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Douleurs, 2007, 8, 2 117 Bain de bouche avec la doxépine : effet analgésique et durée du soulagement de la douleur chez des patients présentant une mucite buccale due aux traitements du cancer Oral doxepin rince: the analgesic effect and duration of pain reduction in patients with oral mucositis due to cancer therapy. J.B. Epstein, J.D. Epstein, H. Oien, E.L. Truelove. Anest. Analg., 2006;103:465-70. Dans une étude précédente, les auteurs avaient évalué la dimi- nution de la douleur après un bain de bouche avec la doxé- pine chez des patients présentant une mucite orale induite par le cancer et ses thérapeutiques [1]. Dans cette étude, ils ont également évalué chez 51 patients présentant une mucite uniquement induite par les traitements, la durée du soulage- ment et les variables permettant d’expliquer au mieux cette durée. La mucite a été évaluée avec l’Échelle d’Évaluation de la Mucite Orale (sévérité de l’érythème, taille des ulcérations sur 9 sites) et la douleur avec une EVA au repos et lors de l’ali- mentation, avant et après un bain de bouche d’une minute avec 5 ml d’une solution de doxépine (5 mg/ml). À 5 minutes, en moyenne, les patients rapportaient 41 % de réduction de leur douleur (p < 0,0001) et 55,6 % à 15 minutes (p < 0,0001). Seul 5 patients n’ont pas eu de soulagement. 38 patients ont eu une réduction de leur douleur à 5 minutes, 6 patients à 15 minutes et 2 patients entre 30 et 60 min. La durée moyenne de réduction de douleur a été de 2 h 30. La plupart des patients ont eu une réduction moyenne de douleur de 51 % (p < 0,0001) et un maximum de 75 % (p < 0,0001). La douleur a réaugmenté progressivement mais au bout de 4 heures, 19 patients ont rapporté encore une réduction de leur douleur de base. De plus, la douleur lors de l’alimentation a été diminuée (p < 0,0001). Concernant les prédicteurs signi- ficatifs de la durée du soulagement : plus la douleur de base était intense, plus les scores de l’érythème étaient élevés ou plus la réduction maximum relative de la douleur était impor- tante, plus la fréquence de réapparition de la douleur était ralentie (utilisation du Cox proportional hazard model ; p < 0,01 pour les 3 variables). Les effets secondaires ont été un goût acceptable, un inconfort et une sensation de brûlure lors du bain de bouche minimes. La moitié des patients ont rap- porté une fatigue évaluée en moyenne comme modérée. Les auteurs soulignent que ces résultats doivent être pris avec pré- caution (étude non contrôlée non randomisée). RÉFÉRENCE 1. J.B. Epstein, E.L. Truelove, H. Oien et al. Oral topical doxepin rinse: anal- gesic effect in patients with oral mucosal pain due to cancer or cancer the- rapy. Oral Oncol, 2001;37:632-7. Mai Luu Étude randomisée des effets de la gabapentine sur la douleur post-amputation A randomized study of the effects of gabapentin on postamputation pain L. Nikolajsen, N.B. Finnerup, S. Kramp, A.-S. Vimtrup, J. Keller, T.S. Jensen. Anesthesiol., 2006;105 :1008-15. Le but de cette étude randomisée en double aveugle avec pla- cebo était d’évaluer si un traitement post-opératoire par la gabapentine pouvait diminuer les douleurs de membre fan- tôme et du moignon. 46 patients amputés au moins au niveau du mollet pour cause de maladie vasculaire périphérique ont reçu la gabapentine (capsules de 300 mg, doses variant de 900 mg à 2 400 mg, d’augmentation progressive sur 2 à 13 jours en fonction de la dose) ou le placebo dès le 1 er jour après l’amputation et pendant une durée de 30 jours. Le trai- tement post opératoire comportait une épidurale de bupiva- caïne arrêtée au bout de 2 à 5 jours, le paracétamol 1 g 4 fois par jour et un opioïde. L’analyse des résultats a porté sur 41 patients. L’incidence de la douleur fantôme (gabapentine vs. placebo) a été de 55 % et 58,8 % versus 52,6 % et 50 % res- pectivement à 30 jours et 6 mois (non significatif). L’intensité moyenne de la douleur fantôme, évaluée par échelle numéri- que de 0 à 10, (gabapentine vs. placebo) a été de 1,5 et 1 ver- sus 1,2 et 0,5 respectivement à 30 jours et 6 mois (NS). L’intensité moyenne de la douleur du moignon a été de 0,85 et 0 versus 1 et 0 respectivement à 30 jours et 6 mois (NS). Les autres évaluations (Mc Gill Pain Questionnaire, fréquence des crises de douleur fantôme, consommation d’opioïdes) et les tests de sensibilité (allodynie, seuil à la pression mécanique et sommation temporelle) ne retrouvent pas non plus de dif- férence significative. 17 patients (9 sous gabapentine et 8 sous placebo) ont eu des effets secondaires tous transitoires : nau- sées, douleurs épigastriques, fatigue, confusion, cauchemars, prurit, ataxie. Les résultats montrent que la gabapentine admi- nistrée lors des premiers 30 jours après amputation ne réduit ni la fréquence ni l’intensité de la douleur post-amputation. Les auteurs soulignent trois points à considérer par rapport à ces résultats négatifs : petit nombre de patients ; titration lente et faible dose ; faible intensité de la douleur dans les deux groupes. Au regard des données, la durée du traitement de la douleur par épidurale a été plus court dans le groupe gaba- pentine et la consommation d’opioïdes a eu tendance à être plus basse après 30 jours, suggérant que les doses de gabapen- tine administrées ont été suffisantes pour réduire la douleur post-opératoire immédiate. Mai Luu

