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Un village, une histoire Brouage, la cité fortifiée et plus beau village Labellisée le 25 juin comme l'un des plus beaux villages de France, la fréquentation à l'office de tourisme de Brouage a déjà augmenté de 20 %. La place forte a connu de nombreuses transformations au fil des siècles entre prospérité et déclin. A vec ses 170 habitants à l'année, la place forte de Brouage voit sa popula- tion très peu varier au cours de l'année. Le village accueille en effet des visiteurs qui ne sont que de passage mais qui semblent re- venir régulièrement d'une année à l'autre. Son récent statut d'un des plus beaux villages de France ren- force déjà l'activité touristique de ce site avec une augmentation de la fréquentation à l'office de tou- risme de 20 %. Jadis, Brouage accueillait des garnisons en raison de sa fonc- tion de défense, notamment sous Henri III, tandis que les guerres de religion faisaient rage. On comp- tait alors 4 000 habitants sur place en plus de 3 000 soldats en temps de conflit, ce qui faisait au total 7 000 individus résidant dans la ville fortifiée. D'abord un îlot pour le commerce du sel. Brouage a été fondé vers 1555 par Jacques de Pons. Au XI e siècle, il n'existait que la tour de Broue et de petits îlots autour des marais salants qui ont fait l'objet de nom- breuses convoitises. Un commerce local se développe au Moyen-Âge et les produits étaient exportés jusqu'à La Rochelle au nord et à Blaye au sud. La création de l'impôt le moins apprécié, la gabelle au XIV e siècle, ne freinera pas cette nouvelle acti- vité. Aujourd'hui, ces anciens ma- rais salants servent de claires pour les ostréiculteurs. Cela constitue la seconde activité économique du village avec le tourisme. Les remparts de Richelieu puis de Vauban Après les guerres de religion qui ont vu de nombreux affron- tements entre catholiques et protestants, Brouage devient officiellement catholique sous Henri III. En 1627, le cardinal de Richelieu s'installe dans le vil- lage et crée des remparts afin d'y stocker des armes de guerre. Ils mesurent six à huit mètres de haut et s'étirent sur deux kilomètres. Ces parades ont pu démontrer leur efficacité puisque Brouage n'a jamais été attaquée. Vauban sera ensuite envoyé à Brouage par Louis XIII afin d'améliorer l'œuvre de Richelieu. Il exercera finalement assez peu de changement. Le Clos de Halle aux vivres constitue un bâtiment chargé d'histoire et montre bien l'évolu- tion des activités qu'a connu le vil- lage à travers les diverses fonctions qu'il a occupé au fil des siècles. En effet, sous Richelieu, il abrite des tonnes de vivres qui servent à ali- menter les soldats. Puis, avec l'installation de l'Arsenal de Rochefort sous Louis XIV, l'arrêt de mort de Brouage est signé. Le village se vide, les commerçants le désertent et les activités déclinent. Le bâtiment est abandonné jusqu'à la fin du XIX e siècle. Il servira ensuite à entreposer des tonnes de poudre, ce qui ne fera pas plaisir aux habi- tants qui craignent l'explosion. Parmi les différentes anecdotes que l'on trouve sur Brouage, il en demeure une concernant un amour impossible entre Louis XIV et Marie Mancini, la nièce du car- dinal de Mazarin. Elle aurait été exilée par son oncle à Brouage afin d'empêcher l'idylle. Plusieurs années après, le Roi Soleil serait venu pleurer près de son lieu de détention. n Marie Lamarque Le centre du village compte 170 habitants à l'année et 16 ateliers d'artisans. © M.L. Le saviez-vous ? Autour de l'église de Brouage, construite en 1608, se trouvaient trois cimetières où les places des sépultures dépendaient de la ca- tégorie sociale du défunt et de la religion à laquelle il appartenait. Ainsi, plus un habitant était riche, plus il pouvait être enterré proche du Seigneur, à l'instar de la tombe du marquis de Carna- valet, dernier grand gouverneur du village, placée juste devant l'autel. On trouve également une dalle funéraire dans l'allée centrale relative à un couple for- tuné