Ce Qu'Est Le Coran - Analyse Scientifique

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    La thse du Coran cr

    La science est d'un got amer ses dbuts,

    mais la fin elle est aussi douce que le miel(inscription figurant sur un plat conserv au Louvre,dpartement des Antiquits islamiques)

    L'article qui va suivre a t publi l'origine dans Sciences et Avenir de janvier2003. Il fait un peu le point sur la recherche concernant la palographie du Coran (la palographieest l'tude des anciennes critures) dont les hros savants s'appellent Alfred Louis de Premare etGerd-Rdiger Puin. L'hypothse qu'ils voquent, celle d'un Coran "cr", n'est cependant pasinconnue dans la thologie musulmane o elle est rpute tre l'une des merveilles dumo'tazilisme. Ce courant rationaliste de l'islam n'a pas attendu le XXme sicle pour affirmer quele Coran est "cr"; "le Calife Al Ma'moun, dans une lettre, rappelle que l'ternit du Coranporterait atteinte l'unit divine" (Universalis). Conduit par Wasl Ibn 'Atta (700?-748) et Abu

    Hudhayl Al Allaf (752-842), les mo'tazilites taient entre autres "partisans de la rechercherationaliste en matire de religion et d'une lction dmocratique du chef de la communautreligieuse" (Universalis)...

    Le Coran, l'orthographe etle savant

    Le Coran serait la parole "incr" de Dieu, directement dicte Mahomet dans un arabe "pur".

    Des travaux suggrent pourtant que le texte a connu des volutions au fil du temps.

    "Al-tanzil", "la descente" : c'est par ce mme mot que les nomades des tribus d'Arabie dsignentla "rvlation" et "l'averse abrupte" qui fait reverdir la terre en quelques heures. Le Coran seraitainsi le "verbe de Dieu" descendu comme une pluie sur la Terre. Intouchable et peine retouch

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    depuis des sicles. Cette version potique ne rsiste pas l'analyse. La meilleure preuve en seraitun amas de parchemins rongs par l'humidit mis au jour dans une cache de la grande mosqueJama'a al-Kabir, Sanaa, au Ymen, en 1972. La tradition juive connat bien ces tombes depapiers destines ensevelir des textes religieux dont on a plus l'usage mais qu'on ne peut dtruireen raison de leur caractre sacr. Invit examiner ces feuillets, le philologue Gerd-Rdiger

    Puin, de l'universit de Sarrebruckdcouvre qu'il est en prsence de manuscrits arabes du coran

    parmi les plus anciens connus : "il s'agit d'un Coran de style hedjazien, qui correspond la graphie en vigueur la fin du VII sicle dans le Hedjaz, la rgion de La Mecque et de

    Mdine."Le manuscrit daterait de 680 environ.

    Il n'existait jusqu'alors que trois exemplaires du Coran de cette poque. La bibliothque deTachkent, en Ouzbkistan, et le muse de Topkapi, Istanbul, dtiennent chacun une copie duVIII sicle. Le manuscrit de Ma'il, dat de la fin du VII sicle est lui la British Library deLondres. Les manuscrits de Sanaa pourraient tre plus anciens. Leur calligraphie est dite dfective,car elle ignore les voyelles brves. Elle ne comporte pas non plus de signes diacritiques, cespoints situs au-dessus ou au-dessous des lettres, qui permettent de diffrencier le "b", le "n", le"y" et le "t", etc. Gerd Puin a constat des variations textuelles mineures, un ordre inhabituel deschapitres (les sourates), ainsi que des styles de graphie trs rares. Il a galement dcouvert que

    l'un des parchemins tait un palimpseste. Conclusion ? Le Coran aurait connu une volutiontextuelle. Et l'exemplaire actuel du Coran ne serait pas celui dont on croit qu'il a t rvl auProphte.

    Gerd Puin se demande mme si des sources prislamiques pourraient tre intervenues dansl'laboration du Coran. Deux tribus mentionnes dans les manuscrits de Sanaa, As Sahab ar-Rass("les compagnons du puits") et As Sahab al-Aiqa ("les compagnons des buissons pineux"),vivaient, l'une dans le Liban prislamique, l'autre dans la rgion d'Assouan, en Egypte, vers 150de notre re. Ils taient vraisemblablement inconnus de Mahomet et de ses compagnons. Leurmention n'aurait pu tre insre dans le Coran qu'au moment de la rencontre entre les conqurantsislamistes et ces contres.

    Rforme orthographique ?

