16
l e ma g a z i n e d u c o u r t m é t r a g e hors série I

Bref le magazine du court métrage - Hors Série

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Le Jour le plus Court Fête du court métrage 19 - 20 - 21 décembre 2014

Citation preview

Page 1: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

le magazine du court métrage

hors série I

Page 2: Bref le magazine du court métrage - Hors Série
Page 3: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

Si le cinéma est né d’une forme courte, avec Méliès,Lumière, il a traversé toute l’histoire du cinémaet emprunté tous les styles. Il est toujours aujour-

d’hui un espace où se découvrent et s’exercent les nou-veaux talents et dans lequel se construisent la libertéet l’ambition des créateurs. Que le solstice d’hiver luisoit entièrement dédié, que les villes soient investiespar les rêves éveillés des réalisateurs, l’idée aurait pluaux surréalistes. La 4e édition du Jour le plus Court,organisée par l’Agence du court métrage, en offrantdes projections collectives et gratuites sur l’ensembledu territoire et dans une très grande diversité de lieux,participe pleinement à la promotion du court métrage.

Le CNC a toujours soutenu le court métrage parcequ’il est le lieu par excellence de la recherche dans ledomaine de l’image et que sa vitalité constitue ungage d’avenir pour le secteur du cinéma et de l’audio-visuel. Ce dynamisme se mesure dans le volume deproduction, avec environ six cents courts métragesfrançais par an qui obtiennent un visa d’exploitation,l’engagement des acteurs du secteur associatif et deschaînes de télévision pour la diffusion des œuvres. Il arencontré également une reconnaissance interna -tionale, avec trois Oscars, tous soutenus par le CNC:en 2008, Le Mozart des pickpockets, film de fiction dePhilippe Pollet-Villard, en 2010, Logorama, film d’ani-mation du Collectif H5 et, en 2014, Mr Hublot, film d’animation de Laurent Witz et Alexandre Espigares.

À travers cette fête d’envergure nationale, c’est leformidable travail que font tout au long de l’annéeles équipes de l’Agence du court métrage qui est misen lumière. Depuis trente ans, l’Agence développe,avec le soutien du CNC, une mission de promotion etde diffusion du court métrage en France, tisse desliens entre les cinéastes et les diffuseurs, pour que lecourt métrage soit considéré comme une expressioncinématographique à part entière, accessible au plusgrand nombre. Je souhaite à cette nouvelle éditiondu Jour le plus Court tout le succès qu’elle mérite, etau public de belles découvertes.

rédérique Bredin, Présidente du CNC

1

le magazine du court métrage,décembre 2014, numéro hors série.Fondateur : François Ode.Bref est publié par l'Agence du court métrage (association subventionnée par le CNC), délégué général : Philippe Germain, directrice administrative et financière : Marie Cerciat, 77 rue des Cévennes, 75015 Paris. Tél. : 01 44 69 26 60 – Fax :01 43 80 95 59. www.brefmagazine.com / [email protected] Facebook : revue Bref.Directeur de la publication : Philippe Pilard. Rédacteur en chef : Jacques Kermabon.Ont participé à ce numéro : Christophe Chauville, Stéphanie Clouet,Sylvie Delpech, Solen Faugère et Donald James.Conception graphique : Anabelle Chapô.Impression : imprimerie Setig certifiée “Imprim’Vert” sur du papier 100% issu de forêts gérées durablement.Dépôt légal : à parution. ISSN 0759-6898.Commission paritaire n° 05 07 G 86 535.Publié avec le concours du Centre national du livre et de la SACD. Exemplaire gratuit – ne peut être vendu.

L’équipe du Jour le plus CourtDirectrice artistique : Catherine Bizern,administratrice : Laure Tarnaud,chargé du développement et des publics : Christian Borghino,chargée de communication : Nadège Vallette Viallard,community manager : Charlotte Forbras,stagiaire communication : Marion Contentin,régisseuse technique : Bérengère Prévost,technicien vidéo : Amaury Denonfoux,technicien DCP : Sylvain Collinpresse,attachée de presse : Karine Durance.Manifestation organisée par l'Agence du court métrage.www.lejourlepluscourt.com

Page 4: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

Bref HORS SÉRIE / DÉCEMBRE 2014

Bref : Par rapport à l’activité de l’Agence du court métrage,est-ce que le Jour le plus Court fait partie de ses missions ou est-ce un événement ponctuel finalement assez éloignéde ses pratiques?Philippe Germain: Le Jour le plus Court correspond et met en

lumière les missions traditionnelles de l’Agence, lieu à la fois de lamémoire du court métrage – puisque depuis trente ans, nous conser-vons tout un patrimoine cinématographique – et de diffusion, carnous restituons ce patrimoine à des diffuseurs, que ce soient descinémas, des festivals, des associations, des médiathèques, des médiasaudiovisuels ou internet.

Catherine Bizern : À une époque où tout ne semble existerque dans l’événement, le Jour le plus Court permet un coup de pro-jecteur sur le film court avec l’ambition d’intéresser de nouveauxpublics tout en popularisant la diffusion du court métrage. Ce pointd’orgue festif est une façon d’affirmer que le court métrage existeavec force et de mieux faire savoir qu’il réunit nombre de specta-teurs tout au long de l’année. Notre rôle est ainsi de faire en sorteque ce soit un moment fort et que la presse relaie vers le plus grandnombre la qualité de ce travail de longue haleine. Le Jour le plusCourt doit aussi permettre de rendre mieux visibles les personnesqui œuvrent pour la diffusion du court et que celles-ci puissent met-tre en avant leur propre travail et voir comment elles sont connec-tées à d’autres.

Le Jour le plus Court doit reposer sur ces deux jambes : propo-ser une opération particulière, à la fin de l’année, et donner à voirtoutes les initiatives qui se font au long cours et de manière peut-être moins spectaculaire, mais plus profonde.

