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53 ONCFS Rapport scientifique 2005 Habitats Contexte de l’étude Les études actuelles menées en Guyane sur l’impact de la chasse sur les populations animales ont montré que les densités de certaines espèces les plus sensibles, comme les grands primates, le pécari à collier Tayassu tajacu, le hocco Crax alector et l’agami Psophia crepitans, sont globalement inférieures dans les zones chassées. Cependant, l’absence ou la faible densité d’une espèce dans une zone ne doit pas être systématiquement attribuée à la pression de chasse tant que la qualité de l’habitat pour cette espèce n’est pas connue. En effet, des études récentes ont montré une importante variabilité des abondances et des peuplements animaux dans diverses zones indemnes de toute pression anthropique récente. À l’échelle de la Guyane, une hétérogénéité des peuplements de « grande faune » est observée en fonction de l’habitat. Elle est fondée sur des critères variés de richesse ou de diversité du milieu naturel qui restent à comprendre et à définir. Plusieurs hypothèses reposent sur la prise en compte des conditions géomorphologiques, géographiques, climatiques et édaphiques, qui, directement ou indirectement (notamment à travers le cortège floristique mais aussi la nature du sous-bois, la productivité des peuplements…), influenceraient les peuplements de grande faune. Par ailleurs, les typologies classiques qui permettent une classification des peuplements forestiers ou des stations par région naturelle, n’ont pas encore été développées en forêt guyanaise. Les acquis scientifiques préalables sont encore très incomplets compte tenu de la complexité des phénomènes en jeu dans le fonctionnement de la forêt tropicale humide (Pascal, 2001) et de la diversité spécifique des peuplements forestiers qui dépasse fréquemment les 150 espèces d’arbre par hectare (pour plus de 1 300 espèces recensées sur le département). Un programme d’étude a donc été élaboré en partenariat avec l’Office national des forêts, l’Unité mixte de recherches ECOFOG et l’Institut de recherche et de développement. Il vise à établir une typologie précise des habitats forestiers, incluant les paramètres spécifiques et structuraux pour la faune et la flore et à élaborer une méthode de spatialisation des habitats à travers la géomorphologie qui semble être la clef d’entrée la plus pertinente pour comprendre la structuration de la biodiversité en Guyane à l’échelle du paysage. Ce projet a été retenu par le Ministère de l’écologie et du développement durable dans le cadre de l’appel d’offre 2005 du programme « Écosystèmes Tropicaux » qui financera l’étude en grande partie. État des connaissances et hypothèses de travail La diversité des forêts guyanaises… De nombreux programmes scientifiques étudient actuellement la diversité spéci- fique des arbres en forêt guyanaise et sa relation avec le substrat géologique, les sols, et la dynamique sylvigéné- tique (Sabatier, 2004). Les premiers résultats montrent que l’influence du sol est forte : – sur la composition floristique, en particulier pour les milieux très con- traignants ; – sur la répartition spatiale ou l’autécologie de quelques essences forestières en liaison avec le drainage ou la texture des sols ; – sur la structure du peuplement à travers la hauteur dominante où les répartitions diamétriques. Le projet « Diversité multi-échelles » (DIME), actuellement en cours, ana- lyse les influences croisées du substrat géologique et des caractéristiques pédo- logiques sur la composition spécifique et la diversité fonctionnelle des arbres. Par ailleurs, l’influence des conditions biogéographiques sur la structure des peuplements forestiers est en train d’être testée et semble s’expliquer selon un gra- dient de pluviométrie croisé à la géolo- gie. Enfin, l’influence de la géologie, du sol, du modelé et de la pluviométrie sur Biodiversité et paysages en forêt tropicale humide guyanaise Cécile Richard-Hansen, Stéphane Guitet*, Florent Ingrassia* & Olivier Brunaux* *Office national des forêts – Direction régionale Guyane

Biodiversité et paysages en forêt tropicale humide guyanaise · restent à comprendre et à définir. Plusieurs hypothèses reposent sur la prise en compte des conditions géomorphologiques,

