe du fer à Nsukka marque la phasefinale et ultime de cette activité dans la région, en termes d’efficacité du procédéd’extraction et de réduction de la main-d’œuvre au strict minimum. Aucune desscories de cette phase ne contient de wustite, ce qui semble indiquer que l’inté-gralité du fer contenu dans le minerai fondu en était extrait. C’est égalementdurant cette phase que l’on assiste à l’utilisation de sable en guise de fondantpour abaisser la température de fusion de la gangue. Le silicate de fer qui se for-mait à partir du sable, en même temps que l’oxyde de fer, libérait ainsi du ferréduit. Les scories appartenant à cette phase avaient les plus faibles températuresde fusion nécessaires à n’importe quelle opération de réduction du minerai de fer.

Discussion

L’évolution de la technique de réduction du fer à Nsukka, que l’on vient d’évo-quer, semble indiquer un progrès constant allant dans le sens d’une économie demain-d’œuvre. Durant la phase moyenne, les fosses à coulée des scories ont étéabandonnées et l’on a laissé les scories couler directement sur le sol. Lors de laphase tardive, la mise en service de fourneaux à appel d’air rendit inutile l’utili-sation de soufflets. À mesure que le procédé s’améliorait, la coulée des scories estdevenue inutile, de même que la main-d’œuvre employée pour cette tâche puis-que l’on vidait désormais le contenu du fourneau à la fin du processus. De touteévidence, des changements ont régulièrement été enregistrés à Nsukka qui ten-taient, à chaque fois, de perfectionner la technique et réduire la main-d’œuvrenécessaire.

Les analyses morphologiques et physiques des résidus trouvés dans la régionde Nsukka montrent clairement que ceux-ci se répartissent en trois groupes biendéfinis, délimités par les trois phases évoquées plus haut, ce qui élimine toutepossibilité d’existence d’une quatrième. Étant donné que chacun de ces groupespossède des caractéristiques techniques et ethno-archéologiques distinctes, lesrenseignements recueillis à Nsukka témoignent des variations concrètes qu’aconnues la technique de réduction du minerai de fer dans la région de la divisionadministrative de Nsukka. Ces variations ont aussi existé isolément dans cha-cune des trois phases susmentionnées. La question se pose donc de savoir com-ment était organisée la réduction du minerai de fer à Nsukka. Les donnéesobtenues suscitent les interrogations suivantes :• Existait-il, dans la région de Nsukka, des communautés productrices de fer

distinctes, pratiquant cette activité indépendamment des autres groupes ?

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• Pourquoi chaque phase représente-t-elle une nouvelle étape technique decette activité ?

• Pourquoi, sur aucun des sites, les trois phases observées ne sont-elles pasretrouvées toutes à la fois ?

La question de savoir si les diverses communautés qui produisaient du fer àNsukka travaillaient indépendamment impliquerait que chacune d’entre ellesl’ait fait uniquement pendant l’une des trois phases observées et n’ait produit defer ni avant ni après cette phase. Ceci est improbable car, d’après les élémentsfournis par les datations et les résultats d’analyse des résidus, il semble que lamétallurgie du fer à Nsukka ait connu un développement constant.

En ce qui concerne la deuxième question, deux points expliqueraient pour-quoi chacune des phases de réduction du minerai de fer à Nsukka était techni-quement différente des autres. Premièrement, d’après les éléments disponibles, ilest indubitable que, lors de la phase tardive, les opérations de réduction du mine-rai étaient mieux maîtrisées et plus efficaces que lors des phases précédentes. Leschangements techniques qui différencient chaque phase peuvent en parties’expliquer comme étant le résultat de plusieurs décennies d’expérience. C’estl’explication la plus probable étant donné que les datations au carbone 14 effec-tuées sur des échantillons provenant des quatre sites étudiés démontrent un netprogrès entre 760 av. J.-C. environ et 1950 apr. J.-C. Ces mêmes progrès ontégalement été mis en évidence par les résultats d’analyse des résidus.

Deuxièmement, on observe, d’après le mode de fonctionnement des four-neaux associés à chaque phase, une tendance régulière à la réduction de la main-d’œuvre. Deux facteurs d’ordre économique et d’ordre politique, qui ont étéidentifiés par d’autres chercheurs (Afigbo, 1973a ; Oguagha, 1982 ; Shaw, 1970)et se sont exercés dans le nord du Pays ibo entre la phase moyenne et la phasetardive de la métallurgie du fer à Nsukka, pourraient avoir entraîné une pénuriede main-d’œuvre dans la division administrative. Shaw (1970, p. 285) a relevéqu’au IXe siècle apr. J.-C., les Ibo exportaient, entre autres, des esclaves chez leursvoisins du Nord. Afigbo (1973a, p. 79-80) a également observé qu’au XIXe siècle,la traite des esclaves était l’une des activités commerciales les mieux établies deNsukka. Il mentionne Nkwo-Ike et Ozalla (dans la division administrative deNsukka) comme de célèbres marchés aux esclaves. La crainte des rafles d’esclaveset la diminution effective de la population en raison de l’exportation de jeunesgens robustes doivent avoir affecté la quantité de main-d’œuvre indispensableà l’industrie métallurgique.

La main-d’œuvre disponible à cette période dans la division administrativede Nsukka était également menacée par des incursions et des guerres menées parles Igala contre Nsukka. Les guerres entre ces deux peuples remontent aux XVIIIe

et XIXe siècles apr. J.-C. (Oguagha, 1982, p. 58). Elles durèrent longtemps et, àleur paroxysme, Nsukka resta sous l’influence d’Igala. Il est probable que leschangements techniques qui différencient chacune des phases de la métallurgie

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du fer à Nsukka représentaient les solutions concrètes trouvées par les forgeronspour faire face à la pénurie de main-d’œuvre.

C’est manifestement pendant la phase moyenne que les fosses de coulée desscories ont été abandonnées et que l’on a laissé couler celles-ci directement sur lasurface du sol. Des années d’amélioration et d’expérience, auxquelles s’ajoutait lapénurie de main-d’œuvre, ont conduit à abandonner les fourneaux à tirage forcéet, ultérieurement, à renoncer à couler les scories au cours du processus de réduc-tion du minerai. Le fourneau était vidé à la fin de l’opération.

C’est probablement en raison de la pénurie de main-d’œuvre et de l’insécu-rité causée par les rafles d’esclaves et les guerres entre Nsukka et Igala que certainsfondeurs ont commencé à utiliser directement du bois, sans prendre le temps dele brûler pour produire du charbon de bois. Selon des données ethnographiquesprovenant d’Ama Orba, cette technique était celle qu’utilisaient les fondeurs decette région durant la phase tardive de la réduction du fer à Nsukka (Okafor,1984a et b, p. 23). La main-d’œuvre nécessaire à cette activité s’en trouvait dimi-nuée et la technique en usage modifiée.

Les différences de techniques observées au cours des trois phases reflètentdonc la situation qui prévalait pendant chacune d’entre elles. La première phasesemble avoir été paisible, raison pour laquelle cette branche d’activité était trèsperfectionnée et complexe. Les fondeurs disposaient de suffisamment de main-d’œuvre et de temps pour construire et utiliser des fourneaux à cuve à tirageforcé. À cette époque, ils creusaient également des fosses de coulée des scories, lestapissaient d’argile et construisaient des chenaux de connexion conduisant auxfosses.

La grave menace que faisait peser sur la main-d’œuvre disponible la traite desesclaves, atlantique et interne, ajoutée à l’insécurité due aux guerres entreNsukka et Igala, imposa d’autres changements techniques. Ces derniers sont évi-dents durant la phase tardive. La pénurie de main-d’œuvre et l’insécurité entraî-nèrent le remplacement de la technique du fourneau à cuve à tirage forcé par lefourneau autoventilé, éliminant ainsi les manieurs de soufflets. On cessa progres-sivement de couler les scories incandescentes au cours du processus de réductionpour vider la totalité de la charge du fourneau à la fin de l’opération. Lorsque lescontraintes susmentionnées pesaient trop lourdement sur eux, les fondeurs de laphase tardive adaptaient parfois encore leur technique, procédant directement àla réduction du minerai avec du bois au lieu de charbon de bois, ce qui réduisaitla durée du processus et l’investissement de main-d’œuvre dans la production decharbon de bois.

Afin de comprendre pourquoi ces trois phases ne sont pas représentées dansun seul et même site, il est indispensable de savoir ce qui se passait dans le norddu Pays ibo (qui comprend la division administrative de Nsukka) pendant le pre-mier âge du fer. D’après des études glottochronologiques, les Ibo ont commencéà former un groupe ethnique distinct au sein de la sous-famille linguistique kwa,

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il y a environ 6 000 ans (Armstrong, 1962, p. 284, et 1964, p. 22-23 ; Afigbo,1973b, p. 8). Ce point de vue est étayé par du matériel archéologique découvertpar Hartle sur des sites qui se trouvent au nord du Pays ibo, en particulier àNsukka, ce qui laisse supposer que la région a été occupée avant le troisième mil-lénaire av. J.-C. L’étude de poteries récupérées lors des fouilles de ces sites montrequ’il y a d’étroites similitudes de couleur, de forme et de décorations entre les tes-sons de poterie découverts et les poteries encore utilisées aujourd’hui dans cetterégion (Hartle, 1967, p. 134-143).

D’après les données historiques et ethnographiques disponibles sur le Paysibo, lorsqu’ils se constituèrent en tant que groupe ethnique, les Ibo s’installèrentd’abord dans la partie nord de la zone. À partir de là, leur culture évolua et ilsessaimèrent vers les autres régions qu’ils habitent aujourd’hui. Il est intéressantd’observer que, de nos jours, de nombreux groupes ibo proclament que leursancêtres vivaient initialement sur le plateau situé au nord du Pays ibo avant departir à la recherche de terres inoccupées (Afigbo, 1973b, p. 9).

Un certain nombre de facteurs attirèrent les ancêtres des Ibo vers le plateaudu nord. La région, bien qu’initialement couverte de forêts, est à la limite de laceinture de la savane. D’après Uzoezie (1972), ceci leur permettait d’exploiterdes terres et de les cultiver avec l’outillage restreint dont ils disposaient. Làencore, la région se trouvait, notamment pendant la période tardive, dans la zonedes principales routes commerciales reliant au pays ibo, Igala et Idoma au nord,d’une part, et les régions d’Ijaw et de Cross River au sud, d’autre part.

Enfin, c’est sur ce plateau ibo du nord, et principalement sur la CuestaNsukka-Udi, que se trouvent les plus riches gisements de minerai de fer. Ils coif-fent les collines résiduelles de la région et la plupart d’entre eux contiennentjusqu’à 50 % de fer (Umeji, 1980). Il est probable que, pendant la longuepériode où ils ont vécu sur ce plateau, un certain groupe ibo ait appris à réduirele minerai de fer. Afigbo (1973b, p. 16) a fait observer que « le plateau ibo dunord et son extension vers Bende sont riches en gisements de minerai de fer etque c’est dans cette région du Pays ibo que la réduction et le travail du fer étaientles plus perfectionnés. Les outils et ustensiles en fer qu’ils produisaient sur le pla-teau étaient très demandés dans le reste du pays et au-delà ».

D’après les datations au carbone 14, il semblerait que ce groupe de produc-teurs ait pu s’être installé à cet endroit où il aurait exploité le minerai et les boisde ces sites dès le VIIIe siècle av. J.-C., c’est-à-dire au cours de la première phasede la métallurgie du fer (sites d’Opi, de Lejja et d’Aku). Les éléments fournis parl’analyse des scories indiquent qu’à cette période, une partie du fer restait dansles scories, ce qui laisse à penser que les producteurs tentaient encore d’améliorerleur maîtrise technique et de tirer le meilleur parti possible du minerai. Cettephase pourrait s’être achevée aux alentours du Ier siècle apr. J.-C., selon des data-tions au carbone 14. Il est probable que l’épuisement des ressources (minerai etcombustibles) sur les sites de la première phase, ajouté à la nécessité de fabriquer

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des outils en fer, a poussé les habitants à chercher de nouvelles sources de matièrespremières. C’est pourquoi le groupe, ou ses descendants, s’est déplacé vers larégion correspondant à la phase moyenne (Owerre-Elu-Nru-Isiakpu), où duminerai riche en fer coiffait la chaîne des monts de Nru-Isiakpu et où l’on trou-vait aussi en abondance du bois dur susceptible de servir de combustible. Lesdatations au carbone 14 qui ont été réalisées montrent que ces sites ont proba-blement été exploités entre 800 et 1450 apr. J.-C.

C’est sans doute autour de 1430 apr. J.-C. que la diminution des ressourcesnécessaires à la réduction du minerai de fer sur les sites de la phase moyenne,conjuguée au besoin d’outils en fer, a conduit à l’exploitation des ressources desrégions appartenant à la phase tardive (Umundu-Orba-Eha-Ndi-Agu). Ainsiqu’on l’a fait observer précédemment, c’était la dernière phase de la métallurgiedu fer dans la division administrative de Nsukka. Six datations au carbone 14montrent que l’on fondait le fer dans cette région entre 1430 et 1950 apr. J.-C.

Nous concluons de ce qui précède que la réduction du minerai de fer dans larégion de Nsukka a été le fait d’un groupe spécialisé d’artisans qui se déplaçaitd’un site à l’autre à mesure qu’il épuisait les matières premières disponibles surplace. Bellamy et Harbord (1904) ont observé que les fondeurs de fer d’Ola Igbi,près d’Oyo, en Pays yoruba, se déplaçaient de même lorsqu’ils avaient épuisé lesressources locales nécessaires à leur industrie. Les témoignages archéologiquesdont il a précédemment été question démontrent l’existence d’une continuitéculturelle dans la région depuis le troisième millénaire av. J.-C. jusqu’àaujourd’hui (Hartle, 1967). C’est la preuve que les ancêtres des communautésactuelles de Nsukka ont toujours vécu dans la région. Les indices ethno-archéo-logiques recueillis au sujet des eguru (forgerons) montrent que le travail du ferétait pratiqué par des groupes à part, qui n’étaient pas ouverts à tous. C’était lemétier d’une caste fermée, qui protégeait jalousement ses fonctions et privilèges,et qui évitait d’admettre en son sein des personnes de l’extérieur (Okafor, 1984a,b et c, p. 69-76).

Les témoignages recueillis à partir de l’étude linguistique réalisée dans ladivision administrative de Nsukka semblent étayer cette conclusion. Il existe desmots communs à toutes les communautés de la division administrative pour lesprincipaux articles liés à la production du fer. Par exemple, le fourneau est géné-ralement connu sous le nom d’itoro ou utu, la loupe de fer est appelée aga, lesscories afuru ou nsi igwe et le minerai de fer nne igwe ou nne ukwume. L’unifor-mité terminologique de tous les éléments indispensables à la production du ferindique nettement une « pratique de groupe » plutôt qu’une multiplicité de pra-ticiens indépendants les uns des autres.

Cette conclusion est également étayée par le fait que même si tous lesNsukka connaissent le nom de ces éléments essentiels à la réduction du mineraide fer, ils ne savent pas quelle est leur origine. Ainsi, la plupart des gens quivivent dans les régions correspondant aux phases ancienne et moyenne ne savent

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pas d’où proviennent les résidus de fusion qu’ils rencontrent autour d’eux. Leplus âgé des anciens d’Opi même, Onyishi Abonyi Nnamani, du village d’Umu-gedu appartenant au clan Idi Opi, a déclaré à l’auteur que les blocs cylindriquesde scories que l’on rencontre à Opi sont « de petits monticules poussant deterre ». Il croit qu’ils n’ont pas été édifiés par l’homme. On raconte une histoireanalogue à Owerre-Elu, dont l’un des habitants, Onyishi Ozioko Ugwu, décritles scories plates issues des coulées sous le nom de nsi igwe et déclare que Dieu lesa données au peuple d’Owerre-Elu pour vaincre leurs ennemis edoballa, ce qui,d’après ce que j’ai appris, se réfère à une bataille au cours de laquelle la populationd’Owerre-Elu a infligé des pertes sévères à ses ennemis en leur lançant des scories.

Enfin, selon une tradition rapportée par Onyeke (1986, p. 14), le clan IdiOpi prétend que les Opi n’ont jamais été eux-mêmes des fondeurs de fer. Le tra-vail aurait été fait par des étrangers qui venaient vivre parmi eux et qui repar-taient une fois leur travail achevé. La réduction du fer dans un bas fourneau estune activité hautement spécialisée. Dans de nombreuses communautés d’arti-sans, comme celles du Pays ibo, la présence de fondeurs devait être très précieuseparce qu’ils produisaient les matériaux nécessaires à la fabrication de la plupartdes outils utilisés par la communauté ; le clan n’aurait autrement pas admis queles fondeurs campent et procèdent à la réduction du minerai de fer partout où ilstrouvaient des matières premières. La tradition consistant à installer les sitesmétallurgiques à proximité de la source de minerai de fer expliquerait pourquoile groupe de fondeurs se déplaçait vers de nouvelles sources de minerai lorsque legisement disponible en un lieu était épuisé. Njoku (1986) a noté que dans lenord du Pays ibo, on tenait davantage compte de l’emplacement du minerai dis-ponible que de la présence de bois pour choisir le site. Cependant, là où les con-ditions étaient favorables, on tenait compte des deux.

Observations

Les découvertes effectuées ont permis de tirer les conclusions ci-après, concer-nant la réduction du fer dans les bas fourneaux à Nsukka.

La réduction du fer dans des bas fourneaux a commencé à Nsukka aux envi-rons de l’an 765 cal. av. J.-C. et s’est poursuivie jusqu’à environ 1950 cal.apr. J.-C. Pendant cette longue période, cette industrie a connu trois phases suc-cessives différentes, chacune représentant un changement ethnologique.

Dans l’ensemble, la technique de réduction du fer dans des bas fourneauxétait très efficace en termes d’extraction du métal. Il restait très peu d’oxyde defer à l’état libre dans les scories. À cet égard, la période la plus ancienne a été lamoins efficace, et la plus récente a été la plus efficace, puisque l’on extrayait alorsdu minerai le maximum de fer disponible en réduisant la main-d’œuvre néces-saire à cette activité.

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48 Edwin Eme Okafor

La réduction du fer à Nsukka s’est effectuée dans divers types de fourneauxà cuve, ceux à tirage forcé ayant été utilisés dès le début et jusqu’à 1430 apr. J.-C.environ. Lorsque le procédé de fusion s’est perfectionné, on a cessé de couler lesscories.

Aucun fourneau à fosse ou en cuvette n’a été trouvé dans la division admi-nistrative de Nsukka. On s’est aperçu que ce que certains avaient pris pour desfourneaux en cuvette (Anozie, 1979) étaient des fosses de coulée des scories danslesquelles elles étaient déversées au cours du processus de réduction du minerai.

Les fondeurs de Nsukka fondaient la goethite et l’hématite qu’ils trouvaientsur place. Le minerai de fer de Nsukka était riche en alumine (Al2O3) et avaitune forte teneur en silice (SiO2). Initialement, la forte teneur en alumine duminerai contraignait les fondeurs à utiliser une température de fusion élevée.Plus tard, ils parvinrent à l’abaisser en utilisant du sable en guise de fondant. ÀNsukka, les principales formes de minéraux présentes dans les scories sont lafayalite, l’hercynite et la wustite. Le verre, la leucite et la magnétite sont desformes mineures présentes dans certaines d’entre elles.

Les scories de Nsukka ont une basicité très faible car les fondeurs n’utilisaientni chaux ni fondant riche en chaux pour réduire le minerai.

Les sites de production étaient fonction de la présence et de l’emplacementdu minerai de fer. On en changeait lorsque les ressources en minerai étaient épui-sées. À Nsukka, la réduction du fer dans des bas fourneaux était pratiquée par desgroupes spécialisés d’artisans qui se déplaçaient lorsqu’ils avaient épuisé lesmatières premières disponibles sur un site.

Les fondeurs de fer de cette région se contentaient de produire des loupes defer. Ils ne les affinaient ni ne les forgeaient eux-mêmes mais les vendaient à desforgerons qui s’en chargeaient pour en faire des outils.

La situation économique et politique qui régnait dans la région a déterminél’évolution des diverses phases techniques de la métallurgie du fer. Les fondeursont pu faire face à la menace qui pesait sur la main-d’œuvre nécessaire à cetteactivité lors des phases moyenne et tardive en adoptant des techniques de réduc-tion directe employant un minimum de personnes.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 49

L’impact du fer en Pays yoruba

Isaac Adeagbo Akinjogbin

L’incidence de la métallurgie du fer sur le système sociopolitique

Nul ne sait combien de temps s’est écoulé entre le début de la connaissance dufer par la société yoruba et la période où celle-là a pleinement influencé celle-ci.Il est d’ailleurs peu probable que cet impact se soit fait sentir simultanémentdans tous les aspects de la vie des Yoruba. Cependant, il semblerait que les débutsd’une forte influence de la métallurgie du fer sur le système sociopolitiqueyoruba remontent à une période comprise entre le IXe et le Xe siècle apr. J.-C.Auparavant, ce système reposait sur de petits villages, le summum de l’organisa-tion politique étant constitué par des groupes de villages (Obayemi, 1977,p. 255-322 ; Akinjogbin, 1981). Le rôle de chef, ou oba (roi), d’un groupe devillages était assumé à tour de rôle par les chefs des différents villages composantce groupe selon un ordre prédéterminé. L’oba était le chef à la fois spirituel etpolitique du groupe. L’une de ses principales fonctions consistait à se concilier lesfaveurs de la terre.

Vers la fin du IXe siècle et au début du Xe, le chef Oduduwa amorça à Ile-Ifeun mouvement révolutionnaire qui rassembla les groupes de villages en unegrande ville composite. Les treize groupes de villages d’Ife devinrent une seulecité ayant Oduduwa pour seul ooni (roi) (Adediran, 1981). Ceint d’une cou-ronne de perles (ade ileke), il vivait dans un grand palais (aafin) au centre de laville. Les villages du groupe furent réunis de force et leurs anciens chefs devinrentdes chefs religieux (isoro) qui se conciliaient les faveurs de la terre pour le bien-être de l’ooni. Bien que certains d’entre eux aient conservé dans leur nouveautitre le préfixe oba, ils perdirent leur pouvoir politique et économique et furent

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50 Isaac Adeagbo Akinjogbin

assujettis à l’autorité politique de l’ooni1. Dès lors, l’ooni administra les anciensterritoires comme des parties intégrantes de son royaume.

Une fois l’expérience réussie et la situation stabilisée à Ile-Ife, de nombreuxfils d’Oduduwa et capitaines de son armée se répandirent dans tout le pays enusant du même procédé et en créant des royaumes sur le modèle de celui d’Odu-duwa à Ile-Ife (Akinjogbin, 1981, chap. 12). C’est ainsi que la majeure partie duPays yoruba, jusque-là organisée en groupes de villages, se transforma en grandsroyaumes gouvernés par les fils et associés d’Oduduwa et par leurs descendants.Selon certaines traditions, il existait sept royaumes. D’autres affirment qu’il enexistait seize. Mais un recensement exact réalisé au début du siècle en dénombraplus de vingt (Anon, 19032).

Or, quels sont les processus qui ont conduit à cette révolution, et quel fac-teur clef a permis cette réussite hormis les qualités de chef et le sens du comman-dement du roi ? Bien que les traditions se soient efforcées de l’estomper, leprocessus de conversion des groupes de villages en royaumes est l’aboutissementde conquêtes militaires. À Ile-Ife et dans tout le Pays yoruba, les groupes des par-tisans d’Oduduwa, généralement les plus restreints au départ, supplantaient lesgroupes les plus vastes et les plus forts en apparence ; le facteur décisif de leursuccès était l’utilisation du fer. C’est par nécessité de minimiser le rôle du recoursà la force que les traditions généralement ne mettent pas l’accent sur ce facteurde manière explicite, mais un certain nombre d’indices témoignent de l’impor-tance déterminante de l’utilisation du fer pendant toute cette révolution.

Tout d’abord, Ogun, dieu du fer, était la divinité tutélaire d’Oduduwa, chefde la révolution. C’était aussi celle de tous ses fils et partisans qui devinrent ulté-rieurement des oba. Aujourd’hui encore, un festival annuel est organisé en l’hon-neur d’Ogun, qui porte différents noms suivant les diverses régions du Paysyoruba. C’est l’occasion pour l’oba, qui vit normalement retiré du monde, desortir au grand jour la tête ceinte de la couronne sacrée (are). Partout où s’est éta-blie la royauté yoruba, Ogun est devenu le dieu tutélaire. Détail instructif :l’Empire ewuare portait en fait le nom d’Ogun.

Un autre indice du rôle décisif joué par le fer dans la révolution d’Oduduwaest l’installation d’une forge à l’intérieur même du palais de l’ooni. Appelée ogunLaadin (la forge de Laadin), elle existe encore aujourd’hui dans l’état où l’on sup-pose qu’elle se trouvait à l’époque d’Oduduwa et constitue désormais une attrac-tion touristique.

Troisième indice : un coutelas à courte lame, appelé ogbo ou, sous une formeplus élaborée, ida (épée), est devenu le symbole de l’autorité et de la justice ; tout

1. Comme Obalesun à Ife et à Ado Ekiti, Obaluru et Obalara à Ife, etc. Le titre ooni aété traduit de diverses manières, mais il est peut-être dérivé d’un mot oghene quisignifiait « très grand ».

2. Voir les débats relatifs à ce nombre dans Adediran (1984).

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L’impact du fer en Pays yoruba 51

nouvel Alaafin (chef du royaume yoruba) reçoit rituellement l’ida Oranyan (épéed’Oranyan) lors de son intronisation. La plupart des oba du Pays yoruba fontencore porter devant eux soit l’ogbo, soit l’ida lors des cérémonies officiellespubliques.

Le fait qu’Oduduwa ait donné une chaîne de fer (epe) à son premier petit-fils, qui devint Olowu (roi d’Owu), est la preuve que le fer était considéré commeun métal de valeur inestimable. Une ligne de l’Oriki (ensemble des psalmodiesde la littérature religieuse traditionnelle yoruba) d’Olowu dit : « Omo ajifepesire » [L’enfant de quelqu’un qui joue avec une chaîne en fer].

Il est probable que l’importance du fer dans la révolution d’Oduduwa netienne pas seulement au fait que ce métal a permis la fabrication d’un armementde guerre si décisif, mais également à celui qu’il a favorisé la révolution agricoleen améliorant l’approvisionnement en nourriture. En atteste la tradition selonlaquelle, peu après la révolution d’Oduduwa, la population d’Ife augmenta rapi-dement. En fait, elle devint trop nombreuse par rapport à l’approvisionnementdisponible, ce qui nécessita une émigration organisée3.

Étant donné l’importance du fer, qui servait à fabriquer des instrumentsaussi bien pour se défendre et attaquer que pour rendre la justice et pratiquerl’agriculture, il n’est guère surprenant que, sous la dynastie d’Oduduwa, chaqueroyaume et même chaque centre urbain de chaque royaume ait possédé de nom-breuses fonderies et autant de forges qu’il lui était nécessaire pour assurer sonautosuffisance. Au début du XVe siècle, tout le fer utilisé dans le Pays yoruba étaitfondu dans le pays, à partir des fourneaux construits par les Yoruba : ceux-ci uti-lisaient uniquement des roches sédimentaires ferrugineuses et des matériaux dechauffe qu’ils se procuraient localement. Dans l’Afrique des XVIIe et XVIIIe siècles,au plus fort de la traite transatlantique des esclaves, les Yoruba continuaient depréférer le fer qu’ils produisaient eux-mêmes, considérant celui qui était importécomme rituellement impur et « sourd ». La plupart des centres urbains yorubaavaient leurs propres mines appelées oko ota ou oko eta (centre d’exploitation desroches sédimentaires ferrugineuses) et au moins un petit fourneau (ile iponrin ouile isunrin) dans le district. Johnson note que certaines régions comme celled’Okemesi, dans l’État d’Ekiti et Ilorin, au Pays yoruba, étaient célèbres pourleurs gisements de roches ferrugineuses (Johnson, 1921, p. 119). On supposequ’elles fournissaient celles dont l’approvisionnement n’était pas suffisant. Lesgrands centres urbains disposaient de nombreux fourneaux et exportaient leursexcédents. Malgré les guerres civiles, qui firent sombrer le Pays yoruba de 1793à 1893, et la dislocation sociale, démographique et économique massive du pays,en 1904, les visiteurs pouvaient encore voir onze bas fourneaux à Laagbe, prèsd’Oyo (Williams, 1973). Tous travaillaient encore à plein rendement et employaientenviron une centaine d’ouvriers. De fait, un Yoruba cultivé, habitant de Lagos,

3. Ceci est conservé dans l’Odu Ofunsa.

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52 Isaac Adeagbo Akinjogbin

qui suspectait ses contemporains d’avoir oublié, comme lui, qu’un tel savoir aitjamais existé chez eux, s’est senti obligé de leur relater la surprise qu’il avaitéprouvée en découvrant ces fonderies.

La perte par les Africains de l’initiative politique et économique, conjuguéeà une politique de découragement au développement de ces entreprises indus-trielles pour éviter la concurrence des produits locaux avec les produits importés,a indubitablement contribué à faire péricliter la métallurgie du fer dans le Paysyoruba. Celle-ci s’était poursuivie jusqu’aux environs de 1936. C’est à cetteépoque que l’on produisit du fer pour la dernière fois. Cette ultime productioneut lieu à Isundunrin, près d’Ejigbo, ville qui semble avoir tiré son nom de sonactivité.

Le schéma d’un fourneau yoruba

En 1956, lorsque le gouvernement de l’Ouest du Nigéria de l’époque lança leProgramme de recherches historiques sur les Yoruba, sous la direction deS. O. Biobaku, le fourneau d’Isundunrin ne s’était pas complètement effondré.Feu Pa David Adeniji, l’un des assistants de recherche de ce programme, quiavait reçu, enfant, une formation de fondeur de fer et travaillait probablement aufourneau d’Isundunrin avant d’aller à l’école, publia, en 1977, quelques annéesavant sa mort, une description détaillée du schéma d’un fourneau de réductiondu fer typique du Pays yoruba. La description qui suit est intégralement reprisede son ouvrage (Adeniji, 1977).

Selon Pa Adeniji, un fourneau typique de réduction du fer devait être situédans un bosquet, à distance de toute habitation mais à portée de voix. En géné-ral, on l’installait sur un terrain d’environ 200 pieds carrés (ou 70 mètres carrés)dont le sol dur bénéficiait d’un bon drainage. La fonderie était placée au centredu terrain qui devait être débarrassé de toutes ses racines et de tous ses buissons.Le bâtiment contenant le fourneau devait avoir soit une forme circulaire (styleantérieur au XIXe siècle), soit une forme rectangulaire. Quelle qu’ait été sa forme,il avait 2 entrées, l’une face à l’est pour laisser entrer l’air frais et l’autre face àl’ouest pour laisser sortir l’excédent de chaleur. Le bâtiment comportait 6 ou8 fenêtres pour permettre aux ouvriers, obligés de rester à l’intérieur parfois pen-dant 72 heures d’affilée ou davantage, de respirer. Le toit du bâtiment était beau-coup plus haut que le toit normal d’une maison afin d’éviter que le chaume neprenne feu. Une plate-forme surélevée était édifiée au centre du bâtiment pour yconstruire le fourneau proprement dit. Une petite tranchée peu profonde étaitcreusée face à l’entrée est et s’achevait à la base de la plate-forme supportant lefourneau. Une autre tranchée, plus importante, (9 × 9 × 9 pieds ou 3 × 3 ×3 mètres) était creusée face à l’entrée ouest. Les 2 tranchées étaient séparées par6 pieds (2 mètres) de terre compacte. Au sommet de cet amas de terre reposait la

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plate-forme portant le fourneau. Un trou étroit, de 2 pouces (5 centimètres) dediamètre, était percé entre la large tranchée et la base du fourneau ; il permettaità l’air de s’échapper et aux scories fondues de tomber goutte à goutte du four-neau dans la tranchée.

Autour du fourneau, érigé sur une plate-forme, on pratiquait 6 ouvertures,chacune de la largeur d’une main d’homme, reliées à la tranchée faisant face àl’est. Une tuyère était insérée dans chaque ouverture pour réguler l’arrivée d’air.Sept autres plates-formes plus petites étaient également édifiées autour de la basesur laquelle reposait le fourneau afin que les ouvriers chargés de l’alimenter et d’yverser les roches ferrugineuses à l’état brut puissent le faire commodément : lefourneau devait en effet être rempli de minerai par le haut.

Le processus de réduction du fer

Une fois le fourneau installé, le processus de fusion pouvait commencer. Il y avaittrois catégories de roches sédimentaires ferrugineuses. Les plus grandes, appeléessagodo, appartenaient à la première catégorie et contenaient le taux de fer le plusélevé. Celles de la deuxième catégorie étaient appelées afuye (pierre légère) ouoko, du nom de la ville où elles furent découvertes pour la première fois. Commeleur nom l’indique, elles étaient plus légères et avaient une teneur en fer infé-rieure à celle des roches sagodo. La troisième catégorie était dénommée agu-nwinni (sable ferrugineux). Toutes étaient extraites soit verticalement, soithorizontalement, en fonction de leur orientation sous terre. Certaines minesétaient si profondes qu’il fallait des échelles pour les exploiter et que les mineursdormaient parfois sous terre pendant des jours entiers.

L’extraction de la matière première et la fonderie du minerai dans le four-neau étaient effectuées par les hommes. Les femmes lavaient les roches de façonqu’elles soient absolument propres, les concassaient et les apportaient jusqu’aubâtiment où était édifié le fourneau, mais il leur était strictement interditd’approcher ce dernier pendant le processus de réduction lui-même.

Pour fabriquer le charbon de bois servant à obtenir la chaleur nécessaire à laréduction du fer, trois espèces de bois dur étaient brûlées. Il s’agit de l’erun (tali),également appelé obo (Erythrophleum guineense), de l’orupa dudu, égalementappelé ako orupa, et du ponhan. Les noms botaniques de ces deux derniers restentà ce jour inconnus. Pour faire démarrer le feu, on utilisait un mélange de char-bon de bois et de bouse animale séchée réduit en poudre. Quand tout était prêt,la poudre allume-feu était versée dans le fourneau, une courte cérémonie propi-tiatoire était organisée en l’honneur d’Ogun et le feu était allumé. Le charbon debois et la roche ferrugineuse étaient versés dans le fourneau dans des proportionsconvenues. Le feu était entretenu et brûlait à plein régime pendant 3 jours(72 heures) au cours desquels on parvenait à produire une température de plus

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de 1 050 °C. Puis on le laissait refroidir pendant 2 jours (48 heures) avant deretirer le fer du fourneau. Pour produire de l’acier, le fer était réchauffé à la forge,où le forgeron le débarrassait de toutes ses impuretés (appelées pepe irin) et yintroduisait du carbone. L’acier ainsi produit était largement utilisé pour fabri-quer des outils volumineux et lourds.

Peut-être serait-il bon de souligner un certain nombre de caractéristiques dela réduction du minerai de fer en Pays yoruba. Premièrement, tous les matériauxutilisés du début à la fin du processus étaient intégralement produits localementet disponibles dans pratiquement toutes les localités du Pays yoruba, même sicertaines régions étaient mieux loties que d’autres. Ils n’étaient jamais importéscar cela n’était pas nécessaire. Deuxièmement, même si la technique était simple,elle était efficace et permettait de satisfaire totalement la demande en fer et pro-duits dérivés des Yoruba. L’excédent de fer qu’il leur restait probablement étaitexporté chez leurs voisins, preuve que complexité de conception n’est pas tou-jours synonyme d’efficacité. Troisièmement, et cela ne ressort peut-être pas clai-rement de la description qui vient d’en être faite, l’ensemble du processus n’étaitpas uniquement considéré comme une opération « technique » ou « technologique » ;il avait également une certaine valeur religieuse. À chaque étape du processus deproduction, les fondeurs devaient respecter certains codes de conduite et desoffrandes propitiatoires étaient faites à Ogun, qui était révéré en sa qualité d’oni-porin akoko (premier fondeur de fer). Avant d’enflammer l’allume-feu, la naturemême du feu était invoquée afin que celui-ci parvienne à produire la plus fortechaleur possible. Le fer ainsi produit était à son tour considéré comme « pur » etcapable d’« entendre » lorsqu’on lui parlait dans le langage approprié. Il n’était ni« impur » ni « sourd », comme le fer européen.

La fabrication d’ustensiles en fer

Selon Johnson (1921), « avant le commerce avec les Européens, tous les articlesen fer et en acier, depuis les armes de guerre jusqu’aux épingles et aiguilles »étaient fabriqués par les Yoruba à partir du fer et de l’acier produits dans leurspropres fourneaux. Adeniji (1977) a tenté, sans succès à notre avis, de dresser laliste de tous les produits fabriqués dans les ateliers des forgerons yoruba. En fait,ces derniers s’enorgueillissaient d’être capables de pouvoir fabriquer à peu de choseprès n’importe quoi, pour autant qu’on leur en fît une description claire4. Ilsn’étaient pas très loin de la vérité puisque, peu après l’introduction du fusil au Paysyoruba, au XIXe siècle, ils en maîtrisèrent rapidement la fabrication ainsi que cellede balles en fer en remplacement des balles en plomb apportées par les Européens.

4. Ce qui est résumé dans l’Uprina Sauomg : « Apejuwe ni alagbede ro » [Un forgeronpeut fabriquer n’importe quel objet pourvu qu’on le lui décrive].

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La conception de l’atelier du forgeron qui produisait tous ces instrumentsétait encore plus simple que celle du fourneau5. Il s’agissait d’un abri ouvert, rec-tangulaire, d’environ 2 mètres sur 4. Son élément principal était l’Ogun qui ser-vait à la fois d’esprit protecteur et d’enclume pour le martelage lourd. L’akamo(fixé au sol) était un autre appareil destiné au martelage d’objets plus petits. Lapanoplie du forgeron se composait de l’emu (pince), de l’omo owu (petite massede fer), de l’iya owu (grosse masse de fer), du motaake (marteau de fer), de l’ilu(poinçon) et d’un obe (couteau). L’ensemble pouvait être emballé dans une caisseet emporté d’un endroit à l’autre, y compris sur le front en cas de guerre. Il yavait deux types de soufflets (ewiri), verticaux et horizontaux. Les enveloppes depalmistes (eesan) fournissaient le matériau nécessaire pour porter le fer à la tem-pérature requise. Chaque ville yoruba avait autant de forges qu’en exigeaient sonagriculture et sa défense. Une petite ville pouvait en avoir 5 et une grande villecomme Ibadan des centaines.

Contrairement aux fourneaux de réduction du minerai, le forgeage n’a pasentièrement disparu du Pays yoruba. En fait, il a fait preuve d’une remarquablecapacité d’adaptation à l’évolution de la culture technique, bien qu’il ait été offi-ciellement négligé et parfois même découragé. Aujourd’hui, les forgerons yorubafabriquent des boulons et des écrous pour les machines importées, des pièces déta-chées pour les voitures et les moteurs, et parfois des machines simples comme deségreneuses et des moulins (broyeurs). Ils pourraient faire bien d’autres chosesencore s’ils recevaient une formation appropriée et des encouragements officiels.

La technique du fer dans la culture yoruba

Comme nous l’avons déjà dit, la réduction du minerai de fer et sa fabricationn’étaient pas uniquement considérées comme un ensemble de techniques, mêmesi c’en était un indubitablement. Du fait qu’elles touchaient la survie même duYoruba, tant du point de vue de son approvisionnement alimentaire que de sasécurité, elles sont devenues parties intégrantes de son bien-être spirituel.Comme nous l’avons déjà fait observer, Ogun oniporin akoko (le premier fondeurde fer et le premier forgeron) est la divinité royale du Pays yoruba. Et partout oùse répandait l’influence politique yoruba, Ogun était présenté comme l’orisharoyal. Nous avons également relevé qu’Ogun était le saint patron de tous ceuxqui travaillaient le fer, qu’il s’agisse des fondeurs ou des forgerons. Aujourd’hui,les conducteurs de véhicules à moteur, les tailleurs, les soudeurs et quiconqueutilise du fer quotidiennement dans son métier ou sa profession reconnaissentconsciemment ou inconsciemment Ogun comme saint patron.

5. La description qui suit est entièrement tirée de mes propres observations sur leterrain.

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56 Isaac Adeagbo Akinjogbin

Comme dans la plupart des anciens métiers du Pays yoruba, les fondeurs defer et les forgerons appartenaient à des lignées spéciales (ebi). Ils portaient desscarifications faciales particulières, appelées gombo, et ogun servait de préfixe àleur nom6. Leurs couleurs favorites étaient le blanc et le noir. Le rouge était toutparticulièrement interdit. Leur boisson préférée était le vin de palme. Ils sedevaient d’être moralement droits parce que l’on prêtait à Ogun, leur dieu tuté-laire, un tempérament emporté et qu’on le pensait capable de punir instantané-ment ceux qui se seraient écartés du droit chemin. Les mineurs croyaient quetoute mauvaise action risquait d’entraîner l’effondrement du puits de mine surleur tête.

La capacité d’Ogun à punir instantanément continue d’être exploitée.Jusqu’à ce jour, quand un oba siège pour écouter une affaire, un objet en fer sym-bolisant Ogun est placé en face de lui. Le plaideur s’agenouille auprès du sym-bole et, lorsqu’il a prêté serment au nom d’Ogun, on peut être sûr qu’il nementira pas de façon éhontée. Dans les tribunaux modernes même, on pensequ’un plaideur qui prête serment au nom d’Ogun dira la vérité, car il croitqu’Ogun lui rendrait justice même si les tribunaux ne le faisaient pas.

6. Comme dans des noms tels que Ogunbayo, Ogunfansi, etc.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 57

Deuxième partie

Rencontres sur la métallurgie du feren Afrique

UNESCO, Paris,12 novembre 1999

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 59

La chaîne opératoire en sidérurgie :matériaux archéologiques et procédés. Apport des études métallographiques

Philippe Fluzin

La chaîne opératoire en sidérurgie

En partant d’un minerai, substance naturelle, pour arriver à un objet fonctionnelen fer, il faut passer par une succession d’étapes techniques au cours desquelles lamatière subit des transformations chimiques et physiques. Les études archéomé-triques des objets et déchets métallurgiques visent à reconstituer cette chaîneopératoire (figure 1).

La phase initiale de l’art des métaux consiste à séparer, au sein du minerai, lemétal des autres éléments auxquels il est associé. L’un des plus importants d’entreeux est l’oxygène (le fer possède trois oxydes : l’oxyde ferrique — hématite,Fe2O3, qui peut être hydratée, goethite, limonite… —, l’oxyde magnétique —magnétite, Fe3O4 — et l’oxyde ferreux — wustite, FeO). Il faudra éliminer l’oxy-gène à l’aide d’un autre composé chimique, par exemple le carbone que contientle charbon de bois. L’obtention du métal passera donc par la réduction successivede ces oxydes.

Les autres éléments contenus dans le minerai (gangue) seront plus ou moinsbien évacués sous la forme de scories.

On notera la tendance des métaux réduits à revenir à l’état d’oxydes (hormisl’or) au contact de l’environnement : c’est ce qu’on appelle l’oxydation (corro-sion). En effet, les métaux « vivent » dans un milieu qui contient précisémentl’élément (l’oxygène) dont on les a séparés pour les produire.

Quels que soient l’époque, le lieu et le procédé considérés, trois élémentsindissociables vont entrer en jeu au cours du processus de réduction (figure 1) :• le minerai. Le fer est le quatrième élément de la croûte terrestre mais il existe

dans le minerai sous des combinaisons minéralogiques très variées. La valeuret l’exploitation d’un minerai dépendent évidemment de sa teneur en oxydesde fer mais également et surtout de la nature et de la concentration des

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60 Philippe Fluzin

Approvisionnement des matières premières

Préparation

Élaboration

Épuration

Formage

Recherche,extraction

LavageConcassageBroyageFlottationTriageGrillageCalcinationAgglomération

Décarburation Forge Fourà puddler

Au vent Sur sole Fourélectrique

Seconde fusion, cubilot

Bas fourneau :-2000 av J.-C, Termit, Niger-1300 av J.-C, Anatolie-Four catalan

-Hõganãs (1910)-Wiberg (1919)-Krupp-Renn (1932)-Hyl-Midrex (1957)

Haut fourneau (Hochofen) :-Europe (XIIe, XIVe-XVesiècles)-Chine (800 av J.-C)-Bas fourneau électrique

Forêts Air,oxygène

MINERAI

DIRECTE(phase solide)

BASSE TEMPÉRATURE

CINGLAGE

FORMAGE

PRODUITSSEMI-FINIS

ET FINIS

FORMAGE

ACIER ACIERFER

AFFINAGE

MOYENNE TEMPÉRATURE HAUTE TEMPÉRATURE

RÉDUCTION INDIRECTE(phase liquide)

phase liquidephase solide

Forgeage Laminage1550-1600

Acier au creusetHuntsman (1740)

Italie ,Val Gabbia,Ve-VIe s.

-Wallon XVes.-Comtois XVIIIe s.-Nivernais

-Cort (1784) -Bessemer (1855)-Thomas (1875)à l'oxygène (1948)

-Martin (1864) -Moissan (1892)-Kjellin (1900)

Couléeen lingotière

Coulée continue(1942-1943)

Moulage

DémoulageRéchauffageLaminage :-blooming-stabling

COMBUSTIBLE COMBURANT

Charbonnier Charbonpulvérisé

Soufflerie :-naturelle-manuelle-hydraulique (XIIes.)-copwer (XIXes.)