Bain de bouche avec la doxépine : effet analgésique et durée du soulagement de la douleur chez des patients présentant une mucite buccale due aux traitements du cancer

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Douleurs, 2007, 8, 2

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Bain de bouche avec la doxépine : effet analgésique et durée du soulagement de la douleur chez des patients présentantune mucite buccale due aux traitements du cancerOral doxepin rince: the analgesic effect andduration of pain reduction in patients with oralmucositis due to cancer therapy.

J.B. Epstein, J.D. Epstein, H. Oien, E.L. Truelove. Anest. Analg.,2006;103:465-70.

Dans une étude précédente, les auteurs avaient évalué la dimi-nution de la douleur après un bain de bouche avec la doxé-pine chez des patients présentant une mucite orale induitepar le cancer et ses thérapeutiques [1]. Dans cette étude, ilsont également évalué chez 51 patients présentant une muciteuniquement induite par les traitements, la durée du soulage-ment et les variables permettant d’expliquer au mieux cettedurée. La mucite a été évaluée avec l’Échelle d’Évaluation dela Mucite Orale (sévérité de l’érythème, taille des ulcérationssur 9 sites) et la douleur avec une EVA au repos et lors de l’ali-mentation, avant et après un bain de bouche d’une minuteavec 5 ml d’une solution de doxépine (5 mg/ml). À 5 minutes,en moyenne, les patients rapportaient 41 % de réduction deleur douleur (p < 0,0001) et 55,6 % à 15 minutes (p < 0,0001).Seul 5 patients n’ont pas eu de soulagement. 38 patients onteu une réduction de leur douleur à 5 minutes, 6 patientsà 15 minutes et 2 patients entre 30 et 60 min. La duréemoyenne de réduction de douleur a été de 2 h 30. La plupartdes patients ont eu une réduction moyenne de douleur de51 % (p < 0,0001) et un maximum de 75 % (p < 0,0001). Ladouleur a réaugmenté progressivement mais au bout de4 heures, 19 patients ont rapporté encore une réduction deleur douleur de base. De plus, la douleur lors de l’alimentationa été diminuée (p < 0,0001). Concernant les prédicteurs signi-ficatifs de la durée du soulagement : plus la douleur de baseétait intense, plus les scores de l’érythème étaient élevés ouplus la réduction maximum relative de la douleur était impor-tante, plus la fréquence de réapparition de la douleur étaitralentie (utilisation du Cox proportional hazard model ; p< 0,01 pour les 3 variables). Les effets secondaires ont été ungoût acceptable, un inconfort et une sensation de brûlure lorsdu bain de bouche minimes. La moitié des patients ont rap-porté une fatigue évaluée en moyenne comme modérée. Lesauteurs soulignent que ces résultats doivent être pris avec pré-caution (étude non contrôlée non randomisée).

