Bilan des révoltes arabes : les médias au cœur de printemps tourmentés- Reporters sans frontières

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  • 8/3/2019 Bilan des rvoltes arabes : les mdias au cur de printemps tourments- Reporters sans frontires

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    rvoltes arabes

    crdit

    :AFP

    /GiANLUiGiGUErciA

    Les mdias,tmoins cLset enjeuxde pouvoir

    RappoRt - novembRe 2011

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    crdit : AFP / GAmAL NomAN

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    Un an aprs le dbut des soulvementsdmocratiques dans le monde arabe,Reporters sans rontires dresse le bilan de lacensure et des violations de la libert dinor-

    mer pendant le Printemps arabe. Les journalistes, et plusparticulirement les photographes, ont pay un lourdtribut. Onze proessionnels des mdias ont trouv la mortdans lexercice de leurs onctions, parmi lesquels desgures de renom du photo-journalisme international. Lesprincipales victimes restent les journalistes locaux.

    Reporters sans rontires se propose de dcrire lesmthodes utilises par les autorits pour empcher lacirculation de linormation pendant six soulvementspopulaires (Tunisie, Egypte, Libye, Bahren, Syrie etYmen) jusqu la mi-novembre 2011.

    Tout commence le 17 dcembre 2010, quand MohamedBouazizi simmole par le eu devant le sige du gouver-norat de Sidi Bouzid, en Tunisie. Sa mort dclenche unevague de maniestations pour le changement dmocra-tique qui orce lancien prsident Ben Ali quitter le pou-voir, le 14 janvier 2011, et touche rapidement lensembledes pays de la rgion.

    Aprs la Tunisie, cest au tour des gyptiens de chasserHosni Moubarak, au pouvoir depuis prs de trente ans.Les jeunes Bahrenis descendent dans la rue ds le 14

    vrier 2011 et lancent un mouvement de protestation quisera ensuite repris par lopposition chiite. Les Libyenset les Ymnites commencent leur tour leur rvolutionmi-vrier. Les Syriens ont entendre leurs revendications partir de mi-mars.

    Le Sultanat dOman est galement le thtre de contes-tations sociales importantes. En Irak, les slogans anti-

    corruption rythment les maniestations hebdomadaires.Les aspirations dmocratiques de la population duKurdistan irakien sont violemment rprimes ds vrier.Mme les Palestiniens se rassemblent Gaza, place duSoldat inconnu, pour rclamer la n des divisions entrelAutorit palestinienne et le Hamas. Les rues de TelAviv et de Jrusalem sont les thtres de maniestationshistoriques demandant au gouvernement de aire passerles programmes sociaux avant la politique scuritaire.Rcemment, le Kowet et la Jordanie sont leur tour tou-chs par une vague de contestation.

    Par peur de la contagion, les leaders de pays arabesvoisins entreprennent des rormes. Le prsident AbdelazizBoutefika en Algrie annonce des changements politiquesle 15 avril. Au Maroc, le roi Mohamed VI adopte, par r-rendum le 1er juillet, un projet damendement constitution-

    nel. Les monarchies du Gole persique ont galement despropositions pour anticiper le mcontentement populaire.

    Pendant ces rvolutions, les mdias ont jou un rlecrucial, en couvrant les mouvements de contestation etleur rpression, et en soutenant les mobilisations. Dans laplupart des cas, les nouveaux mdias comme Facebooket Twitter ont permis la circulation de linormation, sup-plant une presse traditionnelle inode aux pouvoirs enplace. Malgr sa couverture gomtrie variable, notam-ment sur le Bahren, Al-Jazeera a jou un rle important,

    en relayant les voix de lopposition.

    Quand ils ont pu envoyer des quipes sur place, les grandsmdias internationaux ont permis de limiter la rpression.En gypte, Al-Jazeera et CNNont ourni la communautinternationale une couverture en temps rel des vne-ments. Do la volont des autorits de plusieurs pays din-terdire laccs leur territoire ces observateurs gnants.

    Les rgimes en place ont tent dimposer une censuretotale, proessionnels de linormation, blogueurs et net-citoyens aisant les rais dune rpression brutale et

    meurtrire. Chaque pays a dvelopp sa stratgie pourbloquer ou ralentir la circulation de linormation : sur-veillance de la Toile ; coupures dInternet ; coupure desrseaux de tlphonie mobile ; brouillage des chanes satel-litaires ; conscation de journaux ; agressions et arrestationsdes proessionnels de linormation, blogueurs et internautes ;enlvements et assassinats ; expulsion de journalistestrangers ; reus de visas, etc.

    Soazig Dollet avec la participation dHlne et Henri

    Bureau Arique du Nord & Moyen-Orient

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    #sidibouzidLe 17 dcembre 2010, un jeune marchand ambulant,

    Mohamed Bouazizi, simmole par le eu Sidi Bouzid,dclenchant une vague de colre populaire contre lesorces de lordre. Les autorits imposent un black-outm-diatique total, nhsitant pas agresser les journalistes quiaccordent des interviews aux mdias trangers ou tententde se rendre sur place. Aucune inormation ne ltre surles incidents qui agitent cette rgion dlaisse des pouvoirpublics.

    Face au silence des mdias traditionnels, Facebook etTwitter prennent le relais. Utilis par un quart de la popula-

    tion, Facebook accueille commentaires, photos et vidosdes vnements. Partout dans le monde, on suit en directla rvolte Sidi Bouzid qui gagne rapidement Kasserineet Thala. Les vidos amateurs prises partir dappareilsphoto numriques sont pendant trois semaines les seulesimages auxquelles les Tunisiens et le reste du monde ontaccs. Sur Twitter, le hashtag #sidibouzid est partag parles utilisateurs tunisiens, arabes et occidentaux, tmoi-gnant dun mouvement de solidarit devenu international.

    A partir de janvier 2011, conscientes du rle jou parFacebook, les autorits renorcent la censure sur Internet,

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    alors que les mdias trangers commencent sintresser la Tunisie et reprendre les images postes sur le Net.