PG : Il est en effet important de battre en brèche un certainnombre de lieux communs. On entend souvent que le court métragen’est pas diffusé. La diffusion du court n’obéit pas aux règles de lasortie hebdomadaire, très souvent suivie d’une disparition rapidequand les films n’ont pas assez de succès. Les courts peuvent conti-nuer à être diffusés bien des années après leur année de produc-tion. Il suffit qu’un programmateur – un passeur – veuille montrerces films au public.

En 2013, il y a eu mille six cents titres différents diffusés au moinsune fois dans une salle de cinéma ou dans un lieu d’exposition aveclesquels l’Agence du court métrage travaille. Quatorze films ont faitplus de dix mille entrées. En comparaison, la même année, quatre-vingt-onze longs métrages français (sur deux cent trente-cinq) n’ontpas dépassé les dix mille entrées. Ce sont des chiffres publiés par le

Centre national du cinéma et de l’image animée qui, de surcroît, neprend pas en compte la diffusion des festivals. Aujourd’hui, on recenseprès de trois cents festivals qui font le pari de programmer des courtsmétrages, comme par exemple Clermont-Ferrand et ses cent soixantemille entrées.

Un autre lieu commun tient au regret que le court métrage nesoit plus présent en première partie de programme. Même si cemode de diffusion n’en est qu’un parmi d’autres, nous avons cons-taté que, l’année dernière, notamment par le biais du dispositif RADIde l’Agence du court métrage, les films choisis par des directeursde salles pour leurs premières parties de programme ont été vuspar quatre millions de spectateurs. C’est une réalité qu’on a du malà faire passer dans les médias et même auprès des institutions. Ilne faut pas oublier aussi que dans tous les dispositifs d’éducationà l’image, dans les lycées, collèges et écoles, on utilise de plus enplus de programmes de courts métrages.

Bref : Comment expliquez-vous ce hiatus entre cette réalité que vous décrivez et l’image à laquelle est associé le court métrage?PG: Paradoxalement, le court métrage est visible et invisible. Il

est visible par les associations sur le terrain, les festivals, des sallesde cinéma, mais il manque un relais médiatique, institutionnel pourconforter et valoriser ce travail. C’est l’un des enjeux du Jour le plusCourt que de mettre en valeur cette diffusion du court métrage,mais sa création aussi. Il ne faudrait pas présenter le court commeune filière coupée de la réalité de la création cinématographiquedans son ensemble. Aujourd’hui, le court métrage est un véritablelaboratoire de développement et d’expérimentation de la filièrecinématographique. Il permet le renouvellement des talents et dela filière professionnelle, car il constitue le terreau de recherchesesthétiques qu’on n’a pas dans le long métrage, balisé par des enjeuxcommerciaux et économiques. C’est cette réalité riche et complexeque doit montrer le Jour le plus Court.

Bref : Par rapport aux précédentes éditions, cette année, le Jour le plus Court a la volonté d’éditorialiser sa programmation.CB:Oui, c’est la première fois. En même temps, ce n’est qu’une

partie du Jour le plus Court. Proposer une programmation forteautour d’une thématique et de cinéastes est une manière de rendre compte d’un pan du cinéma à partir d’un cheminement

2

D’ampleur nationale et internationale, la fête du court métrage en est à sa quatrième édition. Rencontre avec ses organisateurs : Philippe Germain, délégué général de l’Agence du court métrage,et Catherine Bizern, directrice artistique du Jour le plus Court.

LE COURT MÉTRAGEDE PLUS EN PLUS PRISÉ PAR LES SPECTATEURS

ACTUALITÉSévénement

Page 5: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

particulier. À terme, on pourra essayer d’associer ce geste pro-grammatoire, qui donnera une direction à chaque édition du Jourle plus Court et invitera systématiquement à la découverte d’au-teurs, avec un soutien à une diffusion d’œuvres d’autres struc-tures et à une valorisation d’initiatives territoriales. Ainsi, la mani-festation serait conçue dans un aller-retour entre ce qui émaneraitde la base et ce qui relèverait d’un regard singulier sur la pro-duction du court métrage.

À l’avenir, il faudra dynamiser toutes les initiatives locales neserait-ce que parce que si nous voulons une diffusion plus impor-tante pendant deux ou trois jours de fête, nous savons que les capa-cités techniques de l’Agence et du Jour le plus Court ne sont pas infi-nies. Nous pouvons traiter trois mille séances au maximum, alorsqu’on en souhaiterait cinq mille ! Il faut donc que ces autres séan-ces viennent d’ailleurs, du côté de toutes ces structures qui diffu-sent, qui ont leur propre catalogue (les producteurs, les régions, etc.)et qui pourraient faire des propositions de programmations pourdes publics de proximité.

Bref : À ce moment-là, le Jour le plus Court apportera àcette base plus de visibilité…CB:Être visibles et être connectés les uns avec les autres… Mais

aussi ouvrir des lieux qui d’habitude ne le sont pas. C’est cela l’ave-nir du Jour le plus Court.

Bref : Paradoxalement, le Jour le plus Court a lieu sur trois jours…CB: Le jour le plus court, le 21 décembre, tombe cette année un

dimanche. On a voulu étendre la manifestation sur la semaine (levendredi 19 décembre) pour permettre aux scolaires d’y participer ;l’année dernière, sur deux mille deux cents séances, il y en a eu plusde mille proposées dans les écoles. Les cinémas, eux, programmentdes séances jeune public habituellement le dimanche. Quant auxmédiathèques, elles reçoivent les usagers surtout le samedi. Cestrois jours coulaient de source.

PG: Il est important de dire combien les acteurs de cette mani-festation (les salles, les associations, etc.) participent de l’aména -gement culturel du territoire. C’est aussi cette réalité qu’il faut mon-trer pendant le Jour le plus Court, car l’action culturelle est un systèmefragile qu’il faut conforter. C’est tout l’enjeu de la journée profes-sionnelle qui aura lieu le 19 décembre.