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Page 1: Biodiversité et paysages en forêt tropicale humide guyanaise · restent à comprendre et à définir. Plusieurs hypothèses reposent sur la prise en compte des conditions géomorphologiques,

53ONCFS Rapport scientifi que 2005

Habitats

Contexte de l’étude

Les études actuelles menées en Guyane sur l’impact de la chasse sur les populations animales ont montré que les densités de certaines espèces les plus sensibles, comme les grands primates, le pécari à collier Tayassu tajacu, le hocco Crax alector et l’agami Psophia crepitans, sont globalement inférieures dans les zones chassées. Cependant, l’absence ou la faible densité d’une espèce dans une zone ne doit pas être systématiquement attribuée à la pression de chasse tant que la qualité de l’habitat pour cette espèce n’est pas connue. En effet, des études récentes ont montré une importante variabilité des abondances et des peuplements animaux dans diverses zones indemnes de toute pression anthropique récente.

À l’échelle de la Guyane, une hétérogénéité des peuplements de « grande faune » est observée en fonction de l’habitat. Elle est fondée sur des critères variés de richesse ou de diversité du milieu naturel qui restent à comprendre et à définir. Plusieurs hypothèses reposent sur la prise en compte des conditions géomorphologiques, géographiques, climatiques et édaphiques, qui, directement ou indirectement (notamment à travers le cortège floristique mais aussi la nature du sous-bois, la productivité des peuplements…), influenceraient les peuplements de grande faune.

Par ailleurs, les typologies classiques qui permettent une classification des peuplements forestiers ou des stations par région naturelle, n’ont pas encore été développées en forêt guyanaise. Les acquis scientifiques préalables sont encore très incomplets compte tenu de la complexité des phénomènes en jeu dans le fonctionnement de la forêt tropicale humide (Pascal, 2001) et de la diversité spécifique des peuplements forestiers qui dépasse fréquemment les 150 espèces d’arbre par hectare (pour plus de 1 300 espèces recensées sur le département).

Un programme d’étude a donc été élaboré en partenariat avec l’Office national des forêts, l’Unité mixte de recherches ECOFOG et l’Institut de recherche et de développement. Il vise à établir une typologie précise des habitats forestiers, incluant les paramètres spécifiques et structuraux pour la faune et la flore et à élaborer une méthode de spatialisation des habitats à travers la géomorphologie qui semble être la clef d’entrée la plus pertinente pour comprendre la structuration de la biodiversité en Guyane à l’échelle du paysage.

Ce projet a été retenu par le Ministère de l’écologie et du développement durable dans le cadre de l’appel d’offre 2005 du programme « Écosystèmes Tropicaux » qui financera l’étude en grande partie.

État des connaissanceset hypothèses de travail

La diversité des forêts guyanaises…

De nombreux programmes scientifiques étudient actuellement la diversité spéci-fique des arbres en forêt guyanaise et sa relation avec le substrat géologique, les sols, et la dynamique sylvigéné-tique (Sabatier, 2004). Les premiers résultats montrent que l’influence du sol est forte :

– sur la composition f loristique, en particulier pour les milieux très con-traignants ;

– sur la répartition spatiale ou l’autécologie de quelques essences forestières en liaison avec le drainage ou la texture des sols ;

– sur la structure du peuplement à travers la hauteur dominante où les répartitions diamétriques.

Le projet « Diversité multi-échelles » (DIME), actuellement en cours, ana-lyse les influences croisées du substrat géologique et des caractéristiques pédo-logiques sur la composition spécifique et la diversité fonctionnelle des arbres. Par ailleurs, l’influence des conditions biogéographiques sur la structure des peuplements forestiers est en train d’être testée et semble s’expliquer selon un gra-dient de pluviométrie croisé à la géolo-gie. Enfin, l’influence de la géologie, du sol, du modelé et de la pluviométrie sur

Biodiversité et paysagesen forêt tropicale humide guyanaise

Cécile Richard-Hansen, Stéphane Guitet*, Florent Ingrassia* & Olivier Brunaux*

*Offi ce national des forêts – Direction régionale Guyane

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Habitats

la structure de la végétation en Guyane française par une approche de type géo-systémique est en cours d’étude.