qui vivait à Brouage. La conservation de cet édifice pose néanmoins quelques diffi- cultés à la Ville qui n'avait pas les moyens de remplacer les vitraux endommagés. Deux ornements actuellement présents dans l'église sont l'œuvre de Nicolas Sollogoub, un artiste franco- canadien. Ils ont été offerts au village entre 1982 et 2001 par une délégation québécoise. Un troisième ouvrage sera livré le 28 octobre prochain. Ce clin d'œil au Canada ne s'est pas fait par hasard puisque le village a vu naître le fondateur de la ville de Québec, Samuel Champlain. Nous disposons de très peu d'information sur lui, à part qu'il était de confes- sion protestante et que son père était marin. C'est peut-être cette origine qui lui a donné le goût pour les voyages puisqu'il a tra- versé 23 fois l'Atlantique afin de se rendre en Amérique. Il meurt dans son village natal en 1635 sous le nom de Samuel de Champlain tandis qu'il n'a jamais été officiellement anobli. En réalité, il s'est offert sa par- ticule tout seul et a adopté ce nouveau nom progressivement. Il nous reste aujourd'hui uni- quement ses récits de voyage qui ont fait sa renommée. L'animation à ne pas manquer cet été Tous les jeudis durant les mois de juillet et août, le syndicat mixte de Brouage propose des animations pour les touristes. Le jeudi 20 juillet, la compa- gnie Coyotte Minute a plongé le public dans le cinéma des an- nées 30 au cœur d'un tournage qui va mal se finir. Le spectacle a eu lieu à 17 heures sur la place de l'église. Vauban fera un tour dans le village fortifié en compa- gnie de sa dame et de sa fille, le 27 juillet de 15 à 17 heures. Pour ensuite commencer le mois d'août, la ville accueillera le 3 août, la compagnie Chicken Street avec Santonin qui pro- posera aux visiteurs une recons- titution de la Première Guerre Mondiale à l'échelle 1/100 e . L'animation est prévue sur la place de l'église à 17 heures. Place ensuite à un spectacle brû- lant avec la compagnie l'arche en ciel qui mettra en scène sa fête du feu. C'est l'événement le plus attendu par les visiteurs dans le cadre des Jeudis de Brouage. Le 17 août, des jeux en bois géants seront installés rue de la grotte de 10 à 18 heures. Enfin le 24 août, un chameau géant déambulera dans les rues de la commune à partir de 17 heures. Au-delà de ces animations, les touristes auront le plaisir de par- ticiper aux nuits buissonnières les 20 et 26 juillet ainsi que les 3, 9, 17 et 24 août. Les conteurs in- viteront les curieux à un voyage nocturne. Rencontre avec une artisane du village Véronique Maréchal occupe son atelier de céramique depuis 2009, situé au 27 rue du Québec. Ouvert toute l'année, l'artiste y vend de la vaisselle en terre cuite mais aussi des pièces utilitaires et décoratives. Installée précédem- ment dans le Lot, elle a complè- tement craqué sur Brouage tan- dis qu'elle passait un week-end prolongé en Charente-Maritime. C'est un coup de cœur qui s'est produit totalement par hasard”, explique-t-elle. C'est également par le fruit du hasard que l'artisane a décidé de travailler la terre. “Il y avait un atelier de céramique dans mon village et j'ai décidé de l'intégrer. C'est de là que m'est venu mon amour pour cet art. J'ai longtemps réalisé des petits personnages avant de me diversifier par la suite.L'artiste retrouve souvent les mêmes visiteurs dans son atelier d'une année à l'autre même si elle avoue que la fréquentation peut être très variable. Seul élément qui lui pose pro- blème, c'est le passage intem- pestif de camion et de véhicules agricoles dans la rue principale du village. “Nous avions lancé une pétition afin de lutter contre ce phénomène l'année dernière mais aucune mesure n'a été prise. De plus, ces véhicules ne respectent pas la limitation à 20 km/h”, s'in- digne Véronique Maréchal. L'atelier de Véronique Maréchal se situe au 27 rue du Québec. © M.L. Les premiers remparts ont été érigés en 1569 puis Richelieu les renforcera dès 1627. © M.L. L'un des vitraux offert par la délégation québécoise. © D. R.