    Plus dune centaine de pages Facebook sur les vne-

    ments de Sidi Bouzid sont bloques, ainsi que les articlesen ligne des mdias internationaux traitant des troublessociaux. Ammar 404, la cyber-police tunisienne, meten place un systme rendant impossible le tlcharge-ment des photos et des vidos sur Facebook depuis laTunisie. Le rseau social est pour la premire ois censurpour plus une dure suprieure quelques jours, alorsque les sites de partage vidos et photos, comme Flickr,YouTube, Dailymotion et Vimeo, sont bloqus depuis desmois. La police mne galement une campagne de pira-tage de comptes Facebook an de rcuprer les codes

    daccs des militants et dinltrer les rseaux de journa-listes citoyens qui se sont constitus autour des vne-ments de Sidi Bouzid. De nombreuses botes e-mail sontpirates. Quatre blogueurs, dont Slim Amamou, sontarrts le 6 janvier 2011.

    En rponse, Anonymous, le groupe de hackers militants,conduit, sous le nom Operation : Tunisia, une srie decyber-attaques contre des sites gouvernementaux.

    et depuis Le 14 janvier 2011 ?Depuis le 14 janvier, le ton des mdias a chang. Lapresse et la tlvision sintressent lactualit sociale,totalement interdite du temps de Ben Ali. Mme les d-pches de la trs ocielle agence de presse TAPtraitentde nouveaux sujets ! Touteois, la majorit de la proessionreste en place. Les anciens denseurs du rgime Ben Alise convertissent en pionniers du changement.

    Le ministre de lInormation disparat de lorganigrammedu gouvernement provisoire dunion nationale qui prend

    les rnes du pouvoir, le 17 janvier, aprs la uite du pr-sident Ben Ali. Slim Amamou, blogueur libr quatre joursauparavant, devient Secrtaire dtat la Jeunesse et auxSports. Ce gouvernement annonce immdiatement lalibert totale dinormation et dexpression comme principeondamental de cette re nouvelle.

    Si la libert de ton est relle, de nouvelles lignes rougessemblent se dessiner. Les violences commises par lapolice et larme, les aaires de corruption impliquantdes proches de lancien prsident toujours prsents enTunisie, ou les dicults du gouvernement actuel restent

    trs peu abordes. En mai et juillet 2011, des journa-listes sont violemment agresss par les orces de lordre,alors quils couvrent des maniestations. Comme si lesanciennes mthodes reaisaient surace... Par ailleurs,

    les dclarations de lancien Premier ministre, Bji CadEssebsi, en juillet dernier, rendant la presse en partie res-ponsable de linstabilit sociale et politique actuelle, sontinquitantes.

    Lattaque des locaux de la chane Nessma TV, le 9 octobre2011, et lintimidation de ses salaris et de son directeursuite la projection deux jours plus tt du lm danimationranco-iranien Persepolis de Marjane Sartrapi, a eu pourconsquence de placer la question de la libert dexpres-sion au cur de la campagne pour llection de lassem-

    ble constituante, le 23 octobre.

    La censure du Net reait une timide apparition en mai.Certaines pages Facebook sont ltres en applicationdune rquisition manant du juge dinstruction auprs duTribunal militaire permanent de Tunis pour lutter contre lapornographie. LAgence tunisienne de lInternet (ATI) sestvue intimer lordre de mettre en place un systme decensure et de ltrage. Elle a annonc vouloir dposer unrecours devant la Cour de cassation.

    La campagne lectorale a t couverte par des mdias

    audiovisuels publics et privs, crs sous lre Ben Ali.En eet, si douze radios ont dpos des demandes delicence auprs de lInstance nationale indpendante pourla rorme de linormation et de la communication (Inric),il a allu six mois au gouvernement de Bji Cad Essebsipour donner une rponse avorable lors du dernier conseildes ministres, le 15 octobre 2011... pour des lectionsune semaine plus tard. Charge maintenant lAssembleconstituante, lue le 23 octobre dernier, de poursuivre cetravail de rormes, avec le utur gouvernement de HamadiJbeli, secrtaire gnral du parti Ennahda

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    la coopration et le dveloppement conomiques (OCDE)estime 90 millions de dollars les pertes nancires occa-sionnes pour le pays par cette coupure.

    Les 2, 3 et 4 vrier, les journalistes trangers sont syst-matiquement viss dans une incroyable campagne de vio-lences orchestre par la police militaire. Trente journalistesamricains ont t agresss et/ou interpells, 18 reporters

    ranais, neu Polonais, etc. au cours de cette chasse auxjournalistes trangers. Presque aucune rdaction nest par-gne. Le mdia le plus cibl est la chane Al-Jazeera, avectrois reporters agresss et quatre journalistes arrts et desbureaux dtruits.

    et depuis Le 11 Fvrier 2011 ?Une page historique sest tourne le 11 vrier 2011,

    lorsque le Prsident Hosni Moubarak abandonne le pou-voir au terme de dix-huit jours dune rpression sanglante.Mais neu mois plus tard, les gyptiens dchantent. LeConseil suprme des orces armes (CSFA), qui dirige lepays, ne tient pas ses promesses. Loin dtre lev, ltatdurgence, en vigueur depuis 1981, est maintenu jusquenjuin 2012.Intouchable en gypte, larme pratique toujoursles mmes mthodes de censure et dintimidation. La miseen place du CSFA au lendemain du dpart dHosni Mou-barak na ait que renorcer la sacralisation de cette institu-tion. Le Conseil a non seulement perptu les mthodesdHosni Moubarak pour contrler linormation, mais les a

    renorces. De nombreux journalistes et blogueurs cher-chant dnoncer les exactions commises par certainslments de larme ou de la police militaire au cours dusoulvement pro-dmocratique sont poursuivis devantdes juridictions militaires. Le CSFA a en eet arm quelle

    egyptecrdit : AFP

    Encourags par la rvolution tunisienne, lesgyptiens descendent dans la rue, le 25 janvier2011, loccasion de la Journe de la police.Les autorits tiennent les mdias distance