LABORATOIRE

Gestion des rushes Montage - Étalonnage

VFX - DCP - Sous-Titrage

YMAGIS I 106 rue La Boëtie 75008 Paris I Tél. 01 75 44 88 85

Ses Souffl es I de Just Philippot I Offshore

Planter les choux I de Karine Blanc I Takami Productions

Bleu Blanc Gris I de Sébastien Bardet I Magnetic Films

Pour toutes les étapes de postproduction de votre court-métrage

La diffusion du court a son agence

L’Agence du court métrage est une association régie par la loide 1901, créée en 1983 par un groupe de professionnels du cinéma(auteurs, réalisateurs, producteurs et distributeurs) dans le but depromouvoir et favoriser la diffusion du court métrage en France.Elle permet donc, depuis trente ans, de faire le lien entre ceux quifont les films courts et ceux qui les montrent.

Parmi ses activités de diffusion vers les salles, l’Agence a créé leRADI. Ce dispositif rassemble trois cents salles de cinéma qui pro-posent à leur public des séances privilégiées associant aux projec-tions de longs métrages des films courts en avant séance.

www.agencecm.com

Page 6: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

Pour sa quatrième édition, la manifesta-tion lancée par le Centre national du cinémaet de l’image animée propose vingt-cinq pro-grammes autour de cette question dont qua-tre d’entre eux sont destinés aux scolaires etau jeune public, et cinq composés par les struc-tures prestigieuses que sont la Fémis, le Grec(le Groupement de recherche et d’essais ciné-matographiques), Light Cone (l’association depromotion du cinéma expérimental) et LobsterFilms (fameux pour sa collection de films rareset anciens).

des films pour tousUne centaine de courts métrages au total,

tous, pour l’essentiel, glanés dans la produc-tion francophone récente et, parmi eux, unquart de films d’animation. Il y en a pour tous,pour tous les goûts : de l’expérimental hard-core (Paths of Gde Dietmar Offenhuber, 2006)au film débutant (Dalilade Julian Vogel, 2012),

de l’animation poétique (Les escargotsde RenéLaloux, 1965) au documentaire politique (BlackClay de Fabrice Chiambretto, 2012), du génialportrait de famille tourné avec un téléphone(This is the Wayde Giacomo Abbruzzese, 2013)à la série B bien ficelée (Yuri Lennon's LandingOn Alpha 46 d’Anthony Vouardoux, 2010), dela fiction gorgée de bons sentiments (Ya basta!de Gustave Kervern et Sébastien Rost, 2010) aufilm d’animation insolent et cynique (Il étaitune fois l'huile de Vincent Parronaud, aliasWinshluss, 2010), du bijou historique (TheAirship Destroyerde Walter R. Booth, 1909) à lacomédie du remariage (Le refrainde BenjaminSerero, une véritable perle de 2012).

Bref, la palette est large d’autant qu’autourde cette question clé – C’est quand la paix? –s’articulent d’autres interrogations ou théma-tiques (La paix est précaire, Stop war !, Trêve,L’intranquillité de l’être, La paix, c’est de la science-fiction, etc.), qui elles-mêmes ouvrent la voie à

une exploration plus étendue, verticale et hori-zontale, où paix et guerres métaphorisent, selonles cas, un trauma, un climat ou un état. On saitque les avantages des programmes théma-tiques constituent en même temps leurs prin-cipaux points faibles. Tout en facilitant uneapproche, elle en délimite la portée.

Heureusement, au cinéma, les films mar-chent souvent de travers, à rebours ; ils trans-cendent leur propre sphère. Ainsi L’amour existede Maurice Pialat – un des rares films du patri-moine au programme – ouvre la séance inti-tulée “La paix est précaire”. La paix est-elle pré-caire dans L’amour existe ? Pas vraiment. Pialatenregistre le calme plat, le train-train de veauxpressés de se rendre à leur auge. Le hors-champ(une bagarre, les pauvres, les immigrés), il estbien le seul à le voir (et encore il ne voit pastout) ; seul contre tous. Ce film, cri amer etmanifeste poétique et politique, au titre iro-nique (y'a d'la haine, plutôt) est signé par un

4

La guerre est partout. Les conflits larvés, déclarés ou pourrissants n’ont jamais été aussi nombreux que cette année. Pour mémoire, 2014 aura également été celle des célébrations de la Première Guerre mondiale… Alors, s’interroge le Jour le plus Court, c’est quand la paix ?

C’EST QUAND LA PAIX ?LES FILMSau programme

FAQQu’est-ce qu’un court métrage ?Depuis 1964 sont considérés comme courts métrages les films qui, pour un format de 35 mm,

ont une longueur inférieure à mille six cents mètres, soit moins d’une heure. À quand une nouvelledéfinition énoncée à l’heure du numérique ?

Page 7: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

réalisateur qui, en 1960, est en guerre. En guerrecontre le système, contre les cons, contre sesamis et contre… lui-même.

Car on a beau dire “la guerre, c’est dur”, “c’estmoche”, “plus jamais ça !”, etc., la guerre est làdans un présent glacé, partout et indéfini, ellese voile ou se dévoile, elle se découvre ou sedrape de mille visages. Celui de la comédiehumaine : des cris accompagnent la naissancedes hommes, la colère les fait grandir (Sientjede Christa Moesker, 1997) ; celui de la tragédie :les larmes nourrissent les futurs escadrons dela mort (Les escargots de René Laloux) ou duburlesque : la guerre, pour quelques monceauxde pierres (Us d’Ulrich Totier, 2013). C’est que,éclatante avec ses cimetières et ses champs deruines ou latente car muette et intérieure, laguerre n’a pas d’uniforme. Cent films pour situerdans le temps ou dans l’espace cette notion duchamp de bataille au champ politique, du

champ national au champ social ou conjugal,c’est finalement assez peu.

nommer l’ennemiQue faut-il pour une bonne guerre ? Un

adversaire. En 1956, Howard Hawks expliquaitaux Cahiers du cinémaque “la plus haute formedu drame est l’homme en danger”. L’ennemi (aucinéma) conditionne le drame. Sa présence(qu’elle soit réelle ou allégorique) instille unsentiment de danger qui alimente à propor-tion, ou mieux de manière disproportionnée,tout suspense. Dans In the Border States (filmde 1910) de DW Griffith, un père de famille estappelé au front sous l'uniforme nordiste.Pendant son absence, l’une de ses filles sauveun homme de l’armée des confédérés en lecachant dans un puits. Le montage parallèle(toujours aussi magnifiquement exploité parGriffith) converge vers un dénouement on ne

peut plus explosif, mais finalement assezcomique et immoral, surtout quand on sait dequel bord penchait le réalisateur (du côté desSudistes).

