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COLE POLYTECHNIQUE FDRALE DE LAUSANNE Bulletin des laboratoires de mécanique des sols et des roches No 26-27, décembre 2000 Gravure Elene Bonnard-Sedlatchek Editorial Environnement naturel et construit Quoi de plus noble et fondamentalement important que les activités des ingénieurs et des architectes, qui tendent à créer un cadre de vie harmonieux et durable pour la société ? Trop vite sØduit par les promesses dun monde virtuel cadencØ au cours du NASDAQ, stock options et autres spin-offs, lhomme moderne en vient oublier que son existence mŒme dØpend dune sØrie ØlØmentaire de besoins liØs lhabitat, lØnergie, leau ou lair par exemple, et que des acquis tels que la mobilitØ, le confort ou la qualitØ des infrastructures ne vont pas de soi. Au contraire, et loin de vouloir jouer les Cassandre, force est de constater que bien des tØmoins virent au rouge : pollution, accLs limitØ leau, dØtØrioration du paysage, croissance fulgurante des mØgalopoles, congestion du trafic, Øpuisement des Ønergies fossiles, catastrophes naturelles ... Il est grand temps de valoriser ces professionnels appelØs btir (au sens gØnØral de fonder) notre lieu de vie. Ces ingØnieurs civils, ces architectes, ces ingØnieurs de lenvironnement et tous ceux qui offrent les savoirs complØmentaires des sciences sociales et humaines. Il est temps Øgalement de les amener fØdØrer leurs efforts, collaborer dLs les premiers pas universitaires, bref projeter ensemble. Cest lambition actuelle de lEPFL. Cest le projet de rapprocher, dans un domaine couvrant lenvironnement naturel et construit, les trois dØparte- ments darchitecture, de gØnie civil et de gØnie rural. Nul doute que de nombreuses discussions auront lieu, mais ny a-t-il pas en fin de compte un gain de sens et de contenu ? Et sil sagit dun pari la Pascal, ne faut-il pas le prendre ? Nous sommes la disposition des lecteurs de Sols et Roches pour en dire plus et profitons de ces lignes pour souhaiter tous et toutes un gracieux saut dans le prochain millØnaire. Prof. L. Vulliet Thème de recherche Statistique des tunnels suisses A loccasion du CongrLs mondial des tunnels AITES 2001, qui sera organisØ conjointement par la SociØtØ italienne des tunnels et la SIA, le Groupe spØcialisØ pour les travaux souterrains (GTS, en franais, ou FGU, en Ø Note du rédacteur en chef : Vous avez peut-Œtre ØtØ surpris de ne pas recevoir le NumØro 26 du Bulletin Sols et Roches en septembre Ce nØtait que partie remise. Suite mes nombreuses missions lØtranger cet automne, il a ØtØ dØcidØ de produire un numØro double pour la fin de lannØe 2000. Le voici donc, et bonne lecture. Christophe Bonnard

Bulletin des laboratoires de mécanique des sols et des roches

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Page 1: Bulletin des laboratoires de mécanique des sols et des roches

ÉCOLE POLYTECHNIQUEFÉDÉRALE DE LAUSANNE

Bulletin des laboratoires de mécanique des sols et des roches No 26-27, décembre 2000

Gravure Elene Bonnard-Sedlatchek

Editorial Environnement naturel et construit Quoi de plus noble et fondamentalement important que les activités des ingénieurs et des architectes, qui tendent à créer un cadre de vie harmonieux et durable pour la société ? Trop vite séduit par les promesses d�un monde virtuel cadencé au cours du NASDAQ, stock options et autres spin-offs, l�homme moderne en vient à oublier que son existence même dépend d�une série élémentaire de besoins liés à l�habitat, l�énergie, l�eau ou l�air par exemple, et que des acquis tels que la mobilité, le confort ou la qualité des infrastructures ne vont pas de