    des maniestations. Ds les premires heures de laprs-midi, elles brouillent les rseaux de tlphonie mobile auxabords des lieux de rassemblements, au Caire. La presseinternationale est ds le dbut des vnements trs

    prsente en gypte. Twitter est bloqu le mme jour danslaprs-midi, tout comme le site de streaming bambuser.com. Le hashtag #jan25, en rrence au premier jour demaniestations, circule largement sur le rseau social. Le26 janvier, Facebook est rendu inaccessible par intermit-tence. Des problmes de ralentissement de connexionsont signals, en particulier lors de tentatives daccs auxjournaux en ligne, tels que Al-Badil, Al-Dustouret Al-MasryAl-Youm, qui jouent un rle de premier plan dans la cou-verture des vnements. Le 27 janvier au soir, les autoritsgyptiennes, dpasses, coupent les rseaux Internet et

    de tlphonie mobile. Seul le ournisseur daccs Nour,trs minoritaire, conserve un accs au Web pour quelquestemps.

    Les net-citoyens, qui ralisent un important travail decouverture des maniestations, trouvent malgr tout denombreuses parades pour aire circuler linormation.Ils tweetent depuis la place Tahrir, postent des vidossur YouTube, se connectent sur Bambuser. A ltran-ger, des ournisseurs daccs proposent aux internautesgyptiens dutiliser leur rseau via une connexion parmodem. Google et Twitter sassocient la lutte contre la

    censure en mettant en place une application permettantde convertir les messages vocaux en tweets.

    Laccs Internet est rtabli en gypte dans la matine du2 vrier, aprs cinq jours de blocage. LOrganisation pour

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    naura aucune tolrance ace aux insultes lances contre[elle]. La liste des cas ne cesse de sallonger

    Le plus emblmatique est celui du blogueur Maikel Nabil

    Sanad, condamn le 10 avril 2011 trois ans de prison.Cette condamnation ait de lui le premier prisonnier dopi-nion en gypte depuis la rvolution. Cet objecteur deconscience est accus dinsulte linstitution militaire,publication de ausses nouvelles et troubles lordrepublic, pour avoir publi un rapport, sur son blog, remet-tant en cause lapparente neutralit de larme lors desmaniestations de janvier et vrier 2011. Le rapport stipuleque des militaires ont pris part aux arrestations, dtentions,et tortures de maniestants. Le 23 aot dernier, il a entamune grve de la aim pour dnoncer sa dtention. Son pro-

    cs en appel devait souvrir le 4 octobre dernier. Il a treport au 11 puis au 18 octobre, date laquelle le juge adcid du placement du blogueur en hpital psychiatrique.

    La blogueuse Asmaa Mahouz, laurate du prix Sakharov,remis chaque anne par le Parlement europen, est ga-lement cible. Menace dun procs devant une cour mili-taire, en aot dernier pour insultes lencontre du CSFA,les poursuites avaient t abandonnes. Une nouvelleplainte a t dpose le 8 octobre par plusieurs ociersqui laccusent davoir insult le conseil et ses ociers, lorsde maniestations de soutien Maikel Nabil Sanad, les 3

    et 4 octobre dernier.

    Le 11 septembre, le CSFA a menac de recourir la loidurgence lencontre de tous les journalistes mena-ant la paix sociale. Et larme sest lance dans unecampagne de vrication des licences de seize chanessatellitaires. Des agents du ministre de la Culture et dupersonnel de la radio-diusion publique ont ait irruptiondans les bureaux de la chane Al-Jazeera Mubasher Egypt.Ils ont consqu les quipements de transmission mobile(SNG). Incident qui sest rpt trois semaines plus tard.

    Larme a montr quelle tait encore capable de violences.Lors des arontements qui ont oppos maniestantscoptes et orces de lordre dans le quartier de Masperoau Caire les 9 et 10 octobre dernier, larme na pas hsit prendre dassaut les siges des chanes de tlvisionAl-Hurra et Channel January 25, situs dans le quartier,alors quelles diusaient des reportages sur les incidents.Les militaires ont interrompu les programmes et ont mena-c les journalistes. Elle est galement intervenue pour cou-per temporairement llectricit, les lignes de tlphone etla connexion Internet dans les bureaux dAl-Shorooq. Le

    13 novembre 2011, le CSFA a ordonn le renouvellement,pour 15 jours supplmentaires, de la dtention provisoiredu blogueur et activiste Alaa Abdel Fattah, incarcr de-puis le 30 octobre 2011, pour avoir reus de rpondreaux accusations dincitation la violence, vandalisme,

    et vol darmes lors des maniestations de Maspero. Il at inculp, le 29 novembre, par la Haute cour de scuritnationale.

    Une importante campagne de diamation est lance dansles mdias gouvernementaux contre les ONG gyptiennesqui reoivent des subventions du gouvernement amricainet ont ormul des critiques lgard du CSFA. Cette cam-pagne met en pril lavenir de nombreuses associationsnationales de dense des droits de lhomme.

    LEgypte a vcu un nouvel pisode rvolutionnaire la se-maine prcdant la tenue des lections parlementaires le28 novembre. De violents arontements ont oppos mani-estants demandant le dpart du CSFA et les orces de

    lordre, principalement dans les rues adjacentes la placeTahrir. On a recens plus dune quarantaine dagressionset darrestations de journalistes par les orces de scurit.La tenue des lections a divis, dans son principe, unepartie de lopinion publique gyptienne.

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    Inspire des rvolutions tunisienne et gyptienne, lin-

    surrection libyenne commence les 15 et 16 vrier 2011depuis Benghazi. Tripoli tombe quelques mois plustard, n aot 2011, mettant n au rgime de Mouam-

    mar Kadha, tu le 20 octobre. Le Conseil national de tran-sition (CNT), instaur initialement Benghazi et reconnupar de nombreux tats, est la nouvelle autorit en chargede reconstruire le pays.

