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Annales de pathologie (2013) 33, 196—201 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com HISTOSÉMINAIRE SFP Cas n o 5. Dermatoses bulleuses Case No. 5. Bullous dermatosis Maxime Battistella Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital Saint-Louis, AP—HP, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France Accepté pour publication le 9 avril 2013 Disponible sur Internet le 27 mai 2013 Renseignements cliniques Un homme de 55 ans consulte à la fin de l’été pour un prurit évoluant depuis cinq ans, prédominant sur les zones photo-exposées, s’étant aggravé récemment, avec apparitions de bulles et de croûtes sur le visage, les mains et les avant-bras (Fig. 1). On note dans ses antécédents une toxicomanie intraveineuse à l’héroïne durant huit ans, arrêtée en 1989. Le patient consomme du cannabis quotidiennement, a un tabagisme à 30 paquets-année, et une consommation alcoolique d’au moins demi-bouteille de vin par jour. Le patient ne prend pas de traitement au long cours. Lors de l’examen, le patient a des bulles fragiles au niveau des mains et des chevilles, associées à des lésions croûteuses sur les membres supérieurs et inférieurs (Fig. 2). Il n’y a pas de lésion muqueuse orale ou génitale. On note une élastose solaire marquée de la nuque avec un aspect de peau losangique. Le reste de l’examen clinique est sans particularité sur le plan abdominal, cardiovasculaire, respiratoire ou neurologique. Il n’y a pas d’adénopathie périphérique. Le bilan biologique montre une thrombopénie à 125 000/mm 3 , un ionogramme san- guin et une fonction rénale normaux, et l’absence de syndrome inflammatoire. Le bilan hépatique est normal. Il existe une hyperferritinémie à 655 g/L. La sérologie du virus de l’hépatite C (VHC) est positive, avec une charge virale à 2670 UI/mL (3,43log). Le dosage des uroporphyrines totales est élevé. Le rapport uroporphyrine/coproporphyrine est supé- rieur à 3. Dans les selles, on détecte la présence caractéristique d’isocoproporphyrine. Diagnostic Porphyrie cutanée tardive. Description histologique Une biopsie est réalisée sur une lésion bulleuse du dos de la main, ainsi qu’un examen en immunofluorescence cutanée directe en peau péribulleuse. Adresse e-mail : [email protected] 0242-6498/$ see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2013.04.013

Cas no 5. Dermatoses bulleuses

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nnales de pathologie (2013) 33, 196—201

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

ISTOSÉMINAIRE SFP

as no 5. Dermatoses bulleuses

ase No. 5. Bullous dermatosis

Maxime Battistella

Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital Saint-Louis, AP—HP, 1, avenueClaude-Vellefaux, 75010 Paris, France

Accepté pour publication le 9 avril 2013Disponible sur Internet le 27 mai 2013

Renseignements cliniques

Un homme de 55 ans consulte à la fin de l’été pour un prurit évoluant depuis cinq ans,prédominant sur les zones photo-exposées, s’étant aggravé récemment, avec apparitionsde bulles et de croûtes sur le visage, les mains et les avant-bras (Fig. 1). On note dans sesantécédents une toxicomanie intraveineuse à l’héroïne durant huit ans, arrêtée en 1989.Le patient consomme du cannabis quotidiennement, a un tabagisme à 30 paquets-année,

et une consommation alcoolique d’au moins demi-bouteille de vin par jour. Le patient neprend pas de traitement au long cours.

Lors de l’examen, le patient a des bulles fragiles au niveau des mains et des chevilles,associées à des lésions croûteuses sur les membres supérieurs et inférieurs (Fig. 2). Iln’y a pas de lésion muqueuse orale ou génitale. On note une élastose solaire marquéede la nuque avec un aspect de peau losangique. Le reste de l’examen clinique est sansparticularité sur le plan abdominal, cardiovasculaire, respiratoire ou neurologique. Il n’ya pas d’adénopathie périphérique.

Le bilan biologique montre une thrombopénie à 125 000/mm3, un ionogramme san-guin et une fonction rénale normaux, et l’absence de syndrome inflammatoire. Le bilanhépatique est normal. Il existe une hyperferritinémie à 655 �g/L. La sérologie du virus del’hépatite C (VHC) est positive, avec une charge virale à 2670 UI/mL (3,43log). Le dosagedes uroporphyrines totales est élevé. Le rapport uroporphyrine/coproporphyrine est supé-rieur à 3. Dans les selles, on détecte la présence caractéristique d’isocoproporphyrine.

Diagnostic

Porphyrie cutanée tardive.