CokeDarby (1709)

Bois Houille

STÜCKOFEN

Cémentation

Gisementsde houilles

ÉPONGE DE FER PRÉRÉDUIT FONTE RIBLONS

FERRAILLESÉPONGE

FER-ACIER

Figure 1. Le processus sidérurgique et son évolution historique (© P. Fluzin, 2000. Encollaboration avec V. Serneels, Institut de minéralogie, Université de Fribourg, Pérolles,1700 Fribourg, Suisse)

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 61

éléments auxquels il est associé. Le minerai est donc rarement utilisé tel qu’ilest extrait de la mine. Sa préparation se fait par un certain nombre de traitementspréliminaires (lavage, concassage, triage, calibrage, grillage, calcination…) ;

• le combustible (charbon de bois, tourbe, coke…). Le carbone qu’il contientest un agent triple : thermique, réducteur et se combinant avec le fer pourdonner l’acier et la fonte (planche VIII). La différenciation entre fer, acier etfonte est fondamentale dans l’histoire de la sidérurgie. L’homme sait parfai-tement les distinguer par leur aspect visuel et mécanique, mais il faudraattendre les travaux de Roozeboom, en 1889, et d’Osmond, en 1898 (Che-zeau et Fluzin, 1997), pour disposer de diagrammes d’équilibre qui permet-tent de définir théoriquement le domaine d’existence du fer, de l’acier et desfontes (fer pur : moins de 0,02 % de carbone, acier : de 0,02 à 1,7 % de car-bone, fonte : de 1,7 à 6,67 % de carbone) ;

• le comburant (oxygène de l’air). C’est principalement ce facteur qui condi-tionne le niveau des températures atteint dans les fours. Cherchant à amélio-rer celui-ci, on abandonnera le tirage naturel pour des procédés à air pulséd’abord manuels (soufflets) puis hydrauliques (au XIIe siècle) et mécaniques.

Comme l’indique la figure 1, il est donc indispensable de considérer dans le pro-cessus sidérurgique de nombreuses étapes : préparation, réduction, épuration,forgeage et mise en forme… Nous résumerons certaines d’entre elles ci-après.

Les procédés d’élaboration du métalet les principaux vestiges archéologiques associés

Sans chercher à entrer dans le débat des origines plus ou moins controversées dela sidérurgie (Pleiner, 2000) — il n’y a sans doute pas qu’un seul centre d’origineet de diffusion : 1300 av. J.-C. en Anatolie, 2000 av. J.-C. au Niger, site de Ter-mit (nos récents travaux en RCA indiquent l’existence très ancienne de plusieursfoyers en Afrique) —, il nous semble plus opportun de résumer les étapes del’évolution des procédés sidérurgiques (figure 1).

Ces derniers présentent de nombreuses variantes que l’on peut toutefois syn-thétiser en prenant comme premier critère la température atteinte dans les foursqui conditionne l’état physique des matériaux traités. Soit T la température per-mise par le procédé utilisé et Tf la température de fusion du métal :• si T est inférieure à Tf, nous sommes dans le cas de la filière dite directe (on

passe directement du minerai au fer et/ou à l’acier). Le métal issu de la réduc-tion est encore à l’état solide (pâteux), seules les scories peuvent s’écouler dufourneau ;

• si T est supérieure à Tf, nous abordons la filière indirecte. Les produits issusde la réduction sont liquides : la fonte et le laitier. Bien que la fonte puisseêtre moulée, elle n’est pas forgeable car trop cassante et devra être décarburée

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pour obtenir l’acier selon deux grandes familles d’affinage ; l’affinage sansfusion et l’affinage avec fusion. C’est à cause de cette étape supplémentaire,l’affinage, que l’appellation indirecte a été retenue. Nous aborderons dans cetexte essentiellement les aspects concernant la sidérurgie directe (pour lasidérurgie indirecte, voir Fluzin, 1999 et 2000a et b ; Petrequin et al., 2000).

L A C H A Î N E O P É R A T O I R E E N S I D É R U R G I E D I R E C T E

En sidérurgie directe, il est possible de distinguer trois étapes principales (réduc-tion, épuration et élaboration de l’objet) qui sont ou non liées dans l’espace(planche I).

Chacune de ces étapes implique un procédé et génère un produit et desdéchets plus ou moins spécifiques. Nous les résumerons sommairement enn’entrant pas dans la description des processus physico-chimiques.

La réduction

La première étape consiste à transformer (par réduction) le minerai de fer enmétal brut dans un bas fourneau (planche I, photos 1 et 2). Cette opération, quicombine minerai, charbon de bois et oxygène de l’air, s’effectue à une températureinférieure à celle de la fusion du métal. Le fer et l’acier issus d’une telle opérationdemeurent à l’état pâteux. La gangue du minerai se transforme, quant à elle, en unescorie plus ou moins liquide (suivant la composition du minerai ou l’emploid’ajouts : les fondants). Elle s’écoule ou s’accumule à l’intérieur ou à l’extérieur dufour (planche I, photos 4, 5 et 6). L’étude morphologique détaillée des scoriesapporte des informations sur le fonctionnement et l’architecture du fourneau(Groupe de travail suisse de l’archéologie du fer, 1997 ; Leroy, 1997 ; Serneels,1993). On trouve principalement des scories ayant coulé à l’extérieur du fourneausous forme de plaques ou de cordons simples ou superposés (planche I, photo 4).Elles peuvent mouler une dépression ou un chenal aménagés devant le fourneaupour les recevoir (Biélenin et al., 1998). Les scories qui restent dans le fourneau seprésentent sous forme de blocs plus ou moins compacts moulant le fond de la cuveou imbriqués dans la masse du charbon de bois (planche I, photos 5 et 6). Les sco-ries de réduction directe sont en général denses et constituées de silicates et d’oxy-des de fer accompagnant une phase vitreuse plus ou moins abondante. Danscertains cas, lors du refroidissement, la porosité est beaucoup plus importante (sco-ries spongieuses, légères). Ces scories forment des accumulations parfois trèsimportantes (ferriers), souvent repérables sur le sol lors d’une prospection.

Il ne nous est pas possible de faire une typologie précise des bas fourneauxtant leur diversité est grande, mais il est possible de les regrouper par exemple entrois familles selon que la scorie se sépare plus ou moins facilement du métal etqu’elle s’écoule à l’intérieur ou à l’extérieur du fourneau (Pelet, 1982 ; Biéleninet al., 1998 ; Serneels, 1998 ; Pleiner, 2000).

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64 Philippe Fluzin

Planche I. La réduction directe et ses produits

Photo 1. Mission ethno-archéologique : bas fourneau contemporain au Burkina Faso,site de Toungaré, province de Bulkiemdé, 1994 (© P. Fluzin).Photo 2. Reconstitution expérimentale : bas fourneau sur le modèle de type 2 desClérimois (Yonne), archéodrome de Beaune, 1996 — C. Dunikowski, S. Cabboï,P. Fluzin et A. Ploquin (© P. Fluzin).Photo 3. Reconstitution ethno-archéologique : forges d’Agorregi, Pays basque (Espagne),1999 — M. Urteaga, P. et S. Crew, P. Fluzin, R. Herbach, V. Serneels et P. Dillmann(© P. Fluzin).Photo 4. Scories denses coulées en plaques (cordons successifs). Expérimentation basfourneau de type Aulnay-Truchet (Sarthe), 1997 — C. Dunikowski, S. Cabboï,P. Fluzin et A. Ploquin (© P. Fluzin).Photo 5. Scories coulées internes. Site archéologique de Danawel (Sénégal), 1995 —H. Bocoum et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 6. Fond de four : fouille A 28. Site d’Aulnay-Truchet (Sarthe), 1997 —S. Cabboï (© P. Fluzin).Photo 7. Loupe contemporaine. Mission ethno-archéologique, site de Toungaré(Burkina Faso), 1994. Poids 60 kg (© P. Fluzin).Photos 8 et 9. Reconstitution ethno-archéologique : forge d’Agorregi, Pays basque(Espagne), 1999, loupe n° 8, 21 kg — M. Urteaga, P. et S. Crew, P. Fluzin, R. Herbach,V. Serneels et P. Dillmann (© P. Fluzin).

Quel que soit le type de bas fourneau, on introduit dans sa partie supérieurealternativement du charbon de bois et du minerai (ou des mélanges de mineraiset éventuellement des fondants). La combustion est assurée par une ventilationnaturelle et/ou artificielle en utilisant des soufflets.

Le nombre de paramètres intervenant dans la conduite de l’opération deréduction est très important. Seul le savoir-faire permet de les maîtriser. Celui-cine laissant hélas aucune trace archéologique, il est indispensable, pour tenter del’appréhender, d’effectuer de nombreuses expérimentations et, dans la mesure dupossible, d’observer in situ et in vivo les rares ethnies africaines appliquant encorecette technique (en se méfiant d’une comparaison totale) (Celis, 1991 ; Fluzinet al., 1995 ; Petrequin et al., 2000 ; Fluzin, Serneels et al., à paraître). À l’issuede la réduction (dont la durée, qui varie avec le type de fourneau et les conditionsde ventilation, peut, selon nos expérimentations, aller de 4 à 24 heures), onretire du fourneau (par une ouverture ou en détruisant le four) une masse plusou moins hétérogène et spongieuse : l’éponge de fer (massiot, loupe) (planche I,photos 7, 8 et 9). Elle peut peser (suivant la taille du four et la quantité de mine-rai introduit) de quelques centaines de grammes à 90 kilos pour des exemplesafricains que nous connaissons. C’est un agglomérat plus ou moins compact demétal (fer/acier) (planche I, photo 9), de scories et de charbon de bois. La maî-trise de la conduite du procédé de réduction influence beaucoup sa « qualité » et

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 65

l’éponge de fer est donc rarement suffisamment dense et pure pour ne pas exigerun travail d’épuration. Il est vraisemblable que, dans presque tous les cas, ce tra-vail est indispensable.

L’épuration

L’épuration consiste en un martelage à chaud (cinglage) de la loupe afin de den-sifier le métal en évacuant les impuretés (planche II). Suivant la qualité (homo-généité, compacité de la loupe), nous pouvons distinguer au moins deux grandesfamilles d’épuration (figure 2) :• le travail à partir de la masse directement à la sortie du four ou après passage

dans un foyer ou un four spécifique (planche II, photo 10) ;• la fragmentation de la loupe en morceaux plus ou moins importants afin

éventuellement de les trier (séparation des stériles mais aussi du fer et del’acier comme le pratiquent notamment certains artisans japonais) et de lesassembler ensuite à la forge (planche II, photo 11).

Il peut être tout à fait intéressant d’effectuer une première épuration (dégrossis-sage) de la loupe dès la sortie du four de réduction. En effet, en profitant del’inertie thermique, cela favorisera l’agglomération du métal et sa compacité touten évacuant un certain nombre de stériles. Toutefois, un travail de forge d’épura-tion plus poussé est souvent indispensable et s’effectue a priori dans un foyer ouun four spécifique (planche II, photos 12 et 13). Il est à cet égard intéressant dementionner le cas où la loupe est introduite telle quelle (ou par gros fragmentssuivant son volume) dans de tels fours afin de fluidifier au maximum les scoriesassociées (notamment dans le cas que nous appelons de loupe « sale »). Certainsexemples ethnologiques et archéologiques démontrent cette pratique (Martinelliet al., 2000). L’éponge de fer (loupe) est ainsi « asséchée » plus ou moins effica-cement de ses scories externes (et internes) en générant une configuration parti-culière de vestiges : les scories coulées de type « canal » (Biélenin et al., 1998).

Notons que dans ce cas, suivant la nature plus ou moins réductrice de l’opé-ration, on peut également contribuer à renforcer la carburation de l’éponge parcémentation. Il n’est pas absurde de pouvoir ainsi obtenir des aciers très carbu-rés, voire de la fonte (Fluzin, 1999), en repassant plusieurs fois la loupe dans lemême fourneau (il n’est pas exclu de réutiliser le bas fourneau pour ce typed’opération).

En ce qui concerne les déchets associés à l’opération d’épuration — qui peutcomporter plusieurs étapes : dégrossissage primaire et secondaire (Mangin et al.,2000b) —, ils peuvent être de nature très variée : fragments de scories coulées,scories informes plus ou moins riches en métal, fragments métalliques déchique-tés imbibés de scories… Ce sont ces derniers types de déchets que l’on qualifiede gromps (Nosek, 1994) (planche II, photo 15). Ils sont caractéristiques del’activité même de « compactage » de la loupe. Leur proportion varie considéra-blement d’une loupe à l’autre en fonction de la qualité de celle-ci (densité du

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66Philippe Fluzin

ESSAI DE TYPOLOGIE DES PRATIQUES D'ÉPURATION

EN FONCTION

DEUX GRANDES FAMILLES DEGRÉ CROISSANT D'ÉPURATION MISE EN FORME

DE L'OBJET

DE

GR

É D

E T

RA

NS

FOR

MA

TIO

N

A. Dans la continuité de la réduction (proximité de lieu)

B. Après interruption (lieu différent)

ÉPONGE CHAUDE

ÉPONGE FROIDE

THERMIQUE

MÉCANIQUELOUPE

LOUPE

Dégrossissage,compactage,fragmentation éventuelle

RéchauffageSéparation-fluidification des scoriers

CulotScories coulées(type canal)

Concassage,séparation métal-scorie

Fragmentation,tri sélectif fer-acier

LOUPEou fragmentde loupe(gromps)

CulotScories BattituresGromps

Soudure,association directeou en creuset

demi-produit

- Des dimensions et de la qualité de l'éponge de fer, de la loupe (densité, hétérogénéité : loupe «sale ou propre»)- Du savoir-faire- De la destination et de l'usage du demi-produit (lingot, ébauche) puis du produit fini (objet)

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CulotScories Battitures

CulotScories Battitures

Figure 2. La chaîne opératoire du fer : l’épuration (© P. Fluzin, 1999)

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68 Philippe Fluzin

métal, propreté « inclusionnaire », porosité…). Divers matériaux fondus s’accu-mulent au fond du foyer d’épuration (planche II, photo 14) et forment une sco-rie en forme de calotte plus ou moins hémisphérique, ou culot (planche II,photos 16 et 17).

Les culots ou calottes d’épuration sont généralement de taille importante etsont hétérogènes, avec de nombreuses inclusions de fragments métalliquestémoignant d’une activité thermomécanique sommaire (Mangin et al., 2000b)(planche II, photo 17). Cependant, l’aspect morphologique (masse) des culotsn’est pas un critère discriminant suffisant comme l’indiquent nos travaux concer-nant les forges de Blessey (Mangin et al., 2000a). En effet, la taille d’un culot estplutôt liée à la quantité de matière travaillée (avec ou sans ajouts).

Par ailleurs, l’étude archéométrique d’un culot synthétise une informationglobale très importante en ce qui concerne l’activité de forge pratiquée dans lefoyer qui l’a engendré. Celle-ci peut être plurielle. Les chutes de métal (frag-ments, ébauches, rebuts, produits de recyclage et de récupération d’objets…),quant à elles, délivrent une information sélective sur l’objet technique qui estd’un autre ordre que celles qu’apportent les déchets de type scorie : qualité du

Planche II. L’épuration, pratiques et déchets

Photo 10. Reconstitution ethno-archéologique : forges d’Agorregi, Pays basque(Espagne), 1999 — M. Urteaga, P. et S. Crew, P. Fluzin, R. Herbach, V. Serneels etP. Dillmann (© P. Fluzin).Photo 11. Procédés traditionnels japonais. réduction, épuration par fragmentation de laloupe, forge de lames, polissage. Nancy, Jarville 1989 — O. Masami, W. Ryosui,P. Merluzzo, C. Forrières, A. Thouvenin et A. Ploquin (© P. Fluzin).Photo 12. Foyer de forge d’épuration contemporain. Mission ethno-archéologique, sitede Toungaré (Burkina Faso), 1994 (© P. Fluzin).Photo 13. Foyer de forge d’épuration et de mise en forme d’objets. Expérimentation,Nancy, 1997 — D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).Photo 14. Culot (1,5 kg) après épuration d’une loupe de 4,7 kg. Expérimentation,Nancy, 1997 — D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).Photo 15. Gromps. Macrographie avant et après coupe. Agglomération antique deBlessey-Salmaise (échantillon F104/06 : 109 g) (Côte-d’Or), 2000 — M. Mangin etP. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 16. Culot de forge (409 g), site de Cricket (Alexandrie, Égypte), époquehellénistique — V. Pichot et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 17. Section de culot archéologique. Site de Ponte di Val Gabbia, Bienno (Italie),Ve-VIe siècle apr. J.-C. ; poids 2,5 kg, 1998 — C. Cuccini-Tizzoni, M. Tizzoni etP. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 18. De gauche à droite : fragment de métal, scories, billes de scories récupérées aufond du foyer d’épuration. Expérimentation, Belfort, 1995 — D. Leclère et P. Fluzin(© P. Fluzin).

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 69

métal travaillé, dextérité du travail (soudures, traitements thermiques, typed’outil utilisé…).

Il convient d’être conscient de ces spécificités et de pratiquer des études croi-sées aussi larges que possible lors de la sélection de l’échantillonnage compte tenude leur complémentarité.

La proportion de scories associées au travail d’épuration d’une loupe« propre » ou d’une épuration secondaire peut être relativement faible. Il est clairque ce n’est pas le cas pour une loupe comportant encore une grande proportiond’éléments non métalliques (loupe « sale ») et lorsque l’on utilise des ajouts,désoxydants ou fondants (sable, argile…).

D’après nos expérimentations, d’une part, et l’ethno-archéologie, d’autrepart, il s’avère que l’épuration d’une loupe considérée comme « sale » occasionnedes pertes d’environ 80 % de son poids initial pour obtenir un lingot (Crew,1991 ; Dillmann et al., 1998 ; Fluzin, 1999 ; Leroy, 2000). Ces pertes se répar-tissent comme suit : 50 % pour des éléments à forte teneur en métal déchiqueté,enrobés de scories, qui pourront par extension être voisins de ce que l’ondénomme des gromps, 10 % de battitures et 20 % de scories et de billes. Dans lecas de l’épuration d’une loupe « propre », les pertes sont de l’ordre de 50 % seu-lement, avec une forte proportion en début d’opération. Le poids du culotobtenu, sans tenir compte d’éventuels ajouts, est proche de la moitié de la loupeinitiale. Ces données, si elles peuvent contribuer à estimer prudemment lesquantités produites (métal, déchets), indiquent surtout une perte importante defragments métalliques dont certains se retrouvent dans les culots ou les scoriesinformes (gromps).

L’utilisation d’une enclume massive en métal (acier) se révèle inappropriéeau début de l’opération d’épuration surtout dans le cas d’une loupe hétérogène(compacité insuffisante, présence de fer et d’acier introduisant le problème despaliers de soudabilité…). En effet, la propagation des ondes de choc contribue àdésolidariser le métal en cours d’agglomération et entraîne une perte importante.C’est pour cette raison que nous avons, dans nos expériences, commencé l’épu-ration au billot de bois (planche IV, photo 28) avant de la terminer à l’enclumemétallique. L’usage d’un maillet en bois est également favorable à ce stade.

Il convient donc toujours, lors de la fouille d’un site de forge, de ne pasoublier qu’une enclume n’est pas nécessairement en métal. Outre la notion decoût d’un tel outil, le bois et la pierre (planche IV, photos 29 et 30) peuvent êtreemployés avec pertinence pour de nombreux travaux de forge compte tenu de laqualité intrinsèque de ces matériaux (ici aussi, l’apport de l’ethno-archéologie estconsidérable). Ils atténuent la propagation de l’onde de choc et sont donc parti-culièrement adaptés aux opérations de soudure (épuration, recyclage…). Le boisn’est pas toujours conservé mais, en ce qui concerne la pierre, il est importantd’observer in situ les surfaces de celle-ci afin de déceler certains plans de frappeou d’oxydation superficielle (planche IV, photo 30). Par ailleurs, les dimensions

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de l’enclume sont également à considérer. En fonction du travail à réaliser, il n’estpas systématiquement nécessaire de posséder une enclume massive. Les enclu-mes « Tas » en sont un bon exemple (planche IV, photo 31). Enfin, en l’absencede vestiges matériels concernant l’enclume, il est souvent possible de localiser saposition par rapport au foyer de forge compte tenu d’exigences fonctionnelles etde différences de coloration du sol dues à la présence de battitures. L’atelierF 104 de Blessey illustre parfaitement ces remarques (Mangin et al., 2000a).

Le produit issu de l’épuration est en principe un demi-produit (lingot) plusou moins bien manufacturé comme en témoignent quelques exemples archéolo-giques et de reconstitution (planche III). La qualité de la mise en forme du lin-got, compte tenu des efforts qu’elle nécessite, doit traduire la spécialisation d’unatelier ou une destination particulière à caractère « commercial » (cas des lingotsbipyramidaux — planche III, photos 24 et 27 — ou des currency bars (sortes debarres plates) — planche III, photo 21). En effet, les exemples africains nousindiquent que pour une utilisation locale, on ne se soucie pas de produire desformes particulièrement élaborées (Fluzin, 1994) (planche III, photo 19).

Il est intéressant de constater que dans la Gaule rurale, les demi-produits quicirculaient n’avaient pas une qualité d’épuration excellente et étaient plus pro-ches de fragments de loupes sommairement épurées (Mangin et al., 2000b).

Les lingots peuvent donc prendre l’aspect de fragments de loupes sommaire-ment épurées (planche III, photo 19), de barres (planche III, photo 20), defeuilles repliées sur elles-mêmes, de « saumons » (planche III, photos 22, 23, 25et 26), de bipyramides effilées (planche III, photos 24 et 27), d’ébauches et decurrency bars (planche III, photo 21). Leur taille varie en fonction des loupes ini-tiales, du degré d’épuration, de la nature du métal (fer/acier) et de la destinationdu produit.

Le forgeage de l’objet

Cette troisième phase de la chaîne opératoire est pratiquée par le forgeron surl’enclume pour mettre en forme les objets (planche IV, photo 32). L’emploi duterme forgeage devrait être limité aux traitements thermomécaniques de mise enforme et aux traitements thermochimiques qui modifient la structure et la com-position du métal. Le matériau de départ peut être un lingot ou une pièce demétal correspondant à une ébauche de l’objet à produire, ou encore un lopin issudu recyclage de différents fragments métalliques. Les déchets les plus caractéris-tiques de cette étape sont les battitures, petites plaquettes d’oxydes de fer qui sedétachent de la surface du métal au cours du martelage (planche IV, photo 34).Elles sont évidemment abondantes à proximité de l’enclume. Cela peut, commenous l’avons indiqué, signaler son existence même quand elle n’est plus là. Lesbattitures sont en effet le résultat de l’oxydation du métal après son passage dansle foyer de forge et son martelage. Pour la fabrication d’un objet donné, la pro-

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés

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72 Philippe Fluzin

portion de battitures produites est indirectement liée au nombre de passagesdans le foyer (chaude). Le martelage est, quant à lui, dépendant du savoir-fairedu forgeron et de la complexité de l’objet à réaliser.

D’après nos expérimentations dans une forge, les pertes au feu pour produireun objet (pointerolle, épée) sont de l’ordre de 10 % du poids initial du métal debase (lingot). Il faut souligner, dans ce cas, d’une part que le demi-produit étaitparfaitement épuré et, d’autre part, que la dimension des battitures était fonctiondu métal travaillé ; l’élaboration d’un objet de petite dimension (un clou dechaussure, par exemple) engendre de petites battitures, ce qui n’est pas le cas,bien sûr, pour une épée. Cela dit, les battitures ont tendance à se fragmentercompte tenu de leur faible épaisseur et de leur grande fragilité. Par ailleurs, ilconvient de rappeler que l’emploi d’ajout (pour faciliter les soudures) modifieleur morphologie et leur nature.

Il peut être intéressant, à titre indicatif, d’estimer la quantité de métal tra-vaillé lors de la fouille d’une forge en effectuant un prélèvement et un tamisagedes battitures comme nous l’avons réalisé pour les forges de Blessey (Mangin etal., 2000a). Dans le foyer, les diverses matières fondues peuvent s’accumuler etformer une scorie en forme de calotte (planche IV, photo 33). Fréquemment, lesdésoxydants (sable, argile, etc.) apportent une contribution importante à la for-mation des culots de forge. On trouve aussi des scories informes plus ou moinsriches en métal, souvent fortement oxydées. En principe, ce travail ne produitpas de scories coulées ; si elles existent, c’est en petite quantité. Les autres déchetscaractéristiques correspondent à des chutes de métal plus ou moins travaillé(planche IV, photos 35 et 36).

Planche III. Les demi-produits et les lingots

Photo 19. Loupe épurée considérée comme un lingot (époque contemporaine, 420 g).Mission ethno-archéologique, site de Toungaré (Burkina Faso), 1994 (© P. Fluzin).Photo 20. Lingot gallo-romain en forme de barre irrégulière : site de Touffreville(Calvados), 1995. Poids : 2,410 kg ; longueur : 21 cm ; largeur maximale : 5,5 cm ;section trapézoïdale : 5,5 × 5,4 × 4 cm — N. Coulthard et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 21. Barre ébauche du type currency bars : site d’Aulnat (Auvergne), 250-200av. J.-C., 737 g — L. Orengo et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photos 22 et 25. Lingot (probablement) gallo-romain : site de Coulmier-le-Sec (Côte-d’Or), poids 4,7 kg, longueur 16,3 cm, section médiane 7,5 × 7,2 cm — J. Dumont(© P. Fluzin).Photos 23 et 26. Lingot de Carthage (IVe-IIIe siècle av. J.-C.). Poids : 1,77 kg ;longueur : 20 cm ; largeur : 6,5 cm ; épaisseur : 4 cm — F. Essaadi et P. Fluzin(© P. Fluzin).Photo 24. Lingot bipyramidal (dragage de l’Oise). Poids : 4,3 kg ; longueur : 55 cm ;section médiane : 6,3 × 5,3 cm (© P. Fluzin).Photo 27. Quart de section de lingot bipyramidal. Poids total : 4,3 kg — M. Leroy,P. Merluzzo et P. Fluzin (© P. Fluzin).

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés

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28 31 34

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On voit que si les déchets issus de la réduction et ceux produits par les opé-rations d’épuration et de mise en forme peuvent être aisément distingués, l’iden-tification de ceux issus des deux stades postérieurs à la réduction est plus difficile.Ces deux stades peuvent se pratiquer dans le même atelier, en utilisant les mêmesfoyers ou des foyers analogues juxtaposés, et ils peuvent ne constituer qu’uneseule opération. L’éponge de fer dégrossie de ses scories est purifiée par cinglageet immédiatement, ou très rapidement, transformée en demi-produit (barre, lin-got) puis, éventuellement, en objet, dans le même cadre spatial et avec les mêmesstructures et les mêmes outils. Il faut signaler à ce sujet que la quantité de déchets(scories), en proportions relatives à l’opération, décroît lorsque l’on passe de laréduction à la forge (épuration, élaboration), tout en considérant bien entenduque le nombre d’opérations réalisées ainsi que le volume des produits traitésl’influencent forcément.

A R C H É O M É T R I E D E S V E S T I G E S S I D É R U R G I Q U E S

Méthodologie

Les méthodes d’investigation sur les matériaux archéologiques au laboratoirepeuvent contribuer de manière très significative à la compréhension des vestigesmétallurgiques. De nombreuses possibilités d’analyses sont offertes et apportentdes résultats complémentaires (Serneels, 1994 ; Ploquin, 1994 ; Mangin et al.,2000b). La recherche dans ce domaine est en progrès constant.

Planche IV. La forge : pratique, outils et déchets

Photo 28. Épuration de loupe avec enclume en bois. Expérimentation, Belfort, 1995 —D. Leclère et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 29. Épuration sur pierre, Yelwani (Niger) (d’après G. Célis, 1991a).Photo 30. Enclume de pierre 0,33 × 0,20 m, hauteur 0,17 m, 18 kg. Agglomérationantique de Blessey-Salmaise (Côte-d’Or) — A. Faivre, M. Mangin et P. Fluzin(© P. Fluzin).Photo 31. Enclume ethnologique, Naudjèla, province du Bulkiemdé (Burkina Faso).Longueur : 145 mm ; largeur : 69 mm ; poids : 1,6 kg — H. T. Kienon et P. Fluzin(© P. Fluzin).Photo 32. Fin d’épuration d’une loupe à l’enclume. Expérimentation, Nancy, 1997 —D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).Photo 33. Culot de forge gallo-romain (Saverne). Poids : 205 g, vue de dessus —A. M. Adam et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 34. Battitures lors de la forge d’un objet — D. Leclère et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 35. Chutes de forge, site d’Aigueperse (Auvergne), fin IIe siècle av. J.-C. —L. Orengo et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 36. Chute de métal avec empreinte de tranche à chaud (30 × 22 mm, 24 g).Agglomération antique de Blessey-Salmaise (Côte-d’Or) — M. Mangin et P. Fluzin(© P. Fluzin).

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 75

Cependant, les résultats de ces examens, relativement lourds et coûteux,dépendent étroitement de la qualité de l’échantillonnage et des autres donnéesfournies par les constats archéologiques de terrain. Lors de la fouille d’ateliers, larépartition spatiale spécifique de certains déchets permet d’identifier des aires detravail spécialisées (minerai non réduit dans les aires de chargement des bas four-neaux, battitures autour d’une enclume, etc.).

En plus de l’étude des structures et des relations stratigraphiques, il est essen-tiel de prendre en compte l’ensemble des déchets métallurgiques (répartition,classification macroscopique, tri et quantification). C’est une condition indis-pensable à la réalisation d’un échantillonnage réellement représentatif. Parailleurs, il convient de ne pas oublier l’éventuelle présence de déchets « exotiques »associés à d’autres, plus « classiques », et qui peuvent correspondre à des échecs,à des essais, à des mélanges. À l’échelle de l’échantillon, l’étude de laboratoire estcompliquée par l’hétérogénéité de la physico-chimie des matériaux résultant dela métallurgie du fer en phase solide. La cinétique des procédés mis en œuvre esten général très loin d’atteindre les conditions d’équilibre théoriques (gradient detempérature et de pression dans les fourneaux, irrégularités dans les fluxgazeux…). Quelles que soient les méthodes d’investigation, l’observation devraêtre effectuée sur des prélèvements suffisamment grands pour être représentatifs.Dans bon nombre de cas, c’est l’échantillon entier qui devra être étudié, en par-ticulier pour les méthodes reposant sur un examen microscopique (« examenmicro de l’ensemble macro »).

Les hypothèses élaborées à partir des observations sur les matériaux archéo-logiques peuvent être confrontées en comparant ces derniers aux déchets et pro-duits des reconstitutions expérimentales (Fluzin et al., 2001) et à ceux provenantdes procédés traditionnels tels que l’on peut encore les observer dans certainesparties du monde. L’ethno-archéologie fournit ainsi des données d’intérêtmajeur sur les aspects sociaux et économiques de la sidérurgie : gestuelle techni-que, transmission des savoir-faire, organisation du travail et des échanges avec lesautres activités… (Fluzin et al., 1999).

Les différentes approches

C’est empreint d’humilité que l’archéomètre essaiera honnêtement de considérertous les faits physico-chimiques observés pour tenter une interprétation pluridis-ciplinaire. Les erreurs d’interprétation sont sans doute amoindries par l’expé-rience, le nombre des échantillons traités, la confrontation des données obtenuesavec différentes méthodes, la collaboration transdisciplinaire (notamment enassociation la plus étroite possible avec l’archéologue de terrain), mais ellesdemeurent. Il faut rappeler que le problème de la représentativité de l’échantillonétudié reste au centre de toute démarche de ce type.

Dans le cadre de cet article, seules les approches archéométriques visant àinterpréter les déchets métallurgiques en tant que témoignages d’une étape

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76 Philippe Fluzin

technique seront discutées, mais d’autres démarches sont envisageables : data-tion des scories par thermoluminescence ou archéomagnétisme, par exemple. Demême, il ne faut pas négliger la contribution des sciences naturelles à l’étude dela métallurgie ancienne (identification des charbons et autres combustibles…).

L’étude au laboratoire des déchets métallurgiques porte essentiellement surl’identification des constituants (chimie et minéralogie) et l’observation des tex-tures microscopiques qui témoignent du mode de formation de ces matériaux.Plusieurs techniques sont mises à contribution, de la plus grande échelle d’obser-vation à la plus petite (les spécialistes concernés, métallurgistes, géologues et physi-ciens, peuvent parfois avoir certaines différences d’approche et d’interprétation).

La métallographie (Fluzin, 1999 ; 2000a et b) contribue de façon majeure àl’identification des phases métalliques et aux observations portant sur l’aspect desgrains, les oxydes, les inclusions en relation avec leur environnement et les textu-res macroscopiques (matrice).

En général, l’échantillon est coupé et la surface obtenue est finement polie(jusqu’à 1 micromètre). L’étude se fait alors avec un microscope qui permetd’observer la disposition et la forme des grains de métal en utilisant le fort pou-voir réflecteur de ces matériaux (lumière réfléchie). L’utilisation de différentsréactifs facilite l’observation. La dureté du matériau peut être mesurée par poin-çonnement ponctuel (indentation). Des sections polies de grandes dimensions(supérieures à 100 centimètres carrés) peuvent ainsi être observées.

On soulignera que des résultats complémentaires peuvent être obtenus pardes méthodes plus fines. C’est en particulier le cas des analyses chimiques élé-mentaires ponctuelles (microsonde électronique à balayage…). En général, onutilise pour ce type d’étude des lames ou sections polies de petites dimensions.Pour résoudre des questions spécifiques, le recours à des techniques de pointe(rayonnement synchrotron) est parfois nécessaire, comme dans le cas de lamicroanalyse (microdiffraction et microfluorescence X) des inclusions nonmétalliques dans les matériaux (Dillmann et al., 1998) (voir ci-après).

L’illustration de quelques résultats

L E S I N D I C E S D E D I S C R I M I N A T I O NM É T A L L O G R A P H I Q U E S ( P L A N C H E S V À V I I I )

L’objectif est de préciser un certain nombre d’indices discriminants de la chaîneopératoire pour tenter de cerner, d’un point de vue métallographique, ce qui sepasse entre la réduction (loupe) et la mise en forme d’un objet. À cet égard, il estimportant de préciser que si la présence d’un indice peut être révélatrice d’uneopération, son absence est également une information très intéressante. En effet,l’inexistence d’un faciès typique peut aussi être considérée comme une informa-

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 77

tion importante ; elle permet en quelque sorte un raisonnement par élimination.Par ailleurs, compte tenu de leurs spécificités, certains indices peuvent « survivre »(héritage) à plusieurs opérations (c’est par exemple le cas pour les replis et les glo-bules concentriques lors de la réduction et de la première phase d’épuration…),mais ils peuvent être « incompatibles » avec d’autres opérations : c’est le cas,notamment, des structures d’écrouissage dans des scories de réduction…

En tout état de cause, c’est l’analyse de cohérence de la présence et/ou del’absence des différents indices qui permet d’élaborer les hypothèses les plus fia-bles. Notons que la maîtrise de la conduite du procédé de réduction conditionnela qualité du produit obtenu (loupe « propre » ou « sale » en fonction de la den-sité de métal, de la proportion de scories et de charbon de bois, de l’abondancedes porosités…) et, par conséquent, la quantité et le type de déchets de postré-duction (scories, gromps, culots de tailles et de morphologies diverses…).

L E S I N D I C E S D E R É D U C T I O N ( P L A N C H E V )

Nous donnerons quelques exemples d’indices métallographiques observés dansdes scories « coulées », qui sont généralement les plus nombreuses, mais aussidans certains gromps et dans des culots d’épuration.

Comme nous l’avons déjà signalé (Fluzin, 1994), la proportion relatived’espèces à faible degré d’oxydation doit être prépondérante, compte tenu del’atmosphère réductrice (rapport wustite/magnétite/hématite), sans toutefoisexclure des réoxydations marginales (superficielles ou localisées). Il s’agit bien deconsidérer ici l’importance relative des différents oxydes car l’exemple isolé de lawustite (FeO) peut ne pas être significatif dans la mesure où son domaine d’exis-tence est relativement vaste. Une oxydation postopération (corrosion générali-sée) ne peut faire apparaître cet oxyde dans la mesure où il n’y a pas eu deréchauffage ultérieur (supérieur à 570 °C). La présence d’hydroxyde de fer estdans ce cas l’indice prépondérant.

Le métal (fer/acier) peut prendre différents aspects tout en privilégiant un« contact intime » avec la matrice (fayalite…) sans oxydation périphériquemajeure de l’élément métallique et sans indice de déformation thermomécani-que. Il peut se présenter en globules souvent monocristallins, distribués en fila-ments et/ou en chapelets localisés à proximité de vecteurs réducteurs (charbon debois, puits de diffusion, bulle gazeuse) (Fluzin, 1994). Cette configuration(planche V, photos 37 à 40) peut même correspondre aux anciens grains deminerai comme l’illustre le cas le plus « visuel » du minerai oolithique lorrain(Leroy, 1997) (planche V, photo 37). L’agglomération de ces globules métalli-ques est plus ou moins importante en fonction de l’élimination de la scorieinterstitielle (processus d’« assèchement de l’éponge de fer ») (planche V,photos 39 à 41).

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 79

Il peut prendre l’aspect d’un polycristal avec agglomération centripète depetits globules à proximité ou non d’une porosité (Fluzin et al., 1995)(planche V, photo 45).

Il peut également se développer au sein de la wustite (réduction partielle outotale dans des globules), y compris lorsque celle-ci présente un aspect dendriti-que (Fluzin, 1995). La structure de solidification dendritique qui nécessite loca-lement une température supérieure au point de fusion est également unindicateur des conditions thermodynamiques de l’environnement. Ainsi, la tailleet la morphologie des dendrites nous renseignent sur les conditions thermiquesdu contexte (niveau de température, cinétique et sens du refroidissement). Laprésence de dendrites de wustite de taille importante indique le maintien pro-longé à des températures élevées et un refroidissement lent.

La morphologie des grains (éléments métalliques) est le plus souvent peuanguleuse et ne présente pas d’écrouissage particulier dans le cas des polycristaux.

Il est possible d’observer (cas assez rare au stade de la réduction) la présencede quelques globules apparaissant comme sphériques au niveau du plan de coupe(mais qui peuvent être en fait plutôt cylindriques : filaments). Cette morpholo-gie est d’autant plus vraisemblable que la teneur en carbone augmente, comptetenu de l’abaissement du point de fusion de l’alliage fer-carbone. Elle est à asso-cier à des niveaux de température élevés (tuyère). La ferrite peut toutefois se pré-senter sous cet aspect dans la mesure où les températures atteintes sontsuffisantes pour la rendre « pâteuse » sans dépasser toutefois le liquidus(1 536 °C). Notons que le dépassement de cette température en fonction desconditions de refroidissement impliquerait l’existence de structures de solidifica-tion (dendrites). La décarburation de l’acier pourrait également justifier ce faciès.

Planche V. Indices métallographiques : la réduction

Photo 37. Minerai oolithique lorrain. Au cours de la réduction, le métal apparaît engardant la forme de l’oolithe. Expérimentation de réduction et d’épuration, Nancy-Belfort, 1995 — D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).Photos 38 et 39. Agglomération et densification concentriques au milieu du lingot deCarthage (voir photos 23 et 26) (© P. Fluzin).Photos 40, 41 et 42. Agglomérations filamentaires et en chapelets avec évacuation de lascorie. Début de formation des replis. Loupes expérimentales d’Agorregi (Espagne) (voirphotos 8 et 9) (© P. Fluzin).Photo 43. Replis métalliques au cours de l’épuration d’une loupe. Expérimentation,Belfort, 1995 — D. Leclère et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 44. Replis légèrement déformés. Loupe expérimentale d’Agorregi (Espagne) (voirphotos 8 et 9) (© P. Fluzin).Photo 45. Agglomération centripète. Scorie coulée, site de Ponte di Val Gabbia (Italie)(voir photo 17) (© P. Fluzin).

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80 Philippe Fluzin

Sans exclure l’observation en réduction de telles configurations, elles sont toute-fois plus fréquentes dans le cas des opérations de forge.

Il peut exister des porosités (de morphologie bien souvent caractéristique),plus ou moins vides en fonction du degré d’élimination des stériles (issues de lafusion de la gangue du minerai : fayalite…). Il n’est pas rare d’observer, associésà certaines d’entre elles (notamment à celles qui sont vides), des replis en coursde formation plus ou moins gros et bien formés (planche V, photos 42 à 44). Cesderniers résultent des phénomènes de coalescence et d’agglomération progressifsdu métal qui se densifie au fur et à mesure de l’« assèchement » de la matrice sili-catée. La scorie liquide s’écoulant, cela favorise la jonction des différents globuleset filaments métalliques qui engendre, suivant le contexte, la formation de cesreplis. Ils sont relativement gros et mal formés en début de processus et disparais-sent progressivement au fur et à mesure des traitements thermomécaniques (épu-ration, forge d’objet). Ils sont donc fréquemment observés dans le métal desloupes mais aussi dans les divers déchets inhérents aux différentes phases del’épuration (gromps, culots).

Il est à noter que certains replis semblent également apparaître dans quelquescas de forge d’objets (en particulier lors du recyclage de petits fragments métal-liques). Une température de travail très élevée (fusion partielle) pourrait provo-quer une dissociation du métal conditionnée par la mise en forme initiale (effetde texture rémanent).

L E S I N D I C E S D E F O R G E D ’ É P U R A T I O N( T R A V A I L D U M É T A L B R U T ) ( P L A N C H E V I )

Ces indices sont sans aucun doute les plus difficiles à mettre en évidence (notam-ment dans les culots), compte tenu de la persistance éventuelle d’indices deréduction d’une part et de leur possible association avec les indices de forge d’éla-boration d’objet d’autre part.

La prépondérance d’une atmosphère oxydante doit se manifester, commenous l’avons déjà signalé, par l’existence de degrés d’oxydation d’espèces plusoxydées.

Il est nécessaire de considérer que l’opération de forge est conditionnée parune succession de cycles thermomécaniques qui peut se traduire, indépendam-ment du nombre de pièces traitées, par une certaine stratification au sein desdéchets (culots). Celle-ci est plus ou moins importante en fonction de la duréeet du niveau de température atteint lors d’un cycle thermique et peut être miseen évidence de différentes façons (répartition et morphologie des porosités,zonage de la matrice, nature et répartition des fragments métalliques…). En cequi concerne le métal, l’intensité des déformations thermomécaniques est per-ceptible, suivant les températures atteintes, à travers les déformations structura-les subsistantes (écrouissage, alignements d’impuretés…).

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 81

Le métal « perdu » au cours de l’opération d’épuration n’est pas négligeablecomme l’indiquent nos reconstitutions expérimentales (Leroy et al., 2000). Lenombre et la taille des fragments sont plus importants en début d’opération.Cela doit par exemple se traduire dans la répartition du métal au sein d’unecalotte. Compte tenu des spécificités thermomécaniques de cette opération, lesfragments métalliques se retrouvant au sein des scories (culot, calotte) peuventprésenter différents aspects conjugués et/ou dissociés :• une répartition aléatoire de fragments aux contours relativement déchiquetés

(angles vifs) dont la liaison avec la matrice n’est pas continue (planche VI,photo 46) ;

• une masse métallique plus importante et plus compacte correspondant à laperte de gros morceaux (début d’opération). Il est intéressant de caractériserla nature du métal travaillé (fer/acier, pourcentage de carbone), cela donneen effet des indications sur l’homogénéité du métal de base et sur l’utilisationéventuelle de métaux de nature différente ;

• une réoxydation interne du métal (à proximité de puits de diffusion gazeux)(planche VI, photo 50) ou périphérique, caractéristique de la prépondérancede l’atmosphère oxydante de la forge (planche VI, photo 49). Cette réoxyda-tion peut s’accompagner, dans le cas d’un acier, d’une décarburation superfi-cielle (planche VI, photo 50). Nous rappelons pour mémoire que l’opérationinverse de cémentation nécessite des durées de traitement très longues (supé-rieures ou égales à 10 heures) (Fluzin, 1994) et une atmosphère réductrice ;

• la présence de petits replis métalliques déformés, imparfaitement soudés ausein d’un morceau de métal, dénotant un forgeage insuffisant (planche VI,photos 52 à 54) ;

• la présence locale de métal écroui au contour irrégulier (planche VI,photo 47). L’existence dans le métal d’alignements d’inclusions indique lesens et l’intensité du martelage. Les inclusions se déforment plus ou moinsfacilement selon leur composition et la température de travail ;

• la présence d’éventuelles battitures, ou de vestiges de battitures (planche VI,photos 48 et 49), dans les culots, bien que celles-ci se situent majoritaire-ment à proximité de l’aire de martelage ;

• la présence de billes (cylindres) ou de chapelets de métal (fer/acier) partielle-ment ou non réoxydés. La non-réoxydation de ces éléments métalliques,bien qu’étant dans un contexte oxydant de forge, peut s’expliquer par desconditions locales limitant la diffusion de l’oxygène (le métal se situe dans unenvironnement relativement protecteur de fayalite). Nos reconstitutionsexpérimentales ont montré que ces billes se situaient préférentiellement àproximité d’une source thermique élevée (tuyères).

La qualité du travail d’épuration, qui peut se faire en plusieurs étapes (phase 1 :dégrossissage-compaction, phase 2 : élaboration d’un demi-produit), peut doncêtre évaluée au sein du métal selon plusieurs aspects concomitants :

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 83

• propreté « inclusionnaire » (taux de porosité et d’inclusion) ;• morphologie des porosités et des inclusions (déformation) ;• nombre et morphologie des replis ;• homogénéité de la répartition fer/acier…

L E S I N D I C E S D E F O R G E D ’ É L A B O R A T I O N D ’ O B J E T S( T R A V A I L D U M É T A L É P U R É ) ( P L A N C H E V I I )

Dans le cas d’une opération séparée de la forge d’épuration, nos expérimenta-tions et observations nous conduisent à formuler les remarques suivantes.

Lorsqu’il cherche à élaborer des objets de bonne qualité, un forgeron a inté-rêt à œuvrer avec un foyer le plus propre possible pour bien contrôler son travail(estimation visuelle de la température, prévention des pollutions) et à concentrerle feu en focalisant le foyer suivant le type d’objet à travailler. Cela incite donc àun nettoyage régulier du foyer. Les déchets, qui sont déjà relativement faibles(forge au charbon de bois), sont par conséquent de taille encore plus modeste,hormis le cas d’ajout.