Car, au cinéma comme à la guerre, rienn’est neutre. La traversée, l’entrée ou la sortied’un plan suffit à créer une tension. Hong Kong,1998 : Gerard Holthuis filme la colonie britan-nique avec une pellicule 35 mm, noir et blanc.Le grain de ses images est saisissant. Holthuisse laisse happer par l’ombre d’un monde quise pixellise : immeubles tracés au cordeau, agi-tation effrénée, perspectives de néons noirs etau-dessus de lui, à quelques mètres à peine,très bas dans le ciel, des avions rasent les toits.L’aéroport de Kai Tak, situé en plein centre deHong Kong ne fermera ses portes qu’à la finde l’année. Holthuis chante son requiem.Comme Étienne-Jules Marey, armé de son fusilphotographique, il capte le mouvement de ces

5

Bref HORS SÉRIE / DÉCEMBRE 2014

“C’est tellement dommage qu’on ne voie plus les courts métragesau cinéma !”Ils sont beaucoup vus pourtant ! Ils ne sortent pas le

mercredi, c’est tout. Le plus souvent, ils sont diffusés lorsde séances ponctuelles, mais elles sont nombreuses. Biensûr, cette diffusion concerne surtout les salles art et essaiou recherche, pas les grands circuits, ça ne les intéressepas, ou très exceptionnellement. Mais sachez que biensouvent les courts métrages circulant via l’Agence du courtmétrage sont beaucoup plus vus que bien des longs métra-ges aux sorties plus ou moins confidentielles.

Page 8: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

Bref HORS SÉRIE / DÉCEMBRE 2014

drôles d’oiseaux ; il détaille les dernières envo-lées de ce qui, des années durant, aura consti-tué une menace tant pour les habitants de laville que pour les passagers de ces vols longscourriers. Son film intitulé Hong Kong (1999)tire magistralement profit de ses cadres fixes,lesquels, entre terre et ciel, se trouvent systé-matiquement troublés et troués par l’ombre,les tremblements ou la présence gigantesquede ces mastodontes volants.

film de guerreAvec la guerre, le septième art n’a eu de

cesse de tisser un réseau impressionnant derelations de nature à susciter des mouvementscinématographiques (l’expressionnisme alle-mand, le néoréalisme…) ou à dessiner un genreà part entière : le film de guerre. Sur l’ensem-ble des courts métrages proposés se trouventpeu, très peu de films dits de guerre à propre-ment parler. Deux films d’animation : Le jourde gloire de Bruno Collet (2007) et Lettres defemmesd’Augusto Zanovello (2013). Ce derniermérite le détour tant pour son traitement – uneanimation en papier mâché en parfaite adé-quation avec son sujet (les lettres que reçoi-vent les soldats) – que pour sa forme quiemprunte la scénographie duelle (entre tran-chées et champs de barbelés, entre promis-cuité et espace de l’affrontement) des grandsclassiques consacrés à la Première Guerre mon-diale, tels que Charlot soldat (1918) ou encoreSergent York d’Howard Hawks (1941).

La guerre pose sans cesse la question del’ennemi et de l’ami, de l’adhésion ou de l’aver-sion, de la subjectivité ou de l’objectivité, dupluriel et du singulier. Au programme du Jourle plus Court, on trouve aussi l’explosif Totemsde Sarah Arnold (2014), qui évoque égalementmais autrement la Grande Guerre. Adèle, jeunethésarde spécialiste de la question du Soldatinconnu, s’en retourne chez elle, dans le Nordde la France, pour s’occuper de son grand-pèresuspecté par l’État d’abriter le corps d’un sol-dat dans son jardin. Or qu’il s’agisse des osse-ments d’un aïeul ou de celui d’un étranger,tous les corps morts pour la France appar-tiennent à la République. Aussi bougonne queson grand-père, la jeune femme, qui hésite àse mettre en conformité avec la loi, rencontreun artiste. Ce dernier sculpte à la tronçonneuse

des silhouettes dans des troncs d’arbres dontle bois porte encore les incises du passé et qui,une fois calcinés, sont dressés à la verticale pourcomposer une série de silhouettes (les œuvressont signés Christian Lapie), toutes semblables,à la fois immenses et vulnérables.

Tout se passe comme si, en écrivant sonhistoire unique et indivisible, la Républiqueconfisquait aux victimes du conflit leur deuil,si bien qu’alors, il leur fallait en passer par là,par ce détournement, par ce subterfuge et cettenouvelle mise à mort (symbolique, totémique)et ce, non pas pour dire la perte, mais afin queles anonymes retrouvent leur place, leur nom.

la paix au singulierAinsi les addenda ne cessent de s’addition-

ner au chapitre de l’histoire. Fabrice Chiambretto

6

LES FILMSau programme

Le RADI ou l’avant-programmePar le passé, au cinéma, on voyait avant les

longs métrages des films courts. C’était systéma-tique car c’était obligatoire…

Le caractère obligatoire de la diffusion descourts métrages en avant-programme n’existeplus depuis 1953. En revanche, l’Agence du courtmétrage propose depuis plus de vingt ans un ser-vice qui permet aux salles volontaires d’avoir accèsà un court métrage différent chaque semaine dansun catalogue de deux cent cinquante films demoins de quinze minutes. C’est près de trois centssalles qui sont abonnées à ce service en France etqui, chaque semaine, donc, passent un courtmétrage avant le long de leur choix.

Ce service s’appelle le RADI.www.agencecm.com/pages/radi.php

Le Festival du court métrage de Clermont-Ferrand dépassetoutes les statistiques !Cette manifestation qui a lieu au creux de l’hiver est considérée comme le plus grand

festival de court métrage au monde. Il reçoit plus de huit mille deux cents films à vision-ner pour la sélection officielle, et n’en retient que 2 % soit, cent soixante films provenantde plus de cent trente pays.