    Aux yeux des croyants, ces hypothses sont difficilement acceptables. Selon la tradition, la Corana en effet t rvl Mahomet par fragments entre 610 et 632. Trois collectes du textecoranique auraient ensuite eu lieu aprs sa mort. Le premier Calife, Abou Bakr (632 634),aurait quasi aussitt fait rassembler tous les fragments de la rvlation, y compris en sondant lammoire des premiers compagnons du prophte. La deuxime collecte aurait eu lieu sous le califeOthman (644 656), qui aurait dcid de fixer une fois pour toutes une "vulgate" officielle. Lesmanuscrits et matriaux antrieurs auraient alors t brls. La dernire mise en forme daterait ducalife omeyyade Abd al-Malik (685-705). Elle aurait consist en une homognisation del'orthographe par al-Hajjaj, gouverneur d'Irak. A quelques rserves prs, ces donnes ontlongtemps t acceptes par les orientalistes. Aujourd'hui les spcialistes non musulmans quitravaillent sur le Coran sont plus circonspects, mais aussi tiraills entre plusieurs hypothses. "La

    fixation par crit de la rvlation que reut le prophte a connu une histoire sur laquelle la

    lumire est loin d'tre faite", reconnat Alfred-Louis de Premare, de l'Institut de recherches etd'tudes sur le monde arabe et musulman (universit de Provence, Aix-en-Provence).

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    Il est vrai qu'il n'existe aucun manuscrit qui ne date pas d'une bonne cinquantaine d'annes aprsla mort du prophte. Pourtant selon la tradition islamique, le calife Othman aurait fait raliser descopies de sa vulgate et les aurait expdies dans les principales villes de l'empire : la Mecque,Bassora, Coufa et Damas. Pourquoi donc n'en a-t-on dcouvert aucun exemplaire ? Lepalographe Franois Deroche, de l'Ecole pratique des hautes tudes, ne croit pas que les textesaient t dfinitivement fixs sous le calife Othman. : "La tradition islamique affirme qu'il avoulu fixer le texte afin d'viter les divergences dans sa rcitation. Or l'criture hedjazienne

    d'alors, trop imparfaite, ne permet pas d'empcher ces divergences. Au mieux, elle offre unsupport minimal, acceptable par les diffrents lecteurs"Jacqueline Chabbi est convaincue que leCoran a t mis par crit sous le calife Abd al-Malik, Damas, l'aube du VIII sicle. Lorsquel'islam est devenu une civilisation d'criture.

    Malheureusement, les universitaires occidentaux n'ont pas vritablement d'interlocuteursmusulmans auxquels frotter leur hypothses. Ce sont les religieux qui occupent le terrain

    farouchement. Les hypothses de Gerd Puin ont t qualifies "d'impostures" et des pressions ontt exerces sur ses appuis ymnites. Jacqueline Chabbi a fait l'objet d'une charge d'une rareviolence lors d'une confrence l'institut du monde arabe donne par un membre de l'Acadmieroyale du Maroc, le thologien Abdelaziz Benabdallah. Sur le site pourtant modr de lacommunaut islamique franaise www.oumma.com, le Dr Abdallah, exgte du Coran, dnonce

    violemment "le concept de musulman de service". "Il s'agit de faire cosigner l'article attaquantl'islam par quelqu'un qui porte un nom d'origine musulmane de manire essayer de faire passerl'article de la catgorie polmique strile la catgorie 'hypothse scientifique'. Entre les

    musulmans de service (...) on assista une surenchre progressive. Jusqu' la publication d'un

    essai insultant le prophte de l'islam.[les Verset sataniques ,de Salman Rushdie qui lui valurentune fatwa le condamnant mort] et de se rjouir : "depuis les musulmans de service sont moinsnombreux et moins outranciers"

    Pour avoir abord la Coran comme un texte littraire, l'Egyptien Nasr Abu Zaid, matre deconfrence l'universit du Caire, a quant lui t dclar apostat en 1995 et condamn l'exil.Au final un livre un seul au titre provocateur : Le Coran est-il authentique ? centr sur lesvolutions du texte, t publi compte d'auteur, il y a deux ans par un universitaire tunisien,

    Mondher Sfar. Le hic est que son auteur est galement connu pour avoir commis des articlesngationnistes au dbut des annes 1990. Les autorits religieuses musulmanes ont beau jeu desouligner que son analyse du Coran ne vaut certainement gure mieux que ses lucubrationspasses. "Un historien n'a pas de leons donner un thologien, mme s'il doit l'videncetudier son mode pense et sa doctrine. Bien entendu il n'a pas non plus recevoir de leons de

    lui en vertu d'un quelconque principe d'autorit qui interdirait de poser certaines questions"rappelle fort justement Jacqueline Chabbi.