    Les mdias ont pay un lourd tribut lors de la couverturedes combats entre les orces loyalistes et la rbellion. Ilest encore dicile de donner une estimation du nombre

    de victimes. Quatre journalistes trangers, parmi lesquelsdeux photojournalistes de renom, et au moins un journa-liste libyen ont trouv la mort. On est actuellement sansnouvelles de trois journalistes libyens.

    au cours de Linsurrection...Ds vrier, le colonel Kadha, mme sil adopte un dis-cours de dni, prend conscience des risques de pro-pagation de la rvolte. A mesure que les nouvelles surles chutes des dictateurs en Tunisie et en gypte se r-

    pandent sur le territoire libyen, des appels maniestersont lancs sur Facebook. Laccs aux rseaux sociauxest alors trs perturb.

    Lcrivain et commentateur politique Jamal Al-Hajji, qui

    avait appel sur Internet maniester, est arrt le 1ervrier. Le 16, selon le quotidien Libya Al-Youm, cestle tour du directeur du site dinormations Irasa, TaqiAl-Din Al-Chalawi, et de son rdacteur en che, AbdelFattah Bourwaq. Le mme jour, le blogueur MohammedAl-Ashim Masmari est interpell aprs avoir rpondu des interviews sur la BBCen arabe et Al-Jazeera.

    En labsence des mdias internationaux, les citoyenslibyens simprovisent journalistes grce leurs tlphonesportables et appareils photo, en prenant des images

    des maniestations et de la rpression. Ces vidos ama-teurs sont pendant plusieurs jours les seules imagesdisponibles sur les vnements. Mohamed Al-Nabous,journaliste et blogueur libyen plus connu sous le diminutiMo, onde Benghazi, ds les premiers jours de linsur-rection, la chane de tlvision en ligne Libya Al-Hurra,mettant par Internet, puis par satellite. Il est tu par lestirs dun sniper, le 19 mars, quelques heures avant linter-vention de la coalition.

    Le rgime perturbe ortement la Toile avec laide duprincipal ournisseur daccs Internet, dont le propri-

    taire nest autre que Mohamed Kadha, un des ls deMouammar Kadha. Selon les socits de scurit in-ormatique Arbor Networks et Renesys, Internet aurait

    Libye crdit : Eric BoUvEt

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    t coup plusieurs reprises compter du 18 vrier2011. Toutes les connexions tlphoniques, lignes xes etmobiles, auraient t suspendues autour du 21 vrier,puis ortement perturbes. Le signal du satellite Nilesat,

    diusant entre autres les chanes Al-Hurra, Al-Jazeeraet Al-Arabiya, est brouill compter du 23 vrier. Ceschanes avaient permis de couvrir les vnements et ren-du possibles des tmoignages par tlphone.

    Paralllement, le rgime tente dutiliser les nouvelles tech-nologies pour aire passer ses messages et mobiliser sespartisans. Des SMS sont galement envoys pour dissua-der la population de se joindre aux maniestations.

    Mouammar Kadha annonce que les journalistes, entrs

    en Libye sans autorisation et se trouvant dans les zonescontrles par les insurgs, sont considrs commecomplices dAl-Qada et susceptibles dtre arrts toutmoment. 32 journalistes sont ainsi arrts dans lest dupays par des orces loyales Kadha, avant dtre trans-rs Tripoli pour y tre incarcrs.

    Paralllement, les autorits invitent plusieurs centainesde journalistes trangers venir couvrir ce qui se pas-sait Tripoli. Tout en le niant ouvertement, les ocielsdploient un arsenal de mesures visant les empcherde aire leur travail librement : menaces verbales et phy-

    siques, interdiction de scarter des visites organises,violences et interpellations. Les journalistes sont unique-ment autoriss lmer les groupes de soutien au rgime.Leurs dplacements doivent tre valids par les autorits.Plusieurs dentre eux sont interpells alors quils tentent dese rendre dans certaines localits sans autorisation pra-lable. Dbut mars, les autorits interdisent aux journalistestrangers prsents dans la capitale de sortir de leurshtels sans autorisation. Scnario quelque peu similairen aot, lors de la prise de Tripoli. Paralllement, plusieursjournalistes sont invits quitter le territoire... Enn,

    les Libyens qui tmoignent devant les mdias trangerssexposent aux violences des pro-Kadha.

    Reporters sans rontires considre que lensemble deces exactions constituent des crimes de guerre au sensde larticle 8 des statuts de la Cour pnale internationale.Lorganisation a demand la Commission internationaledenqute sur la Libye douvrir une enqute sur les aitsrecenss.

    Il est galement important de mentionner le bombar-dement, le 30 juillet 2011, du sige de la tlvision

    libyenne nationale Al-Jamahiriya, Tripoli, par les orcesde lOrganisation du trait de lAtlantique Nord (OTAN),dtruisant trois paraboles. Selon la chane, trois

    journalistes auraient t tus et 21 autres blesss pen-dant lattaque arienne. Cette dernire inormation na putre vrie par lorganisation. Les troupes de lOTAN ontjusti leur intervention en expliquant quelles cherchaient museler les messages de terreur de la chane. Cetteattaque a t condamne par Reporters sans rontires.

    depuis LinsurrectionDs le lendemain de linsurrection Benghazi, des

    mdias ont vu le jour dans la partie libre du pays.Premier en date : le journal 17 vrier. En six mois, leurnombre a littralement explos. Fin juillet, plus de 130publications crites sont enregistres auprs du CNT, denombreuses radios sont mises sur pied, il en est de mmedes chanes satellitaires qui oisonnent. On assiste unerelle libration de la parole, une appropriation progressivede lespace public.

