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Centre de droit de la Consommation et du Marché | …...2 S. Pessina Dassonville, Le droit d'arène et autres avatars de la société du divertissement, in Football et Droit, sous

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Remerciements_______________________________________________

Je tiens à adresser mes plus sincères remerciements à :

Monsieur le Professeur Daniel Mainguy, Professeur à la Faculté de droit de Montpellier et Directeur du Master II Droit privé économique, et à Monsieur Malo Depincé, Maître de conférences à la Faculté de droit de Montpellier et Directeur du Master II Droit de la consommation et droit de la concurrence, pour leurs enseignements dispensés et leurs conseils précieux.

Madame Sophie Vernay-Delcourt, assistante au CDCM, pour sa disponibilité.

Madame Pauline Castelot, Doctorante à la Faculté de droit de Montpellier, pour ses conseils judicieux qui m'ont permis de réaliser ce travail de recherche.

Ma compagne Laura May, qui me soutient d'une façon extraordinaire depuis plusieurs années et plus particulièrement depuis le début de cette année universitaire.

Mes parents et mes soeurs qui m'encouragent et me soutiennent du Luxembourg.

Toute l'équipe pédagogique du CDCM et les promotions DPE et MC2 de 2014/2015.

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Liste des principales abréviations_______________________________________________

act. Actualité

c/ ContreCA Cour d'appelCass. Cour de cassationCE Conseil d'ÉtatCC Conseil constitutionnelCCC Contrats Concurrence Consommation - LexisNexisCCE Communication Commerce électroniqueCiv. Arrêt d'une Chambre civile de la Cour de cassationCJCE Cour de justice des Communautés européennesCJUE Cour de justice de l'Union européennecoll. Collectioncom. Chambre commerciale de la Cour de cassationcomm. CommentaireComm. CE Commission des Communautés européennesCSA Conseil supérieur de l'audiovisuel

D. Recueil DallozD. act. Dalloz actualitéDéc. DécisionDir. Directive doctr. Doctrine

éd. Édition

FFF Fédération française de footballFFR Fédération française de rugbyFFT Fédération française de tennisFIFA Fédération Internationale de Football Association

infra plus bas

JCP Juris-Classeur périodiqueJCP G Juris-Classeur périodique, édition Générale

JO Journal officielJOCE Journal officiel des Communautés européennesJORF Journal officiel de la République française

LDGJ Librairie générale de droit et de jurisprudence

2

n° Numéro

ord. Ordonnance

p. ex. par exemplePUF Presses Universitaires de France

Rec. RecueilRLDI Revue Lamy Droit de l'Immatériel

supra plus haut

T. com. Tribunal de commerceTFUE Traité sur le fonctionnement de l'Union européenneTGI Tribunal de grande instanceTPICE Tribunal de première instance des Communautés

européennesTUE Traité sur l'Union européenne

UE Union européenne

3

Sommaire_______________________________________________

Introduction.......................................................................................................... 5

Partie 1 : L'introduction d'un monopole d'exploitation spécifique....................... 10

Titre 1 : Le passage d'un monopole de fait à un monopole de droit............... 11

Chapitre 1 : La consécration législative d'un monopole........................... 11

Chapitre 2 : Les exceptions légales au monopole de droit........................ 20

Titre 2 : L'identification du monopole de droit............................................... 26

Chapitre 1 : La question de la nature du droit d'exploitation.................... 26

Chapitre 2 : La question de l'appropriation de l'événement sportif par le droit de la propriété intellectuelle................................ 34

Partie 2 : L'appréciation d'un monopole d'exploitation ambiguë.......................... 43

Titre 1 : Le problème du défaut de la délimitation du périmètre.................... 44

Chapitre 1 : L'intervention prudente des juges......................................... 44

Chapitre 2 : L'intervention divergente des juges...................................... 51

Titre 2 : Le problème du défaut de garantie de la sécurité juridique.............. 56

Chapitre 1 : Le monopole d'exploitation comme source d'atteintes......... 56

Chapitre 2 : Le monopole d'exploitation et le problème de l'ambush marketing............................................................... 62

Conclusion générale.............................................................................................. 72

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Introduction_______________________________________________

« Si l'homme échoue à concilier la justice et la liberté, alors il échoue à tout »1.

Dans le monde entier, au cours de l'année, sont organisés des événements sportifs d'une envergure plus ou moins importante. En prenant l'exemple de l'organisation des compétitions de football, la Fédération française de football (ci-après FFF) a l'autorité sur celles-ci en France et confie l'organisation des championnats amateurs à la Ligue de football amateur (ci-après LFA), passant par l'organisation des championnats professionnels par la Ligue de football professionnel (ci-après LFP), allant à l'échelle internationale jusqu'à l'organisation de la Coupe du monde de football organisé par la Fédération Internationale de Football Association (ci-après FIFA). Dans nombreux pays, les organisateurs d'événements sportifs se voient protégés par un système de droit exclusif quant à l'exploitation dudit événement, voire même en France, par la concession d'un monopole d'exploitation. Au Brésil il est ainsi question du droit d'arène qui donne à l'exploitant de l'événement sportif, le pouvoir de négocier ses droits de retransmission télévisuelle, ainsi que ses droits audiovisuels et de gérer son marketing quasiment comme bon lui semble2. En outre, afin de s'en tenir à l'exemple de la FIFA, celle-ci avait insisté sur son monopole quant à l'organisation de la Coupe du monde en Afrique du sud en 2010, ce qui faisait l'objet d'un consensus national et international3. En effet, ce droit au monopole résulterait d'un usage. En France, les juges de la Cour d'appel de Lyon l'avaient déjà reconnu il y a presque trente ans : « il est de pratique courante que les organisateurs de spectacles sportifs [...] se réservent le droit d'en monnayer la diffusion par radio ou télévision ; que cette pratique est largement établie sur le territoire national et qu'elle est consacrée tant par la doctrine que par la jurisprudence française et étrangère [...et que] cette pratique, devenue une habitude puisqu'exercée de façon constante depuis un certain nombre d'années, constitue un usage créateur d'un droit »4. Avant sa reconnaissance légale, ce monopole était désormais accepté et autorisé par les usages en ce domaine, de façon qu'il s'agissait alors d'un monopole de fait toléré.

La consécration législative française de ce monopole d'exploitation est seulement intervenue avec la loi Bredin du 13 juillet 1992 qui, de part son article 13, a inséré l'article 18-1 dans la loi Avice du 16 juillet 1984, affirmant pour la première fois

1 Albert Camus, dans Carnets (janvier 1942-mars 1951), Gallimard, 19642 S. Pessina Dassonville, Le droit d'arène et autres avatars de la société du divertissement, in Football

et Droit, sous la direction de J. Guillaumé et N. Dermit-Richard, organisé à la Faculté de droit de Rouen le 12 octobre 2011, Fondation Varenne LGDJ, 2012

3 M. Maisonneuve (sous la dir.), Droit et coupe du monde, Economica, 2011, p.1224 CA Lyon, 1ère ch. civ., sect. B., 26 mars 1987

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que le « droit d'exploitation d'une manifestation ou d'une compétition sportive [appartenait] à l'organisateur de cet événement ». Aujourd'hui ce texte est codifié à l'article L.333-1 du Code du sport qui dispose que « les fédérations sportives, ainsi que les organisateurs de manifestations sportives mentionnés à l'article L.331-5, sont propriétaires du droit d'exploitation des manifestations ou compétitions sportives qu'ils organisent ». Le législateur parle à présent de propriétaire du droit d'exploitation, ce qui laisse surgir des questions quant à la nature de ce droit, menant à des débats doctrinaux et jurisprudentiels importants. S'agirait-il alors d'un droit sui generis issu du monopole légal, d'un droit voisin ou encore d'un véritable nouveau droit de propriété (original) inspiré de l'article 544 du Code civil qui serait par principe absolu et par exception limité ?5 De même, l'absence d'une délimitation du périmètre et de l'assiette de ce monopole laisse place à des incertitudes.

Qui sont finalement les acteurs visés par le bénéfice de ce monopole ? Comme l'indique l'article L.333-1 du Code du sport, sont titulaires de cette prérogative les fédérations sportives (agréées et délégataires) et les organisateurs visés à l'article L.331-5 du même Code, à savoir « toute personne physique ou morale de droit privé [...] qui organise une manifestation ouverte aux licenciés d'une discipline qui a fait l'objet d'une délégation de pouvoir conformément à l'article L.131-146 [...et qui] doit obtenir l'autorisation de la fédération délégataire concernée ». En effet, qu'une seule fédération sportive par discipline ne peut obtenir une délégation du Ministère compétent7 pour organiser des manifestations ou événements sportifs dans cette discipline où seront délivrés les titres officiels. Néanmoins, il est possible qu'une personne physique ou morale de droit privé organise un tel événement alors qu'elle ne bénéficie pas de la délégation du Ministère. Il faut alors que cette personne (physique ou morale de droit privé) reçoive l'agrément de la fédération concernée, qui elle-même a obtenu la délégation (parfois de mission de service public) par le Ministère, pour organiser cet événement ouvert aux licenciés et où pourront être délivrés des titres officiels. Tel est par exemple le cas de l'organisation de l'événement sportif du Marathon de Montpellier8 qui est organisé par l'association Montpellier Agglomération Athlétic Méditerranée (personne morale de droit privé), association affiliée à la Fédération Française d'Athlétisme (ci-près FFA) de laquelle elle doit obtenir l'autorisation de pouvoir organiser cet événement sportif9.

5 J.-M. Marmayou, Le droit d'exploitation des organisateurs sportifs : monopole finalisé ou droit absolu ?, D. 2014, p.14286 Art. L.131-14 Code du sport : « Dans chaque discipline sportive et pour une durée déterminée, une

seule fédération agréée reçoit délégation du ministre chargé des sports.Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'attribution et de retrait de la délégation, après avis du Comité national olympique et sportif français. »

7 Le Ministère compétent est celui de la Ville, de la Jeunesse et des Sports8 Le marathon de Montpellier qui a célébré sa 5ème édition le 19 octobre 2014.9 En pratique, toute personne physique ou morale qui souhaite organiser une manifestation sportive ou

un événement sportif, doit demander un avis auprès de la FFA (art. R.331-9-1 du Code du sport). L'autorisation, pour que l'événement puisse être tenu, sera finalement délivrée soit par un préfet (du lieu du siège de l'organisateur ou du lieu de départ de la manifestation), soit par le Ministère de l'intérieur (sur avis des préfets lorsque la manifestation se déroule sur vingt départements ou plus).

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En outre, l'alinéa 2 de l'article L.333-1 du Code du sport prévoit encore la possibilité pour les fédérations sportives de céder la propriété de tout ou partie des droits d'exploitation audiovisuelle aux « sociétés sportives » , et ce à titre gratuit, dès lors que celles-ci participent aux compétitions ou manifestations sportives organisées par la ligue professionnelle10, elle-même créée par la fédération. À noter que cette disposition ne prévoit que l'hypothèse de la cession gratuite de toute ou partie de la propriété des droits d'exploitation audiovisuelle et non pas la cession de tout le droit d'exploitation de la manifestation ou de l'événement sportif. Qui sont alors ces «sociétés sportives » ? Ce sont notamment les clubs professionnels lesquels devront se constituer en société commerciale11 (soumise au Code de commerce) pour la gestion de leurs activités, dès lors qu'ils participent « habituellement à l'organisation de manifestations sportives payantes qui lui procurent des recettes » supérieures à 1.200.000 euros ou s'ils emploient « des sportifs dont le montant total des rémunérations excède » 800.000 euros12. Force est aujourd'hui de constater que seule la Fédération française de football a cédé ses droits d'exploitation audiovisuelle aux sociétés sportives participant aux compétitions organisées par la Ligue de football professionnel, et ce sous la pression des clubs professionnels qui voulaient inscrire la propriété des droits télévisuels à l'actif de leur bilan13. Le législateur a toutefois mis en place un garde-fou : demeurera le principe de la commercialisation centralisée des droits audiovisuels par la Ligue professionnelle14, de façon à ce que la ligue commercialise à titre exclusif les droits d'exploitation audiovisuelle. Dans cette logique, les droits non commercialisés ou inexploités par la ligue pourront l'être par les sociétés sportives.

Le monopole d'exploitation lui-même reste un objet juridique à identifier. Certes, le législateur a légiféré cette propriété sur le droit d'exploitation des manifestations ou compétitions sportives15 au profit de ses organisateurs, mais sans pour autant clairement définir ce droit. Il s'agirait alors à première vue d'un droit de propriété qui prendrait la forme d'un monopole d'exploitation quant à une chose incorporelle (l'organisation de l'événement sportif avec toutes les obligations qui en découlent) et qui aurait pour objectif de protéger l'organisateur, lequel avait procédé à de lourds investissements (d'argent et de temps), afin de lui assurer une rentabilité économique sur son événement. Or, un monopole, de quelque nature qu'il soit, est toujours par nature contraire à la liberté du commerce et aux principes de la concurrence. Il reste à relever un point étonnant : comment le législateur a-t-il pu instituer un monopole sans définir son objet,

10 p. ex : La Fédération française de rugby (FFR) a créé la Ligue nationale de Rugby (LNR) le 24 juillet 1998 lors de l'assemblée générale. Le rôle de la ligue est énoncé à l'article L.132-1 du Code du sport : « les fédérations délégataires peuvent créer une ligue professionnelle pour la représentation, la gestion et la coordination des activités sportives à caractère professionnel des associations qui leur sont affiliées et des sociétés sportives ».

11 Conformément à l'article L.122-2 du Code du sport, la société sportive prend la forme : « 1° Soit d'une société à responsabilité limitée ne comprenant qu'un associé, dénommée entreprise unipersonnelle sportive à responsabilité limitée ; 2° Soit d'une société anonyme à objet sportif ; 3° Soit d'une société anonyme sportive professionnelle ; 4° Soit d'une société à responsabilité limitée ; 5° Soit d'une société anonyme ; 6° Soit d'une société par actions simplifiée. »

12 Article L.122-1 du Code du sport13 Commentaire, Code du sport, Dalloz, 2014, p.24614 Selon les conditions fixées par les articles R.333-2 et R.333-3 du Code du sport15 La compétition sportive s'entend comme l'organisation de plusieurs manifestations sportives.

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voire son périmètre ? En effet, nul périmètre n'a été déterminé par le législateur de façon à ce que la doctrine puisse avoir matière à discuter. Pareil pour les juges qui hésitent d'une part de trop étendre le monopole au-delà des dispositions prévues par le législateur, et d'autre part de ne pas assez protéger les titulaires de ce droit exclusif. Le débat autour du périmètre de ce monopole se partage entre deux conceptions : l'une restrictive, principalement défendue par la doctrine respectant la ratio legis du texte et prévoyant une interprétation raisonnable de l'article L.333-1 du Code du sport sans trop étendre le monopole, et l'autre extensive, naturellement défendue par les organisateurs, où toute création de valeur ayant son fondement dans l'événement sportif, serait incluse dans le monopole. Les juges, eux, ont hésité sur la ligne à suivre de sorte que les jugements et arrêts rendus penchaient parfois vers l'une ou l'autre conception, créant une insécurité juridique pour toutes les parties aux litiges. Récemment les juges ont plutôt opté pour la conception restrictive du monopole d'exploitation16. Néanmoins, le législateur a posé quelques limites légales au monopole, comme par exemple le droit de citation au nom du droit du public à l'information. Toutes les exceptions légales seront analysées ultérieurement. Force est pourtant de constater que le législateur aurait dû rédiger les dispositions relatives à ce droit de propriété sur l'exploitation sans laisser d'ambiguïtés.

À ce jour, il est avéré que le droit d'exploitation en question ne recouvrirait pas seulement les droits de retransmission télévisuelle, mais aussi tous les autres droits audiovisuels17 ou encore récemment le « droit au pari »18. En revanche, concernant les droits radiophoniques, tout opérateur de radiodiffusion est autorisé de réaliser et/ou de diffuser librement et gratuitement un commentaire oral sur une manifestation, sans qu'une éventuelle cession du droit d'exploitation à un service de communication audiovisuel précis, ne puisse leur être opposé.

Le sujet traité ne concerne pas seulement le droit du sport, mais intéresse aussi le droit commun, de façon marginale le droit de la consommation, et surtout le droit de la concurrence et de la propriété intellectuelle. Tel est notamment l'une des conséquences de la rédaction maladroite des articles L.333-1 et suivants du Code du sport, à savoir quant à l'incertitude de la nature du droit d'exploitation et de son périmètre. Un monopole légal doit forcément être bien encadré afin de protéger ceux qui peuvent s'en prévaloir, ou à l'inverse, de préserver suffisamment d'autres libertés comme celle du commerce et de l'industrie, celle de la liberté d'expression, celle du droit du public à l'information pour donner quelques exemples. Au final, le législateur a voulu consacrer ce monopole pour « récompenser les lourds investissements réalisés pour l'organisation de telles manifestations et permettre, à travers une protection juridique efficace, une

16 TGI Paris 9 décembre 2008 ; TGI Paris 30 mars 2010 confirmé par CA Paris 12 décembre 2012 confirmé par Cass. com. 20 mai 2014

17 Comme les « services de communication au public par voie électronique » (loi n°2004-575 du 21 juin 2004) et tous les droits marketing relatifs à la manifestation ou la compétition.

18 Depuis la loi n°2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, est accordé à l'organisateur de compétitions sportives une nouvelle prérogative, dite de « droit au pari », figurant désormais dans le droit d'exploitation. Ainsi, tout opérateur de paris sportifs en ligne doit, après l'agrément de l'ARJEL, encore obtenir l'autorisation de l'organisateur pour pouvoir commercialiser des paris sur leurs manifestations.

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relative rentabilité économique »19. Mais attention : en reprenant la définition du Larousse de la notion de monopole, il s'agit alors d'un « privilège (de droit ou de fait) dont dispose un individu, une entreprise ou un organisme public de fabriquer ou de vendre seul certains biens ou certains services à l'exclusion de tout concurrent »20. En reprenant la citation d'Albert Camus « si l'homme échoue à concilier la justice et la liberté, alors il échoue à tout », le législateur aurait dû être très attentif et notamment plus précis en octroyant ici un monopole d'exploitation, car il lui revient finalement, et c'est son rôle, d'essayer de concilier justice et liberté.

L'article L.333-1 du Code du sport, consacrant le droit exclusif du propriétaire sur l'exploitation de sa manifestation ou compétition sportive, est-il volontairement rédigé d'une façon ambiguë pour offrir au juge une marge d'appréciation et de manoeuvre, ou bien s'agirait-il d'une maladresse de la part du législateur, laquelle appellerait aujourd'hui une nouvelle intervention législative afin de préciser la nature et le périmètre exact de ce monopole octroyé ?

En effet, l'ambiguïté dans la rédaction de cet article est au coeur du présent débat. Les juges ont dû interpréter le texte et l'appliquer à des litiges sans vraiment savoir comment il a été entendu par le législateur. Une récente constance s'est dégagée dans les décisions, mais celle-ci n'était pas toujours évidente. Toutefois, même s'il y a une certaine constance, l'interprétation incertaine crée une véritable insécurité juridique pour toutes les parties concernées. Il paraît intéressant d'analyser d'abord l'introduction par le législateur de ce monopole spécifique, consacré à la suite d'une reconnaissance d'un monopole de fait (Partie 1), pour ensuite s'intéresser aux difficultés d'interprétation de ce monopole d'exploitation ambiguë (Partie 2).

Partie 1 : L'introduction d'un monopole d'exploitation spécifique

Partie 2 : L'appréciation d'un monopole d'exploitation ambiguë

19 P.-D. Cervetti, Le monopole des manifestations sportives est loin d'être absolu, AJIDA, 2011/3, p.3920 http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/monopole/52393

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Partie 1 : L'introduction d'un monopole d'exploitation spécifique__________________________________________________

L'organisation d'un événement sportif est toujours associé à des engagements et investissements importants. Entre autres, la location, voire la construction d'enceintes sportives comme par exemple des stades, l'accueil des sportifs et leur l'hébergement, l'organisation du déroulement de la compétition elle-même, les contrats négociés autour de l'événement, comme par exemple les contrats de sponsoring ou de cession des droits audiovisuels, sont des obligations auxquelles doivent se soumettre les organisateurs d'événements sportifs. Ceux-ci doivent veiller à la bonne organisation de l'événement pour éviter le risque de pertes financières et tirer un bénéfice adéquat afin de pouvoir refinancer les prochaines éditions, de pouvoir rémunérer tous ceux ayant participé à l'organisation et à la réalisation de l'événement, et finalement pour se réumérer eux-mêmes.

C'est la raison pour laquelle les organisateurs d'événements sportifs nationaux et internationaux réclament une protection universelle légale afin de s'assurer au mieux contre tout risque de pertes en termes financiers, mais aussi en termes d'image. Les enjeux financiers sont en effet importants : par exemple l'assemblée générale du 18 décembre 2014 de la LFP a approuvé les comptes pour la saison 2013-2014 en retenant un chiffre d'affaires de 716,3 millions d'euros21. Mais la protection réclamée concerne également l'image de l'organisateur. Il doit être protégé contre toutes formes d'exploitations de son événement qui se feraient sans son autorisation afin d'éviter que le public reçoive le message comme émanant de l'organisateur. Une mauvaise publicité d'un tiers pourrait être fatale pour l'organisateur et son évènement.

En général, les organisateurs d'événements sportifs majeurs ont toujours réussi à obtenir une protection plus ou moins adaptée à leurs besoins, alors que ce ne sont pas tous les pays qui ont mis en place des dispositions de protection spécifique en leur faveur. Ils bénéficient toutefois d'un monopole de fait sur leurs événements qui est reconnu dans la plupart des pays, car il est d'usage de leur laisser une liberté plus importante quant à l'exploitation de leurs événements. En France, le passage d'un monopole de fait à un monopole de droit s'est réalisé au début des années quatre-vingt-dix (Titre 1). Il est toutefois regrettable que le législateur français n'avait pas pris soin de bien définir le monopole d'exploitation concédé, de façon à ce que la jurisprudence et la doctrine doivent aider à identifier ce droit exclusif (Titre 2).

21 http://www.lfp.fr/corporate/article/approbation-des-comptes-de-la-lfp-1.htm

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Titre 1 : Le passage d'un monopole de fait à un monopole de droit

Le fait que les organisateurs d'événements sportifs bénéficient d'un monopole d'exploitation sur leurs événements est admis et accepté par les usages nationaux et internationaux. Sans que ce monopole soit prévu par les législations nationales, il était considéré comme un monopole de fait. Pour les juges français, « cette pratique, devenue une habitude puisqu'exercée de façon constante depuis un certain nombre d'années, constitue un usage créateur d'un droit »22. Après que ce monopole de fait avait été accepté en jurisprudence, le législateur n'a pas manqué à le consacrer législativement (Chapitre 1) tout en prévoyant des limites notamment au nom du droit public à l'information (Chapitre 2).

Chapitre 1 : La consécration législative d'un monopole

Comme le monopole d'exploitation de l'organisateur sportif était un droit exclusif d'exploitation régi par les usages (Section 1), il a fallu un certain temps avant que le législateur intervienne afin de consacrer ce monopole dans la loi française (Section 2).

Section 1 : Un domaine sous la régence des usages

Le monopole d'exploitation était alors pendant longtemps régi par les usages avant de trouver sa place dans la loi française. Il sera désormais intéressant d'analyser de quelle façon les usages avaient déjà consacré un tel monopole au niveau international (§1) et au niveau national (§2).

§ 1 : Les usages consacrant un monopole au niveau international

Au niveau international, il est d'usage et de coutume que l'organisateur d'un événement sportif jouisse d'une exclusivité sur les droits d'exploitation de son événement. Selon un large consensus mondial, il lui est alors attribué un monopole d'exploitation afin d'assurer son déroulement et son financement, mais aussi afin de protéger ses investissements en argent et en temps.

A titre d'exemple, il semble opportun de mentionner le monopole dont dispose la FIFA en ce qui concerne l'exploitation de la Coupe du monde. Alors que la FIFA admet que les fédérations nationales disposent d'un monopole des droits audiovisuels pour les matchs de qualification d'une Coupe du monde, il n'en est pas ainsi concernant la phase finale de cette compétition, à savoir le véritable tournoi final que tout le monde connaît sous la dénomination de « Coupe du monde »23. La FIFA se réserve tous les droits

22 CA Lyon, 1ère ch. civ., sect. B., 26 mars 198723 Depuis la Coupe du monde de 1998 en France, la phase finale se joue par huit poules composées

chacune de quatre équipes dont les deux premières équipes de chaque poule se qualifient pour les

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relatifs à cette phase finale. Pour la Coupe du monde en Allemagne de 2006, il était alors prévu à l'article 41.1 du règlement de la Coupe du monde de FIFA que la « FIFA [était] propriétaire exclusif, à l'exclusion de l'association organisatrice, toute association participante et tierce partie, des droits d'exploitation de tous les droits des médias liés à la compétition finale de la Coupe du monde de la FIFA 2006 sur une base universelle et discrétionnaire »24. Selon certains auteurs, la FIFA se comporterait «comme si elle était à la tête d'un réseau de distribution sélective dont le produit serait le spectacle sportif de la Coupe du monde [pour s'assurer] de l'étanchéité du réseau de diffusion sur support média du spectacle sportif »25.

De plus, l'article 41.1 du règlement susmentionné exige que l'association organisatrice de la Coupe du monde (qui n'est pas la FIFA stricto sensu) et toutes les associations participantes seront dans l'exigence d'empêcher et d'interdire l'utilisation non autorisée des droits des médias par des tiers et de finalement garantir que tous ces droits restent la propriété exclusive et illimitée de la FIFA pour que cette dernière «puisse exploiter les droits des médias sans restriction »26. En d'autres termes, la FIFA impose à l'association organisatrice, mais surtout aux fédérations nationales participantes une soi-disante « obligation de collaboration »27 dans le but de protéger ses droits.