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    Le Coran du Ymen

    Le manuscrit de Sana

    Cet autre texte parle d'un pisode important de cette recherche, la dcouverteen 1972 de manuscrits d'un Coran trs particulier, dans les sous-sols de la mosque de Sanaa.

    Cette dcouverte, bien qu'touffe par les autorits ymnites, est un repre majeur dans l'histoiredes tudes coraniques. Et bien que suscitant l'animosit irrflchie de tous les milieux

    conservateurs et islamistes, les thses du Dr Gerd-Rdiger Puin sont promises un bel avenir ..

    Le texte ci-aprs a t publi dans "Le Monde" du 07 septembre 2001.

    Le Coran en question

    Par Xavier Ternisien

    "Pour les musulmans, le Coran est la parole "incre" de Dieu, unervlation dicte en direct dans un arabe "inimitable". Mais des dcouvertes rcentes remettent encause ce dogme : le texte aurait connu des volutions dans le temps, ce qui implique une lecturehistorique, juge sacrilge par l'islam fondamentaliste.

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    Sanaa, capitale du Ymen, abrite en ses mursl'un des plus anciens monuments de l'islam : Jama'a al-kabir, la grande mosque. En 1972, aucours de travaux de restauration, des ouvriers trouvent dans les combles une sorte de cachette, cequ'on appelle une "tombe de papiers". La tradition juive connat bien cette pratique qui consiste "ensevelir" dans une guenizah des textes religieux dont on n'a plus l'usage, mais qu'on ne peut

    dtruire en raison de leur caractre sacr. La "tombe" de Sanaa renferme un amas de vieuxparchemins, rongs par le temps et les rats.

    Le prsident des Antiquits ymnites parvient convaincre un universitaire allemand, le DrGerd-Rdiger Puin, de s'y intresser. Celui-ci dcouvre qu'il est en prsence de manuscrits arabesdu Coran parmi les plus anciens connus. Il obtient le droit d'en tirer des microfilms, malgr lesrticences de ses htes. Car, entre-temps, les autorits du Ymen ont mesur l'importance de ladcouverte. Et ne souhaitent pas que le contenu des manuscrits soit rvl au grand public. Le DrPuin souponne les Ymnites d'avoir volontairement expos la lumire ses microfilms, pour lesrendre inutilisables. Les pellicules sont voiles, mais encore lisibles.

    Quelle inavouable vrit renferment donc les manuscrits de Sanaa ? Pour le Dr Puin, ils

    constituent la preuve que le texte coranique a connu des "volutions". Bref, qu'il a une histoire. Etcette hypothse n'est tout simplement pas admissible pour l'islam sunnite. Aux yeux desmusulmans, le Coran que nous connaissons aujourd'hui est la parole "incre" de Dieu. Il estrdig en "arabe pur" et son style est "inimitable". Dans le langage de l'Arabie des tribus, larvlation se dit al-tanzil, "la descente": c'est le mme mot que les nomades emploient pourdsigner l'averse brutale, qui fait reverdir la terre en quelques heures. Le Coran est en quelquesorte le "Verbe de Dieu" descendu sur la Terre. Au point que l'Encyclopdie de l'islam (Brill) peutavancer cette comparaison : "L'quivalent le plus proche dans la foi chrtienne du rle jou par leCoran dans la foi musulmane n'est pas la Bible, mais le Christ."

    Dans son bureau de l'universit de Sarrebruck, Gerd Puin compare patiemment le fac-simil desmanuscrits ymnites avec un exemplaire de la version officielle du Coran, achet au Caire. Le

    livre saint, tel qu'il se prsente dans l'dition de rfrence, n'est accompagn d'aucune variante. Letexte est entour d'un cadre enlumin qui indique clairement son statut privilgi. Au contraire,les feuillets de Sanaa sont couverts d'une criture rudimentaire et sans fioritures. "Il s'agit,explique le Dr Puin, d'un Coran de style hedjazien, qui correspond la graphie en vigueur la findu VIIe sicle dans le Hedjaz, la rgion de La Mecque et de Mdine." Le manuscrit daterait de680 environ, sous la dynastie des Omeyyades de Damas (661 750).

    L'criture hedjazienne est dite "dfective". Elle ignore la notation des voyelles brves, quin'apparatra que bien plus tard. Mais surtout, elle ne comporte pas de signes diacritiques : ces

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    Franois Droche, palographe et professeur l'Ecole pratique des hautes tudes, veut bienapporter crdit une premire mise en forme du texte coranique sous le premier calife Abou Bakr.Mais il met en doute la ralit d'une fixation dfinitive sous le calife Othman, pour des raisons quitiennent la graphie des manuscrits : "La tradition islamique affirme que le calife a voulu fixer letexte afin d'viter les divergences dans sa rcitation. Or l'criture hedjazienne, trop imparfaite, nepermet pas d'empcher ces divergences. Au mieux, elle offre un support minimal, un texte

    consensuel acceptable par les diffrents lecteurs."