Chaque année, les chiffres explosent et pas seulement pour les films proposés ; en2014, cent soixante mille entrées ont été comptabilisées… Aix-en-Provence, Alès, Angers,Annecy, Aubagne, Belfort, Brest, Brive, Cannes, Créteil, Douarnenez, Gardanne, Grenoble,Lille, Marseille, Meudon, Montpellier, Nice, Pantin, Paris, Vendôme, Villeurbanne…, il y aenviron trois cents festivals de cinéma en France qui proposent des courts métrages.

Voir l’agenda des festivals sur www.brefmagazine.com

Page 9: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

dans son très classique (et néanmoins réussi)documentaire Black Clay retrace l’épopée sansvague de Barbara Johns ; avant Martin LutherKing, le 23 avril 1951, cette jeune femme noire deseize ans appelait ses camarades de lycée à fairela grève. Une manière de rappeler que le mou-vement antiségrégationniste a d’abord été portépar des inconnus.

Quelques années plus tard, au mêmeendroit, “pays des téléphones audibles et des chan-teurs engagés qui ont du talent”, dans La sixièmeface du Pentagone, Chris Marker filme la grandemanifestation du 21 octobre 1967. “En une nuit,ils sont passés de l’attitude au geste politique”commente le cinéaste à propos des manifes-tants. C’est que, en 1967, la guerre engage encoretous les individus, elle monopolise entièrementla cité. Aujourd’hui les guerres coloniales sont

oubliées. Mais le cinéma contemporain accueilleleurs traumatismes (Octobre noir ou Malek, Saïd,Karim et les autres…, de Florence Corre et d’Aurel,2011), rend compte de l’impossible négociationavec le passé (Son Indochine de Bruno Collet,2012) et évoque le retour du refoulé (Le silenceet l’oubli de Christophe Delsaux, 2011).

guerres pluriellesAujourd’hui les conflits sont dilués dans le

flux continu des informations: partout ou nullepart. Ce sont des événements entièrement déta-chés de l’expérience qui, néanmoins, ordonnentde nouvelles réalités, recomposent les nations.

Alors que la question conflictuelle de l’im-migration occupe toutes les grandes messesélectorales, le réalisateur Basile Doganis abordeaudacieusement le sujet sans prendre les gants

7

Les courts à la téléIl a longtemps fallu être insomniaque pour voir les courts à la télé, car

les émissions dédiées à ce format passent à des heures indues sur le petitécran. Heureusement, le Replay change la donne.

Quatre chaînes en France aident la production des courts métrages enpré-achetant et/ou en coproduisant les films en vue de les diffuser : France 2,France 3, Arte et Canal +. Elles leur consacrent aussi des émissions plus com-plètes avec interviews, sujets thématiques et reportages : Histoires courtes,Libre court, Court-circuit ou Mickrociné, pour les plus anciennes. On en déni-che aussi sur la TNT…

des bons sentiments dans Journée d’appel (2014).Appelés à faire leur journée de la citoyenneté,des jeunes de banlieue vont faire ce qu’ils saventfaire, ce qu’on attend d’eux : jouer aux lascars,mettre dans la même case ceux qui – flics, mili-taires et Blancs – les mettent dans une seulecase. Parallèlement, le réalisateur met en scènele récit d’un de ces jeunes qui, ayant raté sontrain, conduit sur place par un garçon qu’il mau-dit, arrive à Versailles devant des portes closeset va devoir, malgré lui, passer une journée avecun blanc-bec. En mettant en scène la Républiqueen échec, ce film fait l’étrange et beau constatque la recomposition, la réconciliation ne sontpossibles qu’en faisant un pas de côté : l’écolebuissonnière, la désertion ou la rébellion. Plutôtque la paix, c’est peut-être là une solution.

Page 10: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

Bref : Vos parcours respectifs dans le court métrage sont contrastés : une dizaine de films pour vous, Benoit, et un seul pour vous, Axelle, qui plus est un moyen métrage…Axelle Ropert :Contrairement à l’idée reçue, je trouve qu’il est

plus difficile de réussir un court métrage qu’un long. Pour moi, unrécit de cinéma ne peut se développer que sur la durée. Commentfaire exister une histoire sur dix minutes sans que cela soit une blagueou un simple effet ?

Benoit Forgeard:Moi, je viens de la vidéo d’art ; je ne connais-sais pas spécialement le court métrage, mais il me semblait qu’il s’agis-sait d’une forme de cinéma que je pouvais entreprendre assez rapi-dement, sans trop de moyens, et avec la possibilité d’enchaîner lesfilms. Et pour moi, au contraire d’Axelle, il m’est assez aisé d’écrirevingt pages, mais pas cent ! J’ai ressenti ça sur mon premier longmétrage, Gaz de France, où le moment où il faut faire progresser lanarration, faire évoluer les sentiments, m’a semblé un peu délicat…

Bref : Cette différence vient peut-être de celle de votre formation initiale : les Lettres et la critique de cinémad’une part, les arts contemporains de l’autre?AR: Ce qui m’a formée, c’est avant tout la vision des films, et plus

particulièrement des classiques américains des années 1940 et 1950.Ma première envie, en commençant à écrire, a donc été de me dirigervers le long.

BF : J’ai commencé tardivement à regarder des films, à m’in-téresser à l’histoire du cinéma et ce n’est pas une pose de ma part !En entrant aux Beaux-Arts, je ne connaissais rien, ou presque, ducinéma, sinon le cinéma populaire vu à la télévision. En fait, ce nesont pas des films, mais des poètes ou des artistes comme MarcelDuchamp qui m’ont donné envie de faire du cinéma…

8

Cette année, le Jour le plus Court met trois cinéastes1 à l’honneur : Axelle Ropert, avec une carte blan-che en deux programmes, Benoit Forgeard et Jean-Charles Hue, dont on pourra découvrir l’essentieldu travail. Hasard des agendas, nous avons d’abord rencontré les deux premiers et, quelques joursaprès, Jean-Charles Hue, qui est revenu sur son long parcours créatif. Discussion croisée.