Les règlements FIFA des Coupes du monde de 2010 en Afrique du Sud et de 2014 au Brésil ne différaient pas en leurs substances de celui de 2006. Pour la Coupe du monde de 2010, le règlement prévoyait dans son article 14.1 que la FIFA possédait et gérait tout simplement « tous les droits commerciaux relatifs à la Coupe du Monde »28 et renvoyait à des directives commerciales qui allaient être publiées à une date ultérieure et lesquelles devraient être respectées par toutes les personnes et associations concernées. Quant au règlement de 2014, l'article 15.1 relatif aux droits commerciaux était déjà formulé d'une façon plus explicite et prévoyait que « la FIFA est propriétaire originel, sans restriction de contenu, de temps, de lieu ni de droit, de tous les droits émanant de la Coupe du Monde de la FIFA et de tout autre événement y afférant relevant de son autorité »29. Par la mention « tous les droits », la FIFA entend tout type de droits financiers, de droits d'enregistrement, de reproduction et de diffusion audiovisuels et radiophoniques, de droits multimédias, de droits de marketing et de promotion, et de droits de propriété intellectuelle ainsi que les droits émanant du droit de copyright.

Nul ne peut ignorer que la FIFA s'est construite un monopole d'exploitation sur ses événements aux fins de les protéger au vu de l'importance financière de tels événements. Son monopole autoproclamé jouit néanmoins d'un consensus international,

huitièmes de finales.24 http://fr.fifa.com/mm/document/tournament/competition/fwc06_regulations_fr_1559.pdf 25 D. Poracchia et G. Rabu, Le droit à l'information pendant la Coupe du monde, in M. Maisonneuve

(sous la dir.), Droit et coupe du monde, Economica, 2011, p.12126 V. supra 2427 V. supra 2528 http://fr.fifa.com/mm/document/tournament/competition/56/42/69/fifawcsouthafrica2010inhalt_f.pdf 29 http://fr.fifa.com/mm/document/tournament/competition/01/47/38/17/regulationsfwcbrazil2014_fr.pdf

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car il est d'usage qu'un organisateur sportif protège ses investissements par le biais d'un monopole d'exploitation de son événement, désormais reconnu comme droit de propriété. Dans l'hypothèse où un pays veuille se porter candidat pour organiser une phase finale d'une Coupe du monde sous la direction de la FIFA30, il faut mentionner que le concept de la FIFA est très simple : l'une des conditions d'attribution est que le pays organisateur cède tous les droits d'exploitation de l'événement sportif au bénéfice de la FIFA. Ainsi, l'article 78 des statuts de la FIFA prévoit qu'elle est détentrice de tous les droits qui peuvent naître des compétitions et autres manifestations relevant de sa compétence31. L'article 79.1 de ses statuts paraît également intéressant en ce qu'il prévoit que la FIFA, ses membres et les confédérations ont seuls la possibilité d'autoriser la diffusion de leurs manifestations, « sans restriction pour les considérations de lieu, de contenu, de date, de technique ou de droit »32. Force est de constater que personne, ni même le pays qui organiserait un mondial sur son territoire, pourrait diffuser les matchs sans l'autorisation de la FIFA, étant donné qu'elle seule qui peut l'autoriser sans restriction de droit. Des dispositions légales nationales seraient ainsi écartées afin de permettre à la FIFA de protéger son monopole d'exploitation de la Coupe du monde. En même temps, un pays candidat-organisateur serait dans l'obligation de lui assurer la préservation de ce droit exclusif dès sa candidature à défaut de ne pas être retenu.

Pour ne pas seulement s'en tenir à l'exemple de la FIFA, il est également d'usage pour le Comité International Olympique (ci-après CIO) d'être titulaire d'un monopole d'exploitation sur les Jeux Olympiques qu'il organise. Dans ce sens, l'article 7.2 de la Charte olympique stipule clairement que « les Jeux Olympiques sont la propriété exclusive du CIO qui est titulaire de tous les droits [...] et sans restriction, tous les droits relatifs à leur organisation, exploitation, retransmission, enregistrement, représentation, reproduction, accès et diffusion [...] »33.

À noter qu'au niveau européen, les diffuseurs, membres de l'Union européenne de radio-télévision (UER), sont tenus de respecter l'usage concernant le droit de propriété exclusif des organisateurs sur leurs événements sportifs, suite à sa consécration jurisprudentielle34.

30 Comme c'était le cas par exemple de la Russie pour 2018 et du Qatar pour 202231 L'article 78.1 des statuts de la FIFA (août 2014) : « La FIFA, ses membres et les confédérations sont

les détenteurs originels – sans restriction de contenu, de temps, de lieu et de droit – de tous les droits pouvant naitre des compétitions et autres manifestations relevant de leur domaine de compétence respectif. Font notamment partie de ces droits les droits patrimoniaux en tous genres, les droits d’enregistrement, de reproduction et de diffusion audiovisuels, les droits multimédias, les droits de marketing et de promotion ainsi que les droits sur la propriété intellectuelle tels que les droits sur les signes distinctifs et les droits d’auteur. »

32 L'article 79.1 des statuts de la FIFA (août 2014) : « La FIFA, les membres et les confédérations sont seuls compétents pour autoriser la diffusion des matchs et des manifestations relevant de leur domaine de compétence sur des supports notamment audiovisuels et ce, sans restriction pour des considérations de lieu, de contenu, de date, de technique ou de droit ».

http://fr.fifa.com/mm/document/affederation/generic/02/41/81/55/fifastatuten2014%5ff%5ffrench.pdf33 La Charte Olympique en vigueur au 9 septembre 2013 : http://www.olympic.org/Documents/olympic_charter_fr.pdf34 TPICE, 3ème ch., 12 juin 1997, SA Tiercé Ladbroke c/ Commission, 504/93, Rec., p.923

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Finalement, dans les statuts de la FIFA et dans la Charte Olympique du CIO, il est fait référence à une propriété exclusive détenue par les deux sur leurs événements. Si la propriété exclusive de ces organisateurs a été reconnue au niveau international, car d'usage, il est à présent opportun de s'intéresser à la reconnaissance d'un tel monopole au niveau national.

§ 2 : Les usages consacrant un monopole au niveau national

L'usage décrit précédemment était reconnu au niveau international et les juges français ne sont pas allés à son encontre. Ils se sont prononcés favorablement à la reconnaissance jurisprudentielle de cet usage et ont même validé la qualification de droit de propriété dont dispose les organisateurs d'événements sportifs. L'arrêt précurseur émanait de la Cour d'appel de Lyon en 1987 qui opposait une association de radio locale privée à l'Association Sportive de Saint-Étienne (ci-après ASSE)35. En l'espèce, un match de football de l'ASSE a été diffusé par cette radio sans avoir obtenu l'autorisation du club et sans lui avoir payé des redevances. L'ASSE a saisi le juge des référés pour faire cesser cette pratique illicite et pour demander des dommages et intérêts. Le juge des référés a rendu une ordonnance de référé interdisant à la radio locale de diffuser sauvagement des matchs de l'ASSE. L'affaire avait fini devant les juges de la Cour d'appel de Lyon. Ces juges ont retenu qu' « il est de pratique courante que les organisateurs de spectacles sportifs [...] se réservent le droit d'en monnayer la diffusion par radio ou télévision, notamment de matchs de football ». En outre, ils ont rejeté le moyen de la radio locale au motif que celle-ci ne pouvait sérieusement contester cette pratique étant donné qu'elle avait déjà payé, à plusieurs reprises, des factures à un club en contrepartie du droit de retransmission d'un match.

Selon les juges, cette pratique constituerait ainsi un usage créateur d'un droit qualifié de droit de propriété par la ligue nationale du football et sa transgression, en l'espèce la diffusion d'un match sans l'accord et contre le gré de l'ASSE, représenterait un trouble manifestement illicite36. De plus, cette pratique était largement établie sur le territoire et était devenue une habitude puisque exercée de façon constante depuis plusieurs années. Avec cette résolution de la Cour d'appel de Lyon, le monopole d'exploitation de l'organisateur d'un événement sportif, était désormais admis par la jurisprudence : un monopole de fait trouvait enfin sa reconnaissance jurisprudentielle en France. Des arrêts postérieurs ont confirmé cette nouvelle jurisprudence. Les juges ont par exemple reconnu à la FFF « le pouvoir d'interdire la retransmission télévisée de certaines rencontres de football »37, un pouvoir qui n'était alors pas encore légalement reconnu.

35 CA Lyon, 1ère ch. civ., sect. B, 26 mars 1987, D. 1988, p.558, note J. Anzéma, J. Garagnon et Y. Reinhard

36 N. Mallet-Pujol, La retransmission télévisuelle des événements : entre monopole d'exploitation et pluralisme de l'information, D. 1996, p. 103

37 CA Paris, 1ère ch. conc., 10 février 1992, La Cinq c/ FFF

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L'usage de cette pratique a encore joué un rôle important dans l'adoption d'un Code de bonne conduite en 1992 auquel sont parties l'ensemble des diffuseurs français. Tous ces diffuseurs qui ont adopté le Code de bonne conduite ont reconnu aux organisateurs d'événements sportifs un monopole d'exploitation sur leurs événements, ce qui incluait les droits de retransmission télévisuelle y afférents. De plus, les signataires s'obligeaient à respecter ce Code et ne jamais retransmettre l'événement sans l'autorisation de l'organisateur, hormis dans l'hypothèse des cas prévus par la loi. L'introduction de ce Code de bonne conduite sera alors davantage analysée ultérieurement dans ce travail.

Après que l'usage d'un monopole d'exploitation avait trouvé sa reconnaissance jurisprudentielle au niveau international et national, il est maintenant intéressant de voir quand et comment le monopole de fait a été reconnu par le législateur afin d'être institué comme un véritable monopole de droit.

Section 2 : Un nouveau domaine d'intervention législative

L'institution du monopole de droit s'est faite progressivement avec les premières lois consacrant ce monopole d'exploitation de l'organisateur sportif dans l'ordre juridique national (§1). Le législateur ne cesse d'adapter le monopole aux exigences modernes comme le démontre une loi récente de 2010, consacrant le « le droit au pari » en ligne au profit de l'organisateur sportif (§2).

§ 1 : Les premières lois du monopole d'exploitation

Le monopole de fait des organisateurs d'événements sportifs a été consacré légalement par l'article 18-1, alinéa 1er de la loi du 16 juillet 198438, lequel a été créé par l'article 13 de la loi du 13 juillet 199239. Pour la première fois, le législateur a reconnu que « le droit d'exploitation d'une manifestation sportive ou d'une compétition sportive [appartenait] à l'organisateur de cet événement ». Le législateur a voulu assurer aux organisateurs un retour financier sur l'exploitation commerciale de leurs événements au regard des investissements effectués. Il fallait également assurer que l'exploitation commerciale ne puisse pas se faire sans l'autorisation de l'organisateur, et ce dans l'objectif de protéger « l'éthique des compétitions et de garantir la pérennité des manifestations sportives »40. À noter que l'article 18-1, alinéa 2 de ladite loi prévoyait une limite au droit d'exploitation de l'organisateur. Ce dernier ne pouvait pas imposer aux sportifs qui participaient à l'événement, une obligation pouvant porter atteinte à leur liberté d'expression. Cette limite semblait assez basique dans le sens qu'elle assurait aux participants un minimum de respect d'un de leurs droits fondamentaux. Le détenteur du droit d'exploitation jouissait d'un monopole en ce qui concerne tout le reste pouvant

38 Loi Avice n°84-610 du 16 juillet 198439 Loi Bredin n°92-652 du 13 juillet 199240 http://www.anlsp.fr/article.php?id=7

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faire l'objet d'une commercialisation et étant en lien avec son événement sportif.

Une loi du 6 juillet 200041 est venue modifier l'article 18-1, alinéa 1er, de la loi du 16 juillet 1984. Désormais, il était fait référence à des fédérations ainsi qu'à des organisateurs qui seraient « seuls propriétaires du droit d'exploitation des manifestations ou compétitions sportives qu'ils organisent ». Depuis cette loi, le législateur ne parlait plus de détenteur du droit d'exploitation, mais de propriétaire du droit d'exploitation. Certains auteurs analysent ce droit exclusif comme une sorte de propriété intellectuelle42, alors que d'autres le perçoivent plutôt comme un droit de propriété sur un événement sportif, propriété qui prendrait la forme d'un monopole d'exploitation43. L'identification de la nature de ce droit constituera l'un des problèmes soulevés dans ce travail de recherche mais qui sera traité ultérieurement.

Dans tous les cas, depuis l'intervention de cette loi, il fallait parler de propriétaires d'un droit d'exploitation. La loi du 1er août 200344 a gardé la même formulation de cet alinéa. Ces termes ont également été retenus lors de la codification du Code du sport en 200645. Dans ce sens, le Livre IV du Code du sport réglant l'organisation et l'exploitation des manifestations sportives, prévoit dans son article L.333-1 que « les fédérations sportives, ainsi que les organisateurs de manifestations sportives mentionnés à l'article L.331-5, sont propriétaires du droit d'exploitation des manifestations ou compétitions sportives qu'ils organisent ». Le législateur a maintenu la notion de propriétaire du droit d'exploitation. Cette propriété comprend les droits de retransmission audiovisuelle, mais aussi d'autres droits audiovisuels comme par exemple les « services de communication au public par voie électronique »46. Elle comprend également tous les droits marketing et publicitaires relatifs à l'événement sportif (incluant des photographies et ouvrages), mais aussi tout ce qui concerne la billetterie ou le merchandising. Les droits radiophoniques, faisant initialement partie intégrante de cette propriété, ne se trouvent plus complètement couverts par le monopole depuis une dizaine d'années. L'évolution quant aux droits radiophoniques sera traitée ultérieurement. L'alinéa 2 de l'article L.333-1 prévoit même qu'il est possible, sous certaines conditions, de céder « la propriété de tout ou partie des droits d'exploitation audiovisuelle » des compétitions ou manifestations sportives. Les personnes censées être titulaires de ce droit d'exploitation ont été énumérées dans l'introduction.

La propriété de ce droit d'exploitation, détenue par les organisateurs d'événements sportifs, a dû être adaptée aux exigences modernes, notamment avec le développement de l'internet. Le législateur a pu reconnaître que le monopole de

41 Loi Buffet n°2000-627 du 6 juillet 200042 Ch. Caron, A propos de l'appropriation de l'événement sportif par le droit de la propriété

intellectuelle, CCE n°2, février 2003, comm. 1443 F. Buy, J-M. Marmayou, D. Poracchia et F. Rizzo, Droit du sport, LGDJ, 3ème édition, 2012, p.69544 Loi Lamour n°2003-708 du 1er août 200345 Le Code du sport a été créé par l'ordonnance n°2006-596 du 23 mai 2006 et complété par deux décrets

du 24 juillet 2007 et un arrêté du 28 février 200846 Loi n°2004-575 du 21 juin 2004

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l'organisateur ne se trouvait plus protégé contre toutes les formes d'exploitation de tierces personnes sur le net. C'est la raison pour laquelle il a été obligé d'intervenir.

§ 2 : La récente loi du monopole d'exploitation: le « droit au pari » en ligne

En 2009 en France, il était estimé que 75% des mises sur internet ont été faits sur des sites illégaux47. Le développement d'offres illégales massives sur internet avait autant préoccupé les juges que le législateur. Dans l'affaire Zeturf 48, une société maltaise organisait des paris sportifs en ligne sur des courses de chevaux qui tenaient lieu en France, alors que le Pari Mutuel Urbain (PMU) détenait le monopole étatique sur les paris hippiques ayant lieu sur le territoire français. Le Tribunal de grande instance a ordonné à la société maltaise de mettre fin à ces paris, sous astreinte journalière de 15.000 euros. Suite à un appel formé par la société Zeturf, la Cour d'appel a porté cette astreinte journalière à 50.000 euros49. Cet arrêt a toutefois été cassé par la Cour de cassation au motif que la Cour d'appel n'avait pas vérifié s'il y avait proportionnalité entre d'un côté l'atteinte au principe de la libre prestation des services et de l'autre côté des objectifs poursuivis50. Par cette décision, les juges de la Cour de cassation ont, de façon implicite, mis en cause le monopole étatique dans ce domaine.

Dans une autre affaire opposant la Fédération française de tennis (ci-après FFT) à la société Unibet, cette dernière proposait des paris en ligne sur des matchs du tournoi de Roland-Garros, sans avoir obtenu l'autorisation de la FFT51. Les juges ont condamné la société Unibet à payer des dommages et intérêts à hauteur de 1.200.000 euros, dont 400.000 euros au titre de l'atteinte au droit exclusif d'exploitation dont disposait la FFT en l'occurrence et ce sur le fondement de l'article L.333-1 du Code du sport. Dans cette affaire, les juges ont admis pour la première fois que les organisateurs d'événements sportifs étaient propriétaires du droit d'exploitation des paris sportifs, proposés sur des compétitions qu'ils organisent. Désormais, d'après la jurisprudence, le « droit au pari » était inclus dans la propriété du droit d'exploitation. La société Unibet avait soutenu que les résultats d'une manifestation sportive représentaient des données factuelles insusceptibles de faire l'objet d'une appropriation. Mais la Cour d'appel ne partageait pas ce point de vue et constatait que « l'objet du pari n' [était] pas le résultat connu, mais l'aléa qui n' [existait] que pour autant que la manifestation se [déroulait] actuellement, et qui, par définition, [disparaissait] une fois celle-ci terminée, l'acquisition du résultat tarissant aussitôt le flux économique généré par l'organisation de paris ».

47 Cette estimation a été affirmée dans le projet de loi sur l'ouverture à la concurrence du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne du 5 mars 2009. http://www.economie.gouv.fr/files/files/budget/presse/dossiers_de_presse/090305marche_jeux/presentation_projet_loi.pdf

48 TGI Paris, 8 juillet 2005, n° 05/56360, Zeturf c/ PMU49 CA Paris, 14ème ch., 4 janvier 2006, n°05/15.773, Zeturf c/ PMU50 Cass. com., 10 juillet 2007, n° 06-13.98651 CA Paris, 14 octobre 2009, n° 08/19179, FFT c/ Unibet

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Le 25 mars 2009, un projet de loi a été présenté afin de prévoir la création d'une autorité administrative indépendante, dénommée ARJEL (Autorité de régulation des jeux en ligne), mais aussi de mettre en place un marché attractif et concurrentiel tout en luttant contre le développement des offres illégales sur internet52. Ce texte a été adopté en première lecture au Sénat (24 février 2010) et en seconde lecture par l'Assemblée nationale (30 mars 2010), pour finalement être voté par cette dernière en date du 6 avril 201053. Avant que la nouvelle loi puisse entrer en vigueur, il fallait attendre la décision de la Cour constitutionnelle, alors saisie par des parlementaires socialistes craignant une inconciliation avec la liberté d'entreprendre, la sauvegarde de l'ordre public et la protection de la santé publique. Or, le 12 mai 2010, le Conseil constitutionnel donnait son feu vert, estimant qu'il n'y avait pas, dans le domaine des jeux d'argent et de hasard, de principes fondamentaux reconnus par les lois de la République qui pouvaient s'opposer à l'entrée en vigueur de cette loi54. La loi Lamour relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne55, est alors entrée en vigueur le même jour, soit le 12 mai 2010.

Cette loi a, entre autres, inséré les articles L.333-1-1 à L.333-1-3 dans le Code du sport. L'article L.333-1-1 dispose que « le droit d'exploitation défini au premier alinéa de l'article L.333-1 inclut le droit de consentir à l'organisation de paris sur les manifestations ou compétitions sportives ». Désormais, les paris sportifs sont explicitement inclus dans la sphère du droit d'exploitation de l'organisateur. Pour pouvoir proposer des paris sur des événements sportifs, les sociétés de paris doivent préalablement avoir obtenu l'autorisation de l'organisateur sportif en question. Les autres articles prévoient les modalités de cession contractuelle de ce droit aux opérateurs de paris en ligne agréés, l'interdiction d'attribuer à un seul opérateur le droit exclusif et l'interdiction de discriminer les opérateurs agréés pour une même catégorie de paris. L'ARJEL, après consultation des fédérations sportives, a publié une liste définissant les compétitions et les types de paris sur lesquels les opérateurs agréés ont la possibilité de proposer des paris. De plus, l'ARJEL doit veiller à ce que les opérateurs agréés respectent un cahier des charges précis à défaut de perdre leur agrément. Toutefois, elle doit également contrôler l'activité des opérateurs en ligne afin d'identifier les sites illégaux, voire des comportements fautifs de la part des opérateurs agréés.

Après la reconnaissance par la Cour d'appel et la reconnaissance législative du droit au pari des organisateurs sportifs, ce dernier a finalement été validé par le Conseil d'État dans une décision du 30 mars 201156. Dans cette affaire, la société BetClic, opérateur de jeux et paris en ligne, avait saisi le Conseil d'État afin d'annuler pour excès de pouvoir les dispositions du décret du 7 juin 2010 portant sur les conditions de commercialisation des droits d'exploitation d'un événement sportif des paris en ligne. La société BetClic estimait que ledit décret était contraire à l'article 1er du premier

52 Selon M. J.-F. Lamour, rapporteur du projet, la réforme viserait à mettre en place « une offre légale, attractive, diversifiée et concurrentielle (qui) permettra de lutter efficacement contre l'offre illégale qui aura alors tendance à mécaniquement s'assécher ».

53 La loi a été votée par l'Assemblée nationale par 299 voix contre 223.54 CC, n°2010-605 DC, décision du 12 mai 201055 Loi n°2010-476 du 12 mai 2010, JO, 13 mai 201056 CE, 30 mars 2011, n°342142, société Betclic entreprises limited

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protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme lequel assure la protection du droit au respect des biens. Le Conseil d'État a rejeté ce moyen au motif que « le droit de consentir à l'organisation de paris sur les manifestations [...] sportives, qui s'appuie sur l'aléa qui existe, lors de leur déroulement, sur les résultats qu'elles comportent et constitue ainsi l'une des modalités de leur exploitation commerciale, n'a pas le caractère d'un bien public ». En d'autres termes, le Conseil d'État réaffirme que les paris en ligne font partie intégrante de la propriété du droit d'exploitation dont disposent les organisateurs d'événements sportifs. Ce droit d'exploiter un résultat sportif par le biais de paris en ligne, et ce sans l'accord de l'organisateur, serait contraire à la loi étant donné que ce droit d'exploiter ne serait pas un bien public. Il appartient alors seul à l'organisateur d'une manifestation ou d'une compétition sportive. De plus, la société BetClic avait invoqué la violation de l'article 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) lequel prohibe les restrictions à la libre prestation des services au sein de l'Union européenne. Le Conseil d'État justifie cette restriction par le fait de « prévenir les risques d'atteintes à l'éthique sportive, à la loyauté et à l'intégrité des compétitions ».

Finalement, le Conseil d'État souligne l'importance pour les organisateurs sportifs d'être rémunérés par les opérateurs de paris en ligne en contrepartie de leur autorisation d'effectuer des paris sur leurs compétitions. Ceci permettrait de préserver l'intégrité de l'événement sportif et d'assurer aux organisateurs un retour financier sur les profits générés par les opérateurs de paris. La Commission européenne salue cette vision française. Dans son Livre vert, publié le 24 mars 2011, est indiqué qu'« il existe un large consensus pour considérer que les événements sportifs faisant l'objet de jeux doivent recevoir une juste rémunération en provenance de l'activité de jeu associée »57. L'Autorité de la concurrence, pour sa part, a également affirmé que le prix du droit au pari n'était pas seulement fondé sur les coûts engagés pour détecter et prévenir les fraudes, mais encore et surtout pour assurer une contrepartie financière à l'organisateur de l'événement sportif du fait de consentir à l'organisation de paris sur ses événements58.

Alors même que le législateur a su adapter la législation française aux évolutions modernes en ce qui concerne le droit d'exploitation des organisateurs d'événements sportifs, force est de constater que ce monopole d'exploitation n'est pas sans limites. Heureusement, car un monopole est par principe attentatoire à des libertés, comme par exemple celle évoquée précédemment, à savoir la libre prestation des biens et des services. Mais un monopole évince aussi tous les concurrents quand il s'agit d'exploiter des droits, entre autres commerciaux, étant en lien avec son événement.

57 Livre vert de la Commission européenne du 24 mars 2011 sur les jeux d'argent et de hasard en ligne dans le marché intérieur [COM(2011) 128 final - non publié au Journal officiel] http://europa.eu/legislation_summaries/internal_market/single_market_services/mi0073_fr.htm

58 Avis de l'Autorité de la concurrence n°11-A-02 du 20 janvier 2011 relatif au secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne http://www.autoritedelaconcurrence.fr/pdf/avis/11a02.pdf

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Chapitre 2 : Les exceptions légales au monopole de droit

Lors d'une reconnaissance légale d'un monopole, il est important de prévoir certaines limites à celui-ci. Les limites relatives au monopole d'exploitation de l'organisateur sportif découlent du droit (du public) à l'information. Le législateur a alors dû intervenir pour fixer des limites à ce monopole d'exploitation. Certaines limites ont été reconnues par le législateur suite à une intervention du juge (Section 1) et d'autres ont été révélées par le législateur suite à de diverses circonstances (Section 2).

Section 1 : Les exceptions légales suite à l'intervention du juge

Dans certaines situations, l'intervention des juges a amené le législateur à prendre position lorsqu'il s'agissait de limiter le monopole. C'était notamment le cas pour les droits radiophoniques (§1) et pour le droit d'accès des journalistes aux enceintes sportives (§2).

§ 1 : Les droits radiophoniques

Au début de l'année 2002, une controverse était née autour de la question de savoir si le détenteur du droit d'exploitation était en droit ou non de céder les droits radiophoniques sur son événement, et ce à titre exclusif.