    Jacqueline Chabbi avance, pour sa part, que le Coran a t mis par crit sous le califeAbd-al-Malik, Damas, l'aube du VIIIe sicle. Cette universitaire, qui enseigne les origines del'islam Paris-VIII, a publi en 1997 un livre dcapant, Le Seigneur des tribus (Nosis). "Avecl'empire des Omeyyades, la religion de Mahomet bascule dans un autre monde, explique-t-elle.Elle accompagne le dveloppement d'un Etat dans lequel l'criture devient prdominante. Un'Coran musulman' est ainsi mis par crit, partir de fragments d'oralit conservs dans lesmmoires. Dans les sicles suivants, la tradition islamique couvrira d'un luxe de dtails lesorigines de l'islam et reconstituera un pass fictif. Si nous prenons la figure de l'ange Gabriel, lemessager de la rvlation si prsent dans la tradition postcoranique, nous constatons qu'elle estquasiment absente du Coran : elle ne fait l'objet que de trois mentions, dans des passages tardifs."

    A la faon d'un restaurateur qui enlve les vernis d'une toile pour mettre au jour les couleursd'origine, Jacqueline Chabbi s'est attele retrouver la religion de Mahomet, "l'islam des tribus"."Le Coran des tribus est un texte qui se forge dans l'adversit. Mahomet a connu le destin tragiquede l'inspir, celui qui continue seul contre tous, mme lorsqu'il est banni de sa ville natale. Lelivre que nous connaissons aujourd'hui a gard la trace de ces polmiques. C'est une oralitdsordonne et foisonnante, dans laquelle la parole adverse, les insultes et les objections sontconserves pour mieux les retourner et les contredire bruyamment."

    L'historienne reproche ainsi aux traducteurs d'avoir affadi le texte coranique. Science et foiappartiennent deux registres diffrents, prcise-t-elle : "Les chercheurs n'ont pas se poser laquestion thologique de savoir si le Coran est ou non d'essence divine." Malgr ces prcautions,les spcialistes qui travaillent sur les textes coraniques savent bien que leurs travaux susciterontl'hostilit de beaucoup de croyants. Pourtant, une poigne de penseurs musulmans commencent poser les bases d'une lecture "moderniste" du Coran.

    Un petit livre paru en 2000 commence timidement faire son chemin : Le Coran est-ilauthentique ? (ditions Sfar). Livre impie pour les uns, ouvrage de bonne vulgarisation pour lesautres. A la sulfureuse rputation du livre s'ajoutent les zones d'ombre qui entourent son auteur.Mondher Sfar, universitaire tunisien au pass marxiste, est aussi l'auteur de trois articlesngationnistes, publis au dbut des annes 1990 dans la Revue d'histoire rvisionniste : il s'ylivre une analyse aussi dlirante que consternante du "mythe" des chambres gaz. Son livre surle Coran vaut mieux que ses lucubrations passes. Non que ses arguments soient nouveaux : il nefait que citer certaines donnes de la tradition islamique, et s'appuie sur les travaux de l'coleallemande des orientalistes, initis par Theodor Nldeke et prolongs en France par RgisBlachre. Son originalit est d'oprer une synthse de ces donnes dans une perspective decroyant.

    Mondher Sfar rappelle que la tradition fait tat de variantes, d'omissions ou d'interpolations dansla rdaction du Coran, et cela dj du vivant du Prophte. Ainsi, un hadith mentionn par leclbre commentateur Boukhari rapporte l'anecdote suivante : "Le Prophte, ayant entenduquelqu'un rciter le Coran la mosque, dit : 'Dieu fera misricorde cet homme, car il m'a

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    rappel tel et tel verset qui m'ont chapp dans telle et telle sourate'." Une autre fois, c'est uncompagnon du Prophte, le futur calife Umar, qui se flatte d'avoir t l'origine d'une rvlation :"J'ai dit : ' aptre d'Allah, des gens bien et des gens moins bien frquentent tes femmes. Si tu leurordonnais de se voiler ?' Alors, le verset du voile est descendu."

    L'auteur insiste sur le rle des scribes qui entouraient Mahomet. L encore, la tradition islamique

    leur accorde une importance prpondrante dans la mise en forme du Coran. Un personnagecomme Ibn Abi-Sahr, qui finira par apostasier l'islam, se flatta mme d'avoir not"misricordieux" et "absoluteur", l o le prophte dictait "sage" et "puissant". Dans l'Arabie duVIIe sicle, la notion d'authenticit littrale n'a pas le sens que nous lui donnons aujourd'hui : "Lecouple prophte/scribe est le cadre originel habituel de la pratique scripturaire orientale : chacunremplit sa fonction et le produit de leur collaboration n'en est que plus authentique."