La fréquence des cycles thermiques est plus élevée (en fonction du type defabrication) et ceux-ci sont de durée relativement faible (il faut éviter que lemétal ne brûle dans le cas d’un acier et limiter les pertes au feu). Cela se traduitpar une meilleure homogénéité des déchets (scories, culot, atténuation de la

Planche VI. Indices métallographiques : l’épuration

Photo 46. Fragment de fer déchiqueté en inclusion dans une porosité. Culotarchéologique gallo-romain, site de Touffreville (Calvados), 1995 — N. Coulthard etP. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 47. Idem. Le métal est légèrement écroui (© P. Fluzin).Photo 48. Réoxydation à chaud de filaments et globules de fer (ferrite). Culot : 125 g.Oppidum de Condé-sur-Suippe (Aisne), IIe-Ier siècle av. J.-C. — S. Bauvais, P. Pion etP. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 49. Réoxydation à chaud. Culot : 139 g. Agglomération antique de Blessey-Salmaise (Côte-d’Or) — M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 50. Décarburation par oxydation autour d’une porosité. Scorie, site d’Aigueperse(Auvergne), fin IIe siècle av. J.-C — L. Orengo et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 51. Écrasement thermomécanique. Fragment de barre, de type currency bars,132 g. Oppidum de Condé-sur-Suippe (Aisne), IIe-Ier siècle av. J.-C. — S. Bauvais,P. Pion et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 52. Replis métalliques presque complètement soudés, loupes expérimentalesd’Agorregi (Espagne) (voir photos 8 et 9) (© P. Fluzin).Photo 53. Replis en cours d’écrasement. Scorie archéologique, site de Blessey-Salmaise,forge F 104, échantillon 104/15 — M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 54. Replis en cours d’écrasement avec remplissage partiel de silice. Centre d’unlingot archéologique (photos 22 et 25), site de Coulmier-le-Sec (Côte-d’Or) —J. Dumont, M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).

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stratification). Le métal brûlé génère par ailleurs un faciès métallographique assezcaractéristique.

Signalons toutefois le cas particulier des soudures (Guilot et al., 1987) quiprésentent un certain nombre de spécificités techniques, notamment en fonctionde la teneur en carbone de l’alliage. En effet, pour réaliser une soudure fer/acier,la température requise est celle du « blanc soudant », soit de 1 300 à 1 500 °Cpour le fer et de 1 100 à 1 300 °C pour l’acier. La période pendant laquelle lemétal est susceptible de se souder dans les conditions ordinaires est appelée palierde soudabilité. Ce dernier est plus long pour le fer que pour l’acier. La soudureacier sur fer est donc la plus difficile à réaliser car il faut que les deux métauxsoient amenés en même temps à leur palier de soudabilité, ce qui exige un grosécart de température. De plus, la formation d’oxyde sur les surfaces à souder empê-che le contact intermétallique. C’est pourquoi il est nécessaire, pendant la chauffe,de parsemer de sable ou de décapant (poudre de minerai…) les surfaces à réunir,de façon à limiter l’oxydation et à faciliter l’éclatement de la couche d’oxyde. Lesable forme alors avec l’oxyde de fer un silicate fluide à haute température qui estévacué par martelage sous forme de battitures et de scories de forge et qui constitueles alignements d’inclusions au niveau des soudures (planche VII, photos 59 et62). Par ailleurs, la réalisation de traitements thermochimiques (cémentation,nitruration, trempe sélective…) nécessite l’emploi de substances appropriées(matières organiques, argiles…) qui pourront se retrouver en partie dans les culots.

La proportion de métal perdu (dans les culots) est nettement plus faiblequ’en forge d’épuration et celui-ci, lorsqu’il existe, présente souvent, en fonctionde ses conditions de chauffage (niveau de température atteint) et de refroidisse-ment, un écrouissage important en liaison intime avec la matrice (planche VII,photo 55). Dans certains cas, il est même possible de constater un écrouissagetrès important associé à un microdamas (Mangin et al., 2000a, échantillonF 104/08 et 09). Celui-ci se traduit par un microcomposite fer/acier (de 0,02 à0,4 % de carbone) dont la texture est parfaitement homogène (planche VII,photo 63). Cette configuration microstructurale (à l’échelle du grain) est assezexceptionnelle et devait conférer au métal des caractéristiques mécaniquesremarquables. Des observations équivalentes (à une échelle plus petite) existentsur des nanomatériaux contemporains élaborés par mécanosynthèse (associationpar chocs mécaniques de nanocristaux). Une des explications théoriques possibleconcerne un phénomène d’agrégation (à partir d’un fragment d’éponge ou deloupe) consécutif à la dissipation thermique de l’énergie de choc (martelage surun petit volume) associé au niveau de température de travail en forge. Il y auraitalors formation (accidentelle ou intentionnelle ; trois échantillons concernés)d’un damas de « microcristallisation ». Ce phénomène structural est remarqua-ble car il est voisin des matériaux d’avenir que nous élaborons également dansnotre laboratoire (Fluzin et Gaffet, 1997). Il faut toutefois considérer l’exceptionde la forge « de recyclage » où l’on procède à de nombreuses soudures d’éléments

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 85

de tailles et de natures (pourcentage de carbone) variables pouvant engendrer despertes de métal non négligeables dans le foyer de forge. Il n’est pas rare d’observerune décarburation en périphérie des éléments métalliques les plus riches en carbone.

L’environnement de la forge (en dehors des culots et des battitures) peut éga-lement livrer un matériel plus ou moins abondant constitué de fragments demétal généralement oxydés. Il peut s’agir de chutes, d’ébauches d’objets, de soiesde préhension, de fragments d’outils ou de morceaux de métal éventuellementdestinés à être réutilisés (planche IV, photos 35 et 36). L’étude morphologique etmétallographique de ce matériel peut contribuer à préciser le type d’activitécomme l’indiquent particulièrement bien nos récents travaux dans la campagned’Alésia et sur le site de Blessey (Mangin et al., 2000). Ainsi, une petite chute demétal (planche IV, photo 36) peut apporter des informations très importantesconcernant le travail effectué dans le foyer : on peut y observer une marqued’outil (tranche à chaud). Cela indique que l’artisan a cherché à débiter (couper)un petit morceau de métal de 6 (7 millimètres de section et de 30 millimètres delongueur). Il est possible, compte tenu de sa taille, que celui-ci était destiné à lafabrication d’un clou (de chaussure en l’occurrence). Par ailleurs, nous disposons,grâce à cet échantillon, de quelques données sur l’outillage utilisé. La tranche àchaud, dont l’empreinte est complète, était de même dimension (largeur16 millimètres). La tenaille utilisée pour la préhension de cet élément possédaitdes mors fermés et ses dimensions devaient être modestes. L’objet était néan-moins difficile à saisir suffisamment fermement puisqu’il a été perdu. Pour cetteraison, la perte en forge de tels éléments métalliques devait être assez fréquente.Il est en outre possible d’évaluer le degré de compétence technique des artisans(traitements thermiques, etc.). À cet égard, il convient de faire remarquer que laréalisation de simples tôles de métal (armure, fourreaux d’épée…) nécessite, dela part du forgeron, une maîtrise technique plus grande (ainsi qu’un métal demeilleure qualité) que pour l’élaboration d’objets massifs. En effet, l’amincisse-ment d’une tôle est d’autant plus délicat que l’épaisseur sera faible et la surfacegrande.

Les battitures se situent, comme pour la forge d’épuration, principalement àproximité de l’aire de martelage (elles peuvent néanmoins subsister dans desculots) (planche VII, photos 57 et 58). Elles sont généralement prédominantesvis-à-vis des autres déchets. Leurs dimensions sont fonction de la surface dumétal travaillé : l’élaboration d’un objet de petite dimension engendre de petitesbattitures, ce qui n’est pas le cas pour le travail de surfaces plus importantescomme l’élaboration d’une épée telle qu’en témoigne la reconstitution que nousavons effectuée pour les épées de Gournay-sur-Aronde (Oise). Dans le cas del’utilisation d’ajouts, les battitures peuvent avoir une morphologie « bulleuse »(Dunikowski et al., 1996). Leur évaluation quantitative par prélèvement et tami-sage permet d’avoir une idée sur l’importance et parfois sur le type d’activité del’atelier (Mangin et al., 2000a).

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 87

L’organisation de l’atelier est généralement assez précise (en fonction du typed’activité). Cela doit se manifester par des traces archéologiques relativementbien localisées dans une périphérie voisine du foyer de forge. Compte tenu,d’une part, de la nécessité de forger l’objet avant qu’il ne se refroidisse trop et,d’autre part, du nombre plus ou moins fréquent de passages dans le foyer (chau-des), il est possible de situer l’endroit du forgeage (emplacement de l’enclume) àenviron 1 à 2 mètres du foyer. Cela se voit généralement à la coloration noirâtredu terrain due à la présence de battitures.

Il ne nous est pas permis de détailler davantage les résultats obtenus à l’aidede cette méthode (métallographie). Bien que se limitant à la « lecture du métal »dans son environnement (objet, culot, scorie), elle permet de travailler sur degros échantillons, à moindre coût, et aussi bien de déterminer des indices propresà identifier l’activité sidérurgique que de découvrir le mode de fabrication d’unobjet et la qualité du travail réalisé.

Les analyses chimiques globales (que nous ne détaillerons pas) portent tou-jours sur un volume restreint du matériau (quelques dizaines de grammes) et nesont, à proprement parler, représentatives que de celui-ci. Par ailleurs, il n’existepas de méthode d’analyse à vocation universelle répondant à tous les souhaits desarchéologues. Chaque méthode d’analyse possède ses spécificités et, surtout, seslimites et sources d’erreur propres qu’il convient de bien connaître afin de ne pasfaire des interprétations erronées. Rien ne sert en effet de compiler des donnéessi leur exactitude (intrinsèque ou extrinsèque) n’est pas assurée (Fluzin, 1983).Par ailleurs, un physico-chimiste ou un métallurgiste d’aujourd’hui ne sera pastoujours à même de comprendre et de bien interpréter la chimie particulière des

Planche VII. Indices métallographiques : élaboration de l’objet

Photo 55. Fragment de fer écroui dans un culot archéologique gallo-romain. Site deTouffreville (Calvados), 1995 — N. Coulthard et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 56. Filament de fer presque complètement réoxydé. Scorie archéologique. Site deJuude-Jaabe (Sénégal), 1995 — H. Bocoum et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 57. Vestige de battitures lamellaires. Culot oppidum de Condé-sur-Suippe(Aisne), IIe-Ier siècle av. J.-C. — S. Bauvais, P. Pion et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 58. Vestige de battiture globulaire. Même culot que photo 57 (© P. Fluzin).Photo 59. Inclusions primaires déformées dans le sens du martelage. Lingot d’Alésia(F-XXIV-408), 1996 — M. Mangin, P. Fluzin et P. Dillmann (© P. Fluzin).Photo 60. Inclusions dans un objet en cours de forgeage. Expérimentation, Nancy,1997 — D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).Photo 61. Inclusions dans un fragment de barre (68 g). Agglomération antique deBlessey-Salmaise (Côte-d’Or) — M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 62. Soudure. Jonctions intermétalliques imparfaites. Chute. Site d’Aigueperse(Auvergne), fin IIe siècle av. J.-C. — L. Orengo et P. Fluzin (© P. Fluzin).Photo 63. Microdamas. Chute. Agglomération antique de Blessey-Salmaise (Côte-d’Or) — M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 89

échantillons archéologiques en restant dans son laboratoire. Les scories ancien-nes sont, du point vue chimique et minéralogique, fort différentes des rochesnaturelles ; elles déroutent le géologue. Elles se distinguent aussi très nettementdes résidus de la métallurgie moderne et le métallurgiste s’interroge souventquant aux nombreuses « anomalies » qu’il peut remarquer. Certaines d’entre ellesoffrent par ailleurs de nombreux intérêts pour une meilleure connaissance fon-damentale des matériaux d’aujourd’hui ou de demain (liaison passé-présent-avenir : étude du vieillissement des matériaux et élaboration de matériauxnouveaux…).

L ’ A N A L Y S E P A R M I C R O D I F F R A C T I O ND U R A Y O N N E M E N T S Y N C H R O T R O N

Ce type d’analyse consitute un exemple de découverte récente (Dillmann et al.,1998).

Un des axes de recherche de l’histoire de la sidérurgie concerne l’apparition,en Europe, du procédé indirect (utilisation du haut fourneau) qui a remplacéprogressivement le procédé direct (bas fourneau). Les techniques de la métallo-graphie donnent de nombreuses informations sur les traitements thermomécani-ques et thermochimiques subis par le métal au cours de son élaboration. Enrevanche, elles ne permettent pas de déterminer avec suffisamment de précisionle procédé utilisé pour la réduction du minerai. Il convient donc de caractériserla nature et la structure cristalline des inclusions contenues dans la matricemétallique, inclusions pouvant provenir de la réduction ou de l’épuration (affi-nage). La compréhension de la thermodynamique de formation de ces inclusionspermet de mieux appréhender les procédés de réduction. C’est pourquoi uneétude a été entreprise en partenariat avec le Laboratoire de recherche des monu-ments historiques (LRMH) de Champs-sur-Marne et le Laboratoire pour l’utili-sation du rayonnement électronique (LURE) d’Orsay afin de déterminer lacomposition et la structure des inclusions d’objets représentatifs de l’évolution

Planche VIII. La structure du métal : fer, acier, fonte, à partir de l’étude métallographique d’échantillons archéologiques

Photo 64. Le fer pur, la ferrite (© P. Fluzin).Photo 65. Le fer pur, ferrite écrouie par martelage (© P. Fluzin).Photo 66. L’acier à 0,3 % de carbone, structure de ferrite aciculaire dite deWidmanstätten (© P. Fluzin).Photo 67. L’acier à 0,8 % de carbone, perlite lamellaire généralisée (© P. Fluzin).Photo 68. Acier trempé, bainite nodulaire, troostite (© P. Fluzin).Photo 69. Acier trempé, martensite (© P. Fluzin).Photo 70. Fonte grise avec nodule de graphite (© P. Fluzin).Photos 71 et 72. Fonte blanche, lédéburite (© P. Fluzin).

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90 Philippe Fluzin

des techniques sidérurgiques considérées. Pour ce faire, nous avons réuni un cor-pus (plus de 100 références) d’objets allant de la période gallo-romaine auXIXe siècle. Leur collecte a été effectuée selon des critères stricts permettant derestituer les contextes historiques et techniques de leur fabrication. Ce corpus aété complété par un certain nombre d’échantillons provenant d’expérimenta-tions faites avec deux types particuliers de minerais, dans des bas fourneauxreconstitués. La comparaison des types d’inclusions identifiés en fonction desprocédés d’élaboration des différents objets du corpus a donné toute sa valeuraux données analytiques. Les inclusions ont été systématiquement analysées àl’aide de la microdiffraction et de microfluorescences X sous rayonnement syn-chrotron. Les manipulations ont eu lieu sur la ligne D15 du LURE. Les donnéesanalytiques obtenues ont permis de dégager quatre facteurs discriminants liant lastructure et la composition des inclusions à l’un ou à l’autre des procédés deréduction du minerai de fer (direct ou indirect) :• un type d’inclusions à forte teneur en silicium et faible teneur en fer a été

identifié uniquement dans les inclusions issues d’objets provenant de laréduction directe. Ces inclusions ont toujours été observées au voisinage deszones fortement carburées ;

• des phases aluminées de type « spinelle » ont été identifiées uniquement dansles inclusions issues de la filière directe ;

• des phosphates semblent être présents uniquement dans les inclusions for-mées lors de l’affinage (procédé indirect). En particulier, la présence de phos-phate de calcium ne peut être due qu’à l’ajout volontaire de chaux lors decette étape. Cette configuration pourrait toutefois exister avec certains mine-rais en réduction directe (Lorraine) ;

• des différences de teneur en chrome, vanadium et titane. Les teneurs maxi-males observées dans les inclusions d’objets issus du procédé indirect sont de10 à 100 fois supérieures à celles mesurées dans les inclusions de la filièredirecte. Cette différence pourrait être expliquée par la concentration de ceséléments sous forme de carbures dans les fontes et par leur oxydation lors del’affinage.

Ainsi, l’utilisation de techniques d’analyse locale, utilisant le rayonnement syn-chrotron, a permis de remonter à la structure et à la composition des inclusionsnon métalliques contenues dans les objets ferreux anciens. Les informationsdégagées éclairent d’un jour nouveau les questions d’histoire des techniques fon-damentales portant sur l’apparition du procédé indirect pour la réduction duminerai de fer. Ce type d’examen des inclusions permet de resituer l’objetarchéologique analysé dans son contexte historique et technique sans qu’il soitpour autant assimilé à une nouvelle méthode de datation.

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La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 91

Conclusion

Il est particulièrement difficile de décrire en peu de pages le champ relativementvaste des investigations archéométriques permettant d’essayer de reconstituer lesdifférentes étapes de la chaîne opératoire en sidérurgie à partir des vestigesarchéologiques.

Les quelques exemples cités illustrent, d’une part, la pertinence des résultatsobtenus depuis plusieurs années et, d’autre part, la nécessité d’une collaborationinterdisciplinaire réelle (sciences de l’homme et de la société, sciences naturelles,sciences des matériaux). Chaque méthode, chaque discipline a ses limites et seulela confrontation scientifique permet de tenter de « faire parler » les vestigesarchéologiques en réduisant les sources d’erreur. Ces travaux enrichissent enretour chacun des domaines scientifiques concernés. La compréhension des ves-tiges sidérurgiques contribue à l’histoire des techniques mais ouvre aussi desperspectives sur les dimensions économiques et sociales de cette industrie, doncsur l’histoire en général. Au-delà des aspects techniques, ces études visent àretrouver l’homme qui « se cache derrière » le fait technique ; l’apport de l’ethno-archéologie est à ce point de vue fondamental et on ne le soulignera jamais assez.Par ailleurs, les scories et les métaux anciens fournissent aux ingénieurs des ana-logues réels permettant de comprendre les phénomènes de vieillissement desmatériaux, connaissances applicables dans les domaines du génie civil, de laconservation du patrimoine ou encore de la gestion des déchets modernes. Desanomalies structurales observées dans les métaux anciens laissent entrevoir denouveaux matériaux comme ceux élaborés par mécanosynthèse (Fluzin et Gaffet,1997).

Cependant, malgré tous nos efforts et nos succès, il convient de restermodeste tant « l’objet technique, traduction physique d’un système intellectuel,n’est jamais complètement connu » (Simondon, 1969).

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 93

La métallurgie du fer en Afrique :un patrimoine et une ressourceau service du développement

Hamady Bocoum

L’histoire de la métallurgie de l’Afrique subsaharienne, écrite trop rapidement audébut du siècle dernier à partir de quelques fragments de textes et de trop brèvesincursions archéologiques souvent destinées à confirmer ce que l’on croyaitsavoir dans une ambiance diffusionniste généralisée, n’en est certainement pasà une révision1 près ; avec l’accumulation de données de plus en plus cohéren-tes en faveur de l’autonomie de la sidérurgie africaine, elle pourrait même pro-céder de plusieurs foyers indépendants. L’intérêt de la métallurgie africaine nese situe cependant pas dans cette seule dimension chronologique. D’une part,il réside aussi dans le continuum technique qui permet, aujourd’hui encore,l’observation in vivo de traditions pyrotechnologiques qui offrent des possibi-lités exceptionnelles d’études sur l’une des acquisitions techniques les plusdécisives de l’humanité : la maîtrise du fer. D’autre part, il réside, et ce n’est pasrien, dans la remarquable capacité d’adaptation des artisans du fer qui, face auxpénuries de toutes sortes, parviennent encore à entretenir le souffle d’uneAfrique ingénieuse.

1. En 1971, Mauny, un des fondateurs de l’archéologie ouest-africaine, publiait unouvrage assez pessimiste intitulé Les siècles obscurs de l’Afrique noire, dans lequel ilexprimait le désarroi du chercheur face à la rareté des sources dans certainsdomaines. Quelque vingt ans plus tard, McIntosh et McIntosh (1988), dans leurarticle « From siècles obscurs to revolutionary centuries on the middle Niger »,répondaient partiellement aux préoccupations du pionnier en exposant tout ce quela recherche archéologique avait pu apporter comme contribution à la connaissancedes sociétés du moyen Niger. En réalité, c’est dans tous les domaines de la rechercheque l’archéologie apporte chaque jour de nouvelles révélations qui, vu l’immensitédu travail à accomplir, ne sont pas près de s’estomper.

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94 Hamady Bocoum

Le fer en Afrique : un patrimoine vieux de 4 000 ans

La problématique de l’origine de la métallurgie du fer en Afrique alimente,depuis de nombreuses décennies déjà, un débat contradictoire qui divise la com-munauté scientifique. La nature des informations disponibles et la gamme trèsouverte des interprétations possibles ne contribuent pas toujours, il est vrai, àclore un débat plus que jamais ouvert sur de nombreux aspects. En effet, si desdatations de plus en plus nombreuses font remonter les débuts de la productiondu fer en Afrique au milieu du deuxième millénaire av. J.-C. au moins, ce qui enferait l’une des métallurgies les plus anciennes au monde (d’où l’hypothèse d’unfoyer d’invention autonome), des observations et commentaires sur la fiabilité decertaines mesures entretiennent une suspicion, parfois légitime, qu’il importe deprendre en considération.

Les sources écrites n’étant d’aucun secours pour l’écrasante majorité del’Afrique subsaharienne pour des faits dont l’antiquité se compte en millénaires,seule l’archéologie est en mesure d’apporter des réponses décisives aux questionsposées. C’est pour cette raison qu’il sera nécessaire, à chaque fois, de s’appuyersur des faits biens établis par la recherche archéologique pour apprécier les argu-mentations qui fondent les hypothèses en concurrence.

Des hypothèses et des faits

L’analyse des arguments présentés par les partisans et les adversaires de l’autono-mie du foyer sidérurgique africain montre qu’ils s’inspirent de considérationsméthodologiques difficilement conciliables. Dans les grandes lignes, les partisansde l’emprunt privilégient l’hypothèse d’un foyer d’invention unique et sont plutôtpréoccupés par la mise en évidence de points de passage pertinents, tandis que ceuxqui défendent l’hypothèse d’une invention autonome, s’appuient beaucoup plussur les évidences archéologiques auxquelles ils tentent de trouver une cohérencechronologique, technique et culturelle. Malgré tout, la mise en perspective desdeux approches articulée aux faits établis par la recherche permet d’identifier lesconstantes autour desquelles s’organise la controverse (Holl, 2000, p. 8).

L E S H Y P O T H È S E S E X O G È N E S

L’origine exogène de la métallurgie du fer peut être considérée comme une ques-tion récurrente de l’archéologie africaine tant elle traverse toute l’histoire de ladiscipline sur le continent. Cette opinion, avant l’avènement massif des donnéesde la chronologie absolue, reposait sur deux idées directrices.

Partant de l’unicité supposée du foyer d’invention de la métallurgie, sa prin-cipale préoccupation était la recherche de voies de transmission (Leclant, 1956 ;

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La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 95

Mauny, 1952 ; Huard, 1960 ; Tylecote, 1975 ; Phillipson, 1985,). Mais, incontes-tablement, c’est Mauny (1952) qui a le plus systématisé cette hypothèse. Selonlui, ce sont les Hittites qui auraient découvert les techniques de réduction aucours du deuxième millénaire av. J.-C. Celles-ci auraient par la suite essaimé àtravers la Méditerranée pour prendre pied en Égypte par contact direct. Les lettresd’Amarna adressées à Ramsès II et datant de 1300 av. J.-C faisaient état, en effet,du retard d’une livraison de lingots de fer au pharaon. Malgré ce contact précoce,la propagation technique proprement dite n’aurait été réelle, toujours d’aprèsMauny, que vers le VIIe siècle av. J.-C., à la suite de l’invasion d’Assourbanipal.

Pour l’Afrique de l’Ouest, Mauny excluant toute transmission par le biais del’Égypte, c’est une propagation indirecte, par Phéniciens interposés, qui est rete-nue. Le contact aurait eu lieu en Afrique du Nord. Ce sont les Berbères quiauraient initié l’Afrique de l’Ouest de proche en proche postérieurement auVIe siècle av. J.-C.

La contestation de l’autonomie du foyer sidérurgique africain s’inspire égale-ment d’un argument technique selon lequel la production du fer suppose desconnaissances pyrotechnologiques nécessaires à la maîtrise des hautes tempéra-tures. Elle établit de fait une relation de causalité entre la connaissance de lamétallurgie du cuivre et l’acquisition d’un potentiel technique pouvant conduireà l’invention, autrement plus complexe, de la sidérurgie. À côté de ces deuxlignes de force, existe un troisième argument, nouveau celui-là parce que se rap-portant aux données récentes (Killick et al., 1988), qui repose sur la contestationde la fiabilité de certaines mesures au carbone 14 obtenues au Niger parGrébénart (1983b, 1985 et 1988)2. En rapport avec ce problème, on note unetendance à la contestation des dates au carbone 14 dans les zones arides où laprésence possible de vieux morceaux de charbon de bois peut entraîner undécalage chronologique considérable.

Toutefois, dans leurs constructions archéologiques, c’est-à-dire dans l’élabo-ration des hypothèses, ces auteurs ne s’écartent pas considérablement de celledéjà évoquée (Mauny, 1952). En effet, même s’ils excluent l’idée d’une initiationà la métallurgie de l’Afrique de l’Ouest à partir de la vallée du Nil, ils maintien-nent celle de la transmission transsaharienne. Mais, fait notable, il n’existe plusde fixation sur la cité punique de Carthage, car le Maroc ainsi que la Libye (legolfe de Syrte) sont également envisagés comme voies de transmission possibles.

L E S H Y P O T H È S E S S U R L ’ O R I G I N E A U T O C H T O N E

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’idée d’une origine autochtone dela métallurgie du fer en Afrique est fort ancienne. Des auteurs comme Mortillet

2. Manifestement, cet auteur avait commis une méprise quant à l’identificationformelle de certains ecofacts (halos rubéfiés correspondant à des troncs d’arbres cal-cinés) à des fourneaux destinés à la production du fer.

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96 Hamady Bocoum

(1903), Von Luschan (1909), Reinach (1913) et De Pedrals (1950) l’ont avancéedès la fin du siècle dernier ou dans la première moitié du XXe siècle. Leurs étudesfaites à partir d’une base de données très réduite s’appuyaient, pour la plupart,sur l’originalité des procédés de réduction mis en œuvre par les Africains (VonLuschan, 1909).

C’est probablement Lhote (1952) et Diop (1973, 1976) qui, les premiers,tentèrent de renouveler la question dans une polémique croisée contre Mauny(1952), lequel s’inspirait pour l’essentiel des positions de Leclant (1956). Danssa première publication, centrée sur l’Égypte ancienne, Diop (1973, p. 532)défend l’hypothèse selon laquelle la métallurgie du fer est une invention africainequi remonterait à l’Ancien Empire. À l’appui de sa thèse, il cite plusieurs décou-vertes in situ, notamment celle d’un morceau de fer de réduction près de l’orificedu canal d’aération de la grande pyramide construite vers 2700 av. J.-C. Poursui-vant ses investigations, Diop (1976) ouvre de nouvelles perspectives à la suite desdatations qu’il a réalisées sur le site de Termit au Niger (Dak. 145 : 678 ± 120av. J.-C. et Dak. 147 : 974 ± 120 av. J.-C.). Ces datations rendaient difficile-ment opératoire l’hypothèse d’une diffusion à partir de l’Afrique du Nord, y com-pris l’Égypte. Cette révélation, assez froidement accueillie, marque avec le recul unvéritable point d’inflexion des recherches sur le fer en Afrique en ce sens qu’elleremettait en cause de manière pertinente les hypothèses jusque-là dominantes. Ils’ensuivra une accumulation considérable de datations.

Les données archéologiques récenteset leur signification

Avec l’intensification des opérations archéologiques au Niger, au Nigéria et dansla région des Grands Lacs (Rwanda, Burundi), un corpus relativement impor-tant de mesures au radiocarbone est maintenant disponible. Les recherches deGrébénart (1983a et b, 1985, 1988), même si elles ont donné lieu à des contes-tations, parfois objectives (Killick et al., 1988), sont maintenant validées par destravaux indépendants (Paris et al., 1992 ; Quéchon, 1995). Les résultats obtenuspar ces derniers ont en effet permis la mise en place d’un faisceau convergent dedatations en chronologie absolue qui rendent inopérantes toutes les théories dif-fusionnistes littéralement amputées de leurs bases chronologiques, ce qui est unecontestation rédhibitoire (Holl, 1988, 1993, 1997 et 2000 ; Okafor, 1992a et bet 1993 ; Grébénart, 1983a et b, 1985 et 1988 ; Paris, 1992 ; Quéchon, 1995 ;Van Grunderbeek, 1992 ; Wiesmuller, 1996 et 1997 ; Vignati, 1995). À ce pro-pos, il est important de noter que les indices recueillis à Termit sont confirméspar la série de Do Dimmi qui a fourni cinq dates comprises entre 1010 av. J.-C.et 35 apr. J.-C. Pour valider le choix de cette borne inférieure, rappelons que lastation Termit ouest 9 a aussi fourni deux mesures comprises entre 1395 et 820

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La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 97

av. J.-C. en données corrigées (Paris et al., 1992, p. 58). Dans la même zone,précisément à Égaro, deux mesures faites sur des poteries récoltées dans un con-texte où l’on retrouve des objets en fer ont donné des dates comprises entre 2520et 1675 av. J.-C. en données corrigées (Paris et al., 1992, p. 58). Une mesure amême livré 4000 + 110 BP, soit entre 2900 et 2300 av. J.-C.3

Toujours au Niger, dans la région de l’Azawagh, le site d’In Tékébrin, qui alivré des objets en cuivre, a été daté entre 2531 et 1675 av. J.-C., dates obtenuesà partir de trois supports différents (ossements brûlés, charbons et céramiques),toutes très proches les unes des autres, ce qui renforce considérablement l’hypo-thèse de l’homogénéité supposée de l’assemblage étudié. Selon Paris et al. (1992,p. 59) : « L’apparition des premiers objets en métal (fer et cuivre) se situe au-delàde 1350 av. J.-C., dans un contexte encore largement ténéréen puisqu’ils sontprésents sur un site d’artisans spécialisés dans la fabrication de petits grattoirs. »

Ainsi, les dates obtenues en Afrique occidentale, centrale (Zangato, 1993 et1999 ; Essomba, 1992a et b ; Holl, 1988, 1991 et 1997) et orientale constituentaujourd’hui un corpus suffisamment consistant pour que tous les auteurs s’accor-dent sur l’effondrement de l’hypothèse méroïtique. S’il en est ainsi, la contesta-tion de l’autonomie du foyer sidérurgique africain se trouve totalement recentréesur la crédibilité de la voie nord-africaine, qui ne repose pas non plus sur desdonnées plus cohérentes (Holl, 2000). En effet, toutes les évidences archéologi-ques actuellement disponibles sont en opposition avec les hypothèses nord-afri-caines telles qu’elles apparaissent dans la publication de Miller et Van der Merwe(1994, p. 8-9), qui ont proposé deux transmissions possibles : le golfe de Syrte(Libye actuelle), via Gao jusqu’au Niger, ou du Maroc à Tombouctou, sansqu’aucune découverte récente ne vienne les étayer. En réalité, elles ne diffèrentguère de celles de Mauny (1952) qui, face à l’absence de preuves décisives, enétait réduit à faire remarquer à propos du monde punique que, à défaut d’ateliersde réduction du minerai de fer, des objets finis se rencontrent dans les tombes duVIe siècle av. J.-C.

Un demi-siècle plus tard, la situation n’a pas fondamentalement varié car,pour la période concernée, aucun ensemble sidérurgique cohérent, d’une anti-quité comparable au complexe nigérien n’a été mis au jour en Afrique du Nord.On pourrait en déduire que, dans l’état l’actuel des connaissances, le débat estclos faute de preuves décisives pouvant accréditer les voies de transmissionjusqu’ici envisagées4.

3. Voir Stuiver et Pearson (1986).4. En réalité, la question n’est pas aussi simple car les réserves posées devraient être

prises en considération afin de renforcer la base analytique des travaux à venir, quidevraient prendre en charge les différents aspects de l’environnement culturel ettechnique des civilisations de cet âge ancien du fer. Ce n’est qu’ainsi que nous arri-verons progressivement à une compréhension suffisante des mutations intervenues.

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98 Hamady Bocoum

Divergences et hypothèses

Malgré l’apport considérable de la recherche archéologique à l’établissementd’un cadre chronologique cohérent, toutes les questions relatives à la sidérurgieancienne en Afrique ne sont pas pour autant définitivement résolues et certainesrestent très discutées. Il s’agit, entre autres, de la culture pyrotechnologique, dela fiabilité de certaines mesures au carbone 14 obtenues au Niger et de la problé-matique des sites de transition pouvant renforcer l’hypothèse d’une inventionautochtone. Aussi nous voudrions les évoquer brièvement pour indiquer enquoi, même si elles ne peuvent être totalement ignorées, ces hypothèses ne cons-tituent pas, dans leur état actuel d’élaboration, des réserves de nature à valider undoute substantiel quant à la vraisemblance des arguments en faveur d’un foyerindigène de la sidérurgie africaine.

L A C U L T U R E P Y R O T E C H N O L O G I Q U E

Quelle que soit la problématique envisagée, la question de l’autonomie du foyersidérurgique africain peut être ramenée à une interrogation centrale. Les méca-nismes oxydo-réducteurs étant régis par des principes stricts et universels centréssur la maîtrise des hautes températures, les métallurgistes africains étaient-ils enpossession de la culture technique leur permettant d’y accéder ?

Pour donner un contenu à cette interrogation, il y a lieu de s’inspirer desaspects déjà évoqués dans cet ouvrage (contribution de Fluzin) et qui indiquentque, de tous les paramètres impliqués dans la réduction des oxydes de fer, le plusimportant reste la température. Car c’est elle qui déterminera l’état physique dumétal et permettra, sur le plan fonctionnel, de différencier le procédé direct duprocédé indirect suivant que la température atteinte est inférieure ou supérieureau point de fusion du fer.

Partant de ces considérations et en articulation avec le cas précis du Niger, ilne nous semble pas pertinent de défendre la thèse de la nécessité d’un longapprentissage pour passer de la métallurgie du cuivre à celle, plus complexe, dufer. L’accès aux hautes températures était en effet inscrit dans la logique de lachaîne opératoire technique du cuivre, comme en rendent compte les étudesexpérimentales réalisées sur des scories associées à la production du cuivre àAfunfun ; ces études suggèrent, d’après Killick et al. (1988), que des tempéra-tures comprises entre 1 350 et 1 450 °C ont pu être atteintes. Celles-ci étant lar-gement suffisantes pour produire du fer dans le cadre d’un processus deréduction directe en phase solide, nous pouvons en déduire que la proximitéchronologique entre le fer et le cuivre est un argument décisif en faveur de l’exis-tence d’un environnement technique propice à la réduction des oxydes ferreux,donc à la production du fer, à son invention.

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La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 99

À P R O P O S D E S C H A R B O N S F O S S I L E SE T D E L A C H R O N O L O G I E

L’utilisation possible de charbons fossiles au Niger, dans la station métallurgiqueAfunfun 175, a été envisagée par Killick et al. (1988, p. 390-391) pour expli-quer la singularité du fourneau 8 (1710 + 50 av. J.-C., 2450-1750 av. J.-C.).Pour cette raison, l’auteur a suggéré de considérer, avec raison, les charbonsrécoltés dans cette installation comme n’étant pas nécessairement synchrones dufonctionnement du fourneau suspecté. Mais, depuis lors, des données nouvellesont été accumulées (Paris et al., 1992 ; Quéchon, 1995) qui indiquent que dansla répartition des sites métallurgiques en question, celui d’Afunfun n’est plusisolé. Il existe à présent plusieurs localités ayant fourni des dates comparablescomme nous l’avons déjà signalé. En conséquence, si l’on s’en tenait à la récurrencedes faits, celle-là même qui fonde l’approche statistique dans la constructionarchéologique, la généralisation, pour ne pas être abusive, devrait accepter ledeuxième millénaire av. J.-C. comme début de la métallurgie dans cette région. Lesmétallurgistes de la région d’Agadez auraient, dans ce cas, accédé par leurs propresobservations à la compréhension des principes techniques de la réduction. Ce biland’étape, autrement mieux argumenté que toutes les hypothèses concurrentes, n’estcependant pas exclusif de la poursuite des recherches et, notamment, du croise-ment des mesures au carbone 14 avec des datations par thermoluminescence ouencore par la méthode de l’archéomagnétisme. À cet impératif il faudrait aussiajouter la nécessité d’une approche plus contextuelle des dates obtenues5.

L A P R O B L É M A T I Q U E D E S C U L T U R E S D E T R A N S I T I O N

La problématique des cultures de transition est un véritable serpent de mer enarchéologie. La recherche de l’apparition d’une innovation dans une commu-nauté donnée et sa visibilité archéologique, suivant qu’elle est brusque ou pro-gressive, conduit souvent à l’élaboration de deux hypothèses. Ainsi sontcommunément interprétés comme les marqueurs d’une évolution progressive,qui éventuellement peut rendre compte d’une invention, les cas où la nouvelletechnique prend pied dans une société qui l’adopte et parfois la perfectionne. Àl’opposé, l’apparition rapide d’une technique déjà bien constituée est souventperçue comme la manifestation d’un emprunt. Ainsi, même si cette variante del’évolutionnisme « technique » fortement ancrée dans les traditions historiogra-phiques est un mal dont on a appris à s’accommoder, elle ne permet pas non plusde contester l’ancienneté de l’apparition de la métallurgie au Niger. Car, malgré

5. Malgré les évidences déjà accumulées dans la définition du contexte culturel au seinduquel apparurent les premières manifestations du fer au Niger, seule une datationdes artefacts associés à la production du fer (inclusions charbonneuses dans les sco-ries, fourneaux, objets) apportera des arguments irréfutables. L’UNESCO devraitfavoriser la mise en place d’une équipe d’experts sur cette question.

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100 Hamady Bocoum

les difficultés inhérentes à l’interprétation des sites de surface, il y a des indicesprobants de l’existence de cultures de transition entre la fin du néolithique et ledébut de l’âge du fer au Niger. Dans la région de Termit, les premiers témoinsmétallurgiques sont associés à une industrie lithique en cours de définition queQuéchon (1995, p. 309) appelle, avec toute la prudence requise, le « ténéréen »de Termit. Cette industrie, qui s’est développée entre 3300 et 1500 av. J.-C., estmarquée par la prédominance dans la production lithique des disques, des trian-gles bifaces, des pièces foliacées, des grattoirs, des rabots, des scies, etc. Quant àla céramique, elle est de type soudano-sahélien, au début tout au moins car, versla fin de la période (2000-1500 av. J.-C.), apparaissent de nouvelles formes et denouveaux décors (jattes à encolure galbée soulignée d’une impression pivotante,ou à rebord épaissi et décor géométrique partiel en composition) qui s’imposentprogressivement jusqu’à caractériser l’épisode « postérieur ». Sous cet éclairage, laréserve de la transition culturelle nous semble aussi devoir être évacuée, d’autantque c’est dans une « ambiance néolithique » que les techniques métallurgiquesfont leur apparition au Niger.

On peut naturellement épiloguer encore longtemps sur la question del’invention dans les sociétés préindustrielles avant la mise en place progressive dela science moderne. Elle se situe potentiellement à notre avis, au détour de cha-que observation effectuée, dans un environnement contenant les germes d’unsaut qualitatif. De nombreux exemples de réduction accidentelle de certainsminerais sont ainsi signalés par Routhier (1963) qui rapporte qu’en Nouvelle-Calédonie, les feux de brousse vont jusqu’à faire fondre et vitrifier, au pied desarbres, des plaquettes de schiste. Ce type d’accident, par exemple, est tout à faitplausible pour le Niger, notamment avec le cas de certains « fourneaux » ditsallongés et dont la configuration et le mode de fonctionnement ne semblentobéir à aucune logique. Ainsi, même s’ils demeurent par ce fait essentiellementdes ecofacts, rien n’indique qu’ils n’ont pas pu inspirer les métallurgistes de l’épo-que. On peut tout aussi bien se demander pourquoi la pomme est tombée sur latête de Newton en pleine cogitation, hasard ou nécessité ?

Le fer en Afrique : une longévité exceptionnelleet une remarquable capacité d’adaptation

Si le fer est aussi ancien en Afrique, c’est aussi sur ce continent qu’il a été le plusconservateur dans ses principes techniques. N’ayant participé qu’en qualité deconsommateurs au formidable renouveau de la sidérurgie6, les métallurgistes

6. Le passage de la réduction directe à la réduction indirecte a permis, avec la possibi-lité technique de fondre le fer, des applications multiples qui auront un effetd’entraînement sur tous les autres secteurs industriels. Parallèlement, le fonctionne-

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La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 101

africains ont néanmoins pu sauver de l’anéantissement un important patri-moine7. Pour cette raison aussi, l’Afrique est aujourd’hui le seul endroit aumonde où il est encore possible d’observer, in vivo, le fonctionnement d’un four-neau traditionnel de production du fer par la méthode dite de réduction directe.Ainsi, ni la Traite atlantique avec l’arrivée de la barre de fer, qui a fait ici se croiserles routes du fer et de l’esclave, ni les progrès de l’économie marchande ne sontvenus à bout de l’expertise africaine en matière de production du fer. Cetteremarquable capacité de résistance, au-delà de l’anecdote, est une magistrale con-tribution des métallurgistes du continent au patrimoine technologique del’humanité. Ils ont eu l’immense mérite de l’avoir sauvegardé pour témoignerdevant l’histoire.

Plus près de nous, même si les succès de la récupération, notamment dans ledomaine artistique, ont tendance à éclipser le dynamisme de la forge tradition-nelle qui paraît, pour l’observateur non averti, comme renaître de ses cendres, ily a lieu de signaler que rien n’est plus faux. Ainsi, au XVe siècle avec l’établisse-ment de relations régulières avec l’Europe, les forgerons furent les premiers arti-sans dont l’expertise fut reconnue et même sollicitée, y compris dans l’entretiendes embarcations. Le navigateur Francisco de Coelho Lemos, qui en a fait l’expé-rience, note avec assurance que s’il « était nécessaire de façonner quelques ferru-res de gouvernail, comme cela m’arriva, il se trouvait ici de très bons forgeronsnègres indigènes ».

De même, la crise du début des années 1980 et les différents plans d’ajuste-ment qui ont conduit à l’effondrement des politiques d’encadrement ainsi qu’àl’arrêt brutal des efforts d’équipement dans la plupart des pays africains a eu uneffet particulièrement dopant sur les métiers de la forge. Car non seulement lespaysans mais également de plus en plus de citadins se tournent vers l’artisanatlocal pour faire face aux besoins les plus pressants en équipements (Fall, 1985,1995 et 1997). Cette évolution est aujourd’hui très sensible dans de nombreuxsecteurs parmi lesquels l’agriculture, l’artisanat d’art et de récupération, l’indus-trie. Car la fin annoncée du petit artisan face à l’intrusion des produits del’industrie n’a pas eu lieu8.

7. Même s’ils ne réactivent guère plus leurs installations qu’à l’occasion de cérémoniestrès spécifiques (reconstitutions, rites, etc.) ils auront au moins réussi à mainteniropérationnel un patrimoine technique vieux de plus de 4 000 ans.

8. En effet, dès le début de l’introduction de la culture attelée, les artisans africainsvont très rapidement réussir à copier les modèles proposés et fréquemment les

ment à flux continu des hauts fourneaux permettra une production de masse du ferà des coûts réduits dont l’Afrique sera un des destinataires, notamment dans lecadre de la Traite atlantique. La barre de fer s’imposera inexorablement au conti-nent entraînant concomitamment le recul de la production locale. Il n’est d’ailleurspas exagéré de dire que le décrochage technique du continent date de cette période(Bocoum, 2000).

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102 Hamady Bocoum

En réalité, l’industrie de récupération elle-même est beaucoup plus ancienneque l’on ne le pense car, pour bien comprendre l’histoire de la récupération enAfrique, il est nécessaire de remonter plusieurs siècles en arrière. Des analysesmétallographiques réalisées sur des objets archéologiques africains établissent trèsclairement que les forgerons avaient l’habitude de rassembler des fragmentsmétalliques d’origine et de composition différentes pour réaliser de nouveauxobjets n’ayant pas nécessairement la même destination que celle des pièces ini-tiales (Bocoum, 1988, 2000). C’est dans la continuité de cette tradition que lesartisans africains ont commencé à utiliser les emballages métalliques comme sup-ports à des réalisations utilitaires, ludiques ou décoratives. Dans ce registre, ilsont aussi parfois excellé dans la reproduction des armes à feu introduites par lesEuropéens et même entrepris, sous l’impulsion de leurs souverains, un véritableespionnage industriel telle l’aventure de Siakha Kuruma, forgeron de Samory,qui avait séjourné à l’arsenal de Saint-Louis pour étudier le fonctionnement desfusils à répétition. Sa réussite exceptionnelle lui valut d’ailleurs, dans la tradition,le surnom de Siakha l’homme au fusil à dix coups (Person, 1970).

Dans le domaine de la manufacture enfin, les artisans du fer, une fois résoluela question liée à la maîtrise des soudures, parviennent aujourd’hui, partout enAfrique, à des applications qui, si elles sont encouragées, conduiraient dans unproche avenir à une autonomie relativement poussée dans le domaine de l’équi-pement. Cette activité quasi industrielle, tant son mode de fonctionnement s’estadapté aux conditions modernes de production, couvre des domaines variésallant de la menuiserie métallique à la production des engins agricoles, des mou-lins à céréales, des presses à huile, des pompes à eau, etc. C’est sans doute ici queles artisans du fer en Afrique sont en train de réaliser leur plus grande révolutionet de prendre une revanche inattendue sur ceux qui les avaient, sans doute tropvite, classés parmi les reliques de l’histoire. Leur capacité à répondre, hier commeaujourd’hui, avec efficacité à des sollicitations diverses et variées en fait en réalitéde puissants agents économiques dont la participation à l’effort de développe-ment peut être considérable pour peu qu’ils soient bien encadrés.

Conclusion

Dans l’étude des faits techniques et des traits culturels, surtout quand ils sontaussi anciens que ceux relatifs à l’apparition du fer en Afrique, la recherche d’unecohérence chronologique sur la base des évidences archéologiques est un exercice

améliorer en les adaptant à la nature des sols, à la morphologie des hommes aux-quels ils sont destinés et aux capacités de traction des bêtes. Il est incontestable queles succès de la traction asine et équine doivent beaucoup aux artisans du fer. Cesont également eux qui assurent l’entretien, voire le renouvellement du parcexistant.

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La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 103

inévitable. L’exploitation de la documentation disponible renforce considérable-ment la crédibilité de l’existence d’un foyer autonome d’invention de la métal-lurgie du fer en Afrique, qui pourrait procéder d’un phénomène de convergence.Cette possibilité théorique — il s’agit de la convergence — est curieusement sou-vent absente des préoccupations des chercheurs plutôt enclins à la mise au pointde modèles centrifuges. Heureusement que l’histoire commence à se peuplerd’exemples contraires. C’est le cas notamment des découvertes récentes sur lasidérurgie indirecte qui établissent que les métallurgistes européens avaient réusside manière indépendante à maîtriser ce procédé contrairement aux théories dif-fusionnistes qui la faisaient venir de Chine (Fluzin et al., 1998).