La radio RMC avait acheté, en exclusivité, les droits radiophoniques pour les matchs de la Coupe du monde de football. À la même époque, il y a eu un appel d'offres par la Ligue nationale de football sur la commercialisation des matchs de Ligue 1, Ligue 2 et de la Coupe de la Ligue. Un groupement d'intérêt économique (GIE) «Sport libre », regroupement de plusieurs radios généralistes, a saisi le Conseil d'État en référé afin de suspendre la délibération qui autorisait cet appel d'offres. Pour sa part, le ministre des sports de 200259 contestait également cette pratique, estimant qu'il faudrait faire la distinction entre, d'une part l'image de la manifestation qui ferait partie du droit d'exploitation et qui pourrait alors être commercialisé, et d'autre part l' « oeuvre du journaliste de radio ou de la presse écrite, relevant du domaine exclusif du droit à l'information »60. Or, dans son ordonnance, le Conseil d'État a estimé que l'illégalité de cette pratique n'était pas manifeste en raison de l'ambiguïté de la rédaction de l'article 18-1 de la loi de 1984 (ancien article L.333-1 du Code du sport)61.

Ladite controverse a finalement pris fin avec l'intervention du législateur et la loi Lamour du 1er août 200362 qui a reconnu à tout service de radiodiffusion sonore le droit de réaliser et de diffuser librement et gratuitement un commentaire oral d'une manifestation ou d'une compétition sportive. Ce droit est même garanti alors que l'organisateur a cédé le droit d'exploitation à un service de communication

59 Madame Marie-George Buffet60 Commentaire, Code du sport, Dalloz, 2014, p.24561 CE, ord., 18 mars 2002, n° 244081, GIE « Sport libre »62 V. supra 44

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audiovisuelle. Dès lors, les droits radiophoniques n'entraient plus dans la propriété du droit d'exploitation, mais relevaient du droit à l'information.

Par cette disposition, la France adopte une règlementation différente à celle de ses pays voisins dans lesquels la commercialisation des droits radiophoniques reste autorisée. La Commission européenne ne suit pas non plus la position originale de la France63. Toutefois, il est opportun de préciser que ce droit à l'information se limite strictement à la libre diffusion d'un commentaire oral de la compétition. La diffusion de sons produits à l'occasion de celle-ci n'est pas permise. Cette disposition est aujourd'hui ancrée à l'article L.333-7 du Code du sport.

Il semble que le législateur avait ressenti le besoin de modifier la loi après que le Conseil d'Etat avait révélé l'ambiguïté dans la rédaction de l'article 18-1 de la loi du 16 juillet 1984. Cet appel au législateur ne devrait pas rester le seul. En effet, la jurisprudence a encore une deuxième fois déploré l'ambiguïté des textes.

§ 2 : Le droit d'accès des journalistes aux enceintes sportives

Le principe de la liberté d'accès des journalistes aux enceintes sportives a été reconnu par la Cour de cassation dans une affaire en 1996 opposant la société nationale de télévision France 3 à la Formula One Constructors Association (ci-après FOCA)64. En l'espèce, la FOCA avait cédé les droits d'exploitation des grands prix de Formule 1 à un diffuseur spécifique. Dans cette optique, elle avait refusé l'accès aux enceintes sportives à une équipe de journalistes qui intervenait pour le compte d'un diffuseur non cessionnaire du droit d'exploitation. Les juges ont condamné ce refus comme étant un «trouble manifestement illicite» en vertu du droit du public à l'information et ont retenu qu'une cession du droit d'exploitation à un diffuseur spécifique ne pouvait pas faire obstacle à l'accès aux enceintes sportives d'autres journalistes non cessionnaires de ce droit.

Cette jurisprudence a été largement contestée par beaucoup d'organisateurs d'événements sportifs, notamment par la Fédération française de sport automobile et la FFF, et a même été remise en cause avec l'entrée en vigueur de la loi du 6 mars 1998 relative à la sécurité et à la promotion des activités sportives 65. Le nouvel article L.333-6 du Code du sport (ancien article 18-2 de la loi du 16 juillet 1984) prévoit que « l'accès des journalistes et des personnels des entreprises d'information écrite ou audiovisuelle aux enceintes sportives est libre sous réserve des contraintes directement liées à la sécurité du public et des sportifs, et aux capacités d'accueil ». Le droit d'accès des journalistes aux enceintes sportives doit désormais se concilier avec les obligations de sécurité et les capacités d'accueil, propres à chaque établissement sportif. Chaque

63 Comm. CE., 19 janvier 2005, aff. DG Comp/C-2-37.214 (vente combinée des droits médiatiques sur le championnat allemand de football (Bundesliga)), Communiqué de presse IP/05/62

64 Cass. 1ère civ., 6 février 1996, n°93-17.670, affaire FOCA65 Loi n°98-146 du 6 mars 1998

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fédération sportive doit élaborer un règlement dans lequel il faudra définir les contraintes propres à chaque établissement. Ce règlement devra être approuvé par le ministre chargé des sports après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA)66.

Dans tous les cas, même si les journalistes non cessionnaires du droit d'exploitation étaient autorisés d'accéder aux enceintes sportives, ils n'auraient pas le droit de capter des images de l'événement. Ils ont pourtant le droit de réaliser un commentaire oral sur l'événement et de le diffuser librement et gratuitement, comme vu précédemment concernant les droits radiophoniques.

Force est de constater qu'il existe encore d'autres exceptions légales qui pourraient être opposables aux cessionnaires du droit d'exploitation.

Section 2 : Les autres exceptions légales

Dans d'autres situations, le législateur a encore dû intervenir afin d'instaurer des exceptions légales au monopole d'exploitation. Partant, il a apprécié l'élaboration d'un Code de bonne conduite lequel a été adopté par tous les diffuseurs français afin de garantir le respect du droit de citation (§1). En outre, la transposition d'une directive européenne a fait que les événements sportifs d'importance majeure soient diffusés par un service de télévision à accès libre (§2). Finalement, le législateur a pris soin d'interdire la pratique de « gel des droits » (§3).

§ 1 : Le droit de citation : résultat d'un Code de bonne conduite

Le droit de citation, au profit des services de communication audiovisuelle non cessionnaires du droit d'exploitation, a été admis en France avec l'élaboration d'un Code de bonne conduite67 adopté par tous les diffuseurs français. C'est en s'appuyant sur le mécanisme de la courte citation qu'il est possible pour un non cessionnaire du droit d'exploitation de diffuser (gratuitement) des brefs extraits qu'il peut choisir librement parmi les images du ou des cessionnaires effectifs. Cette disposition est aujourd'hui fixée à l'article L.333-7 du Code du sport et elle prévoit deux limites essentielles : d'abord les brefs extraits doivent être diffusés lors d' « émissions d'information » et ensuite il faut citer sa source, à savoir assurer l'identification, pendant la diffusion, du service cessionnaire qui bénéficie du droit d'exploitation.

66 Par exemple l'avis n°2007-7 du 17 juillet 2007 du CSA sur le projet de règlement relatif aux conditions d'accès aux stades des journalistes pendant la sixième Coupe du monde de rugby ; JORF n°187 du 14 août 2007 page texte n°93

67 Code de bonne conduite du 22 janvier 1992, élaboré par le CSA et adopté par tous les diffuseurs français.

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Une loi du 1er février 2012 visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs68 a modifié l'alinéa 6 de l'article L.333-7 du Code du sport, lequel prévoit depuis 2012 que « le Conseil supérieur de l'audiovisuel fixe les conditions de diffusion des brefs extraits prévus au présent article, après consultation du Comité national olympique et sportif français et des organisateurs de manifestations sportives mentionnés à l'article L.331-5 ». Par une délibération du 15 janvier 201369, le CSA a fixé les conditions de diffusion de brefs extraits. Il semble opportun de citer quelques exemples de ces conditions : ainsi, il faut que la diffusion de brefs extraits intervienne après la fin de la première diffusion de l'information par le détenteur du droit d'exploitation. De plus, il est nécessaire que l'identification du détenteur de ce droit soit affichée durant au moins cinq secondes pendant la diffusion des brefs extraits. Encore faut-il que la diffusion de ceux-ci n'excède pas une minute et trente secondes par heure d'antenne et par journée de compétition. La Cour d'appel de Paris70, confirmée ultérieurement par la Cour de cassation71, a précisé que cette durée d'une minute et trente secondes, déjà prévue par le Code de bonne conduite, s'entendait par journée de compétition et non pour chaque match d'une même journée. De plus, la durée des brefs extraits doit être limitée à maximum trente secondes pour un match spécifique. Finalement, en ce qui concerne les chaînes d'information continue, un passage toutes les quatre heures par période de vingt-quatre heures est autorisé.

L'article R.333-4 du Code du sport a été inséré par un décret du 11 janvier 201172 pour préciser les conditions d'application de l'article L.333-7 du Code du sport. Ainsi, tous les « éditeurs de services de télévision » du territoire de l'Espace Économique Européen (EEE) ont la possibilité de recourir aux courts extraits des événements sportifs « d'un grand intérêt pour le public », alors même qu'un opérateur détient les droits d'exploitation audiovisuelle de manière exclusive.

Le droit de citation et l'article L.333-7 du Code du sport permettent de tempérer l'exclusivité du droit d'exploitation du cessionnaire, et ce au nom du droit du public à l'information, comme c'était déjà le cas pour les droits radiophoniques et le droit d'accès des journalistes aux enceintes sportives. Dans le passé, les juges n'ont jamais hésité à sanctionner des chaînes de télévision qui n'avaient pas respecté les dispositions de ce droit de citation, que ce soit au titre du manquement à l'obligation de citer sa source73 ou alors au titre du dépassement du délai de diffusion de l'extrait74.

68 Loi n°2012-158 du 1er février 2012 visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs69 Délibération du CSA du 15 janvier 2013 relative aux conditions de diffusion de brefs extraits de

compétitions sportives et d'événements autres que sportifs d'un grand intérêt pour le public70 CA Paris, 4ème ch., sect. A, 28 janvier 2004, n°2002/15549, L'Equipe c/ TF171 Cass. com., 8 février 2005, n°04-13.10472 Décret n°2011-47 du 11 janvier 2011 qui transpose la directive 2007/65/CE du 11 décembre 2007 du

Parlement européen et du Conseil, aujourd'hui codifié à l'article 15 de la directive n°2010/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 10 mars 2010 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels.

73 CA Paris, 15 juin 1989, n°89-10.709, Antenne2 c/ TF174 CA Paris, 4e ch., sect. A, 28 janvier 2004, n°2002/15549, L'Equipe c/ TF1 (confirmé par Cass., com.,

8 février 2005, n°04-13.104) et TGI Nanterre, 1ère ch. sect. A, 25 juin 2003, n°01-08.261, LNF c/L'Equipe TV (confirmé par CA Versailles, 1ère ch. sect. 1, 23 septembre 2004, n°03-06.239)

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Encore semble-t-il opportun d'analyser de plus près le cas spécifique des diffusions des événements sportifs d'importance majeure.

§ 2 : Les événements sportifs d'importance majeure : le produit d'une directive européenne

L'événement sportif d'importance majeure représente une autre limite au monopole d'exploitation du ou des cessionnaires de ce droit. Avec la transposition d'une directive européenne75 par la loi du 1er août 200076, il est désormais garanti que les événements d'importance majeure soient diffusés par un service de télévision à accès libre. L'article L.333-9 du Code du sport renvoie aux articles 20-2 et 20-3 de la loi du 30 septembre 1986 (modifiée par la loi du 1er août 2000) qui prévoient les conditions de retransmission de ces événements d'importance majeure. Ces événements ont été listés dans un décret du 22 décembre 200477 et comptent au total vingt et un événements sportifs d''importance majeure. En font par exemple parties les jeux olympiques d'été et d'hiver, les matchs officiels de l'équipe de France de football, le tournoi des Six Nations du rugby, le Tour de France cycliste masculin ou encore les finales des simples messieurs et dames de Roland-Garros. Cette liste a été déclarée conforme au droit communautaire par la Commission européenne78. De plus, le Tribunal de l'Union européenne (TUE) a déclaré que ces listes pouvaient comprendre tous les matchs des phases finales de la Coupe du monde ou du championnat d'Europe (en l'occurrence du football) sans porter atteinte au droit de propriété d'exploitation des fédérations concernées (de la FIFA et de l'UEFA)79.

L'article 1 du décret du 22 décembre 2004 exige que soit assuré la retransmission exclusive de ces événements dans l'objectif qu'une partie importante du public ne soit pas privée de la possibilité de suivre ces événements, et ce, par un service de télévision à accès libre. Ces événements ne peuvent alors pas faire l'objet d'un transfert d'un droit de diffusion exclusif à un service de télévision à péage. L'article 2 de ce décret définit encore ce qu'est un éditeur de services de télévision à accès libre : il s'agit de « tout éditeur d'un service de télévision dont le financement ne fait pas appel à une rémunération de la part des usagers et dont les émissions peuvent être effectivement reçues par au moins 85% des foyers de France métropolitaine ».

Finalement, lorsqu'un titulaire du droit exclusif de retransmission se trouve dans l'impossibilité de diffuser l'événement d'importance majeure, il doit proposer de céder ses droits à des services de télévision à accès libre, et ce, dans un délai raisonnable avant

75 Directive n°89/552/CEE du Conseil du 3 octobre 1989, aujourd'hui reprise par la directive n°2010/13/UE du 10 mars 2010 (V. supra 69)

76 Loi n°2000-719 du 1er août 2000, modifiant l'ancien article 20-2 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

77 Décret n°2004-1392 du 22 décembre 2004 pris pour l'application de l'article 20-2 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

78 Comm. CE, déc. n°2007/480, 25 juin 2007 : JOUE n° L 180, 10 juill. 2007, p.3379 TUE, 17 février 2011, aff. T-385/07, FIFA et UEFA c/ Commission européenne

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que l'événement n'ait lieu. Des conditions pour cet appel de cession des droits figurent à l'article 4 dudit décret. À défaut d'une proposition des autres éditeurs de service de télévision, le titulaire des droits exclusifs peut diffuser l'événement en question sans devoir respecter les conditions de diffusion prévues par le décret. C'était grâce à cette disposition spécifique que France Télévision a pu diffuser le match de la finale de handball masculin en 2010, alors que Canal + était titulaire des droits exclusifs.

Il existe alors une disposition dans la Code du sport qui prévoit que la diffusion d'un événement d'importance majeure doit être garantie dans tous les cas. Dans la même logique il est interdit, pour le titulaire du monopole, de « geler les droits » de diffusion d'un événement sportif.

§ 3 : L'interdiction de « gel des droits »

Le législateur a prévu une dernière disposition dans le Code du sport qui préserve le public d'une pratique dite de « gel des droits » qui consisterait pour un diffuseur, cessionnaire du droit d'exploitation, à ne pas assurer la diffusion en direct d'extraits significatifs de la manifestation ou de la compétition sportive. L'article L.333-8 dudit Code autoriserait dans ces cas qu'un diffuseur non cessionnaire du droit d'exploitation puisse garantir la diffusion de la manifestation ou compétition sportive.

Après avoir vu comment le monopole de fait de l'organisateur sportif a trouvé sa place dans la loi, il est intéressant d'analyser de plus près ce droit exclusif.

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Titre 2 : L'identification du monopole de droit

Le monopole d'exploitation des organisateurs d'événements sportifs est alors consacré à l'article L.333-1 du Code du sport. Depuis 1992 il s'agit désormais d'un monopole de droit. Or, il est redoutable que le législateur n'avait pas pris le soin de définir le monopole d'exploitation et les notions de manifestations ou compétitions sportives. Un auteur estime plus particulièrement qu'il s'agirait, encore aujourd'hui, d'un objet juridique à identifier80. C'est toute la question de la nature du droit exclusif d'exploitation de l'événement sportif (Chapitre 1), qui laisse surgir l'interrogation d'une éventuelle appropriation de l'événement sportif par le droit de la propriété intellectuelle (Chapitre 2).

Chapitre 1 : La question de la nature du droit d'exploitation

La rédaction ambiguë de l'article L.333-1 du Code du sport ne permet pas d'identifier la nature du monopole d'exploitation. Le législateur est resté muet sur ce point. Les juges restent hostiles et la doctrine s'acharne davantage sur cette question en suivant attentivement les décisions des juges. L'absence de définition de la nature et de l'assiette du monopole d'exploitation laisse ouvert plusieurs questions auxquelles il faudra trouver des réponses (Section 1). Afin de mieux pouvoir répondre à celles-ci, il semble opportun de procéder à une comparaison avec le droit brésilien et son droit

d'arène (Section 2).

Section 1 : L'absence de définition de la nature et de l'assiette du monopole d'exploitation

Le législateur a instauré un monopole, mais il n'a pas veillé à définir les termes des articles du Code du sport qui renvoient à celui-ci. Tant la définition du droit d'exploitation, c'est-à-dire de la nature du monopole (§1), que la définition de la manifestation ou compétition sportive, c'est-à-dire de l'objet qui lui sert d'assiette (§2) restent des sujets de débats.

§ 1 : L'absence de définition du droit d'exploitation (la nature)

Le droit d'exploitation de la manifestation ou de la compétition sportive n'a pas été défini par le législateur. C'est la raison pour laquelle la nature de ce droit d'exploitation, qui constitue le monopole de l'organisateur de la manifestation ou de la compétition sportive, reste incertaine. Une partie de la doctrine qualifie ce droit d'exploitation comme étant un droit sui generis, donc un droit de son propre genre, une autre partie de la doctrine considère qu'il s'agit plutôt d'un droit d'auteur ou d'un droit voisin, et une dernière partie l'assimile à une nouvelle catégorie de droit de propriété

80 P.-D. Cervetti, Haro sur le monopole d'exploitation des organisateurs de compétitions sportives, RLDI 2013 91

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incorporelle.

Le problème du défaut de précision renvoyant à la nature du droit d'exploitation laisse encore persister la question de savoir si le monopole d'exploitation est absolu ou alors s'il doit, au contraire, être limité à certains droits d'exploitation précis81. Vu précédemment, la consécration du monopole d'exploitation par le législateur n'a pas été une création originale par ce dernier, mais s'est traduite par une légifération d'une situation de fait relevant d'un usage. Or, alors même que les juges avaient toujours reconnu aux organisateurs sportifs la détention d'un monopole d'exploitation sur leurs événements, ils n'avaient jamais sanctionné une violation de celui-ci sur le fondement de l'article 544 du Code civil lequel consacre le droit de propriété. D'après la jurisprudence, il semble que les juges écartaient dès le début la théorie selon laquelle le monopole d'exploitation de l'organisateur pouvait s'entendre comme véritable droit de propriété en vertu de l'article 544 du Code civil.

La doctrine, incertaine à ce sujet, a remis en cause la nature du monopole d'exploitation. Dans ce sens, Jean-Michel Marmayou, faisant référence à la rédaction maladroite de l'article L.333-1 du Code du sport, a fait renaître le débat quant à la nature du droit d'exploitation, supposant qu'il serait possible d'hésiter entre deux grandes occurrences : il s'agirait d'un simple monopole légal ou d'un véritable droit de propriété82. Dans le premier cas, le droit d'exploitation pourrait représenter soit un droit sui generis, soit un droit voisin du droit d'auteur. Dans l'hypothèse du droit voisin, il s'agirait plutôt d'un monopole ayant pour finalité de protéger un investissement. Dans le deuxième cas, l'auteur estime que droit d'exploitation pourrait entrer dans le champ d'application de l'article 544 du Code civil83 pour être « par principe absolu et par exception limité ». En partant de ces deux points de vues, cet auteur est d'avis que «l'organisateur sportif est bien titulaire d'un monopole mais dans le premier son monopole mérite une interprétation stricte, alors que dans le second ce sont ses limites qui méritent cette stricte interprétation ». Ce débat s'est intensifié avec la formulation de l'article L.333-1 du Code du sport qui parle de « propriétaires du droit d'exploitation des manifestations ou compétitions sportives » ainsi qu'avec les jugements et arrêts dans lesquels les juges n'hésitent pas à parler d'un « droit de propriété »84.

Toutefois, il semble que le législateur n'ait pas voulu penser ce droit comme un véritable droit de propriété (alors même qu'il a rédigé l'article L.333-1 du Code du sport comme si c'était un droit de propriété ; J.-M. Marmayou parle encore d'une «défaillance rédactionnelle»), mais plutôt comme un simple monopole légal. Dans cette optique le législateur a assorti le monopole d'exploitation de limites importantes85, alors que « le

81 P.-D. Cervetti, Le monopole des manifestations sportives est loin d'être absolu, AJIDA 2011/3, p.3982 J.-M. Marmayou, Le droit d'exploitation des organisateurs sportifs : monopole finalisé ou droit

absolu ?, D. 2014, p.142883 L'article 544 du Code civil dispose que « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la

manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ».

84 Par exemple TGI Paris, 30 mars 2010, n°08-07.671 ; CA Paris, 12 décembre 2012, n°10-10.996 ; Cass. com., 20 mai 2014, n°13-12.102

85 Les limites ont été analysées dans la Partie 1, Chapitre 2, Section 1 et 2

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droit de propriété classique confère au propriétaire de la chose les plus larges pouvoirs pour l'exploiter »86. Toutefois, la frontière entre domaine du monopole et ce qui doit en être exclu n'est pas toujours claire. A titre d'exemple il semble opportun d'évoquer l'affaire Andros qui opposait cette dernière à la société Motor Presse France87. En l'espèce, la société Motor Presse France avait assuré la couverture médiatique (sous forme de supplément d'un magazine spécialisé et sous forme de programmes spécialement diffusés) pour le compte de la société Andros et plus précisément pour son événement sportif intitulé « Trophée Andros ». Une fois cet événement clôturé, la société Motor Presse France avait réutilisé les clichés réalisés lors de cet événement pour faire de la publicité pour un autre événement, et ce, après avoir supprimé la marque « Andros », apposée sur les véhicules et sur la combinaison des pilotes. La Cour de cassation a condamné la société Motor Presse France estimant que l'utilisation de ces clichés, même modifiés de sorte à ne plus pouvoir identifier l'événement original, portait atteinte au droit de propriété de l'organisateur sur sa compétition. La modification, puis la diffusion des clichés ne pouvaient se faire sans l'autorisation de l'organisateur, propriétaire du droit d'exploitation de l'événement sportif initial. Dans cette affaire, les juges ont fait preuve d'une vision extensive du monopole d'exploitation que certains auteurs qualifieraient de droit de propriété incorporelle à caractère général88.

D'autres auteurs, constituant la doctrine majoritaire89, mettent néanmoins en cause cette qualification estimant que le régime de cette propriété serait très dérogatoire au droit commun. Pour exemple : comme analysé dans l'introduction de ce travail de recherche, il est possible que la fédération qui organise une compétition sportive cède le droit d'exploitation audiovisuelle aux sociétés sportives qui participent à cette compétition. Force est de constater que la cession de ces droits est originale (par rapport à la notion du droit de propriété du droit commun), car transmis aux sociétés sportives, ils restent néanmoins commercialisés par la ligue professionnelle, créée elle-même par la fédération. De plus, il semble étrange que les produits de cette commercialisation soient répartis entre la fédération, la ligue et les sociétés sportives, alors que ces dernières ont, voire peuvent détenir, la propriété des droits audiovisuels.

En mettant de côté l'analyse du droit voisin du droit d'auteur, car traitée ultérieurement, il semble alors que le droit de propriété sur l'événement sportif, tel qu'il figure à l'article L.333-1 du Code du sport, ne soit ni un droit de propriété tel que prévu par l'article 544 du Code civil, ni un droit sui generis, mais plutôt un tout nouveau droit de propriété pouvant être qualifié d'original. En effet, s'agissant d'une propriété incorporelle sur une manifestation ou une compétition sportive, il faut pouvoir la protéger contre toutes tentatives d'appropriations par des tiers, voire contre une exploitation (commerciale) abusive par des tiers, notamment dans les cas où ceux-ci n'auraient pas obtenu l'autorisation de l'exploiter. Le législateur avait peut être voulu

86 P.-D. Cervetti, Haro sur le monopole d'exploitation des organisateurs de compétitions sportives, RLDI 2013, 91

87 Cass. com., 17 mars 2004, n°02-12.771, affaire Andros c/ Motor Presse France88 www.anlsp.fr 89 F. Buy, J.-M. Marmayou et F. Rizzo, Droit du sport, LGDJ, 3ème éd., 2012 n°1207

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consacrer un nouveau type de propriété en consacrant le monopole dans le Code du sport. Ce Code moderne est censé prévoir des situations nouvelles, jamais réglées auparavant par voie législative, lesquelles peuvent avoir des impacts importants sur les finances des parties concernées ou de façon marginale sur les impôts (par exemple eu égard aux importantes sommes payées pour les droits de retransmission90). Ce droit de propriété original devrait alors être défini et mieux encadré au plus vite par le législateur. La nature du droit d'exploitation de l'organisateur sportif serait à considérer comme une toute nouvelle forme de droit de propriété exclusivement prévue dans le Code du sport.

Mais l'absence de définition de l'objet qui lui sert d'assiette pose également un problème aux juges et aux parties en cause.

§ 2 : L'absence de définition de la manifestation ou de la compétition sportive (l'assiette)

L'incertitude due à l'absence de la qualification de la nature du droit d'exploitation est renforcée par l'absence de définition de la manifestation ou de la compétition sportive, c'est-à-dire de l'objet qui lui sert d'assiette. Il est pourtant nécessaire de pouvoir identifier la manifestation ou la compétition en tant que chose (en l'occurrence appropriable) pour qu'elle puisse faire l'objet d'un droit d'exploitation. C'est ce qui découle notamment de l'article 1129 du Code civil91 qui exige qu'une obligation doive avoir pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce.