TROIS CINÉASTESENTRE COURTS ET LONGS MÉTRAGES

RENCONTRESfocus

Axelle Ropert et Benoit Forgeard

�1. Retrouvez les portraits filmés de ces cinéastes, entre autres, sur le site de la mani-festation : www.lejourlepluscourt.com

Page 11: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

Bref : Vous vous êtes frotté assez vite, tout comme Axelle, au format du moyen métrage…BF: Oui, c’est vrai, avec Belle Île en mer, mais je suis très vite revenu

à davantage de concision. J’aime que les choses soient lancées rapi-dement et c’est ce qui fait que le “court court” me plaît.

AR: Le moyen métrage, c’est une durée que je trouve très intéres-sante, un peu l’équivalent de la nouvelle en littérature. Pour Étoile vio-lette, une quarantaine de minutes me permettait de faire exister unrécit qui n’aurait ni le côté étriqué de certains courts métrages, ni lecôté artificiellement “étiré” d’un petit long métrage. Je suis persuadéeque le numérique libéré des contraintes de coût a encore aggravé ladifficulté de bien des courts métrages à travailler leur durée.

J’ai été obligée de tourner en numérique mon long métrage,Tirez la langue mademoiselle (2013), pour des raisons budgétaires,mais je compte bien revenir au 35 mm. Ce n’est pas du tout un per-fectionnement technique facilitant l’accès à la réalisation, mais undiktat de l’industrie auquel nous, cinéastes, avons beaucoup de malà nous opposer. Le niveau esthétique moyen du cinéma a baissé, laplupart des films ressemblent maintenant, sur le plan de l’image, àdes “aquariums hyper réalistes” (ce côté à la fois glacé et trop réel dunumérique), et il y a une beauté propre à l’argentique qu’on a totale-ment perdue.

BF: En même temps, lorsque je débutais, j’aurais trouvé fantas-tique d’avoir ce moyen de faire des films plus facilement, car le 35 mmpouvait encore paraître compliqué. Il me semble un peu bizarre deregretter que la technologie ait finalement cet effet pervers. Le prob-lème est peut-être que trop de gens s’emparent des caméras sanssavoir quoi filmer ! Mais ce n’est pas pire qu’en littérature, où les édi-teurs croulent sous les manuscrits…

Bref : Ce serait alors plus des problèmes de scénarios?AR: S’il y a un problème de scénario dans le cinéma français,

c’est plutôt dans le cinéma “grand public”, où l’écriture est souventbâclée. Les “premiers films” sont parfois maladroits ou bancals, maispas particulièrement mal écrits, je trouve.

Ce qui me chagrine plus, c’est que beaucoup de jeunes cinéastessont obsédés par le naturalisme, le réel, et que trop peu s’intéressentvraiment à la fiction. Ou alors à l’extrême, les scénarios étant cade-nassés par des gens qui se promeuvent comme “super-scénaristes”,et qui oublient qu’il faut aussi trouver les respirations d’un scénario…

BF: Mais est-il toujours aussi dominant que cela, ce natura lisme?Bon, il est vrai qu’il y a un cinéma assez pénible pour moi, qui m’en-nuie toujours un peu, qui force toujours trop le trait…

AR : Dans les années 1990, quand j’avais vingt ans, il y a avaitsurtout cette école naturaliste, “l’école Pialat”, dans laquelle je neme reconnaissais pas du tout. Aujourd’hui, j’ai le sentiment queles choses sont plus dispersées et il semble plus difficile de dresserdes filiations.

Bref : Vous situeriez-vous dans les fameux “films du milieu”dont on parle si souvent?BF : J’ai toujours travaillé sur la base de petits budgets et ces

films du milieu, pour moi, ont déjà pas mal d’argent ! Le budget deGaz de France n’est que la moitié de celui de certains courts !

AR: Je ne suis pas assez calée en production pour répondre. Maisje pense que la grandeur du cinéma français réside aussi dans sonétrangeté: Tati, Bresson, Demy, Rohmer, Rivette, et même Truffaut fai-saient des films magnifiques, mais fondamentalement étranges. Lesavoir-faire d’un producteur consiste à produire comme “normaux”(et donc rassurants) des films qui seront étranges au final (et doncinquiétants pour les financiers, mais pas forcément pour le public).

J’ai choisi au sein de la carte blanche pour le Jour le plus Courtde montrer un film de Paul Vecchiali. C’est une personnalité exem-plaire, de cinéaste et de producteur. Ses films des années 1970, commeceux de Jean-Claude Biette ou de Jean-Claude Guiguet, étaient pro-duits avec très peu de moyens par sa société de production Diagonale.Et quels films c’étaient ! Ils étaient certes à la marge, mais comme ledit Godard, c’est la marge qui fait tenir les pages ! Sans Duras, pas deBelmondo ; sans Brisseau, pas de Jean Dujardin.

Bref : Considérez-vous faire partie aujourd’hui d’une telle famille de résistance?AR: Non, pas du tout. Ces cinéastes autour de Diagonale étaient

des francs-tireurs et il y avait chez eux une forme de colère et decourage sans faille que je n’ai pas du tout pour ma part. Il faut avoirune sacrée force de caractère pour être un cinéaste de la marge !Mais les années 1970 le permettaient, il y avait beaucoup de projetsincroyables – Eustache, Duras, Arrietta, certains films de Garrel – quine pourraient plus se faire aujourd’hui ; il y avait un respect a prioriplus fort pour le “cinéaste-artiste”.

9

Bref HORS SÉRIE / DÉCEMBRE 2014

Page 12: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

BF: Autour d’Ecce Films (qui a produit Les coquillettes, La bataillede Solférino ou La fille du 14 juillet, NDLR), il y a une famille, qui n’estpas un mouvement et qui n’est pas tout à fait une famille de style,mais vraiment celle d’un esprit partagé.