    Quel est lavenir politique de la Libye ? Quand seradessine la prochaine constitution ? La tche du CNT est

    immense. Il est dicile dimaginer le paysage mdiatiquedans la Libye de demain, qui a besoin du soutien interna-tional

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    Le mouvement de contestation dmocratiquegagne le Bahren compter de mi-vrier 2011.Les autorits de ce tout petit pays, qui compte peine 1,2 millions dhabitants, seorcent

    de contrler linormation sur les maniestations et lesexactions des orces de lordre en mettant en place unimpressionnant arsenal de mesures rpressives : inter-pellations et expulsions de journalistes trangers qui se

    heurtent dimportantes dicults pour obtenir des visas ;intimidations des personnes voulant tmoigner auprs demdias trangers ; harclement des denseurs de lalibert dexpression ; arrestations de photographes,blogueurs et net-citoyens (dont lun meurt en dtention) ;poursuites judiciaires contre des militants de la libertdexpression, etc. En parallle, une campagne de propa-gande est lance contre les principales gures du mouve-ment de protestation, accuses dtre des tratres ou desterroristes.

    journaListes baHrenis, principaLesvictimes de La rpressionPlus dune trentaine de journalistes bahrenis sont arr-ts, certains pendant quelques heures, dautres pendantplusieurs semaines. Ainsi, la journaliste Naziha Saeed,collaboratrice de Radio Monte-Carloet de France 24, estconvoque le 22 mai. Elle est interroge pendant douzeheures et torture. Le journaliste sporti Faysal Hayyat, quiconnat la prison davril juin, aurait galement t tortur.

    Le licenciement de proessionnels de la presse ait ga-lement partie de la politique de rpression des autorits.Daprs un rapport du Bahrain Center or Human Rights,plus de quarante journalistes ont t licencis ou orcs dequitter leur poste depuis le dbut des protestations.

    Les pHotograpHes,des cibLes priviLgiesA partir de mars, de nombreux journalistes sont arrts etcondamns. Certains, dont plusieurs collaborateurs de laBahrain Society o Photography, voient leur procs souvriren octobre. Son prsident, Mohamed Salman Al-Sheikh,connat la prison du 11 mai au 2 juillet 2011. Impos le 15mars, ltat durgence est lev le 1er juin 2011. Louverturedun dialogue national dbut juillet dernier par les autori-

    ts apaise les tensions, mais na pas mis n lensembledes poursuites.

    aL-Wasat, cibLe dune campagnede HaineLa presse gouvernementale relaie des messages de hainecontre le quotidien Al-Wasat, seul journal dopposition dupays, une des principales cibles des attaques du rgimecontre les mdias. Le 15 mars 2011, des hommes armsprennent dassaut les locaux de limprimerie du journal. Le

    12 avril, Karim Fakhrawi, ondateur et membre du direc-toire, dcde alors quil se trouve en garde vue depuisune semaine. Les causes exactes de son dcs restent claircir. Le journal est erm une journe dbut avril et sonquipe de direction contrainte de dmissionner. Elle est

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    poursuivie devant la Cour pnale suprieure du Royaumepour de graves abus, accuse davoir dius des inor-mations ausses et mensongres, portant atteinte limageet la rputation du pays ltranger. Le rdacteur en che,

    Mansour Al-Jamari, orc de quitter son poste, rintgrquelques jours plus tard sur dcision du conseil dadmi-nistration, reconnat la publication de six articles douteux.Touteois, il suspecte une manipulation. Dbut octobre, ilssont condamns des amendes.

    bLogueurs, sites internet etcHane sateLLitaire de LoppositiongaLement viss

    Le 9 avril 2011, le net-citoyen Zakariya Rashid Hassandcde en dtention, probablement aprs avoir t tortur,sept jours aprs son arrestation pour incitation la haine,publication de ausses nouvelles, promotion du secta-risme, et appel au renversement du rgime sur des orumsen ligne. Son crime : avoir administr un orum de discus-sions.

    Le 22 juin, 21 militants des droits de lhomme et membresde lopposition sont condamns ensemble, par un tribu-nal militaire, de lourdes peines de prison, lissue dun

    procs collecti cens aire exemple et marquer lesesprits. Parmi eux, le blogueur Abduljalil Al-Singace, arr-t le 16 mars dernier, porte-parole et directeur du bureaudes droits de lhomme du mouvement Al-Haq. Il dnoncesur son blog les discriminations lgard des chiites,ainsi que ltat dplorable des liberts publiques dansson pays. Il est condamn la prison perptuit. AliAbdulemam, blogueur rput, considr comme lun despionniers dInternet dans le pays, est quant lui condamnpar contumace quinze ans de prison erme. Dbutseptembre, plusieurs dtenus entament une grve de la

    aim pour dnoncer leur incarcration, ainsi que la multi-plication des dtentions arbitraires et des procs inqui-tables. Le 27 septembre 2011, un tribunal dexception aconrm en appel les peines de prison, prononces enpremire instance.

    Entre juin et septembre, les autorits bloquent un certainnombre de sites Internet : PalTalk, un service de discus-sion en ligne par chat, audio et vido, dont le chatroomcommunautaire, Bahrain Nation, a t utilis par lesopposants pour communiquer ; http://bahrainmirror.com,site critique lgard du gouvernement ; le site du Mou-

    vement bahreni pour la justice et le dveloppement onden juillet 2011, qui dnonce les violations des droits delhomme au Bahren et prne la mise en uvre de rormesdmocratiques ; et le site http://twitcam.livestream.com quidiuse en temps rel de linormation sur Twitter.

    Quant la chane de tlvision satellitaire Lualua TV, lan-ce Londres le 17 juillet 2011, par des activistes de lop-position bahrenie, aute dautorisation de diuser depuisManama, elle ait lobjet de brouillages permanents depuis

    cration. Le streaming online est inaccessible au Bahren.

    attaques contre Les journaListestrangers qui proLongentLe bLack-outmdiatique

    Tout est mis en uvre par les autorits du Royaumepour limiter la couverture internationale des vnements.Plusieurs journalistes voient leur demande de visa rejete,

    dautres sont reouls leur arrive. Beaucoup bncientde visas courts de 48 heures. Une ois dans le pays, unjournaliste est obligatoirement escort par une quipeournie par le ministre de lInormation qui limite sesdplacements et restreint les sujets couvrir. Plusieurs sontmenacs, voire agresss. Un des incidents les plus gravessurvient quand des snipers tirent dlibrment depuis unhlicoptre sur le journaliste Michael Slackman et le came-raman Sean Patrick Farrell du New York Times, alors quilscouvrent les violences place de la Perle, Manama, le 18vrier 2011. Une quipe de CNNest violemment interpel-le et menace le 29 mars 2011.