Les manifestations et compétitions sportives réunissent des personnes (et/ou du matériel) en un lieu où elles agissent ensembles, pendant une durée déterminée, en respectant les règles du jeu de l'activité sportive en question. Concrètement, en prenant l'exemple de la pratique du football, cette compétition est constituée par l'action de vingt-deux joueurs (hors remplaçants) sur un terrain de football et étant d'une durée déterminée, à savoir quatre-vingt-dix minutes. Il s'agit alors d'une activité sportive pouvant être individualisée et, par conséquent, être qualifiée de chose92. En l'occurrence, il s'agirait d'une chose immatérielle qui devrait pouvoir faire l'objet d'une appropriation eu égard à sa valeur patrimoniale qu'elle peut représenter : celui qui organise l'action sportive doit pouvoir en récolter les fruits. En d'autres termes, l'organisateur devra bénéficier d'un droit de propriété sur l'action sportive, laquelle deviendrait ainsi un bien

90 Ainsi, 748,5 millions d'euros auraient été dépensés par Canal + et BeinSports pour les droits de diffusion de la Ligue 1 de football pour la période de 2016 à 2020. http://www.lesechos.fr/04/04/2014/lesechos.fr/0203422669233_droits-tv-du-football---canal--vainqueur-de-l-appel-d-offres-de-la-ligue.htm

91 Article 1129 du Code civil : « Il faut que l'obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce. La quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu'elle puisse être déterminée.»

92 F. Zénati-Castaing et T. Revet, Les biens, 3ème éd., PUF, 2008

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immatériel93.

Une partie de la doctrine classe les manifestations et compétitions sportives dans la catégorie des biens nouveaux94. Ceux-ci se définiraient par « toutes choses, corporelles et incorporelles, utiles et appropriables, dont la nature intrinsèque ne permet pas qu'on leur applique in extenso l'ensemble des attributs propriétaires posés par l'article 544 du Code civil ». En ce qui concerne la manifestation ou la compétition sportive, celles-ci vont pouvoir acquérir une valeur économique certaine à travers leur diffusion ou retransmission et, par conséquent, faire l'objet d'une exploitation de la part de leur organisateur de façon à devenir un bien appropriable. Pour cette partie de la doctrine, il ne serait « pas possible de nier l'existence d'un véritable droit de propriété finalisé [...] permettant aux organisateurs des compétitions sportives de rentabiliser leur investissement ». L'événement sportif ne pourrait alors acquérir une valeur et intégrer la catégorie des biens (incorporels) que s'il était organisé et susceptible d'être exploité.

Mais étant donné que l'assiette même du droit d'exploitation n'a pas été définie par le législateur, il est parfois possible que les juges se retrouvent dans des situations plus délicates. Ainsi qu'en est-il de la question du traitement des images prises à la pause ou à la fin de l'événement sportif ? D'une part il serait envisageable de considérer que ces moments font partie intégrante de l'événement sportif et tomberaient sous l'égide du droit d'exploitation de l'organisateur, mais d'autre part, et c'est une théorie soutenue par M. Ch. Caron, il serait aussi possible d'exclure de l'événement sportif tout ce qui ne constituerait pas une prestation sportive95. À ce moment-là, les images prises durant les pauses ou à la fin des matchs pourraient être librement captés par tout le monde sans que puisse leur être opposé le droit d'exploitation exclusif de l'organisateur. Une situation similaire avait amené les juges à rappeler que le monopole d'exploitation de l'organisateur s'appliquait à la compétition en tant qu'action sportive96. Ils déduisaient que l'itinéraire du Tour de France faisait partie de l'action sportive et se trouvait donc protégé par le monopole d'exploitation. Or, cette protection ne joue que lorsque la compétition est en cours. Une fois terminée, l'itinéraire n'est plus protégé par le monopole et peut faire l'objet d'une exploitation par n'importe qui, à condition de respecter le droit des marques ou de faire preuve de parasitisme. En effet, les juges ont déduit que l'itinéraire du Tour de France constituerait une information libre au public, une fois le Tour de France terminé.

93 F. Buy, J.-M. Marmayou et F. Rizzo, Droit du sport, LGDJ, 3ème édition, 2012, n°119894 P.-D. Cervetti, Haro sur le monopole d'exploitation des organisateurs de compétitions sportives, RLDI

2013, 91, et dans Le monopole des manifestations sportives est loin d'être absolu, AJIDA, 2011/3, p.39

95 Ch. Caron, A propos de l'appropriation de l'événement sportif par le droit de la propriété intellectuelle, CCE n°2, février 2003, comm. 14

96 TGI Paris, 9 décembre 2008, n°08/00052, affaire Tour de France c/ Eurocycler

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Section 2 : Une possible comparaison avec le droit brésilien et son droit d'arène97

En comparant le monopole d'exploitation de l'organisateur sportif en France avec celui de l'organisateur brésilien dans son pays, il faut admettre que les deux législateurs n'avaient pas le même point de vue. En effet, il sera intéressant d'analyser que le droit d'arène brésilien repose clairement sur les principes du droit d'auteur et des droits voisins, alors que la nature du monopole français reste toujours incertaine. La comparaison de la nature du monopole français et du droit d'arène brésilien sera analysée à travers l'influence du monopole sur les sportifs (§1) et sur les organisateurs d'événements sportifs (§2) .

§ 1 : L'influence du monopole sur les sportifs

Le droit brésilien a créé une disposition nommée droit d'arène, laquelle donne droit à un pourcentage de redevances issues de l'exploitation de l'événement sportif. Les sportifs peuvent bénéficier, en partie, de ce droit. Au Brésil, le législateur est parti du principe que les sportifs (professionnels) qui participent à une manifestation ou compétition sportive doivent être considérés comme des artistes. Partant, il l'a consacré pour la première fois dans la loi sur le droit d'auteur et les droits voisins du 14 décembre 197398. Plus tard, il a institué un véritable droit d'auteur, nommé droit d'arène, au profit des sportifs et des organisateurs. Ce droit d'arène a été « transféré » dans la loi sur le sport du 24 mars 199899, dite loi Pelé.

Le droit d'arène confère ainsi aux sportifs qui participent à une manifestation ou compétition sportive le droit à une participation de 20% (depuis une loi n°12.395 du 16 mars 2011 encore seulement 5%) sur les sommes perçues sur l'exploitation des droits de retransmission par l'organisateur. Cette somme devra être divisée de façon proportionnelle et égale selon la forme prévue par le Conseil national des sports du Brésil. Toutefois, selon la conception française du droit d'auteur et des droits voisins, ce droit d'arène accordé aux sportifs ne peut être considéré comme tel, mais plutôt comme un droit à sa propre image.

Effectivement, il n'y a pas de disposition française comparable au droit d'arène brésilien depuis l'abandon de la réglementation portant sur le droit à l'image collective des sportifs professionnels100. Force est de constater qu'il n'existe plus de droit spécifique au profit des sportifs, qui n'ont d'autre choix que d'accepter que les images les reproduisant à l'occasion de l'événement sportif soient couvertes par le monopole

97 Inspiré par l'intervention de S. Pessina Dassonville à un colloque « Football et Droit », organisé sous la direction de J. Guillaumé et N. Dermit-Richard à la Faculté de droit de Rouen le 12 octobre 2011. Stéphane Pessina Dassonville, Le droit d'arène et autres avatars de la société du divertissement, Football et Droit, Colloque ss. la direction de Johanna Guillaumé et Nadine Dermit-Richard, L.G.D.J., 2012

98 Loi brésilienne n°5.988 du 14 décembre 197399 À l'article 42 de la loi brésilienne n°9.615/98 du 24 mars 1998 (loi Pelé)100 Alors prévue par l'article L.222-2 du Code du sport

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d'exploitation de l'organisateur. En vertu de l'article 9 du Code civil, il leur reste uniquement le droit à l'image classique à invoquer dans l'hypothèse où l'organisateur, un cessionnaire du droit d'exploitation ou un tiers ferait preuve d'une violation de leur droit au respect à la vie privée101.

Serait-il alors envisageable en droit français d'octroyer aux sportifs le statut d'artiste afin de les protéger, et ce à l'aide du droit d'auteur ou des droits voisins ? M. S. Pessina Dassonville répond par la négative : concernant la protection du droit d'auteur, il faudrait démontrer une improvisation artistique de la part du sportif et ce sous forme d'oeuvre chorégraphique. Il serait par exemple peu probable qu'un footballeur fasse preuve d'une improvisation artistique en disputant son match. Pour le cas des droits voisins, il faudrait que le sportif, alors artiste-interprète selon les termes du Code de propriété intellectuelle, exécute une oeuvre de l'esprit. Or, ni la jurisprudence, ni la doctrine n'ont accordé au sportif cette qualité estimant qu'il n'exécute pas une oeuvre de l'esprit.

La question posée précédemment est pourtant légitime. Pourquoi le sportif ne peut-il pas être considéré, voire comparé, à un artiste sachant que, selon différents sports, ce statut serait mérité. Evidemment, cette hypothèse n'est pas crédible pour des footballeurs, rugbymen ou golfeurs. Or, il faudrait le nuancer pour des disciplines comme la danse artistique ou le patinage artistique, qui sont des disciplines invoquant expressément la notion artistique102. Serait-il imaginable que les sportifs de ces disciplines puissent être qualifiés d'artistes ? Le législateur apportera peut-être un jour une réponse à cette question. Les juges sont toutefois hostiles à la reconnaissance de la qualité d'artistes-interprètes comme le démontre l'affaire dite de l'Île de la tentation103. Des participants à une émission de télé-réalité revendiquaient la qualité d'artistes afin de pouvoir bénéficier des avantages propres au Code de la propriété intellectuelle. Or, les juges ont retenu qu'ils n'avaient pas accompli de prestation d'interprétation, leur «participation consistant simplement à exprimer [...] leurs propres sentiments et à s'impliquer dans les relations interpersonnelles générées naturellement par une vie communautaire entre couples et célibataires ».

Si le législateur brésilien n'a laissé aucun doute sur la nature du droit d'arène, spécificité du droit brésilien, il n'en est pas de même en France. En ce qui concerne les sportifs qui participent à l'événement sportif, ils sont considérés comme des artistes au sens de la loi Pelé au Brésil, alors que cela n'est pas possible en France et ne risque pas de devenir le cas dans les années à venir. En effet, le législateur français ne s'est pas prononcé à se sujet et les juges français restent hostiles à la reconnaissance de cette qualité. Comme cela a été analysé, il se trouve que les sportifs français, au cours de la

101 Article 9 Code civil : « Chacun a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée : ces mesures peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées en référé ».

102 A. Lucas et H.-J. Lucas, Traité de la propriété littéraire et artistique, Lexis-Nexis, 3ème éd., 2006, n°995, p.703, note 18 : « une expression artistique peut avoir une dimension sportive, comme le prouve l'exemple de la danse ou le patinage artistique »

103CA Paris, 18e ch., 12 février 2008, n°07-02.721, SAS Glem c/ A. Laize et a.

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compétition sportive, restent protégés par le monopole d'exploitation de l'organisateur sans pouvoir en demander leur « part du gâteau », alors qu'au Brésil, les sportifs ont droit à un pourcentage des sommes recueillies par la commercialisation de ces droits.

Lors d'une première approche, il s'est avéré que le droit d'arène est bénéfique pour les sportifs brésiliens, alors qu'il n'existe pas de disposition similaire en France. Il est désormais temps de comparer le monopole d'exploitation dans ces deux pays et son influence sur les organisateurs, notamment sous une analyse de la nature même de ce monopole.

§ 2 : L'influence du monopole sur les organisateurs d'événements sportifs

Le pendant brésilien de l'article L.333-1 du Code du sport français104 se trouve à l'article 42 de la loi Pelé du 24 mars 1998, récemment modifié par une loi du 16 mars 2011105, lequel prévoit que « le droit d'arène qui appartient aux sociétés sportives, consiste en une prérogative exclusive de négocier, autoriser ou interdire la réception, la fixation, l'émission, la transmission, la retransmission ou la reproduction d'images, par quelque moyen ou processus que ce soit, de spectacles sportifs auxquels elles participent »106. Le législateur brésilien accorde aux sociétés sportives, par exemple aux clubs de football, directement la possibilité de négocier leurs droits d'exploitation liés à l'événement sportif ce qui n'est en revanche pas le cas pour l'hexagone comme expliqué supra. Ils sont dès lors ab initio titulaires du droit d'exploitation, alors qu'en France, ce sont d'abord les fédérations sportives et les ligues professionnelles qui peuvent, de façon secondaire, céder les droits d'exploitation audiovisuelle aux sociétés sportives.

La nature du monopole d'exploitation pose alors débat en France, faute de définition prévue par le législateur. Droit de propriété original, droit sui generis, droit d'auteur ou encore droit voisin du droit d'auteur, la doctrine est en contradiction et ne semble pas trouver de véritable solution à la question de la nature du monopole. Si le droit d'arène brésilien a été construit sur la logique du droit d'auteur et des droits voisins, il semble opportun d'essayer de faire une comparaison avec le monopole d'exploitation français pour déterminer si une telle conception pourrait être plausible.

Les organisateurs des manifestations ou compétitions sportives peuvent être considérés comme des producteurs de spectacles sportifs vu qu'ils organisent et créent finalement l'événement qui va devenir un spectacle sportif pour le public. Est-il alors possible de leur appliquer les dispositions prévues dans le Code de la propriété intellectuelle ? Il serait concevable que l'organisateur sportif soit protégé en tant que

104 Pour rappel : « Les fédérations sportives, aisni que les organisateurs de manifestations sportives mentionnés à l'article L.331-5, sont propriétaires du droit d'exploitation des manifestations ou compétitions sportives qu'ils organisent »

105 Loi brésilienne n°12.395 du 16 mars 2011106 D'après la traduction personnelle de S. Pessina Dassonville

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producteur de phonogrammes107 ou de vidéogrammes108, ou encore en tant qu'entreprise de communication audiovisuelle produisant des programmes audiovisuels109. Partant, lors du déroulement de la manifestation ou de la compétition sportive, sont émis des sons et sont réalisées des images qui sont susceptibles d'être enregistrés et diffusés. L'organisateur serait alors un producteur de phonogrammes ou de vidéogrammes de ces sons et images étant donné qu'il est la raison d'être de ceux-ci. De plus, la reproduction et la mise à disposition du public des phonogrammes, vidéogrammes ou programmes, nécessitent toujours l'autorisation du producteur. Quant au monopole d'exploitation, l'organisateur de l'événement sportif doit également autoriser la cession du droit d'exploitation audiovisuelle avant que le cessionnaire puisse en faire usage et reproduire les sons et images.

Cette comparaison quant à la nature du monopole dans ces deux pays n'est pas sans intérêt. Plusieurs auteurs ont essayé de démontrer qu'il devait y avoir un lien plus ou moins important entre le monopole d'exploitation et la propriété intellectuelle. À défaut de précision de la part du législateur à cet égard, les différentes théories vont persister. La nature du monopole d'exploitation peut alors aussi être rapprochée du droit d'auteur ou d'un droit voisin. Du moins elle doit être prévue afin de protéger un investissement, celui-ci représentant justement une des finalités majeures de la propriété intellectuelle.

Chapitre 2 : La question de l'appropriation de l'événement sportif par le par le droit de la propriété intellectuelle

La nature du droit exclusif reste incertaine. Plusieurs auteurs, dont notamment M. Ch. Caron, ont soulevé la thèse selon laquelle il pourrait s'agir d'un droit d'auteur ou d'un droit voisin, étant donné qu'il y a lieu de protéger un investissement (Section 1). Admettant que l'organisateur sportif devrait être protégé quant à ses investissements, les juges français et européens ont néanmoins décidé de ne pas partager explicitement cette théorie (Section 2).

107 Article L.213-1 Code de la propriété intellectuelle :« Le producteur de phonogrammes est la personne, physique ou morale, qui a l'initiative et la responsabilité de la première fixation d'une séquence de son. L'autorisation du producteur de phonogrammes est requise avant toute reproduction, mise à disposition du public [...] ».

108 Article L.215-1 Code de la propriété intellectuelle : « Le producteur de vidéogrammes est la personne, physique ou morale, qui a l'initiative et la responsabilité de la première fixation d'une séquence d'images sonorisée ou non. L'autorisation du producteur de vidéogrammes est requise avant toute reproduction, mise à disposition du public [...] ».

109 Article L.216-1 du Code de la propriété intellectuelle : « Sont soumises à l'autorisation de l'entreprise de communication audiovisuelle la reproduction de ses programmes, ainsi que leur mise à la disposition du public par vente, louage ou échange, leur télédiffusion et leur communication au public dans un lieu accessible à celui-ci moyennant paiement d'un droit d'entrée. »

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Section 1 : L'admission de protection d'un investissement

Le droit exclusif accordé à l'organisateur d'un événement sportif répondrait à la logique des droits voisins. La protection des investissements devrait se faire au nom de la propriété intellectuelle dans l'objectif de rentabiliser le monopole d'exploitation (§1). Il sera alors opportun d'illustrer l'approche des juges lorsqu'il s'agissait de protéger les investissements des organisateurs sportifs (§2).

§ 1 : La protection d'un investissement au nom de la propriété intellectuelle

Les organisateurs des événements sportifs bénéficient d'un droit subjectif exclusif d'exploitation, lequel serait au fond basé sur la logique de protection accordée aux producteurs de la propriété littéraire et artistique, selon M. Ch. Caron, spécialiste du droit de la propriété intellectuelle. Ce dernier affirme qu'il serait dangereux si les appropriations de l'immatériel pouvaient se développer en dehors du Code de la propriété intellectuelle110. A cet égard, il estime que le droit d'exploitation sur les manifestations ou compétitions sportives doit être rattaché au domaine du droit voisin au sens du Code de la propriété intellectuelle, alors « même s'il n'existe pas de réelle proximité avec le domaine culturel [. Ce] droit répond à la logique qui préside à tous les droits voisins. Il s'agit de protéger des investissements en accordant, afin de les rentabiliser, un monopole »111. M. Ch. Caron n'est sans doute pas le seul à défendre cette théorie. D'autres auteurs112 estiment aussi que la nature du monopole d'exploitation de l'organisateur sportif serait un droit voisin qui ne dirait pas son nom.

L'idée principale probablement voulue par le législateur pourrait alors se traduire par une situation dans laquelle l'organisateur devrait être protégé par un monopole du moment que celui-ci s'investit d'une manière plus importante. Pour faire le lien avec le producteur, tel que prévu dans les droits voisins, il peut y avoir une similitude avec l'organisateur d'un événement sportif. Partant, le producteur est protégé non pas parce qu'il a été à l'origine d'un acte de création, mais plutôt parce qu'il a procédé à un investissement ayant pour finalité d'exploiter la création d'autrui. Cet investissement peut s'exercer avant l'exploitation, par exemple pour encourager l'acte créatif, ou après celle-ci afin de permettre au public d'y avoir accès. Le producteur se retrouve finalement dans une situation protégée à cause de son investissement effectué qui bénéficie finalement à l'intérêt général. Cette situation lui permet de tirer des avantages économiques de la création étant donné qu'il a indirectement participé à son succès.

110 Ch. Caron, Du droit des biens en tant que droit commun de la propriété intellectuelle, JCP G, 2004, I, 162

111 Ch. Caron, Droit d'auteur et droits voisins, Litec, 2ème éd., 2009, n°625112 A. Lucas et H.-J. Lucas, Traité de la propriété littéraire et artistique, Lexis-Nexis, 3ème éd., 2006,

n°993, p.701 ; P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique, PUF, 6ème éd., 2007, n°154, p.189

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En d'autres termes, les droits voisins protègent les investisseurs comme les producteurs de phonogrammes, vidéogrammes et des producteurs de bases de données. Leur objectif est en premier lieu de protéger des investissements. De cette façon il peut y avoir une comparaison avec l'investissement fait par les organisateurs des événements sportifs. Par le biais du monopole d'exploitation, le Code du sport est également censé protéger celui qui a créé et organisé une manifestation ou compétition sportive afin de lui permettre d'en récolter les fruits. Il semble alors opportun d'illustrer cette comparaison à l'aide de quelques exemples tirés de la jurisprudence.

§ 2 : L'illustration jurisprudentielle de protection d'un investissement

Dans plusieurs arrêts, les juges ont fait preuve de volonté à protéger l'investissement effectué par des organisateurs d'événements sportifs et ont adopté une formule laquelle a été reprise dans chacune des affaires qui vont être analysées. En l'occurrence, les juges avaient estimé qu' « en l'absence de toute précision ou distinction prévue par la loi concernant la nature de l'exploitation des manifestations ou compétitions sportives qui est l'objet du droit de propriété reconnu par ces dispositions, toute forme d'activité économique ayant pour finalité de générer un profit et qui n'aurait pas d'existence si la manifestation sportive dont elle est le prétexte ou le support nécessaire n'existait pas, doit être regardée comme une exploitation au sens de ce texte »113.

Dans l'affaire Unibet c/ FFT, analysée supra, les juges avaient considéré que la société Unibet ne pouvait pas proposer, sans l'autorisation de la FFT, des paris en ligne sur des matchs de compétition organisés par cette dernière. La proposition de tels paris constituait une forme d'activité économique pouvant générer des profits pour la société Unibet alors que celle-ci n'aurait pas de raison d'être sans l'existence de l'événement sportif en question. Or, le monopole d'exploitation réserve à l'organisateur seul le droit d'exercer de telles activités économiques pour en tirer tous les fruits de son investissement.

Dans l'affaire FFR c/ VIP Consulting, une société exploitait des images de plusieurs joueurs de l'équipe de France de rugby sur son site internet. Les joueurs y figuraient en tenue de match laquelle présentait les marques « XV de France » et «FFR». Or dans cette affaire, les juges n'ont pas retenu de faute de la part de la société VIP Consulting au motif que la FFR n'était pas en mesure de prouver que, d'une part les images avaient été prises au cours des manifestations organisées par ses soins, et d'autre part que chacun des joueurs avait signé la règle IX de la Charte du sport de haut niveau114. Ici, l'investissement de l'organisateur ne peut être protégé que lorsqu'il pourra

113 CA Paris, 14 octobre 2009, n°08/19179, Unibet c/ FFT ; CA Paris, 16 mars 2011, n°09-22.229, FFR c/ VIP Consulting ; CA Paris, 12 décembre 2012, n°10-10.996, FFR c/ Fiat France et a.

114 En signant la Charte du sport de haut niveau, un sportif professionnel « reconnait et accepte que l'utilisation de son image doit faire l'objet d'une autorisation de la FFR dès lors qu'elle est associée aux signes distinctifs de cette dernière (marques de la FFR, emblèmes du XV de France, maillot de l'équipe de France, etc.) ».

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prouver que l'exploitation, en l'occurrence l'exploitation des images, trouve son origine dans la manifestation sportive même. Dans ce sens, il est en principe admis que la fédération sportive ou l'organisateur sportif dispose d'un droit exclusif sur l'image collective de l'équipe sportive et du monopole d'exploitation qui découle de l'article L.333-1 du Code du sport, encore faut-il que la fédération ou l'organisateur sportif puisse rapporter la preuve que ces images avaient été prises à l'occasion de leur événement sportif115.

Dans l'affaire FFR c/ Fiat France et a., la société automobile Fiat avait fait la promotion d'un de ses modèles de voiture dans un journal de sport en reproduisant le résultat d'un match de rugby qui s'était déroulé la veille. La FFR a attaqué la société Fiat au motif que cette dernière avait fait référence à un résultat sportif d'actualité d'une compétition organisée par la FFR, et qu'elle aurait par ce fait violé l'article L.333-1 du Code du sport et ainsi porté atteinte au monopole d'exploitation de la fédération française de rugby. Les juges de la Cour d'appel ont pourtant estimé, en raison des circonstances de l'espèce, que l'utilisation du résultat sportif sur un support publicitaire n'était pas une atteinte caractérisée au monopole d'exploitation. Il semble opportun de défendre le point de vue que cette publicité ne constituait pas stricto sensu une forme d'activité économique ayant pour finalité de générer un profit et qui ne pouvait pas exister sans l'existence de l'événement sportif. Le résultat était connu par la plupart du public, et surtout cette publicité figurait à la septième page d'un journal sportif, juste après le résumé, les analyses et les commentaires relatifs au match concerné. Même si le monopole doit protéger des investissements, il s'agirait surtout de constater une violation du monopole dans la limite du raisonnable. Dans ce sens, la publicité qui reprenait qu'un résultat connu par un grand public, et ce dans un journal spécialisé en matière sportive, ne devrait pas être protégée par le monopole d'exploitation.

Le raisonnement ne s'arrête pas seulement à la question de la nature du droit d'exploitation, mais également à sa délimitation qui sera traitée dans la deuxième partie de ce travail de recherche. Il est pourtant nécessaire de tempérer la formulation utilisée par les juges quant à la protection des investissements. Il ne faudra pas sanctionner «toute forme d'activité économique ayant pour finalité de générer un profit et qui n'aurait pas d'existence si la manifestation sportive [...] n'existait pas », car cela risquerait de trop étendre la sphère de protection accordée au monopole d'exploitation. À défaut, il serait alors par exemple prohibé d'éditer un livre relatif à un événement sportif116.

Dans cette logique, la théorie sur la nature du monopole d'exploitation et les droits d'auteurs et droits voisins n'a pas été retenue par les juges français et européens.

115 N. Alaphilippe, Droit du sport - Centre de droit et d'économie du sport, Université de Limoges, D. 2012, 704, II, A, 1, c

116 Ch. Caron, À propos de l'appropriation de l'événement sportif par le droit de la propriété intellectuelle, CCE n°2, février 2003, comm. 14

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Section 2 : Le rejet de la théorie du droit d'auteur et des droits voisins

La théorie du droit d'auteur et des droits voisins quant à la nature du monopole a été préventivement rejetée par les juges français (§1) et partiellement rejetée par les juges européens (§2).

§ 1 : Le rejet préventif de cette théorie par les juges français

Deux décisions de justice illustrent très bien la volonté pour les juges de protéger un investissement mais sans vouloir fonder leur décision sur le terrain de la propriété intellectuelle.