Description histologique

Une biopsie est réalisée sur une lésion bulleuse du dos de la main, ainsi qu’un examen enimmunofluorescence cutanée directe en peau péribulleuse.

Adresse e-mail : [email protected]

242-6498/$ — see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.ttp://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2013.04.013

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Cas no 5. Dermatoses bulleuses 197

× 50).Subepidermal blister without inflammation. Roof of the blister isintact (HES, ×50).

Figure 1. Érosion post-bulleuse peu inflammatoire sur le cuir che-velu.Poorly inflammatory post-blistering erosion on the scalp.

Il existe un décollement bulleux sous-épidermique. Letoit de la bulle est constitué de l’épiderme non altéré.La bulle est peu inflammatoire, focalement hémorragique(hématies dans l’espace du décollement). Le plancher dela bulle est constitué du derme superficiel, dont le reliefpapillaire est bien conservé (Fig. 3). On voit en colorationstandard mais également sur la coloration par le PAS desdépôts éosinophiles autour des capillaires du derme super-ficiel (Fig. 4). Le PAS montre également un épaississementde la membrane basale épidermique. Le niveau de clivagese situe au sein de cette membrane basale épidermique(Fig. 5).

L’immunofluorescence cutanée directe montre desdépôts épais d’IgG et de C3 le long de la basale épidermique,mais également autour des capillaires du derme superficiel(Fig. 6).

Figure 2. Bulle tendue non inflammatoire sur l’index droit etcicatrices inflammatoires sur le dos de la main.Non inflammatory blister on the index finger, and inflammatoryscars on the dorsum of the hand.

Figure 3. Biopsie sur le bord du doigt : décollement sous-épidermique non inflammatoire. Le toit de la bulle est intact (HES,

Commentaires

Les porphyries sont des maladies métaboliques, le plus sou-vent innées, liées à des défauts dans la synthèse de l’hème.Les porphyrines sont des molécules intervenant dans cettesynthèse. Différents défauts enzymatiques dans la cascademétabolique des porphyrines entraînent différents tableauxcliniques, classés selon le siège de l’anomalie biologique(porphyries hépatiques, porphyrie érythropoïétiques), selonleur mode transmission héréditaire, ou selon la clinique(porphyries aiguës, porphyries avec atteinte cutanée, por-phyries mixtes) (Tableau 1) [1]. Les porphyrines induisentla libération de médiateurs de l’inflammation et activentle complément lorsqu’elles sont irradiées par les UV, ce quisemble intervenir dans la pathogénie des manifestations desporphyries.

La porphyrie cutanée tardive (PCT) est de loin la plus fré-quente des porphyries. Elle est de répartition mondiale maisavec des prévalences variables allant de 1/2000 en Espagneà 1/25 000 aux États-Unis.

Figure 4. Épaississement éosinophilique des parois des capillairesdu derme superficiel (HES, × 400).Eosinophilic deposits around capillaries in the superficial dermis(HES, ×400).

Page 3: Cas no 5. Dermatoses bulleuses

198 M. Battistella

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Tableau 1 Classification des porphyries.Classification of porphyrias.

Porphyries aiguës Po

Porphyrie aiguëintermittente (PAI)

Incidence : 1/10 000Crises neuroviscérales

Po

Coproporphyriehéréditaire (CH)

RareCrises neuroviscéralesAtteinte cutanée (30 %) :bulles

Poco

Porphyrie variegata(PV)

1/30 000Crises neuroviscérales 40 %Atteinte cutanée (80 %) :bulles

Pr(P

Porphyrie héréditairepar déficit en ALAdeshydrase (PHA)

RarissimeCrises neuroviscéralesNeuropathie périphérique

Prdo(P

ALA : acide amino-lévulinique ; les porphyries avec atteinte cutan

acteurs étiologiques et physiopathologie

a PCT est l’expression d’un défaut enzymatique enroporphyrinogène décarboxylase (UPG) responsable de’accumulation d’uroporphyrines. Les mécanismes de ceéfaut enzymatique sont multiples, incomplètement éluci-és, souvent combinés entre eux. Il s’agit en effet d’unenzyme complexe, fragile, qui fonctionne surtout dans lesépatocytes et les érythrocytes [2].