soi. Au contraire, et loin de vouloir jouer les Cassandre, force est de constater que bien des témoins virent au rouge : pollution, accès limité à l�eau, détérioration du paysage, croissance fulgurante des mégalopoles, congestion du trafic, épuisement des énergies fossiles, catastrophes naturelles ... Il est grand temps de valoriser ces professionnels appelés à bâtir (au sens général de fonder) notre lieu de vie. Ces ingénieurs civils, ces architectes, ces ingénieurs de l�environnement et tous ceux qui offrent les savoirs complémentaires des sciences sociales et humaines. Il est temps également de les amener à fédérer leurs efforts, à collaborer dès les premiers pas universitaires, bref à projeter ensemble. C�est l�ambition actuelle de l�EPFL. C�est le projet de rapprocher, dans un domaine couvrant l�environnement naturel et construit, les trois départe-ments d�architecture, de génie civil et de génie rural. Nul doute que de nombreuses discussions auront lieu, mais n�y a-t-il pas en fin de compte un gain de sens et de contenu ? Et s�il s�agit d�un pari à la Pascal, ne faut-il pas le prendre ? Nous sommes à la disposition des lecteurs de Sols et Roches pour en dire plus et profitons de ces lignes pour souhaiter à tous et à toutes un gracieux saut dans le prochain millénaire. ■ Prof. L. Vulliet

Thème de recherche

Statistique des tunnels suisses A l�occasion du Congrès mondial des tunnels AITES 2001, qui sera organisé conjointement par la Société italienne des tunnels et la SIA, le Groupe spécialisé pour les travaux souterrains (GTS, en français, ou FGU, en �

Note du rédacteur en chef : Vous avez peut-être été surpris de ne pas recevoir le Numéro 26 du Bulletin Sols et Roches en septembre� Ce n�était que partie remise. Suite à mes nombreuses missions à l�étranger cet automne, il a été décidé de produire un numéro double pour la fin de l�année 2000. Le voici donc, et bonne lecture. Christophe Bonnard

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Fig.3 : Distribution du volume excavé des tunnels selon le type et la période de mise en service

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allemand) a entrepris de recenser les tunnels et galeries civiles suisses. Ce recensement se limite actuellement aux ouvrages en service excavés en souterrain, mais une extension aux ouvrages en cours de construction et aux tunnels réalisés à ciel ouvert est envisagée. A ce jour, ce recensement auquel le Laboratoire de Mécanique des Roches (LMR) a participé n�est pas encore complet, mais il compte déjà approximativement 900 objets d�une longueur cumulée de 1250 km et d�un volume total de 42 mio m3, auxquels devraient s�ajouter encore une cinquantaine de tunnels et galeries. Les questionnaires distribués aux administrations canto-nales, aux grandes régies, aux sociétés d�électricité et aux bureaux d�ingénieurs-conseils demandent pour chaque tunnel ou galerie les renseignements suivants : ▪ Catégorie : tunnel routier ou ferroviaire, galerie

hydraulique, ou autre ▪ Désignation et localisation de l�objet ▪ Année de mise en service ▪ Maître d�ouvrage, respectivement exploitant,

personne de contact ▪ Nombre de tubes ▪ Longueur, section et couverture maximale du tunnel ▪ Méthode d�excavation ▪ Type de ventilation (pour l�exploitation, en ce qui

concerne les tunnels routiers) ▪ Pression intérieure maximum et type de revêtement