Les routes du fer ouvrent aussi un vaste champ de recherches dans desdomaines variés parmi lesquels figure en bonne place l’étude des conséquenceséconomiques, sociales et politiques de la métallurgie ainsi que de celles relativesau développement urbain ; elles devraient toutes contribuer au renouvellementdes études sur l’histoire des techniques en Afrique jusque-là prisonnières de lacomparaison et de l’analogie, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elles sontpeu enrichissantes.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 105

Les datations de la métallurgie du ferà Termit (Niger) : leur fiabilité,leur signification1

Gérard Quéchon

Les résultats scientifiques, notamment en sciences humaines, sont directementdépendants des choix méthodologiques de l’enquête, voire des conditions maté-rielles dans lesquelles elle s’est déroulée. Cette remarque liminaire aux apparencesde lapalissade semble pourtant indispensable car elle n’est pas toujours prise encompte dans la littérature archéologique.

En effet, la finalité du métier de chercheur étant de combler les lacunes dusavoir, il n’est pas surprenant que l’impossibilité de répondre à une questionapparaisse insupportable à beaucoup. De là à camoufler ce qu’on ne sait pas endessinant, comme au XVIe siècle, des monstres sur les blancs de la carte, il n’y aqu’un pas, parfois franchi d’autant plus facilement que l’archéologie, disciplinefrustrante, ne livre que des bribes de connaissances sous forme de puzzles mélangéset toujours incomplets.

La question des débuts de la métallurgie en Afrique noire offre un bon exem-ple de cette attitude : les raisonnements menés sur le sujet par tel ou tel archéo-logue peuvent se révéler tout à fait cohérents voire convaincants en apparence,mais ils recouvrent souvent une absence de documents avérés, la plupart desrégions évoquées comme routes possibles de diffusion de la métallurgie étantalors terres inconnues. Les conclusions « scientifiques » s’apparentent à un purexercice de style.

C’est ainsi que nombre de cartes archéologiques dessinent les anciennes voiesmigratoires où la densité du peuplement au travers de celle des sites traduit,

1. Cette communication a pour but de préciser la chronologie des origines du fer àTermit et sa cohérence, dans une démarche méthodologique étroitement liée à ce ter-rain précis et fondée sur des arguments internes. Il ne s’agit en aucune manière d’unregard d’ensemble sur la métallurgie ancienne en Afrique. Il eût donc été incohérentd’y associer une bibliographie générale que l’on trouvera aisément par ailleurs. Seulesont donc été précisées les références indispensables à la compréhension du texte.

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106 Gérard Quéchon

parfois de façon assez comique, davantage l’activité des préhistoriens que la pré-sence des hommes préhistoriques.

Quand une région est vide sur la carte, il faudrait d’abord savoir si elle estpauvre en témoins archéologiques ou pauvre en prospections et ne pas déduiretrop vite que les faits manquent, là où manquent seulement les informations.

Ainsi, la zone située immédiatement au sud de Termit n’a jamais été pros-pectée, tandis que, encore plus au sud, la région de Zinder n’a fait l’objet qued’une enquête préliminaire de J.-P. Maître, juste avant son décès subit ; celle-cin’a donc pas été publiée. Ce que j’en sais par mes conversations d’alors avec cecollègue et ami, c’est qu’il s’agit d’une région difficile à interpréter, où les hiatuséventuels avec la préhistoire du Ténéré sont probablement liés en bonne partie àdes climats et à des paléo-environnements différents. Rien, en tout cas, qui per-mette d’écrire, par exemple, que les territoires de l’ouest du lac Tchad situés entreTermit et Taruga n’ont commencé à utiliser le fer que près d’un millénaire aprèsces deux régions2. Il faut vraiment arrêter, en préhistoire aussi, de confondrel’absence de preuve et la preuve de l’absence.

Il faudrait également, pour présenter des résultats plus proches de la vérité,que soient également publiées les prospections infructueuses, pratique qui restetrès exceptionnelle dans un contexte où « l’efficacité économique » est devenueune priorité absolue.

Ces considérations, qui ont l’air de s’éloigner de la « science », sont pourtantessentielles puisqu’elles gouvernent la fiabilité des résultats, alors qu’elles sontrarement prises en compte dans les publications.

Il faut enfin souligner le décalage entre le souhaitable et le possible. La bonnedémarche à Termit aurait été de réunir sur le terrain l’équipe multidisciplinairela plus large, avec entre autres un paléométallurgiste. Les contraintes financièresqui pèsent désormais sur la recherche l’ont interdit. On ne peut que le regretter,en soulignant que les résultats présentés ici relèvent donc d’une stricte archéo-logie généraliste.

Le contexte géographique, climatique et archéologique

Situé autour du 16e degré de latitude nord, Termit s’est trouvé, durant l’holo-cène, dans une zone particulièrement sensible en termes de changements clima-tiques et de possibilités de peuplement, car la structure de ce petit massif tabulaires’organise autour d’une faille nord-sud générant une série de cuvettes endo-réiques qui ont, périodiquement, constitué autant de réserves d’eau.

2. « But the lands west of Lake Chad lying between Termit and Taruga did not begin to useiron for nearly a millenium after they did » (McIntosh, 1994).

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Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) 107

La séquence archéologique doit en permanence être évaluée à la lumière deces variations environnementales, avec l’idée bien présente que le rapport entreles climats favorables et les densités de population est loin d’être simplement méca-nique. Il se révèle extrêmement complexe à l’étude et doit au minimum faire l’objetd’un examen macrorégional (Person et Quéchon, 1997 ; Quéchon et Person, 1997).

Les plus anciens témoignages sont apportés par une industrie à bifaces detype acheuléen à laquelle succède une industrie à éclats de type paléolithiquemoyen. Les sites, répandus dans tout le massif mais fréquents surtout dans la par-tie nord, sont pour la plupart des épandages de piémonts livrant un outillageabondant mais largement déplacé, sauf à de très rares exceptions près. Aucunepossibilité de datation absolue n’a été trouvée à ce jour et il est important denoter l’absence de toute trace d’atérien dans la région, malgré le maillage serré dela prospection.

La séquence holocène est celle qui a livré le plus de résultats, tant qualitatifsque quantitatifs. On trouve d’abord, environ 9 000 ans avant nos jours, un néo-lithique ancien à outillage lourd avec pics, bifaces, houes… qui témoigne d’uneactivité agricole très ancienne, même si elle a probablement été provisoire. Luisuccèdent des industries lithiques et céramiques peu abondantes mais de lamême famille, plus ou moins apparentées à ce que l’on appelait autrefois néoli-thique de tradition soudanaise (gouges, etc.). Les témoins archéologiques de cesépisodes anciens sont, dans leur majorité, affectés d’une patine d’altérationhydromorphe qui atteste leur position antérieure aux plus hauts niveaux lacus-tres et palustres locaux.

Le néolithique récent qui leur succède est caractérisé par une variante localedu néolithique ténéréen dite « faciès de Gossololom », à outillage très spectacu-laire (pièces foliacées bifaciales, disques, rectangles, scies, lames ovalaires unifa-ces, tout à fait caractéristiques…) Mais l’intérêt principal de cet épisode résidedans le fait que la grande majorité des gisements qui s’y rapportent sont restéspour l’essentiel en place, quoique en surface. On peut très facilement y réperto-rier des zones différenciées d’approvisionnement, de primo-débitage, d’ateliers,de stockage, etc. Ils livrent dès lors une multitude de renseignements rarementobservables sur l’organisation de l’espace et, partant, sur l’organisation économi-que et sociale de ses occupants. On s’aperçoit par exemple que les artisans fabri-quaient pour ainsi dire à la chaîne certains types d’outils pour les échanger, tantleur production dépasse de façon manifeste la simple satisfaction de leurs propresbesoins.

Cette tradition lithique se perpétue — en se modifiant légèrement —jusqu’au moment où, dans un contexte qui reste celui d’artisans spécialisés dansl’outillage lithique, l’on constate la présence sur les sites des premiers morceauxde métal (fer et cuivre).

On entre alors progressivement dans une phase intermédiaire (« sidéro-lithique ») où l’outillage de pierre joue encore un grand rôle bien qu’il y ait

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108 Gérard Quéchon

production de fer par bas fourneaux. Peu après cet épisode, on enregistre l’aban-don de la région, probablement en raison de la dégradation climatique.

Les datations

La séquence culturelle qui vient d’être esquissée ne devrait pas poser de problèmeparticulier. Elle est logique et s’inscrit dans un schéma de complexité croissanteet dans une sorte de cohérence interne. Cependant, au moment où furent obte-nues les premières datations, elle surprenait par son ancienneté alors inattendue,autant dans ses débuts — avec une « néolithisation » précoce, qui n’est pas l’objetde l’exposé d’aujourd’hui — que dans sa fin, avec la présence, beaucoup plus tôtque prévu, du métal sur les sites puis de fourneaux de métallurgie.

Rappelons les faits : en 1972, les premières mesures, à 2630 ± 120 ans BPpour une base de fourneau à Do Dimmi, et à 2925 ± 120 ans BP pour un sitecomportant des outils de fer et de cuivre nous avaient alertés, mais leur caractèrealors isolé obligeait à la prudence. Une des principales missions de la reprise desopérations de terrain à partir de 1982 était de confirmer ou d’infirmer cette chro-nologie ancienne. Les premiers résultats indiquant la contemporanéité du grossite d’habitat de Do Dimmi avec les bas fourneaux voisins constituaient plutôtune confirmation.

Néanmoins, la difficulté à obtenir des dates sur charbon et la relative incer-titude de ces dates, s’agissant de sites de plein air, conduisirent à la mise sur piedd’une tentative de datation sur dégraissants végétaux de céramique qui avaitl’avantage, en cas de réussite, de préciser la chronologie à partir du contexteculturel lui-même, puisque les objets datés en font partie. Ce programme, missur pied en collaboration par J.-F. Saliège, A. Person, F. Paris et moi-même, adonné des résultats extrêmement positifs, notamment en ce qui concerne Ter-mit. En effet, les mesures effectuées en aveugle par J.-F. Saliège sur des tessons decéramique de diverses périodes se sont révélées étonnamment cohérentes et con-formes à la logique archéologique (tableau 1). De plus, le croisement, chaquefois que possible, des datations de céramiques et de charbon sur un même site adonné des résultats très convaincants (tableau 2). À l’exception de deux sites surun ensemble d’une trentaine de mesures (ce qui semble plutôt de bon augure cardes résultats trop parfaits en matière de chronologie absolue pourraient avoirtendance à inquiéter), on se trouve devant un corpus de datations qui délimiteun terrain temporel solide.

La signification calendaire de ces mesures pour la métallurgie ancienne enAfrique fera l’objet d’un développement plus loin dans ce volume (Donnéeschronométriques et chronologiques de la métallurgie à Termit, A. Person etG. Quéchon). Elle peut être résumée ici en deux dates essentielles confirmées àplusieurs reprises : les objets de fer et de cuivre font leur apparition à Termit à

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Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) 109

peu près en 1500 avant l’ère chrétienne et les premiers fourneaux de métallurgieconnus sont datés aux environs de 800 av. J.-C. (photo 73).

Tableau 1. Datations sur dégraissant végétal de céramiques

Ces datations ont été effectuées en aveugle par J.-F. Saliège. Les datations suivies d’unastérisque indiquent la présence d’objets de métal sur le site. À l'exception des deux quifigurent entre crochets, ces résultats sont conformes à la logique archéologique.

Il faut, à ce propos, être tout à fait clair : l’écart entre ces deux dates ne sous-entend en aucune manière qu’il aurait existé à Termit deux stades culturels suc-cessifs, le premier dans lequel la population aurait connu le métal, mais non laréduction des minerais, et le second où la métallurgie aurait été complète. Cescénario nous semble même très peu vraisemblable. Simplement, on doit s’en

Sites Datations

Céramique ancienne

Termit ouest (dune sud) 7160 ± 300Cheguelenga 84 6760 ± 100Termit ouest 130 6085 ± 290Termit ouest 131 5275 ± 180Termit ouest (dune nord) 5240 ± 100Bezi Yasko 134 5000 ± 120

Céramique « ténéréenne »

Gara Tchia Bo 200 4420 ± 200Gara Tchia Bo 20 3625 ± 90Gossololom Bo 151 3600 ± 100Gara Tchia Bo 176 3510 ± 100Gossololom Bo 152 3235 ± 120Bézi Atchwa 3225 ± 90[Gara Tchia Bo 75 1960 ± 150]

Céramique « post-néo phase 1 »

Tchiré Ouma 147 3300 ± 120Gara Tchia Bo 48 ouest 3265 ± 100*Gara Tchia Bo 48 est 3260 ± 100*Tchiré Ouma 146 3230 ± 170*Termit ouest 95-b 3100 ± 100*Tchi Guiribé 127-b 2950 ± 100*Termit ouest 8 b[Gara Tchia Bo 48 B

2880 ± 120*2430 ± 110*]

Céramique « post-néo phase 2 »

Do Dimmi 16 2270 ± 90*Chegulenga 123 2095 ± 200*

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110 Gérard Quéchon

tenir rigoureusement à l’exposé des faits observés et, jusqu’à présent, il y a undécalage entre les premiers objets et la trace des premières opérations de réduc-tion. Cet écart n’a d’ailleurs rien de surprenant dans la mesure où les restes defourneaux s’avèrent aussi rares que discrets et qu’on n’a trouvé que deux ensem-bles, même pour la période où les outils de métal se sont multipliés. Il est donclogique de ne pas en trouver dès le début de la période.

Tableau 2. Datations multiples

Chaque fois que possible, les mesures ont été multipliées sur un même site, soit avec unnouvel échantillon de charbon, soit en datant un tesson de céramique au dégraissantvégétal. Cette opération avait pour but de contrôler la cohérence intrasite puis intersitede la chronologie.

Dans le même ordre d’idées, le fait que les datations des bas fourneaux s’éta-lent sur plusieurs siècles ne doit pas être attribué à une imprécision de la

Résultats satisfaisants

Site Charbons 1972 Charbons1982-1985 Dégraissant végétal

Do Dimmi 15 (bases de fourneaux)

2630 ± 120 2500 ± 7002065 ± 600

Do Dimmi 16(habitat)

1745 ± 110 2590 ± 120 2270 ± 900

Termit ouest 8B (site avec objets métal)

2925 ± 120 2880 ± 120

Gara Tchia Bo 176 (Ténéréen tardif )

3535 ± 200 3510 ± 100

Gara Tchia Bo 20 (Ténéréen tardif )

4100 ± 9003695 ± 800

3625 ± 900

Termit ouest (néolithique moyen) :– paléosol organique– poterie niveau supérieur

6340 ± 1005240 ± 100

Résultats incohérents

Âge attenduÂge obtenu

Charbons Dégraissant végétal

Gara Tchia Bo 75 ± 3500/3000 445 ± 80 1960 ± 150

Gara Tchia Bo 172 ± 3700/3200 2530 ?(problème de mesure)

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Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) 111

méthode ; il était évident, dès la découverte, qu’il y avait eu plusieurs opérationsde réduction au même endroit et aussi que le grand site d’habitat voisin avait étélonguement occupé. Les datations postérieures ont confirmé la justesse de cetteobservation, en vérifiant que ces deux gisements étaient contemporains sur unelongue durée : au moins les huit derniers siècles avant l’ère chrétienne.

L’ancienneté de cette chronologie exclut évidemment une origine méditerra-néenne ou méroïtique de la métallurgie du fer au sud du Sahara, hypothèse éga-lement battue en brèche, depuis une vingtaine d’années, par la multiplication,pour des sites avec du fer, de datations africaines situées au dernier millénaireavant Jésus-Christ.

On admettra donc, dans l’état actuel des connaissances, l’existence d’unfoyer autochtone africain de métallurgie du fer. Faut-il en fixer le berceau àTermit ? Peut-être mais sans exclure qu’un prochain programme de recherchesoblige à une révision. On notera en particulier les dates encore plus anciennesobtenues à Égaro, 70 km à l’ouest de Termit, mais sans l’appareil critique quipermettrait d’être totalement affirmatif (Paris et al., 1992). L’important, c’estque nous sommes désormais dans un cadre chronologique fiable pour les débutsde la métallurgie régionale.

Bien que reposant, comme nous venons de le voir, sur des mesures nombreuseset concordantes, ce cadre est néanmoins contesté, peut-être à cause de la diffi-culté qu’il y a d’admettre des perspectives nouvelles, alors qu’il nous arrived’accepter sans broncher des données dont la fiabilité est loin d’être démontrée,au seul titre qu’elles participent des idées reçues.

McIntosh (1994), en particulier, pense que les dates de Termit doivent êtreenvisagées avec un considérable scepticisme. Son argumentation repose sur deuxconsidérations :• les premières mesures anciennes pour la métallurgie du Niger, les dates du

cuivre-1 avancées par Grébénart pour la région d’Agadès, ne sont plus accep-tées (Killick et al., 1988) ;

• il y a des dangers de trouver des charbons fossiles sur les sites de surface duNiger et peut-être sur beaucoup d’autres, ainsi que dans les fourneaux deréduction.

Sur le deuxième point, il suffit de faire remarquer que, si tel était le cas, le corpusdes dates de Termit n’aurait aucune chance d’être cohérent, puisque les échan-tillons datés n’auraient que des rapports aléatoires avec l’activité humaine del’époque. On voit bien, au contraire, que toutes les dates se coordonnent defaçon remarquable et corroborent en tous points le raisonnement purementarchéologique, qu’il s’agisse de charbons pris dans un fourneau ou de mesures surles dégraissants céramiques.

C’est bien la conscience des difficultés de datation sur les sites de surface quia conduit à attendre, pour publier les données, d’avoir multiplié et croisé lesrésultats d’un même site à partir d’éléments différents et d’avoir ajouté le

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112 Gérard Quéchon

maximum de mesures possibles de sites différents. Il se trouve que toutes lesdates obtenues sont pertinentes en elles-mêmes et cohérentes entre elles. Il fau-drait donc, pour que la chronologie soit fausse, que toutes les mesures, quelleque soit leur origine, soient affectées de la même erreur, ce qui est statistique-ment invraisemblable.

Il est intéressant de noter que les datations céramiques prouvent a contrarioque les charbons de fond de fourneau ainsi que les charbons dunaires des siteseux-mêmes ne sont ni des charbons fossiles ni des charbons exogènes sans rap-port avec l’activité humaine car, dans ce cas, les datations croisées auraient étéinopérantes.

Quant au premier argument adressé à des archéologues qui ont été parmi lespremiers à souligner que la manière dont était posée la question du cuivre-1 d’Aga-dès n’était guère satisfaisante, il pourrait prêter à sourire. Remettre en cause les

Photo 73. Vue panoramique des 22 bases de fourneaux de Do Dimmi (Termit, Niger)(© G. Quéchon).

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Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) 113

dates de la métallurgie à Termit sous prétexte que d’autres dates de métallurgie,proposées par quelqu’un d’autre, lors d’un autre programme et dans une autrerégion se sont révélées discutables semble un argument pour le moins spécieux !À cette aune, on aurait vite fait de déclencher dans le petit monde des préhisto-riens un nouvel épisode, inattendu, de la querelle des Bouffons.

Reste l’objection majeure, s’agissant de sites de surface, sur l’incertitude de lacontemporanéité des fragments de métal et du reste du matériel archéologique.Il s’agit d’un point crucial : lors de la présentation de la séquence, nous avonslonguement insisté sur le fait que les documents prouvaient que les sites du néo-lithique final de Termit étaient presque toujours totalement exempts de pertur-bations et de mélanges. C’est dans ce contexte, en liaison avec des vestigesorganisés avec une logique aussi remarquable que récurrente, qu’apparaissent lespremiers objets de métal ; s’ils ont été semés ultérieurement, là où on les a

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114 Gérard Quéchon

retrouvés, par un paléo-Toubou facétieux, celui-ci était également un préhisto-rien remarquable puisqu’il les a systématiquement abandonnés dans le mêmecontexte culturel céramique et lithique, sur des sites de la même période (environ2800 à 3300 BP) et jamais sur des gisements plus anciens. L’objection se renforceencore si l’on essaie d’imaginer l’occupation de la région par une population his-torique connaissant la métallurgie : elle n’aurait alors laissé aucune autre trace deson existence que ces répétitives « offrandes » métalliques sur certains gisements,triés avec soin, de ses prédécesseurs.

Il semble inutile d’insister davantage sur une série d’observations que nouscroyons solides. Pour autant, tous les problèmes de cette métallurgie ancienne nesont pas résolus. Si la chronologie est établie, nous ne connaissons pratiquementrien de la technique, des processus de la création et de l’étendue de cette métal-lurgie, pour n’évoquer que quelques points en suspens.

Conclusion

Indiscutablement, dans l’état actuel des connaissances, l’hypothèse d’une inven-tion autochtone s’impose, d’abord pour des raisons chronologiques, mais aussiparce que cette métallurgie arrive dans des cultures complexes et très« techniciennes », donc dans une tendance favorable à l’innovation.

Je voudrais insister néanmoins sur le fait qu’il ne s’agit pas d’une positiondéfinitive : les berceaux de l’humanité, de l’agriculture, de l’élevage, de la métal-lurgie, etc. sont incontestablement des berceaux à roulettes et certains bébés peu-vent s’attendre à un avenir agité. Peu enclin à la recherche obstinée du scoop et àl’archéologie dite « de la fille du chef », je voudrais rappeler qu’il n’est pas impor-tant, en soi, que la métallurgie africaine soit la plus jeune ou la plus vieille, endo-gène ou allochtone. S’il s’avère que des dates plus anciennes trouvées ailleursindiquent que le fer s’est diffusé à partir d’une autre source, l’Afrique n’en sera nimeilleure ni moins bonne : avoir des racines, ce n’est pas affirmer qu’elles sontplus profondes que celles des autres.

Mais si toutes les positions scientifiques sont respectables, à condition d’êtrefondées, celles de l’idéologie le sont parfois moins. Il est indéniable que, à l’instarde toutes les opinions humaines, les avis scientifiques subissent l’influence ducontexte philosophique et politique dans lequel ils sont formulés. À cette aune,la question des origines de la métallurgie africaine s’est souvent inscrite, dans lepassé (et parfois, hélas !, encore maintenant), au sein d’une logique intégrant lesrapports de force Nord-Sud, colonisateurs-colonisés.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 115

Données chronométriqueset chronologiques de la métallurgie à Termit

Matériaux graphiques pour l’étude des âges anciens du fer1

Alain Person, Gérard Quéchon

Cette réflexion prolongeant celle de Gérard Quéchon (voir chapitre précédent),nous ne reviendrons pas sur les raisonnements archéologiques qui y sont présen-tés, mais nous tenterons de réaliser une approche chronologique de cette métal-lurgie par des représentations graphiques, tout en nous interrogeant sur certainsdes problèmes que posent les datations au carbone 14.

Dans le premier article et pour des raisons de clarté et de commodité del’exposé, l’ensemble des données chronologiques a été exprimé en données noncalibrées. En effet, le but principal étant de vérifier la pertinence des mesures dediverses natures sur le même site où de même nature sur des sites différents, ilsemblait plus adéquat de conserver la formulation la plus simple. En opérantainsi, nous étions bien conscients d’exprimer les données non pas en chronologievraie mais en termes de mesures radiométriques dont le rapport avec le tempshistorique, si étroit soit-il, reste complexe. Il s’agit donc, dans un premier temps,de chronométrie, c’est-à-dire de test de la validité archéologique de la mesure del’âge d’un échantillon sans l’inclure pour autant dans un référentiel temporelgénéral. Les comparaisons se font d’échantillon à échantillon (figure 3) ou degroupe d’échantillons à groupe d’échantillons (figure 4). Dans un second temps,une approche chronologique est envisagée pour Termit, avec calibration desmesures (tableau 3) pour les faire entrer dans un référentiel chronologiquecalendaire (figure 5) et pouvoir ainsi comparer en termes de données histori-ques les débuts de la métallurgie à Termit à l’ensemble des autres événementsarchéologiques.

1. Les auteurs tiennent à remercier Vincent Balter, pour l’aide aussi précieuse quespontanée apportée dans la mise en forme des graphiques, ainsi que Jean Polet pourses conseils et sa relecture amicale.

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116 Alain Person, Gérard Quéchon

1500

1650

1800

1950

2100

2250

2400

2550

2700

2850

3000

3150

3300

3450

3600

3750

3900

4050

4200

4350

4500

Âg

e14

C

Figure 3. Représentation graphique des mesures 14C BP, à Termit-Égaro. Histogrammeadditionnant par classes de 50 ans les dates radiocarbones BP non calibrées selonl’intervalle de confiance des mesures

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Données chronom

étriques et chronologiques de la métallurgie à T

ermit

117

NIGER(Quéchon, 1999)

NIGÉRIA(Woodhouse, 1998)

CAMEROUNMac Eachern, 1996)

GABON(Clist, 1995)

RWANDA-BURUNDI(De Maret et Thiry, 1996)

MEROE(Shinnie, 1985)

ÂG

ES

14C

(

Figure 4. Histogram

me com

paratif des âges 14C

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118A

lain Person, Gérard Q

uéchon

Tableau 3. Datations sur dégraissant végétal des céramiques

Sites (échantillons) Codelabo Matériel Âge 14C BP Âge BP

calibréÂge av. J.-C.

apr. J.-C. calibréCalibration av. J.-C.

– apr. J.-C.

Gara Tchia Bo 200 Pa 547 Dégraissant végétal 4420 ± 200 – 4985 3036 av. J.-C. 3364-2789 av. J.-C.Gara Tchia Bo 20 a UPS Charbon 4100 ± 90 – 4564 2615 av. J.-C. 2871-2493 av. J.-C.Gara Tchia Bo 20 b UPS Charbon 3695 ± 80 – 4036 2087 av. J.-C. 2192-1947 av. J.-C.Gara Tchia Bo 20 c Pa 505 Dégraissant végétal 3625 ± 90 – 3919 1970 av. J.-C. 2131-1828 av. J.-C.Gossololom Bo 151 Pa 539 Dégraissant végétal 3600 ± 100 – 3885 1936 av. J.-C. 2120-1776 av. J.-C.Gara Tchia Bo 176 a UPS Charbon 3535 ± 200 – 3780 1831 av. J.-C. 2136-1616 av. J.-C.Gara Tchia Bo 176 b Pa 484 Dégraissant végétal 3510 ± 100 – 3760 1811 av. J.-C. 1944-1686 av. J.-C.Gossololom Bo 152 Pa 540 Dégraissant végétal 3235 ± 120 – 3461 1512 av. J.-C. 1629-1398 av. J.-C.Bézi Atchoua Pa 511 Dégraissant végétal 3225 ± 90 – 3421 1472 av. J.-C. 1602-1407 av. J.-C.Gara Tchia Bo 75 Pa 643 Dégraissant végétal 1960 ± 150 – 1884 66 apr. J.-C. 114 av. J.-C.-235 apr. J.-C.Tchiré Ouma 147 Pa 320 Dégraissant végétal 3300 ± 120 – 3476 1527 av. J.-C. 1734-1429 av. J.-C.Gara Tchia Bo 48 W M Pa 811 Dégraissant végétal 3265 ± 100 – 3468 1519 av. J.-C. 1673-1421 av. J.-C.Gara Tchia Bo 48 E M Pa 810 Dégraissant végétal 3260 ± 100 – 3467 1518 av. J.-C. 1671-1419 av. J.-C.Tchir Ouma 146 M Pa 510 Dégraissant végétal 3230 ± 170 – 3460 1511 av. J.-C. 1683-1312 av. J.-C.Termit ouest 96 b M Pa 481 Dégraissant végétal 3100 ± 100 – 3281 1332 av. J.-C. 1443-1219 av. J.-C.Tchi Guiribé 127 b M Pa 669 Dégraissant végétal 2950 ± 100 – 3098 1149 av. J.-C. 1307-999 av. J.-C.Termit W 8 a M IFAN Charbon 2924 ± 120 – 3067 1118 av. J.-C. 1300-924 av. J.-C.Termit W 8 b M Pa 688 Dégraissant végétal 2880 ± 120 – 2971 1022 av. J.-C. 1257-901 av. J.-C.Do Dimmi 15 a F IFAN Charbon 2630 ± 120 – 2752 803 av. J.-C. 898-601 av. J.-C.Do Dimmi 16 a M UPS Charbon 2590 ± 120 – 2744 795 av. J.-C. 832-533 av. J.-C.Do Dimmi 16 b M Pa 296 Charbon 2580 ± 80 – 2742 793 av. J.-C. 810-559 av. J.-C.Do Dimmi 15 b F Pa 288 Charbon 2500 ± 70 – 2581 632 av. J.-C. 791-420 av. J.-C.Gara Tchia Bo 48 B1 M Pa 519 Dégraissant végétal 2430 ± 110 – 2399 450 av. J.-C. 772-391 av. J.-C.Do Dimmi 16 c M Pa 504 Dégraissant végétal 2270 ± 90 – 2321 372 av. J.-C. 399-195 av. J.-C.Gara Tchia Bo 181 F Pa 351 Charbon 2120 ± 60 – 2086 137 av. J.-C. 196-45 av. J.-C.Cheguelenga 123 M Pa 662 Dégraissant végétal 2095 ± 200 – 2045 96 av. J.-C. 383 av. J.-C.-122 apr. J.-C.Do Dimmi 15 c F UPS Charbon 2065 ± 60 – 1996 47 av. J.-C. 162 av. J.-C.-9 apr. J.-C.Do Dimmi 16 d M IFAN Charbon 1745 ± 110 – 1665 285 apr. J.-C. 143-422 apr. J.-C.

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Données chronométriques et chronologiques de la métallurgie à Termit 119

Gara Tchia Bo 200

Gara Tchia Bo 20 a

Gara Tchia Bo 20 b

Gara Tchia Bo 20 c

Gossololom Bo 151

Gara Tchia Bo 176 a

Gara Tchia Bo 176 b

Gossololom Bo 152

Bézi Atchoua

Gara Tchia Bo 75

Tchiré Ouma 147

Gara Tchia Bo 48 W M

Gara Tchia Bo 48 E M

Tchiré Ouma 146 M

Termit ouest 95 b M

Tchi Guiribé 127 b M

Termit W 8 a M

Termit W 8 b M

Do Dimmi 15 a F

Do Dimmi 16 a M

Do Dimmi 16 b M

Do Dimmi 15 b F

Gara Tchia Bo 48 B1 M

Do Dimmi 16 c M

Gara Tchia Bo 181 F

Cheguelenga 123 M

Do Dimmi 15 c F

Do Dimmi 16 d M

– 3500

– 3250

– 3000

– 2750

– 2500

– 2250

– 2000

– 1750

– 1500

– 1250

– 1000

– 750

– 500

– 250 0

250

500

– 3036

– 2615

– 2087

– 1970

– 1936

– 1831

– 1811

– 1512

– 1472

66

– 1527

– 1519

– 1518

– 1511

– 1332

– 1149

– 1118

– 1022

– 803

– 795

– 793

– 632

– 450

– 372

– 137

– 96

– 47

285

Céram

ique néolithique

Charbon néolithique

Céram

ique métal

Charbon m

étal

Site

s (é

chan

tillo

ns d

atés

)

Âge 14C calibré

Figure 5. Chronologie de la fin du néolithique et des débuts de la métallurgie à Termit

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120 Alain Person, Gérard Quéchon

La critique scientifique d’une date au carbone 14 pose deux questionspréalables :• le problème de la représentativité archéologique de la mesure, qui peut être dis-

cuté dans le cadre des travaux de Termit pour lequel on dispose de toutes les don-nées. La méthode utilisée est celle de l’application de la mesure au carbone 14aux matériaux anthropiques eux-mêmes : il s’agit de dégraissants végétaux inclusdans des céramiques (Saliège et Person, 1991 ; Durand et al., 1999), de char-bons provenant de sites archéologiques (par croisement des résultats avec lesdatations céramiques) et de bases de structure de réduction (photo 73) ;

• la fiabilité de la mesure, liée par exemple à la quantité de carbone utilisable.Elle est accessible ici de deux façons : d’une part, par les informations donnéespar les laboratoires de datation en fonction de l’étroitesse de l’intervalle deconfiance qu’ils fournissent, ce qui conduira à pondérer l’intervalle de tempspris en compte dans les traitements graphiques, et, d’autre part, par son inté-gration cohérente dans un corpus de mesures réalisées sur le même ensemblearchéologique.

Il paraît intéressant de traduire sous forme graphique (Gasco, 1985 ; Voruz,1995) l’ensemble des 28 mesures réalisées pendant toute la durée du programmepar les laboratoires2 (tableau 3), pour avoir une première image des débuts de lamétallurgie du fer dans le massif de Termit (figure 3). Il s’agit d’un histogrammecumulatif pondéré dans lequel la même surface est accordée à chaque date, detelle sorte que les plus précises, celles qui ont un petit intervalle de confiancen’aient pas une part moins importante que les autres dans les pics de fréquencemais, au contraire, qu’elles y jouent un rôle prépondérant. Pour plus de lisibilité,la présentation est ici sous forme de « poire » (Gasco, 1985 ; Evin et Oberlin,1998) : l’axe chronologique en abscisse est figuré de façon verticale et l’histo-gramme présenté avec son image en « miroir » de part et d’autre de cet axe.

L’homogénéité du graphique apparaît clairement. Il y a donc continuité dansle recouvrement des datations, ce qui conforte déjà la réalité de la métallurgieancienne entre 3300 et 1400 BP. La période comprise entre 3300 et 2000 BP,documentée par 26 mesures, correspond à l’essentiel de l’activité métallurgiqueenregistrée sur les sites archéologiques. Pour refléter l’ensemble des mesures aucarbone 14 obtenues dans la région, nous avons fait figurer également les2 données obtenues sur les sites d’Égaro (Pa 629) : 4000 ± 110 BP (Pa 661) et3645 ± 150 BP (Paris et al. 1992). Ces dates ont pourtant été obtenues dans debonnes conditions de terrain et de laboratoire mais, dans la mesure où une seulemission a pu être réalisée, la prudence reste de mise, surtout s’agissant de sites de

2. Laboratoire de datation de l’Institut fondamental d’Afrique Noire (Dakar), Labora-toire de géochimie isotopique de l’Université de Paris Sud (Orsay) et Laboratoired’océanographie dynamique et de climatologie de l’Université Pierre-et-Marie-Curie (Paris).

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Données chronométriques et chronologiques de la métallurgie à Termit 121

surface. Il est facile de visualiser l’influence graphique de ces deux dates entre 4100et 3300 BP (figure 3). Pour confronter visuellement ces informations à l’ensembledes données bibliographiques disponibles sur la métallurgie du fer en Afrique,nous avons établi, de la même façon, des histogrammes cumulés de datations pourchaque grande région où existent des corpus de dates au-delà de 1 000 années BP(Clist, 1995 ; MacEachern, 1996 ; de Maret et Thiry, 1996 ; Okafor, 1993, Wood-house, 1998). Nous avons fait figurer aussi le peu d’informations chronologiquesexistant sur Méroé (Shinnie, 1985), en raison du rôle de référence « mythique » quece site a joué dans la littérature (figure 4). Il va de soi qu’à propos des données publiéespar différents auteurs à différentes époques, il est impossible d’établir un appareil cri-tique comparable à celui mis en place pour les gisements de Termit, car tous les élé-ments scientifiques pour le faire ne sont pas accessibles. Il ne s’agit donc que d’unecompilation de résultats, exprimés en âge au carbone 14 BP, destinée à donner unevue d’ensemble sommaire, mais la plus globale possible, des données publiées.

Un tel graphique confirme néanmoins en première analyse l’ancienneté de lamétallurgie du fer en Afrique. Il y a, d’évidence, une bonne concordance chro-nologique de tous les histogrammes, y compris dans les régions les plus éloignées.Une fois encore, l’hypothèse diffusionniste à partir de Méroé est visuellementinvalidée. Il semble en revanche que les dates proposées pour l’Afrique centralesoient aussi anciennes que celles du Niger. Enfin, il existe au Gabon, au Nigériaet au Cameroun un ensemble impressionnant de mesures concordantes.

Après avoir ainsi présenté une vision synthétique, si schématique soit-elle,des débuts de la métallurgie du fer en Afrique subsaharienne, il est intéressant,pour la région de Termit où nous disposons des informations nécessaires, de ten-ter une approche plus fine de la chronologie réelle en regroupant, après les avoirtransformées en données calendaires, l’ensemble des datations de la périodeconcernée (figure 5). Il était impossible de présenter les résultats de cette opéra-tion sous la même forme graphique que les données non corrigées. En effet, laprobabilité qu’une date calendaire se situe en un point donné de son intervallede confiance est régie par une formule complexe, liée, entre autres, au nombred’interceptions entre la mesure non corrigée et la courbe de calibration. La formede représentation adoptée jusqu’ici est donc inapplicable.

D’ailleurs il ne serait pas souhaitable, même si c’était possible, de garder lemême mode de présentation car il s’agit maintenant de définir une chronologievraie et il vaut mieux bien faire la distinction entre les deux démarches. Nousavons donc adopté une présentation plus classique, où les résultats sont disposéspar groupes culturels à la suite les uns des autres, en regard d’une échelle tempo-relle exprimée en années historiques. La barre d’erreur a été volontairement limi-tée à 1 σ car la multiplication des dates convergentes justifie que l’on minimisel’incertitude dans le cadre d’un traitement statistique et aussi parce que l’essaique nous avons fait avec 2 σ alourdissait et compliquait le graphique sans appor-ter d’informations nouvelles.

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122 Alain Person, Gérard Quéchon

Le chiffre figurant à la droite de chaque date est celui de la valeur du sommetde la courbe de probabilité calendaire la plus forte, il n’est donc presque jamaisau centre de l’intervalle de confiance. Il est noté à titre indicatif et pour donnerune vision plus imagée, sinon plus exacte, de la succession des événements.

Les conclusions s’imposent d’elles-mêmes : la continuité culturelle danslaquelle s’inscrit l’arrivée des premiers objets de fer est aussi clairement visible surle graphique qu’elle l’a été sur le terrain ; il n’y a pas de rupture, à partir du néo-lithique récent et jusqu’à la fin de l’occupation humaine antéhistorique du mas-sif, mais seulement des évolutions.

On notera au passage, sans en surestimer la signification, la répétition de cer-taines des valeurs figurées, tant pour les premières dates de présence du fer sur lessites (1519, 1518, 1512) que pour celles des premiers bas fourneaux (803, 795,793). Quoiqu’un tel degré de précision soit anecdotique, il est ainsi confirmé quel’on se trouve dans un cadre chronologique solide. C’est d’autant plus vrai quel’ensemble des dates est encore plus étroit qu’il n’apparaît au premier abord, sil’on prend soin d’examiner séparément les trois mesures extrêmes du dispositif,la plus ancienne et les deux plus récentes. Celle du site 200, 3036 av. J.-C.(3364-2789 av. J.-C.) correspond en effet à un ensemble qui nous avait sembléle plus ancien de la série ténéréenne : la panoplie lithique habituelle n’est pasencore au complet et il existe des formes céramiques qui disparaissent par lasuite. Il est donc logique qu’elle soit antérieure aux autres de quelques siècles carelle ne fait pas à proprement parler partie, même si elle l’annonce, du contexteculturel dans lequel apparaîtront les premiers objets de métal.

Les deux dates les plus récentes posent un problème différent. La première— site 75, 66 apr. J.-C. (114 av. J.-C.-235 apr. J.-C.) — est impossible pour duténéréen. Il s’agit probablement d’un problème de carbone allochtone plusrécent provenant d’un carbonate pédogénétique et s’étant déposé dans la poro-sité de la céramique à la suite d’une phase d’immersion temporaire, par exemple ;le prétraitement au laboratoire s’est révélé insuffisant pour l’éliminer. Le cas de laseconde date est plus complexe : elle est relative à l’ensemble de Do Dimmi quicomporte à la fois un habitat et des bas fourneaux et dont on sait qu’il a étéimportant et qu’il a perduré pendant plusieurs siècles. Les 6 mesures s’étalantentre 800 et 50 av. J.-C. ne doivent donc pas surprendre. Mais la dernière, à285 apr. J.-C., semble, dans le contexte de Termit, un peu tardive. Il ne sauraitbien sûr être question de l’écarter pour ce seul motif et nous l’avons gardée dansle dispositif. Nous devons pourtant faire part de notre doute, surtout pour unsite traversé par la principale piste chamelière actuelle et, donc, plus susceptibleque d’autres de subir des rajeunissements.

Au terme de cette analyse graphique d’un corpus de dates qui sont validées à lafois par le contexte archéologique local, par leur cohérence propre et par leur adé-quation aux données bibliographiques disponibles, il semble difficile de contester,tout au moins de bonne foi, l’ancienneté des débuts de la métallurgie africaine.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 123

L’Afrique centrale : le « savoir-fer »

Pierre de Maret

Certains d’entre vous se demandent sans doute pourquoi l’UNESCO a décidé,il y a quelques années, de lancer un projet interculturel consacré aux « Routes dufer en Afrique » et, surtout, en quoi cela concerne son département du Dialogueinterculturel et du pluralisme pour une culture de la paix.

En prenant cette initiative, l’UNESCO répondait à la demande insistante denombreux savants, diplomates, hommes d’État et intellectuels africains. Maiscela ne procédait-il pas d’un intérêt rétrograde pour une technique emblémati-que d’une Afrique à jamais révolue ? En quoi cela pouvait-il favoriser le dialogueinterculturel, voire promouvoir la paix ?

De tous les continents, l’Afrique est celui où le travail du fer a été le plusrépandu, présentant à la fois :• un certain nombre de grandes caractéristiques communes qui font la spécifi-

cité, l’originalité de la métallurgie africaine ;• une grande diversité technique, culturelle et symbolique, qui sont autant de

variations sur ce fond commun ;• une continuité remarquable, qui remonte à plusieurs millénaires et qui per-

met même de penser que cette technique fondamentale peut trouver son ori-gine sur le continent africain.

Les fondeurs et les forgerons africains témoignent, dans le dialogue interconti-nental, des savoirs et des « savoir-fer » de leur continent dans un domaine qui eutaussi un rôle fondamental dans bien d’autres civilisations de par le monde. Cen’est pas un hasard si tant d’Anglo-Saxons s’appellent M. ou Mme Smith. EnFrance, l’ouvrage de Robert Griffon (1999), Le dernier forgeron, évoque avec nos-talgie l’importance qu’avait ce métier autrefois. Son auteur, qui a consacré unethèse à la Sorbonne aux forgerons du Cher, montre combien la forge était unhaut lieu de convivialité villageoise. Cela évoque tout à fait mes expériences afri-caines car, en effet, la forge a partout un rôle essentiel dans le dialogue. Elle était

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124 Pierre de Maret

d’ailleurs souvent un lieu d’où toute violence était strictement bannie. Dans larecherche de la paix entre les personnes ou les peuples, les forgerons ont souventjoué un rôle essentiel ; marginalisés, détenteurs de pouvoirs extraordinaires, ilsfurent souvent les intercesseurs entre groupes ennemis, les émissaires en cas deconflit entre familles ou ethnies.

Plus largement, en matière de dialogue interculturel, ce qui me fascinedepuis longtemps c’est, à propos de la métallurgie, l’extraordinaire parallélismesymbolique qui existe entre les différentes civilisations, que ce soit en Europe, enAsie ou en Afrique. Cela nous renvoie aux catégories universelles de l’esprithumain chères à Claude Lévi-Strauss, ancrage idéal pour le dialogue interculturelcomme pour la recherche scientifique. Car de ce point de vue, l’Afrique offreaussi aux scientifiques un champ extraordinaire d’observation et d’analyse oùtechnologie, archéologie et anthropologie peuvent dialoguer et fournir des exem-ples et des modèles interprétatifs dont l’importance déborde du cadre stricte-ment africain.

Je voudrais aborder essentiellement deux ordres de problèmes au départ demon expérience de l’Afrique centrale où je travaille depuis une trentained’années. Comme on parle beaucoup de l’ancienneté de la métallurgie en Afri-que, mes collègues Hamady Bocoum et Gérard Quéchon viennent de le faire, jevoudrais, d’abord, discuter un peu cet aspect des choses puis aborder brièvementquelques aspects liés à la technique avant de développer les rapports que la métal-lurgie entretient avec les systèmes de pensée chez les Bantu.

À quand remonte la métallurgie en Afrique centrale ?

Il y a plus d’un siècle déjà, un géologue, archéologue amateur (Stainier, 1897),avait eu l’intuition, vu l’importance et la sophistication de la métallurgie en Afri-que centrale, que, contrairement aux conceptions racistes de l’époque, la métal-lurgie devait y être très ancienne. Pendant longtemps on a lié de façon assezmécanique l’expansion bantu à la métallurgie, l’une expliquant l’autre dans unraisonnement circulaire.

Comment les Bantu s’étaient-ils propagés à travers l’Afrique centrale ? Grâceà la supériorité agricole que leur conférait la métallurgie pour défricher la grandeforêt et à la supériorité militaire que leur procurait la possession d’armes en fer.Comme la zone d’origine des langues bantu avoisinait celle de la culture nok oùl’on avait des dates parmi les plus anciennes pour des fourneaux de réduction dufer, l’archéologie paraissait confirmer cette hypothèse, corroborée par le faitqu’un linguiste, Guthrie (1970), avait cru pouvoir montrer que les Proto-Bantuconnaissaient la métallurgie avant que ne débute leur migration.

Reprenant les travaux de Guthrie, François Nsuka et moi-même (1980)avons pu montrer que les reconstructions proto-bantu de Guthrie ne prouvaient

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L’Afrique centrale : le « savoir-fer » 125

pas la connaissance de la métallurgie à cette époque. En effet, les termes commehache, houe, et même forger ou minerai, avaient eu vraisemblablement à l’ori-gine un sens qui n’était pas lié au métal.

Cela a amené à dissocier progressivement l’origine du fer des Bantu en Afri-que centrale, d’autant plus que les recherches se multipliant, on a obtenu en dif-férents points des dates aussi anciennes, voire plus anciennes, que celle de Tarugaen zone nok au Nigéria. Progressivement, les dates admises pour le début de lamétallurgie du fer en Afrique centrale ont reculé, passant du début de l’ère chré-tienne au IVe, Ve, voire au VIIe siècle av. J.-C.1.