RÉFÉRENCE

1.

J.B. Epstein, E.L. Truelove, H. Oien

et al.

Oral topical doxepin rinse: anal-gesic effect in patients with oral mucosal pain due to cancer or cancer the-rapy. Oral Oncol, 2001;37:632-7.

Mai Luu

Étude randomisée des effets de la gabapentinesur la douleur post-amputationA randomized study of the effects of gabapentinon postamputation pain

L. Nikolajsen, N.B. Finnerup, S. Kramp, A.-S. Vimtrup, J. Keller,T.S. Jensen. Anesthesiol., 2006;105 :1008-15.

Le but de cette étude randomisée en double aveugle avec pla-

cebo était d’évaluer si un traitement post-opératoire par la

gabapentine pouvait diminuer les douleurs de membre fan-

tôme et du moignon. 46 patients amputés au moins au niveau

du mollet pour cause de maladie vasculaire périphérique ont

reçu la gabapentine (capsules de 300 mg, doses variant de

900 mg à 2 400 mg, d’augmentation progressive sur 2 à

13 jours en fonction de la dose) ou le placebo dès le 1

er

jour

après l’amputation et pendant une durée de 30 jours. Le trai-

tement post opératoire comportait une épidurale de bupiva-

caïne arrêtée au bout de 2 à 5 jours, le paracétamol 1 g 4 fois

par jour et un opioïde. L’analyse des résultats a porté sur

41 patients. L’incidence de la douleur fantôme (gabapentine

vs

. placebo) a été de 55 % et 58,8 %

versus

52,6 % et 50 % res-

pectivement à 30 jours et 6 mois (non significatif). L’intensité

moyenne de la douleur fantôme, évaluée par échelle numéri-

que de 0 à 10, (gabapentine

vs

. placebo) a été de 1,5 et 1

ver-

sus

1,2 et 0,5 respectivement à 30 jours et 6 mois (NS).

L’intensité moyenne de la douleur du moignon a été de 0,85

et 0

versus

1 et 0 respectivement à 30 jours et 6 mois (NS).

Les autres évaluations (Mc Gill Pain Questionnaire, fréquence

des crises de douleur fantôme, consommation d’opioïdes) et

les tests de sensibilité (allodynie, seuil à la pression mécanique

et sommation temporelle) ne retrouvent pas non plus de dif-

férence significative. 17 patients (9 sous gabapentine et 8 sous

placebo) ont eu des effets secondaires tous transitoires : nau-

sées, douleurs épigastriques, fatigue, confusion, cauchemars,

prurit, ataxie. Les résultats montrent que la gabapentine admi-

nistrée lors des premiers 30 jours après amputation ne réduit

ni la fréquence ni l’intensité de la douleur post-amputation.

Les auteurs soulignent trois points à considérer par rapport à

ces résultats négatifs : petit nombre de patients ; titration lente

et faible dose ; faible intensité de la douleur dans les deux

groupes. Au regard des données, la durée du traitement de la

douleur par épidurale a été plus court dans le groupe gaba-

pentine et la consommation d’opioïdes a eu tendance à être

plus basse après 30 jours, suggérant que les doses de gabapen-

tine administrées ont été suffisantes pour réduire la douleur

post-opératoire immédiate.

Mai Luu