On distingue habituellement trois types de PCT :la forme I, sporadique, est la plus fréquente. C’est undéficit acquis du fonctionnement de l’UPG dans les hépa-tocytes. Elle représente plus de 80 % des cas, et est liéeà des facteurs hépatotoxiques détaillés ci-après ;la forme II, familiale classique, autosomique dominante,correspond à une mutation délétère hétérozygote du gènede l’UPG, qui s’exprime dans le foie et les érythro-

cytes. Les manifestations cliniques sont plus précoces.Même dans ces cas familiaux, les facteurs hépatotoxiquesextrinsèques ont leur importance, déclenchant ou aggra-vant l’expression phénotypique de la maladie [3] ;la forme III, familiale rarissime, où le défaut génétique del’UPG n’existe que dans les hépatocytes et pas dans lesérythrocytes.

Les facteurs hépatotoxiques sont principalement auombre de trois :la surcharge hépatocytaire en fer joue un rôle essen-tiel. Elle est quasiment toujours présente sur les biopsieshépatiques de malades ayant une PCT. Elle est plus incons-tamment mise en évidence sur le bilan biologique. Lesmutations C282Y et H63D du gène HFE, impliquées dansl’hémochromatose, sont mises en évidence assez fré-quemment dans les PCT sporadiques, la fréquence variantselon les études et l’origine géographique des patients(13 à 42 %) [4,5] ;le VHC a un rôle déterminant, présent chez 10 à 91 % despatients selon les études. Une méta-analyse évalue la pré-valence du VHC chez les patients PCT à 50 %. Dans lamajorité des cas, il s’agit d’infections actives. Si le lienépidémiologique est incontestable, le mécanisme physio-pathologique est mal expliqué. Les autres virus d’hépatite

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ries non aiguës

rie cutanée tardive (PCT) 1/2000 à 1/25 000Atteinte cutanée : bulles

rie érythropoïétiqueitale (PEC)

Très rareErythrodontieAtteinte cutanée :PhotosensibilitéAnémie hémolytique

orphyrie érythropoïétique 9/10 000Atteinte cutanée :PhotosensibilitéComplications hépatiques(2 %)

orphyrie érythropoïétiqueante liée à l’XX)

Très rareIdem PPE

nt en italique.

ne semblent pas impliqués. Le rôle indépendant du VIHest plus controversé car beaucoup de patients sont co-infectés par le VHC, et sont soumis à d’autres facteurstoxiques (alcool, drogues, antirétroviraux) [5—7] ;les facteurs toxiques, largement dominés en France parl’alcoolisme chronique. Les autres toxiques sont repré-sentés par les médicaments, avec au premier plan lestraitements estrogéniques (contraception ou traitementsubstitutif de ménopause).

linique

a PCT sporadique prédomine chez les hommes, généra-ement après 50 ans Les principaux signes sont dermatolo-iques. Il s’agit d’un prurit initial, fréquent, prédominantux zones photo-exposées, avec photosensibilité et fra-ilité cutanée à l’origine de lésions bulleuses touchant

urtout le dos des mains et le visage. Ces bulles évoluenters une croûte, et cicatrisent en laissant des grains deilium. Une hypertrichose temporo-malaire est possible,

insi qu’une pigmentation cutanée hétérogène des zoneshoto-exposées. Une dermatose actinique avec vieillisse-ent prématuré, nuque losangique, élastose avec kystes et

omédons du visage est un signe classique [2].

istologie

es différentes porphyries cutanées partagent certainesaractéristiques : dépôt de matériel hyalin légèrement éosi-ophile dans et autour des capillaires du derme superficiel,uplication de la membrane basale vasculaire et épi-ermique, dépôts amorphes ou fibrillaires à la jonctionermo-épidermique. Dans la PCT, les dépôts hyalins sontestreints à la toute proximité des capillaires dermiquesuperficiels, moins épais et diffus que dans la protoporphyrierythropoïétique. Ces dépôts sont PAS positifs. La membraneasale épidermique peut être épaissie sur le PAS. L’élastoseolaire est presque toujours présente. Les bulles se formentar fragilisation de la jonction dermo-épidermique. La mem-rane basale PAS-positive est souvent retrouvée sur le toite la bulle et on voit également parfois des agrégats PAS-ositifs au sein de l’épiderme, contenant du collagène IV,

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199

Cas no 5. Dermatoses bulleuses

Figure 5. La coloration par le PAS souligne les dépôts péricapil-laires du derme superficiel (PAS, ×200).PAS staining shows more precisely the pericapillaries deposits in

the superficial dermis (PAS, ×200).

appelés caterpillar bodies (Fig. 7). Le plancher de la bulleest très peu inflammatoire, et conserve un relief papillairefestonné en « dents de scie ».

L’immunofluorescence directe (IFD) montre des dépôtsd’IgG, et moins souvent de C3 et/ou d’IgM autour des capil-laires dermiques, et à moindre degré le long de la basaleépidermique.