Il y a un consensus assez général pour dire que, entre la zone nok au Nigéria(Okafor, 1993), le Cameroun, le Gabon (Clist et Lanfranchi, 1989 ; Lanfranchiet al., 1991), la République centrafricaine (Essomba, 1992 et Zangato, 1993 et1999) et le Rwanda (Van Grunderbeek, 1992), la métallurgie du fer est présenteà partir de la fin du IXe siècle avant notre ère. Il existe une série de dates plusanciennes dans la même région, remontant jusqu’au XVe siècle avant notre ère,mais, vu la grande ancienneté des échantillons, les différents chercheurs ont eutendance à les considérer comme contaminés et à les rejeter2.

N’empêche, en rejetant les dates très anciennes, on a eu tendance, comme jel’ai dénoncé dans un texte récent (de Maret et Thiry, 1996), à postuler que lamétallurgie du fer ne pouvait pas être plus ancienne en Afrique que sur d’autrescontinents. Toute date antérieure à 1500 av. J.-C. était donc rejetée. Les résultatsobtenus au Niger (Paris et al., 1992 ; Quéchon, 1995) tendent cependant àprouver le contraire.

Il existe pour l’Afrique centrale un autre indice permettant de penser quel’usage du fer est très ancien, peut-être aussi ancien qu’au Niger. En effet vers3000 BP, voire 3500 ou même 4000 BP, on a une série de fosses profondes dontla fonction première reste controversée (silo/tubercules ?) mais qui ont servi ulté-rieurement de fosses à détritus. Or, elles ne contiennent quasiment pas d’éclatsde débitage ou d’outillage de l’industrie lithique. Alors que celle-ci était abon-dante jusque vers 3500 BP, elle s’interrompt soudain sur des sites d’habitat deplein air. Cette disparition brutale et attestée du Congo au Cameroun et mêmejusqu’au Ghana s’explique difficilement. Qu’est-ce qui peut avoir remplacé lapierre ? Il est tentant de penser que c’est le fer. Malheureusement, on n’en a pas

1. Vu les fluctuations de la teneur en carbone 14 dans l’atmosphère à ces périodes, lacalibration des dates les place dans un intervalle qui va du VIIIe au Ve siècle av. J.-C.Cet intervalle de temps est trop large pour permettre de dresser une chronologiefine permettant de déterminer la zone d’origine de la métallurgie et la façon dontelle s’est diffusée.

2. Ainsi, au cours de mes recherches personnelles à Yaoundé, au Cameroun, une datede cette époque pour une fosse renfermant des scories n’a pas été confirmée pard’autres dates pour la même fosse et pour une série d’autres fosses datées une qua-rantaine de fois dans une dizaine d’autres sites de la région.

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126 Pierre de Maret

encore trouvé de trace à une époque aussi ancienne. Mais cela peut s’expliquerpar le fait que les objets en fer étant rares et précieux, ils étaient systématique-ment récupérés et reforgés, et que le reste, rouillé, a disparu. L’absence jusqu’àprésent de fourneau, tuyère ou scories amène Lavachery (1997-1998) à fairel’hypothèse que la population de ces régions utilisait le fer mais ne le produisaitpas.

Une de nos chercheuses (Thiry, 1996) a réexaminé les données linguistiqueset arrive à des conclusions très intéressantes et qui corroborent peut-être l’hypo-thèse d’une connaissance et d’un usage anciens d’objets en fer à défaut d’une pra-tique de la métallurgie. En effet, le terme signifiant fer semble finalementd’origine proto-bantu, alors que celui signifiant minerai de fer serait, lui, d’ori-gine plus récente et se serait diffusé d’est en ouest, de la région des Grands Lacsvers l’Angola et la Namibie.

Tout cela semble de plus en plus indiquer une connaissance très ancienne dela métallurgie du fer et, donc, sa probable découverte sur le continent africainavec, pour certaines régions, un phénomène de frontière mobile, sur le modèlede la conquête de l’Ouest américain. On aurait ainsi de vastes zones où la réduc-tion du fer n’est pas bien connue mais où les outils en fer se répandent parfoispendant longtemps avant que leurs habitants parviennent à la maîtrise de toutesles étapes de la métallurgie.

Les aspects techniques de la métallurgie du feren Afrique centrale

Si les fourneaux et les techniques de réduction ont largement retenu l’attentiondes anthropologues, des archéologues et des technologues, par contre le travaildu forgeron a été négligé. Les analyses métallographiques effectuées par ma col-lègue Terry Childs (1991), à l’époque au MIT de Boston, de fer de haches et decouteaux en provenance du Zimbabwe, notamment des ruines du grand Zimba-bwe et d’objets archéologique datés du VIIIe au XIVe siècle provenant de la zoned’origine des Luba, attestent de l’extraordinaire maîtrise technique des forgeronsbantu. Ainsi, souvent par soudage et corroyage, le forgeron fabriquait une lameen acier à faible teneur en carbone sur laquelle il soudait une couche d’acier quidonnait un bon tranchant, tandis que le centre de la lame, plus mou, permettaitd’absorber les chocs sur des objets durs.

Fréquemment, les Luba recyclaient les objets usés : les houes étaient refor-gées pour faire des haches, les haches pour faire des couteaux, les couteaux pourfaire des rasoirs, les rasoirs enfin donnaient des scalpels.

Mes fouilles dans cette région ont permis d’établir la séquence archéologiquede l’âge du fer dans cette zone depuis le VIIe siècle jusqu’aux Luba contempo-rains. C’est actuellement la plus longue fréquence connue et elle permet de sui-

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L’Afrique centrale : le « savoir-fer » 127

vre l’évolution non seulement du travail du fer mais aussi du cuivre (de Maret,1979 et 1980 ; de Maret et Thiry, 1996). Les forgerons luba pratiquaient aussi letréfilage de ces deux métaux à des fins décoratives. D’une façon générale, lestechniques de tréfilage sont très mal connues et ont malheureusement pratique-ment disparu.

Mais la plus grande surprise de l’analyse métallographique par T. Childs desobjets archéologiques luba, c’est la présence de fonte, de fer fondu (inclusion decarbide) dans des bracelets, et cela dans une proportion croissante au fil dutemps. Cette production de fonte est confirmée par le témoignage ancien d’unmissionnaire qui parle de fonte mise dans un moule pour des houes et par lestraditions orales actuelles (Childs, 1991).

La présence de véritable fonte de fer est, comme vous le savez, extraordinairepuisqu’elle implique une maîtrise technique et l’obtention systématique de tem-pératures très élevées réputées impossibles à atteindre avec les techniques afri-caines. D’où l’insistance de Jean Devisse et des spécialistes français pour que l’onparle de réduction et pas de fonte. Eh bien, il faut désormais admettre que lesLuba fondaient le fer, et ce depuis plus d’un millénaire !

La seconde surprise de taille, c’est que la fonte étant trop cassante pour êtreforgée, une étape de décarburisation est nécessaire pour transformer le métal afinde pouvoir le forger. C’est manifestement ce que les forgerons luba faisaient carles bracelets étudiés sont essentiellement de l’acier qui englobe des zones defonte. Comme le souligne Childs (1991), les techniques luba pour la métallurgiedu fer et du cuivre ont évolué parallèlement, et les techniques mises au point avecun métal ont été adaptées à l’autre. Ils avaient aussi, par exemple, mis au pointune technique de séparation du minerai contenu dans le sable des rivières par cequ’on appelle, en métallurgie moderne, le hancok jigg, c’est-à-dire un processusde sédimentation différentiel dans de l’eau courante.

Bref, dès que l’on prend la peine d’étudier de façon approfondie différentsaspects de la forge et qu’on ne se limite pas aux techniques de réduction/fonte,on constate le niveau de perfectionnement poussé de nombreux aspects del’activité métallurgique qui devraient être étudiés avant leur disparition totaleet définitive.

Les aspects symboliques de la métallurgie du feren Afrique centrale

Venons-en maintenant, après l’aspect historique et technique, à l’aspect symbo-lique de la métallurgie du fer.

Le symbolisme sexuel est dominant dans la réduction/fonte ; l’aspect symbo-lique de l’opération est essentiel, comme l’avait montré Échard (1983a et b), et

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128 Pierre de Maret

vise à corréler aussi étroitement que possible la production du métal et celle deshumains. Ces deux opérations cruciales relèvent toutes les deux d’une vastesphère qui englobe la procréation, la génération, la régénération, la transforma-tion, la fertilité, la fécondité, le succès, un mélange particulier et subtil de force,de savoir, de savoir-faire et de chance qui, comme dans beaucoup de cultures,sont intégrés dans le concept très polysémique de pouvoir, de puissance.

En Afrique centrale bantu, la fonte est clairement, plus ou moins simultané-ment, coït et accouchement. Le fourneau est orné de seins, de scarificationscomme une femme ; on lui met même parfois une ceinture comme chez lesShona du Zimbabwe, et le vocabulaire utilisé pour désigner ses différentes partiesfont référence au corps féminin. Soulignons au passage le parallèle avec les pote-ries, faites aussi en argile et dont les parties sont désignées, comme dans beau-coup de langues du monde, par des termes reprenant des éléments du corps :panse, lèvre, postérieur, épaule… Ah, catégories universelles de l’esprit humain,quand vous nous tenez !

Les soufflets avec leurs deux chambres sont souvent assimilés au pénis avecses testicules, leur rythme étant celui de l’acte sexuel.

Dans une vaste zone de l’Afrique centrale, on place des charmes à l’intérieurdu fourneau, souvent enterrés au centre, parfois dans un petit pot3. Cette der-nière pratique est ancienne et largement attestée du Congo au Rwanda, commele montre l’archéologie.

Pour les humains aussi, les relations sexuelles provoquent un échauffement,par exemple chez les Zulu ou les Thonga. Selon les Manyika du Zimbabwe, lafusion d’un homme et d’une femme est particulièrement dangereuse et doncbrûlante. Elle abolit les frontières non seulement entre deux personnes mais aussientre les sexes, entre le haut et le bas. Pour eux, l’acte sexuel est clairement unefonte, quelque chose de très « fusionnel » comme on dirait en français.

En matière de gestation aussi, les rapports entre la métallurgie, la poterie etles humains sont multiples.

Érigé à l’écart du village, le fourneau est souvent protégé, en Afrique del’Ouest, par un auvent. Comme pour la poterie, la fonte est entourée de prohi-bitions essentiellement à caractère sexuel : abstinence, interdiction de présenceféminine, surtout pour les femmes enceintes ou réglées.

Pour les Thonga, bien décrits par Junod (1910), « un enfant résulte d’unecuisson réussie, et il est considéré comme une poterie qui a été cuite et ne s’estpas fêlée à la cuisson ». En français aussi, on peut être un peu « fêlé ». Pour lesThonga, comme l’observait mon maître de Heusch (1982), on doit veiller à une

3. En décembre 1997, cette pratique a encore été observée lors d’une opération dereconstitution réalisée par des forgerons du Nord-Cameroun au cours de l’atelierinternational sur les Métiers africains du feu (METAF) que j’avais organisé àYaoundé.

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L’Afrique centrale : le « savoir-fer » 129

cuisson bien contrôlée de l’enfant et éviter toute surchauffe soudaine. Ainsi lafemme enceinte doit éviter de manger trop chaud ou trop épicé.

Comme pour la fonte, la cuisson de la poterie oblige à respecter des interdits.Il est interdit aux femmes enceintes ou réglées de s’en charger. Souvent, seule lafemme ménopausée peut s’occuper de la cuisson car, si elle ne l’est pas, elle ris-que de devenir stérile.

En ce qui concerne la naissance, la fonte est plus ou moins explicitementl’enfant de la femme/fourneau et les scories le placenta. Chez les Minyanka toutcomme chez les Lovedu ou les Sotho, l’enfant doit, après sa naissance, êtrerefroidi, fumé ou aspergé d’eau comme un morceau de métal forgé. Une vie nou-velle est créée quand l’eau refroidit le feu, comme le forgeron refroidit avec del’eau le morceau de métal sans forme pour créer une forme nouvelle.

En ce qui concerne la cuisson des poteries, on n’attend pas qu’elles refroidis-sent. Au contraire, on les retire du feu encore très chaudes et on les asperge d’eau,d’une décoction d’écorces ou de cendres. Ce qui est frappant c’est que, dans lazone où on procède ainsi, les nouveau-nés sont traités pratiquement de la mêmefaçon, si bien qu’on peut se demander si les pots sont traités comme des enfantsou inversement, si, quand on fume et asperge le nouveau-né, c’est pour le traitercomme un pot.

On pourrait multiplier les exemples. Clairement la gestation, la fonte et lacuisson de poteries sont des cuissons ; la naissance est assimilée à l’extraction dela fonte ou des poteries. Il faut cependant souligner un paradoxe. Bien que lespratiques rituelles soient beaucoup plus développées pour la réussite des opéra-tions de fonte/réduction que pour la forge, la fonte, l’opération métallurgiquepar excellence, n’est pas présente dans les rituels. Au contraire, le fait de forgeroccupe une place importante dans des aspects clefs du système symbolique, alorsque les actes rituels n’y prennent pas une grande place. Chez les Bantu, le forge-ron occupe souvent une place prépondérante dans les rites et les mythes. Il yintervient souvent de façon métonymique, représenté par son nyundo, son mar-teau-enclume. Le parallèle entre la fonte et l’accouchement peut expliquer ceparadoxe. Les femmes, comme les fondeurs, se dissimulent pour « accoucher ».Au contraire, la forge est un lieu public, convivial, au centre du village, où l’onaime venir bavarder en observant le forgeron dans ses œuvres. La fonte et la forgemétamorphosent la matière et, cependant, ce sont des opérations très différentes,techniquement et symboliquement. Si la fonte est une naissance, le contrairen’est pas vrai. Un fourneau est comme une parturiente, mais une parturienten’est pas comme un fourneau. La métaphore n’est pas réversible.

Un autre thème que l’on rencontre d’un bout à l’autre de l’Afrique centrale,là où se sont développées des royautés, est celui d’un roi forgeron qui est à l’ori-gine à la fois de cette dynastie et de la connaissance de la métallurgie. Dans lamême zone qui va de l’Angola à l’Ouganda, il n’est pas surprenant de trouver,dans les rituels d’intronisation, une étape où l’on entrechoque deux marteaux, ce

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130 Pierre de Maret

qui renvoie probablement autant au roi/forgeron qu’à la transformation d’unindividu en roi sacré, selon un processus assimilé au forgeage et destiné à l’endur-cir, à le rendre fort.

Pour conclure très provisoirement cette incursion dans l’univers symboliquebantu, la masse-enclume du forgeron, dont l’aspect phallique est évident, faitsouvent l’objet de traitements particuliers, d’autant que par sa forme elle évoque,comme chez les Luba, un autre objet également lié à la fécondité et également deforme phallique, la poupée manipulée par les petites filles ou, parfois, par lesfemmes stériles.

Ces masses-enclumes sont associées à la royauté et se rencontrent souventparmi les objets régaliens les plus sacrés, par exemple à la cour du mwami auRwanda et au Burundi. Ce qui est intéressant, c’est que dans mes fouilles dans ladépression de l’Upemba, au cœur du grand royaume luba, on en a trouvé égale-ment une dans la tombe d’un personnage manifestement important.

Pour revenir à ce vaste champ symbolique qui englobe la fertilité/l’infertilité,la chance/la malchance, le froid/le chaud, la vie/la mort, le sec/l’humide, le dur/le mou, l’ouvert/le fermé et le masculin/le féminin, l’analyse de la métallurgienous renvoie aussi aux rapports entre les sexes, dans tous les sens du terme.

Il serait assez réducteur et ethnocentrique de considérer les prohibitions quel’on constate comme une façon de séparer les sphères masculines et féminines.En fait, à différents moments, à différentes étapes, il peut y avoir coopération, ycompris pour remédier à des problèmes sexuels chez l’autre sexe (comme parexemple, au Rwanda, ceux de la femme frigide). Les pouvoirs masculins et fémi-nins sont complémentaires et sont nécessaires pour s’équilibrer, pour contrôler lachaleur, pour définir des limites, pour aider à les franchir.

Les processus de transformation sont au centre des relations entre les sexes etde la perpétuation de l’ordre social, naturel et symbolique. À travers leurs com-plémentarités techniques, physiologiques et symboliques, il nous rappelle,comme aux Bantu, l’interdépendance constante entre les hommes et les femmes.

C’est aussi une des bases du dialogue interculturel.

Conclusion

Au sein d’une Afrique, et particulièrement d’une Afrique centrale, déchirée partrop de conflits atroces et face aux manipulations de l’histoire et de l’identité aux-quelles on assiste, il est temps de montrer à ces peuples, aux hommes et auxfemmes qui les composent, que bien plus de choses les rassemblent qu’elles ne lesséparent, que leurs ressemblances l’emportent largement sur leurs différences.

L’analyse comparée des techniques, du vocabulaire, des rites et des mythesliés à la métallurgie l’illustre bien. Quand on sait le rôle crucial que jouaient lefer et sa métallurgie en matière économique, politique et symbolique dans les

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L’Afrique centrale : le « savoir-fer » 131

civilisations africaines, on comprend mieux l’intérêt manifesté par les chercheurset les décideurs africains.

L’ingéniosité, la créativité et l’excellence dont ont fait et dont font encorepreuve nombre d’artisans africains et la très haute antiquité de cette pyrotechno-logie sont aussi source de fierté légitime. À l’heure de la mondialisation, si l’onveut favoriser le dialogue interculturel et le pluralisme, il importe que s’établisseune certaine réciprocité culturelle entre les peuples. Rien n’est plus pernicieuxque l’absence d’échange, l’assujettissement de façon univoque à un modèledominant. C’est ça aussi le combat pour l’exception culturelle.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 133

Bilan de l’archéologie de l’âge du ferau Cameroun méridional1

Joseph-Marie Essomba

C’est en mars 1983 que, conformément aux recommandations de la réunion deGaroua, nous avons élaboré un programme de recherches archéologiques dans lecentre et le sud du Cameroun, principalement axé sur l’âge du fer. Il s’inscrivaitdans le cadre des projets de l’ancien Ministère de l’enseignement supérieur, del’informatique et de la recherche scientifique (MESIRES), du Centre de recher-ches et d’études anthropologiques de l’ex-Institut des sciences humaines et del’Université de Yaoundé. Il a été exécuté en partenariat avec l’ORSTOM pen-dant une période de trois ans à partir de 1989.

La problématique du programme et les objectifs

L’histoire du Cameroun précolonial, notamment dans la partie sud du pays, resteencore très mal connue. Les tentatives de reconstitution exigent un effort derecherche où l’archéologie de l’âge du fer devra contribuer à l’étude du peuple-ment et de l’évolution des sociétés. De plus, ce type d’archéologie est très impor-tant pour l’histoire ancienne d’une bonne partie de l’Afrique centrale forestière,au regard de la question du peuplement bantu, ce qui nous reporte à quatre mil-lénaires avant l’époque actuelle. On notera que dès l’origine des recherches surl’identité culturelle des bantuphones, le berceau probable de ces peuples a étésitué aux confins du Nigéria et du Cameroun, d’où ils auraient essaimé à traversl’Afrique centrale au cours de la période de l’âge du fer. Quelques travaux accom-plis en archéologie ont montré l’importance des voies de migration ou d’expan-

1. Ce texte est, avec l’accord de l’éditeur, une version remaniée d’un article publié en1999 dans Paléo-anthropologie en Afrique centrale. Un bilan de l’archéologie au Came-roun, de M. Delneuf, J.-M. Essomba et A. Froment (Paris, L’Harmattan).

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134 Joseph-Marie Essomba

sion qu’ils auraient suivies, voies naturelles que sont les savanes de la côteatlantique, les cours d’eau de la forêt équatoriale, l’interface forêt-savane septen-trionale et les savanes d’Afrique centrale, comme le suggèrent les analyses de VanNoten (1982).

Il est incontestable que le centre et le sud du Cameroun demeurent, en lamatière, l’une des zones de passage et de sédentarisation des premiers locuteursbantu, dont il s’agit de restituer l’histoire économique, sociale et des techniquespar l’archéologie, les traditions orales et l’étude des cultures matérielles. Cetterestitution passe par l’établissement d’une grille chronologique et par l’étude del’environnement dans lequel ont évolué ces peuples et leurs civilisations en Afri-que centrale. Le programme comporte donc :• l’identification et la cartographie des sites de l’âge du fer au Sud-Cameroun ;• la fouille des sites identifiés et l’étude scientifique du mobilier archéologique ;• l’établissement d’une grille chronologique pour l’histoire ancienne de la

région ;• l’étude de l’environnement, de son impact sur l’évolution des sociétés dans

la zone forestière, d’où l’importance de l’apport futur du programmeECOFIT (Écosystèmes forestiers intertropicaux) ;

• la restitution des aspects historiques de l’histoire des techniques (métallurgiedu fer et de la céramique ; leurs chaînes opératoires) et de l’histoireéconomique ;

• la mesure de l’ampleur des migrations bantu au Sud-Cameroun (de l’archéo-logie à la biologie des peuples).

Un deuxième volet, culturel celui-là, intéresse ce programme. Il s’agit de :• procéder à la collecte des documents d’intérêt historique et archéologique

pour le Musée national ;• donner à de jeunes chercheurs camerounais une formation en archéologie ;• procéder à une animation scientifique et culturelle par des séminaires,

conférences, colloques, publication et expositions.

Méthodologie

Sur le plan méthodologique, nous rattachons l’étude du fer en tant que procédétechnique, acteur économique et phénomène de société, aux différents contextesde l’étude du passé des sociétés du Sud-Cameroun. L’étude du fer et de l’âge dufer exige donc une approche interdisciplinaire. Elle fait appel aux sciences de laterre, aux sciences exactes et aux analyses de laboratoire en prenant pour maté-riau de base les données archéologiques et chronologiques.

Les sources orales constituent un instrument privilégié pour la bonnecompréhension de bien des questions dans ce domaine. Par les enquêtes, desapproches nouvelles sont ouvertes sur les procédés techniques ainsi que sur le

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Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 135

rôle économique et social du fer. Ce choix méthodologique est largement expli-qué dans l’ouvrage Civilisation du fer et sociétés en Afrique centrale (Essomba,1992b).

Le bilan et le résultat des recherches

L E B I L A N D E S T R A V A U X ( 1 9 8 3 - 1 9 8 8 )

Depuis 1983, nous avons mené des recherches dans les départements de la Lékié,du Nyong et Kellé, de la Sanaga maritime et du Mfoundi. Ces recherches nousont amenés à identifier et à fouiller les sites de Nkometou et de Pan-Pan. Un pre-mier bilan de ces travaux a été établi en 1988 (Essomba, 1988). Il a permis demettre en évidence l’importance de l’archéologie de l’âge du fer dans l’histoireancienne de la région (figure 6).

Trois zones, dans les sites étudiés, ont apporté des informations inédites etprécieuses. Il s’agit des sites de Nkometou et Pongsolo (Lékié) et de Pan-Pan(Nyong et Kellé). En parallèle, il faut mentionner le gisement d’Obobogo étudiépar de Maret (1992), celui d’Okolo, étudié par Atangana (1988) et celui deNdindan, étudié par Mbida (1992). Ces sites ont permis d’estimer le début del’âge du fer dans la région vers le IVe siècle avant l’ère chrétienne.

Le site de Nkometou

Nkometou, à 20 kilomètres au nord de Yaoundé, où les fouilles ont débuté en1983, s’est révélé important par la quantité de structures en fosses identifiées etpar les éléments prélevés dans quelques-unes d’entre elles. D’une manière géné-rale, les informations apportées par ce site témoignent de deux stades de civilisa-tion. Le premier, néolithique, est fondé sur une économie alimentaire établie àpartir des noix de palme et de l’utilisation des meules, des broyeurs et des usten-siles en poterie. Le second est celui de l’âge du fer dont les témoins métallurgi-ques (scories) sont datés du Ve siècle avant l’ère chrétienne (Essomba, 1992a).

Les sites de Pongsolo

Situés dans la Lékié, ces gisements ont apporté des informations intéressantes surla question de la production du fer dans la région. Outre les informationsrecueillies oralement sur la production du fer et la technique traditionnelle deréduction, les datations au radiocarbone effectuées sur les sites de Pongsolo I etPongsolo II, ont permis de situer ces derniers entre le XVe et le XVIe siècle de l’èrechrétienne (Essomba, 1988 et 1992a et b). Cette chronologie est corroborée parcertaines données de la tradition orale relatives à l’occupation de la région par lesanciens Beti qui peuvent ainsi être considérés comme les occupants de ces ateliers.

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136 Joseph-Marie Essomba

Les sites de Pan-Pan

Ces sites apportent des informations intéressantes sur le peuplement récent de larégion et sur l’étude des techniques de réduction du fer. Ils ont été datés entre leXIVe et le XVe siècle de notre ère. Leurs fours à réduction sont imposants etoffrent une architecture particulière faite de petites briques de terre cuite. Ils sontexceptionnels en Afrique centrale forestière. La datation, ici, permet les situer àla période d’occupation de la région par les anciens Bassa (Essomba, 1985, 1988,1989 et 1992b).

Sanaga

Nyong

Ntem

Nkolebengue

Pan-Nsas

Pan-Manguenda

Ngongtem

Meboma

LekukuaPongsolo

NkometouOkolo

NdindanOliga

Ngock

Neboya

Nguilmulen

NitukuMassangui

++ +

+

+

+

EbolowaKribi

Sangmelima

AbongMbang

Eseka

Douala

Bafia

Edéa

GABONGUINÉE ÉQUATORIALE CONGO

OCÉ

AN

ATL

AN

TIQ

UE

YaoundéObobogo

+

Site à caractère néolitique FrontièreLimite de la région étudiée03009001500 m

Site de réduction du fer

Ancienne forge

fouillénon fouillé

0 100 km

TCHAD

C.A.

NIGERIA

GABON CONGO

(G.É.)

(G.É.)

Yaoundé

Figure 6. Localisation des principaux sites étudiés par l’auteur dans la région

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Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 137

Ces recherches ont nécessité de nouvelles orientations, notamment l’ouver-ture des prospections vers d’autres zones et l’intensification de l’archéométrie.

L E S N O U V E L L E S D O N N É E S ( 1 9 8 9 - 1 9 9 1 )

De 1989 à 1991, nos recherches sur l’archéologie de l’âge du fer se sont poursuiviesdans le cadre de la problématique et des objectifs définis plus haut, avec l’interven-tion de l’ORSTOM en partenariat. Au cours de cette période, des travaux ont étéréalisés à Yaoundé sur le site d’Oliga et sur celui de Saka à Awae, et dans l’arrondis-sement de Zoétélé.

Le site d’Oliga

Situé dans la zone nord de Yaoundé, Oliga a été fouillé entre 1989 et 1990. C’estla toute première structure de four à réduction enfouie examinée au Sud-Came-roun. Ce gisement a apporté des informations inattendues sur la question del’âge du fer dans cette région et en Afrique centrale forestière (Essomba, 1989 et1992b). Il a été daté du premier millénaire avant l’ère chrétienne.

Plusieurs échantillons de charbon de bois ont été prélevés à différentsniveaux stratigraphiques de la structure. Douze de ces échantillons ont faitl’objet de datations au radiocarbone dont quatre par le Laboratoire de radiocar-bone de l’Université Claude-Bernard de Lyon-I (par J. Evin) et huit par le Labo-ratoire Beta Analytic de Miami, en Floride (États-Unis d’Amérique). Lesrésultats de ces analyses chronologiques figurent dans les tableaux 4 et 5.

Tableau 4. Datations radiocarbones du site d’Oliga (Laboratoire de Radiocarbone. BetaAnalytic, Miami, Floride)

N°échantillon

N°laboratoire Dates (B.P.) Dates calibrées Carré et niveau

archéologique (en cm)

1 Beta 31 411 2710 ± 130 B.P. 1256-500av. J.-C.

A2 (–90) NA7

2 Beta 31 412 1860 ± 70 B.P. 0-334 av. J.-C. A1-B1 (–50) NA1-23 Beta 31 413 1960 ± 80 B.P. ± 70 av. J.-C B2 (–60) NA3

70 apr. J.-C.4 Beta 31 414 2820 ± 70 B.P. 1300-800

av. J.-C.A2 (–50) NA2

5 Beta 31 410 2810 ± 100 B.P. 1300-800av. J.-C.

A2 (–90) NA7 (–100)

6 Beta 31 534 2110 ± 60 B.P. 367 av. J.-C. A2 (–90) NA710 apr. J.-C.

7 Beta 32 228 2150 ± 80 B.P. 400 av. J.-C. A2 (–100) NA722 apr. J.-C.

8 Beta 32 264 2200 ± 60 B.P. 400 av. J.-C. A2 (–110) NA10 (–120)90 apr. J.-C.

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138 Joseph-Marie Essomba

Tableau 5. Datations radiocarbones du site d’Oliga (Laboratoire de Radiocarbone,Université Claude Bernard, Lyon I)

Quelles réflexions entraînent cet ensemble de dates ? L’analyse critique de cesdonnées repose sur la position stratigraphique des échantillons dans les niveauxarchéologiques et sur leur profondeur dans le temps, par rapport à ce qui estconnu jusqu’ici dans la région.

D’une manière générale, on doit noter que les dates obtenues par les deuxlaboratoires situent la structure entre la fin du deuxième millénaire et le début dupremier avant l’ère chrétienne. Par ailleurs, du point de vue stratigraphique, ilfaut noter que les dates sont relativement concordantes par rapport au niveau deprélèvement des échantillons.

Ainsi, le fourneau remonte au premier millénaire selon trois des dates obte-nues au laboratoire de Lyon (Ly-4976, Ly-4977 et Ly-4978 (tableau 5). Cesdates peuvent être considérées comme étant en concordance avec cinq de cellesdu Laboratoire Beta Analytic : Beta 32264, Beta 31410, Beta 32228, Beta 31411et Beta 31534 (tableau 4). La date Ly-4979 : 1945 ± 250 BP, soit 831 av. J.-C.-567 apr. J.-C., au niveau archéologique 4, semble entachée d’une importantemarge d’erreur et doit être prise avec une grande réserve, sans toutefois la rejetercomplètement. En effet, il y a lieu de considérer qu’au niveau 6, qui n’est pas trèsloin du niveau 4, on a obtenu la date Beta 31411 : 2 710 ± 130 BP, soit 1 256-500 av. J.-C., proche de celle du niveau 7 (Beta 31410 : 2820 ± 100 BP).

L’examen de ces dates permet de retenir que, sur les douze obtenues, troisplacent le fourneau à la fin du deuxième millénaire et au début du premier mil-lénaire avant J.-C. Elles peuvent paraître pour le moment excessives et être prisesavec circonspection. Sept dates le situent au premier millénaire avant l’ère chré-tienne et une seule remonte au début du premier millénaire.

Toutefois, et comme nous l’avons déjà souligné, si les dates des XIVe, XIIIe etXIIe siècles avant notre ère peuvent aujourd’hui paraître trop anciennes pour lesdébuts de la métallurgie du fer en Afrique centrale forestière, il ne saurait en être demême de celles comprises entre le IXe et le VIIIe siècle avant l’ère chrétienne. Ces der-nières rentrent parfaitement dans le contexte actuel de la chronologie de l’âge du feren Afrique de l’Est, en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale (Essomba, 1992b).

N°échantillon

N°laboratoire Dates (B.P.) Dates calibrées Carré et niveau

de fouille (en cm)

9 Ly-4976 2150 ± 60 B.P. 365-68av. J.-C.

A2 NA11 (–130)

10 Ly-4977 2185 ± 110 B.P. 539 av. J.-C. B2 NA10 (–120)26 apr. J.-C.

11 Ly-4978 2380 ± 110 B.P. ± 773-212 B2 NA11 (–130)12 Ly-4979 1945 ± 250 B.P. 831 av. J.-C. B2 NA4 (–70)

567 apr. J.-C.

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Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 139

Ces dates, qui vont de la fin du deuxième millénaire avant J.-C. au début dupremier millénaire de l’ère chrétienne, posent un problème : celui de la durée del’utilisation du fourneau. Malheureusement, il manque des éléments concretspermettant de mieux déterminer cette durée. Tout ce qu’on peut dire, c’est que cesdates font reculer les débuts de l’âge du fer dans la région au cours de cettepériode. Ceci est d’autant plus intéressant qu’elles proviennent de deux laboratoiresdifférents et qu’elles ont été prises dans une véritable structure de réduction.

Ce qui apparaît encore plus important, en ce qui concerne ces dates commele site en général, c’est que celles-là font du fourneau d’Oliga la plus vieille struc-ture de réduction du fer connue aujourd’hui en Afrique centrale forestière. Il estintéressant de noter qu’au Gabon, les dates aujourd’hui connues situent entre450 et 600 av. J.-C. d’anciens sites de réduction du fer (Clist, 1989). En effet, lesrecherches archéologiques entreprises dans ce pays récemment ont permis demettre en évidence de nombreux témoins de la paléométallurgie du fer avec desdates comparables à celles enregistrées au Sud-Cameroun, à Obobogo, Ndindan,Nkometou et Oliga (Clist et al., 1986).

De nouvelles recherches sont envisagées sur le site d’Oliga pour élargir nosconnaissances, notamment sur l’occupation successive du site et sur les change-ments possibles de l’environnement. Ce site est donc capital dans l’étude de l’âgedu fer aujourd’hui en Afrique centrale.

Le site de Saka

En mars 1990, une prospection dans l’arrondissement d’Awae (département dela Mefou) a permis l’identification du site de Saka chez les Mvele. Un sondage amis en évidence les éléments caractéristiques d’un atelier de réduction du fer :des scories, des fragments de tuyères et des tessons de poterie. Les premières data-tions au radiocarbone de cet atelier le situent aux XVIe et XVIIe siècles ap. J.-C.Cette période correspond à celle de la mise en place de la population beti dans larégion. Les études sur ce site doivent se poursuivre.

L A R E C O N N A I S S A N C E A R C H É O L O G I Q U ED A N S L ’ A R R O N D I S S E M E N T D E Z O É T É L É

De juillet à août 1990, nous avons effectué une mission de reconnaissancearchéologique dans l’arrondissement de Zoétélé (département du Dja et Lobo),situé dans la zone forestière du Sud-Cameroun à une centaine de kilomètres légè-rement au sud-est de Yaoundé. Y prenaient part R. Asombang, archéologue (Ins-titut des sciences humaines), et J. P. Ossah Mvondo (École normale supérieure deYaoundé). L’objectif était d’identifier et de localiser les gisements archéologiquespossibles dans l’arrondissement de Zoétélé et, notamment, ceux de l’âge du fer.

Malgré les efforts consentis dans le cadre de la recherche archéologique auCameroun méridional, la province du Sud et, en particulier, le département du

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140 Joseph-Marie Essomba

Dja et Lobo sont restés pratiquement inconnus à ce point de vue. Les donnéesarchéologiques actuelles demeurent insuffisantes. Cette situation justifie la pros-pection menée à Zoétélé, étape préliminaire du long travail de recherche devantêtre mené dans l’ensemble du département, d’une part, et dans la province duSud, d’autre part. Cette mission de reconnaissance nous a conduits à des villagestels que Nkooveng, Nkolmebong, Fibot, Nkumadzap, Otetek Etoto, Zoétélé-Brousse et Zoétélé-Village (figure 7).

La méthode de recherche a été fondée sur l’étude de la carte de la région au1/200 000 sur laquelle nous avons identifié certains villages à partir d’élémentstoponymiques. Des enquêtes ont été ensuite menées auprès de certaines personnesâgées et des autorités traditionnelles. Elles comportaient un questionnaire sur lesanciens villages et les vieux ateliers de production du fer. En outre, nous avonsprocédé à la prospection systématique des champs et des habitations actuellesafin de repérer et de localiser les vestiges d’activités anciennes. Deux types degisements ont été identifiés : les sites préhistoriques et les sites de l’âge du fer.

L E S S I T E S P R É H I S T O R I Q U E S

L’abri-sous-roche d’Akok-Oveng (NK1)

Ce site se trouve en fait à la limite de l’arrondissement de Zoétélé et du départe-ment du Nyong et Mfoumou. Il demeure toutefois important pour notre analyseparce qu’il est frontalier de notre zone d’étude. Il est localisé à 1 kilomètre de laroute d’Edjom et à 12 kilomètres du village de Fibot, soit à 3° 28’ 02” de latitudenord et à 11° 57’ 06” de longitude est. La façade de l’abri mesure 140 mètres delong et sa profondeur à partir du centre 21 mètres environ. La hauteur, mesuréeà partir de l’axe central, approche 50 mètres ; le sol, incliné de gauche à droite,forme une pente de près de 4 mètres de dénivelée. Le site a été aménagé pour desbesoins cultuels. On y a placé une statue de la Vierge Marie, un autel et desbancs. D’après nos informateurs, la mission catholique y organise souvent descultes.

Aucun vestige n’a été récolté en surface, peut-être à cause de l’aménagementdu site qui les aura fait disparaître. Étant donné ses fonctions religieuses, nousavons jugé inopportun d’y faire des sondages. D’autres abris-sous-roche ont étésignalés dans la région. Ils feront l’objet de prospections et d’études lors de mis-sions futures.

Nkolmebong (NKM1)

Ce gisement est situé à 3° 26’ 03” de latitude nord et à 11° 05’’ au nord-ouest deFibot. Il est à 3,4 km de Fibot-centre, sur la route d’Eboman, à Yemfok, dans levillage de Nkolmebong. Son altitude est de 690 mètres. Notre attention a étéattirée par la légende racontant qu’on y trouvait des traces de genoux sur le

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Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 141

Zoétélé Brousse

Ololok

Elolo

Ngomedjap

Akokoven

Meret

Ngolbang

Obout

Fibot

Nkolmebong

KumuNkumodjap

Zoétélé

Nyong

Soo

Route goudronnée

Route secondaire

Piste praticable pour véhicules tout terrain

Site préhistorique

Site de l'âge du fer

0 10 km

Figure 7. Prospection archéologique dans l’arrondissement de Zoétélé. Localisation desprincipaux sites identifiés par l’auteur (juillet-août 1990)

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142 Joseph-Marie Essomba

rocher. Nous y avons constaté l’existence de concavités circulaires et ovales, res-pectivement au nombre de 14 et 6. Celles qui sont rondes ont en moyenne desdiamètres compris entre 10 et 15 centimètres maximum pour une profondeurvariant entre 3 et 12 centimètres. La longueur des concavités ovales varie de 32 à90 centimètres et leur largeur de 12 à 25 centimètres. La disposition générale deséléments est circulaire. Toutefois, l’ensemble relève bien d’une action anthropi-que mais, dans l’état actuel des recherches, nous ne sommes pas en mesure d’endonner une interprétation valable. Celle-ci reste une voie de recherche ouverte(figure 7, site de Nkolmebong).

Les trois abris-sous-roche d’Akok-Oveng

À la différence de l’abri-sous-roche d’Akok-Oveng (NK1), ce site est situé, lui,au nord-est de Nkolmebong. Les coordonnées ne sont pas indiquées à causedes difficultés particulières d’orientation rencontrées dans la brousse pendant laprospection. De la route principale à l’abri, on a compté 50 minutes de marche.Cet abri tire son nom de l’arbre Oveng situé devant son ouverture. Sa structurese compose de trois cavités formant un demi-polygone (figure 7, site d’Akok-Oveng). La première cavité, sur la gauche, est la moins profonde et ne mesurepas plus de 2,62 m au plus profond, pour 9,5 m de long. Le sol est plat et colo-nisé par la végétation. La deuxième cavité, au centre, laisse présager des dépôtsanthropiques. Le sol d’occupation est celui de la zone d’érosion de la cavité supé-rieure. Les dépôts ont une épaisseur de 15 centimètres. Un tesson non décoré aété ramassé en surface, à côté d’une rigole. Il présente des traces d’usure et undégraissant de quartz. Deux autres tessons, également non décorés, ont été récol-tés à une profondeur de 10 centimètres environ du niveau du sol d’occupation.Au point le plus profond, cette deuxième cavité mesure 6,20 m. La pente estinclinée de façon uniforme de l’avant vers l’arrière, la hauteur est de 8 mètres etl’ouverture mesure 19,7 m de largeur.

La troisième cavité, à droite, possède une ouverture de 13,4 m de longueuret mesure, au point le plus profond, 7,45 m de long. Le sol est incliné de la droitevers la gauche et couvert de rochers ; il n’offre aucune possibilité de fouille. Cesrochers semblent provenir du plafond de la grotte. Il est à noter que cet abri-sous-roche est continuellement utilisé par la population actuelle.

Tous ces abris suscitent des recherches futures. Aucun d’entre eux n’ayant étédaté, il est encore difficile de situer leur occupation à l’âge du fer.

L E S S I T E S D E L ’ Â G E D U F E R

Les sites de Zoétélé

On distingue Zoétélé-Village et Zoétélé-Brousse. Des enquêtes ont été menéessur l’origine de Zoétélé auprès de Thomas Ngane Oyono (né vers 1916) et deCélestin Oyono (né vers 1933). Il en ressort que le nom de Zoétélé avait été

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Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 143

donné à Lucien Oyono Eyamo (né vers 1888 et mort vers 1933), du groupe Fong,par ses parents à cause de ses nombreuses richesses, de ses capacités et de sesprouesses guerrières ainsi que de ses réalisations matérielles. Tous ses exploits ontconduit à ce qu’on le compare à un éléphant. Ses parents avaient trouvé en lui leuréléphant. C’est de ce nom que vient celui du site Zoétélé, ou « éléphant debout ».

Avant l’arrivée des Allemands au Cameroun, les parents d’Oyono Eyamo, ditZoétélé, ont d’abord habité la localité aujourd’hui connue sous le nom de Zoétélé-Brousse. Ce site est à 10° NE de Zoétélé-Ville et à 1 500 mètres du village Eteto. Ladistance entre Eteto et Zoétélé-Ville est de 11,8 km. C’est de Zoétélé-Brousse qu’estparti Oyono Eyamo pour fonder Zoétélé-Village. Suivant nos informateurs, le ferétait produit dans ces localités aux temps anciens. Une prospection nous a permisde repérer et de localiser des sites archéologiques dans ces deux endroits.

Zoétélé-Brousse (ZB1)

Le site est identifié à partir de scories ramassées en surface à 500 mètres du lieuindiqué par l’informateur. Cette découverte nous a amenés à faire des prospec-tions dans les environs et à trouver le site de ZB1-locus A (point de fouille A), ouZB1-LA.

Zoétélé-Brousse (locus A) ou ZB1-L.A.

Ce site, à l’ouest de ZB1, est constitué par une butte ronde de 52 centimètres dehauteur et de 4,3 m de diamètre. Il se situe à 12° NO de Zoétélé-Ville, dans lacacaoyère d’Ebene Mengue. Son entrée se trouve à Otetek sur la route de Meba,dans le village du chef Jacques Oyono. Il est distant de 1 kilomètre de la route.

Un sondage de 1 mètre carré a été effectué sur ce site. L’apparition en surfacede terre brûlée et de charbon de bois a orienté le sondage. Cette terre brûlée res-semblait à des fragments de briques. Avant de déterminer la nature de la struc-ture, qui devait être un atelier de production du fer, le sondage a été poursuivisur 90 centimètres de profondeur. Au cours de la fouille, l’on a observé de petitesperturbations dans la structure, causées par des trous de rats palmistes dans lesparties supérieure et inférieure, et par des nids de fourmis. On a régulièrementtrouvé de gros morceaux de charbon de bois tout au long de la fouille, plus par-ticulièrement concentrés vers l’ouest. Quatre échantillons ont donné des datescomprises entre le XVIe et le XVIIe siècle apr. J.-C. Un fragment de tuyère d’unelongueur de 5 centimètres a également été prélevé. Ceci a confirmé l’hypothèsed’un atelier de réduction du fer, bien qu’il n’y ait pas été trouvé pour l’instant dedépôt de scories. Les recherches doivent s’y poursuivre.

Zoétélé-Village

Ce site se trouve à 1 kilomètre de la sous-préfecture Zoétélé-Ville, sur le côtédroit de la route qui mène à Meba, dans la cour de Joseph Aba Bilunga, décédé

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144 Joseph-Marie Essomba

en 1958 et frère d’Oyono Eyamo de Zoétélé-Ville. On a observé, en surface uni-quement, des scories dispersées sur une étendue de 6 mètres carrés. Elles sont depetite taille. La proximité de la route et des habitations peut indiquer que ce sitea subi des transformations pour devenir un atelier de forge. Aucun sondage n’y aété effectué.

Le site d’Otetek (OT1)

OT1 se situe à 3° 14’ 06” de latitude nord et 11° 54’ 05” de longitude est, à3 kilomètres au sud-est de Zoétélé-Ville, sur la route de Nkomadzap. Le sitemétallurgique est précisément à 52° au sud-est de Zoétélé-Ville, à une centainede mètres du carrefour Minkoumou-Nkoumadzap, dans la cour de la Missionévangélique chrétienne.

Nous avons été conduits à Otetek à la suite d’une étude toponymique. Aucours de notre enquête, notre informateur, le pasteur Josué Mezang Mezang(68 ans), nous a indiqué que la première appellation de cette localité était Vele-mekon et les premiers habitants étaient les « Yetchang », qui ont séjourné làavant l’arrivée des Fong. Ce sont eux qui ont donné à cette localité le nomd’Auxerre, qui signifie doucement en langue béti.

S’agissant du fer, nos informateurs nous ont fait savoir que leurs grands-parents en produisaient. Toutefois, ils n’étaient pas en mesure d’indiquer l’empla-cement des anciens ateliers. Pourtant, la prospection dans le village nous a per-mis d’identifier un site de production dans la cour de la Mission chrétienne. Desscories apparaissent sur près de 100 mètres carrés, puis du charbon de bois. La dis-persion de fragments de poterie et de scories de petite taille indiquerait qu’il s’agitd’un atelier de forge. La fouille de ce site a été réservée pour une autre mission.

Koumou (KM1)

Le site de Koumou se trouve dans le village de Nkoumadzap, à 10 kilomètres dela sous-préfecture de Zoétélé, près de la rivière Lobo et à 475 mètres des chutesde Koumou. Il est dans une plantation, aujourd’hui exploitée par Thomas AkoaJean, paysan âgé de 27 ans qui nous a servi de guide. Selon nos informateurs, celieu a été habité anciennement par les ancêtres de la population de Nkoumadzap.Le site a souffert des travaux de construction de la route effectués avec un bull-dozer. Le sondage effectué, sur 1 mètre carré de surface jusqu’à une profondeurde 1 mètre, a permis de prélever des fragments de briques, de scories, des mor-ceaux de tuyères et du charbon de bois. Les datations au radiocarbone en sontattendues.