… ses liens avec le paysage…

Plusieurs études ont démontré la faisa-bilité de l’approche par unité géomor-phologique sur le relief guyanais et ont permis de développer un processus de segmentation de l’espace et une première définition d’unités géomorphologiques. Les bases de cette approche se fondent sur une description d’interfluves élé-mentaires regroupés en fonction de leurs caractéristiques topographiques, leur forme, leur taille, leurs orientations générales, le tout étant étroitement lié au substrat géologique qui les supporte. On définit ainsi des zones de collines de formes variables, de plateaux plus ou moins larges et à différents niveaux d’altitude… sur granites, schistes de dif-férentes natures, roches volcaniques… Une méthodologie d’analyse rapide (Roullier, 1997 ; Ndongou, 1999) est actuellement utilisée par les aména gistes forestiers. Elle se déroule en une phase d’interprétation de prises de vues aérien-nes ou satellitaires qui permet de recon-naître et localiser les différents types de modelés caractéristiques du relief. Puis un croisement d’informations est réalisé avec les cartes topographiques thématiques (altitude, dénivellation) et géologiques pour aboutir à la définition et au zonage des unités. Une validation terrain permet de consolider les résultats obtenus. Cependant, la démarche actuel-lement utilisée en Guyane n’a pas de cadre normalisé et n’est pas standardi-sée à l’échelle du département.

…et influences sur la faunesauvage et les habitats.

La comparaison avec les pays voisins nous fournit une base de réflexion sur les sources potentielles de variabilité naturelle des peuplements de grande faune. En Amazonie, les milieux fores-tiers très tranchés existent du fait de leur inondation saisonnière (« Varzea ») ou non (« Terra ferme »). Cette inon-dation serait une source majeure de variabilité dans la biomasse globale et dans le cortège des mammifères, con-sidérablement plus important dans les forêts inondées ou alluviales que dans les forêts de terre ferme. Cette varia-tion s’expliquerait essentiellement par la nature et la richesse des sols, qui, pério-

diquement enrichis par les allu vions des fleuves permettraient une production primaire (feuilles et fruits) plus élevée pouvant accueillir des biomasses ani-males plus fortes (Peres, 1999). Ces zones à dynamique annuelle autorise-raient également un étalement des pics de fructification, réduisant la période de rareté en ressources fruitières.

En Guyane, l’opposition entre forêt de terre ferme et forêt inondée n’est pas aussi tranchée que celle des forêts amazoniennes. L’imbrication des dif-férents types de forêt reste plus com-plexe en raison notamment d’un réseau hydrographique très dense. Les densités animales sont plutôt comparables avec les forêts de type « terre ferme » du bassin amazonien, c’est à dire parmi les moins riches. Cette relative pauvreté des milieux du plateau des Guyanes a également été soulignée par la mise en évidence d’un gradient décroissant de richesse et de biodiversité selon la latitude et l’altitude, à l’échelle des forêts tropicales sud-américaines (Voss et Emmons, 1996). Certaines espèces patrimoniales comme les atèles, dont l’espèce a une répartition géographique réduite au plateau des Guyanes sem-blent par contre plus abondantes en Guyane que dans d’autres zones de l’Amazonie, et leur grande vulnérabilité à la chasse rend donc la responsabilité des gestionnaires du milieu naturel en Guyane encore plus importante.

Au-delà de l’impact de la chasse sur les espèces les plus sensibles, des analyses préliminaires montrent que de grandes disparités existent entre les zones non chassées. Certaines espèces sont parfois plus abondantes dans les zones chas-sées que dans les zones non-chassées. Ces différences de peuplements sont à mettre en relation avec le milieu naturel variable et plus ou moins favorable selon les espèces. Ainsi, selon nos résultats préliminaires des sites à topogra phie plutôt douce, proches de fleuves, seraient plutôt favorables aux ongulés (Pécari à collier Tayassu tajacu et cervidés Mazamasp.), aux rongeurs agoutis (Dasyprocta agouti) et acouchis (Myoprocta acouchy)et aux tinamous (Crypturellus sp. et Tinamus major), alors que les sites à relief marqué favoriseraient plutôt les marails (Penelope marail), les hoccos (Crax alector), les toclos (Odontopho-rus guyanensis) et les grands primates (Richard-Hansen, 2005).