(pour les galeries hydrauliques) ▪ Principaux types de roche rencontrés ▪ Difficultés dues aux conditions géologiques ▪ Venues d�eau pendant l�excavation Les réponses recueillies sont généralement complètes pour les tunnels récents. Au fur et à mesure que l�on remonte dans l�histoire (les premiers tunnels figurant dans la liste datant du milieu du 19e siècle), les réponses deviennent plus ou moins lacunaires. Toutes les informations sont stockées au LMR sur un fichier Filemaker qui permet ainsi d�effectuer des tris selon de nombreux critères. Une liste des tunnels avec des possibilités de tri réduites est également disponible sur le site Web du GTS (www.swisstunnel.ch) . A titre d�illustration, les figures 1 à 3 montrent quelques exemples d�exploitation du fichier, soit respectivement le nombre de tunnels, leur longueur cumulée et le volume total excavé des tunnels, groupés selon leur catégorie et

selon la date de mise en service. Il en ressort clairement la prépondérance des tunnels ferroviaires jusqu�en 1930, suivie d�une activité accrue de construction de galeries hydrauliques (avec une pointe entre 1950 et 1970), puis d�une augmentation continue des tunnels routiers depuis 1930. Ces tendances sont particulièrement mises en évidence par les critères de tri suivants : le nombre pour les tunnels ferroviaires, la longueur pour les galeries hydrauliques et le volume excavé pour les tunnels routiers. En particulier, il est frappant de relever le grand nombre de tunnels excavés à la fin du XIXe siècle et jusqu�à la première guerre mondiale, même s�il s�agissait d�ouvrages de longueur relativement courte. La figure 4 montre enfin l�essor spectaculaire des tunne-liers qui, depuis leur apparition à la fin des années 1960, ont excavé presque 40% du volume des tunnels mis en service pendant cette dernière décennie. Une étude approfondie permet de constater la tendance croissante à l�utilisation des tunneliers pour les tunnels de grand diamètre. D�une manière générale, le volume excavé par périodes de dix ans montre une nette augmentation depuis 1950, qui reflète la construction du réseau autoroutier et le début d�une nouvelle ère ferroviaire. Avec l�accomplissement du projet Rail 2000, la construction des grands ouvrages d�AlpTransit, et le projet du Swissmétro, la réalisation de tunnels en Suisse a encore un bel avenir devant soi. ■

Article rédigé par Prof. Dr P. Egger

Travaux de thèse

Ségrégation inverse dans les écoule-ments granulaires Un des processus de formation des pentes naturelles est celui de l�écoulement d�un mélange de grains de diffé-rentes tailles, sous l�action de la gravité : avalanche rocheuse, lave torrentielle, coulée de boue, glissement de terrain, glissement sous-marin, etc. Sous certaines conditions, un processus appelé ségrégation inverse peut se produire: les plus grosses particules se retrouvent en surface alors que les plus fines se concentrent en pro-fondeur (Fig. 1b). Ce phénomène est l�inverse de celui observé lors du processus de sédimentation (Fig. 1a). �

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Fig.4 : Distribution du volume excavé des tunnels selon la méthode d�excavation

(a) (b) (c) Fig. 1: (a) sédimentation, (b) écoulement granulaire, (c) événements multiples

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Fig. 2: Exemple de coulée (photo E. Bardou) Répété plusieurs fois, ce mécanisme conduit à la formation de pentes fortement anisotropes (Fig. 1c). Une des conséquences est que la granulométrie visible en surface n�est souvent pas représentative de la granulométrie de l�ensemble de la masse écoulée (Fig. 2). Martin Kern vient de proposer dans sa thèse, soutenue récemment à l�EPFL, un modèle mathématique et numé-rique reproduisant ce mécanisme de ségrégation inverse. Ce travail s�est déroulé en collaboration avec l�Institut de recherche sur les avalanches à Davos (SLF), dirigé par Dr W. Ammann, la direction de thèse étant assurée par Prof. L. Vulliet (LMS). L�approche retenue est celle de la micro-mécanique : des sphères rigides, de diamètres variés, en nombre important et soumises à la gravité, interagissent par des collisions instantanées (Fig. 3). Un volume de contrôle tri-dimensionnel est considéré, avec un fond fixe rugueux incliné et des conditions périodiques sur les quatre faces latérales (une particule quittant le volume entre à nouveau par la face opposée). L�interaction entre particules est représentée de manière relativement simple par trois paramètres : deux coefficients de restitution anélastique e (normal), respectivement b (tangentiel), et un coefficient de friction de Coulomb, µ. Un algorithme de calcul original (time to next contact) est proposé, qui minimise le temps de calcul. Les paramètres étudiés ont été les constantes de matériaux