Dans la première affaire117, les sociétés Tour de France (ci-après STF) et Amaury Sport Organisation (ASO) reprochaient à la société Gemka Production d'avoir commercialisé des vidéocassettes sur l'événement cycliste du Tour de France, sans avoir obtenu leur autorisation. La STF organise chaque année cet événement sportif et avait cédé à la société ASO le droit exclusif de « produire, éditer, et commercialiser sous forme de vidéocassettes les enregistrements des épreuves de la compétition » de 1993 à 1999. Concernant les autres années, c'était la STF elle-même qui commercialisait ces vidéocassettes. Ils ont fondé leur action en justice sur deux griefs, l'un sur la contrefaçon de marque pour la reproduction non autorisée de la marque « Tour de France » et l'autre sur des actes de concurrence déloyale et de parasitisme.

Le grief de contrefaçon a été écarté au motif que « la protection qui s'attache à la marque ne peut faire obstacle à l'utilisation de l'expression pour désigner, en soi et dans son sens courant, l'événement sportif mondialement connu ». Cette position de la Cour d'appel de Paris est assez étonnante dans le sens où elle ne permet pas au titulaire de la marque de s'opposer à la reproduction non autorisée celle-ci du moment qu'elle est utilisée « en soi et dans son sens courant » et qu'il s'agisse d'un « événement sportif mondialement connu ». Un auteur estime que cette solution présente une exception prétorienne venant limiter le droit de propriété du titulaire sur le signe distinctif dès lors qu'il s'agit d'un événement mondialement connu, notion assez floue et qui dépendra justement de l'appréciation des juges du fond118. Partant, cet auteur dénonce les difficultés pour le droit de la propriété intellectuelle d'organiser l'appropriation des événements, conception qui est refusée en jurisprudence119.

Les juges ont préféré fonder leur décision sur le grief de la concurrence déloyale et de parasitisme. Alors que la société Gemka Production soulignait l'absence d'une situation de concurrence, la Cour d'appel a déclaré qu'une telle situation ne serait pas exigée du moment où le comportement déloyal résulterait d'un comportement

117 CA Paris, 4ème ch., sect. A, 28 mars 2001, Sté Gemka Production SA c/ Sté Tour de France et Sté Amaury Sport Organisation

118 V. supra 116119 Les juges refusaient de protéger le défilé du bicentenaire de la Révolution française par le droit

d'auteur. TGI Paris, 21 février 1990

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parasitaire. Ainsi, cette société aurait dû solliciter l'autorisation de la STF pour commercialiser les vidéocassettes. Ensuite, les juges ont clairement affirmé leur intention de vouloir protéger l'investissement de la STF en retenant qu'elle « détient sur l'épreuve elle-même un droit d'exploitation, en dehors du droit à l'information, qui l'autorise légitimement, en raison de l'importance des investissements réalisés, à recueillir les fruits des efforts qu'elle consacre à cette manifestation » et que ce sont finalement « ces fruits [qui] lui permettent au surplus d'assurer la pérennité de la manifestation ». Cette solution est intéressante dans le sens où elle souligne directement que le fondement du monopole d'exploitation de l'organisateur de l'événement sportif réside dans l'investissement effectué par ce dernier. Pour M. Ch. Caron, il n'existerait plus de doute sur la nature du monopole qui serait d'après lui bien un droit voisin120, étant donné que la protection d'un investissement serait l'une des finalités majeures de la propriété intellectuelle.

La deuxième affaire121 concernait l'Automobile Club de l'Ouest (ci-après ACO) qui avait créé la course automobile nommée Le Mans ou 24 heures du Mans, organisée par l'Association Sportive Automobile de l'Automobile Club de l'Ouest (ci-après ASAACO) et qui détient le monopole d'exploitation de cette manifestation sportive. L'ACO est titulaire des marques « Le Mans », « 24 Heures du Mans » et « 24 Heures ». Or, la société Dragoon Éditions avait commercialisé un ouvrage commercial à l'occasion de cet événement en utilisant des photographies et des textes relatifs à cette course, sans avoir obtenu l'accréditation de l'organisateur. Elle prétendait que le droit d'exploitation de l'organisateur ne recouvrait que les retransmissions télévisuelles et non l'exploitation d'un livre. Or, les juges ont retenu que le livre publié par cette société était « très clairement une tentative d'exploiter commercialement à son profit le succès que connait la manifestation dont il s'agit » et que cette société a par conséquent exploité frauduleusement les droits d'exploitation de l'organisateur par « crainte de refus ou de devoir payer une rémunération ». Finalement les juges l'ont condamné pour parasitisme.

Dans les deux affaires, les juges ont préféré écarter les fondements sur le droit de la propriété intellectuelle au profit de la concurrence déloyale laquelle relève de la responsabilité civile et donc du droit commun. Symboliquement, ces solutions semblent plus neutres plutôt que de fonder leur décision sur le droit de la propriété intellectuelle dans le sens où l'incertitude quant à la nature du monopole d'exploitation les plaçait dans une situation délicate. Par conséquent, dans la première affaire la concurrence déloyale a (heureusement) permis à la STF d'obtenir gain de cause alors qu'elle était titulaire d'une marque protégée et aurait dû être protégée par ce seul fait.

Les juges de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) sont allés dans le même sens, sans pour autant écarter totalement le théorie des droits voisins. Dans tous les cas, la question s'était posée avec l'affaire Murphy.

120 V. supra 116121 T. com. Nanterre, 12 décembre 2002, affaire ACO et ASAACO c/ SARL Dragoon éditions

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§ 2 : Le rejet partiel de cette théorie avec l'arrêt Murphy de la CJUE

L'arrêt Murphy de la CJUE122 relançait en 2011 le débat sur la nature du monopole d'exploitation détenu par l'organisateur d'événements sportifs, en l'occurrence par la Premier League anglaise123. Cette dernière avait cédé les droits exclusifs de retransmission des matchs de football au diffuseur BSkyB. Malgré ce droit d'exploitation exclusif, des pubs anglais diffusaient des matchs de la première ligue anglaise au sein de leur établissement, sans passer par le diffuseur officiel BSkyB, mais par des décodeurs étrangers (notamment grecs) qui étaient moins onéreux que l'abonnement payé auprès du diffuseur officiel124. La Football Association Premier League contestait la diffusion des matchs par un autre diffuseur que le cessionnaire du droit d'exploitation audiovisuelle, entre autres sur le fondement de la violation de son droit d'auteur qu'elle a sur les rencontres organisées par elle. Or, les juges de la CJUE ont clairement exclu la possibilité pour le titulaire du monopole de « faire valoir un droit d'auteur sur les rencontres [...], ces rencontres sportives ne pouvant pas être considérées comme des créations intellectuelles propres à un auteur et, partant, comme des ''oeuvres'' au sens du droit d'auteur de l'Union ».

Si le fondement du droit d'auteur est clairement exclu, la question du fondement sur les droits voisins n'a pas été explicitement traitée mais semble avoir été implicitement rejetée à son tour : « une législation nationale qui interdit d'importer, de vendre ou d'utiliser des cartes de décodeur étrangères est contraire à la libre prestation de services et ne peut être justifiée [...] au regard de l'objectif de protection des droits de la propriété intellectuelle ». Les droits voisins font partie des droits de la propriété intellectuelle qui ne protègent pas « au premier chef des créations intellectuelles, mais des investissements destinés à fabriquer des biens (phonogrammes, vidéogrammes, programmes audiovisuels), permettant, ce faisant, d'exploiter latu sensu des créations intellectuelles »125. Or, selon l'interprétation faite de la présente décision, la CJUE estimerait que le monopole d'exploitation accordé par une législation nationale à un organisateur sportif ne justifierait pas que ce dernier puisse se prévaloir d'un droit d'auteur ou d'un droit voisin pour interdire la diffusion de sa compétition sportive.

Dès lors, la CJUE a pris position dans un communiqué de presse et a expliqué que pouvaient seuls être protégés par le droit d'auteur « la séquence vidéo d'ouverture, l'hymne de la Premier League, les films préenregistrés montrant les moments les plus marquants des rencontres récentes de Premier League, ainsi que certains graphismes»126 qui pouvaient être considérés comme des «oeuvres au sens du droit de l'Union » d'après les termes de la décision. Finalement, l'autorisation, au titre des droits d'auteur, serait alors seulement requise pour la diffusion de la séquence vidéo

122 CJUE, 4 octobre 2011, C-429/08, affaire Premier League c/ Murphy123 L'organisation et la commercialisation des droits de retransmission télévisuelle de la première ligue anglaise de football est assurée par la Football Association Premier League (FAPL).124 A. Astaix, Droits sportifs audiovisuels : la fin de l'exclusivité ?, D. act., 10 octobre 2011125 S. Pessina Dassonville, Le droit d'arène et autres avatars de la société du divertissement, p.178, in

Football et Droit, sous la direction de J. Guillaumé et N. Dermit-Richard, organisé à la Faculté de droit de Rouen le 12 octobre 2011, Fondation Varenne LGDJ, 2012

126 CJUE, Communiqué de presse n°102/11

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d'ouverture ou de l'hymne de la Premier League diffusées avant les matchs. En effet il s'agit là d'une communication au public de la part des pubs qui nécessite obligatoirement l'autorisation du titulaire de l'oeuvre.

41

Conclusion Partie 1_______________________________________________

La mise en place d'un monopole de droit ne semblait être qu'une question de forme, étant donné que les usages en la matière permettaient déjà aux organisateurs d'événements sportifs de bénéficier d'un monopole de fait. Or, c'est justement la forme qui pose problème dans l'interprétation de l'article L.333-1 du Code du sport qui consacre le monopole d'exploitation. Le législateur parle de « propriétaires du droit d'exploitation » et de leur possibilité de céder « la propriété de tout ou partie des droits d'exploitation ».

Serait-il alors possible de considérer qu'il s'agit d'un droit de propriété au sens de l'article 544 du Code civil ? Il est admis de répondre par la négative, considérant que le monopole est assorti de limites importantes alors que le propriétaire d'un droit de propriété classique dispose généralement des plus larges pouvoir pour exploiter son droit. De plus, les juges n'ont jamais sanctionné une atteinte au monopole d'exploitation de l'organisateur sportif en se fondant sur l'article 544 du Code civil.

Serait-il admissible de considérer qu'il s'agit d'un droit d'auteur ou d'un droit voisin ? La théorie du droit d'auteur a été clairement écartée par les juges de la CJUE. La théorie des droits voisins peut être soutenue dans le sens que l'organisateur sportif pourrait être vu comme un producteur du spectacle sportif où sont réalisés des sons et images, susceptibles d'être enregistrés et diffusés. L'exploitation de ces sons et images sont soumis à l'autorisation du producteur, ce qui est également le cas pour l'exploitation des sons et images de l'organisateur sportif. Au final, l'intérêt premier serait de protéger un investissement. Les juges français ont reconnu cet intérêt de protection d'un investissement, mais ont toutefois préféré sanctionner les atteintes au monopole d'exploitation de l'organisateur sportif sur le fondement de la responsabilité délictuelle ou sur l'article L.333-1 du Code du sport, plutôt que d'oser une condamnation pour violation d'un droit de la propriété intellectuelle.

Il est judicieux de prétendre qu'il s'agisse d'un droit de propriété tout nouveau et original. Dans cette optique, il est avéré que ce droit de propriété est spécial dans la mesure où il porte sur une propriété incorporelle qu'est l'événement sportif. Il s'agirait d'un droit de propriété original qui n'est uniquement prévu dans le Code du sport, permettant de protéger l'organisateur sportif et ses investissements, sans devoir recourir aux dispositions du Code civil ou à celles du Code de la propriété intellectuelle.

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Partie 2 : L'appréciation d'un monopole d'exploitation ambiguë_______________________________________________

Le législateur français a consacré un monopole de droit au bénéfice de l'organisateur sportif. Les premiers problèmes d'interprétation de la nature de ce droit exclusif ont alors déjà été analysés supra, mais d'autres questions restent pourtant encore ouvertes.

Le fait de mettre en place un monopole a des conséquences sur les marchés en cause. La liberté du commerce et de l'industrie, le libre jeu de la concurrence et la liberté de la prestation des services peuvent être très atteints par l'institution d'un monopole. Mais un monopole peut également porter atteinte à la liberté d'expression. C'est d'autant plus regrettable que le législateur n'avait pas pris soin de délimiter le périmètre du monopole, ce qui fait apparaître une insécurité juridique à l'égard des parties concernées, soit envers l'organisateur lui-même, mais également envers tous les concurrents et autres parties intéressées.

Le législateur a peut être voulu laisser la liberté aux juges d'interpréter l'article L.333-1 du Code du sport afin d'adapter au mieux leurs décisions aux différents cas d'espèces. Ou bien, il s'agit simplement d'une maladresse de la part du législateur qui manque à ce jour de préciser l'étendue du monopole. La jurisprudence et la doctrine sont en attente d'une précision législative. En effet, la loi du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne est venue ajouter les paris en ligne dans la sphère d'exploitation du monopole de l'organisateur, mais le législateur n'a que fait l'ajouter, sans pour autant prendre position quant aux autres questions qui restent désormais ouvertes. Il sera opportun d'analyser les situations dans lesquelles les juges ont opté pour une interprétation large de l'article L.333-1 du Code du sport, donc bénéfique aux organisateurs. Il ne faudra toutefois pas négliger que les juges ont parfois été hostiles à trop étendre le pouvoir des titulaires du monopole, considérant qu'un monopole porte déjà par principe atteinte à différents principes et libertés. Mais d'un autre côté, il reste important de protéger un organisateur sportif pour ses investissements effectués. C'est alors qu'un phénomène dit de l'« ambush marketing » pose problème à l'égard du titulaire du monopole. Cette stratégie de marketing consiste à occuper tous les espaces commerciaux aux frontières de l'événement sportif sans pour autant être partenaire ou sponsor officiel de l'organisateur.

Le coeur des juges balance alors entre deux conceptions : d'une part ils doivent préserver la protection de l'organisateur sportif, et d'autre part ils doivent rappeler à ces derniers que leur monopole d'exploitation n'est pas absolu et sans limites. En attendant que le législateur prenne position, force est de constater qu'il existe des problèmes liés au défaut de délimitation du périmètre du droit exclusif (Titre 1), créant des problèmes de garantie de sécurité juridique (Titre 2).

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Titre 1 : Le problème du défaut de la délimitation du périmètre

La loi ne définit pas clairement le droit de propriété de l'organisateur sportif ce qui engendre des difficultés quant à son périmètre. Qu'est-ce qui relève de ce droit et qu'est-ce qui en est exclu ? Faudra-t-il considérer que le droit de propriété de l'événement sportif s'étend uniquement aux droits audiovisuels, voire à l'organisation de paris sportifs, ou bien englobe-t-il toutes les activités économiques reposant sur l'événement sportif ? Alors même que la loi apporte quelques précisions, ce sont surtout les juges qui ont, pour le moment, le rôle délicat de délimiter le périmètre. Force est de constater qu'ils interviennent prudemment (Chapitre 1) et parfois de façons divergentes (Chapitre 2).

Chapitre 1 : L'intervention prudente des juges

L'article L.333-1 du Code du sport manque de clarté quant à la délimitation de l'objet du monopole. Les juges (et la doctrine) adoptent deux conceptions d'interprétation de cette disposition. L'une extensive qui consiste à tirer toutes les conséquences légales du terme employé par le législateur lorsqu'il parle d'un droit de propriété, où les seules limites au monopole sont celles découlant du droit public à l'information, à savoir celles prévues aux articles L.333-6 à L.333-9 du Code du sport. L'autre restrictive qui prévoit que le droit de propriété ne couvre que les droits d'exploitation audiovisuelle et l'organisation de paris sportifs en ligne. L'intervention des juges reste prudente dans le sens où ils adoptent une interprétation extensive telle que voulue par les organisateurs sportifs (Section 1), mais ils n'hésitent pas à recourir à la conception restrictive lorsque les organisateurs sportifs tentent d'étendre leur monopole au-delà du nécessaire (Section2).

Section 1 : L'interprétation extensive en relation avec la volonté des organisateurs

L'interprétation extensive est évidemment souhaitée par les organisateurs d'événements sportifs. Elle est notamment adoptée dans un besoin de protection des organisateurs sportifs (§1), ce qui a trouvé sa confirmation avec la loi instituant le droit au pari au profit des organisateurs (§2).

§ 1 : Une interprétation extensive dans le but de protection des organisateurs

La protection des fédérations et organisateurs sportifs semble seulement être efficace du moment qu'ils bénéficient d'un monopole d'exploitation sur tout ce qui relève de leur compétition ou manifestation. En tant que source d'importants revenus, cette exploitation doit se faire de manière exclusive par l'organisateur afin de lui garantir un retour financier au moins égal aux frais dépensés. L'Association Nationale des

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Ligues de Sport Professionnel (ci-après ANLSP)127 estime qu'il faut « reconnaitre clairement aux organisateurs, la propriété de l'ensemble des droits sur les compétitions ou manifestations qu'ils organisent et la possibilité de négocier juridiquement et financièrement auprès des acteurs économiques concernés »128. D'après l'ANLSP, cette reconnaissance serait essentielle pour protéger l'éthique des compétitions et garantir la pérennité des événements sportifs. Mais cette exclusivité permettra également à l'organisateur d'assurer une (bonne) image de sa compétition, laquelle pourrait par exemple être décrédibilisée dès lors qu'il y aurait des soupçons de fraudes aux résultats. Mais l'image peut également pâlir sous l'effet d'autres circonstances. C'est notamment l'image de la FIFA qui souffre ces derniers temps des accusations de manipulation et de corruption. Elle se trouve décrédibilisée par une grande partie de la population depuis qu'elle a désigné la Russie et le Qatar comme pays-hôtes des mondiaux de 2018 respectivement 2022.

En outre, à l'ère de l'internet, les exploitations non autorisées comme l'utilisation du nom d'un événement ou de la diffusion illégale des matchs de sport, mettent en péril l'économie des organisateurs sportifs. D'une manière secondaire, ces avènements mettraient finalement en danger la viabilité des événements sportifs. Dans ce sens, l'ANLSP déclare que « le droit d'exploitation [...] est un outil proportionné à la réalisation de l'objectif d'assurer le financement du sport professionnel et de garantir les conditions d'un déroulement éthique des compétitions sportives par une régulation et un contrôle appropriés ». En ayant une vision extensive des dispositions contenues à l'article L.333-1 du Code du sport, les organisateurs d'événements sportifs souhaiteraient évidemment inclure tous les modes imaginables d'exploitation commerciale de leurs manifestations ou compétitions. Ainsi, l'exclusivité « engloberait toute activité économique pouvant être rattachée à l'événement »129. D'une façon générale, le périmètre devrait s'étendre « à toute création de valeur dont l'un des supports au moins est l'événement sportif »130. Étant donné que ladite disposition est imprécise quant à son périmètre, la jurisprudence opte plutôt pour une conception extensive en vertu du principe ubi lex non distinguit, nec nos distinguere debemus : là où la loi ne distingue pas, il n'y a pas lieu de distinguer.

Dès lors, l'affaire Tour de France c/ Gemka Production131 avait montré que «l'organisateur d'une manifestation sportive détient sur l'épreuve elle-même un droit d'exploitation qui l'autorise légitimement, en raison de l'importance des investissements réalisés, à recueillir les fruits des efforts qu'il consacre à cette manifestation »132. Pour rappel, la société Gemka Production avait commercialisé des vidéocassettes sur l'événement sportif du Tour de France. Elle avait régulièrement acquis les droits sur les

127 L'ANLSP regroupe la Ligue Nationale de Basket (LNB), la Ligue de Football Professionnel (LFP), la Ligue Nationale de Handball (LNH), la Ligue Nationale de Rugby (LNR) et la Ligue Nationale de Volley (LNV).

128 http://www.anlsp.fr/article.php?id=7 129 N. Blanc, Objet du monopole d'exploitation du spectacle sportif, JCP, n°26, 24 juin 2013, doctr. 751130 P.-D. Cervetti, Haro sur le monopole d'exploitation des organisateurs de compétitions sportives,

RLDI 2013, 91131 V. supra 117132 V. supra 116

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images de la société Gaumont et de l'Institut National de l'Audiovisuel (INA). Or, cela ne la privait pas de solliciter l'autorisation de la société Tour de France, étant donné que cette dernière détient le monopole d'exploitation sur son événement sportif et que dès lors, la commercialisation de vidéocassettes lui étant réservée, les sommes ainsi recueillies représentaient les fruits de son investissement. Une vision extensive de la part des juges du monopole d'exploitation a permis à la société Tour de France d'obtenir gain de cause.

Dans une autre affaire, les juges avaient considéré que le droit d'exploitation de la manifestation sportive recouvre l'édition d'un livre consacré à celle-ci (affaire ACO et ASAACO c/ Dragoon éditions133). Cette conception extensive de la part des juges est toutefois critiquable étant donné que l'édition d'un livre consacré à un événement sportif n'est pas une exploitation de la manifestation sportive en tant que telle. Si les images sont couvertes par le monopole, il n'en est pas de même pour le texte écrit par un tiers. C'est uniquement pour la reproduction d'images que l'autorisation de l'organisateur doit être sollicitée et non pas pour un texte qui serait écrit à propos de l'événement. Les juges devraient veiller à ne pas trop étendre le monopole au-delà des frontières de la manifestation sportive elle-même.

Finalement, les juges ont également admis que porterait atteinte au monopole d'exploitation, le fait pour un tiers d'utiliser des clichés pris lors d'une manifestation sportive pour les réutiliser à des fins promotionnelles d'une autre manifestation sportive, après les avoir modifié de façon à ce que la manifestation initiale ne pouvait plus être identifiée (affaire Andros134).

Cette conception extensive a été défendue par les juges dans le domaine des droits des paris en ligne. Ils ont estimé que ce marché représenterait une source essentielle de retombées financières importantes, lié directement aux manifestations et compétitions sportives. La loi du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne est venue souligner cette tendance des juges en admettant que les paris en ligne font partie du monopole d'exploitation.

§ 2 : Une interprétation extensive et sa confirmation par la loi du droit au pari

La question s'est posée aux juges de savoir si la commercialisation des paris en ligne, qui portent sur leurs événements sportifs, constituait une forme d'exploitation couverte par le monopole. Cette question avait été posée pour la première fois dans deux affaires jugées le même jour. Il s'agissait de sites de paris en ligne, qui faisaient référence au déroulement de la compétition du Roland-Garros, mais aussi au calendrier officiel de cette compétition ainsi qu'aux noms des équipes participantes. La Fédération française de Tennis avait alors saisi le Tribunal de grande instance de Paris pour faire

133 V. supra 121134 Cass. com., 17 mars 2004, n°02-12.771, affaire Andros c/ Motor Presse France

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sanctionner cette atteinte à son monopole d'exploitation à l'encontre des sociétés expekt.com135 et Unibet136. Les juges ont estimé que le fait d'organiser des paris sportifs en ligne représentait un acte commercial de la compétition sportive, portant atteinte au monopole de l'organisateur. Seule la société Unibet a fait appel à ce jugement.

En appel, les juges de la Cour d'appel de Paris ont retenu dans l'arrêt rendu le 14 octobre 2009 que « l'organisation de paris sportifs doit être regardée comme une exploitation de la manifestation sportive de nature à porter atteinte au droit d'exploitation reconnu par l'article L.333-1 du Code du sport à la Fédération française de tennis »137. Les paris en ligne constituent alors un acte d'exploitation commerciale qui rentre dans le périmètre du monopole conféré à la FFT. Pour les magistrats parisiens, il semble dès lors que toutes les formes d'activités économiques qui n'existeraient pas sans l'événement sportif sur lequel elles s'appuient, relèveraient du monopole d'exploitation réservé à l'organisateur. Le périmètre du monopole d'exploitation serait ainsi énormément élargi étant donné que le titulaire du monopole pourrait revendiquer tous les flux financiers qui se sont développés en raison de l'existence même de l'événement sportif.

Cette solution et surtout cette conception extensive des juges reste critiquable dans le sens où, selon cette logique, tous les contrats (même ceux auxquels l'organisateur ne serait pas partie) dont la cause résiderait dans l'existence de l'événement sportif devraient être autorisés par l'organisateur moyennant une contrepartie financière. En d'autres termes, Didier Poracchia soulève l'absurdité que pourrait avoir la portée de cette décision : « À suivre la cour de Paris, dès lors qu'un contrat est conclu parce que la manifestation existe, le propriétaire de celle-ci peut prétendre accéder à la richesse créée parce que sans sa compétition le contrat ne se serait pas conclu. C'est donc faire entrer dans le champ d'exclusivité, l'activité contractuelle d'autrui qui a pour seule cause l'existence d'une chose sans que le contrat ne crée une sujétion quelconque entre les protagonistes de l'accord et de la chose »138. En effet, il ne serait pas imaginable que la FIFA interdise à un vendeur de chaussures de football de vendre celles-ci à une personne alors même que ce soit l'événement sportif de la Coupe du monde qui aurait poussé cette personne à en acheter. L'existence de cet événement sportif mondial serait peut être la cause du contrat, mais qui ne fera naître aucun droit sur la chose. Ce contrat ne pourra jamais porter atteinte au monopole d'exploitation de la FIFA.

Toutefois, la loi du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne est partiellement venue consacrer cette jurisprudence et a complété le Code du sport en insérant les articles L.333-1-1 à L.333-1-3. Désormais, le monopole d'exploitation inclut le droit pour l'organisateur de consentir à l'organisation de paris sur ses compétitions ou manifestations sportives. Mais heureusement le législateur n'est pas allé aussi loin que

135 TGI Paris, 30 mai 2008, 3ème ch., sect. 2, n°08/02005, expekt.com c/FFT136 TGI Paris, 30 mai 2008, 3ème ch., sect. 2, n°08/02006, Unibet c/FFT137 CA Paris, 14 octobre 2009, n°08/19179, affaire Unibet c/ FFT138 D. Poracchia, Un an de sport dans le droit de la communication, CCE. n°11, novembre 2010,

chron.10

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les juges de la Cour d'appel et n'a pas retenu l'idée selon laquelle toutes les activités économiques, trouvant leur cause dans l'événement sportif, relèveraient du monopole.