    En juin, plusieurs correspondants trangers sont contraintsde quitter le territoire, linstar de Frederik Richter, corres-pondant de lagence Reuters au Bahren depuis 2008, etdu journaliste et crivain irlandais, Finian Cunningham,rsidant dans le pays depuis des annes. Mi-juin, les auto-rits annoncent leur intention de poursuivre le correspon-dant du journal The Independent, Robert Fisk, laccusantdorchestrer une campagne mdiatique diamatoire et pr-mdite, et de aire daut limpartialit et la crdibilitproessionnelle dans sa couverture unilatrale des vne-

    ments. Mattar Ibrahim Mattar, dput du parti Al-Weaq, estmme arrt du 2 mai au 7 aot 2011, cause dune inter-view donne sur Al-Jazeera, au cours de laquelle il souligneles risques darrestation pour les leaders de lopposition.

    La commission denqute indpendante (BICI), dirige parChri Bassiouni et mise en place le 29 juin 2011 sur dcretroyal, dans son rapport rendu public le 23 novembre dernier,a conclu que les orces de scurit du Bahren avaient eurecours de manire excessive la orce an de mettre unterme au soulvement populaire en mars dernier, reconnais-sant lutilisation de la torture contre des dtenus. Le roi Ha-

    mad bin Isa Al Khalia a par la suite annonc la mise en placedune commission nationale charge de mettre en oeuvreles recommandations de la commission dinvestigation

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    Cest en mars 2011 que les Syriens, inspirs parleurs voisins tunisiens et gyptiens, descendentdans la rue pour rclamer des changementsdmocratiques. Le rgime de Bachar Al-Assad

    rpond par la violence ce mouvement de protestation,timide au dbut. Plus de 15 000 personnes auraient tarrtes, parmi lesquelles de nombreux journalistes etblogueurs. Le recours la torture tend devenir syst-matique. Au l des semaines, les autorits renorcent leurcontrle des moyens de communication, dlivrant dis-crtion les visas pour la presse trangre, donnant sa

    cyber-arme un rle de plus en plus central pour surveil-ler la Toile. Propagande pro-Bachar Al-Assad, diusionde ausses inormations, hacking de botes e-mail et descomptes des rseaux sociaux, phishing, etc. Les autoritssengagent dans une vritable bataille de la dsinormation.An dimposer un black-outsur les vnements, les orcesde scurit empchent les proessionnels de linormationde se rendre sur les lieux des maniestations. Le 25 mars2011, les orces de scurit interdisent aux mdias dentrerdans la ville de Deraa, un des oyers de la contestation, lesobligeant regagner la capitale dans des convois escor-

    ts par les orces de scurit. Pour limiter la mobilisationet la transmission dimages et vidos, le rgime procdergulirement des coupures temporaires des rseauxde tlcommunication (tlphonie mobile et Internet) dansles localits o se droulent les maniestations. Mdias etONG trouvent une parade en distribuant des tlphonessatellitaires certains habitants de villes dicilement ac-cessibles, ou cibles de coupures rquentes du rseau.Cela nest pas sans danger. Les contrles aux rontirestant renorcs, il est aujourdhui trs dicile de aire entrerde telles technologies dans le pays.

    De nombreux journalistes et blogueurs syriens sont enle-vs ou arrts, et torturs en dtention. Prs de vingt-cinqdentre eux sont actuellement derrire les barreaux. Parmieux, Ahmed Bilal, ralisateur pour la chane Falesteen,interpell le 13 septembre dernier ; Amer Matar, journa-

    liste pour le quotidien Al-Hayat, priv de libert depuisle 4 septembre et le blogueur Jehad Jamal, connu sousle surnom de Milan, arrt le 14 octobre 2011 pour latroisime ois depuis mars 2011. Ou encore le cinasteet documentariste Nidal Hassan, enlev le 3 novembre Damas. Nous craignons quavec dautres, ils connaissentle mme sort que Ghiyath Matar, militant paciste arrt le6 septembre dernier et dcd en dtention le 12, aprsavoir t tortur.

    Les agressions physiques sont quotidiennes. Le cari-

    caturiste Ali Ferzatest enlev le 25 aot 2011 place desOmeyyades, dans le centre de Damas, par les servicesde scurit qui le passent tabac, lui brlent le corpsavec des cigarettes, et prennent soin de lui casser lamain gauche, celle qui lui sert dessiner. Il est relchquelques heures plus tard sur la route de laroport, la tterecouverte dun sac.

    De nombreux journalistes et blogueurs uient le pays pourse rugier en Turquie ou au Liban. Le gouvernement dupays du Cdre collabore avec le rgime de Damas dans

    sa chasse aux Syriens qui diusent de linormation sur larpression.

    et La presse trangre ?

    Les autorits russissent vider le pays de la presse tran-gre, en arrtant et expulsant ds le dbut du mouvementde contestation un certain nombre de correspondants, enreusant de dlivrer des visas, et plus tard en limitant dras-tiquement laccs des journalistes trangers au sol syrien.

    Les correspondants des agences Associated Presset Reuters sont arrts et expulss ds le dbut de lacontestation. Khaled Yaqoub Oweis, correspondant deReuters Damas, se voit retirer son accrditation le25 mars. Al-Jazeera annonce, le 27 avril, sa dcision de

    syrie crdit : mANi

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    suspendre, pour une dure indtermine, toutes ses acti-vits en Syrie en raison des multiples menaces reues parses quipes. Le 30 avril, une centaine de personnes serassemblent devant les bureaux de la chane Damas,accuse de mensonges et dexagration dans sa cou-verture du mouvement. Les locaux sont vandaliss.