Bref : La relation de fidélité à son producteur semble pourtous deux fondamentale dans votre cinéma…BF: Pour mon premier “vrai” court métrage, La course nue, il n’y

avait pas d’argent du tout et Emmanuel Chaumet, qui venait de fonderEcce Films ne voulait pas attendre de trouver les moyens financiersauprès des guichets traditionnels pour le faire. Nous nous sommesdonc lancés comme ça, avec un peu de son argent personnel…

AR : J’ai réalisé Étoile violette avec Elena Films, la structure decourts métrages des Films Pelléas. David Thion et Philippe Martincontinuent de m’accompagner pour mes longs. Faire un film, c’estun tel champ de bataille que je trouve important d’avoir des alliéssolidaires : en l’occurrence, des producteurs.

Bref : Le passage au long métrage est-il, selon vous, facilitépar le travail dans le court, qui plus est lorsqu’il s’effectue en compagnie d’un même producteur?BF: Avec Emmanuel Chaumet, nous travaillons ensemble depuis

dix ans, je n’ai connu que lui comme producteur, et il me semblaitimportant de faire mon premier long métrage avec lui. On connaît

bien nos manières mutuelles de travailler et ce dont on est capables.Nos défauts aussi !

AR : On reprend tout à zéro en faisant un long. Le tournage d’Étoile violette avait été pour moi très léger, il n’y avait pas d’enjeuni de pression liée à l’argent ; c’était vraiment facile.

J’ai mis vraiment les pieds dans le cinéma lorsque j’ai commencémon premier long métrage, La famille Wolberg (2009). La tensiond’un long, c’est incommensurable avec celle d’un court! L’un des béné-fices du court est ce plaisir de vivre un tournage heureux et détendu…Il donne l’idée que tourner n’est pas forcément épouvantable ! J’airetrouvé cette sensation en réalisant récemment le court Truffaut auprésent pour la Cinémathèque française, sur cinq jours et avec unequinzaine de comédiens, après avoir fait deux longs métrages lesannées précédentes. Il est peut-être bien de revenir de temps en tempsau court pour se “recharger en bons souvenirs”. On y retrouve leschoses essentielles, les raisons mêmes pour lesquelles on fait ducinéma : les acteurs, la simplicité, le rapport direct aux choses. J’aid’ailleurs envie de faire un court métrage tous les deux ou trois longs,pour revenir aux fondamentaux, retrouver le plaisir et la légèreté,sans arrière-pensée. Je vais appeler ça “ma pause ophulsienne” !

Bref : Quels sont, d’ailleurs, vos projets immédiats?AR: Je suis en train de préparer mes deux prochains films, qui

seront d’abord une comédie romantique, puis le biopic d’une princessedu XVIIIe siècle, un film d’époque. Il nous faudraêtre malins et trouver la bonne équation entreune vraie splendeur à l’écran et un budgetraisonnable. Ce qui pose des défis très intéres-sants. C’est d’ailleurs une des leçons du courtmétrage: savoir dépenser l’argent à bon escientet ruser avec le manque.

BF: Je finis actuellement Gaz de France, quia été tourné en décembre 2013 et qui sera finidébut 2015, soit plus d’un an de travail. La phasede postproduction est très longue, car le film aété intégralement tourné sur fond vert, ce quim’amène à expérimenter une forme nouvellede montage, très chronophage, mais aussi trèsamusante…

10

RENCONTRESfocus

Bref HORS SÉRIE / DÉCEMBRE 2014

Page 13: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

Distingué du Prix Jean-Vigo 2014 et pré-senté à la Quinzaine des réalisateurs, Mangetes morts a mis en lumière le nom de Jean-Charles Hue, que les cinéphiles connaissaientdéjà grâce à La BM du seigneur, succès d’es-time en 2011. Mais on sait beaucoup moins quele réalisateur a auparavant signé de nombreuxcourts métrages plutôt passés inaperçus. Unebizarrerie que l’intéressé explique par son par-cours de plasticien : “Comme je faisais beau-coup de dessin et de peinture, je suis entré à l’école d’arts de Cergy-Pontoise, mais avec l’idéede faire de l’expérimental et les noms de KennethAnger ou Jonas Mekas en tête. Donc j’ai rapi-dement fait des courts métrages, documentairecomme fiction, jamais dans une optique pro-fessionnelle, sans demander d’argent au CNCou aux régions. Ces œuvres ont été beaucoupmontrées dans le monde de l’art contemporain,des expositions, des galeries.”

Sa démarche artistique, il l’a très tôt orien-tée vers le désir de filmer les communautésgitanes. “Je connaissais déjà les Dorkel (la famillede gens du voyages présente dans plusieursde ses films, NDLR), se souvient-il, mais c’est àpartir de mon séjour à Barcelone, en troisièmeannée d’études, que j’ai commencé à faire desprises de vues, en 16 mm et avec des moyens

très modestes, autour de Gitans espagnols ren-contrés alors.” Ces différents segments com-posent une sorte de journal intime “à la Mekas”,se délecte de préciser Hue, qui ne montre tou-tefois que rarement ces premiers essais.

Gadjo MexicoLa partie de son œuvre qui est présentée

dans le cadre du Jour le plus Court consiste sur-tout en ses docu-fictions réalisées lors de séjoursà Tijuana, juste de l’autre côté de la frontièrecalifornienne. Parti sans argent, sinon des fondspropres, il y a tourné une série de portraits. Deretour d’un premier séjour, ce matériau avaitséduit la productrice Élisabeth Pawlowski quiparvint à décrocher une aide financière, ame-nant Jean-Charles Hue à repartir au Mexique :“J’avais 45000 euros, pour la première fois de mavie, car jusqu’alors j’avais emprunté à la banquepour tourner ! Il se lance alors dans l’aventurede Carne viva (2009), devenu finalement un longmétrage, intégrant ses premiers portraits et quia été montré dans plusieurs festivals impor-tants, notamment à Marseille et à Turin.

Entre temps, via Élisabeth Pawlowski, unlien s’est noué avec Capricci Films, une ensei-gne toujours exigeante dans son rôle de “têtechercheuse” et qui permet au cinéaste d’ache-ver La BM du seigneur, avant de le distribuer ensalles. De cette matière conséquente rassem-blée alors au contact de la vie de la famille Dorkelnaîtra aussi le moyen métrage documentaireUn ange, autour du fameux et massif Fred, quel’on retrouve dans La BM… et Mange tes morts.