    Sans remettre en cause son origine divine, Sfar avance que le Coran est une copie imparfaite d'unarchtype cleste, un livre (kitab) qui se trouve auprs de Dieu. Il en conclut que Mahomet "n'a pas reu la rvlation selon le mode de la dicte, mais selon le mode de l'inspiration".L'universitaire affirme hardiment que le Coran prsente "une volution et des variations dans letemps" : "Cette histoire n'a t possible que parce que la nature de la rdaction du texte qui

    deviendra le Coran empruntait les voies de l'laboration, de la composition, de la stylisation et dela rectification." Et l'auteur de conclure en regrettant que "la critique historique du texte coraniqueait pris un retard d'un sicle et demi par rapport aux travaux qui ont expos les textes bibliques la lumire de l'histoire humaine". "

    Xavier Ternisien,

    La formation des critures islamiques

    Par Alfred-Louis de Prmare,

    Professeur mrite, universit de Provence et Ireman

    On ne peut pas parler de la formation du Coran sans parler de l'ensembledes critures islamiques durant cette mme priode. En effet, si nous nous plaons dans laperspective de l'histoire des textes, les deux corpus d'critures aujourd'hui canoniques pour lesmusulmans, le Coran et le Hadth, sont ns ensemble, bien que la mise en forme des grands

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    corpus de Hadth ft postrieure celle du corpus coranique.

    Par ailleurs, le Coran n'est pas la seule source de rfrence canonique en matire de lgislation,celle-ci couvrant les diffrents champs de la vie concrte de la communaut musulmane : droitpriv, droit pnal, statut personnel, etc. Il y a aussi le Hadth, l'ensemble des traditions rapportesdu prophte de l'islam, appel aussi Sunna, c'est--dire " pratique normative ". titre d'exemple,

    l'obligation des cinq prires quotidiennes n'est pas tant dfinie par le Coran que par le Hadth. Demme, pour comprendre les controverses actuelles sur le foulard islamique, il ne faut pas serfrer seulement au Coran, mais galement un clbre hadth (logion) attribu au prophte del'islam disant que, de la femme, on ne doit voir que le visage et les mains. En ce qui concerne lalapidation des adultres, cette peine ne se trouve pas dans le Coran, mais dans la Sunna.

    Il me faut faire d'abord une mise au point sur le terme " corpus " appliqu au Coran, dans lamesure o les musulmans refusent gnralement ce terme car le Coran est pour eux un texte sacrdescendu du ciel et non un corpus qui serait le produit d'un assemblage humain. Et pourtant latradition islamique elle-mme parle de " rassemblement ", de " collecte " [jam'], de textesrassembls aprs la mort du prophte. Au fond, le terme " corpus " ne dit pas autre chose et on peut l'employer mme si certains musulmans d'aujourd'hui ne s'en satisfont pas. En effet, la

    simple lecture du Coran montre bien ce caractre de rassemblement de textes fragmentaires,souvent juxtaposs et souvent sans vritable continuit de l'un l'autre, mme si leur juxtapositionfinale peut obir une certaine intention.

    Que le terme " corpus " puisse tre appliqu au Hadth est encore plus vident. Plusieurs desgrands corpus canoniques du IXe sicle sont intituls jmi', " celui qui rassemble ", et leurs unitslittraires en sont des fragments discontinus, mme lorsqu'elles sont classes par thmes.

    On peut donc dire, aussi bien pour le Coran que pour le Hadth, que ces corpus non seulement ontt " rassembls ", mais aussi qu'ils ont fait l'objet d'une activit rdactionnelle et d'unelaboration, et donc qu'ils ont une histoire. Or, pour comprendre cette histoire, il faut l'envisagersous trois aspects : il s'agit d'un processus sur une longue priode, dans un espace largi, fruit d'untravail collectif.

    Une longue priode, un espace largi, un travail collectif

    Pour les musulmans, la totalit du Coran a t rvle (le terme propre est " descendue ") pendantla carrire du prophte, entre 610 et 632. Dans un premier temps, la recherche orientalistemoderne a gnralement repris ce schma, classant les diffrents chapitres (sourates) du Corancomme ayant t rvls successivement La Mecque et Mdine. Les manuels scolairesreprennent gnralement ce schma, certains allant mme jusqu' dire, par exemple : " En 610, leCoran est rvl par l'archange Gabriel ". Cette perspective, outre l'utilisation d'un langageproprement confessionnel, ne tient pas compte du travail rdactionnel qui s'est tendu bien aprsla mort du prophte de l'islam et dont la tradition islamique nous donne de multiples tmoignages.