Fig. 3: Modélisation par sphères rigides

des lois de contact, l�angle de la pente, la densité initiale du mélange et la granulométrie. Martin Kern a établi que seules certaines combinaisons de paramètres conduisent à la ségrégation inverse. Pour des faibles valeurs de e (fort amortissement lors des chocs), l�écoulement s�arrête avant même que le phénomène de ségrégation ne s�opère. Pour des valeurs fortes de e, une expansion importante du volume est observée (comme en dynamique moléculaire des gaz) et la ségrégation ne se produit pas non plus. Une augmentation du coefficient de frottement µ fait passer l�écoulement d�un stade d�accélération à celui de décélération (Fig. 4). La ségrégation inverse est obtenue uniquement pour des régimes permanents, quelle que soit la granulométrie initiale. Une application importante de ce travail consistait à valider le fonctionnement du avalanche-airbag, un ballon gonflable permettant à un skieur pris dans une avalanche de rester à la surface de l�écoulement et d�augmenter ses chances de survie. Des essais en vraie grandeur et des essais en laboratoire ont complété l�analyse. ■

Article rédigé par L. Vulliet Bibliographie Kern, M. (2000) Inverse grading in granular flow. Thèse EPFL No 2287 Vulliet L., Kern M. & Ammann W. (2000) Inverse grading in slopes, Proc. VIIIth Int. Symp. on Landslides, Cardiff, pp. 1514-1520 Kern M.A., L. Vulliet & W.J. Ammann 1999. Inverse grading in granular flow. Proc. NUMOG VII, Graz, Austria, pp. 535-540

Editeurs responsables : Professeurs L. Vulliet et F. Descoeudres LMS / LMR, ISRF, DGC, EPFL, 1015 Lausanne, Suisse Tél. (021) 693 23 15 Fax (021) 693 41 53 E-mail : [email protected] [email protected] WWW : http://lmswww.epfl.ch/lms_f Http://lmrwww.epfl.ch/lmr_f Rédacteur en chef : Ch. Bonnard

Fig. 4: Vitesse moyenne de l�écoulement en fonction du temps pour deux valeurs de µ et pour e=0.8, b=0.4