    Les Syriens et les trangers rsidant dans le pays ont peur

    de tmoigner. Les personnes en contact avec les mdiastrangers paient souvent cher leur engagement. OmarAl-Assad, qui collaborait avec de nombreuses publi-cations, notamment les quotidiens As-Safr, Al-Hayat,ainsi que la chane Al-Jazeera depuis le dbut du sou-lvement populaire, a t arrt le 3 juillet. Il a t li-br le 30 novembre. Dautres citoyens syriens, bra-vant la peur des reprsailles, ont t ou sont toujoursincarcrs et torturs pour leurs contacts et soutien autravail des journalistes trangers. Leur liste sallonge chaquejour. En labsence de journalistes trangers, il est impossiblede sinormer prcisment en Syrie. Ce black-out mdia-

    tique impos par les autorits laisse libre cours toutes lesrumeurs.

    internet : surveiLLance deLa toiLe et cyber arme

    Internet est ralenti quasiment chaque vendredi, jour dela grande maniestation hebdomadaire. Cette mesurese trouve souvent prolonge pour empcher le tl-

    chargement et lenvoi des vidos ralises au cours desrassemblements. La cyber-arme, charge de traquerles cyberdissidents sur les rseaux sociaux, semble avoirredoubl dactivit depuis n juin. Ses membres agissenten inondant de messages pro-Assad les pages et lessites de soutien aux maniestations. Des comptes Twittersont crs pour parasiter les inormations ournies par lehashtag #Syria, en envoyant des centaines de tweets dontles mots-cls renvoient des rsultats sportis ou des pho-tos du pays.

    Elle cherche galement discrditer le soulvement

    populaire, en postant des appels la violence sur lespages des opposants et en aisant croire quils en sont lesauteurs. Pour mieux surveiller les dissidents, les autoritsrcuprent leurs donnes personnelles en utilisant la tech-nique du phishing, qui consiste crer de ausses pages

    de login Facebook : un lien sur Twitter vous invite aller regarder une vido. Vous rentrez alors votre adressee-mail et mot de passe en toute conance. Le signal dela chane prive Orient TV, qui met depuis les Emirats

    arabes unis, a t coup plusieurs reprises sur les deuxsatellites Nilesat et Arabsat.

    La propagande Luvre dansLes mdias

    Le rgime utilise les mdias pour diuser sa propagandequi repose sur trois mots dordre : le premier consiste en uneexaltation de Bachar Al-Assad et de son gouvernement. Il

    jette le discrdit sur les mdias trangers, accuss de men-tir sur la situation du pays et de prendre parti pour lesrvolutionnaires. Lorsque les maniestations ont commencen Syrie, au mois de mars, personne nosait plus regarderAl-Jazeera en public, de peur de se aire taxer de mundiss(inltr, comploteur), qualicati donn aux opposants parles partisans du rgime, tmoigne un tudiantde retour deDamas n aot 2011. Le discours ociel dnonce ennlexistence dune conspiration. Dans un premier temps,Bachar Al-Assad a dsign un complot isralien, avantdagiter la menace salaste derrire les mouvements deprotestation. Stratgie mdiatique qui ne leurre pas grand

    monde lextrieur du pays mais arrive jouer sur la peurdarontements communautaires chez les Syriens, selonBarah Mikail, directeur de recherches la Fondation pourles relations internationales et le dialogue extrieur. Lergime brandit le danger de violences entre communauts,tente ainsi de monter les communauts les unes contre lesautres, en aisant circuler des rumeurs dans les villes mul-ticonessionnelles, grce aux mdias qui lui sont dles.

    Le Prsident a annonc dimportantes rormes pour satis-aire la rue. Il a promulgu, le 28 aot 2011, un dcret lgis-

    lati sur les mdias qui appelle, sans plaisanter, au respectdes liberts ondamentales prsentes dans la dclarationuniverselle des droits de lhomme et des conventions inter-nationales. Une rpression sanglante sabat sur la popu-lation depuis bientt six mois. Les dispositions prvues larticle 11 stipule que toute attaque contre un proessionneldes mdias sera assimil une attaque lencontre dunonctionnaire de lEtat syrien. Qui le pouvoir cherche-t-il convaincre ? La communaut internationale ? Son opinionpublique ?

    Mais personne nest dupe. La commission denqute inter-

    nationale sur les violations commises en Syrie, dans sonrapport publi le 28 novembre dernier, montre clairementcomment les orces de scurit syriennes ont commis etcommettent toujours des crimes contre lhumanit dans di-rentes rgions du pays

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    images de la rpression et dimposer une censure totale.Cest le dbut dune politique de violences systmatiquescontre les proessionnels de la presse.

    Tous les moyens sont bons pour intimider les journalistes.Menaces tlphoniques et agressions physiques sont quo-tidiennes. Les milices proches du pouvoir, les ameusesbaltajiyas, mnent de vritables expditions punitivesdans la rue.

    Trois journalistes ont trouv la mort dans lexercice de leursonctions depuis le dbut de la contestation, touchs pardes tirs de snipers alors quils couvraient des manies-tations : Hassan Al-Wadha, cameraman pour la chaneAl-Hurra ; Jamal Al-Sharabi, photographe pour le quoti-dien indpendant Al-Masdar ; Abd Al-Ghani Al-BureihidAl-Yemeniya TV. Trois autres journalistes ont trouv lamort depuis vrier, lors de bombardements ou alors quilsparticipaient des maniestations.

    Les arrestations sont rquentes ainsi que les enlvements

    qui peuvent durer de quelques heures quelques jours.Ils visent non seulement les journalistes indpendantsmais galement danciennes gures de la presse o-cielle, rallies la contestation. Cest le cas du journalisteAbdelghani Al-Shamiri, ancien che de linormation de laradio et tlvision dEtat, qui rejoint la cause des protes-tataires. Il est enlev le 31 mars dernier Sanaa, par desagents de la Scurit nationale et relch le lendemain,suite aux pressions du Syndicat des journalistes.