Des résultats préliminaires montrent que la forte représentation, ou la domi-nance, de certaines familles végétales pourrait être liée à l’importance rela-tive de certaines espèces ou groupes d’espèces animales qui les consomment préférentiellement.

Par ailleurs, de nombreuses études mettent en évidence que le facteur limitant pour l’expansion numérique d’espèces animales dans une zone est constitué principalement par la pério dede pénurie des ressources alimentaires, et particulièrement pour de nom-breuses espèces frugivores. La présence sur certains sites d’espèces ressources clé, importantes dans le régime ali-mentaire et fructifiant à une période décalée par rapport à l’ensemble des autres peut également représenter un facteur important de développement pour certaines espèces animales assez spécialisées.

Problématiqueet intérêt de l’étude

Si les études en cours permettent d’éclairer une partie de la structuration de la biodiversité spécifique à l’échelle du paysage aucune approche globale ne permet à l’heure actuelle de faire le lien entre ces multiples relations bilatérales. Les jalons sont cependant posés pour expliciter les relations entre paysage, habitat et biodiversité et être capable de les analyser.

Notre projet d’étude propose de se situeren connexion et en complémentarité avec les programmes scientifiques en cours, mais en abordant le problème selon une démarche différente qui se veut directement opérationnelle, multi-disciplinaire et pragmatique.

On cherchera ainsi à valider les hypothèses qui sous-tendent la démarche d’aménagement forestier actuellement mise en œuvre, à savoir :

– un type d’« Unité de Paysage » cor-respond à un ensemble d’habitats bien particulier ;

– des relations fortes existent entre le type d’unité de paysage et les carac-téristiques dendrométriques d’un peu-plement ;

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Habitats

– la diversité biologique est liée à la diversité des habitats ;

– la conservation de chaque type d’unité de paysage permet de conserver un maximum de biodiversité (Julliot et al., 2000).

Une typologie d’habitats existe déjà pour la Guyane (classification CORINE Biotope, fondée sur la description des associations végétales) mais elle n’a encore jamais été mise en rela-tion directe avec les unités géomor-phologiques. Des études menées en Amérique du Nord ont cependant d’ores et déjà démontré l’influence de la géomorphologie sur la biodiversité à l’échelle du paysage (Nichols et al.,1998).

Protocole et démarchede travail

Plusieurs étapes doivent être franchies qui sont autant de sous-objectifs.

Formaliser la méthodede stratification de l’espaceforestier en unités de paysage

Cette étape s’appuiera sur les travaux déjà réalisés en ce domaine et sur l’expertise d’un groupe de travail réu-nissant des scientifiques de différents domaines (pédologie, écologie, bota-nique) et des forestiers (aménagiste, expert). La typologie unifiée qui sera ainsi définie prendra en compte les particularités des différentes zones biogéographiques. Cette première approche sera aussi mise en relation avec les données botaniques déjà dis-ponibles et centralisées à l’Herbier de Cayenne.

Caractériser les habitatsselon leurs différentescomposantes environnementales, floristiques et faunistiques

Cette approche multi-disciplinaire s’appuiera sur la mise en place de sites-ateliers pour lesquels les descrip-tions d’habitats seront associées à des inventaires. Le plan d’échantillonnage de ces sites-ateliers sera déterminé à partir de la cartographie réalisée lors de la première phase du projet. Chaque site sera décrit par un transect de 10

à 20 km environ sur 20 m de large sur lequel on procèdera à des relevés de descripteurs habitats et à un inventaire dendrométrique, détaillé par longueur de 100 m. Ces transects seront implantés de façon à obtenir une bonne représentativité de toute la variabilité intra-unités (notam-ment en fonction de la topographie). Ils seront les plus rectilignes possibles pour permettre leur utilisation en inventaire faunistique. Les variables descriptives retenues comprennent des paramètres :

– environnementaux : biogéogra-phie, topographie, densité du réseau hydrographique…

– pédologiques : présence de cuirasse, hydromorphie, sondages…

– structuraux : hauteur et structure diamétrique du peuplement des arbres, fermeture de canopée, densité du sous bois.