D’une manière générale, les résultats de cette mission de reconnaissancearchéologique dans l’arrondissement de Zoétélé se sont avérés intéressants. Huitsites ont été identifiés dont trois préhistoriques et cinq de l’âge du fer. La missiona été centrée particulièrement sur les zones nord et sud-est de l’arrondissement.Cette orientation ressort de la pratique de l’ethno-archéologie qui a conduit à

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Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 145

l’identification des anciens sites dans ces secteurs. Les gisements se retrouvent enfait en dehors des lieux d’habitation actuels. On comprend, dès lors, les diffi-cultés d’une prospection à grande échelle dans cette zone forestière et la justifi-cation de l’approche ethno-archéologique dans ce milieu.

Par ailleurs, la mission a permis de mettre une fois de plus en évidence leriche patrimoine archéologique du Cameroun méridional en sites tant préhisto-riques que de l’âge du fer. L’exploitation des sites répertoriés devient doncurgente. Leur étude devrait sans aucun doute apporter des données permettantde mieux se documenter sur l’histoire ancienne du Cameroun. Cette urgenceréside aussi dans l’intensification des enquêtes orales dans la région qui se révè-lent d’une aide précieuse pour la cartographie de ces gisements, tant que lesinformateurs demeurent en vie.

Conclusion et perspectives

Le bilan des dernières recherches effectuées par le programme consacré à l’âge dufer et à la métallurgie du fer dans le centre et le sud du Cameroun se révèle inté-ressant de par la dimension historique des informations apportées sur les planschronologique et technique ; ces recherches ont été d’un apport particulier aucolloque de 1986 ; elles ont fait par ailleurs l’objet de conférences publiques àl’Université de Yaoundé en mars 1990, à l’Université de Bangui en avril 1990, auCentre culturel français de Yaoundé et à Akwa Palace de Douala en avril 1991(Essomba, 1992b).

On peut dire aujourd’hui que, dans le centre et le sud du Cameroun, lesdébuts de l’âge du fer remonteraient au premier millénaire avant notre ère. Cettepériode est marquée par la sédentarisation, la production alimentaire, le regrou-pement des habitants dans des villages et le peuplement de la région par les ban-tuphones. Les dernières recherches mettent en évidence la concordance entre lesdatations des ateliers de production du fer et les données de la tradition orale surl’occupation de la région par les anciennes communautés beti entre le XVIe et leXVIIe siècle (sites de Nkometou, de Saaka et de Zoétélé-Brousse). Elles permet-tent aujourd’hui d’établir sans conteste que le sud du Cameroun se situe au car-refour des chemins des migrations des anciens bantuphones dès le premiermillénaire avant notre ère. Un fait historique très important dans l’histoire dupeuplement ancien de l’Afrique centrale se fait ainsi jour.

Si le bilan de ces recherches semble globalement positif, beaucoup resteencore à faire. Il s’agit de l’extension des travaux à travers tous les départementsdu Cameroun méridional. Par ailleurs, des questions relatives à l’environnementn’ont pas encore été abordées : elles devraient intéresser l’économie ancienne,l’occupation de l’espace, la couverture végétale et son évolution. Elles devraientêtre abordées à l’aide de la palynologie, de l’anthropologie et de la paléoclimato-logie. Elles doivent permettre d’aboutir à l’établissement d’une grille chronologique

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146 Joseph-Marie Essomba

solide sur l’âge du fer au Sud-Cameroun, en rapport avec les recherches effec-tuées dans le Woleu-Ntem au Gabon et celles à entreprendre dans l’Adamaoua etsur la côte atlantique. C’est le vaste projet d’étude de l’évolution de l’homme etde l’environnement dans l’aire bantuphone de l’Afrique centrale qui devrait enanalyser les informations essentielles. Une fois de plus, la palynologie, l’anthro-pologie et la paléoclimatologie devraient participer à ces recherches. L’histoireancienne de l’Afrique centrale sera ainsi mieux comprise pour ce qui concerne lapériode de l’âge du fer.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 147

Les routes du fer en Afrique :une contribution du Nigéria

David A. Aremu

Les premiers indices de la métallurgie du fer au Nigéria

L ’ É T U D E H I S T O R I Q U E

Actuellement, l’un des indices les plus anciens de métallurgie du fer au Nigéria,provient de Taruga et date d’environ 2500 BP1. Ces datations concernent devéritables fours de réduction du fer qui ont été dégagés lors de fouilles. Il enexiste qui pourraient être antérieurs, mais l’association de charbon de bois datéavec des objets archéologiques n’est pas certaine, car ceux-ci proviennent dedépôts alluviaux : les matériaux ont été entraînés dans un cours d’eau par lessi-vage et sont restés dans son ancien lit sans que l’on ait la certitude qu’ils datenttous de la même époque.

Si, toutefois, les dates associées à cet ensemble de figurines (de la culture nok)servent de point de repère, alors, la métallurgie du fer pourrait remonter à3000 BP, voire à 3500 BP au Nigéria. Quoi qu’il en soit, même si nous nouslimitons à la date la plus récente, soit 500 av. J.-C., elle est encore trop proche dela datation du fer à Méroé et à Carthage pour que l’idée de la propagation dela métallurgie du fer à partir de l’une ou l’autre de ces deux régions soitvraisemblable.

Si l’expansion du fer dans l’État du Plateau ou à Nok a reçu une impulsionextérieure, celle-ci, probablement partielle, aurait tout aussi bien pu venir deMauritanie, à l’ouest, et indirectement seulement, voire pas du tout, du nord-ouest ; cette impulsion aurait en outre pu être liée au développement antérieurde l’extraction minière de cuivre en Mauritanie. Ce qui est significatif à cetégard, c’est le fait que :

1. Années BP : before present. Le zéro correspond par convention à l’année 1950(NDT).

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148 David A. Aremu

• les mines et l’outillage de la région d’Akjout, en Mauritanie, remontent à3500 BP ;

• la tradition métallurgique dans cette région s’est développée de façon plus oumoins continue, augmentant lorsque les circonstances étaient favorables, cequi, une fois encore, remonte à 400 ou 500 av. J.-C., soit 2400 ou 2500 BP(Andah, communication personnelle).

Dans la région de Kastina Ala, Andah a exploré un certain nombre d’abris-sous-roche le long d’un escarpement rocheux, ainsi qu’un espace habité ouvert sur unepente adjacente. L’un des abris-sous-roche, Tse Dura, a fait l’objet de rechercheset les indices recueillis à ce jour suggèrent deux principales phases d’occupation.La première correspond à un groupe qui utilisait des outils en pierre abrasée etpolie et de la poterie, mais ne disposait pas de fer. Lors de la seconde phase enrevanche, les habitants de l’abri utilisaient le fer et le travaillaient peut-être. Pourcette époque, huit dates obtenues par datation au carbone 14 semblent indiquerque la métallurgie du fer avait atteint la région dès le IVe siècle av. J.-C. (Calvo-coressi et David, 1979).

Le fer pourrait avoir fait son apparition à Daima (figure 8) aux environs duVe ou du VIe siècle apr. J.-C. (c’est-à-dire un millier d’années après Nok). Plusrécemment, des sites où se pratiquait la métallurgie du fer ont été datés dans larégion de Dalla Hill, à Kano (635 ± 95 ans apr. J.-C.,) et à Samaru-Ouest, site 1,Zaria (685 ± 80 ans apr. J.-C.) (Posnansky et al., 1979 ; Sutton, 1976 ; Calvo-corressi et David, 1979). Il existe d’autres sites similaires, datant de la même épo-que, c’est-à-dire entre le IVe et le XIe siècle apr. J.-C., sur une distance de1 kilomètre le long de la rivière Kubanni. Ces dates indiquent clairement que lamétallurgie du fer a été intensément pratiquée dans cette région au cours de laseconde moitié du premier millénaire de notre ère.

Thurstan Shaw (1976) a exploré un certain nombre de tertres situés entreBida et Zungeru. On connaît depuis de nombreuses années l’existence de jarresfunéraires mises au jour par l’érosion. Des fouilles de contrôle réalisées dansdiverses parties du tertre Rafiu Ndoko ont révélé une série de niveaux d’occupa-tion datant de l’âge du fer. Des échantillons de morceaux de charbon de boiscomposites provenant de trois emplacements situés au centre du tertre indiquentune occupation allant du IIIe au VIIe siècle apr. J.-C. Les échantillons prélevés parsondage aux abords du site fournissent des dates plutôt tardives, aux environs dela période allant du VIIIe au Xe siècle apr. J.-C. À Uffe Ijumu, où Ade Obayemi aeffectué des fouilles sur le site d’Ado, la réduction du fer y est datée du IXe auXIVe siècle apr. J.-C. (Aremu, 1990).

Anozie (1979) a effectué des fouilles à Umundu près de Nsukka et à Umu-kete Aguleri, dans la vallée de l’Anambra. Trois datations faites à Umunduconcernent une période beaucoup plus tardive, les XVIIIe et XIXe siècles. Dansla localité d’Afikpo, Chikwendu a fouillé le site d’une habitation abandonnéeà Ugwuagu (site 2). Les découvertes archéologiques qui y ont été faites, àsavoir de grandes quantités de poteries ainsi que du fer, des ossements d’ani-

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Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 149

maux et des sépultures humaines, datent d’une époque tout à fait différente etsont d’une tout autre nature que les découvertes réalisées sur le site 1d’Ugwuagu. Trois d’entre elles, provenant de la tranchée A, datent des XVe etXVIe siècles apr. J.-C. et deux, provenant de la tranchée B, des XIIIe et IXe siècles(Calvocoressi et David, 1979).

300 km0

Jos

Yankari

Sukur

Daima

OturkpoIbila-Alukpo

Umundu

OpiIgbo-Ukwu

Kano

Zaria

Illela

Bénin Ikom

Afikpo

Ilorin

BidaAbuja

Taruga

Akata

Uffe-Ljumu

Zungeru

Yelwa

YauriIdofin

OkemesiIsunehinrin

Ife

Oyo

AgegeOffa

Ijebu-Ode

N I G E R

NIN

N I G E R I A

C A M E R O U N

G o l f ed e G u i n é e

LacTchad

Figure 8. Principaux sites de réduction du fer et leur localisation dans les États duNigéria

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150 David A. Aremu

Il existe d’autres sites où l’on trouve en abondance des indices de productiondu fer, mais il n’a été possible d’y procéder ni à des fouilles ni à des datations.C’est le cas des sites d’Ampara, de Delimiri et de Shaushau qui se trouvent dansle parc national de Yankari et possèdent plus de 60 fourneaux, bases de four ettas de scories de fer (photos 74 à 83). Le complexe métallurgique d’Igede(figure 8), situé à Ibila-Alukpo, collectivité locale d’Oju, dans l’État de Benue,couvre une vaste région d’environ 2 kilomètres carrés à l’est du siège du gouver-nement local, sur la route d’Ibila à Ilache. Le site compte plus de 30 fours à cuvedont 13 en bon état de conservation, tandis que les autres se sont effondrésjusqu’à la base.

Il existe 5 fourneaux et tas de scories à Ijaye, près de Moniya, dans l’Étatd’Oyo. Le département d’archéologie et d’anthropologie de l’Université d’Iba-dan y effectue ses études sur le terrain. Tous ces sites, et d’autres, nécessitent quedes études approfondies y soient menées avant de pouvoir arriver à une conclu-sion valable sur les débuts de la métallurgie du fer au Nigéria par rapport aureste de l’Afrique.

L E S S I T E S D E R É D U C T I O N D U F E R A U N I G É R I A

Le rapport ci-après se fonde sur le travail effectué sur le terrain par l’auteur etsur ses comptes rendus écrits relatifs aux sites de réduction nigérians (tableau 6et figure 8). Des indices de production du fer existent dans la plupart des Étatsdu Nigéria, mais leur concentration est plus forte dans certains d’entre eux. Ungrand nombre de ces sites, qui faisaient partie du patrimoine culturel, ont étédétruits lors de la construction de routes, de l’édification de bâtiments, d’acti-vités minières ou agricoles et par des chasseurs de trésors. Il est nécessaire deprocéder à des études holistiques de tous les sites identifiés pour avoir unemeilleure idée des rapports entre la route du fer au Nigéria et le reste de l’Afri-que. Les scories de fer, les tuyères, les bases et les parois de four ainsi que desobjets en fer sont des indices courants de l’existence de sites de réduction là oùils ont été découverts. La langue parlée par les habitants, leurs noms, leurstitres honorifiques, le nom de leurs villages et de leurs villes, leurs chansons etleurs proverbes révèlent qu’ils pratiquaient la métallurgie dans le passé. Lessites répertoriés ci-après ne sont pas les seuls à exister au Nigéria : ce sont ceuxconnus de l’auteur à ce jour2.

2. Nous prions nos lecteurs de bien vouloir contacter l’auteur, ou n’importe queldépartement d’archéologie, ainsi que la Commission nationale pour les musées etmonuments du Nigéria, s’ils ont connaissance de sites similaires qui ne sont pasencore recensés dans la liste en question. Il ressort de ce qui précède que de nom-breux sites ont été détruits. Il sera nécessaire d’appliquer les lois relatives à la présen-tation des sites appartenant au patrimoine culturel du Nigéria et de procéder à desfouilles sur des sites qui n’en ont pas encore fait l’objet, ce qui exigera des crédits dela part des instances gouvernementales compétentes et de l’UNESCO.

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Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 151

Tableau 6. Sites de réduction du fer au Nigéria

États (fig. 8) Sites Observations

AbiaAdamawa Sukur Grands tas de scories, débris de tuyères et

des parois de foursAnambra Akwa

Igbo Ukwu Xe siècle apr. J.-C.Umukete Aguleri

Akwa IbomBauchi Parc national de Yankari Plus de 60 parois de fours et tas de scories

Ampara Fouilles non encore effectuéesDelimiri, Shaushau, PanguruAutresSchiri, Fagam, Fele, Fali, Baura, Muta, Kagalam, Mia Bin, Kirifi, Kantara, Kariya Wuro

BayelsaBenue Tse Dura IVe siècle av. J.-C., 17 bases et 12 fours

Ibila Alukpo, OtukpoUtonkon 5 fours à cuveEdumoga

Borno Daima Ve siècle apr. J.-C.Cross River Mbak Itam Parois de four, tuyère et scories

Ikom Tas de scories d’environ 3 m de hautEyanga

DeltaEbonyi Amagu Ugwu 150-50 av. J.-C.

Afikpo Découverte d’une petite quantité de fer dans l’abri-sous-roche d’Ukpa

Edo Bénin 1180 apr. J.-C. ± 105Aldja Complexe métallurgique et sidérurgique

Ekiti Okemesi Scories de ferEnugu Lejja Tuyères, four d’égalisation et scories

Aku (près de Lejja) IIe siècle apr. J.-C.Umundu 1625-1775 apr. J.-C.Opi VIIIe siècle apr. J.-C.

FCT AbujaTaruga 440 ± 140 av. J.-C.

Gombe PanguruImo AbiribaJigawaKaduna Samaru West env. 685 ± 80 apr. J.-C.

MadakiyaKagarko Tas de scories

Kano Colline de Dalla 635 ± 95 ans apr. J.-C.KatsinaKogi Odo Ere-Akata

IjomuUn four et des scoriesScories et tuyères

Uffe Ijumu IXe-XIVe siècle apr. J.-C., un four et un tas de scories

Ajaokuta Scories et restes de fourneaux ; industrie du fer et de l’acier

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152 David A. Aremu

États (fig. 8) Sites Observations

Itakpe Scories et restes de fourneauxKebbiKwara Ilorin Signifie : « Où nous aiguisons le fer »

Iponrin Ce qui signifie : « Aiguisage du fer »Mont Idofin-Ojokolo Scories de fer, tuyères et bases de foursIdofin-Igbo Aawo Tas de scoriesOlla Site de réduction du fer détruit situé face

au commissariat de police de la villeObo Ayegunle Tas de scoriesOwa Kajola Tas de scories de fer, fours à tuyèresOwa Onire Scories de fer, fours à tuyèresOba 1310 ± 140 et 1585 apr. J.-C. ± 80 ans

Lagos AgegeNassarawa Yelwa 100 apr. J.-C. – 700 apr. J.-C.Niger Bida

Makera TakunpataKongo Makeri Makera signifie « fer » en hausaZungeruRafiu Ndoko

Ogun Otta, Ilaro, Ilobi; Oke Odan, Ljebu Ode

Ondo OndoOsun Isundurnin Signifie : « Où nous avons fondu pour

devenir du fer. » Four en forme de dôme, scories de fer

Ile-Ife à Woye Asiri 1135 apr. J.-C.Olaigbi, Ogunro, Ogbomoso

Oyo Oyo (ville) Dans cette ville se trouvent de nombreux sites de fusion du fer détruits, par exemple Isokun, Fatunke

Ancien parc national d’OyoAgunrin « Où ils martèlent le fer »IseyinIgunrin « Martelage du fer »OgunremiIponrin « Affûtage du fer »Ijaye Cinq fours et tas de scorie de ferMoniya Site détruit situé en ville, en face de

l’Allied BankPlateau Dusten Kongba Objets en fer découverts dans l’un des

niveaux datés de 2780 av. J.-C. ± 100 ansJosNok 3500 av. J.-C. (Y-142-3)Samun Dukya 1520 av. J.-C. ± 115 ans

Rivers Ke 1335 apr. J.-C. ± 85 ansOnyoma

Sokoto SawuniUlaira 220 apr. J.-C.

TarabaYobe Dix fours et tas de scories

Collectivité locale de Gujbaà Ligdir

Zamfara Zamfara

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Photo 74. Trou de 5 cm servant à vérifier laréduction du minerai de fer dans le fourneau(© Aremu).Photo 75. Tuyères dans les trous prévus à cet effet(© Aremu).Photo 76. Porte de fourneau (© Aremu).Photo 77. Site de réduction du minerai de fer,parc national de Yankari, État de Bauchi(© Aremu).Photo 78. Tas de scories de fer sur le site deréduction du minerai de fer d’Ampara (© Aremu).Photo 79. Revêtement extérieur écaillé d’unfourneau à cuve (© Aremu).Photo 80. Vue latérale d’un fourneau à cuve(photographie prise du nord) (© Aremu).Photos 81, 82 et 83. Divers stades de destructionde fourneaux à cuve (© Aremu).

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156 David A. Aremu

Il est important de noter que des indices de production du fer à l’époque préco-loniale existent à Ajaokuta, à Aladja et à Itakpe, et se trouvent à l’emplacementactuel d’un complexe métallurgique et sidérurgique. Cette coïncidence permetde penser que dans les autres régions du Nigéria et d’Afrique où existe ce typed’indices, il est peut-être possible de trouver du minerai de fer en quantité etqualité suffisantes pour alimenter un complexe métallurgique et sidérurgiquemoderne.

La réduction du fer et les techniques de forgeau Nigéria

L A P R O D U C T I O N D U F E R

Pour comprendre les techniques de fusion du fer, les archéologues s’interrogentnotamment sur : la manière dont le fourneau était utilisé, son mode de construc-tion et sa forme ; le procédé de réduction du minerai dans les fours ; l’agence-ment du site ; les rites traditionnels, les tabous et les aspects sociaux liés à laréduction du minerai ; l’époque où l’on a commencé à procéder à cette opérationet celle où elle a cessé dans chaque région connue.

Lorsqu’on étudie un continent ou une région particulière, comme l’Afriqueou l’Afrique de l’Ouest, il faut également savoir quels groupes ethniques sontspécialisés dans les divers types de métallurgie du fer, quelles similitudes ou dif-férences sont les plus apparentes en matière de construction du four, de proces-sus de fusion et au niveau d’autres éléments ; cette étude doit être faite dans lesdifférentes parties de chaque région, ou sous-régions, et dans la région ou sur lecontinent tout entier.

Le processus de réduction comprend la préparation du four, des tuyères etdu charbon de bois qui servira de combustible. Il comprend également la pros-pection du minerai de fer, son extraction et sa préparation.

Lors de la prospection, un jeune (garçon ou fille vierge) accompagne les fon-deurs. Rechercher du minerai de fer accompagné d’un garçon ou d’une fillevierge a une signification spirituelle particulière, dépassant le simple fait que lesfondeurs, qui sont âgés, ont besoin d’un jeune aux yeux plus perçants que lesleurs pour les accompagner dans leur recherche du minerai.

Les traces laissées par certains insectes fouisseurs fournissent une piste. Lesfondeurs recherchent ces traces au sol qui, lorsqu’elles contiennent des matériauxferreux, leur permettent de savoir qu’il y a de fortes chances de trouver du mine-rai de fer à cet endroit. Ils sont également tributaires de l’observation visuelle etde leur expérience, les meilleurs moyens de localiser le minerai.

Avant de commencer à extraire le minerai, ils préparent de la nourriture pourla durée de leur séjour sur le site, ainsi que pour le sacrifice propitiatoire au dieu

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Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 157

Ogun. Le matériel nécessaire à l’extraction du minerai se compose de coutelaspour éliminer broussailles et buissons, de pioches servant à creuser, de lourds picsavec lesquels on extrait le minerai, de houes utilisées pour rassembler et retirer laterre. Les fondeurs utilisent des paniers et de petites calebasses légères aux mêmesfins. Ils utilisent des échelles pour descendre dans le puits ou dans le tunnel où setrouve le minerai, et pour en remonter, et des lampes pour s’éclairer si le puitsqu’ils creusent est profond et obscur (Aremu, 1990).

Pour extraire le minerai, le sol est creusé à la fois verticalement et horizonta-lement. Les mineurs redoutent beaucoup cette dernière opération car c’est enprocédant aux coupes horizontales que beaucoup d’entre eux périssent. Ils res-pectent certains tabous lorsqu’ils creusent le sol à la recherche de minerai de fer.Il leur est interdit de vouloir du mal à quelqu’un, d’avoir des relations sexuellesavec la femme d’un autre homme et de voler. Selon la croyance, si les mineursbrisent l’un de ces tabous, le plafond du tunnel qu’ils sont en train de creuserrisque de s’effondrer et de les tuer en les ensevelissant, d’où le dicton :« Quiconque s’apprête à fondre du fer ne doit pas se livrer au mal… Quiconquefond du fer ne doit pas accepter de charmes maléfiques destinés à nuire à autrui »(Adeniji, 1977, p. 12 ; Aremu, 1999, p. 187-188).

Pour extraire le minerai de fer, les travailleurs opèrent en équipe, travaild’équipe qui se poursuit lors des phases ultérieures du processus.

Lors de la phase de préparation, une fois ramené à la surface, le minerai defer est trié et concassé jusqu’à l’obtention de morceaux de la taille de gravillons.Ensuite, soit il est transporté jusqu’à une rivière pour y être lavé, soit les mineurs-fondeurs vont chercher de grandes quantités d’eau pour le laver. Après le lavage,le minerai est versé sur un matelas grossier, étendu sur le sol et laissé au soleiljusqu’à ce qu’il devienne absolument sec, puis il est broyé et réduit en poudre.

La préparation du combustible implique la fabrication du charbon de boisqui permettra de faire le feu pour réduire le fer. Ce charbon de bois ne peut pasêtre fabriqué à partir de n’importe quel bois. Il ne peut l’être qu’à partir desvariétés ci-après :• Talí (Obo), Erythrophleum quineense ;• Aformosia laxifora (Shedun) ou Pericolpsis laxiflora ;• Lophir lanceolata (Liponhan).Ces trois variétés sont des bois durs préparés selon des techniques particulières(Aremu, 1990, p. 190-191). La forme ronde du four offre une enceinte où l’onproduit la chaleur nécessaire à la réduction. Les parois sont construites en argile.Il existe différentes sortes de fours au Nigéria : en forme de dôme, à cuve et àsoufflets. Les trous des tuyères sont aménagés à la base du four pour permettreà l’air d’y entrer pendant la fusion soit par appel d’air naturel, soit à l’aide desoufflets.

Lors de la réduction, après séchage du minerai, un petit feu de charbon debois est allumé dans le four et une charge mixte constituée alternativement deminerai et de combustible y est placée. La température du four augmente par un

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158 David A. Aremu

appel d’air qui est soit naturel, soit produit par des soufflets ; l’alimentation enair est contrôlée lors des phases ultérieures par observation de la couleur de laflamme qui s’échappe de la charge. La réduction dans des fours en forme dedôme et à cuve, telle qu’elle est pratiquée aussi bien à Isundunrin qu’à Yankari(Bauchi), dure au minimum de 18 à 20 heures. Après la fusion, on laisse le four-neau refroidir et l’on en retire la masse spongieuse de fer métallique appeléeloupe3. Celle-ci est normalement réchauffée et martelée en une masse compacte,opération qui doit être répétée plusieurs fois pour éliminer toutes les scories4.

Il existe encore, au Nigéria, des artisans capables de réduire le fer. Ils repré-sentent une période qui appartient à l’histoire et c’est l’une des raisons pour les-quelles nous les avons enregistrés sur cassettes vidéo avant que leur savoir-faire nese perde.

L E S T E C H N I Q U E S D E F O R G E

Les techniques de forge comprennent le forgeage, la trempe et la soudure, cestrois activités devant en principe être pratiquées dans un atelier de forgeron. Pourcertains, l’atelier fait partie de la forge avec son feu et son enclume sur lesquels lemétal est chauffé et façonné. Une fois le fer obtenu, le forgeron le porte au rougepuis, lorsqu’il est incandescent, il procède par martelage et coupe pour lui don-ner la forme désirée.

La trempe aide à durcir le fer et s’obtient en chauffant et martelant à plu-sieurs reprises le fer pour en éliminer les scories. La soudure consiste à réunirdeux ou plusieurs morceaux de fer. Là encore, il faut chauffer le fer au rouge, puismarteler les différents éléments pour les assembler et leur donner la formevoulue. Ces trois opérations sont répétées à plusieurs reprises dans le four et surl’enclume par martelage.

Dans le passé, les forgerons étaient tributaires du fer produit localement. Denos jours, ils se procurent le métal dont ils ont besoin en utilisant de vieillespièces détachées d’automobiles et autres morceaux de ferraille. Ils emploient éga-lement du charbon de bois et des coquilles de noix de palmier pour alimenter lefour.

Leur panoplie d’outils se compose d’énormes blocs de pierre utilisés commeenclumes, de pierres plus petites, à la surface lisse, qui servent de pierres àaiguiser, de soufflets fabriqués à partir de tuyaux de bois évidé, de peau de chèvre

3. Bloom en anglais (NDLR).4. Cinq films vidéo ont été dirigés par l’auteur, dont deux concernent les processus de

réduction du fer : Démonstration de fusion du fer à Isundunrin (Pal, 80 min) ; Fusiondu fer à Wikki, Parc national de Yankari, Bauchi (Pal, 60 min) ; Coulage du laiton àObo Aiyegunle (NTSC,100 min) ; Sites bauchi de fusion du fer à Ampara, Parcnational de Yankari (Pal, 40 min) ; Construction d’un four à cuve à Wikki, Parcnational de Yankari, Bauchi (Pal, 60 min).

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Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 159

ou de mouton et de baguettes de bambou, de marteaux en pierre de diversestailles selon le travail à faire.

Un long marteau, plus léger que les autres, et une barre de fer servent àfaçonner les coins par martelage tandis que les aspérités du métal incandescentessont coupées à l’aide d’une herminette. Un ciseau à froid et un marteau sont uti-lisés pour ébarber le fer à froid. Un rocher à la surface concave peut servir àfaçonner des lames de houes. Le forgeron doit également posséder un rochercreusé en surface et contenant de l’eau pour y tremper le fer chaud au cours duforgeage. Des tenailles ou pinces en fer servent à tenir le métal chaud.

Autrefois, les forgerons fabriquaient tous les outils en fer utilisés : lames dehoues, coutelas, haches, couteaux, ciseaux, rasoirs, tiges, chaînes, bracelets, épin-gles à cheveux, herminettes, mors et étriers pour chevaux, pour n’en mentionnerque quelques-uns.

Parmi toutes les industries traditionnelles du Nigéria, celle du forgeron estparticulièrement importante, comme en témoigne sa large diffusion dans tousles lieux de peuplement humain, des villages aux grandes villes. Bien que l’on aitcessé de produire le fer dans la plupart des communautés nigérianes, il existe tou-jours des forgerons dans chaque ville ou village.

Le fer dans la vie quotidienne des sociétés nigérianes

Le fer offre de nombreux avantages par rapport au cuivre, au bronze et au laiton.Il est beaucoup plus solide et peut être mieux aiguisé que ces derniers, plutôt des-tinés à la fabrication d’objets utilitaires ou ornementaux, et sert à fabriquer diverstypes d’outils et d’armes de guerre. Doté de nombreux et grands avantages parrapport aux outils de pierre et aux bâtons, il offre une efficacité très supérieure àcelle de la pierre, du cuivre et du bronze. L’on peut beaucoup plus efficacementet facilement défricher des forêts, travailler le bois, cultiver le sol et abattre desanimaux ou tuer des personnes (ennemies) lorsqu’on est équipé d’outils etd’armes en fer. Les différents modes d’utilisation du fer ont contribué à l’expan-sion rapide de la technique du fer en Afrique.

La connaissance et la possession du fer ont valu un grand prestige à de nom-breuses sociétés africaines. Des États se sont formés et développés à partir dumoment où l’on a commencé à travailler et à utiliser le fer. C’est le fer qui a per-mis aux militaires assyriens de remporter la victoire sur les Kushites vers 660av. J.-C., pour ne citer que ce cas célèbre.

Le travail du fer au Nigéria a pris son essor à partir de la découverte soudainedes techniques de réduction et, plus récemment, de la diffusion des techniquesindustrielles modernes de production de fer et d’acier à Ajaokuta, Aladja etItakpe. La gamme de produits fabriqués par les artisans depuis l’époque des pre-mières communautés utilisant le fer jusqu’à nos jours s’est élargie et contribue àsatisfaire actuellement de nombreux besoins de la vie quotidienne.

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160 David A. Aremu

On trouvera ci-après sept tableaux indiquant certains des domaines, — écono-mie, ménage, culte ou religion, politique ou arts militaires — où le fer est très cou-ramment utilisé par la société nigériane dans la vie quotidienne (tableaux 7 à 13).

Tableau 7. Outils destinés à la fabrication de produits marchands

Tableau 8. Ustensiles et appareils ménagers

Catégories Objets Observations

Outils du forgeron Grattoirs Utilisés pour fabriquer des modèles à l’échelle

Coupoirs SpatulesCouteaux PincesPoinçons LimesEnclumes de fer, marteaux

Outils des fondeurs de bronze et de laiton

Ils diffèrent de tous ceux précédemment cités

Outils des graveurs sur bois Coutelas Aboros (grands et petits)Haches SciesCouteaux

Outils agricoles Houes Petites et grandesCoutelas, couteaux à igname, couteaux servant à couper le blé de Guinée

Outils de chasse Pièges dotés de flèches Petits ou grandsPièges dépourvus de flèches Petits ou grandsPièges à rat Ils diffèrent de ceux

précédemment citésFlèches, montures de fusil, massues

Outils de pêche HameçonsOutils servant à inciser les palmiers pour récolter la sève nécessaire à la fabrication du vin de palme

Coutelas, haches pour palmiers à vin

Couteaux pour palmiers à vin

Aha : Yoruba

Instruments destinés au tissage d’étoffes

Tige servant à l’égrainage du coton

Omo Obibo : Yoruba

Objets Observations

Couteaux à okrasHachesBraseros ou fourneaux Ifonna YorubaSéchoir à viande Ayanra : YorubaAssiettes en métalChaînes

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Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 161

Tableau 9. Objets à vocation religieuse et cultuelle

Tableau 10. Objets cérémoniels pour le mariage

Tableau 11. Objets à vocation politique et militaire

Tableau 12. Motifs représentant des êtres humains et des animaux

Tableau 13. Divers : Tôlerie, Serrurerie à titre d’exemple

Catégorie Objets Observations

Religion Symboles d’OgunSymboles de SangoSymboles d’OsanyinSymboles d’EgungunSymboles d’Obalufon Premier artiste travaillant le métal

(bronze ou laiton)Objets à vocation cultuelle Culte d’Ogboni Essentiellement en bronze/laiton

Mère infinie IyaBâton d’Ogboni Edan

Objets

Bâton de cérémonie destiné aux mariagesAssiettes de mariage en laiton

Catégorie Objets Observations

Politique Épées royales, assiettes royales, siège royalSceptre royal Il pouvait être en laiton ou en

bronzeMatériel militaire Dagues, épées de fer

Aba Cadenas, verrou ou serrure de métal permettant de se protéger des ennemis

Flèches empoisonnées, coutelas

Objets Observations

Motifs artistiques destinés à représenterdes êtres humains et des animauxTêtes en bronze ou en laiton Exemple : les têtes d’Ife et du BéninAnimaux, serpents et oiseaux en bronzeou en laiton

Exemple : le serpent de bronze d’Igbo Ukwu

Objets

Montants et châssis de VolkswagenMoulage de clés, de serrures, etc.

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162 David A. Aremu

Croyances liées au fer

Les études ethnographiques réalisées dans le Pays yoruba montrent que forgeronset « utilisateurs » du fer croient en Ogun — le dieu du fer — et le vénèrent. Cescroyances et coutumes sont peut-être antérieures aux indices archéologiques dis-ponibles au Nigéria. Ogun est considéré comme la divinité à laquelle appartien-nent le fer et l’acier, et, par conséquent, tous les articles et outils fabriqués à partirde ces deux éléments. Les principaux symboles d’Ogun sont le fer, l’enclume, lechien et des mariwo (de jeunes feuilles de palmier), ainsi que certains arbres(Aremu, 1990). Le fer symbolise Ogun et Ogun symbolise le fer.

Le trait distinctif d’Ogun est sa relation au fer et aux autres éléments relevantde la technique des matériaux. Ogun est presque universellement associé à destechniques potentiellement dangereuses (armes, véhicules à moteur, trains, élec-tricité) et à des professions plutôt masculines et risquées : la fabrication du fer, lachasse, la guerre dans le passé, les transports, la construction, la mécanique etl’ingénierie de nos jours (Sandra, 1980, p. 6-7). Les aspects dangereux aussi bienque bénéfiques de ces associations sont reconnus dans le système de croyances enOgun.

Les Yoruba croient qu’étant donné sa maîtrise artistique, c’est Ogun (le fer)qui donne la touche finale au travail créatif de l’homme de chair et de sang. Ilincombe à Ogun de procéder à la circoncision, aux scarifications du visage, auxtatouages ou à toute autre opération chirurgicale qui peut s’avérer nécessairepour préserver la bonne santé des gens. Cette conception vient de la croyanceselon laquelle tous les outils en fer et en acier appartiennent à Ogun et que tousceux qui les utilisent le font sous son autorité (Idowu, 1975, p. 88 ; Alabede,1993, communication personnelle).

En Pays yoruba, de manière générale, Ogun symbolise le fer. C’est parcequ’on le croit maître du fer et de l’acier qu’Ogun est reconnu comme le dieu de laguerre et des guerriers, des chasseurs et de la chasse, de tous les artisans-forgerons,des ingénieurs, des mécaniciens , de tous les conducteurs de machines à moteur etde tous les réparateurs de machines, en fait de tous ceux qui ont affaire à quelqueobjet en fer ou en acier. Tous sont réputés devoir le vénérer ou se le concilier pardes offrandes propitiatoires, notamment avant d’entrer dans leur atelier le matinpour entreprendre un nouveau travail comme l’ouverture d’une forge, ou avantune expédition de chasse ou l’achat d’un nouveau véhicule, ou encore lui rendregrâce après avoir échappé à une catastrophe tel un accident de voiture ou de chasse.

On rappelle souvent aux Yoruba l’adage ci-après : « Bi Omode bada’le, ki oma da Ogun oro Ogun kewo » [Si l’on rompt un engagement, que ce ne soit pasavec Ogun ; avec Ogun c’est strictement interdit]. Jusqu’à aujourd’hui, les non-chrétiens prêtent serment au tribunal sur un instrument en fer plutôt que sur laBible, comme le font les chrétiens. Jésus-Christ enjoint toutefois les chrétiens àne pas jurer du tout, mais à simplement dire « oui ou non » (Mat., 2 34-37).

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Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 163

La coutume était de vénérer Ogun avant et après chaque guerre (Ojo, 1971,p. 169-170). Désormais cette célébration a lieu tous les ans à l’occasion des pre-mières récoltes d’ignames entre juin et septembre, et le chien a remplacé l’êtrehumain comme principale victime sacrificielle. À Idofin et Obo Ayegunle, c’esten août que l’on célèbre la consommation de la nouvelle moisson d’ignames.Alors qu’il était autrefois vénéré dans tout le pays, Ogun ne l’est plus que parquelques dévots et forgerons disséminés sur la quasi-totalité du territoire du Paysyoruba. Ire, dans l’État d’Ekiti, reste le principal lieu où se pratique ce culte.Ikole, Ondo, Ado-Ekiti et Otun célèbrent le festival annuel avec raffinement. Lechristianisme en particulier et l’islam ont, de manière générale, entraîné la dimi-nution du nombre d’adorateurs d’Ogun dans le Pays yoruba.

La nature masculine d’Ogun se traduit par le fait que, contrairement à ce quise passe dans la plupart des autres religions yoruba, les femmes ne peuvent pasassumer les fonctions de prêtresses, même si elles peuvent désormais participeraux cérémonies. Les sacrifices et les prières visent à apaiser le côté destructifd’Ogun afin que ses disciples évitent le danger, notamment les accidents. Cen’est qu’à titre secondaire qu’on se tourne vers lui pour lui demander de favoriserdes objectifs individuels liés à la richesse, au pouvoir, à la fertilité, etc.

Ainsi qu’on l’a fait observer précédemment, il est instructif de voir à quelpoint le fer a influencé les croyances et la vie spirituelle de la population de diver-ses régions du Nigéria et de l’Afrique en général. Ce n’est peut-être pas sans rap-port avec le fait que la connaissance du travail du fer venant de l’intérieur desêtres, l’on peut aisément comprendre qu’il soit enraciné dans leurs croyances etdans la manière dont ils pratiquent leur culte. La description des routes du fer enAfrique ne serait pas complète si l’on ne mentionnait pas les croyances et cou-tumes des différents peuples liées à Ogun. Tout travail de production et de for-geage exige, du début à la fin, des offrandes propitiatoires à Ogun et l’onconsidère que c’est lui qui assure le succès de toutes les activités.

Pour prendre pleinement conscience des contributions des diverses sociétésnigérianes aux routes du fer en Afrique, il reste encore beaucoup de recherches àfaire. Elles devront être planifiées, programmées, financées de façon satisfaisanteet porter aussi bien sur l’archéologie et l’ethnographie que sur les autres disci-plines qui s’y rattachent.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 165

Au seuil de la métallurgie intensive

Le choix de la combustion lente dans la boucle du Niger (Burkina Faso et Mali)1

Bruno Martinelli

La production préindustrielle de fer parcourt l’histoire de l’Afrique de l’Ouestdans la longue durée, depuis plus de 2 500 ans. Tant du point de vue archéolo-gique qu’historique et anthropologique, l’Afrique subsaharienne apparaîtcomme détentrice d’un patrimoine historique général de la métallurgie. Laréduction directe du minerai de fer y a perduré et s’y est diversifiée, multipliantles choix techniques à un degré inégalé par les autres parties du monde. Cettediversité est l’une des questions les plus importantes qui se pose aujourd’hui sil’on veut définir, comprendre et comparer l’ensemble de ces techniques enn’oubliant jamais que des techniques d’une telle complexité, engagées dans unequête de l’efficacité, sont d’abord des systèmes de connaissance. Pour l’ensembledes sciences humaines intéressées par la métallurgie comme fait technique etsocial (archéologie, histoire et anthropologie), l’Afrique constitue un laboratoirede recherches comparatives sans équivalent. Les recherches contemporaines surles métallurgies du fer en Afrique modifient notre regard sur le passé des sociétés,des États et des civilisations dans cette partie du monde.

Jusqu’au début du XXe siècle, les artisans ont fourni des instruments métalli-ques à de vastes aires régionales, contribuant à structurer les espaces politiques etéconomiques. Entre les XVe et XIXe siècles, l’activité métallurgique a contribué àla genèse d’États et de royaumes malinke, soninke, songhay et moose dans les airessoudano-sahéliennes de la boucle du Niger. Parallèlement à la fourniture d’arme-ment pour les activités militaires, la production de fer y permit l’extension desdéfrichements et l’évolution technique de l’agriculture céréalière (mil, sorgho).

1. Ce texte est, avec l’accord de l’éditeur, une version remaniée d’un article publié en2000 dans P. Pétrequin, P. Fluzin, J. Thiriot et P. Benoît (dir. publ.), Arts du feu etproductions artisanales, XXes Rencontres internationales d’Archéologie et d’Histoired’Antibes, Antibes, éditions APDCA.

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166 Bruno Martinelli

On commence seulement à mesurer les conséquences de la fournitured’équipements métalliques sur les écosystèmes et l’évolution des végétaux exploi-tés, alors qu’on connaît depuis longtemps son incidence sur le commerce etl’activité des marchés. La production métallurgique a été un facteur importantde différenciation régionale et de mutation sociale. Bien des États précoloniauxde l’Ouest africain ont cherché à attirer, administrer et protéger des métallur-gistes de divers statuts, sans nécessairement restreindre leur indépendance et leurmobilité. Ce fut le cas dans la vallée du Sénégal, sur le plateau de Jos et Taruga,au Nigéria, dans plusieurs zones du delta intérieur du Niger, dans les montsMandingue au Mali, au Fouta-Djalon en Haute-Guinée, au Kenedougou, auPays songhay et dans la région d’Agadez au Niger. Le Yatenga, situé dans le norddu Burkina Faso, a été l’un de ces centres de production intensive à rayonnementde grande amplitude (figure 9).

Ce royaume, fondé à la fin du XVIe siècle, connut son plein essor aux XVIIIe

et XIXe siècles avec une intensification exceptionnelle de la production métallur-gique et de l’activité commerciale. Si l’activité traditionnelle d’exploitation duminerai et de réduction a complètement cessé depuis les années 1950-1960, laforge y reste active. Elle répond aux multiples besoins de la population rurale eturbaine en utilisant les métaux de récupération. Le Yatenga possède de riches tra-ditions significatives de la place qu’occupait cette industrie dans la culture histo-rique et matérielle des habitants de cette région.

Ce chapitre propose deux axes de réflexion sur la métallurgie du fer duYatenga, articulés par les notions de mutation technique et de mutation sociale.Compte tenu de nos observations sur le terrain, nous avançons l’idée qu’il existed’étroites relations entre un changement technique majeur, saisissable dans uncontexte ethnographique théoriquement restitué, et un processus de stratifica-tion sociale et politique qui s’est développé de la fin du XVIIIe siècle au début duXXe siècle. L’un des enjeux les plus importants de ce processus fut la définitionstatutaire du forgeron, maître de la production et organisateur de la commercia-lisation du fer forgé, en contrepartie de règles contraignantes d’enclosure sociale.Les études menées au Yatenga permettent de démontrer que, contrairement à unschéma de constance transculturelle trop souvent reçu au nom de l’évidence, lestatut de métallurgiste a évolué, passant par des états successifs. Il est, dans cetterégion, le produit d’une mutation sociale globale dont il est possible de suivre lesincidences techniques, économiques et politiques. « Le choix de la combustionlente » relève de cette triple interrogation.

Les deux systèmes techniques et sociaux

Dans les sociétés africaines, la métallurgie est un révélateur de la complexité dessociétés et des échanges matériels et humains qu’elles entretenaient. Le statut

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Au seuil de la métallurgie intensive 167

NIGERIA

NIGER

BÉNIN

TOGOGU

INÉ

E

C Ô T E -D ' I V O I R E

M A U R I T A N I E

M A L I

G H A N A

BURKINA-FASO

LIBERIA

Niger

G o l f e d e G u i n é e

0 250 km

Yatenga

Aire de métallurgie moose

Figure 9. Le Yatenga et l’aire de métallurgie moose

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d’artisan spécialisé dépend de configurations sociales différentes, mêmelorsqu’elles sont spatialement et historiquement en contact, comme ce fut le casdans la boucle du Niger au cours des siècles derniers. La notion même de« forgeron », dont on ne saisit pas assez qu’elle est, de prime abord, le produit detraductions discutables, exprime cette remarquable variabilité. L’image du forge-ron a été abordée de manière stéréotypique dans une littérature ethnologique quine l’a appréhendée que sous l’angle des mythes et des fonctions rituelles, restantaveugle à la métallurgie en tant que telle. L’ouvrage de Griaule, Dieu d’eau(1948), qui place le forgeron civilisateur au centre du système cosmogonique desDogon (Mali), est l’archétype de cette orientation. Il vaut la peine de signalerqu’un site très important de mine et de production métallurgique, celui de Wol(Woru), était situé à quelques kilomètres de Sanga, où Griaule et son équipemenèrent leurs recherches durant plus de trente ans. Aucun de ces chercheursn’en a signalé l’existence. Il faut dire que les métallurgistes qui y produisaient dufer à cette époque n’étaient pas des forgerons mais de simples agriculteurs. Cesmétallurgistes étaient incompatibles avec le forgeron du mythe présenté commeun modèle commun à l’ensemble des Dogon. Faut-il y voir la raison de cetétrange silence ?