Diagnostic différentiel

Les diagnostics différentiels histologiques sont :l’épidermolyse bulleuse acquise (auto-immune),l’épidermolyse bulleuse dystrophique (génétique), lespseudoporphyries, la bullose du diabétique, l’amylosebulleuse, les bulles par succion, les bulles sur élastosesolaire ou sur cicatrice. Ce sont toutes des bulles pardécollement sous-épidermique ou dermique superficiel,peu inflammatoires.

L’épidermolyse bulleuse acquise est le principal diag-nostic différentiel, clinique et histologique. C’est unedermatose bulleuse auto-immune liée à des anticorps anti-collagène VII, qui est le constituant des fibrilles d’ancrage. Il

Figure 6. Immunofluorescence cutanée directe : dépôts matsépais d’IgG autour des capillaires dermiques superficiels (IF, × 200).Direct immunofluorescence: thick IgG deposits around superficialdermal capillaries (IF, ×200).

Figure 7. Porphyrie cutanée tardive. Le relief papillaire conservédu plancher est bien visible, ainsi que les caterpillar bodies intra-épidermiques, constitués d’agrégats de collagène de la membranebasale (HES, × 200).Porphyria cutanea tarda. Festooning of the dermal papillae is pre-served. Eosinophilic intraepidermal globules (caterpillar bodies)are present (HES, ×200).

s’agit d’un décollement sous-épidermique, avec une bulle etun plancher peu inflammatoires, sans dépôt périvasculaire.L’IFD montre des dépôts linéaires d’IgG ± IgA sur la basale,sans dépôts périvasculaire.

L’épidermolyse bulleuse dystrophique est une situationplus exceptionnelle, presque exclusivement pédiatrique. Ils’agit d’une affection génétique de transmission récessiveou dominante touchant le collagène VII. Le décollement bul-leux y est sous-épidermique. La bulle et le plancher sont peuinflammatoires. La répétition des décollements entraîne unaspect cicatriciel du derme superficiel.

La pseudoporphyrie est une dermatose phototoxique bul-leuse déclenchée par certains médicaments, ou au coursde l’hémodialyse, ressemblant fortement à la PCT. L’aspecthistologique est très proche de la PCT, bien que les dépôtspérivasculaires soient moins abondants. Il peut y avoir deséosinophiles dans l’infiltrat. Les dosages de porphyrines uri-

naires et dans les selles sont normaux, au contraire de laPCT. Les médicaments incriminés dans la pseudoporphyriesont nombreux [8].

La bullose du diabétique est une entité peu rapportée(Fig. 8). La majorité des auteurs s’accordent pour décriresous ce terme des bulles sous-épidermiques non inflam-matoires survenant chez des diabétiques, avec une cavitébulleuse contenant de la fibrine, une microangiopathie dia-bétique dermique superficielle (épaississement des paroiscapillaires) avec une IFD négative (Fig. 9). La physiopa-thologie est méconnue. On suppose que les anomalies dumétabolisme glucidique fragilisent certains constituants dela membrane basale épidermique.

Les bulles mécaniques par succion sont sous-épidermiques, à l’inverse des bulles par frottementqui sont intra-épidermiques. Il n’y a pas d’inflammation,pas d’altération des membranes basales ni d’altérationvasculaire. Le décollement est sous-épidermique, avec unrelief papillaire conservé.

Les amyloses bulleuses et les bulles sur élastose solairerelèvent d’un même mécanisme de fragilité dermique super-ficielle, lié aux dépôts de matériel amorphe (substanceamyloïde ou résidus de fibres élastiques). Il n’y a pas

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2 M. Battistella

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igure 8. Bullose du diabétique : bulles et érosions non inflam-atoires sur la face antérieure du tibia.ullous disease of diabetes: poorly inflammatory blisters and éro-

ions on the shin.

’inflammation spécifique associée. Le clivage s’effectue auein des dépôts.

Les bulles sur cicatrice relèvent là encore d’une fragi-isation de l’ancrage dermo-épidermique. Ce décollementous-épidermique au-dessus d’un tissu cicatriciel est sou-ent une constatation histologique sans traduction clinique.