– botaniques : inventaires au genre ou à l’essence des arbres de plus de 20 cm de diamètre, présence d’espèces indica-trices, densité en lianes et palmiers.

Les transects seront ensuite découpés en grandes unités d’habitats « homogè-nes » sur la base des descripteurs pré-cédents.

Les relevés faunistiques, plus lourds d’un point de vue logistique, seront conduits sur une sélection d’environ 6 sites qui s’appuiera sur ce décou-page. Les sites choisis pour les relevés faunistiques devront présenter des profils géomorphologiques ou paysa-gers tranchés, pour mieux mettre en évidence les éventuelles différences de cortège faunistique, sans noyer la comparaison sous une variabi lité intra-site trop élevée. Pour cette par-tie, on devra en outre se limiter aux zones où la pression de la chasse reste minime (+ de 3 km des voies de circulation – pistes ou criques) et où le milieu n’a pas été fragmenté par l’exploitation de façon à ne pas intro-duire de biais. Les inventaires de faune seront réalisés selon le protocole du « line transect » qui est celui le plus classiquement utilisé pour la détermi-nation des abondances d’espèces dans ce type de problématique dans tout le bassin amazonien.

Établir les relations entrepaysages, habitats et peuplements

L’échantillon obtenu fera l’objet d’analyses statistiques à plusieurs échelles qui permettront d’explorer les relations existantes entre les différentes composantes des habitats et leur liens avec les unités de paysage. Les sites décrits feront ensuite l’objet d’une clas-sification à posteriori en s’orientant sur une sélection de descripteurs (habitats rencontrés, espèces remarquables ou préférentielles) traités selon les métho-des utilisées classiquement en typolo-gie, de façon à tester leur rattachement à priori aux unités de paysage et la pertinence de cette classification vis-à-vis de la diversité biologique. Cette analyse aboutira à la réalisation d’une matrice (unités de paysages X habitats) qui permettra de préciser la typologie des unités de paysage par une descrip-tion de ses habitats représentatifs et de la biodiversité qui y est rattachée.

On tentera également d’établir des relations entre cortège faunistique d’une part, type d’habitat, composi-tion f loristique (niveau des familles, des genres ou d’espèces dominantes), structure des peuplements forestiers d’autre part, en utilisant des métho-des exploratoires classiques (AFC, clas-sification hiérarchique). Les autres descripteurs du milieu définissant les habitats seront ensuite pris en compte dans les analyses de façon à carac-tériser les types d’habitats en fonction d’espèces faunistiques indicatrices.

Conclusion

Ce programme doit se dérouler en 2006-2007. Il formalise au sein de Silvolab la collaboration entre scienti-fiques (UMR) et gestionnaires (ONF-ONCFS).

L’intérêt pour la gestion concerne à la fois la gestion forestière menée par l’ONF et la gestion de la faune sau-vage pilotée par l’ONCFS, qui doivent trouver une articulation pour une com-plète prise en compte de la biodiversité dans la gestion des milieux forestiers.

À l’échelle du massif, la méthode d’aménagement forestier mise en place à partir de 1993 permet d’individualiser

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Habitats

des séries de « protection », permettant de soustraire de l’exploitation des zones qui se veulent représentatives de la bio-diversité « ordinaire » (série d’intérêt écologique général), ou d’habitats à « haute valeur patrimoniale » (série d’intérêt écologique particulier). Au niveau de la parcelle forestière, un certain nombre de mesures permettent également de prendre en compte la conservation de la biodiversité dans toutes les phases opérationnelles réalisées sur le terrain (inventaires, création de desserte, exploi-tation). Les résultats attendus de ce pro-jet permettront de mieux appréhender le contenu réel des séries d’intérêt écologique et de consolider les bases du zonage que le gestionnaire met en place dans le cadre de ses aménagements sur l’ensemble de la bande forestière aménagée, apportant

une nouvelle cohérence à la stratégie de préservation de la biodiversité des milieux forestiers.