    De mme, il savoir que la constitution du corpus s'est faite dans un espace plus large que celui deLa Mecque et de Mdine, qui s'tendait du Hedjaz et du Ymen la Msopotamie. En effet, nousavons affaire un processus qui commence Mdine, mais qui continue aprs la conqute enSyrie et en Msopotamie surtout, o se constituent des codex concurrents de celui de Mdine.

    Il s'agit donc d'une priode longue : il faut compter environ un sicle pour l'tablissement d'unevulgate officielle du Coran, et un sicle de plus pour celui des grands corpus canoniques du

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    Hadth.

    Il s'agit aussi d'un travail collectif qui prend en compte l'uvre de scribes dont la traditionislamique atteste l'existence et nous donne les noms. On y parle des secrtaires qui entourentMuhammad dont certains sont d'anciens juifs qui ont adhr la foi nouvelle ; tel autre estd'origine thiopienne ou byzantine, ct d'Arabes de la Pninsule, du Nord ou du Sud. Certaines

    traditions laissent penser que Muhammad reoit du ciel, mais aussi de ses secrtaires ! Aprs lamort du fondateur, le travail de constitution du corpus se poursuit non seulement Mdine, maisaussi dans les nouveaux centres crs par la conqute : c'est le cas de la nouvelle agglomrationde Kfa en Irak qui verra l'tablissement d'un codex coranique concurrent de celui de Mdine.Les rcits traditionnels voquent aussi des codex concurrents en Syrie et au Ymen.

    Les musulmans des premires gnrations, racontant comment s'tait constitu le Coran, lefaisaient avec beaucoup de libert et de ralisme, et paraissaient donc moins rigides que beaucoupde musulmans d'aujourd'hui.

    L'intervention du pouvoir politique

    Durant toute cette priode, le rle de l'autorit politique dans ce processus a t considrable.Tous les grands califes ont t impliqus dans la mise en place des critures. Les califesconstituent des commissions pour le rassemblement et la mise au point des textes, contrlent ladiffusion des textes slectionns, rpriment les dissidents et dtruisent les versions concurrentes.Tout cela obit une vise politique : sauvegarder l'unit d'une communaut, dj dchire par lesdissensions, autour d'un pouvoir unique et de textes contrls. En effet, le calife est par dfinition" successeur " du prophte et se trouve investi d'une double fonction de chef religieux et politiquede la communaut. La nostalgie d'une alliance idale entre le politique et le religieux animel'utopie islamique encore de nos jours.

    Le rapport entre le Coran et le Hadth

    Ces deux termes ont aujourd'hui une signification technique bien dfinie dans la communautmusulmane : le Coran est considr par les musulmans comme la parole de Dieu, le livre saint, etsa fonction dominante est d'ordre liturgique ; le Hadth est l'ensemble des traditions attribues auprophte Muhammad et il est considr comme l'une des sources de la pratique normative de lacommunaut.

    Lorsque nous nous plaons sur le terrain de l'histoire des textes, et en particulier sur celui de laformation des critures islamiques, nous sommes obligs de prendre en considration unensemble d'informations qui laissent entrevoir au dpart une certaine indcision entre les deuxtermes coran et hadth, et les ralits qu'ils recouvrent. Les conclusions que nous pouvons en tirerrelvent alors du domaine des hypothses fructueuses de la recherche. Elles ne sont pas pour

    autant livrer telles quelles devant un public d'ge scolaire.

    Le chercheur doit d'abord prendre en compte la grande diversit des sources islamiques sadisposition. Il peut y relever de nombreux indices qui tmoignent de cette indcision initiale. Envoici quelques exemples. Un transmetteur de traditions dclare : " J'ai recueilli de l'envoy deDieu beaucoup de coran " et il voque en fait des textes appartenant aujourd'hui au Hadith. Autreexemple : le premier calife omeyyade Mu'awiya voulant contrer des opposants qui refusentl'exclusivit des Qurayshites prtendre au califat dclare : " Il y a des gens qui rapportent deshadths qui ne sont pas dans le livre de Dieu et qui ne sont pas transmis de l'envoy de Dieu ".

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    L'affirmation que le pouvoir politique est rserv aux Qurayshites. est une parole attribue auprophte par les corpus canoniques du Hadth, mais elle ne figure pas dans le Coran. Dans unouvrage de controverse chiite, attribu un auteur du milieu du VIIIe sicle, nous trouvons pardeux fois un extrait du Coran actuel annonc par " Muhammad a dit ". Or, pour la foi musulmane,c'est Dieu qui parle dans le Coran et non Muhammad. On pourrait citer d'autres exemples de cegenre.