    Les tentatives dassassinats se sont multiplies plus r-cemment. Une dizaine de journalistes, dont plusieurs de

    la tlvision nationale, ont t cibls alors quils couvraientles rassemblements de lopposition. A titre dexemple, le21 juillet dernier, le prsentateur de la chane satellitaireocielle Yemeniya, Yasser Al-Moualimi, connu pouravoir exprim son soutien au mouvement de contesta-

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    e mouvement de protestation dmocratique com-mence le 11 vrier 2011 quand les Ymnites des-cendent dans les rues de Sanaa pour clbrer lachute du prsident gyptien Hosni Moubarak et

    rclamer la dmission de leur gouvernement. Plusieursjournalistes sont attaqus en marge des cortges, descamras sont consques et dtruites, des cartesmmoires vides. Le prsident Ali Abdallah Saleh durcitles mesures en vigueur an dempcher la diusion des

    crdit : AFP / AhmAd GhArABLi

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    tion, chappe une tentative dassassinat. Abdel MajidAl-Samawi, journaliste pour la tlvision, est gravementbless par le tir dun sniper, le 23 septembre.

    journaux conFisqus,sites bLoqus

    La presse indpendante et dopposition est trs prsenteau Ymen, ce qui explique pourquoi les autorits tententde couper les rseaux de distribution, et de saisir cer-tains de ces journaux. De nombreux titres indpendantsou alis lopposition (Al-Omanaet Al-Thawry, Al-Ahali,

    Akhbar Al-Youm, Al-Oula, Al-Nass, Al-Sharia, Al-Qadiya,Al-Yaqeen, Al-Tajamou, Hadith Al-Madina, Al-Nidaa, etc.)sont rgulirement saisis par la Garde rpublicaine auxcheck-points, notamment ceux situs lentre des pro-vinces du sud, telles que Taz et dIbb. Les distributeursde ces publications sont systmatiquement agresss, leslocaux des mdias mis sac et le matriel consqu. A unmois dintervalle, en juin et et juillet, le sige de lhebdoma-daire indpendant Al-Nada, et les bureaux du quotidienindpendant Al-Adhwaa, Sanaa, sont attaqus. En mai,la chane Suhailnest pas pargne, ni les locaux du quo-tidien indpendant Al-Oula Sanaa.

    Les autorits bloquent galement la version en ligne desjournaux, ou les sites dinormation indpendants, commeYemenOnline daily, Aden Online, Al-Masdar Online, Mareb

    Press, Al-Sahwa Net. Mme le site de lagence Saba a aitlobjet de blocages.

    Par ailleurs, les autorits ymnites ont rendu la connexion Skype inaccessible ds vrier 2011, aprs stre ren-dues compte que de nombreuses personnalits de loppo-sition et les journalistes avaient recours cette application

    pour donner des interviews.

    La presse trangreEn mars dernier, la chane Al-Jazeera dcide de ermer sesbureaux ace aux nombreuses dicults rencontres : retraitdaccrditation pour lensemble de ses journalistes ; agres-sion dun cameraman ; attaque de ses bureaux ; pillage dumatriel de transmission, etc. Deux de ses correspondantssont expulss le 19 mars.

    Certains journalistes trangers parviennent toujours exercer leur mtier au Ymen, mais nombre dentre euxsont expulss, ou reouls laroport. Les autorits nedlivrent plus de visa.

    Les autorits ymnites ont interdit au journaliste amricaindu New York Times, Robert Worth, lentre dans le pays,le 25 mars. Quelques jours plus tt, six journalistes britan-

    niques et amricains, rsidant au Ymen et collaborantrgulirement pour des mdias internationaux (Wall StreetJournal, Time, Los Angeles Timeset le Washington Post)ont t expulss du pays. Mme sort rserv au journalisteamricain Patrick Symmes, dOutside Magazineet de GQMagazine, ainsi quau photographe italien Marco Di Lauro leur retour dun reportage sur lle de Socotra.

    diFFicuLts tecHniques

    Les journalistes doivent aire ace aux nombreuses etlongues coupures dlectricit. Depuis plusieurs mois, lapopulation ne bncie que dune heure dlectricit parjour. Or sans lectricit, aucune connexion nest possible,sau pour ceux qui possdent des gnrateurs. Mais leuel se ait rare, suite une rupture des stocks organisepar le gouvernement. Les problmes de communicationdans le pays sen sont trouvs aggravs. Les autoritsont arbitrairement erm la socit de tlphonie mobileSabaFon, aux mains de lopposition.

    Le 23 novembre dernier, le prsident Ali Abdallah Saleh a

    sign, Riyad en Arabie saoudite, laccord de transitionpropos par le Conseil de Coopration du Gole. En ver-tu de cet accord, il cde le pouvoir son vice-prsident,Abd-Rabbu Mansour Hadi, qui sera en charge de compo-ser un nouveau gouvernement en accord avec loppositionet dorganiser des lections prsidentielles dans un dlaide trois mois.

    Touteois, cet accord prvoit galement que le prsidentymnite ne sera pas jug et condamn pour les crimesquil a commis. Ali Abdallah Saleh, bless il y a cinq mois,

    devrait galement se rendre aux Etats-Unis pour pour-suivre son traitement commenc en Arabie saoudite entrejuin et octobre dernier. Aussi cet accord de transition estcontest par la rue.

    Il est aujourdhui dicile dimaginer comment va voluerle paysage mdiatique au Ymen. Les autorits en chargede mettre en oeuvre des rormes dmocratiques doiventaire du respect des liberts ondamentales, parmi les-quelles la libert de la presse, une pierre angulaire dunouveau rgime

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    REPORTERS SANS FRONTIRES est une organisation internationale de dense de la libert de la presse. Elle observe et rapporteles atteintes la libert de la presse dans le monde. Reporters sans rontires analyse linormation et intervient par voie de presse,par courrier, sous orme de rapports denqute et de recommandations pour alerter lopinion contre les exactions commises contredes journalistes, les violations la libert dexpression et aire pression sur les responsables politiques.

    Secrtaire gnral : Jean Francois Julliard l Directeur des publications : Gilles Lordet

    REPORTERS SANS FRONTIRES, SECRTARIAT INTERNATIONAL

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