Brouage, la cité fortifiée et plus beau village · 2019-01-28 · valet, dernier grand gouverneur du village, placée juste devant l'autel. On trouve également une dalle funéraire

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Page 1: Brouage, la cité fortifiée et plus beau village · 2019-01-28 · valet, dernier grand gouverneur du village, placée juste devant l'autel. On trouve également une dalle funéraire

Un village, une histoireBrouage, la cité fortifiée et plus beau villageLabellisée le 25 juin comme l'un des plus beaux villages de France, la fréquentation à l'office de tourisme de Brouage a déjà augmenté de 20 %. La place forte a connu de nombreuses transformations au fil des siècles entre prospérité et déclin.

Avec ses 170 habitants à l'année, la place forte de Brouage voit sa popula-

tion très peu varier au cours de l'année. Le village accueille en effet des visiteurs qui ne sont que de passage mais qui semblent re-venir régulièrement d'une année à l'autre. Son récent statut d'un des plus beaux villages de France ren-force déjà l'activité touristique de ce site avec une augmentation de la fréquentation à l'office de tou-risme de 20 %.

Jadis, Brouage accueillait des garnisons en raison de sa fonc-tion de défense, notamment sous Henri III, tandis que les guerres de religion faisaient rage. On comp-tait alors 4 000 habitants sur place en plus de 3 000 soldats en temps de conflit, ce qui faisait au total 7 000 individus résidant dans la ville fortifiée.

D'abord un îlot pour le commerce du sel.

Brouage a été fondé vers 1555 par Jacques de Pons. Au XIe siècle, il n'existait que la tour de Broue et de petits îlots autour des marais salants qui ont fait l'objet de nom-breuses convoitises. Un commerce local se développe au Moyen-Âge

et les produits étaient exportés jusqu'à La Rochelle au nord et à Blaye au sud.

La création de l'impôt le moins apprécié, la gabelle au XIVe siècle, ne freinera pas cette nouvelle acti-vité. Aujourd'hui, ces anciens ma-rais salants servent de claires pour les ostréiculteurs. Cela constitue la seconde activité économique du village avec le tourisme.

Les remparts de Richelieu puis de Vauban

Après les guerres de religion qui ont vu de nombreux affron-tements entre catholiques et protestants, Brouage devient officiellement catholique sous Henri III. En 1627, le cardinal de Richelieu s'installe dans le vil-lage et crée des remparts afin d'y stocker des armes de guerre. Ils mesurent six à huit mètres de haut et s'étirent sur deux kilomètres. Ces parades ont pu démontrer leur efficacité puisque Brouage n'a jamais été attaquée.

Vauban sera ensuite envoyé à Brouage par Louis XIII afin d'améliorer l'œuvre de Richelieu. Il exercera finalement assez peu de changement.

Le Clos de Halle aux vivres constitue un bâtiment chargé d'histoire et montre bien l'évolu-tion des activités qu'a connu le vil-lage à travers les diverses fonctions qu'il a occupé au fil des siècles. En effet, sous Richelieu, il abrite des tonnes de vivres qui servent à ali-menter les soldats.

Puis, avec l'installation de l'Arsenal de Rochefort sous Louis XIV, l'arrêt de mort de Brouage est signé. Le village se vide, les commerçants le désertent et les activités déclinent. Le bâtiment est abandonné jusqu'à la fin du XIXe siècle. Il servira ensuite à entreposer des tonnes de poudre, ce qui ne fera pas plaisir aux habi-tants qui craignent l'explosion.

Parmi les différentes anecdotes que l'on trouve sur Brouage, il en demeure une concernant un amour impossible entre Louis XIV et Marie Mancini, la nièce du car-dinal de Mazarin. Elle aurait été exilée par son oncle à Brouage afin d'empêcher l'idylle. Plusieurs années après, le Roi Soleil serait venu pleurer près de son lieu de détention. n

Marie Lamarque

Le centre du village compte 170 habitants à l'année et 16 ateliers d'artisans. © M.L.