Le style Hue s’affine et s’affirme encore, à lalisière parfois poreuse entre fiction et docu-mentaire, y trouvant sa force et sa singularité.Ce qui n’empêche pas le cinéaste de s’aven turerdans une forme de fiction plus franchementposée, pour un film qu’il écrit actuellement etoù jouera Jean-François Stévenin aux côtés, biensûr, de Fred Dorkel. Avant de nouveaux films àTijuana, un “polar métaphysique” et un courtmétrage dont des images ont déjà été mises enboîte avec la Bolex de ses débuts ! La rechercheet l’expérimentation continuent, succès ou pas,et c’est une excellente nouvelle…

11

Mange tes courts !

Le style Hue s’affine et s’affirme encore, à la lisière parfoisporeuse entre fiction et documentaire, y trouvant sa force et sa singularité.

Page 14: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

Vous aimez le court métrage, vous voulez en voir et en savoir plus : abonnez-vous à Bref, le magazine du court métrage.

L'actualité du court en 4 numéros par an, livrés avec leur DVD de films, pour seulement 35 euros.

Prolongez la fête du court métrage tout au long de l'année avec

Abonnez-vous dès maintenant et recevez en cadeau un DVD* au choix :*dans la limite des stocks disponibles.

OFFRE SPÉCIALE “LE JOUR LE PLUS COURT”100 DVD À GAGNER

Inscrivez votre choix par ordre de préférence :

� Intégrale Priit Pärn (1977-2010),Chalet Pointu, 2014“Remplie d’œuvres riches, ouvertes à de multiples interpré-tations autant qu’aux rêveries, la filmographie de Priit Pärnest essentielle à quiconque désire aborder l’animation contem-poraine dans toute sa complexité et ses possibilités.” Marcel Jean, délégué général du Festival d’Annecy

� Cindy, the doll is mine,de Bertrand Bonello, Shellac, 2014“Le film, un court métrage d’un quart d’heure d’une beautébouleversante, est à la fois une fiction théorique sur le cinémaet la représentation, et un portrait documentaire d’AsiaArgento.” Isabelle Regnier, Le Monde

� Le 6 juin à l’aube,de Jean Grémillon, Éditions de l’Œil, 2014“Une élégie funèbre et poétique, dont le cinéaste a écritle commentaire et composé la musique, à la beauté lyrique.C’est toutes les guerres que vise le cinéaste, dit Jean-MarieStraub dans un supplément. En effet, les ruines de Saint-Lo ne sont-elles pas celles d’Alep ou de Gaza ?” Christophe Kantcheff, [email protected] /www.brefmagazine.com

entretiens

actualités

dossiers thématiques

explorer les frontières du cinéma

internet

animation

documentaire

films-essais

classiques du court métrage

expérimental

festivals

pistes pédagogiques

le magazine de toutes les formes courtes

leurs premiers longs métrages

ressources

la chronique de Michel Chion

nouvelles images numériques

Histoire du cinéma

techniques cinématographiques

un DVD à chaque numéro

art vidéo

Agnès VardaLuc Moullet

Jean-Pierre Jeunet

Pascale Ferran

Jan Svankmajer

François Ozon

Alain Guiraudie

Johan Van der Keuken

Cédric Klapisch

Michel Gondry

Valérie Mréjen

Guy Maddin

Laurent Cantet

Naomi Kawase

Vincent MacaigneAlain Cavalier

Chris Marker

Serge Bozon

Jean-Luc Godard

Mati Diop

Thomas Salvador

Sophie Letourneur

Bertrand Mandico

clip

fiction

1 AN D’ABONNEMENT = 4 MAGAZINES + 4 DVD

� abonnement France (un an)* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 €

� abonnement étudiant (un an)* . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 €Joindre une copie recto-verso de la carte d’étudiant en cours de validité

� abonnement étranger (un an) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 €Règlement par virement international uniquementcode IBAN : FR76 1027 8041 0100 0279 6534 104code BIC : CMCIFR2A – CCM Paris 8 Europe

* Chèque à l’ordre de l’Agence du court métrage, 77 rue des Cévennes, 75015 Paris.Une facture vous sera adressée à réception de votre règlement.

Mme � M. � . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . société : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

téléphone : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . fax : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

email : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . @ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

� merci de me tenir informé-e par email des soirées organisées par Bref à Paris.

Page 15: Bref le magazine du court métrage - Hors Série
Page 16: Bref le magazine du court métrage - Hors Série

AG

ENC

E B

OLDINT. NUIT / CHAMBRE / RUE JEAN-PIERRE

TIMBAUD. LUI : IL FAUT TOUJOURS QUE TU AIES RAISON, ALORS QUE JE FAIS TOUT POUR TOI. TU NE ME LAISSES JAMAIS M’EXPRIMER. J’AI JAMAIS LE DROIT DE RIEN DIRE ET SI J’AI LE MALHEUR DE FAIRE UNE REMARQUE TU M’EXPLIQUES QUE ÇA TE SAOÛLES...C’EST VRAIMENT INJUSTE !ELLE : MAIS ARRETE DE TE PLAINDRE TOUT LE TEMPS, TU NE VOIS PAS QUE JE N’EN PEUX PLUS DE TES REPROCHES. POURTANT C’EST PAS FAUTE DE TE DIRE QUE ÇA M’ENERVE. DONC VOILA, JE TE POURRIS LA VIE TU ME POURRIS LA MIENNE, ON EST QUITTE COMME ÇA !

HISTOIRES COURTES

Le Dimanche Soir

Le Jeudi Soir

LIBRE COURT

IL EST BON PARFOIS D’ALLER À L’ESSENTIEL.FRANCE TÉLÉVISIONS ENCOURAGE LA CRÉATION DE

COURTS-MÉTRAGES AVEC PLUS DE 90 PRÉACHATS PAR AN.