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Départs En cette seconde moitié de l�année 2000, les Laboratoi-res de mécanique des sols et des roches voient se tourner des pages importantes de leur histoire, notamment à la suite de trois départs de collaborateurs de longue date : MM. Michel Dysli, ingénieur civil EPUL et chef de section, après 29 ans d�activité au LMS, Francis Noverraz, géologue UNIL, après 20 ans d�activité au GEOLEP, puis au LMS et Mohamed Kharchafi, docteur-ingénieur de l�Ecole Centrale de Paris et adjoint scientifique, après 11 ans d�activité au LMS, puis au LMR. Chacun de ces trois collaborateurs mérite une évocation personnelle, plus ample qu�une mention dans la rubrique des mouvements de personnel. Dans ce numéro du bulletin Sols et Roches, nous avons demandé à M. Adalbert Fontana, ingénieur civil EPFL et ancien assistant de construction de la chaire de fondations, administrateur du bureau Géotechnique Appliquée P. & C. Dériaz et Cie SA à Genève, qui est membre des Amis des Laboratoires de mécanique des sols et des roches, mais surtout un ami de Michel Dysli depuis 50 ans, de nous apporter ci-après un éclairage personnel sur la personnalité de ce collaborateur hors du commun. Nous le remercions à cette occasion de sa présentation si pertinente. Les deux autres collaborateurs cités ci-dessus feront l�objet d�une présentation similaire dans les prochains numéros du bulletin Sols et Roches. ■ Michel Dysli… Dès fin novembre, Michel Dysli, bien qu�en pleine possession de ses moyens, cessera son activité professionnelle, car stoppé dans sa course par le couperet de l�administration. Michel Dysli n�a pas à être présenté dans ces colonnes. Pendant trente ans, toute personne travaillant de près ou de loin avec le Laboratoire de mécanique des sols de l�EPFL s�est familiarisée avec sa silhouette, l�odeur de sa pipe, a bénéficié de ses connaissances, a admiré son énergie et sa capacité de travail, s�est étonné parfois de ses certitudes. Michel Dysli a beaucoup apporté à l�Ecole et au renom de la Suisse à l�étranger. Auteur de près de 90 publications, d�un livre sur le gel qui fait autorité et qui lui a valu le prix Louis Courbot, Michel est devenu ces dernières années un des spécialistes mondiaux dans le domaine du gel. N�est-il pas surnommé parfois Mister Frost Dysli ? Son activité dans de nombreuses commission nationales et internationales, ses nombreuses expertises ne sauraient être passées sous silence. En tant que chargé de cours, Michel a fait bénéficier de son enthousiasme et de ses vastes connaissances, en deuxième et en troisième cycle, de nombreuses volées d�étudiants, d�ingénieurs, de praticiens. Michel Dysli est marié à Ruth Fretz et père de deux enfants, Jacques et Claire-Anne, tous deux universitaires et engagés dans leur vie professionnelle. Sur un autre

plan, à l�instar de son père qui l�a initié, Michel a parcouru et parcourt encore les montagnes, tant à ski (Dolent, Mont-Blanc, crêtes du Jura, forêt de Bohème) qu�à pied. Avant son mariage, il a même escaladé les arêtes et les parois les plus abruptes de nos Alpes (arête S de l�Aiguille Noire de Peuterey, face W de Blaitière). Ces dernirèes années, Michel, depuis son camp de base de la Fouly, a gravi pratiquement tous les sommets de la région. Le connaissant depuis près de cinquante ans, j�ose évoquer ici, avec beaucoup d�amitié, ce personnage entier, monolithique et de caractère égal, que je n�ai jamais vu se mettre en colère. Je relève également sa fidélité à ses intérêts, à ses amitiés, à ses lectures d�enfance, car, sorti tout droit des romans de Jules Verne, il s�apparente vraiment à ses personnages héroïques qui tendent à s�émanciper de toute contrainte. Comment ne pas évoquer ici le voyageur Philéas Fogg d�un calme imperturbable et d�une volonté inflexible, l�ingénieur Cyrus Smith, homme industrieux qui réfléchit, cherche et trouve, ou encore le capitaine Hatteras fixé sur le conquête du pôle. Face aux contradictions, aux objections, aux critiques, Michel � et je cite ici un grimpeur et un auteur de sa jeunesse � offre l’inflexibilité d’un croiseur de bataille sur une mer agitée… la tranquille et puissante assurance des grands fauves qui s’avancent lentement, écartant, dédaigneux, les herbes de la savane. Une fois à la retraite, Michel ne cessera pas son activité scientifique. Après le thème du gel, celui du dégel, ce dégel qui sera le sujet de son doctorat. Après Mister Frost Dysli, Mister Defrost Dysli, et la boucle sera fermée. Michel, nous comptons sur toi, car tu as encore beaucoup à nous apporter et à nous faire découvrir. Alors bonne route. Avec toute mon amitié. ■