Les bulles par œdème du derme superficiel sont égale-ent sous-épidermiques, et surviennent le plus souvent en

ontexte d’infiltrat inflammatoire sous-jacent. Le clivage’effectue au sein du derme superficiel sous la membraneasale épidermique, par dissociation des fibres collagènear un œdème interstitiel majeur. Elles surviennent surtoutans des affections aiguës. La situation la plus fréquentest la bulle sur piqûre d’insecte, par hypersensibilité.’infiltrat y est polymorphe, contenant des lymphocytes,eutrophiles et des éosinophiles en quantité variable.e syndrome de Sweet, dermatose neutrophilique fébrileiguë, s’accompagne de lésions parfois cliniquement bul-euses (Fig. 10), et comporte histologiquement un infiltrateutrophilique du derme et un œdème marqué du dermeapillaire (Fig. 11). La lucite polymorphe peut également

igure 9. Bullose du diabétique : bulle sous-épidermique nonnflammatoire, et discrète microangiopathie des capillaires der-iques dont la paroi est épaissie (HES, × 100).ullous disease of diabètes: sub-epidermal blister without inflam-ation. Slight microangiopathy of the dermal capillaries with

hickened wall (HES, ×100)l.

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igure 10. Syndrome de Sweet bulleux : plaques inflammatoiresouloureuses centrées par une bulle tendue.ullous Sweet syndrome: inflammatory painful plaques centeredy blisters (courtesy of Dr Marie-Dominique Vignon-Pennamen).mage fournie par le Dr Marie-Dominique Vignon-Pennamen.

tre bulleuse dans sa forme la plus sévère. L’œdème der-ique est ici accompagné d’un infiltrat à prédominance

ymphocytaire (Fig. 12).

volution et pronostic

ans le cadre de la PCT sporadique, le pronostic global esturtout lié au contexte de la maladie hépatique sous-jacenteventuelle. Le risque est celui des maladies hépatiques chro-iques (cirrhose, carcinome hépatocellulaire).

Les mesures d’éviction de tout toxique hépatique (alcool,édicament) et des estrogènes chez la femme sont néces-

aires, mais souvent insuffisantes à elles seules pour obtenirne rémission, surtout lorsqu’il existe une hypersidéroseépatique. La photoprotection est nécessaire.

Les deux cibles thérapeutiques sont l’élimination des por-hyrines en excès et la diminution de la surcharge ferrique.es saignées sont donc le traitement de première intentione la plupart des PCT, parvenant à améliorer la majoritées patients. Les antipaludéens de synthèse (chloroquine)orment avec les porphyrines des complexes hydrosolublesxcrétés par le rein et peuvent être employés. La défé-oxamine est un chélateur du fer pouvant être utilisé en

igure 11. Syndrome de Sweet : œdème papillaire marqué etnfiltrat à neutrophiles dermique, sans vascularite (HES, × 200).weet syndrome: papillary edema and neutrophil infiltrate withoutasculitis (HES, ×200).

Page 6: Cas no 5. Dermatoses bulleuses

Cas no 5. Dermatoses bulleuses

Figure 12. Lucite polymorphe bulleuse : œdème majeur duderme et infiltrat lymphocytaire périvasculaire dermique superficielet profond (HES, × 50).Bullous polymorphic light eruption: major dermal edema and per-ivascular lymphocytic infiltrate in the superficial and deep dermis(HES, ×50).

cas de contre-indication aux saignées (insuffisance rénalechronique, anémie) [9].

Au cours de l’association PCT-infection VHC, certainspatients ont eu une rémission de la PCT au cours du trai-tement du VHC par l’interféron alpha.

POINTS IMPORTANTS À RETENIR

Les porphyries sont des maladies métaboliques, leplus souvent innées, liées à des défauts dans lasynthèse de l’hème. Les porphyrines accumulées sontphotosensibles.

La porphyrie cutanée tardive (PCT) est liée à undéfaut de l’uroporphyrinogène décarboxylase (UPG), leplus souvent acquise.

Le défaut de l’UPG est lié à la sidérose hépatique, àl’hémochromatose, à l’infection par le VHC et/ou auxtoxiques hépatiques (alcool).

Dans la PCT, on observe des bulles sur les zonesphoto-exposées (visage, dos des mains) cicatrisant enlaissant des grains de milium.

L’histologie montre un décollement sous-épidermique, la basale étant souvent attachée autoit de la bulle. Il existe des dépôts fibrillaires

201

PAS-positifs épais autour des capillaires du dermesuperficiel.

Ces dépôts péricapillaires sont positifs enimmunofluorescence cutanée directe (IFD) en IgG(± C3, IgM).

L’aspect histologique est proche de celui décrit dansles bulloses du diabétique, où l’IFD est négative.

Le principal diagnostic différentiel estl’épidermolyse bulleuse acquise (EBA), maladieauto-immune avec anticorps anti-collagène VII. Dansl’EBA, il existe des dépôts linéaires le long de lajonction dermo-épidermique en IgG ± IgA, sans dépôtpérivasculaire.

Déclaration d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-tion avec cet article.

Références

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