    Le mot " Coran " tait au dpart un nom commun dont nous retrouvons l'origine dans la languesyriaque o il signifie "lecture" d'une criture sainte dans un cadre liturgique. Ceci donne penserque les paroles ou les textes retenus pour constituer le corpus coranique taient en grande partiedestins une rcitation liturgique. Dans la littrature islamique primitive, on trouve pluttl'expression " Livre / criture de Dieu " pour dsigner ce que nous appelons aujourd'hui le Coran.Le mot hadth a, au dpart, le sens trs gnral de " relation, rapport, rcit " et l'on peut dire quesous son sens technique de " paroles " transmises de Muhammad, il a gard son sens originel.

    Replacer les critures islamiques dans leur environnement culturel

    Sans sous-estimer les lments de la culture arabe de la Pninsule dont on retrouve l'cho dans leCoran, il faut bien constater que l'islam s'inscrit dans la ligne des traditions religieuses juives etchrtiennes. Il ne faut pas non plus ignorer l'influence d'lments d'origine zoroastrienne. Ledomaine arabe tendu de la Pninsule aux rives de l'Euphrate tait largement travers par tous cescourants. Qu'il s'agisse de Muhammad, des rdacteurs du Coran ou des prdicateurs, tout au longde ce premier sicle de l'islam, tous puisent largement dans la culture ambiante. Dans les textes duCoran, nous trouvons une reformulation de thmes bibliques l'usage de la nouvelle communaut.Il faut entendre le terme " biblique " au sens large en y incluant, du ct juif, toute la littrature decommentaire qui entoure la Bible : Targum, Midrash, Talmud, et du ct chrtien, des vangilesapocryphes aussi bien que des thmes de la prdiction patristique orientale. Contrairement l'usage chrtien des critures juives antrieures (par exemple : " comme il est crit au livre duprophte Isae... "), les critures islamiques ne citent pas leurs sources. Dans le Coran, tout estprsent comme une parole directe de Dieu mme lorsqu'il s'agit d'un emprunt vident. Il en estde mme dans le Hadth o le remploi de telle parabole vanglique ou de tel rcit des traditions juives est prsent comme une parole de Muhammad. Ajoutons encore que les emprunts sontsouvent utiliss dans un cadre polmique contre les juifs et les chrtiens et retourns contre eux.Ce procd s'inscrit dans un contexte gnral o les diffrentes communauts religieusespolmiquaient coup de citations scripturaires : juifs contre chrtiens, nestoriens contre jacobites,chrtiens contre juifs ou manichens, etc. Les premiers musulmans, en constituant leurs proprescritures, sont entrs tout naturellement dans ce mode de relations conflictuel trs gnral.

    Le langage confessionnel

    Il faut prendre garde ne pas confondre le plan de l'histoire et celui de " l'histoire sainte ". Unmanuel d'histoire, lorsqu'il traite des dbuts de l'islam, n'a pas reprendre son compte lesexpressions d'un langage confessionnel. Ceci s'applique aussi l'histoire des Hbreux ou la viede Jsus. Cependant, il faut se mnager la possibilit de rendre compte du contenu culturel etreligieux en disant : " Les musulmans croient que..., la Tradition rapporte que... ".

    Prenons l'exemple du mot " rvlation ". Il est employ couramment pour dsigner la prdicationde Muhammad alors qu'il implique dj un acte de foi de la part de celui qui l'utilise. Cet usagedoit tre reconsidrer dans le cadre d'un enseignement lac du fait religieux.

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    En revanche, pour enseigner le contenu culturel ou plus proprement religieux de l'islam,l'enseignant doit tre au clair avec le langage utilis par cette tradition. Ce terme de " rvlation ",couramment employ mme par les chercheurs lacs modernes, ne correspond pas au vocabulairehabituel de la littrature islamique pour dsigner l'mission du message coranique. Celle-ci parlesurtout de " descente " [tanzl]. Le mot " rvlation " est une traduction d'inspiration biblique : ilrenvoie au grec apocalupsis (origine du mot " apocalypse "), qui signifie littralement "

    dvoilemen ". Or, en parlant de " descente ", la thologie islamique met l'accent sur l'extranitd'une parole divine descendue du ciel, que le prophte reoit la manire d'un rceptacle passif. Ily a un " Livre-source ", conserv sur une " Table auprs de Dieu ", qui descend sur le prophte,lequel ne fait que le transmettre.