Pour des raisons à la fois techniques et sociales, le statut des forgerons estd’une extrême variabilité en Afrique de l’Ouest. Il est déterminé par l’ensembledes rapports que les artisans entretenaient avec les fournisseurs ou détenteurs dematière première comme avec les destinataires du travail de la forge, l’ensembledes catégories de fonctions et de pouvoirs qui définissaient la société dans sonensemble. Pour ces différentes raisons, la métallurgie du fer apparaît commel’une des clefs d’interrogation comparative des sociétés ouest-africaines, tant dupoint de vue du développement des structures sociales que de celui des systèmestechniques et des écosystèmes. Plusieurs catégories de forgerons coexistaient sou-vent au sein de la même région, témoignant de critères discriminants propres àchaque communauté. Par extension, l’application de la notion d’artisanat, plusparticulièrement pour les « arts du feu », doit satisfaire à des exigences de défini-tion et d’ajustement. La transformation du minerai implique la maîtrise du feudans des fours dont on connaît de nombreux types, structures et systèmes defonctionnement (avec ou sans ventilation). Ceux qui en sont les utilisateursn’ont pas toujours le statut d’artisan au sein de leur société. Dans des régionsmétallurgiques suffisamment importantes pour avoir fait l’objet d’études (nordde la boucle du Niger — Burkina Faso, Mali, nord du Togo et du Bénin, norddu Cameroun — et Niger), des agriculteurs maîtrisaient et monopolisaient latechnique des fours (hauts ou bas fourneaux). Ils fournissaient ensuite le métal àdes forgerons, simples fabricants. L’existence de ce système dualiste a été nette-ment signalée par l’ethnologue allemande Renate Wente-Lukas (1977) pour lessociétés matakam, sukur ou kirdi du Nord-Cameroun. La question d’une dis-tinction catégorielle entre métallurgistes et forgerons avait aussi été posée par

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Echard (1965) à partir de données concernant les Hawsa du Niger. Elle le futencore par Dupré (1981) en ce qui concerne l’Afrique centrale. Dans d’autressociétés, les forgerons réalisaient l’intégralité de la chaîne opératoire, de l’extrac-tion du minerai jusqu’à la fabrication des objets. Si l’on considère les agriculteurs-métallurgistes comme des « artisans », ce ne peut être qu’au nom d’un conceptimporté dont la définition est en partie théorique. Dans l’ensemble de ces socié-tés, les artisans reconnus comme tels par la terminologie vernaculaire sont les for-gerons. « Gens des soufflets » ou « de l’enclume », ils sont identifiés par l’activitéde fabrication et la livraison de leurs produits aux utilisateurs locaux. Dans detels contextes, la distinction n’est jamais seulement technique et économique,elle est aussi rituelle, symbolique et sociale. L’attribution systématique de lamétallurgie à la catégorie des forgerons par des auteurs aussi bien anciens quecontemporains est préjudiciable à la connaissance des anciennes sociétés afri-caines. La difficulté résulte aussi de l’absence de terme spécifique pour désignerlocalement les agriculteurs-métallurgistes, alors qu’il en existe toujours un pournommer les forgerons. Les documents d’archives doivent donc être systémati-quement critiqués et confirmés sur le terrain.

Les sociétés segmentaires, les États et la métallurgie

Pour simplifier, sans négliger l’existence de situations intermédiaires, il est possi-ble de distinguer deux systèmes techniques, sociaux et politiques. De nombreu-ses sociétés connaissent un modèle dualiste dans lequel les activités d’élaborationprimaire (extraction et réduction du minerai) sont entre les mains d’agriculteurs,le métal étant livré selon des modalités contractuelles diverses à des forgeronspour la fabrication. D’autres sociétés présentent un modèle d’organisationmétallurgique où l’ensemble de la chaîne opératoire est réalisé par la seule caté-gorie des forgerons, de la mine à la forge.

Le premier modèle est caractéristique de sociétés segmentaires qui sont res-tées sans pouvoir politique centralisé jusqu’au début du XXe siècle. Ce systèmesocial a une ossature de parenté lignagère, l’autorité juridique et territoriale étantdévolue aux doyens ou aux représentants de lignages. Le lignage est une unité àla fois économique, religieuse et politique. J’ai étudié des sociétés lignagèresd’agriculteurs-métallurgistes en Pays bassar occidental (Nord-Togo) puis en Paysdogon (Mali). Le second modèle semble avoir connu son expression la plus ache-vée dans le contexte de formations étatiques du passé précolonial. Il se fonde surune double articulation entre système de spécialisations techniques et systèmehiérarchisé d’assignations identitaires et statutaires. Les forgerons sont au centred’un système catégoriel (cordonniers, tisserands, teinturiers, boisseliers, bateliers,griots, etc.) qui les astreint à l’endogamie, en contrepartie d’une spécialisationtechno-économique exclusive et d’une assignation de pouvoirs sociaux et religieux.

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170 Bruno Martinelli

Les anciens royaumes malinke, peul et songhay de l’Ouest africain en fournissentde remarquables illustrations (McNaughton, 1988 ; Olivier de Sardan, 1982).J’ai, pour ma part, étudié ce second type de production métallurgique auYatenga, dans le nord du Burkina Faso (figures 9 et 10).

Les mutations techniques de la métallurgie du fer dans cette partie del’Afrique sont indissociables de la formation de sociétés complexes, tendanciel-lement stratifiées. Nullement refermées sur elles-mêmes (comme on l’a cruparfois) car insérées dans des circuits d’échanges marchands (fer, or, sel, kola,textiles) et à la mobilité humaine, les sociétés segmentaires n’ont pas échappé àcette tendance. Elles ont assimilé une partie des distinctions catégorielles desociétés étatiques voisines (c’est le cas des Dogon par rapport aux Bambara).Produits d’histoires spécifiques, les situations sociales observables sur le terrainsont encore diverses. Elles témoignent de la complexité des étapes franchies parces sociétés. La région dans laquelle je poursuis des recherches en est l’illustra-tion remarquable, aussi bien du côté moose burkinabé que du côté dogonmalien. En examinant les relations entre métallurgie du fer, formation poli-tique globale, agriculture et échanges, il est possible de circonscrire les condi-tions sociales et politiques d’émergence de statuts spécifiques de « forgerons »en tant qu’artisans reconnus du feu et du fer. Produit de l’histoire sociale, cestatut a enregistré d’importantes variations selon les sociétés africaines. Pourchacune d’entre elles, il importe de savoir comment et quand il s’est constitué,quelles formes il a prises, à partir d’un état social où la différenciation entreartisan et non-artisan était moins marquée qu’actuellement. Cette évolutions’est parfois faite dans un climat de contrainte, des chefferies guerrières sou-mettant de petits groupes de forgerons puis contrôlant la production desarmes. Ce fut le cas au Yatenga sous le règne de Naaba Wumtanângo(XVIe siècle). Cette forme de recrutement ne pouvait s’effectuer ni à grandeéchelle, ni sur des périodes prolongées. Si le pouvoir politique cherchait à atti-rer les forgerons en nombre pour contribuer à la production d’armes, il devaitménager leur sens de l’indépendance, leur opposition à l’usage de la contrainte.Maints exemples démontrent que les forgerons disposaient d’une échelle deréponses adaptées aux conflits avec le pouvoir politique : la grève, la malédic-tion, l’émigration. Le développement de l’artisanat s’est plus généralementeffectué en s’adaptant à la stratification interne et à la complexification desociétés agricoles et urbaines, dans des contextes favorables de peuplement, destructuration politique, d’échanges de produits, de circulation des hommes etdes idées.

La coexistence des métallurgies de réduction d’agriculteurs et de forgerons,de non-artisans et d’artisans (si l’on s’en tient aux critères locaux) s’est traduitepar des formes de complémentarité technique, de contacts et d’échanges à traverslesquelles chaque groupe, selon les ressources dont il disposait, apparaissaitcomme spécialiste par rapport à ses voisins. Ainsi en est-il en ce qui concerne la

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Au seuil de la métallurgie intensive 171

production directe d’acier que les forgerons nomment généralement « fer dur »,destiné à la réalisation des tranchants des lames de haches ou de sabres. Jusqu’auXXe siècle, une partie des forgerons du Yatenga, gros producteurs de métal, sefournissait en « fer dur », ou acier siècle, dans le nord du Pays samo ou même,plus loin, en Pays dogon, auprès d’agriculteurs-métallurgistes. Ces derniers ontconservé le monopole d’une production stratégique puisque ce métal était utilisépour les tranchants de haches ou de sabres jusqu’à son remplacement par l’acierimporté d’Europe.

DwênzaTabi

Okoyeri

Bandiagara

Koro

Kâyn

Kibsi

Tyu

Rônga

Womsum

GursiSamoKwêere

Kalsaka

Ségénéga

Ouahigouya

Mêngao

Yatengafulse/mosi

Djibo

Hombori

Bankas

Plaine du Séno

Plaine du Séno

Dogôn

Dogôn

Deltainterieurdu Niger Dogôn

Dogôn/Tel lem

Tômbori

Dogôn

Gondo

Wol

Mopti

B U R K I N A - F A S O

M A L I

Sege

Aru

Sanga

Somadougou

Dalla-Boni

50 km

Sites forgerons Systèmes dunaires Localités

Routes

Frontièresinternationales

Sites métallurgistes

0

Sites mixtes

Zones humides

Escarpements

Figure 10. Agriculteurs métallurgistes et forgerons au Yatenga et dans la plaine de Séno

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172 Bruno Martinelli

L’antériorité et la complexité

Ces données soulèvent des questions de divers ordres : historique, technique etsocial. Y a-t-il antériorité d’un système sur l’autre ? Si les datations permettent dedistribuer chronologiquement les métallurgies africaines, nous ne savons presquerien des organisations sociales correspondantes. Les deux systèmes ont coexisté etsubsisté jusqu’au XXe siècle. À défaut de faits, un modèle explicatif transféré dunéolithique méditerranéen vers l’Afrique subsaharienne a souvent conduit à hié-rarchiser historiquement les systèmes. Il définit l’artisanat métallurgique commeun témoin privilégié de « libération du technicien » et de passage de sociétés« polyvalentes » à des sociétés complexes (Leroi-Gourhan, 1964, p. 238). Ilpousse à considérer les systèmes dualistes comme plus anciens ou plus archaïquesque les systèmes unitaires. Pour décider d’un éventuel passage du proto-artisanatvers l’artisanat proprement dit, l’argumentation peut-elle se déplacer sur le ter-rain technique ? Le critère typologique n’est pas décisif, du moins en ce qui con-cerne l’ensemble de la boucle du Niger. Un essai de classification des fours àinduction, réalisé sur plus d’une centaine de sites de réduction de cette région(Martinelli, 1993a et b), ne permet pas d’établir de relation univoque entre tech-nique utilisée et identité sociale des producteurs (figure 11).

Des techniques analogues de fours fonctionnant par induction étaient prati-quées, dans des régions proches aussi bien qu’éloignées les unes des autres, pardes forgerons dans certains cas, par des agriculteurs-métallurgistes dans d’autres(photos 84 et 85). Rien n’interdit de penser que des emprunts aient eu lieu, dansles deux sens, entre ces groupes. L’exemple des métallurgies dogon, échelonnéesdu nord au sud de la falaise, est l’un des exemples les plus remarquables de conver-gences techniques et de divergences sociales (Martinelli, 1995b). Le critère decomplexité technique ne peut être récusé a priori, mais il relève d’une analysethéorique des processus qu’en l’état actuel des connaissances, nous ne pouvonsencore mener avec toute la rigueur nécessaire. Les complexités ne se trouvent pasforcément où on les attend. Pour la qualité des métaux, la supériorité de certainsagriculteurs-métallurgistes était si reconnue par les forgerons voisins qu’elle a puamener ces derniers à en abandonner la production. Tel fut le cas du Yatenga à lafin du XIXe siècle et au début de la période coloniale. Le critère d’échelle de pro-duction est-il moins discutable ? Dans ses travaux sur les forgerons hawsa ettouareg, Echard (1965 et 1992) avait fort justement insisté sur l’impact desmétallurgies africaines sur l’espace social tant pour le fonctionnement d’unités deproduction dans des aires territorialisées que pour les transferts de matériaux, leséchanges de produits finis, la mobilité des hommes et les cycles marchands.Intensité de production et emprise sur des espaces de distribution des produits etde mobilité humaine dépendent de facteurs sociaux et politiques globaux. Lescomparaisons (bien peu nombreuses encore) que nous pouvons faire entre des

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180

70/80

200

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130

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1

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500

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120

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140130/140

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200 200

100 100

230

Dogon, Pignari(Mali)

Kurumba, Oursi(Burkina Faso)

Basar (Togo)

Dogon (?), Séno (Mali)

Ninsi/fulse, Ronga,Yatenga (Burkina Faso)

Bobo (Burkina Faso)(d'après photo Meniaud 1912)

Minyânka, Sikasso (Mali)

Bwa, Ouarkoye (Burkina Faso)(d'après photo Palausi 1951)

1. Moose tikare ziitenga(Burkina Faso)

2. fulse fulogi yïngane, Yatenga(Burkina Faso)

fulse/moose,Yatenga central Fulse/moose, Yatenga occidental (Burkina Faso)

et Seno et reconstitution kâyn (Burkina Faso)

Dogon, Aru (Mali) Dogon, Wol/Woru (Mali)Nînsi/Samo, Kweere Daro

(Burkina Faso)

(?) Tyanfala (Mali)(d'après Gouletquer 1983)

(?) Fouta-Djalon(d'après Appia 1952)

Bâmbara (?), Bamako (Mali)(d'après photo Zeltner, 1935,

Musée de l'Homme)

Mande,Bendougou

(Mali)

Hawsa (Niger)(d'après Échard 1965)

Malinké(Côte d'Ivoire)

(d'après Célis 1991)

Zarma Tillaberi(Niger)

Malinké et senufo(Côte d'Ivoire)

130 140

190

160

160 140

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80

185 200

90

Figure 11. Principaux types de fours à induction dans la boucle du Niger

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systèmes dualistes, montrent que si beaucoup étaient d’échelle microrégionale(Pays dogon), certains ont pu alimenter des exportations à grande échelle. Ce futle cas du Pays bassar, dans le nord du Togo, qui produisait des lames de houepour les exporter vers le Royaume dagomba à l’ouest et vers la côte de Guinée,par voies caravanières.

En conclusion, les questions posées par la pluralité des systèmes de produc-tion métallurgique restent largement ouvertes. On retiendra qu’il a existé descorrespondances structurelles entre systèmes de production métallurgique et for-mations sociales et politiques. Les sociétés où les activités de mines et de réduc-tion étaient réalisées par des agriculteurs, sans spécification artisanale, sont engénéral de type segmentaire, alors que les organisations métallurgiques intégrale-ment contrôlées par des forgerons se sont développées au sein de sociétés strati-fiées à structure étatique. Il faudrait déterminer à quels substrats sociopolitiquesont renvoyé ces « tendances » pour juger de leur extension et de leurs consé-quences dans l’histoire comparée des sociétés ouest-africaines.

Photo 84. Fours de métallurgistes dogon à Vol et Sege (© C. Desplagnes, 1906).

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La mutation technique au Yatenga

L’étude particulière des processus sociaux qui se sont développés autour de lamétallurgie au Yatenga permet de répondre à certaines de ces questions. Ce ter-rain est d’un double intérêt. Cette région minière et métallurgique d’impor-tance majeure est, depuis plus de trois siècles, sous le contrôle de forgeronsendogames pratiquant une forme de coexistence technique avec les agriculteurs-métallurgistes de régions voisines, fournisseurs d’acier pour des productionsvalorisées telles que sabres et instruments les plus tranchants (haches et hermi-nettes). Dans l’espace politique moose, le Yatenga est la seule région où s’estaccomplie une mutation sociale au terme de laquelle les producteurs de métalfurent contraints de choisir entre le métier métallurgique, en devenant des« forgerons » à part entière, et l’agriculture, en abandonnant toute activitémétallurgique. Cette transition, qui n’a probablement rien de très exceptionnelen Afrique de l’Ouest, pose particulièrement la question des limites techni-ques, sociales et symboliques dont dépend le statut de forgeron dans certainessociétés. La définition de limites est d’autant plus précise et consciente qu’ellemet en présence des groupes complémentaires, dont les anciennes relations ne

Photo 85. Anciens fours (bôn-daagha) au Yatenga (© B. Martinelli).

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sont pas effacées des mémoires lignagères. Devenir forgeron alors que l’on étaitmétallurgiste est un franchissement de seuil aussi important que devenir forge-ron alors qu’on était agriculteur ou guerrier. Le passage du statut de métallur-giste à celui de forgeron s’est accompli dans un climat de rupture sociale, si cen’est de déchirement, puisque son principal enjeu était le mariage endogame etl’ensemble des interdits qui l’accompagne. Les données de l’histoire oraleabondent et convergent sur ce point. Elles permettent de situer les principalesétapes d’une transition qui a commencé au XVIe siècle, sous le règne de NaabaWumtanângo, et qui s’est achevée sous le règne de Naaba Kângo (1757-1787)(Izard, 1980, 1983 et 1985). Ce dernier souverain joua un rôle décisif dansl’édification du royaume et la codification du statut des forgerons. Son règneest caractérisé par la constitution d’un État centralisé et d’une société stratifiée,la sécurisation des axes de commerce et l’accroissement des échanges avec lespays voisins, l’accélération de la sédentarisation agricole, toutes conditionsfavorables à l’intensification de la production métallurgique.

Durant la seconde moitié du XVIIIe siècle s’est accomplie, parallèlement à ceprocessus social, une mutation importante de la technique métallurgique. Lestémoins archéotechnologiques en fournissent les jalons. Les anciens fours étaientde type cellulaire à aération continue et à fosse. Ils donnaient des métaux enquantité limitée mais à forte proportion d’acier. Ils mettaient en œuvre une tech-nique voisine de celle qui a subsisté jusqu’à une période récente en Pays samoseptentrional. Ils sont appelés bôn-daase (au singulier : bôn-daagha), ce qui signi-fie « fours mâles ». À partir de la fin du XVIIIe siècle, s’est mis en place un nou-veau mode de réduction directe original à partir de l’invention d’un type de four.La séquence innovatrice a pu être reconstituée à partir de plusieurs témoinsmatériels archéologiques. Elle est attribuée à un groupe de forgerons d’une zonecirconscrite du Yatenga central. Du fait de son rôle dans l’histoire sociale et tech-nique de la région, ce groupe exerce des pouvoirs éminents sur l’ensemble desforgerons du Yatenga en ce qui concerne les droits d’installation d’atelier deforge. Les nouveaux fours ont la forme de colonnes hautes tronconiques oucylindriques plus ou moins cintrées ou galbées (photo 87). L’écoulement desscories est latéral et se fait par l’extérieur. L’étude comparative de ces fours meten évidence une tendance au surdimensionnement qui prend son sens dans uncontexte de production intensive. Ce four, appelé bônga (au pluriel : bômse), estconsidéré comme un « four femelle » avec tout le symbolisme de parturition affé-rant. Il est conçu pour traiter d’importantes quantités de minerai (environ1 tonne) à chaque opération. Il produit environ 150 kilos de loupes par opéra-tion. Les fours bômse ont une hauteur moyenne de plus de 5 mètres, bien quenombre d’entre eux atteignent 6,50 m.

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Au seuil de la métallurgie intensive 177

Le système technique de réduction des forgerons moose du Yatenga ne selimite pas à ce four de grande taille. Il comprend deux autres fours équipés desoufflets. Le plus petit est le fôn-doogho, qui permet de faire un traitementd’affinage pour épurer et carburer le fer du bônga par petites quantités, en vue

Photo 86. Fours contemporains (bônga) au Yatenga (© B. Martinelli).

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d’opérations déterminées de forge. Le plus imposant des fours à soufflets est lebwaagha, de forme tubulaire inclinée. Il est multifonctionnel mais, au Yatenga,il a surtout été utilisé pour produire des aciers à partir de minerais fer-manganèse(sidgha) extraits dans un unique site situé près d’Ouahigouya, le chef-lieu de laprovince. Ce dernier four est d’un type commun à l’ensemble des peuples ducentre et du sud du Burkina Faso (Bisa, Lobi, Dagara, Kasena) jusqu’au nord duGhana.

Ce système de réduction fractionnée avec plusieurs fours est la conséquenced’un choix de production massive initiale, puis d’affinage et de transformationpar étapes en fonction des exigences de la forge, du marché et des possibilités devente dans des aires locales, régionales et extrarégionales. Les loupes du bôngaétaient des composés hétérogènes ayant dissous le carbone en proportion varia-ble selon le temps et la zone de combustion dans le four. Les forgerons distin-guaient des types de fer commun — le fer mou ou « frais » (kutu masgha) et le fertrès mou ou « acide » (kutu misgu) — pour des matériaux peu carburés à des tem-pératures maximales de 900 à 1 000 °C. Cette hétérogénéité du produit impli-quait un tri mécanique et une réduction complémentaire d’affinage. Une partiede ce fer était directement forgée pour la production d’instruments aratoires oudomestiques. Il s’agissait de types de fer commun assez sensibles à l’oxydation. Ilspouvaient suffire pour des outils fréquemment renouvelés mais ils ne pouvaientêtre utilisés pour des armes de guerre et des outils agissant en percussion sur desmatières dures et résistantes. Le fer de la plus mauvaise qualité, qualifiéd’« acide » (kutu misgu) car rapidement oxydable en raison de sa très faible teneuren carbone, était aussi forgé. Dans le cadre de pratiques commerciales peu scru-puleuses, certains forgerons trouvaient un bénéfice à vendre ce fer sur des mar-chés éloignés à la faveur de leurs déplacements commerciaux. Ils connaissaientl’art de la contrefaçon. Dans le cas des haches et des herminettes, on pouvait for-ger toute la lame dans un métal dur obtenu au four bwaagha, mais il s’est avéréplus économique de souder un tranchant de fer dur sur un support (âme) de ferordinaire. Les forgerons, qui possédaient la technique d’élaboration des types defer dur (kutu kyênga ou kyeghênga), la délaissèrent lorsqu’ils purent s’approvision-ner en fer chez les métallurgistes samo nînsi (branche de l’ethnie samo), au suddu Yatenga. Bien que l’activité de production ait sensiblement diminué au débutdu XXe siècle, quelques-uns de ces fours fonctionnaient encore à la fin des années1950 dans les régions périphériques septentrionale et occidentale du Yatenga.C’est dans l’une de ces régions, à la frontière du Mali (figure 9), que j’ai effectuéplusieurs reconstitutions. D’après des observations du début du XXe siècle (rele-vées dans les archives d’administrateurs coloniaux d’avant 1914), les fours enactivité étaient au nombre de 1 000 à 1 500. Au rythme de 2 ou 3 réductions parsaison de production (février-avril), ils fournissaient donc, à cette époque derégression de la métallurgie, suffisamment de métal pour forger plus de1 000 tonnes de fer par an.

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L A M A R C H E R É D U C T R I C E E N C O M B U S T I O N L E N T E

La durée des opérations de réduction était remarquablement longue comparati-vement aux données qui ont été enregistrées pour d’autres régions d’Afrique del’Ouest. En fonction du volume des fours et du nombre de leurs ouvertures (de9 ou 11), les temps de réduction duraient de 3 à 7 jours. Les réductions de 7 jourssont attestées par des enquêtes menées dans plusieurs parties du Yatenga éloi-gnées les unes des autres afin de garantir la fiabilité de l’information. J’ai réaliséen 1988, dans la localité de Kâyn située sur la frontière avec le Mali,2 réductions : l’une de 3 jours (70 heures), l’autre de 4,5 jours (100 heures).Certaines loupes obtenues au terme de ces opérations ont été récupérées, soumi-ses à l’affinage, puis forgées par plusieurs forgerons. En ce qui concerne la duréedes reconstitutions, une précision doit être apportée. Les maîtres-forgerons del’opération avaient pratiqué leur dernière réduction au bônga en 1962, près de30 ans plus tôt. Ils avaient manifesté l’intention de réaliser un four à11 ouvertures et une réduction de 7 jours dont ils m’avaient expliqué le déroule-ment au cours de nombreux entretiens. La construction achevée, c’est en taillantles ouvertures qu’ils se rendirent compte que si le four avait la hauteur requise, il

Photo 87. Batterie de fours de forgerons moose au Yatenga, avec soldat donnantl’échelle (© J. Meniaud, Paris, É. Larose, 1912).

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n’avait pas le diamètre nécessaire à la base. Ils réalisèrent alors un four à9 ouvertures d’un volume supérieur à la moyenne. Les impératifs de durée de laréduction s’imposèrent ensuite en fonction des quantités de minerai et de com-bustible. Cette erreur d’estimation présenta l’avantage de pouvoir comparer lesrésultats de 2 opérations et d’en évaluer les résultats. Elles révélèrent une margede liberté et de décision dès la conception du four. Cette expérience conduit, engénéral, à relativiser les résultats obtenus en situation de reconstitution maisfournit de précieuses informations complémentaires pourvu qu’elles contribuentà une critique technique. Une reconstitution réalisée par des acteurs techniquesexpérimentés n’a rien d’artificiel mais elle fait intervenir les variables aléatoires dela mémoire dont il faut tenir compte pour l’interprétation.

Quelle que soit la durée de l’opération, le four bônga est chargé une seulefois, avant l’allumage. On n’ajoute ni minerai ni charbon de bois (seul combus-tible tiré de Prosopis africana ou, à défaut, de Boscia angustifolia, de Pterocarpuslucens ou d’Anogeissus leiocarpus). Les ouvertures sont obturées avant l’allumageet le restent jusqu’au matin du jour choisi pour l’évacuation des matériaux. Lesscories sont tout d’abord évacuées par un orifice d’où elles « urinent » (dûnleere)vers l’extérieur du four durant 6 à 8 heures. Les loupes de fer sont positionnéesderrière chaque ouverture, par où elles sont dégagées. Elles ont l’apparenced’éponges métalliques de 10 à 30 kilos selon l’ouverture. Dans de bonnes condi-tions techniques, 9 ou 11 loupes permettent d’obtenir de 150 à 200 kilos dematière métallique hétérogène. La matière finalement utilisable, constituée destrois qualités de fer déjà mentionnées, ne représente que de 30 à 60 % de lamatière récupérée. Cette différence du simple au double témoigne d’une impor-tante variation de compétence entre les forgerons. Au camp de brousse où se pra-tiquent les opérations de réduction, cette compétence s’exprime immédiatementpar vérification mécanique de la qualité du métal. Elle fait l’objet d’un jugementcollectif. Le choix technique se traduit par une tendance à ce que l’on pourraitappeler du « gigantisme » si l’on considère la hauteur qu’atteignaient certainsfours (photo 87). Il met en valeur une expérience des limites techniques au prixd’une perte des performances techniques. C’est un indicateur d’inachèvementdu processus innovant qui, si la période coloniale n’était venue le contrarier,aurait pu se poursuivre au cours du XXe siècle.

L’ensemble de ces indicateurs techniques singularise la métallurgie duYatenga par rapport à celle des régions voisines, et même de régions africainesplus éloignées. Elle se caractérise comme le choix d’une marche réductrice encombustion lente du fait de l’obturation des ouvertures pendant 90 % du tempsde réduction. C’est moins la taille, la forme ou la structure de leur constructionque ce processus de « combustion lente » que les forgerons considèrent commepertinente de leur identité technique. Ils sont relativement conscients que cescritères d’identité mettent l’accent sur la maîtrise des températures et le progrèsque représente selon eux la capacité à contenir des températures de plus en plus

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élevées pendant un temps prolongé dans une zone circonscrite de combustion. Ilest possible de s’interroger sur les raisons et la signification de ce « choix » tech-nique. En quel sens y a-t-il choix alors que l’ensemble des déterminants techni-ques est considéré comme particulièrement contraignant ? Lenteur et rapiditén’ont aucune signification en elles-mêmes. Les critères de conscience techniqueproviennent aussi bien de l’enquête orale sur la connaissance d’autres techniques,acquises au cours de voyages d’apprentissage (Martinelli, 1995a, 1996 et 1998)que des reconstitutions avec les enregistrements de la température, des matièreset des opérations. Ils mettent en évidence des concepts de seuil, de marge desécurité et de décision technique. L’hétérogénéité des zones et des phases de com-bustion dans le four peut être observée et interprétée en termes de gestion et dereprésentation, tant perceptive que cognitive, des rapports entre matière et feu.

L A C O N D U I T E D U P R O C E S S U S T H E R M I Q U E

Ce système de réduction par induction présente la particularité de n’exigeraucune intervention humaine durant 90 % du processus, entre l’allumage, tousorifices obturés, et l’évacuation des scories qui commence une demi-journéeavant l’ouverture générale du four. Pour comprendre ce qui se passe à l’intérieurd’un tel four dont les forgerons parlent de manière métaphorique (gestation,accouchement), tout en en maîtrisant les phases, il est nécessaire d’étayer le rai-sonnement hypothético-déductif par des mesures. Il s’agit de pesée et de prélève-ment des matériaux avant et après l’opération, ainsi que d’enregistrement destempératures dans les différentes parties du four durant la réduction. Cet enre-gistrement a été effectué afin de comparer les résultats de réductions de duréesdifférentes.

Les courbes de température ont été établies au moyen de sondes thermiques(platine-rodium) d’une précision allant de 400 à 1 400 °C. L’une d’elles étaitplacée à la base du four, au-dessus de l’orifice d’évacuation des scories, les autresà 1,5 m, 2,5 m et 3,5 m de hauteur (figure 12). Cette disposition a permis derelever un double principe de chauffage et de combustion déterminant du pointde vue de la conduite du feu.

La diffusion de monoxyde de carbone à une température supérieure à600 °C dans la partie haute du four durant une période de 60 heures est essen-tielle à ce processus de réduction avant que le minerai descende dans la zone decombustion. L’oxyde ferreux serait ainsi préréduit à une température assez élevée.Il ramollirait et dissocierait le minerai. L’état fissuré de morceaux de minerai« non transformé » récupérés en fin du processus semble le confirmer. Il s’agitaussi de réguler la propagation des gaz en évitant tout effondrement anarchiquede la charge. Ces conclusions semblent rejoindre les observations de Leroy(Leroy et al., 2000, p. 37-51) à partir d’une étude expérimentale de fours et deprocessus de réduction utilisés avec des minerais lorrains.

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182B

runo Martinelli

0

200

400

600

800

1 000

1 200

1 400

1 600

1 4 7 10 13 16 19 22 25 28 31 34 37 40 43 46 49 52 55 58 61 64 67 70 73 76 79 82 85 88 91

Sonde 1 – base du four

Sonde 2 – 1,5 m

Sonde 3 – 2,5 m

Sonde 4 – 3,5 m

heures

°C

Figure 12. Yatenga, Kâyn ; réductions com

parées 70/100 h. Courbes de tem

pérature

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Au seuil de la métallurgie intensive 183

Les températures relevées dans la zone focale de combustion (entre le fond et1,5 m de haut) indiquent qu’une réduction prolongée des oxydes de fer s’y réa-lise à une température stabilisée, après une vingtaine d’heures de combustion,entre 800 et 950 °C. Cette phase dure de 50 à 70 heures (toutes ouvertures bou-chées). La comparaison entre les opérations montre qu’un gain d’environ100 °C, en température moyenne, semble obtenu en allongeant de 30 % letemps de réduction. Cette observation rejoint celles qui ont été faites, pourd’autres régions, sur des fours à induction de conception différente, telles quecelles de Goucher (1984) et de Barros (1985) en Pays bassar, au Togo.

En suivant les courbes de température, le déroulement du processus deréduction peut être décomposé en trois phases :• une montée rapide de la température durant 20 heures dans la partie infé-

rieure avec un premier pic qui se répercute dans toutes les parties du four.Celui-ci est un indicateur objectif de la fin de la phase du « coup de feu » ini-tial et du déplacement des zones de combustion. Il marque le palier à partirduquel la température se stabilise dans chaque zone ;

• une évolution ascendante lente de la température moyenne dans les différen-tes parties du four pour produire l’effet de chauffage (de 600 à 800 °C) enatmosphère carbonée. Les couches de minerai descendent lentement, soumi-ses à une combustion contrôlée et à une température constante (de 800 à1 000 °C) durant plus de 50 heures ;

• une brutale augmentation de la température durant les 10 dernières heures,dès le début de l’évacuation des scories par un petit orifice inférieur appelédûnleere (l’endroit par lequel le four « urine »). La température moyennes’élève immédiatement à plus de 1 250 °C dans la partie inférieure du four.Lors de l’une des reconstitutions, la sonde inférieure a été retirée, endomma-gée, à une température de 1 450 °C, 5 heures après le début de l’évacuationdes scories. Les tuyaux sont débouchés par intermittence pour observer lacouleur de combustion. Les forgerons interviennent mécaniquement avecdes bâtons, durant plusieurs heures, pour activer le flux de scories sortant parces tuyaux. La température se stabilise alors à plus de 1 200 °C dans la zonefocale durant les 6 dernières heures, jusqu’au dégagement des loupes.

L E B I L A N C O M P A R A T I F D E S M A T I È R E S

Après une première réduction de 70 heures, près de 40 % du minerai concasséqui avait été chargé est récupéré à l’état non réduit. En mettant ce résultat enrelation avec le volume du four dont on a dit plus haut qu’il était un compromisentre un four à 9 ouvertures et un four à 11 ouvertures, il a été décidé de pra-tiquer une seconde réduction en se fiant à nouveau, en ce qui concerne ladurée, au savoir des forgerons. Cette seconde opération a duré 100 heures. Lebilan comparatif des matières permet de mettre en évidence plusieurs faits

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(tableau 14). L’allongement de 30 heures du temps de réduction a permis de réa-liser un gain de rendement de 6,17 % et d’atteindre ainsi un taux de 22 % dupoids de métal par rapport au minerai initialement chargé, déduction faite duminerai non réduit. Par ailleurs, la quantité de minerai non transformé a étédiminuée de moitié, passant de 328 à 158 kilos. Tout aussi significative est l’aug-mentation importante des scories vitrifiées (nwâre) évacuées hors du four. Lasuperposition des courbes met en évidence le fait que la différence pertinenten’était pas l’augmentation des températures mais l’allongement de la secondephase du processus au cours de laquelle se produisent les effets de chauffage et decombustion. La comparaison entre ces deux opérations confère toute sa perti-nence au concept empirique et vernaculaire de combustion lente. L’allongementde la durée de réduction a probablement recoupé (au moins partiellement) unephase cruciale d’un processus dont la préoccupation essentielle des forgerons estde déterminer le terme.

Tableau 14. Yatenga. Reconstitutions réalisées à Kâyn. Bilan comparatif des matières

Valeur +/–

Durée totale (jours) 3,5 4,5Durée combustion (heures) 70 100

Matériaux

Charbon :– total (kg) 910,00 925,00 15,00– nombre paniers (paniers) 91,00 93,00 2,00– couche 1 (kg) 420,00 412,00 – 8,00– couche 2 (kg) 170,00 192,00 22,00– couche 3 (kg) 160,00 170,00 10,00– couche 4 (kg) 160,00 180,00 20,00– reste\fin réduction (kg) 176,00 36,00 – 140,00– consommé (kg) 734,00 889,00 155,00

Minerai :– brut (kg) 958,50 973,00 14,50– concassage 1 (kg) 910,00 903,00 – 7,00– concassage 2 (kg) 837,00 846,00 9,00– nombre paniers (paniers) 131,00 133,00 2,00– couche 1 (kg) 422,10 412,00 – 10,10– couche 2 (kg) 100,80 125,00 24,20– couche 3 (kg) 314,10 309,00 – 5,10– total charge (kg) 837,00 846,00 9,00Paille non tassée (m3) 3,00 3,00

Résultats de la réduction

Minerai non transformé (kg) 328,00 158,00 – 170Loupe (fer non raffiné) :

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J’ai envisagé l’hypothèse selon laquelle, en raison de l’obturation des ouver-tures du four, une réduction prolongée et poussée des oxydes de fer, favorisant ladiffusion du carbone à l’intérieur du fer, rendrait possible une production directed’acier. Elle se révèle ne pas être en adéquation avec les résultats obtenus au cours

Valeur +/–

– ouverture 1 (kg) 23,20 27,20 4,00– ouverture 2 (kg) 8,20 21,30 13,10– ouverture 3 (kg) 6,10 13,50 7,40– ouverture 4 (kg) 6,10 12,10 6,00– ouverture 5 (kg) 3,10 9,60 6,50– ouverture 6 (kg) 6,80 18,30 11,50– ouverture 7 (kg) 7,30 18,60 11,30– ouverture 8 (kg) 18,50 29,10 10,60– ouverture 9 (kg) 0,80 1,00 0,20– total (kg) 80,10 150,70 70,60

Scories :– vitrifiée, nwâre (kg) 90,00 175,00 85,00– blocs, rângo (kg) 70,90 92,00 21,10– fond four (kg) 34,00 65,00 31,00– total (kg) 194,90 332,00 137,10

Récapitulations et quotients*

M, total charge (kg) 837,00 846,00 9,00MNT (kg) 328,00 158,00 – 170,00M2 > M-MNT transformé (kg) 509,00 688,00 179,00C consommé (kg) 734,00 889,00 155,00S totales (kg) 194,90 332,00 137,10L totales (kg) 80,10 150,70 70,60

Restes (cendres, gaz, etc.) calculés par déduction

M2-L-S total (kg) 234,00 205,30 – 28,70M2-L-S (%) 27,96 24,27 – 3,69

RatiosRéduction +/–

70 h 100 h 30 h

M/C 1,14 0,95 – 0,19M2/C 0,69 0,77 0,08M/S 4,29 2,55 – 1,75M2/S 2,61 2,07 – 0,54C/S 3,77 2,68 – 1,09M/L 10,45 5,61 – 4,84M2/L 6,35 4,57 – 1,79L/M 0,10 0,18 0,08

* M : minerai ; MNT : minerai non transformé ; M2 : minerai concassage 2 ; C :charbon ; S : scories ; L : loupes.

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de ces reconstitutions (tableau 14). Cela ne veut pas dire qu’elle ne l’est pas parrapport à ce type de technique si l’on se réfère à certains témoignages de forge-rons. Bien qu’il y ait un peu d’acier (fer « dur » — kutu kyênga) au centre des plusgros blocs, sa proportion reste peu importante. La combustion lente sembleavoir d’autres objectifs. Interrogeons les forgerons. La combustion lente estnécessaire, selon eux, pour plusieurs raisons :• les quantités de minerai à réduire et de combustible à brûler ;• la résistance de l’édifice. Les parois du four ne sont pas conçues pour résister

à des températures prolongées supérieures 1 000 °C. Les forgerons affirmentque si les ouvertures sont obturées durant 85 % du temps de réduction, c’estpour que le four « ne se fende pas ». Maints récits se rapportent à des forge-rons inexpérimentés (Martinelli, 1996) dont les fours se sont brisés. Il n’estpas envisagé de modifier la technique de construction, par exemple en ren-forçant les parois avec des blocs de scories et des soutènements d’argilecomme c’est le cas de certains fours dogon et samo connus des forgerons duYatenga ;

• le contrôle de la dynamique des matériaux et des gaz durant la réduction. Lesmontées en température de cuisson se traduisent par des modifications derépartition des matériaux dans le four. Il peut se produire des effondrementsde la charge créant des brèches à travers le minerai et le charbon qui entraî-nent l’échappement direct au lieu d’une diffusion prolongée du carbone.Une combustion prolongée permet une descente régulière de la charge decombustible et une certaine homogénéisation de l’action du carbone surl’oxyde de fer ;

• la maîtrise des températures. Le progrès technique est représenté, pour lesforgerons, par la capacité de contrôler la montée de la température et decontenir les températures les plus élevées dans une zone focale de cuisson.L’un des objectifs de cette technique est de limiter l’hétérogénéité des zoneset des phases de combustion, par conséquent, celle des métaux finalementproduits ;

• les proportions croissantes de fer « dur » (kutu kyênga) et de fer commun, dit« frais » (kutu masgha), directement utilisables à la forge par rapport à cellesde fer « acide » (kutu misgu). Pour les forgerons, les trois qualités de fer cor-respondent à des durées de réduction variables à la base du four, le fer « dur »étant associé aux durées les plus longues, le fer « acide » aux plus courtesdurant la phase terminale de l’ouverture du four.

La transmission et la maîtrise du savoir métallurgique

Les représentations de la combustion lente qu’énoncent les forgerons sont préci-ses et variées. Elles évoquent une gestion normative des marges de sécurité quidoivent être préservées à chaque franchissement de seuils repérable par identi-

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fication perceptive (auditive, visuelle, olfactive) ou cognitive. Pour connaître etcontrôler la technique de ces fours à induction, observer ne suffit pas. Le fourest un milieu clos et opaque. La connaissance de la structure du four renvoie àcelle de son fonctionnement. Cet ensemble de techniques exige la maîtrise duprocessus physico-chimique de transformation des minerais et la capacitéd’anticiper des processus irréversibles. Les interventions correctrices sont trèslimitées, ce qui fait dire aux forgerons qu’une fois le four chargé, « tout dépendde dieu Wênde ».

La maîtrise cognitive de la chaîne, qui s’achève par la réduction des minerais,est longue à acquérir. Au Yatenga, on devait apprendre à forger avant de com-mencer l’apprentissage de la réduction, considéré comme l’aboutissement de latransmission du métier (Martinelli, 1996). Ainsi se systématisaient des savoirscompartimentés. L’apprentissage du travail au four bônga s’étendait sur unegrande partie de la vie professionnelle. Les aînés des lignages interposaient dessecrets en des points stratégiques du processus opératoire. Les normes d’entraidelignagère et communautaire, d’une part, et d’assistance nécessaire des anciens,d’autre part, conditionnaient la transmission des savoirs. Dans des unités ligna-gères plurigénérationnelles, des forgerons de 30 à 40 ans pouvaient être canton-nés aux tâches subalternes d’extraction du minerai et de fabrication du charbonde bois. Ils n’assistaient qu’en tant qu’observateurs ou manœuvres aux opérationsclefs de la réduction du minerai. Certains savoirs (aussi bien techniques que sym-boliques) relatifs au processus de combustion lente étaient exclusivement trans-mis sur un mode initiatique entre aînés. Les jeunes forgerons étaient ainsiconditionnés à considérer l’élaboration initiale du fer comme un processus dehaute complexité, exigeant le respect de règles et normes particulièrement strictes.

Le choix technique, le choix économique

Le système technique des forgerons du Yatenga est caractérisé par la volonté deproduire des excédents et de livrer les surplus dans d’autres régions du Paysmoose ainsi que dans les pays voisins, jusqu’à la frontière du Ghana. Le choix dela combustion lente par ces forgerons a tendu, dès la phase de recherche innova-trice et durant tout le XIXe siècle, à répondre à un choix économique, celui d’unsaut quantitatif de la production permettant d’insérer la métallurgie dans leséchanges et le commerce de longue distance. La plupart des familles de forgeronsse sont organisées pour permettre à des groupes d’hommes jeunes d’effectuer desdéplacements avec des caravanes d’ânes et de bœufs portant les charges, afind’aller vendre, dès la fin de la saison sèche, au moment des travaux agricoles dansl’Est et le Sud-Est, des lames aux types adaptés à la clientèle de ces régions (Oua-gadougou, Pwitenga, Tenkodogo et Pays moose et gurûnsi méridionaux). Cer-tains revenaient directement au Yatenga après avoir accumulé des cauris ou

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acheté des produits alimentaires et manufacturés, mais beaucoup d’autres conti-nuaient avec leurs ânes en direction du Ghana ; ils s’inséraient dans les réseaux etcycles d’échanges des commerçants moose. Ils revenaient avec de la kola quel-ques mois plus tard. Toujours organisés en caravanes, certains continuaient, pourvendre cette kola, jusqu’à Mopti et Tombouctou et ne revenaient qu’ensuite auYatenga, chargés de poissons séchés et fumés. Les produits de la forge fournis-saient, pour ceux qui étaient engagés dans les échanges de longue distance, lecapital initial du cycle commercial.

Au Yatenga, la mainmise des forgerons sur la chaîne opératoire du fer est unprocessus indissociable de la stratification et de la dynamique externe de lasociété moose. Ayant désinvesti les lieux et les fonctions du pouvoir, au prix d’unrégime contraignant d’endogamie, les forgerons se sont orientés vers une pro-duction et une commercialisation à grande échelle. Ils se sont trouvés de plus enplus mêlés aux commerçants, sur les routes caravanières qui mettaient le nord dela boucle du Niger en communication avec les pays de la côte de Guinée. Ilsconnurent, jusqu’au début du XXe siècle, un certain enrichissement, tout encontinuant de distinguer les échanges avec les agriculteurs locaux, fournisseursde denrées alimentaires, régis par une logique de troc et des échanges lointainsrégis par les lois du mercantilisme.

Le choix de la combustion lente est indissociable d’une transition identitairequi a fait de ces anciens producteurs polyvalents, agriculteurs et métallurgistes,des « forgerons » selon les critères imposés par le pouvoir des souverains duYatenga. La mutation technologique a consacré et concrétisé ce statut d’« artisans »à part entière. La soumission des métallurgistes au pouvoir puis leur consente-ment à ce régime d’enclosure sociale ont eu pour compensation un monopoleaccru sur la production du fer dans un contexte favorable à l’expansion démogra-phique, spatiale et sociale. Par contraste, les agriculteurs-métallurgistes des paysvoisins, samo et dogon, ont conservé une activité essentiellement sédentaire etlocale. Les acheteurs (forgerons et agriculteurs) ont continué à venir à eux pours’approvisionner en fer « dur ». Tout autre étaient l’espace et le monde des forge-rons. Leur existence comme leur activité étaient, dès l’apprentissage, caractériséespar une grande mobilité économique et migratoire. Ils reconquéraient ainsi uneliberté. Le dynamisme de cette métallurgie, marqué par l’invention de foursd’une capacité exceptionnelle pour l’ensemble de l’Afrique subsaharienne, s’estfondé sur une intense circulation des savoirs, des individus et des produits. Cettemobilité exigeait l’ouverture et la sécurité des communications. C’était le fonde-ment du compromis entre les souverains et les métallurgistes du Yatenga. Lescausalités sociales de cette mutation sont donc nombreuses et corrélées : le déve-loppement général de l’agriculture, le renforcement du pouvoir politique au cen-tre comme à la périphérie des territoires administrés, la sécurisation des voies decirculation et des marchés, la dynamique sociale sur le plan aussi bien local queglobal.

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Bilan des datations des vestiges anciensde la sidérurgie en Afrique

L’enseignement qui s’en dégage

Louise-Marie Maes-Diop

À l’encontre de « la théorie carthaginoise », en 1968, nous terminions l’articleintitulé « Métallurgie traditionnelle et âge du fer en Afrique » par la phrase suivante :« S’il semble donc prouvé aujourd’hui que la métallurgie traditionnelle du fer enAfrique était très ancienne, largement répandue et autochtone, il reste, par contre,à déterminer les foyers d’origine de cette métallurgie, leur datation exacte et leshypothétiques routes du fer à travers le continent » (Maes-Diop, 1968).

Depuis une trentaine d’années, plusieurs dates particulièrement importantesont été acquises, qui permettent de préciser très notablement l’ancienneté de lamétallurgie du fer en Afrique noire. Le point de nos connaissances sur le débutde l’âge du fer en Afrique et dans le monde est présenté dans le tableau 15.