Les juges n'ont pas toujours eu cette conception extensive du monopole d'exploitation. Il y avait des litiges dans lesquels le juges ont raisonnablement dû remettre en place les organisateurs d'événements sportifs, qui essayent parfois d'étendre leur monopole au-delà des limites (incertaines) que leur confère le Code du sport. Mais il sera également opportun d'analyser le fait que, même si les juges ont repris l'attendu de la Cour d'appel dans son arrêt du 14 octobre 2009, ils en ont posé des limites.

Section 2 : L'interprétation restrictive contre les tentatives d'extension du monopole

Les juges adoptent toutefois une interprétation restrictive lorsque les organisateurs sportifs cherchent à surprotéger leur monopole. Il existe alors plusieurs litiges dans lesquels les juges ont plutôt opté pour une conception restrictive (§1) ce qui permet aux juges d'imposer des limites au monopole d'exploitation (§2).

§ 1 : Les affaires à conception restrictive

Dans l'objectif d'illustrer que les juges n'ont pas toujours opté pour une appréciation extensive du droit d'exploitation, il est opportun de mettre en avant deux affaires dans lesquelles ils ont clairement exposé qu'il fallait retenir que le droit d'exploitation, en ce qu'il constitue un monopole, devrait s'apprécier de façon restrictive.

Le Tribunal de grande instance de Paris a ainsi retenu que le monopole d'exploitation de l'organisateur ne concernait l'événement sportif qu'en qualité d'action sportive139. En l'espèce la société Eurocycler proposait des training camps dans le domaine cycliste qui consistaient à commercialiser un séjour sportif en France avec l'objectif de refaire le Tour de France par l'itinéraire utilisé lors de la dernière Grande Boucle. La société Tour de France (STF) estimait que l'itinéraire du Tour de France était protégé par le monopole d'exploitation dont il est titulaire. Néanmoins, les juges ont jugé que « si en vertu de ce droit d'exploitation, l'organisateur du Tour de France peut légitimement recueillir les fruits des efforts, notamment financiers, consacrés à cette manifestation sportive, ce droit, en ce qu'il constitue un monopole, doit s'apprécier de façon restrictive ». Partant, les juges ont retenu que le monopole d'exploitation ne porte pas sur les effets indirects de l'événement, « tels que les retombées touristiques, a fortiori pour une manifestation dont la popularité repose notamment sur son accès libre et gratuit ». Le monopole ne peut pas être étendu à l'itinéraire, car cela « reviendrait à leur accorder un droit sur des effets indirects du Tour de France et non pas sur une exploitation de cette manifestation en tant que telle ». Au final, il faut saluer cette vision des juges de ne pas inclure un itinéraire dans le monopole d'un organisateur, car

139 TGI Paris, 9 décembre 2008, n°08/00052, Tour de France c/ Eurocycler

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comment un organisateur peut-il se prévaloir d'un itinéraire utilisé pour sa course cycliste sur une voie publique qui est ouverte à toute personne ? Force est pourtant de constater que l'itinéraire reste protégé au cours du déroulement du Tour de France, mais une fois celui-ci clôturé, l'itinéraire devient une information de libre parcours et peut être exploité commercialement par des tiers. Avec cette solution, les juges ont rappelé que le monopole ne s'applique qu'à l'événement en tant qu'action sportive.

Le deuxième exemple jurisprudentiel de la conception restrictive est celui de l'affaire FFR c/ VIP Consulting, analysée supra140. Dans cet arrêt, les juges de la Cour d'appel de Paris ont retenu que l'organisateur a, en principe, un droit exclusif sur l'image collective de l'équipe, mais lorsqu'il prétend qu'un tiers a utilisé des images illustrant les sportifs au cours d'une compétition, faudra-t-il encore qu'il prouve que ces images avaient été prises au cours du déroulement de son événement sportif. A défaut, il ne pourra pas prétendre l'illégalité des images en se fondant uniquement sur son monopole d'exploitation. Cette solution semble proportionnée et rappelle que les organisateurs ne peuvent pas invoquer leur monopole pour toute exploitation commerciale d'un tiers. Ils sont toujours dans l'obligation de prouver qu'ils détiennent bien un droit exclusif sur les biens ou le services exploités commercialement par un tiers en démontrant que cette exploitation relève de leur monopole.

Une autre affaire attire l'attention : c'est celle qui oppose la société Fiat et ses concessionnaires à la Fédération française de Rugby (FFR). Les juges ont fait une interprétation restrictive du monopole tout en reprenant la formulation adoptée par la Cour d'appel de Paris dans son arrêt du 14 octobre 2009, qui était de conception extensive.

§ 2 : L'interprétation restrictive comme limite du droit exclusif d'exploitation

L'affaire FFR c/ Fiat France et a.141 était originale dans le sens où se posait pour la première fois la question aux juges de savoir si les résultats d'un match appartenaient ou non à son organisateur. Les juges ont alors une nouvelle fois dû délimiter le périmètre du monopole d'exploitation, après qu'ils y avaient déjà inclus les paris sportifs142.

Force est de constater qu'un lien peut être fait entre les paris sportifs et les résultats sportifs dans le sens où les opérateurs qui proposaient des paris en ligne estimaient que leur activité économique consistait à porter à la connaissance du public la survenance d'un événement sportif et en organisant des paris sur ses résultats. Une partie de la doctrine estimait que « ni la connaissance de la compétition, ni le résultat sportif, ni a fortiori le résultat ayant fait l'objet du pari [...] ne sont couverts par le

140 V. supra 113 : CA Paris, 16 mars 2011, n°09-22.229, FFR c/ VIP Consulting141 TGI Paris, 30 mars 2010, n°08/07671 ; confirmé en appel CA Paris, 12 décembre 2012, n°10/10996,

confirmé par Cass. com., 20 mai 2014, n°13-12.102142 V. supra 137

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monopole d'exploitation reconnu aux organisateurs de la compétition. Ce sont de simples faits de libre parcours et dont l'exploitation est, sauf attitude abusive, libre »143, alors qu'une autre partie de la doctrine considère que les résultats font partie du monopole d'exploitation et nécessitent l'autorisation de l'organisateur étant donné qu'il s'agit d'éléments issus de l'événement, couvert par le monopole144. Le législateur partageait initialement cette dernière théorie. En effet, le projet de loi (relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne) retenait à l'origine que l'article L.333-1-1 du Code du sport devait disposer que « l'utilisation à des fins commerciales, de tout élément caractéristique des manifestations ou compétitions sportives, notamment leur dénomination, leur calendrier, leurs données ou leurs résultats, ne peuvent être effectuée sans le consentement des propriétaires des droits d'exploitation »145. Vu précédemment, le législateur a préféré modifier cet article en ne faisant plus référence au résultat sportif, mais il consacrait encore uniquement un droit au pari146. Cette modification de la part du législateur du projet de loi était la conséquence d'un avis circonstancié de la Commission européenne, craignant une incompatibilité de la disposition nationale avec le droit européen147.

Dans tous les cas, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 14 octobre 2009 a trouvé sa consécration dans la loi du 12 mai 2010, étant donné que les juges avaient eu une conception extensive du monopole, estimant que les opérateurs de paris en ligne devaient nécessairement obtenir l'autorisation de l'organisateur de l'événement sportif. L'affaire FFR c/ Fiat France et a. se distingue toutefois de cette approche. Les juges ont eu une conception restrictive du monopole, alors même qu'ils avaient repris mot pour mot l'attendu de l'arrêt de 2009. Ils ont exclu les résultats sportifs du périmètre du monopole d'exploitation détenu par l'organisateur, estimant que « étendre le monopole des organisateurs aux résultats sportifs reviendrait à leur accorder un droit qui ne leur a pas été explicitement réservé [...] Les organisateurs sportifs de manifestations sportives n'ont donc un monopole sur les droits d'exploitation de celles-ci limités à ceux décrits dans l'article L.333-1 et suivants du Code du sport mais pas sur les résultats sportifs ; ils ne peuvent sous l'empire de ce texte empêcher toute communication qui utiliserait un résultat sportif ou évoquerait une manifestation sportive ». Cette affaire pose une nouvelle limite au monopole d'exploitation et les juges s'éloignent de la conception extensive qu'avait eu la Cour d'appel de Paris dans son arrêt de 2009. Ils estimaient que le monopole ne devait pas prospérer en dehors de la fonction à laquelle il a été assigné.

L'évolution jurisprudentielle démontre parfaitement que l'ambiguïté de la rédaction de l'article L.333-1 du Code du sport posait et pose toujours des problèmes

143 F. Buy, J-M. Marmayou, D. Poracchia, F. Rizzo, Droit du sport, LGDJ, 3ème éd., 2012144 F. Fajgenbaum et T. Lachacinski, RJES, 2008, n°88145 Prévu à l'article 52 du projet de loi.146 Comme il a été exposé, l'article L.333-1-1 du Code du sport, introduit par l'article 63 (ancien article

52) de la loi du 12 mai 2010, dispose uniquement que : « le droit d'exploitation défini au premier alinéa de l'article L.333-1 inclut le droit de consentir à l'organisation de paris sur les manifestations ou compétitions sportives »

147 Avis circonstancié de la Commission européenne, 8 juin 2009, notification 2009/0122/F

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d'interprétation (extensive ou restrictive) aux juges. L'intervention du juge avec la loi du 12 mai 2010 a clarifié un peu le champ de bataille entre les organisateurs sportifs et ceux qui prétendaient pouvoir utiliser des données liées à l'événement, mais il aurait été préférable qu'il pose enfin les limites exactes du monopole pour épargner les juges et les parties de se trouver dans des situations d'incertitude. Il est également possible que le législateur n'avait pas voulu trop étendre le monopole lorsqu'il avait remodifié son projet de loi en ne gardant que le droit au pari au bénéfice des organisateurs.

Les juges optent parfois pour la conception extensive ou restrictive. La tendance jurisprudentielle récente tend plutôt vers la conception restrictive dans l'objectif de ne pas accorder un monopole absolu à l'organisateur sportif. À part ces deux conceptions, il sera également intéressant de voir comment les juges des différentes instances interviennent aux litiges.

Chapitre 2 : L'intervention divergente des juges

L'intervention divergente des juges pourra d'abord être parfaitement illustrée à l'exemple de l'affaire FFR c/ Fiat (Section 1). Il sera ensuite opportun d'analyser pourquoi l'intervention de la responsabilité civile délictuelle peut jouer un rôle intéressant dans ces types de litiges (Section 2).

Section 1 : L'intervention divergente des juges dans l'affaire FFR c/ Fiat

Il a été exposé que les juges ont souvent dû délimiter le périmètre du monopole d'exploitation, faute de précision des dispositions de l'article L.333-1 du Code du sport. L'intervention et l'interprétation des juges ne se sont pas toujours faites de la même façon. L'affaire FFR c/ Fiat illustre bien ce propos. Reprenant la formulation d'un arrêt « que l'on a trop souvent voulu présenter comme un arrêt de principe »148, les juges avaient pourtant dans cette affaire relativisé la portée de cet arrêt et ont admis que le monopole d'exploitation de l'organisateur sportif ne pouvait être sans limites. Étant donné qu'une analyse plus approfondie devra être faite de cette affaire FFR c/ Fiat, il est important de rappeler tous les faits essentiels.

D'un côté, il y a la FFR (Fédération française de rugby) qui encourage et développe la pratique du rugby et qui organise en France les rencontres auxquelles participe l'équipe de France (le XV de France). De l'autre côté il y a la société Fiat qui a fait paraître, par l'intermédiaire de la société de communication Leo Brunett France, une publicité dans un journal sportif (L'équipe) en date du 24 février 2008. Cette publicité avait pour objet de promouvoir son nouveau modèle automobile, la Fiat 500. Ladite

148 L'avocat Maître Etienne Wéry qui représentait l'agence de publicité qui avait réalisé la publicité litigieuse dans l'affaire FFR c/ Fiat, à propos de l'arrêt rendu par la Cour d'appel le 14 octobre 2009 (FFT c/ Unibet) http://www.droit-technologie.org/actuality-1566/evenement-sportif-le-monopole-de-l-organisateur-n-est-pas-absolu.html

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publicité mentionnait en grands caractères noirs d'imprimerie dans un encadré les termes suivants : « France 13 Angelettre 24 » suivie d'une phrase écrite en petits caractères « La Fiat 500 félicite l'Angleterre pour sa victoire et donne rendez-vous à l'équipe de France le 9 mars pour France-Italie » en indiquant finalement en grands caractères noirs d'imprimerie « Italie 500 ».

Après une mise en demeure adressée à la société Fiat le 7 mars 2008, de faire cesser ce type de publicité, la FFR a assigné cette dernière et la société Leo Brunett devant le Tribunal de grande instance de Paris pour violation de son droit d'exploitation en vertu de l'article L.333-1 du Code du sport ainsi que pour agissements parasitaires (ces derniers seront traités dans le détail infra). Elle estimait que cette publicité portait atteinte à son monopole d'exploitation étant donné qu'elle avait été publiée sans son autorisation, ni de contrat de parrainage, tout en faisant usage de son calendrier, ses scores et des noms des équipes participantes (notamment pour les matchs France-Angleterre et France-Italie).

Le Tribunal de grande instance a débouté la FFR de sa demande fondée sur l'atteinte au droit d'exploitation et a déclaré non fondées les demandes sur le parasitisme149. Il a retenu que « si en vertu de ce droit d'exploitation, l'organisateur des matchs du Tournoi des VI Nations peut légitimement recueillir les fruits des efforts, notamment financiers, consacrés à cette manifestation sportive, ce droit, en ce qu'il constitue un monopole, doit s'apprécier de façon restrictive [...] Étendre le monopole des organisateurs aux résultats sportifs reviendrait à leur accorder un droit qui ne leur a pas été explicitement réservé ; or le juge ne peut prétendre que le texte a été rédigé maladroitement pour étendre un monopole qui se heurte par principe à la liberté du commerce et au principe de la concurrence ». En d'autres termes, le tribunal estime que le monopole se limite aux droits d'exploitations prévus à l'article L.333-1 du Code du sport qui n'incluent pas les résultats sportifs. L'organisateur ne pourra alors pas empêcher les communications qui feraient référence à un résultat sportif ou à l'existence d'une manifestation sportive. D'après Jean-Michel Marmayou, le Tribunal de grande instance résonnait plutôt en termes « d'assiette »150.

La FFR avait interjeté appel contre ce jugement. Alors que la Cour d'appel de Paris confirmait le jugement de première instance, elle adoptait pourtant une motivation différente 151, en raisonnant en termes de « périmètre »152. Dans ce sens, la Cour a retenu que « pour être caractérisée, une atteinte à la propriété des droits visés suppose une appropriation ou exploitation d'une compétition ou manifestation sportive ». Or, les juges ont constaté dans ce litige « qu'il n'est dès lors pas établi que l'activité économique des mis en cause puisse être regardée comme la captation injustifiée d'un flux économique résultant d'événements sportifs organisés par la FFR, constitutive d'une exploitation directe illicite, comme non autorisée, de tels événements ». La captation injustifiée d'un flux économique n'était, d'après la Cour, pas avérée de sorte

149 TGI Paris, 30 mars 2010, n°08/07671150 J.-M. Marmayou, Le droit d'exploitation des organisateurs sportifs : monopole finalisé ou droit

absolu ?, D. 2014, p.1428151 CA Paris, 12 décembre 2012, n°10/10996152 V. supra 150

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qu'il n'y avait pas eu d'exploitation directe et illicite de l'événement par la société Fiat. Les juges ont exclu du périmètre du monopole les informations qui constituaient des faits d'actualité. L'atteinte au monopole n'était ainsi pas avérée étant donné que la publicité se bornait seulement « à reproduire un résultat sportif d'actualité, acquis et rendu public en première page du journal d'information sportive, non favorable à l'équipe de France, et à faire état d'une rencontre future, également connue comme déjà annoncée par le journal dans un article d'information ». D'après les juges, l'utilisation du résultat sportif et du calendrier ne pouvait finalement pas être vue comme une captation injustifiée d'un flux économique généré à l'occasion d'événements sportifs organisés par la FFR. L'élément déterminant dépendra ainsi de la caractérisation d'une exploitation directe de l'événement sportif153.

La FFR avait formé un pourvoi en cassation. La formulation de la Cour d'appel a été reprise in extenso par la Cour de cassation154. Les juges de la Cour suprême ont estimé que la publicité de Fiat n'était pas « constitutive d'une exploitation directe » de la compétition sportive. Il semble adéquat de prétendre que l'activité économique de la société Fiat avait pour objet une offre qui se distinguait manifestement de l'activité sportive, alors même que la compétition sportive se trouvait au centre de cette publicité. Dans ce sens, « il n'est pas contestable que la publicité réalisé par Fiat constitue une activité profitable au centre de laquelle se trouve le Tournoi des VI Nations, mais cette communication commerciale a uniquement pour objet de proposer un modèle de voiture, ce qui n'a aucun rapport avec l'activité sportive »155. La solution de la Cour de cassation est défendable, mais peut également créer de nouveaux problèmes d'interprétation. Il faudra alors se poser la question à partir de quel moment une exploitation serait directe ou indirecte pour pouvoir identifier une atteinte au droit d'exploitation. Cette question relèvera de l'interprétation souveraine des juges du fond, mais risque de ne pas être jugée de la même façon devant les différents Cours et Tribunaux. En même temps, comment la Cour aurait-elle jugé si la FFR vendait des véhicules ou si la société Fiat organisait, à côté de son activité de vente de véhicules, encore des compétitions de rugby ?

Souvent, les organisateurs fondent leurs actions en justice non seulement sur le droit d'exploitation qu'ils détiennent de l'article L.333-1 du Code du sport, mais encore sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle de l'article 1382 du Code civil. La doctrine y voit alors une possibilité pour les organisateurs sportifs de reconstruire leur monopole en dépassant la sphère de protection prévue par les dispositions du Code du sport.

153 S. Cherqui, Exploitation des manifestations sportives : limite du monopole, D. 2013, p. 81154 Cass. com., 20 mai 2014, n°13-12.102, FFR c/ Fiat155 V. supra 150

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Section 2 : L'intervention incidente du droit de la responsabilité délictuelle

À côté de leur droit d'exploitation exclusif, les organisateurs et fédérations fondent encore souvent leurs actions en justice sur la responsabilité civile délictuelle, au titre d'une action en concurrence déloyale et de parasitisme. Cette action peut être accompagnée de la demande principale, soit à titre complémentaire (reposant sur des faits distincts de ceux invoqués pour la violation du monopole), soit à titre subsidiaire (reposant sur les mêmes faits mais en cas de doute sur la recevabilité de la demande principale).

M. P.-D. Cervetti redoute que « si cette pratique des plaideurs apparait, à bien des égards, suspecte, la jurisprudence a largement contribué au brouillage des pistes»156. Ainsi, les affaires Gemka Production c/ Tour de France 157 et Asaaco c/ Dragoon éditions158, analysées supra, avaient démontré que le périmètre du monopole d'exploitation prévu à l'article L.333-1 du Code du sport, semblait s'étendre au-delà des dispositions prévues par cet article du moment où le fondement sur l'article 1382 du Code civil rendait possible, au bénéfice de l'organisateur, de couvrir tous les droits attachés à la commercialisation de l'événement sportif.

Force est toutefois de constater que la tendance jurisprudentielle va plutôt dans le sens opposé. Les juges sont très attentifs lorsqu'il s'agit de trancher sur la concurrence déloyale et le parasitisme, afin d'éviter des reconstructions (du périmètre) du monopole par des mécanismes de la responsabilité délictuelle. Dans cette optique, les juges ont récemment rejeté plusieurs actions fondées sur le parasitisme159. Quant à l'affaire FFR c/ VIP Consulting, où il s'agissait pour la société VIP Consulting de mettre en relation des rugbymen professionnels avec des clients, les juges ont considéré que « le partenariat recherché ne [profitait] pas directement à la société VIP Consulting, mais d'abord à ses clients de part et d'autre ; qu'elle ne peut être regardée comme un acte de parasitisme commis au détriment de la FFR ». D'une part il est critiquable que les juges n'aient pas pris en considération le fait que la société VIP Consulting promouvait son image en se référant à la notoriété des rugbymen et indirectement à celle de la FFR, mais d'un autre côté il faut féliciter les juges qui ont limité le monopole en concluant que la FFR ne pouvait pas rapporter de preuves suffisantes que la société VIP Consulting bénéficiait des flux économiques générés à l'occasion d'événements sportifs organisés par la FFR, faute d'exploitation directe et illicite.

Quant à l'affaire FFR c/ Fiat, les juges ont souverainement constaté l'absence de risque de confusion dans l'esprit du public en ce qui concernait la qualité de la société Fiat. La FFR l'avait accusé de parasitisme estimant qu'elle se vantait comme partenaire officiel de l'événement, alors que ce n'était nullement le cas. Or, les juges ont retenu que la publicité « ne [comportait] aucune mention ou indication pouvant laisser croire que

156 P.-D. Cervetti, Le monopole des manifestations sportives est loin d'être absolu, AJIDA, 2011/3157 CA Paris, 4e ch., sect. A, 28 mars 2001, Sté Gemka Production SA c/ Sté Tour de France et Sté

Amaury Sport Organisation158 T. com. Nanterre, 12 décembre 2002, affaire ACO et ASAACO c/ SARL Dragoon éditions159 CA Paris, 16 mars 2011, n°09-22.229, FFR c/ VIP Consulting ; CA Paris, 12 décembre 2012,

n°10/10996, confirmé par Cass. com., 20 mai 2014, n°13-12.102 affaire FFR c/ Fiat

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[la société Fiat exercerait son] activité dans le cadre d'un rapport juridique quelconque avec la FFR ». De plus, les juges ont pris en considération la capacité de lecteurs de ce journal spécialisé et ont déduit que « les lecteurs, même moyennement attentifs, du journal » n'avaient pas pu être induit en erreur sur la qualité de la société Fiat, « étant ajouté que s'agissant d'un journal spécialisé en matière de sport, ses lecteurs sont par ailleurs plus avertis dans ce domaine et habitués aux encarts publicitaires de parrains officiels, se présentant clairement, et habituellement, par une appellation incluant le terme officiel, comme partenaire (ou parrain, sponsor ou fournisseur) du XV de France».

Pour reprendre les termes de Maître Étienne Wéry qui représentait l'agence de publicité dans le litige FFR c/ Fiat, à propos de l'évolution du parasitisme : « Pour le dire familièrement, la concurrence déloyale et le parasitisme sont un peu la tarte à la crème des litiges commerciaux : il est toujours bon d'en mettre une dose et, même quand on n'a pas grand-chose dans son dossier, on a une chance de l'emporter en créant un climat sur le thème [...] Parfois, ça marche et le juge entre en voie de condamnation »160.

Cette tendance de la jurisprudence peut être félicitée dans le sens où les titulaires du monopole ne devraient pas abuser de leur positionnement face aux concurrents, voire aux sportifs. Les juges ont raison de ne pas étendre le périmètre du monopole d'exploitation au-delà des dispositions prévues dans le Code du sport, alors même que ce périmètre représente encore aujourd'hui un objet juridique à délimiter. Il appartiendra alors à la sagesse des juges de faire une interprétation proportionnée et raisonnable des limites du monopole, sans pour autant trop désavantager les organisateurs sportifs, car il est aussi bien vrai que leurs investissements devront être protégés afin d'assurer la pérennité de l'événement même.

160 http://www.droit-technologie.org/actuality-1566/evenement-sportif-le-monopole-de-l-organisateur-n- est-pas-absolu.html

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Titre 2 : Le problème du défaut de garantie de la sécurité juridique

D'après de ce qui a été analysé supra, il est compréhensible que le législateur ait consacré un monopole de droit au profit des organisateurs d'événements sportifs. Ce qui est alors moins compréhensible est le fait que le législateur n'avait pas pris soin de bien définir la nature du droit de propriété dont disposent organisateurs sportifs et de ne pas délimiter correctement le périmètre de ce droit. Cette absence de clarté se traduit par un manque de sécurité juridique pour tous les organisateurs sportifs et les éventuels mis en cause, et ce dans un domaine qui est particulièrement susceptible d'intéresser le commerce et la concurrence. De plus, l'organisation d'un événement sportif peut, dans tous les cas, engendrer des flux financiers importants. Il est d'autant plus critiquable que le législateur n'ait pas mieux encadré ce monopole de droit. Le monopole d'exploitation risque davantage être la source de diverses d'atteintes (Chapitre 1). Dans ce sens, il sera également intéressant d'étudier l'atteinte que peut porter la stratégie de l'« ambush marketing » au monopole d'exploitation (Chapitre 2).

Chapitre 1 : Le monopole d'exploitation comme source d'atteintes

Le monopole d'exploitation constitue indéniablement la source de diverses atteintes. C'est la raison pour laquelle il faudra analyser la protection de différents intérêts face au monopole (Section 1). De même, force est de constater que le marché des droits de retransmission des événements sportifs, tombant sous la protection du monopole d'exploitation, constitue un marché particulièrement exposé aux règles du droit de la concurrence (Section 2).

Section 1 : Le problème de protection des différents intérêts

La question de la protection des différents intérêts face au monopole fait l'objet d'une interrogation délicate dans le sens où il faudra évaluer les différents intérêts en cause. Ainsi, il sera demandé aux juges de déterminer le juste milieu entre la protection de l'organisateur sportif et la préservation de la liberté du commerce et de la libre concurrence (§1). Cette question intéressera aussi la position du consommateur face au monopole (§2).