Le saviez-vous ?Autour de l'église de Brouage,

construite en 1608, se trouvaient trois cimetières où les places des sépultures dépendaient de la ca-tégorie sociale du défunt et de la religion à laquelle il appartenait. Ainsi, plus un habitant était riche, plus il pouvait être enterré proche du Seigneur, à l'instar de la tombe du marquis de Carna-valet, dernier grand gouverneur du village, placée juste devant l'autel. On trouve également une dalle funéraire dans l'allée centrale relative à un couple for-tuné qui vivait à Brouage.La conservation de cet édifice

pose néanmoins quelques diffi-cultés à la Ville qui n'avait pas les moyens de remplacer les vitraux endommagés. Deux ornements actuellement présents dans l'église sont l'œuvre de Nicolas Sollogoub, un artiste franco-canadien. Ils ont été offerts au village entre 1982 et 2001 par une délégation québécoise. Un troisième ouvrage sera livré le 28 octobre prochain.Ce clin d'œil au Canada ne s'est

pas fait par hasard puisque le village a vu naître le fondateur de la ville de Québec, Samuel Champlain. Nous disposons de très peu d'information sur

lui, à part qu'il était de confes-sion protestante et que son père était marin. C'est peut-être cette origine qui lui a donné le goût pour les voyages puisqu'il a tra-versé 23  fois l'Atlantique afin de se rendre en Amérique. Il meurt dans son village natal en 1635 sous le nom de Samuel de Champlain tandis qu'il n'a jamais été officiellement anobli. En réalité, il s'est offert sa par-ticule tout seul et a adopté ce nouveau nom progressivement.Il nous reste aujourd'hui uni-

quement ses récits de voyage qui ont fait sa renommée.

L'animation à ne pas manquer cet étéTous les jeudis durant les mois

de juillet et août, le syndicat mixte de Brouage propose des animations pour les touristes.Le jeudi 20 juillet, la compa-

gnie Coyotte Minute a plongé le public dans le cinéma des an-nées 30 au cœur d'un tournage qui va mal se finir. Le spectacle a eu lieu à 17 heures sur la place de l'église. Vauban fera un tour dans le village fortifié en compa-gnie de sa dame et de sa fille, le 27 juillet de 15 à 17 heures.

Pour ensuite commencer le mois d'août, la ville accueillera le 3 août, la compagnie Chicken Street avec Santonin qui pro-posera aux visiteurs une recons-titution de la Première Guerre Mondiale à l'échelle 1/100e.

L'animation est prévue sur la place de l'église à 17 heures. Place ensuite à un spectacle brû-lant avec la compagnie l'arche en ciel qui mettra en scène sa fête du feu. C'est l'événement le plus attendu par les visiteurs dans le cadre des Jeudis de Brouage. Le 17 août, des jeux en bois géants seront installés rue de la grotte de 10 à 18 heures. Enfin le 24 août, un chameau géant déambulera dans les rues de la commune à partir de 17 heures.

Au-delà de ces animations, les touristes auront le plaisir de par-ticiper aux nuits buissonnières les 20 et 26 juillet ainsi que les 3, 9, 17 et 24 août. Les conteurs in-viteront les curieux à un voyage nocturne.

Rencontre avec une artisane du villageVéronique Maréchal occupe

son atelier de céramique depuis 2009, situé au 27 rue du Québec. Ouvert toute l'année, l'artiste y vend de la vaisselle en terre cuite mais aussi des pièces utilitaires et décoratives. Installée précédem-ment dans le Lot, elle a complè-tement craqué sur Brouage tan-dis qu'elle passait un week-end prolongé en Charente-Maritime. “C'est un coup de cœur qui s'est produit totalement par hasard”, explique-t-elle.C'est également par le fruit du

hasard que l'artisane a décidé de travailler la terre. “Il y avait un atelier de céramique dans mon village et j'ai décidé de l'intégrer. C'est de là que m'est venu mon

amour pour cet art. J'ai longtemps réalisé des petits personnages avant de me diversifier par la suite.”L'artiste retrouve souvent les

mêmes visiteurs dans son atelier d'une année à l'autre même si elle avoue que la fréquentation peut être très variable.Seul élément qui lui pose pro-

blème, c'est le passage intem-pestif de camion et de véhicules agricoles dans la rue principale du village. “Nous avions lancé une pétition afin de lutter contre ce phénomène l'année dernière mais aucune mesure n'a été prise. De plus, ces véhicules ne respectent pas la limitation à 20 km/h”, s'in-digne Véronique Maréchal.

L'atelier de Véronique Maréchal se situe au 27 rue du Québec. © M.L.

Les premiers remparts ont été érigés en 1569 puis Richelieu les renforcera dès 1627. © M.L.

L'un des vitraux offert par la délégation québécoise. © D. R.