    Ce schma thologique pourrait tre explicit dans le cadre de l'histoire des religions : l'Orientancien vhicule plus ou moins une telle conception depuis les stles et les tablettes des loisbabyloniennes, les tables de la loi de Mose sur le mont Sina " crites du doigt mme de Dieu ",et surtout les tables clestes d'Hnoch et de la littrature apocalyptique juive.

    Alfred Louis de Prmare

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    Alfred-Louis de Prmare, Les Fondations de l'islam. Entre criture et histoire, Paris 2002, Seuilcollection L'Univers historique, p. 310-313.

    Quraysh est la tribu du prophte Mhuhammad.

    A.-L. de Prmare, Les Fondations, p. 317-321.

    Le Livre-source, en arabe " la mre du Livre " - umm al-kitb - Coran, 13,39 ; conserv sur uneTable - f lawhin mahfz- Coran 85,21-22.

    Cf. la stle du code de lois d'Hammourabi, dict " sur l'ordre de Shamash, le grand juge descieux et de la terre ", comme il est dit dans l'pilogue de ce code.

    Bible, Livre de l'Exode, 31,18.

    La Bible. Ecrits intertestamentaires, Paris, Gallimard (Bibliothque de la Pliade), 1987, p. 568(1er Hnoch, 81,1-3) ; p. 616 (Id., 103,1-3) ; p. 1187-1188 (2e Hnoch, 22,8-23,3).

    Bibliographie :

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    - Une bibliographie des travaux de Gerd-Rdiger Puin :

    Gerd Rdiger Puin: "Observations on Early Qur'an Manuscripts in Sana'a," i What theKoran Really Says, 2002 ISBN 157392945X. Karl-Heinz Ohlig og Gerd Rdiger Puin (udg.): Die dunklen Anfnge, 2005 ISBN3899301285.

    Livres :

    Aux origines du Coran, Alfred-Louis de Prmare

    Prsentaion de l'diteur :

    Le Coran, avant dtre un livre, a t un ensemble de messages transmis deMuhammad. Ils sont reus par les musulmans comme Parole de Dieu. Mais comment sont-ilsdevenus un livre ? cette question, une rponse simple est couramment donne aujourdhui :sous le calife Uthmn (644-656), un livre a t constitu rassemblant tous ces messages, et ayantacquis le statut de Rvlation.

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    Pourtant, les historiographes musulmans des premiers sicles suggrent que la rdaction du textecoranique connut une histoire bien plus complexe, qui ne sacheva quau Xe sicle avec lafixation dun corpus intangible et commun tous les musulmans. Cette mise en crit des textestransmis a impliqu des choix dans un contexte de divisions politiques et de confrontationsreligieuses, elle a ncessit lintervention des autorits califales, elle a entran des dbats sur lestatut du Prophte, sur lorigine, la langue, la nature de son message.

    A.-L. de Prmare, historien des textes et des ides, reprend ces questionnements dhier, en traitantdes origines du Coran selon les mthodes et les interrogations propres toute recherche actuellesur la littrature religieuse.

    Connatre ainsi les modalits de rdaction du corpus coranique, analyser les procds littrairesalors mis en uvre, dcouvrir les enjeux politiques et religieux sous-jacents permettra de mieuxcomprendre un livre dont lopacit premire est due, entre autres, aux conditions de sa productionet pas seulement son statut de parole rvle. La voie est alors ouverte pour sortir du cadre d'uneexgse traditionnelle, de type historico-thologique, et envisager des lectures critiquesrenouveles de cette criture sainte .

    144 pages

    ISBN : 2-912868-19-X

    La pense islamique. Acteurs et enjeux, Alain Roussillon

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    Dans son nouveaulivre, La pense islamique contemporaine. Acteurs et enjeux (Paris, Tradre, 2005), AlainRoussillon dcrit l'mergence d'une nouvelle mouvance au sein de la pense musulmanes: lesnouveaux intellectuels musulmans. Bien que dcrivant une tendance regroupant des activistesmusulmans, des islamistes libraux ou encore des penseurs musulmans scularistes, cetteappellation recouvre plus prcisment les penseurs religieux non clricaux (par opposition auxoulmas et aux "intellectuels sculiers") n'ayant pas, pour la plupart, suivi les filires officiellesd'o sont issus les clercs et dont ils contestent le monopole hermneutique.

    Histoire de la pense en terre dIslam, Miguel Cruz Hernandez

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    Histoire de la pense en terre dIslam : un si gros ouvrage traduit delespagnol et mis jour par Roland Bhar. Il est dautant plus gros quil est riche et fort agrable lire. Miguel Cruz Hernandezen est lauteur. Il compare, commente, analyse, explique, va au-deldu simple expos et cependant reste dans le cadre de lhumain et de luniversel. Bref, loin desdlires de puissance de certains historiens.