§ 1 : La question de la frontière entre la protection de l'organisateur et la préservation de la liberté du commerce et de l'industrie et de la concurrence

Dans le cadre de litiges dans lesquels au moins un plaideur était titulaire du monopole d'exploitation, les juges ont souvent rappelé, lorsque la question concernait le périmètre du monopole, que « le juge ne peut prétendre que le texte a été rédigé maladroitement pour étendre un monopole qui se heurte par principe à la liberté du commerce et au principe de la concurrence ». Évidemment, un monopole est par principe contraire aux valeurs qui se détachent du principe de la liberté du commerce et de l'industrie et du principe de la concurrence. Vu dans l'introduction, le monopole se

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définit par le « privilège (de droit ou de fait) dont dispose un individu, une entreprise ou un organisme public de fabriquer ou de vendre seul certains biens ou certains services à l'exclusion de tout concurrent ». En effet, en présence d'un monopole tous les concurrents sont évincés du marché. Il n'y a plus de situation de concurrence, sauf dans certains cas particuliers comme par exemple pour la retransmission des événements d'importance majeure. Au moment où le cessionnaire du droit d'exploitation ne pourrait pas assurer la retransmission de cet événement, il devra faire un appel d'offre en respectant des modalités de publicité spécifiques permettant aux éditeurs (concurrents) d'acquérir les droits de retransmission dans l'objectif de diffusion de l'événement sportif d'importance majeure. Mais ces situations sont assez rares.

Dans le secteur des paris sportifs (en ligne), les opérateurs proposant de tels services ont considéré que le monopole d'exploitation serait contraire au principe de la liberté du commerce et de l'industrie, mais également contraire au principe communautaire de la libre prestation de service. La Cour de justice de la Communauté européenne (CJCE) avait exposé que les offres de jeux d'argent161 et de paris sportifs162 étaient des prestations de service au sens de l'article 49 du Traité instituant la Communauté européenne (TCE). Pour sa part, le Tribunal de grande instance de Paris a rappelé « qu’il est constant que des restrictions [à la libre prestation des services à l’intérieur de la Communauté] peuvent être admises si elles sont justifiées par des raisons impérieuses d’intérêt général et propres à garantir la réalisation de l’objectif qu’elles poursuivent, et si elles ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif lesdites restrictions devant en tout état de cause être appliquées de manière non discriminatoire entre les ressortissants des états membres »163. En l'espèce, la société Unibet avait estimait qu'elle était en droit d'organiser librement son activité de paris en ligne en vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie. Or, le tribunal a retenu qu'elle n'était pas en mesure de démontrer en quoi le monopole constituait une « restriction injustifiée, inadaptée, disproportionnée et discriminatoire » au principe de la libre prestation de services164.

La prise de position de M. T. Verbiest s'avère intéressante dans le sens où il s'exprime à propos du monopole face au principe de la liberté du commerce et de l'industrie et du principe de libre prestation de service : « Au-delà de la justification de la mesure en cause, un doute subsiste tout de même s’agissant de la nécessité et la proportionnalité d’un tel droit surtout lorsque domine le souhait de lui donner un champ d’application très vaste »165. Il est vrai, que le législateur166 et les juges167 souhaitaient lui donner un champ d'application assez vaste en 2009, date à laquelle a été

161 CJCE, 24 mars 1994, aff. C-275/92, Schindler162 CJCE, 21 octobre 1999, aff. C-67/98, Zenatti163 CA Paris, 14 octobre 2009, n°08-19.179, FFT c/ Unibet164 J.-B. Auroux, Monopole de l'organisateur de manifestations sportives sur les paris en ligne, RLDI,

2008, n°39 165 T. Verbiest, La FFT remporte aisément le second set dans le match qui l'oppose à Unibet, RLDI,

2009, n°55166 Avec le projet de loi sur l'ouverture à la concurrence du secteur des jeux d'argent et de hasard en

ligne du 5 mars 2009167 Entre autres et surtout dans l'affaire CA Paris, 14 octobre 2009, n°08-19.179, affaire Unibet c/ FFT

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publié l'article de M. T. Verbiest. Ce souhait a toutefois été relativisé et il semble que la jurisprudence tente désormais de limiter de plus en plus le monopole au profit de la concurrence et de la liberté du commerce et de l'industrie.

§ 2 : La question de la protection du consommateur face au monopole

Le monopole d'exploitation de l'organisateur des événements sportifs fausse le libre jeu du marché, mais ceci dans l'objectif de protéger ses investissements. Le droit exclusif d'exploitation doit être réservé à l'organisateur pour garantir la pérennité de ses événements sportifs et de lui garantir un retour financier sur ses investissements. Mais cela peut avoir des impacts sur le consommateur. Partant, les organisateurs peuvent par exemple imposer librement les prix de billetterie aux consommateurs pour accéder au stade et par conséquent à l'événement sportif. La tendance récente démontre qu'il faut parfois payer des prix exorbitants pour voir un match de Ligue 1 ou de la Ligue des Champions. Or, il faut relativiser cette tendance qui n'est pas seule due aux organisateurs des événements sportifs. En effet, un marché noir important de la billetterie s'est développé. Parfois les organisateurs d'événements sportifs cèdent une partie de leur droit d'exploitation quant à la vente de billets, et recourent à des sites de revente en ligne comme par exemple le site numéro un mondial des ventes de billets d'événements sportifs et culturels à savoir viagogo.fr.

Initialement, ce site avait comme objet de permettre à des particuliers de revendre des billets dont ils n'avaient plus besoin, ou, dans bien trop souvent des cas, de réaliser une plus-value entre le prix auquel ils ont acheté le billet et le prix de revente. Depuis 2006, la société viagogo conclut des partenariats avec des organisateurs sportifs pour être cessionnaire partiel du droit de revente de billets168. Toutefois, le problème consiste en la méthode de fixation des prix sur de tels sites, qui peuvent être fixés directement par les vendeurs sans être contrôlés par l'organisateur de l'événement lui-même. La conséquence en est une nette hausse des prix qui oblige les plus passionnés à payer des prix exorbitants allant jusqu'à plusieurs milliers d'euros pour un match de football. Le Tribunal de grande instance de Paris a récemment condamné ladite société parce qu'elle proposait sur son site internet la vente de billets pour la finale de la Coupe de la Ligue, programmée pour le 19 avril 2014 au stade de France, entre le PSG et l'Olympique de Lyon169. Alors même que ces deux équipes avaient signé un contrat de partenariat avec ladite société, force est de constater que la finale de la Coupe de la Ligue est organisée chaque année par la Ligue de Football Professionnel (LFP), chargée de cette tâche par la FFF, qui est alors l'organisateur de cette manifestation sportive. En proposant des billets dudit match sur ses sites internet, à savoir www.viagogo.fr, www.viagogo.com et www.viagogo.lu, elle a porté atteinte au monopole d'exploitation de la LFP étant donné qu'elle n'avait pas eu l'autorisation de cette dernière de vendre ces billets. Avec cet arrêt, il est probable que les juges ont, entre autres, voulu préserver les

168 Les partenaires officiels de la Ligue 1 sont actuellement l'Olympique de Marseille, Girondins de Bordeaux, Paris Saint-Germain, Olympique Lyonnais, AS Saint-Etienne, Montpellier HSC, RC Lens et FC Nantes

169 TGI Paris, 10 avril 2014, n°14/53262, FFF c/ Viagogo

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consommateurs des prix hallucinants des billets de matchs de football, tels qu'ils sont proposés au marché noir. Désormais, il faudra considérer comme faute le fait de mettre en vente des billets d'événements sportifs sans avoir obtenu l'autorisation de la fédération ou de l'organisateur sportif.

Le monopole d'exploitation peut encore avoir d'autres effets sur les consommateurs, notamment en matière de retransmissions des événements sportifs. S'il est vrai que les fédérations peuvent céder tout ou partie de leur droit d'exploitation télévisuelle à des sociétés privées comme BeinSport ou Canal+, ce phénomène se fera au détriment de la majorité des consommateurs-spectateurs qui dénoncent des abonnements trop coûteux170, voire mal composés171. Cette privatisation du sport se fait aussi au détriment des chaînes gratuites ce qui est finalement malheureux pour nombreux téléspectateurs. « Découragés par la désertion des téléspectateurs et la surenchère des droits de diffusion à la télévision, les chaines gratuites - TF1 en particulier - font de plus en plus l'impasse sur le sport, privilégiant d'autres contenus, moins coûteux comme les séries. En février [2013], la Une a ainsi choisi de laisser la formule 1, qu'elle diffusait depuis 1992. Ces courses sont désormais retransmises sur Canal +. Un an avant, la première chaine française avait déjà renoncé aux treize plus belles affiches de la Ligue des champions, historiquement retransmises sur des chaines gratuites »172.

Finalement, soit le consommateur décide de souscrire un, voire deux abonnements afin de pouvoir suivre l'actualité des événements sportifs en direct, soit il se contente des quelques diffusions restantes sur les chaînes gratuites. Mais un nouveau phénomène leur permet de regarder des matchs en direct, sans débourser un seul centime à ces fins : des portails internet proposant le streaming173. À la limite de la légalité, le streaming se situe dans un vide juridique, permettant de voir des matchs en direct et gratuitement par internet. C'est au mépris des organisateurs sportifs que se développe cette tendance, car force est d'admettre que l'argent tiré des droits de retransmission constitue la principale source de revenus pour les fédérations et organisateurs, qui risquent de perdre un meilleur chiffre d'affaires si la pratique du streaming ne cesse de se développer étant donné que les téléspectateurs vont préférer recourir au streaming plutôt que de souscrire des abonnements coûteux. Il semble alors clair que le marché des droits de retransmission constitue un marché particulier, notamment à l'égard du droit de la concurrence.

170 Autour de 40 € par mois pour Canal + http://www.lesoffrescanal.fr/offre-tv/canal-plus/chaines-tv/canal-plus-sport et entre 10 et 12 € pour Beinsport http://www.beinsports.fr/abonnement

171 Les deux opérateurs ne diffusent pas toujours les mêmes matchs. Ainsi il se peut qu'un supporter du Montpellier HSC qui a abonné BeinSport ne puisse pas voir le match auquel participerait son équipe étant donné que Canal + aurait obtenu les droits de retransmission pour ce match. Il vaudrait alors mieux souscrire deux abonnements, l'un chez Canal + et l'autre chez BeinSport pour être sûr de pouvoir suivre tous les matchs de son équipe préférée, voire même tous les matchs qu'une personne aurait aimé regarder. Bien évidemment ce serait fâcheux, mais au final aussi trop coûteux.

172 S. Cassini, Le streaming, nouvelle ''drogue dure'' du sport, Le monde, économie, 24.08.2013 http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/08/24/le-streaming-nouvelle-drogue-dure-du-sport_3465851_3234.html

173 p. ex. www.atdhe.ru

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Section 2 : Le marché particulier des droits de retransmission face au droit de la concurrence

Par principe, le monopole d'exploitation de l'organisateur sportif est contraire aux principes du droit de la concurrence, mais ce dans l'objectif de protéger ses investissements. Le marché des droits de retransmission présente un marché particulier (§1), particulièrement exposé aux valeurs du droit de la concurrence (§2).

§ 1 : Le marché particulier des droits de retransmission

Les montants dépensés par Canal + et BeinSport pour les droits de retransmission de la Ligue 1 et de la Ligue 2 s'élevaient à 607 millions d'euros pour les saisons 2012 à 2016 et à 748,5 millions d'euros pour les saisons 2016 à 2020174. Les droits de retransmission constituent l'une des prérogatives du monopole d'exploitation quant à l'exploitation des droits d'exploitation audiovisuelle, détenus par l'organisateur ou la fédération de l'événement sportif. En ce qui concerne les sommes payées pour la cession des droits de retransmission, celles-ci sont très élevées, en prenant par exemple celles payées pour la Ligue 1 et Ligue 2. Le montant payé sera davantage élevé dans le cas d'une « cession exclusive à une chaine à péage dont le principal attrait pour les abonnés est justement la diffusion de matchs en exclusivité [...] Il appartient clairement que l'intérêt des organisateurs de manifestations sportives est de céder les droits de retransmission le plus souvent en exclusivité à des chaines à péage dont le modèle est fondé sur l'acquisition de tels droits »175.

Les revenus tirés des droits de retransmission télévisuelle sont les plus importants, représentant la principale source de revenus pour les fédérations ou organisateurs sportifs. Ce fait a des répercussions sur la base de négociation que l'organisateur va avoir avec les investisseurs et sponsors lesquels seront « contraints de rémunérer l'effet démultiplicateur, dont ils profitent, de la retransmission télévisée »176. Ainsi, le montant qu'un sponsor devra payer pour apposer un panneau publicitaire dans un stade, dépendra de la visibilité que ce dernier aura finalement sur les écrans des téléspectateurs et dépendra de l'audience du diffuseur.

L'influence des flux financiers, générés lors des retransmissions, sur les disciplines sportives est considérable. Ainsi, il est déjà plusieurs fois arrivé que des spectacles sportifs ont dû s'adapter aux exigences des retransmissions. C'était par exemple le cas des Jeux olympiques de Séoul où les horaires ont été modifiés afin de permettre aux téléspectateurs américains de suivre l'événement en direct. De même

174 V. supra 90175 T. Lemieux, Droits de retransmission : rencontre équilibrée entre titulaires des droits et public ?, in

Droit(s) du Football, sous la dir. de M. Touzeil-Divina et M. Maisonneuve, organisé par les laboratoires juridiques - CRJ & Themis-Um - des Universités de La Réunion et du Maine, réalisé dans le cadre de la 3ème éd. des « 24 heures du Droit », colloque du Mans, 4 avril 2014, L'Epitoge-Lextenso CLUD, 2014

176 F. Buy, J-M. Marmayou, D. Poracchia et F. Rizzo, Droit du sport, LGDJ, 3ème éd., 2012, n°1339, p.765

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quant aux changements des règles du jeu, comme c'est le cas pour la discipline du volley : depuis l'an 2000, tous les points sont comptés, alors qu'avant il fallait avoir le service. Ce changement des règles du jeu permet de réduire significativement la durée des rencontres.

§ 2 : Le marché des droits de retransmission et le droit de la concurrence

Le marché des droits de retransmission est particulièrement exposé aux règles du droit de la concurrence du fait de la position forte du titulaire du droit d'exploitation et des enjeux économiques et stratégiques que ces droits peuvent présenter pour les différents diffuseurs.

Alors qu'une fédération sportive peut, en vertu de l'article L.333-1 alinéa 2 du Code du sport, céder « aux sociétés sportives, à titre gratuit, la propriété de tout ou partie des droits d'exploitation audiovisuelle », le législateur a réservé à la ligue professionnelle177 la mission de commercialisation de ces droits d'exploitation audiovisuelle, laquelle devra seulement veiller aux limites prévues aux articles R.333-1 et suivants du Code du sport. À ce jour, seule la Fédération française de football a cédé (gratuitement) ces droits aux sociétés sportives. Vu supra, c'était suite à la demande des grands clubs professionnels de football de vouloir inscrire les droits télévisuels à l'actif de leur bilan, que le législateur avait accordé aux fédérations sportives le droit de céder la propriété de tout ou partie des droits d'exploitation audiovisuelle. La commercialisation sera néanmoins réalisée par la ligue professionnelle.

Partant, le législateur a prévu que la commercialisation devra être réalisée avec constitution de lots, pour une durée limitée et dans le respect des règles de concurrence178. Ainsi, en ce qui concerne les contrats d'exclusivité de diffusion, le droit de la concurrence ne met pas en cause le principe de l'exclusivité. Ainsi il existe un consensus, en France et en Europe : un contrat de diffusion exclusive n'est pas anticoncurrentiel en soi. Dans ce sens, « la finalité de la nature exclusive de la cession des droits de retransmission audiovisuelle des événements sportifs consiste à garantir la valeur économique du programme car, s'agissant d'un bien éphémère [...] pour lequel la demande est peu élastique [...], le diffuseur est assuré d'obtenir une audience conséquente d'une source de recettes publicitaires intéressantes »179. Toutefois, il est nécessaire que cette exclusivité soit limitée dans le temps et dans l'espace afin de permettre aux concurrents d'accéder au marché de la retransmission des événements sportifs180. La durée maximale des contrats de cession des droits audiovisuels était toujours de trois ans, mais depuis 2007, cette durée a été portée à quatre ans suite à deux avis nuancés du Conseil de la concurrence (qui est aujourd'hui l'Autorité de la

177 Sachant que la ligue professionnelle est créée par la fédération concernée.178 L'article L.333-2 alinéa 2, du Code du sport prévoit que « cette commercialisation est effectuée avec

constitution de lots, pour une durée limitée et dans le respect des règles de concurrence ». 179 V. supra 176, n°1342, p. 767180 Cass. com., 1er mars 1984, (Bull civ. IV n°91)

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concurrence)181.

Il faut également assurer la transparence de ce marché avec des appels d'offres bien réglementés. L'article R.333-3 du Code du sport prévoit les conditions de la procédure d'appel à candidature182, ainsi que le fait pour la ligue de devoir « rejeter les propositions d'offres globales ou couplées ainsi que celles qui sont assorties d'un complément de prix ».

Finalement, en ce qui concerne la répartition du produit tiré de la vente des droits de retransmission, l'alinéa premier de l'article L.333-3 du Code du sport prévoit que « les produits de la commercialisation par la ligue des droits d'exploitation des sociétés sont répartis entre la fédération, la ligue et les sociétés ». Le législateur laisse le soin à la ligue et à la fédération de fixer la part respective que recevra chacun. Quant aux montants reversés aux sociétés sportives, il s'agira de prendre en compte la notoriété et les performances sportives de celles-ci. À noter qu'un prélèvement de 5%, dite taxe «Buffet », sera effectué sur le montant hors TVA de l'ensemble des droits d'exploitation audiovisuelle183.

Chapitre 2 : Le monopole d'exploitation et le problème de l'ambush marketing

Le monopole de l'organisateur d'événements sportifs est souvent confronté à des pratiques anticoncurrentielles mettant en danger l'exploitation de ses droits exclusifs. Une pratique juridiquement non définie, mais pouvant porter une atteinte considérable au monopole, est celle de l'ambush marketing qui peut être traduite par la notion de marketing d'embuscade184 ou encore de « marketing sauvage ». D'après l'inventeur de cette pratique, il s'agirait d'une «stratégie commerciale consistant pour une entreprise à

181 Avis n°07-A-07 du 25 juillet 2007 relatif aux conditions de l'exercice de la concurrence dans la commercialisation des droits sportifs et Avis n° 07-A-15 du 9 novembre 2007 portant sur le projet de décret modifiant l'article R.333-2 du Code du sport

182 Art. R.333-3 du Code du sport : « La commercialisation [...] est réalisée selon une procédure d'appel à candidatures publique et non discriminatoire ouverte à tous les éditeurs ou distributeurs de services intéressés.L'avis d'appel à candidatures contient des informations relatives au contenu et à l'échéance des

contrats en cours portant sur les autres droits d'exploitation audiovisuelle. Il précise également le calendrier de la procédure d'attribution et les modalités d'ouverture des offres des différents candidats. Les droits sont offerts en plusieurs lots distincts dont le nombre et la constitution doivent tenir compte des caractéristiques objectives des marchés sur lesquels ils sont proposés à l'achat. Chaque lot est attribué au candidat dont la proposition est jugée la meilleure au regard de critères préalablement définis dans l'avis d'appel à candidatures. Les contrats sont conclus pour une durée qui ne peut excéder quatre ans. La ligue doit rejeter les propositions d'offres globales ou couplées ainsi que celles qui sont assorties

d'un complément de prix. »183 En 2006, les sommes perçues par la taxe « Buffet » ont été affectées au Centre national de

développement du sport. 184L'inventeur revendiqué de ce concept est Jerry Welsh, ancien directeur marketing d'American Express.

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se placer dans le sillage d'un sponsor parrainant un événement sportif mais dont le programme de parrainage était particulièrement mal conçu et mal mené »185. Mais au fil du temps, deux conceptions de l'ambush marketing se sont dégagées. L'une estimant qu'il s'agit d'une pratique commerciale illicite dans l'objectif pour une entreprise d'associer ses produits ou services à un événement (notamment sportif) pour retirer un profit économique de la notoriété de cet événement sans avoir obtenu l'autorisation de l'organisateur186, et l'autre conception qui prévoit qu'il s'agit de pratiques commerciales n'étant juridiquement pas interdites, donc par définition licites187. Suivant ces conceptions, il sera intéressant de soulever les problèmes rencontrés par les titulaires du monopole face à la lutte contre l'ambush marketing avec les moyens du droit commun (Section 1) pour finalement mettre en place des moyens alternatifs permettant de prévenir l'ambush marketing (Section 2).

Section 1: Le monopole d'exploitation et la lutte contre l'ambush marketing

D'une part, l'ambush marketing consiste pour les pratiquants de cette stratégie à occuper tous les espaces libres autour d'un événement sportif, alors que d'autre part, les organisateurs et sponsors, souffrant de cette pratique, essaient de rendre cet espace commercial aussi étanche que possible. Étant donné que l'ambush marketing est un phénomène transnational, il convient d'approcher le sujet par une analyse comparatiste. En effet, même si l'événement en soi se tient lieu dans un pays, il est la plupart du temps diffusé dans le monde entier, comme c'est par exemple le cas pour la Coupe du monde de football. Il convient alors d'appréhender la lutte contre l'ambush marketing à l'aide des mécanismes du droit commun (§1) pour conclure que le droit français, avec la théorie des agissements parasitaires, est le mieux préparé pour lutter contre cette stratégie de marketing (§2).

§ 1: La lutte contre l'ambush marketing à l'aide des mécanismes du droit commun

La victime de l'ambush marketing pourrait d'abord songer à se défendre en invoquant le droit de la propriété intellectuelle pour sanctionner l'utilisation ou l'imitation de ses oeuvres, dessins, signes ou marques. Or, force est de constater que ce mécanisme ne pourra protéger le titulaire de ces droits que contre les ambushers les plus primitifs, étant donné qu' « utiliser ou imiter la marque ou le logo d'autrui, [serait] une contrefaçon bête et méchante, ce n'est justement pas de l'ambush marketing »188. Dans ce sens, les juges du Tribunal de grande instance avaient déjà retenu que des opérateurs

185 J.-M. Marmayou, Coupe du monde de football : comment lutter contre l'ambush marketing ?, in M. Maisonneuve (sous la dir.), Droit et Coupe du monde, Economica, 2011, p.155

186 Le législateur italien a consacré cette conception dans une loi qui était entrée en vigueur pour la période des Jeux d'hiver de 2006, définissant l'ambush marketing comme « toutes activités parallèles à celles des entités autorisées par les organisateurs dans le but d'en obtenir un bénéfice financier ».

187 Le jugement dans l'affaire FFR c/ Fiat du TGI de Paris en date du 30 mars 2010 retenait que « le parrainage ne peut avoir pour effet de priver tout autre acteur économique de fonder sa publicité autour d'un sport pour autant qu'il ne s'approprie pas les symboles et logos de la fédération qui organise les matchs ni les images ». Les juges allaient alors plutôt dans le sens de cette conception plus libérale.

188F. Buy, J-M. Marmayou, D. Poracchia et F. Rizzo, Droit du sport, LGDJ, 3ème éd., 2012, n°1220, p.704

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qui faisaient référence à un événement sportif sans utiliser « ni les marques, logos, symboles des organisateurs ni images et sons de la représentation sportive [ne feraient] qu'user de la liberté de créer une publicité appuyée sur l'actualité, fut-elle sportive »189. Dès lors, la stratégie des ambushers est à la limite de la légalité. Or, surtout le droit des marques ne saura être une arme efficace contre les ambushers, puisque, souvent, les signes distinctifs liés à des grands événements sportifs ne remplissent pas les conditions nécessaires pour être protégés. La FIFA ne pouvait alors par exemple pas faire enregistrer les marques « Fussball WM 2006 » et « WM 2006 »190 en Allemagne car insusceptible d'être réservées dans le sens qu'il s'agissait de la description de l'événement même191, alors qu'elle pouvait l'enregistrer auprès de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (OHMI)192. Finalement le droit des marques ne constitue pas un moyen efficace pour lutter contre l'ambush marketing étant donné que la victime sera contrainte de prouver l'utilisation par l'ambusher des signes protégés ou leur similitude qui aurait créé une confusion dans l'esprit du public, sachant que «l'ambusher intelligent s'emploie justement à éviter tout risque de confusion dans l'esprit du public en [...] indiquant qu'il n'est pas un sponsor officiel »193.

Ensuite pour lutter contre l'ambush marketing il pourrait être opportun d'invoquer les dispositions de l'article L.121-1 du Code de la consommation qui sanctionne la publicité trompeuse. Concrètement, cette disposition aurait pour objectif de protéger les consommateurs, mais elle serait indirectement utile pour remédier une déstabilisation du marché concurrentiel résultant de l'ambush marketing. Or, ce moyen de défense ne pourrait seulement être soutenu si l'ambusher aurait fait croire qu'il est un partenaire officiel. De même que pour le droit des marques, l'ambusher sera attentif à ne pas créer de confusion quant à sa qualité et ainsi à ne pas induire les consommateurs en erreur.

Reste enfin la possibilité pour l'organisateur sportif (français) d'évoquer son monopole d'exploitation qu'il tient de l'article L.333-1 du Code du sport. Ce droit exclusif est partiellement efficace dans la lutte contre l'ambush marketing puisqu'il permet de sanctionner toute violation du monopole sans devoir prouver la mauvaise foi de l'ambusher ou le préjudice personnellement subi. « Ce droit est sanctionné de manière autonome sans qu'il soit nécessaire de faire appel à l'article 1382 du Code civil»194 et de devoir prouver une faute, un préjudice et un lien de causalité. Il faudra uniquement prouver l'atteinte au monopole. Toutefois, le monopole d'exploitation de l'organisateur n'est que partiellement efficace dans la lutte contre l'ambush marketing étant donné que l'assiette de ce droit est limitée à la compétition ou à la manifestation sportive.