Tableau 15. Ordre chronologique et localisation des plus anciens vestiges de minerai réduit dans le monde

Dates Localisation Nature des échantillons

– 2900 –2300 Niger oriental Objets divers– 2565 –2440 Égypte Morceau de minerai (houe)– 2520 – 1675 Niger oriental Objets divers– 2450 – 2100 Mésopotamie et Anatolie Lames de poignards et fragments– 2345 – 2181 Égypte Bloc de minerai réduit– 1991 – 1786 Basse Nubie égyptienne

(Moyen Empire)Fer de lance

– 1870 – 1130– 1810 – 1375

Niger oriental Objets divers

– 1800 – 1750 Chypre Perle grossière– 1400 – 1200 Région du lac Victoria-Nyanza– 1300 – 800 CamerounVers – 1100 ChineVers – 950 Grèce, Nigéria (peut-être

beaucoup plus tôt)

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190 Louise-Marie Maes-Diop

J. P. Mohen (1990 et 2001) signale également un instrument en fer (ne com-portant pas de pourcentage de nickel) découvert dans une tombe datée de5000 av. J.-C. à Samarra, en Iraq, au sujet duquel on s’interroge. Par ailleurs, lalame du poignard de Tell Asmar (en Mésopotamie) a disparu par oxydation ; cequi fut analysé ce sont quelques parcelles adhérant au manche, c’est-à-dire desparcelles d’oxyde provenant de la décomposition de la lame. Dans ce cas, la cons-tatation de l’absence de nickel n’est guère probante. Remarquons que les datesobtenues à Égaro permettent de considérer comme possible l’origine ouest-afri-caine des quelques échantillons de minerai de fer trouvés en Égypte et datant del’Ancien Empire (2565-2181 av. J.-C.), d’autant qu’en Mésopotamie et en Ana-tolie, les dates sont comprises entre 2450 et 2100 av. J.-C., sauf à confirmer cellede Samarra. Notons que les vestiges de fer sont généralement rouillés.

Après les dates capitales du Niger oriental (Quéchon et al., 1992) et cellesdes régions proches des rives ouest et sud du lac Victoria-Nyanza (Van Grunder-beek, 1982), des dates significatives ont été obtenues en 1998-1999 : au Came-roun, pour le site d’Oliga (zone nord de Yaoundé), une série de dates s’échelonnantde 1300 av. J.-C. à 567 apr. J.-C. (Delneuf et al., 1999, chap. XIV ; Essomba,1998). En Centrafrique, dans la région mégalithique de Bouar sur le site de Gba-biri (site 77), les dates corrigées tombent vers 800 av. J.-C. (Zangato, 1995,1999). Ainsi l’ancienneté et l’endogénéité de la paléosidérurgie africaine sont-elles maintenant indiscutables et indiscutées. La carte schématique ci-après(figure 13) résume la répartition des sites du fer antérieurs au VIe siècle av. J.-C.

La civilisation de Nok-Taruga (Nigéria, au nord de la basse Bénoué) estcaractérisée principalement par ses figurines en terre cuite associées à une indus-trie du fer ; les dates au carbone 14 s’échelonnent de – 3500 à + 200. En fait,faute de fouilles assez nombreuses et systématiques, il n’existe que peu de datespour la région de Nok. Depuis 40 ans, les deux dates les plus anciennes, 3500 et2000 av. J.-C., sont jugées inacceptables et ce, sans justification valable. Actuel-lement, les dates généralement admises pour la civilisation de Nok ne remontentpas au-delà du IXe ou Xe siècle av. J.-C. L’ancienneté du fer dans le massif de Ter-mit (elle pourrait dépasser 2500 av. J.-C.) oblige à reconsidérer cette question.De plus, Aremu fait état, dans sa contribution, d’objets en fer trouvés à DustenKongba (État du Plateau, au nord de la Bénoué), dans une couche datée de2780 ± 100 av. J.-C. On ne saurait trop insister sur la priorité qu’il faudraitaccorder à cette région comme lieu de fouilles approfondies, d’autant que dans

Dates Localisation Nature des échantillons

– 903 – 796 Centrafrique– 713 Napata (Nubie)VIIe siècle Gabon, monde carthaginois,

IndeVIe siècle Méroé

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Bilan des datations des vestiges anciens de la sidérurgie en Afrique 191

le Niger oriental, les objets en fer sont plus anciens que les vestiges de fourneaux(voir plus haut la contribution d’H. Bocoum).

En Zambie, le fer est présent au moins au début de l’ère chrétienne. En Afri-que du Sud (rive méridionale du Limpopo), la métallurgie du fer est attestée auIIIe siècle de notre ère.

La présence même de cette industrie du fer qui se développe, en Afrique sub-saharienne, parallèlement à celle de la pierre et des autres métaux (cuivre, or,étain, bronze…) implique une population relativement nombreuse. Le com-merce existait déjà en Afrique noire à cette haute époque : « Un certain nombred’objets trouvés en fouilles montrent que, dès l’âge du fer ancien, il existait devastes réseaux d’échange » (Van Noten, 1981). Le même auteur observe que cecommerce devait être « principalement limité » aux zones proches des grandsfleuves car les sites éloignés des axes fluviaux ou de la région interlacustre four-nissent fort peu d’objets importés.

Ces réseaux d’échanges étendus existaient au troisième millénaire av. J.-C.(rappelons sur ce point les quatre expéditions conduites par l’Égyptien Herkoufau XXIVe siècle av. J.-C.), ce qui prouve la possibilité d’un commerce du fer entreles différentes régions de l’Afrique. Les modes de désignation du fer sont appa-rentés dans les langues soudanaises et bantu et en égyptien ancien1. Le fer a puarriver en Égypte à partir du Soudan occidental et central par l’Ennedi où la pré-sence ancienne de lances a été remarquée par Huard (1964).

Seule la multiplication des fouilles et des datations permettra d’en savoirplus, quoique la vitesse de disparition du fer sous les climats chauds et humidesempêche probablement de découvrir exactement ce qu’il en a été dans bien descas.

En conclusion, il apparaît que la technique de réduction du minerai de fer aété inventée en Afrique noire dès le milieu du troisième millénaire environ, c’est-à-dire en même temps qu’en Asie occidentale et peut-être même avant. Il sembleque ces deux foyers d’invention aient été indépendants. Mais ce n’est pas absolu-ment certain. À noter que ni l’Égypte ni la Mésopotamie ne possédaient deminerai de fer sur leur propre territoire. Mais, connaissant déjà la fonte d’autresmétaux, elles pouvaient faire venir le minerai. Toutefois, le résultat des fouilles etdes datations laisse plutôt supposer que la sidérurgie, dans l’histoire de l’huma-nité, est née d’une part en Afrique occidentale et d’autre part en Anatolie.Cependant, d’autres régions nous réservent peut-être des surprises.

Des recherches systématiques devraient être effectuées non seulement dans larégion de Nok, et dans l’espace compris entre Nok et le massif de Termit, maisaussi au Tchad (à Korotoro et dans la région de l’Ennedi) ainsi que dans les oasisqui le relient à l’Égypte (Nukheila/Merga, Bir Abu Husein, Selima, Kharga,

1. Alors qu’au contraire, la racine commune du mot fer dans les langues sémitiques esttrès différente (Lhote, 1952).

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192 Louise-Marie Maes-Diop

Nil

Niger

Chari

Sénégal

Congo

OCÉAN

ATLANTIQUE

OCÉAN

INDIEN

Équateur

Tropique du Capricorne

Tropique du Cancer

Orange

Zambèze

BuhenNapata

Méroé

Giseh

Termit

Nok

GbabiriTaruga

Egaro

Tigidit

Carthage

Oliga

Katuruka

MubugaOtoumbi

AmarnaAbydos

Thèbes

1 000 km

Egaro, Niger oriental -2900/2300, -2520/1675(G. Quéchon & al. 1992)

Nok, Nigeria -925/+70 (A. Fagg 1972)

Giseh, Égypte -2700, (C. A. Diop 1973)-2565/2440 (J. P. Mohen 1990)Abydos, Égypte -2345/2181 (J. P. Mohen 1990)

IIIe millénaire avant J.-C. Xe siècle avant J.-C.

Oliga,Cameroun -1256/500(J. M. Essomba 1999)Taruga, Nigeria -880/400(R. Vernet 1993)Gbabiri, Rép. centrafricaine -903/796(E. Zangato 1999)

IXe siècle avant J.-C.

Napata, Soudan, fin VIIIe siècle,Pianthy-713(J. P. Mohen 1990, 1996)

Carthage, Tunisie (R. Niemeyer 1952)Otoumbi, Gabon (R. Oslisly & al. 1992)

Tigidit, Niger (D. Grébénart 1988)

VIIIe siècle avant J.-C.

VIIe siècle avant J.-C.

Méroé, Soudan (P.L. Shinnie & al. 1982)VIe siècle avant J.-C.

Buhen, Nubie Égyptienne -1991/1786?(J. P. Mohen 1990, 1996)Termit, Niger oriental -1870/1130(G. Quéchon & al. 1992) Amarna, Thèbes, Égypte -XIVe siècle18e/19e dynasties (C. A. Diop 1973, J. P. Mohen 1996)Mubuga, Burundi -1230/1210,Katuruka, Tanzanie -1470/1030(M. Cl. Van Grunderbeek)Oliga, Cameroun -1300/800(J. M. Essomba 1999)

IIe millénaire avant J.-C.

0

Métallurgie africaine du fer, du IIIe millénaire au Ve siècle avant J.-C.Sites connus

Figure 13. La métallurgie africaine du fer du IIIe millénaire au Ve siècle av. J.-C., pourles sites connus

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Bilan des datations des vestiges anciens de la sidérurgie en Afrique 193

Dakhla, Farafra), autour du lac Victoria-Nyanza et entre Nok et le Sine-Saloum(Sénégal). Ajoutons que les mines de Télénugar, au Tchad, attendent d’êtredatées ainsi que l’apparition du fer dans les couches postérieures à 2000 av. J.-C.du Nachikoufien (Zambie).

Il serait souhaitable que les fondations et organismes à vocation culturellefavorisent directement les fouilles et les datations ainsi que l’insertion, dans lesmanuels scolaires et universitaires, des nouvelles données qui modifient considé-rablement la vision erronée — encore actuellement très répandue — tant dupassé de l’Afrique que de la contribution de ce continent au développementtechnique et culturel de l’humanité.

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 217

Liste des auteurs

David A. AremuUniversité d’IbadanDepartment of Archaeology and AnthropologyIbadan, Oyo State, Nigéria

Isaac Adeagbo AkinjogbinUniversité Obafemi Awolowo, Ile-IfeIle Road, Ile Ife, Osun State, Nigéria

Hamady BocoumDirecteur du Patrimoine de la République du SénégalMinistère de la culture, avenue Léopold Sédar Senghor, DakarUniversité Cheikh-Anta-Diop, BP 206, Dakar, Sénégal

Joseph-Marie EssombaUniversité de Yaoundé-IDépartement d’histoire, arts et archéologieBP 755, Yaoundé, Cameroun

Philippe FluzinDirecteur de l’UMR 5060 CNRSLaboratoire de métallurgies et culturesUniversité de technologie de Belfort-Montbéliard, 90010 Belfort Cedex, France

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218 Annexes

Joseph Fazing JemkurCentre for Nigerian Cultural StudiesAhmadou Bello UniversityZaria, Kaduna State, Nigéria

Louise-Marie Maes-DiopGéographe et historienne, ParisAssociation « Khepera » BP 11, 91192 Gif-sur-Yvette, France

Pierre de MaretUniversité libre de Bruxelles44, avenue Jeanne, 1050 Bruxelles, BelgiqueUniversité Léopold-Sédar-Senghor d’Alexandrie1, place Ahmed Orabi El Mancheya, BP 21111, 415 Alexandrie, Égypte

Bruno MartinelliMaison méditerranéenne des sciences de l’homme5, rue du Château de l’Horloge, 13024 Aix-en-Provence, France

Edwin Eme OkaforDepartment of ArchaeologyUniversity of Nigeria,University Road, Nsukka, Enugu, Nigéria

Alain PersonLaboratoire de recherches sur l’AfriqueMaison René-Ginouvès, CNRS-UMR 7041allée de l’Université, 92023 Nanterre Cedex, FranceUniversité Pierre et Marie CurieLaboratoire de géologie des bassins sédimentaires75252 Paris Cedex 05, France

Gérard QuéchonLaboratoire de recherches sur l’AfriqueMaison René-Ginouvès, CNRS-UMR 7041allée de l’Université, 92023 Nanterre Cedex, France

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 219

Consultation internationale de spécialistes (Maputo, 10-13 décembre 1991)

Extraits du Rapport

À l’invitation de la Commission nationale du Mozambique pour l’UNESCO,s’est tenue à Maputo (Mozambique) du 10 au 13 décembre 1991 une réunioninternationale consultative de spécialistes sur le lancement du projet des Routesdu fer en Afrique.

I Recommandations issues de la réunion en vue de l’étudede faisabilité

Les spécialistes recommandent :

• de dégager deux objectifs principaux : l’évaluation du rôle du fer dans le déve-loppement en Afrique et la construction d’une image positive de l’Afrique àtravers ce projet ;

• de créer une banque de données reliée à des systèmes similaires dans le mondesur le thème du fer en Afrique ;

• d’établir une bibliographie annotée portant sur les disciplines académiques(archéologie, histoire, métallurgie, anthropologie, sociologie, développement,environnement, géologie, etc.) ;

• de faire un inventaire des thèses non publiées en rapport avec le sujet du fer enAfrique ;

• d’établir des liens avec les entreprises du fer en Afrique pour solliciter leurappui financier pour les projets de recherche sur le terrain ;

• de définir des aires culturelles et de mettre en valeur les similitudes en se réfé-rant à la tradition orale ;

• d’étudier le lexique du fer dans les langues africaines ;

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220 Annexes

• de faire une étude comparée des coûts et de la rentabilité entre les techniquesmodernes importées et la réhabilitation des techniques anciennes de fabrica-tion du fer pour l’artisanat ;

• de réaliser des publications (livres d’histoire, bandes dessinées et livres pourenfants) ;

• de classer le monument Casa dos Mabyaias (La Maison des Mabyaias) commepatrimoine du Mozambique ; réalisé par le maître-sculpteur Malangatana,essentiellement à partir du fer comme matériau de sculpture, il symbolise plei-nement la place et les objectifs du projet des Routes du fer en Afrique ;

• d’adopter ce monument comme logo du projet des Routes du fer en Afrique ;

• de réaliser toutes opérations techniques destinées à la préservation de cemonument menacé à terme par la rouille ;

• de faire procéder à des études sur les thèmes suivants :- le fer dans la tradition orale,- le fer dans les échanges matrimoniaux,- le fer et la mythologie,- le fer et la musique,- le statut social du forgeron,- le fer et le pouvoir,- le fer comme monnaie d’échange,- le fer dans le développement de l’agriculture,- le fer et la technologie,- le fer et le développement industriel : la rentabilisation des industries du fer

en Afrique,- l’histoire du chemin de fer en Afrique,- les premières voitures en Afrique,- le fer et l’environnement,- le fer et la santé publique,- le fer dans les musées,- la répartition géographique du fer en Afrique,- les minerais de fer,- le fer dans la vie quotidienne,- le fer et l’expansion bantu,- le fer et l’architecture,- l’industrie du fer et l’intégration régionale.

Ces recommandations ne sont pas limitatives et s’ajoutent à celles déjà con-tenues dans le document d’avant projet.

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Annexes 221

II Communications à caractère scientifique et techniqueLes spécialistes ont entendu et discuté 13 (treize) communications portant

sur des thèmes spécifiques liés à la thématique du fer. Les communications(Appendice III) ont permis de découvrir la richesse et la diversité des travaux derecherche déjà réalisés sur le thème commun du fer dans plusieurs régionsafricaines.

Appendice I

Ordre du jour

1. Ouverture de la réunion

2. Élection du bureau de la réunion

3. Adoption de l’ordre du jour

4. Réflexion sur la problématique du fer en Afrique

5. Histoire et anthropologie du fer (histoire, culture, philosophie, religion etdéveloppement)- histoire du fer en Afrique : état de la recherche, problèmes et perspectives ;- l’homme et le métal : mythes, traditions et religions ;- les artisans du fer : leurs modes de vie, confréries, statut social ;- le fer dans la vie : alimentation, pharmacopée et thérapies traditionnelles.

6. Technologies et industries du fer- les techniques du travail du fer en Afrique ;- la métallurgie et les industries du fer en Afrique.

7. Fer, patrimoine culturel, environnement- archéologie, géologie et géographie des minerais de fer en Afrique ;- exploitation des mines de fer et protection de l’environnement ;- le fer dans les ouvrages de génie civil (monuments, bâtiments, ponts) élé-

ments du patrimoine culturel.

8. Examen du projet de document des routes du fer en Afrique (CNUM/RF/02/91/Rev.1)

9. Mécanisme de la mise en œuvre et coordination du projet des routes du feren Afrique

10. Approbation du rapport final et recommandations

11. Clôture de la réunion

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222 Annexes

Appendice II

Liste des participants

BACCAR, Mounira : Secteur de la culture, UNESCO

CHAMBAL, Frederico Jeremias (Mozambique) : Instituto Nacional de Geologia,Dep. Laboratorio Maputo, Mozambique

FAYE, Safi (Sénégal) : Ethnologue, Réalisateur, Dakar, Sénégal

JOSÉ, Alexandrion (Mozambique) : Universidade Eduardo Mondlane – Centrode Estudos Africanos, Maputo, Mozambique

KARAYENGA, Athanase (Burundi) : Directeur général de Boneica (Société decommunication multimédia), Paris

KIPRÉ, Pierre (Côte d’Ivoire) : École Normale Supérieure, Direction de la recher-che et de la coopération scientifique, Abidjan, Côte d’Ivoire

KOSSOU, Basile (Bénin) : Secrétaire de la Décennie mondiale du développementculturel, UNESCO

LAIFA, Embarek (Algérie) : Conseiller technique (géologie minière) au Ministèredes ressources minérales, Maputo, Mozambique

LEYTEN, Harrie M. (Pays-Bas) : Conservateur, Tropenmuseum, Amsterdam,Pays-Bas

LEISEGANG, Gerhard (Mozambique) : Departamento de História, Faculdade deLetras, U.E.M., Maputo, Mozambique

LUCAS, Carlos (Mozambique) : Engenheiro químico, Dep. De Engenharia Quí-mica, Faculdade de Engenharia, Universidade Eduardo Mondlane, Maputo,Mozambique

MACHUNGO, Inês Beatriz Fernandes (Mozambique) : Assistante, UniversidadeEduardo Mondlane, Faculdade de Letras, Dep. de Letras Modernas, Maputo,Mozambique

M’BOKOLO, Elikia (Zaïre) : Directeur d’études, École des Hautes Études enSciences Sociales, Paris

MEDEIROS, Eduardo (Mozambique) : Instituto Superior Pedagogico, Dep. DeAntropologia, Maputo, Mozambique

NGUNGA, Armindo (Mozambique) : Faculdade de Letras, Universidade EduardoMondlane, Maputo, Mozambique

SANTANA AFONSO, Ana Elisa (Mozambique) : Coordinatrice du projet des Rou-tes du fer en Afrique, CNUM, Maputo, Mozambique

SIBANDA, Eric (Swaziland) : Sandile University of Swaziland, Dept. of AfricanLanguages and Lit., Swaziland

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Annexes 223

SIMBI, David Jambuwa (Zimbabwe) : Président and professeur, Dep. of Metal-lurgical Engineering, University of Zimbabwe, Mount Pleasant, Harare,Zimbabwe

SecrétariatCOVANE, Luis Antonio Covane (Mozambique) : Departamento de História,

Universidade Eduardo Mondlane, Maputo, Mozambique

MANUENSE, Herminia (Mozambique) : Ministérió da Cultura, Projecto ARPAC(Arquivo do Património cultural), Maputo, Mozambique

RIBEIRO, Fatima (Mozambique) : Departamento de Português, Instituto Supe-rio Pedagógico, Maputo, Mozambique

Appendice III

Liste des interventions

Allocution de bienvenue : Ana Elisa Santana Afonso, Secrétaire générale de laCNUM

Allocution de Graça Machel, Présidente de la Commission nationale du Mozam-bique pour l’UNESCO (CNUM)

Allocution de Basile Kossou, Secrétaire de la Décennie mondiale du développe-ment culturel (DMDC), représentant du Directeur général de l’UNESCO

Allocution d’ouverture : S.E. le Ministre de la culture Dr. José Mateus Kathupa

Introduction générale des travaux : Ana Elisa Santana Afonso

Chapitre I – Réflexion sur la problématique du fer en Afrique

Thème 1 – La problématique du fer au Mozambique : problèmes et perspectivesAlexandrino José (Mozambique)

Thème 2 – Cadre général de la problématique du fer en Afrique : Harrie M. Ley-ten (Pays-Bas)

Thème 3 – Interdisciplinarité, histoire et anthropologie du fer : les ambiguités dufer dans l’aire Kongo-Teke : Elikia M’Bokolo (Zaïre)

Examen du document du projet des routes du fer en Afrique

Examen du document : Lignes générales sur les mécanismes de coordination etde la mise en exécution du projet des routes du fer en Afrique

Chapitre II – Histoire et anthropologie du fer en Afrique

Thème 4 – The Iron smelting process in Africa and Mozambique and its docu-mentation – Produçao e trabalho do ferro na Provincia do Niassa : GerhardLeisegang (Mozambique)

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224 Annexes

Thème 5 – The Growth and spread of Iron technology in Northern Mozambique Adamowicz ( Mozambique)

Chapitre III – Fer, héritage culturel et environnement

Thème 6 – Le savoir fer au Burundi : Athanase Karayenga (Burundi)

Thème 7 – Anthropologie et filmographie du fer en Afrique de l’Ouest : Safi Faye(Sénégal)

Thème 8 – O léxico do ferro em algumas línguas moçambicanas : ArmindoNgunga (Mozambique)

Chapitre IV – Technologies et industries du fer

Thème 9 – Technology and iron industries in Africa : David J. Simbi (Zimbabwe)

Thème 10 – Generalidades sobre o proçesso tecnológico da fabricação do ferro eAço : Carlos Lucas (Mozambique)

Thème 11 – Iron in Yorubaland : T. A. Akinjogbin (Nigéria)

Thème 12 – Les routes du fer dans la structuration de l’espace ouest africain auXXe siècle : l’exemple ivoirien : Pierre Kipre (Côte d’Ivoire)

Thème 13 – Mining and Iron work in the ancient agricultural communities ofMozambique : Eduardo Medeiros (Mozambique)

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 225

Membres du Comité scientifiqueinternational du projet« Les routes du fer en Afrique »

M. Frank Aig-Imoukhuede, président du Comitéancien directeur de la culture au Ministère fédéral de l’informationet de la cultureLagos, Nigéria

M. Herman M. Batibo, linguisteprésident de l’Association des linguistes d’Afrique orientale et australedirecteur du Département de langues et littérature africainesUniversité du BotswanaGaborone, Botswana

M. Hamady Bocoum, archéologuespécialiste de l’histoire technique et sociale de la métallurgie du feren Afrique de l’Ouestdirecteur du patrimoine culturel du Sénégalresponsable du Laboratoire de préhistoire et de protohistoirede l’Université Cheikh-Anta-DiopDakar, Sénégal

M. Pierre de Maret, archéologue, anthropologuerecteur de l’Université libre de Bruxelles (ULB)directeur du Centre d’anthropologie culturelle de l’ULBprofesseur à l’Université Léopold-Sédar-Senghor d’AlexandrieBruxelles, Belgique

M. Jean Devisse, historien, archéologue ✞ancien professeur d’histoire et d’archéologie africaine à la Sorbonne, Paris

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226 Annexes

M. Melvin Edwards, plasticienThe State University of New JerseyDepartment of Visual ArtsMason Gross School of the ArtsNew Brunswick, New Jersey, États-Unis d’Amérique

M. Martin Eno Belinga, géologuechef du Département des sciences de la terreFaculté des sciencesUniversité de YaoundéYaoundé, Cameroun

M. Pierre Kipré, historienspécialiste de l’histoire de l’Afrique de l’Ouestancien Ministre de l’éducation nationale et de la formation de baseAbidjan, Côte d’Ivoire

M. Joseph Ki-Zerbo, historienspécialiste de la méthodologie de l’histoire africainedirecteur du Centre d’études pour le développement africain (CEDA)Ouagadougou, Burkina Faso

M. Lech Krzyzaniak, archéologuedirecteur du Musée d’archéologiePoznan, Pologne

M. Alberto Lescay Merencio, artiste plasticienprésident de la Fondation Caguayopour les arts monumentaux et appliquésSantiago de Cuba, Cuba

M. Harrie Leyten, ancien conservateur du Musée royal des tropiquesancien vice-président du Comité scientifique internationaldes routes du fer en AfriqueAmsterdam, Pays-Bas

M. Elikia M’Bokolo, historien et sociologuespécialiste de l’histoire africaine, notamment de l’Afrique de l’Est,directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales(histoire et civilisations de l’Afrique)Paris, France

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Annexes 227

M. José Mateus Muaria Katupha, linguistespécialiste des langues bantuancien Ministre de la culture, de la jeunesse et des sportsdéputé de l’Assemblée de la Républiquevice-président du Comité scientifique international des routes du feren AfriqueMaputo, Mozambique

M. Théophile Obenga, historienspécialiste des langues africainesancien directeur du Centre international des civilisations bantuancien Ministre des affaires étrangères du CongoDepartment of Black StudiesSan Francisco State UniversitySan Francisco, Californie, États-Unis d’Amérique

M. Bethwell Allan Ogot, historienspécialiste de l’histoire africaine, notamment de l’Afrique de l’Est,pionnier des techniques de l’histoire oraledirecteur de l’Institut de recherche et d’études supérieuresMaseno, Kenya

M. Mohamed Ould Khattar, archéologueancien délégué permanent adjoint de la Mauritanie auprès de l’UNESCOspécialiste du programme à la Division du Patrimoine culturelde l’UNESCOParis, France

M. Kléna Sanogo, archéologueDirecteur de l’Institut des sciences humaines (ISH)Ministère de la culture et de la recherche scientifiqueBamako, Mali

Dr D. J. Simbi, ingénieur métallurgisteDépartement d’ingénierie métallurgiqueUniversité du ZimbabweHarare, Zimbabwe

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 229

Index des spécialistes

A

Aba Bilunga 143Adam 74Adeniji 54, 157Adeniji (Pa) 52Afigbo 43, 45Agadès 111Akinjogbin 12Akoa Jean (Thomas) 144Alabede 162Andah 24, 29, 35, 148Anozie 36, 48, 148Aremu 15, 36, 148, 157, 162, 190Arkell 11, 25Armstrong 45Asombang 139Atangana 135Avery 29, 35

BBarendson 23Bauvais 83, 87Bellamy 35, 36, 46Benoît 165Biélenin 62, 65Biobaku (S.O.) 52Bocoum 10, 14, 64, 87, 101, 102, 124

CCabboï 64Calvocoressi 27, 36, 148, 149Calvocorressi 148

Celis 16, 64Célis 74Chezeau 61Chikwendu 148Childs 35, 126, 127Clark 26Clist 13, 121, 125, 139Coelho Lemos 101Coghlan 24Connah 26, 30, 37Coulthard 72, 83, 87Crew 64, 68, 69Cuccini-Tizzoni 68

DDaniels 26David 36, 148, 149David Adeniji 52Davies 24De Barros 183De Maret 14, 127Delneuf 133, 190Devisse 127Dillmann 64, 68, 69, 76, 87, 89Diop 29, 96Dumont 72, 83Dunikowski 64, 85Dupré 169Durand 120

EEchard 169, 172Échard 127

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230 Index des spécialistes

Effah-Gyamfi 36Ekechukwu 36Essaadi 72Essomba 15, 97, 125, 133, 135, 136, 137,

138, 145, 190Evin 120

FFagan 26Fagg 23, 36, 37Faivre 74Fall 101Fells 41Fluzin 12, 61, 62, 64, 65, 68, 69, 70, 72,

74, 75, 76, 77, 79, 81, 83, 87, 89, 91,98, 103, 165

Forrières 68Froment 133

GGaffet 84, 91Gasco 120Goucher 183Grébénart 95, 96, 111Griaule 168Griffon 123Groupe de travail suisse de l’archéologie

du fer 62Guilot 84Guthrie 124

HHarbord 36, 46Hartle 45, 46Hawkes 24Herbach 64, 68Herbert 11Herkouf 191Heusch 128Holl 94, 96, 97Huard 11, 95, 191

IIdowu 162Izard 176

J

Jemkur 11, 23, 24, 31, 36Johnson 51, 54Junod 128

KKense 35Kienon 74Killick 10, 41, 95, 96, 98, 99

LLambert 27Lanfranchi 125Lavachery 126Leclant 94, 96Leclère 68, 74, 79, 87Leroi-Gourhan 172Leroy 62, 68, 69, 72, 74, 77, 79, 81, 87,

181Lévi-Strauss 124Lhote 23, 29, 96, 191

M

MacEachern 121Macintosh 27Maes-Diop 14, 24, 29Maggs 10Mangin 65, 68, 70, 72, 74, 83, 84, 85, 87Maret 121, 125, 135Maret (de) 13Martinelli 12, 15, 65, 172, 181, 186, 187Masami 68Mauny 11, 16, 26, 27, 28, 29, 93, 95, 96,

97Mbida 135McDonnel 38McIntosh 111McIntosh et McIntosh 28, 93McNaughton 10, 170McPhee 33Merluzzo 68, 72, 74, 79, 87Mezang Mezang (Pasteur Josué) 144Miller 10, 97

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Index des spécialistes 231

Mohen 190Moock 37Mortillet 95Morton 38, 41Mungo Park 23

NNgane Oyono 142Nicklin 36Niger 111Njoku 36, 47Nosek 65Nsuka 124

OObayemi 148Oberlin 120Oguagha 43Ojo 163Okafor 11, 12, 15, 23, 24, 29, 35, 36, 37,

39, 40, 41, 44, 46, 96, 121, 125Onyeke 36, 47Onyishi Abonyi Nnamani 47Onyishi Ozioko Ugwu 47Orengo 72, 74, 83, 87Osmond 61Ossah Mvondo 139Oyono 142, 143Oyono Eyamo 143, 144

P

Paris 96, 97, 99, 108, 120, 125Pearson 37Pedrals 96Pelet 62Person 13, 102, 107, 108, 120Petrequin 62, 64Pétrequin 165Philips 37Phillips 36, 40Phillipson 25, 95Pichot 68Pion 83, 87Pleiner 61, 62

Ploquin 64, 68, 74Pole 35Posnansky 27, 148

Q

Quéchon 13, 96, 99, 100, 115, 124, 125RReinach 96Roozeboom 61Routhier 100Rustad 29Ryosui 68

SSaliège 108, 120Sandra 162Santana Afonso (Ana Elisa) 9Sardan (Olivier de) 170Sassoon 36Schmidt 29, 35Serneels 62, 64, 68, 74Shaw 26, 27, 37, 43, 148Shinnie 11, 24, 25, 121Simondon 91Sperl 41Stainier 124Stuiver 37Sutton 30, 31, 35, 36, 37, 148

TTamari 11Termit 111Thiriot 165Thiry 121, 125, 126, 127Thouvenin 68Tizzoni 68Trigger 24, 25, 29Tylecote 23, 24, 26, 30, 35, 36, 41, 95

U

Umeji 45Urteaga 64, 68Uzoezie 45

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232 Index des spécialistes

V

Van der Merwe 41, 97Van der Plicht 37Van Grunderbeek 14, 96, 125Van Noten 134, 191Vignati 96Von Luschan 96Voruz 120

WWarmington 29Wente-Lukas (Renate) 168Wiesmuller 96Willett 26Wingrove 38, 41Woodhouse 13, 121Woolley 24

ZZangato 97, 125, 190

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 233

Index des sites

AAbakaliki 36Abia 151Abiriba 36, 151Abuja 35, 151Adamawa 151Ado 148Ado-Ekiti 163Afikpo 148, 151Afunfun 98, 99Agadès 112Agadez 99, 166Agege 152Agorregi 64, 68Agorregi (Espagne) 79, 83Agunrin 152Aigueperse (Auvergne) 74, 83, 87Ajaokuta 151, 159Akjoujt 27Akjout 148Akok-Oveng 140, 142Aku 36, 37, 45, 151Akwa 151Akwa Ibom 151Aladja 159Aldja 151Alésia 85, 87Alexandrie 68Ama Orba 44Amagu Ugwu 151Ampara 150, 151, 158Anambra 151Anatolie 14, 61, 190, 191

Angola 126, 129Argungu 36Arménie 24Ashafa 32, 36Aulnat (Auvergne) 72Aulnay-Truchet (Sarthe) 64Autriche 41Auxerre 144Awae 137, 139Awgu 36Awka 36Azawagh 97Azelik 27

B

Basse Bénoué 190Basse Nubie égyptienne 189Bauchi 151, 158Baura 151Bayelsa 151Beaune 64Belfort 68, 74Bende 45Bénin 151, 161, 168Bénoué 190Benue 150, 151Bida 148, 152Bienno 68Bir Abu Husein 191Birmingham 25Birom 36Blessey 68, 70, 72, 85Blessey Samaise (Côte-d’Or) 74

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234 Index des sites

Blessey-Salmaise 68, 83Blessey-Salmaise (Côte-d’Or) 74, 83, 87Borno 151Boston 126Bouar 190Boucle du Niger 28, 165, 168, 172, 188Boucle du Niger à Gao 27Bulkiemdé 64, 74Burkina Faso 15, 64, 68, 72, 74, 166, 168,

170, 178Burundi 96, 130

C

Cameroun 13, 14, 15, 121, 125, 133,134, 139, 143, 145, 168, 189, 190

Carthage 26, 28, 29, 72, 79, 95, 147Centrafrique 190Chawai 36Cher 123Chine 103, 189Chypre 189Clérimois (Yonne) 64Collectivité locale de Gujba à Ligdir 152Colline de Dala 30Colline de Dalla 151Combe 36Condé-sur-Suippe (Aisne) 83, 87Congo 125, 128Coulmier-le-Sec (Côte-d’Or) 72, 83Cricket 68Cross River 45, 151Cuesta Nsukka-Udi 45

D

Daima 21, 26, 30, 148, 151Dakhla 193Dalla Hill 148Danawel 64Darfur 25Daura 33, 36Delimiri 150, 151Delta 151Dja 139, 140Do Dimmi 96, 108, 122

Dogon 188Douala 145Dusten Kongba 152, 190

E

Ebene Mengue 143Eboman 140Ebonyi 151Edjom 140Edo 151Edumoga 151Égaro 13, 97, 111, 120, 190Eguru 46Égypte 14, 24, 68, 95, 96, 189, 190, 191Ejigbo 52Ekiti 51, 151, 163Ennedi 14, 191Enugu 151Esie 36Espagne 64, 68État de Kaduna 32États de Bauchi 31Eteto 143Éthiopie 29Eyanga 151

FFagam 151Fali 151Farafra 193Fatunke 152FCT 151Fele 151Fibot 140Fluzin 72Fouta-Djalon 166France 123

G

Gabon 13, 121, 125, 139, 190Gao 28, 97Garoua 133Gaule 70Gbabiri 190

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Index des sites 235

Ghana 125, 178, 187, 188Gibraltar 27Golfe de Gabès 27Golfe de Syrte 27, 97Gombe 151Gournay-sur-Aronde (Oise) 85Grands Lacs 96Grèce 189Guinée 160, 174, 188

H

Haute-Guinée 166

IIbadan 55Ibila 150Ibila Alukpo, Otukpo 151Ibila-Alukpo 150Ibo 43, 44, 45Idofin 163Idoma 45Ife 49, 51Igala 43, 44, 45Igbira 36Igbo Aawo 152Igbo Ukwu 151, 161Igede 150Igunrin 152Ijaw 45Ijaye 150, 152Ikole 163Ikom 151Ilache 150Ilaro 152Ile iponrin 51Ile isunrin 51Ile-Ife 49, 50Ile-Ife à Woye Asiri 152Ilobi 152Ilorin 51, 152Imo 151In Tékébrin 97Iponrin 152Iseyin 152Isokun 152

Isundunrin 52, 158Isundurnin 152Itakpe 152, 159Italie 68

JJarville 68Jenne-Jeno 28Jigawa 151Jos 152, 166Juude-Jaabe (Sénégal) 87

KKaduna 31, 151Kagalam 151Kagarko 151Kano 30, 31, 148, 151Kantara 151Kariya Wuro 151Kastina Ala 148Katsina 31, 33, 36, 151Kâyn 179Ke 152Kebbi 152Kellé 135Kenedougou 166Kharga 191Kirifi 151Kogi 151Kongo Makeri 152Korotoro 191Koumou 144Koumou (chutes de) 144Kubanni (rivière) 148Kurmin Mazuga 32, 36Kwa 44Kwara 152

LLaagbe 51Lac Tchad 26, 106Lac Victoria 29Lac Victoria-Nyanza 14, 193Lagos 152Lejja 36, 37, 45, 151

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236 Index des sites

Lékié 135Libye 95Libye actuelle 97Ljebu Ode 152Lobo 139, 140Lobo (rivière) 144LURE d’Orsay 89

M

Madakiya 151Maïdi 36Makera 31Makera Takunpata 152Mali 15, 28, 166, 168, 169, 178, 179Malinke 165, 170Mandara 26Maputo 9Maroc 27, 28, 95, 97Matara 29Mauritanie 24, 27, 28, 147, 148Mbak Itam 151Meba 143Mefou 139Méroé 13, 25, 26, 28, 121, 147, 190Mésopotamie 14, 190, 191Mésopotamie et Anatolie 189Mfoumou 140Mfoundi 135Mia Bin 151Minkoumou-Nkoumadzap 144Monde carthaginois 190Moniya 150, 152Mont Idofin-Ojokolo 152Monts Mandingue 166Moose 165Mopti 188Mozambique 9, 11Muta 151

N

Nachikoufien 193Namibie 126Nancy 68, 74, 87Nancy-Belfort 79

Napata 25, 190Nassarawa 152Naudjèla 74Ndindan 135, 139Nebersdorf 41Niger 11, 13, 14, 24, 27, 28, 61, 95, 96,

97, 98, 99, 100, 111, 121, 125, 152,166, 168, 169, 191

Niger oriental 14, 189, 190Nigéria 11, 12, 15, 21, 23, 26, 27, 28, 30,

32, 33, 35, 36, 52, 96, 121, 125, 133,147, 150, 151, 157, 158, 159, 162,163, 166, 189, 190

Nkolmebong 140, 142Nkomadzap 144Nkometou 135, 139, 145Nkooveng 140Nkoumadzap 144Nkumadzap 140Nkwo-Ike 43Nok 21, 32, 36, 124, 125, 147, 148, 152,

190, 191, 193Nok-Taruga 190Nord du Cameroun 168Nord du Nigéria 31Nord du Pays ibo 43Nord du Togo 168Nord-Cameroun 128Nord-Togo 169Nouvelle-Calédonie 100Nru-Isiakpu 46Nsukka 11, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43,

44, 45, 46, 47, 48, 148Nukheila/Merga 191Nyong 135, 140

OOba 49, 152Obo Aiyegunle 158Obo Ayegunle 152, 163Obobogo 135, 139Odo Ere-Akata-Ijomu 151Oduduwa 49Ogbom so 152Ogbomoso 36

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Index des sites 237

Ogun 152Ogundo 152Ogunremi 152Oise 72Oju 150Oke Odan 152Okemesi 51, 151Okigwe 36Oko 53Okolo 135Ola Igbi 36, 46Olaigbi 152Oliga 137, 139, 190Olla 152Ondo 152, 163Onyoma 152Opi 24, 29, 36, 37, 38, 41, 47, 151Orba 36, 40, 41, 42Orba-Umundu-Eha-Ndi-Agu 40Osun 152Otetek 144Otetek Etoto 140Otta 152Otun 163Ouagadougou 187Ouahigouya 178Oualata 27Ouganda 129Owa Kajola 152Owa Onire 152Owerre-Elu 36, 39, 40, 41, 47Owerre-Elu-Nru-Isiakpu 46Owerre-Elu-Nru-Isiakpu-Edeoballa 39Oyo 36, 46, 51, 150, 152Oyo (ville) 152Ozalla 43

PPanguru 151Pan-Pan 135, 136Pays basque 64, 68Pays bassar 174, 183Pays bassar occidental 169Pays ibo 45, 47Pays moose 187

Pays moose et gurûnsi méridionaux 187Pays samo 171Pays samo septentrional 176Pays songhay 166Pays yoruba 12, 15, 50, 51, 52, 54, 55, 56,

162, 163Peuls 170Phalaborwa 41Plateau 31, 147, 152, 190Plateau ibo 45Pongsolo 135Pongsolo I 135Pongsolo II 135Ponte di Val Gabbia 68Ponte di Val Gabbia (Italie) 79Pwitenga 187

RRafiu Ndoko 148, 152Région bahaya 29Région d’Azelik 28Région de Nsukka 21Région des Grands Lacs 14, 16, 126Région du lac Victoria-Nyanza 189République centrafricaine 14, 125Rive méridionale du Limpopo 191Rivers 152Royaume dagomba 174Rwanda 96, 125, 128, 130

SSaaka 145Sahara 26, 28Sahara central 28Saint-Louis 102Saka 137, 139Samarra 190Samaru 31Samaru Ouest 21, 30, 31Samaru West 151Samaru-Ouest 148Samo 188Samory 102Samun Dukya 152Sanaga maritime 135

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238 Index des sites

Sanga 168Saverne 74Sawuni 152Schiri 151Sekkiret 27Selima 191Sénégal 64, 193Shaushau 150, 151Sine-Saloum 193Sokoto 31, 152Songhay 165, 170Soninke 165Soudan 25, 30, 191Soudan occidental et central 14Sud du Sahara 28Sud-Cameroun 134, 137, 139Sukur 151

TTaraba 152Taruga 23, 24, 25, 26, 28, 30, 31, 36,

106, 125, 147, 151, 166Tchad 191, 193Teguef n’Agar 27Télénugar 193Ténéré 106Tenkodogo 187Termit 13, 27, 61, 96, 100, 106, 108, 111,

113, 115, 120, 121, 122, 190, 191Tichitt 27Togo 174, 183Tombouctou 97, 188Touffreville (Calvados) 72, 83, 87Toungaré 64, 68, 72Tsauni Nord 31Tse Dura 148, 151

UUffe Ijumu 148, 151Ugwuagu 148, 149Ukehe 36Ukpa 151Ulaira 152Umugedu 47

Umukete Aguleri 148, 151Umundu 36, 40, 41, 42, 148, 151Umundu-Orba-Eha-Ndi-Agu 46Upemba 130Utique 29Utonkon 151

V

Vallée de Kubanni 30Vallée de l’Anambra 148Vallée du Nil 14, 95Vallée du Sénégal 166Victoria-Nyanza 190

W

Wikki 158Woru 168

Y

Yankari 150, 151, 158Yankari (Bauchi) 158Yaoundé 125, 128, 135, 137, 139, 190Yatenga 15, 166, 170, 171, 172, 175, 176,

177, 178, 179, 180, 186, 187, 188Yelwa 152Yelwani (Niger) 74Yemfok 140Yobe 152Yoruba 49, 50, 51, 54, 55

ZZagomida 36Zambie 191, 193Zamfara 152Zaria 30, 36, 148Zimbabwe 126, 128Zinder 106Zoétélé 137, 139, 140, 142, 143, 144Zoétélé-Brousse 140, 142, 145Zoétélé-Village 140, 142, 143Zoétélé-Ville 143, 144Zungeru 148, 152

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 239

Table des illustrations

Figures

Figure 1. Le processus sidérurgique et son évolution historique 60

Figure 2. La chaîne opératoire du fer : l’épuration 66

Figure 3. Représentation graphique des mesures 14C BP, à Termit-Égaro.Histogramme additionnant par classes de 50 ans les datesradiocarbones BP non calibrées selon l’intervalle de confiancedes mesures 116

Figure 4. Histogramme comparatif des âges 14C 117

Figure 5. Chronologie de la fin du néolithique et des débuts de lamétallurgie à Termit 119

Figure 6. Localisation des principaux sites étudiés par l’auteur dansla région 136

Figure 7. Prospection archéologique dans l’arrondissement de Zoétélé.Localisation des principaux sites identifiés par l’auteur (juillet-août1990) 141

Figure 8. Principaux sites de réduction du fer et leur localisation dans les États du Nigéria 149

Figure 9. Le Yatenga et l’aire de métallurgie moose 167

Figure 10. Agriculteurs métallurgistes et forgerons au Yatenga et dans laplaine de Séno 171

Figure 11. Principaux types de fours à induction dans la boucle du Niger 173

Figure 12. Yatenga, Kâyn ; réductions comparées 70/100 h. Courbes detempérature 182

Figure 13. La métallurgie africaine du fer du IIIe millénaire au Ve siècleav. J.-C., pour les sites connus 192

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240 Table des illustrations

Photos

Planche I. La réduction directe et ses produits 63

Planche II. L’épuration, pratiques et déchets 67

Planche III. Les demi-produits et les lingots 71

Planche IV. La forge : pratique, outils et déchets 73

Planche V. Indices métallographiques : la réduction 78

Planche VI. Indices métallographiques : l’épuration 82

Planche VII. Indices métallographiques : élaboration de l’objet 86

Planche VIII. La structure du métal : fer, acier, fonte, à partir de l’étudemétallographique d’échantillons archéologiques 88

Photo 73. Vue panoramique des 22 bases de fourneaux de Do Dimmi(Termit, Niger) 112

Photo 74. Trou de 5 cm servant à vérifier la réduction du minerai de ferdans le fourneau 153

Photo 75. Tuyères dans les trous prévus à cet effet 153

Photo 76. Porte de fourneau 153

Photo 77. Site de réduction du minerai de fer, parc national de Yankari,État de Bauchi 153

Photo 78. Tas de scories de fer sur le site de réduction du minerai de ferd’Ampara 154

Photo 79. Revêtement extérieur écaillé d’un fourneau à cuve 154

Photo 80. Vue latérale d’un fourneau à cuve 154

Photos 81, 82 et 83. Divers stades de destruction de fourneaux à cuve 155

Photo 84. Fours de métallurgistes dogon à Vol et Sege 174

Photo 85. Anciens fours (bôn-daagha) au Yatenga 175

Photo 86. Fours contemporains (bônga) au Yatenga 177

Photo 87. Batterie de fours de forgerons moose au Yatenga, avec soldatdonnant l’échelle 179