Adalbert Fontana

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En bref Mouvements de personnel Plusieurs arrivées et départs se sont produits au cours des six derniers mois de l�an 2000. Au chapitre des arrivées, nous saluons tout d�abord la venue du Dr Tsuyoshi Nishimura, de l�Université de Kyoto, au Japon, qui vient effectuer des recherches pendant dix mois au LMR pour développer un modèle de calcul tridimensionnel de déformation des massifs rocheux, dont les résultats seront comparés avec ceux donnés par le modèle Z-SOIL. Par ailleurs, nous relevons la venue à l�EPFL de MM. Grégory Leuridan et Jeremy Nuttin, étudiants en génie civil de l�Université Libre de Bruxelles, qui viennent effectuer en Suisse leur travail de diplôme, le premier sous la direction du Prof. L. Vulliet, le second sous celle du Prof. F. Descoeudres. Nous avons aussi le plaisir d�avoir de nouveau parmi nous M. Giovanni Grasselli, qui est de retour de l�Université de Berkeley en Californie, pour achever à Lausanne sa thèse de doctorat en mécanique des roches. Enfin, nous accueillons au LMS un nouvel apprenti, M. Lionel Pittet. A tous, nous souhaitons une cordiale bienvenue. Au chapitre des départs, ce ne sont pas moins de neuf collaborateurs et stagiaires qu�il faut mentionner. Tout d�abord, trois personnes qui ont marqué à titres divers la vie de nos laboratoires nous quittent après une longue activité : MM. Michel Dysli, Francis Noverraz et Mohamed Kharchafi. Un article spécifique de ce bulletin évoque ces départs, sur lesquels nous reviendrons encore dans nos prochains numéros. Par ailleurs, trois jeunes assistants quittent les LMS et LMR après avoir effectué des travaux de recherches pendant quelques années : Dr François Huot, dont la thèse a été présentée dans le bulletin Sols et Roches No 20 de mars 1999, poursuit des travaux de recherche au Laboratoire de constructions hydrauliques de l�EPFL ; M. Sylvain Bathiaz, qui a travaillé sur un projet de recherche sur les écoulements dans les joints rocheux, compte réorienter sa carrière dans le domaine de l�environnement ou des transports ; M. Laurent Schillinger, dont la recherche portait sur les injections des sols granulaires par un coulis de micro-ciment, pense retourner dans l�enseignement auquel ses premières études universitaires l�avaient préparé. Nous leur souhaitons plein succès pour la suite de leur carrière. En dernier lieu, trois étudiants qui avaient passé quelques mois dans nos laboratoires, Mlle Geneviève Brennet, M. Dominique Deschamps et M. Alexandre Almosni, nous ont quittés, les deux premiers après avoir obtenu leur diplôme de génie civil de l�Université de Liège, en juin 2000, après avoir accompli leur travail de diplôme au LMS, et le dernier pour poursuivre ses études à l�Ecole Nationale des Ponts et Chaussées à Paris. Toutes nos félicitations et nos meilleurs v�ux pour leurs activités futures. ■ Un nouveau docteur Le 17 novembre 2000, M. Martin Kern, qui a effectué son travail de doctorat sous la direction du Prof. L. Vulliet, mais en travaillant essentiellement à l�Institut

de la Neige et des Avalanches (ISL) de Davos, avec le Dr W. Ammann, a présenté au public sa thèse sur l�écoulement de milieux granulaires de granulométrie variable dans les pentes (voir présentation de ce travail dans ce bulletin, sous la rubrique travaux de thèse). Nous le félicitons d�une part pour son excellent travail et d�autre part pour le prix qu�il a reçu en septembre 2000, à l�occasion des journées de rencontre des doctorants dans le domaine des dangers naturels, mises sur pied par l�organisation CENAT, Centre de compétences en dangers naturels des EPF et du WSL. ■

Colloques Au cours des prochains mois, trois colloques donnés par des conférenciers étrangers, organisés par les LMS et LMR, sont annoncés :

Jeudi 18 janvier 2001, 14.00 h M. Dr J. Koehler, Bundesanstalt für Wasserbau, Karlsruhe Soil-water interaction due to pressure fluctuations acting on saturated submerged soil

Jeudi 1er février 2001, 14.00 h Prof. D. Kolymbas, Université d�Innsbruck Some analytical approximations for tunnels