La mise en place de mesures de gestion générales de la faune chassée (quotas ou périodes de chasse) est envisagée en Guyane, en particulier à travers l’élaboration des Orientations régiona-les de gestion de la faune sauvage et de l’amélioration de la qualité de ses habitats (ORGFH). Cependant, de nombreuses connaissances biologiques sont encore à acquérir pour leur mise en œuvre dans des conditions opti-males. La connaissance des habitats préférentiels des espèces pourra inter-venir dans la définition des outils de gestion adaptés selon le type de zone géographique et de milieu.

À l’échelle régionale, la mise en place d’un réseau d’espaces protégés (Réserve biologique domaniale, Réserve naturelle…) vise la sauvegarde du patri-moine naturel à travers ses éléments les plus remarquables, les plus sensibles ou les plus menacés. La connaissance des habitats plus ou moins favorables à certaines espèces animales pourra être un élément dans le choix ces zones à préserver. La cartographie et la représentation relative des divers habi-tats à l’échelon régional permettront d’extrapoler le niveau global de pres-sions ou de menaces sur les différentes espèces dans l’espace forestier « nord » du département, le plus soumis à des modifications et à des pressions anthropiques.

A B S T R A C T

Biodiversity and landscapes in the Guyanese forest

Cécile Richard-Hansen, Stéphane Guitet, Florent Ingrassia & Olivier Brunaux

Habitats are the most operational level of biodiversity expression in terms of land planning and population management. This project therefore sets out to develop the necessary tools for managers to characterize and spatialize the major forest habitats in Guyana. The aim is to draw up a precise typology of forest habitats, including specific and structural parame-ters for wild fauna and flora and to develop a method for spatializing habitats based on geomorphology which seems to be the most relevant field of study to understand the structure of biodiversity at the landscape level in Guyana.

For wildlife, the operational objective is a better understanding of the relationship between habitats and large animal populations in forest areas. This will provide a useful approach for the sustainable management of animal resources in Guyana.

B I B L I O G R A P H I E

Julliot C., Brunaux O., Dutrève B., Joubert P., Massemin D. & L. Tellier (2000) – Prise en compte de la biodiversité dans l’aménagement et la gestion forestière en Guyane. Rapport ONF DR Guyane. 54 pp.

Ndongou A. (1999) – Procédure de segmentation du territoire forestier en unités de paysage selon une approche géomor-phologique. Mémoire de l’Université ENGREF.

Nichols, J. D., Killingbeck K. T. & P. V. August (1998) – The influence of geomophological heterogeneity on biodiversity. II. ALandscape perspective. Cons. Biol. 12 (2) : 371-379.

Pascal J. P. (2001). Structure et dynamique des forêts tropicales humides. C.R.Acad. Agri. Fr 87 (5) : 57-66.

Richard-Hansen C. (2005) – Connaissance et gestion de la faune chassée en zones isolées de Guyane. Rapport Convention ONCFS/Ministère de l’Outre Mer. 47 pp.

Roullier C. (1997) – Segmentation de l’espace forestier : description géomorphologique d’une région naturelle de Guyane. DESS « Espace Rural et Environnement » de l’Université de Bourgogne, Dijon.

Sabatier D. (2004) – Évaluation multi-échelles de la diversité spécifique, structurale et fonctionnelle des arbres en forêt guya-naise : Prise en compte du substrat géologique, des sols et de la dynamique sylvigénétique. Rapport d’activité intermédiaire. Rapport AMAP. 40 pp.

Voss R. S. & L. H. Emmons (1996) – Mammalian diversity in neotropical lowland rainforest : a preliminary assessment. Bull. Am. Mus. Nat. Hist. 230 : 1-115.

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Habitats

Étape 1Stratifi cation à l’échelle régionale

sur le périmètre des forêts aménagées

Étape 2Détermination des habitats par unité de paysagesur transects de 10 à 20 km

Étape 3Caractérisation des habitats par inventaires

sur tronçon homogène de 2 à 3 km

Méthodologie de caractérisation et de spatialisation des habitats :démarche projetée dans le cadre de l’étude