Jeudi 22 février 2001, 14.00 h M. P. Lunardi, Rocksoil SpA, Milano Approche basée sur l’analyse des déformations contrôlées dans les roches et dans les sols pour la réalisation des tunnels : application au tunnel de Tartaiguille Ces colloques ont lieu dans la salle de conférences de notre institut (DGC, salle D0-386). Les personnes de l�extérieur sont les bienvenues. ■

Lien vers notre site web Les sites web de nos laboratoires (lmswww.epfl.ch ou lmrwww.epfl.ch) contiennent des renvois vers les sites de nos partenaires scientifiques, ainsi que des adresses d�intérêt général dans les divers domaines d�activité de nos laboratoires. Si vous désirez que nous introduisions un lien vers votre propre site, nous vous prions de nous en informer, en précisant le motif de votre demande, et en nous communiquant votre URL. Cette demande peut être faite par e-mail, à l�adresse [email protected]. Merci de nous aider ainsi à agrandir la toile. ■

Convention de collaboration avec l’ECI En septembre dernier, le département de génie civil de l�EPFL, par l�intermédiaire de son chef actuel, Prof. Laurent Vulliet, directeur du LMS, a signé une convention de collaboration avec l�Ecole Colombienne d�Ingénierie à Bogotá, et en particulier son recteur, Ing. Eduardo Silva Sanchez. Cet accord, qui facilitera l�échange d�étudiants ou de stagiaires, a déjà permis à un étudiant de génie civil de l�EPFL, M. Ch. Wenger, de partir en Colombie pour y accomplir sur place son travail de diplôme, sous la direction (à distance) du Prof. L. Vulliet et de M. Ch. Bonnard. Ce genre d�activités permet ainsi d�élargir le champ des relations internationales de nos laboratoires. ■

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Mission d’évaluation

Evaluation de la sécurité d’un versant et des dommages, suite à un glissement de terrain dans la ville de Bakou, en Azerbaidjan A la suite d�un grand glissement de terrain couvrant une surface de quelques 15 ha, qui s�est produit soudainement le 7 mars 2000 dans un quartier de la ville de Bakou, le LMS a été sollicité par l�organisation Disaster Risk Management, à Washington, sur demande de la Banque Mondiale, pour entreprendre une expertise. Le soussigné est donc parti une semaine à Bakou en mai dernier, pour évaluer la sécurité de la niche d�arrachement, au pied de laquelle des travaux de terrassement avaient déjà été entrepris (voir figure 1) et qui ne se trouvait qu�à quelques cinquante mètres d�un grand monument aux victimes de guerres ; par ailleurs, il a procédé à une évaluation des dommages directs et indirects induits par cette catastrophe et des travaux de stabilisation à entreprendre. Cette évaluation comprenait aussi la nécessité éventuelle de reloger les habitants de maisons apparemment exposées, à proximité immédiate du glissement. De nombreuses données topographiques, géologiques et géotechniques ont pu être obtenues, quoique souvent par trop approximatives, mais il a été difficile de réunir des informations fiables sur les dommages et les coûts de réparation réels, ainsi que sur les données climatiques. Toutes les informations recueillies ont été analysées afin de procéder à des calculs de stabilité, pour évaluer l�efficacité des diverses mesures de stabilisation projetées. L�analyse du mécanisme du glissement et de ses causes a révélé q�il s�agissait d�un glissement en chaise de forme simple, avec une seule surface de cisaillement se développant dans des conditions géologiques assez défavorables (dépôts limono-argileux quaternaires principalement). Il a été déclenché par des pluies très importantes qui sont tombées en octobre et novembre 1999 (dépassant la précipitation moyenne annuelle, en deux mois !). Etant donné la faible perméabilité du sol, la nappe phréatique est remontée lentement, ce qui

explique le temps écoulé jusqu�à la rupture de mars 2000. A la suite des fissures qui se sont ouvertes dans la masse glissée, la nappe phréatique était redescendue notablement 15 jours après la catastrophe, au moment où les investigations par forage ont été entreprises. Il est aussi possible que de nombreuses conduites d�adduction d�eau et d�eaux usées traversant le glissement aient pu avoir un effet négatif, car de légers mouvements préparatoires avaient été décelés préalablement. Grâce à une action rapide des autorités, toutes les personnes menacées ont pu être évacuées en quelques heures de sorte que le glissement, qui s�est déclenché quelques heures après l�évacuation, n�a pas causé de victimes. Les travaux de confortation décidés par les autorités ont consisté à niveler toute la pente. Ce travail de terrassement devrait être complété par des drainages, mais surtout par la mise en place d�une recharge à l�aval, plutôt que de construire une double ligne de pieux comme envisagé initialement. De plus, il a été recommandé de mettre en place un programme d�auscultation pour contrôler l�efficacité des travaux de stabilisation et la sécurité des zones au voisinage de la niche d�arrachement. Ce n�est qu�au bout de quelques années de surveillance que l�on pourra vraiment déterminer si la zone affectée, à proximité immédiate du port de Bakou, peut être reconstruite. ■

Article rédigé par Ch. Bonnard

Fig. 2 Détail des habitations totalement détruites le long de la niche d�arrachement latérale. A l�arrière-plan, on voit le monument aux morts et la zone boisée où d�autres habitations sont exposées

Fig. 1 Vue de profil de la niche d�arrachement sommitale et des travaux de terrassement en cours au pied de la pente. En arrière-plan, on voit le centre de Bakou

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Sébastien, qui es-tu ? Sébastien Ambert est un nouvel assistant au LMS, depuis le début du mois de mars 2000. Il nous explique quelle a été sa formation et pourquoi il fait un travail de recherche à l’EPFL, en réponse aux questions de notre rédacteur. Votre présence au LMS a déjà été annoncée l’année dernière dans le bulletin Sols et Roches, et vous voilà de retour ; précisez-nous votre parcours. - Je suis originaire du centre de la France, mais j�ai fait

mes études de génie civil à l�INSA de Rennes ; j�étais effectivement venu au LMS au printemps 1999 pour y accomplir mon travail de diplôme. J�ai ensuite postulé pour accomplir mon CSN (équivalent français du service civil) dans une institution de recherche scientifique à l�étranger et j�ai pu ainsi revenir à Lausanne pour seize mois.

Quel est votre domaine d’activité ? - Je suis engagé dans plusieurs projets de recherche

(sols complexes à double porosité et milieux multiphasiques). Par ailleurs, j�ai eu l�occasion de travailler pour diverses expertises dans des domaines très variés (tassements, glissements de terrain). Enfin, je suis assistant du cours de mécanique des sols, ce qui fait que mon activité est très diversifiée ; c�est ce que j�apprécie dans ce travail.

Avez-vous déjà fait des plans pour la poursuite de votre carrière ? - Je n�ai pas encore d�objectifs définitifs, mais cela me

plairait de faire une thèse en mécanique des sols. Comment vous êtes-vous intégré à la vie lausannoise ? - La vie à Lausanne me plaît énormément, tant au

niveau des contacts que j�ai noués qu�en ce qui concerne les possibilités d�activités et de distractions. Je trouve l�ambiance très sympathique et me sens bien en Suisse.

Enfin, en dehors de votre travail, quels sont vos intérêts ? - J�aime beaucoup lire, aller au cinéma, regarder la

télévision et écouter de la musique. Mes goûts sont très éclectiques. J�avais joué autrefois dans une fanfare, et je vais reprendre prochainement ici cette activité. Je veux surtout garder une certaine disponibilité pour faire de nouvelles découvertes dans ce pays si varié.

Nous vous souhaitons beaucoup de succès dans vos activités et un bon séjour en Suisse. ■