189 V. supra 187190 «Fussball WM 2006 » désignant Fussball Weltmeisterschaft 2006, traduit en français : Coupe du monde de football 2006 ; « WM 2006 » désignant Weltmeisterschaft 2006, traduit en français : Coupe du monde 2006 191 Bundesgerichtshof, 27 avril 2006, deux arrêts : I, ZB 96/05 (Fussball WM 2006) et I, ZB 97/05 (WM 2006)192 OHMI, division d'annulation, 28 octobre 2005, Ferrero oHGmbh c/ FIFA (réf. 969C002155521)193 V. supra 185, p.159194 V. supra 188, n°1227, p.710

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Il est difficile de trouver des moyens de défense pour lutter contre l'ambush marketing ce qui résulte entre autres du fait qu'il n'est pas réglementé dans la législation française. Or, le droit français semble disposer d'une théorie, issue de la concurrence déloyale, et qui semble être au mieux adaptée à la situation : les agissements parasitaires.

§ 2 : La lutte contre l'ambush marketing à l'aide du parasitisme

Au niveau international, presque tous les pays disposent de législations sanctionnant des pratiques concurrentielles déloyales. En France, la concurrence déloyale est sanctionnée par la responsabilité civile délictuelle en vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil. D'autres pays ont des dispositions spécifiques consacrant l'interdiction des pratiques de concurrence déloyale, comme c'est le cas par exemple pour l'Allemagne195. Les pays de common law n'ont pas de dispositif qui interdit de manière générale la concurrence déloyale. Néanmoins, la doctrine accepte et regroupe les agissements constitutifs d' « unfair competition » ce qui équivaut à la concurrence déloyale telle qu'elle est connue dans les pays de droit romano-germanique. A l'égard des diverses législations nationales, il semble pourtant que seules les mises en oeuvres les plus maladroites de l'ambush marketing peuvent être sanctionnées, considérant que les législations ne constitueraient pas un obstacle infranchissable à cette pratique. Cette défaillance des législations face à l'ambush marketing est dû au fait que doit toujours être rapporté la preuve de la faute de l'ambusher. Si, en France, il faut parler d'une faute, c'est notamment à cause de l'article 1382 du Code civil qui impose qu'il doit y avoir eu une faute. Dans d'autres pays, il faudra parler d'acte contraire aux pratiques commerciales honnêtes comme par exemple en Belgique. Mais au final, ce sera toujours un comportement illicite qui devra être sanctionné. Or, « le problème est justement de savoir si l'ambush marketing est ou non, en soi, illicite ; est ou non en soi, constitutif d'une faute »196.

Un autre problème, au niveau des législations internationales, est que dans certains pays, les actions en concurrence déloyale ne peuvent seulement être mises en oeuvre entre concurrents, comme c'est le cas pour l'Allemagne par exemple. C'est regrettable en matière de lutte contre l'ambush marketing étant donné qu'il n'y a pas toujours une situation de concurrence entre la victime et l'ambusher. À ce titre, il semble qu'une spécificité française de la concurrence déloyale puisse porter secours : les agissements parasitaires ou le parasitisme. Il n'exige pas de situation de concurrence entre la victime et l'auteur de la faute. De plus, face à l'ambush marketing, le parasitisme semble être l'arme la plus efficace dans le sens que celui-ci se définit par «l'ensemble des comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-

195 Le § 3 UWG (Gesetz gegen den unlauteren Wettbewerb) qui interdit explicitement des agissements commerciaux déloyaux (Verbot unlauterer geschäftlicher Handlungen)

196 V. supra 188, n°1222, p.706

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faire »197. Pour rappel, l'inventeur de la stratégie de l'ambush marketing définissait celle-ci comme une « stratégie commerciale consistant pour une entreprise à se placer dans le sillage d'un sponsor parrainant un événement sportif mais dont le programme de parrainage était particulièrement mal conçu et mal mené »198. Ainsi, le parasitisme pourrait a priori être parfait pour lutter contre ce marketing d'embuscade. Toutefois, force est d'admettre que le parasitisme est lui aussi malheureusement construit sur l'article 1382 du Code civil et il faudra encore que la victime puisse démontrer une faute, un préjudice et un lien de causalité entre les deux. Or, vu précédemment, il sera très difficile pour l'organisateur sportif de démontrer l'existence d'un préjudice, alors même que l'objectif de l'ambusher ne consiste pas à nuire à l'image ou à la réputation de l'organisateur voire de son événement sportif.

Force est finalement de constater qu'il est difficile de bien protéger le monopole d'exploitation contre la pratique de l'ambush marketing. Les mécanismes du droit commun et le monopole en soi ne permettent pas de protéger l'organisateur sportif de manière satisfaisante contre cette pratique. Il est alors conseillé aux organisateurs d'événements sportifs de recourir à des moyens alternatifs permettant de lutter contre l'ambush marketing.

Section 2 : Le monopole d'exploitation et les moyens alternatifs de lutte contre l'ambush marketing

M. J.-M. Marmayou est d'avis que « la lutte contre l'ambush marketing est perdue si elle est exclusivement confiée à des juristes, ou si à l'inverse, elle l'est exclusivement à des spécialistes du marketing »199. Pour lutter efficacement contre cette pratique, il faudra tout d'abord utiliser de bonnes techniques contractuelles pour rendre l'espace autour de l'événement le plus étanche possible ou alors créer et adhérer à des Codes de bonne conduite pour ainsi penser à une prévention en avant-plan (§1). Ensuite, il est aussi possible de solliciter l'aide du législateur en lui rappelant qu'il est nécessaire de protéger suffisamment l'événement sportif et ce pour diverses raisons (§2).

§ 1 : La nécessité d'une prévention en avant-plan

La prévention en avant-plan se traduit d'abord par l'utilisation de bonnes techniques contractuelles au sein des différents contrats en relation avec l'événement sportif (I), ou encore par le développement de Codes de bonne conduite pour restreindre la liberté de publicité des membres-adhérents (II).

197 P. Le Tourneau, De la modernité du parasitisme, Gaz. Pal. 2001, doct., p.4198 V. supra 185, p.168199 V. supra 185, p.168

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I : La nécessité d'une prévention à l'aide de techniques contractuelles

Les contrats de sponsoring représentent une ressource essentielle pour les organisateurs sportifs, surtout lorsque les sponsors acquièrent l'exclusivité totale. Mais même une exclusivité partielle peut faire espérer aux sponsors et partenaires des retombées importantes quant à l'image et à la notoriété, engendrant finalement de meilleures ventes. Il existe alors une grande tentation pour les ambushers de s'associer à l'événement sportif pour profiter des retombées financières sans avoir déboursé, pour leur part, les prix importants payés par les partenaires et sponsors. Il semble alors opportun que les organisateurs sportifs utilisent de bonnes techniques contractuelles avec leurs partenaires et sponsors en leur imposant des obligations de faire ou de ne pas faire dans l'objectif de rendre l'espace commercial autour de l'événement le plus étanche possible.

L'organisateur sportif pourrait alors par exemple interdire au cessionnaire du droit de retransmission de diffuser des publicités de concurrents, donc autres que celles des partenaires ou sponsors officiels.

L'organisateur sportif pourrait encore introduire une clause dite de « clean site » dans le contrat conclu avec la ville hôte de l'événement. Cette clause aurait pour effet qu'une surface déterminée autour de l'événement sportif soit libérée de toute publicité n'émanant pas de sponsors ou partenaires officiels. Ainsi, l'organisateur pourrait contrôler tous les messages publicitaires entourant la sphère territoriale de son événement. Par cette mesure, les frontières auxquelles se situent généralement les ambushers seraient considérablement repoussées.

De même, l'organisateur sportif pourrait, par le biais du billet d'entrée acquis par le spectateur, imposer un « dress code » à ce dernier en lui interdisant par exemple de faire de la publicité (trop apparente) pour des entreprises concurrentes. En outre, une telle clause de « dress code » pourrait être imposée aux équipes participantes à l'événement sportif en érigeant des obligations comportementales envers les sportifs et leur staff technique qui devront veiller à la visibilité de leurs propres sponsors, pouvant être différents des sponsors officiels.

Or, force est pourtant de constater que la liberté contractuelle ne peut pas résoudre tous les problèmes. D'une part, elle se heurte au principe de l'effet relatif des contrats, et d'autre part elle est soumise au respect des libertés fondamentales comme la liberté d'expression, la liberté du commerce et de l'industrie ou encore au droit public à l'information pour n'en citer que quelques-unes. Une conséquence restante : « l'espace commercial autour de l'événement sportif que l'organisateur peut se réserver ou réserver à ses partenaires est ainsi limité, ce qui mécaniquement accroit l'espace laissé libre aux ambushers qui, plutôt de consacrer des sommes considérables pour obtenir le titre de parrain officiel, préfèrent concentrer leur intelligence, et un budget moindre, à développer des opérations commerciales ingénieuses »200.

200 V. supra 185, p.170

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Un autre moyen de lutter contre l'ambush marketing serait encore de conclure des accords collectifs avec les entreprises concernées, ou de développer des Codes de bonne conduite.

II : La nécessité d'une prévention à l'aide de codes de bonne conduite

La pratique de l'ambush marketing peut être restreinte dans la mesure où les entreprises impliquées dans un événement sportif peuvent adopter un code de bonne conduite. À l'aide d'un tel Code il serait possible « de développer une discipline collective [...] destinée à restreindre la liberté publicitaire de ses membres » dans la mesure où « toutes les entreprises, sponsors avérés ou potentiels, appartiennent à [...] des réseaux plus ou moins institutionnalisés »201.

Dans cette logique, un Code de bonne conduite a été élaboré à l'occasion de la Coupe du monde en Afrique du Sud en 2010 pour prévenir explicitement l'ambush marketing202. L'article 11.6 (sponsors ambushing sponsors) de ce Code prévoit par exemple que tous les sponsors officiels puissent avoir des accords différents avec l'organisateur de l'événement sportif quant à la promotion de leurs produits. Ainsi, ils n'avaient pas à « ambusher » un autre sponsor officiel en faisant référence à un aspect de l'événement qui n'était pas prévu dans leur contrat de sponsoring, mais qui pouvait bien faire l'objet dans un contrat d'un autre sponsor officiel. Cette disposition concerne alors l'ambush entre les sponsors officiels eux-mêmes203.

La directive européenne 2005/29/CE204 a renforcé le rôle de tels Codes de bonne conduite en leur consacrant une force plus contraignante. L'article 6.2.b) de cette directive sanctionne le « non-respect par le professionnel d'engagements contenus dans un code de bonne conduite par lequel il s'est engagé à être lié ». Encore faut-il que les engagements pris par le professionnel soient fermes et vérifiables et qu'il soit effectivement lié à ce code dans le cadre d'une pratique commerciale.

Mais pour que l'organisateur d'un événement sportif, ainsi que ses partenaires officiels, soient encore mieux préparés dans la lutte contre l'ambush marketing, il faudra parfois faire appel au législateur.

201 V. supra 185, p.169202 ASA sponsorship Code http://www.asasa.org.za/codes/sponsorship-code/sponsorship-rules-and-

provisions203 Article 11.6 ASA sponsorship Code : « Where there is more than one official sponsor of an event,

there may be specific agreements between sponsors and organisers on the promotional access granted to sponsors under a sponsorship contract. Here one sponsor may not ambush another sponsor by using any aspect of any event not specified in the contract to promote its name. »

204 Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:32005L0029&from=FR

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§ 2 : La nécessité d'une intervention législative

Les organisateurs d'événements sportifs majeurs n'hésitent pas à faire appel aux législateurs nationaux pour protéger davantage leur événement contre des pratiques d'ambush marketing. La FIFA et le CIO en sont les meilleurs exemples puisqu'ils conditionnent l'attribution de leur événement à une ville ou un pays d'accueil à l'adoption de textes législatifs ad hoc pour protéger au mieux leur événement. Évidemment, la lutte contre l'ambush marketing est souvent au centre de leur intérêt du moment que cette pratique ne soit pas toujours sanctionnée par les législations nationales.

Certaines lois sont adoptées pour un seul événement, elles sont alors temporelles et finalement abrogées après l'événement. D'autres peuvent rester applicables aux prochains événements classés dans la même catégorie. Pour cette dernière catégorie, il est commun de parler de « lois parapluies » car elles permettent aux gouvernements nationaux de les redéclarer applicables aux prochains événements sportifs si bon leur semble.

Il y a même des pays qui sont allés jusqu'à déplacer la sanction de l'ambush marketing dans la sphère pénale. Tel est par exemple le cas pour l'Afrique du Sud qui avait prévu, pour la Coupe du monde de 2010, une peine d'amende et une peine d'emprisonnement (de maximum 5 ans) pour toute revente de billets dans un but promotionnel sans avoir obtenu l'autorisation de la FIFA, du moment qu'il ne s'agissait pas d'un partenaire officiel.

Or, même si cette pratique peut être très efficace dans la lutte contre l'ambush marketing, elle reste toutefois critiquable dans la mesure où elle peut porter une atteinte disproportionnée à la liberté du commerce, à la liberté d'expression, et bien sûr au principe de libre concurrence. Ces lois « consolident des monopoles qui n'avaient pas forcément besoin de cela et utilisent, pour couvrir le plus d'actes pirates possible, des notions relativement vagues qui ne garantissent pas la sécurité juridique des opérateurs»205. Dans ce sens, pays hôte pour le Championnat d'Europe de 2008, il faut d'un côté féliciter la Suisse qui avait résisté au lobbying des instances sportives en décidant de ne pas adopter de tels textes spéciaux, les estimant trop attentatoires aux principes de liberté de commerce, de libre concurrence et de liberté d'expression206.

Il serait temps que l'Union européenne, ou du moins le législateur français s'occupe de la problématique de l'ambush marketing pour enfin instituer un cadre jurdique clair et efficace contre cette pratique tellement méprisée par les organisateurs d'événements sportifs, et par conséquent par les sponsors et partenaires officiels. En effet, ces derniers ne bénéficient d'aucun régime de protection spécifique « alors même que leur financement constitue une ressource indispensable pour l'organisation des événements sportifs et, de façon plus générale, pour la promotion du sport »207. La seule

205F. Buy, J-M. Marmayou, D. Poracchia et F. Rizzo, Droit du sport, LGDJ, 3ème éd., 2012, n°1228, p.713206 V. supra 185, p.167207 T. Alès et M. Aynès, Ambush marketing-Panorama jurisprudentiel et conseils pratiques, CCC, n°12,

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action dont disposent ces derniers est le parasitisme. Or, l'action en parasitisme n'est pas toujours satisfaisante dans la mesure où elle est d'abord difficile à démontrer, En plus, il faut dénoncer le fait que les montants alloués aux victimes ne correspondent jamais au préjudice réellement subi. Ainsi, par rapport aux gains qu'ils peuvent tirer des pratiques litigieuses, les condamnations des ambushers ne sont finalement pas suffisamment dissuasives. À côté de l'action de parasitisme, l'organisateur sportif peut encore recourir à la protection de son monopole issu de l'article L.333-1 du Code du sport. Or, vu supra, ce monopole ne saura pas être adapté à toutes les confrontations à l'ambush marketing. Une intervention du législateur sera vivement souhaitable pour enfin prendre position et mettre fin à l'insécurité juridique qui ombrage les événements sportifs.

décembre 2014, étude 12

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Conclusion Partie 2_______________________________________________

L'ambiguïté de la rédaction de l'article L.333-1 du Code du sport reste au coeur des débats doctrinaux et jurisprudentiels. Persiste alors un désaccord doctrinal et jurisprudentiel quant à l'interprétation de cet article.

En ce qui concerne la délimitation du périmètre, il paraît opportun d'adhérer à l'idée soutenue par Jean-Michel Marmayou208 lorsqu'il s'agissait pour les juges d'adopter une conception restrictive ou extensive du monopole d'exploitation. Selon cet auteur, les juges optent d'une part pour une conception extensive lorsqu'une « une activité génératrice de revenus, au centre de laquelle se trouve la compétition et qui a pour objet ou pour effet de proposer un produit ou un service, » ne se distingue pas de l'activité sportive209. D'autre part, ils optent plutôt pour une conception restrictive en présence d'une « activité économique, au centre de laquelle se trouve la compétition, mais qui a pour objet ou pour effet d'établir des offres qui se distinguent manifestement de l'activité sportive »210.

Toutefois, il est regrettable que les juges avaient repris, dans l'affaire FFR c/ Fiat, la formule de « captation injustifiée d'un flux économique [...], constitutive d'une exploitation directe illicite comme non autorisée ». Dans un domaine qui est déjà assez flou à cause de l'ambiguïté de la rédaction de l'article L.333-1 du Code du sport, les juges auraient dû opter pour des termes et notions connus et précis. Or, ils font référence à des notions floues comme la « captation injustifiée » d'un « flux économique » ou «exploitation directe illicite», ce qui ne contribue forcément pas à clarifier un domaine qui est assez brouillé.

Quant à l'ambusher, son seul objectif est de repérer de telles situations incertaines pour pouvoir procéder à la commercialisation de ses produits ou services aux abords de l'événement sportif. Reste finalement à l'organisateur sportif que la possibilité d'agir contre l'ambusher sur le fondement de la concurrence déloyale pour pallier les lacunes de la protection de son monopole d'exploitation.

208 D. Poracchia, J.-M. Marmayou et C.-A. Maetz, Un an de sport dans le droit de la communication, CCE n°11, novembre 2010, chron. 10

209 C'était le cas pour l'exploitation commerciale, d'une société autre que l'organisateur sportif, de vidéocassettes sur un événement sportif, CA Paris, 4ème ch., sect. A, 28 mars 2001, Sté Gemka Production SA c/ Sté Tour de France et Sté Amaury Sport Organisation ; ou pour l'exploitation commerciale d'un ouvrage illustrant et commentant une course sportive, T. com. Nanterre, 12 décembre 2002, affaire ACO et ASAACO c/ SARL Dragoon éditions ; ou pour l'organisation de paris sportifs en ligne sans avoir obtenu l'autorisation de l'organisateur sportif, CA Paris, 14 octobre 2009, n° 08/19179, FFT c/ Unibet

210 C'était le cas pour une société, autre que l'organisateur sportif, de proposer des voyages en reprenant l'itinéraire du Tour de France, TGI Paris, 9 décembre 2008, n°08/00052, affaire Tour de France c/ Eurocycler ; ou pour une société de créer une publicité en se fondant sur une actualité sportive, TGI Paris, 30 mars 2010, n°08/07671 ; confirmé en appel CA Paris, 12 décembre 2012, n°10/10996, confirmé par Cass. com., 20 mai 2014, n°13-12.102, FFR c/ Fiat France et a.

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Conclusion générale_______________________________________________

Pour reprendre la question posée dans l'introduction :

L'article L.333-1 du Code du sport, consacrant le droit exclusif du propriétaire sur l'exploitation de sa manifestation ou compétition sportive, est-il volontairement rédigé d'une façon ambiguë pour offrir au juge une marge d'appréciation et de manoeuvre, ou bien s'agirait-il d'une maladresse de la part du législateur, laquelle appellerait aujourd'hui une nouvelle intervention législative afin de préciser la nature et le périmètre exact de ce monopole octroyé ?

Maladresse ou pas, il faut saluer le fait que les juges ont su adapter leurs décisions au cas d'espèces dans la plupart des litiges. Les désaccords jurisprudentiels étaient inévitables lorsqu'il était question de condamner une partie sur une disposition qui est rédigée de façon ambiguë. Il se peut que le législateur a expressément voulu laisser la liberté aux juges d'interpréter le texte pour l'adapter aux questions qui allaient leur être posées. Ou bien, faut-il au contraire, interpréter le désaccord jurisprudentiel comme un appel au législateur de prendre (enfin) position ? Dans tous les cas, le silence du législateur est insécurisant tant pour l'organisateur sportif que pour les autres opérateurs économiques. L'incertitude quant à la nature, l'assiette et le périmètre du monopole continue à poser plusieurs difficultés. En effet, l'organisateur risque de ne pas retirer tous les profits espérés de l'exploitation de son événement. Les autres opérateurs économiques, à part l'ambusher, qui ne sont pas prêts à payer des sommes importantes pour devenir sponsor ou partenaire, n'osent ou ne veulent pas risquer une exploitation commerciale indirecte de l'événement sportif, craignant d'être sanctionnés pour la violation du monopole.

Si le législateur a voulu accorder un droit de propriété original à l'organisateur sportif, il serait souhaitable de l'affirmer et d'en délimiter les contours. Dans ce sens, Pierre-Dominique Cervetti semblait avoir trouvé les justes mots. Ce dernier a affirmé qu'en « tout état de cause, en refusant de préciser dans la loi le périmètre du droit d'exploitation, le législateur a confié à la jurisprudence le soin d'établir des contours clairs. Il faut toutefois l'encourager à s'armer de prudence dans cette entreprise, car s'il est vrai que c'est dans les lacunes de la loi que s'exprime l'intelligence du juge, force est d'admettre qu'il n'appartient pas à celui-ci de se substituer, dans ses fonctions, au législateur »211.

211 P.-D. Cervetti, Haro sur le monopole d'exploitation des organisateurs de compétitions sportives, RLDI 2013, 91

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http://www.olympic.org/Documents/olympic_charter_fr.pdf

VIII. Textes

◦ Textes communautaires

Avis de la Commission européenne :

Avis circonstancié la Commission européenne, 8 juin 2009, notification 2009/0122/F

Communiqué de presse :

CJUE, Communiqué de presse n°102/11

76

Décisions :

Comm. CE, 19 janvier 2005, aff. DG Comp/C-2-37.214 sur la vente combinée des droits médiatiques sur le championnat allemand de football (Bundesliga), Communiqué de presse IP/05/62

Comm. CE, déc. n°2007/480, 25 juin 2007 : JOUE n° L 180, 10 juill. 2007, p.33

Directives :

Directive 2007/65/CE du 11 décembre 2007 du Parlement européen et du Conseil, aujourd'hui codifié à l'article 15 de la directive n°2010/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 10 mars 2010 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels

Directive n°89/552/CEE du Conseil du 3 octobre 1989, aujourd'hui reprise par la directive n°2010/13/UE du 10 mars 2010

Livre Vert :

Livre vert de la Commission européenne du 24 mars 2011 sur les jeux d'argent et de hasard en ligne dans le marché intérieur [COM(2011) 128 final - non publié au Journal officiel]

◦ Textes français

Arrêté :

Arrêté du 28 février 2008 relatif aux dispositions réglementaires du Code du sport

Avis :

Avis du CSA n°2007-7 du 17 juillet 2007 du CSA sur le projet de règlement relatif aux conditions d'accès aux stades des journalistes pendant la sixième Coupe du monde de rugby

Avis de l'Autorité de la concurrence n°11-A-02 du 20 janvier 2011 relatif au secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne

77

Code de bonne conduite :

Code de bonne conduite du 22 janvier 1992 élaboré par le CSA et adopté par tous les diffuseurs français

Décrets :

Décret n°2004-1392 du 22 décembre 2004 pris pour l'application de l'article 20-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

Décret n° 2007-1133 du 24 juillet 2007 relatif aux dispositions réglementaires du Code du sport

Décret n°2011-47 du 11 janvier 2011 qui transpose la directive 2007/65/CE du 11 décembre 2007 du Parlement européen et du Conseil

Délibération :

Délibération du CSA du 15 janvier 2013 relative aux conditions de diffusion de brefs extraits de compétitions sportives et d'événements autres que sportifs d'un grand intérêt pour le public

Lois :

Loi Avice n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives

Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

Loi Bredin n° 92-652 du 13 juillet 1992 modifiant la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives et portant diverses dispositions relatives à ces activités

Loi n° 98-146 du 6 mars 1998 relative à la sécurité et à la promotion d'activités sportives

Loi Buffet n° 2000-627 du 6 juillet 2000 modifiant la loi no 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives

Loi n° 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

Loi Lamour n° 2003-708 du 1er août 2003 relative à l'organisation et à la promotion des

78

activités physiques et sportives

Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique

Loi n°2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne

Loi n° 2012-158 du 1er février 2012 visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs

Ordonnance :

Ordonnance n°2006-596 du 23 mai 2006 relative à la partie législative du Code du sport

IX. Jurisprudences

◦ Décision du Conseil constitutionnel

CC, n°2010-605 DC, décision du 12 mai 2010

◦ Décisions du Conseil d'État

CE, 30 mars 2011, n°342142, société Betclic entreprises limited

CE, ord., 18 mars 2002, n° 244081, GIE « Sport libre »

◦ Décisions et avis du Conseil de la concurrence

Avis n°07-A-07 du 25 juillet 2007 relatif aux conditions de l'exercice de la concurrence dans la commercialisation des droits sportifs

Avis n° 07-A-15 du 9 novembre 2007 portant sur le projet de décret modifiant l'article R.333-2 du Code du sport

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◦ Décisions de première instance

T. com. Nanterre, 12 décembre 2002, ACO et ASAACO c/ SARL Dragoon éditions

TGI Nanterre, 1ère ch. sect. A, 25 juin 2003, n°01-08.261, LNF c/L'Equipe TV

TGI Paris, 8 juillet 2005, n° 05/56360, Zeturf c/ PMU

TGI Paris, 30 mai 2008, 3ème ch., sect. 2, n°08/02005, expekt.com c/FFT

TGI Paris, 30 mai 2008, 3ème ch., sect. 2, n°08/02006, Unibet c/FFT

TGI Paris, 9 décembre 2008, n°08/00052, Tour de France c/ Eurocycler

TGI Paris, 30 mars 2010, n°08/07671

TGI Paris, 10 avril 2014, n°14/53262, FFF c/ Viagogo

◦ Décisions de Cour d'appel

CA Lyon, 1ère ch. civ., sect. B., 26 mars 1987

CA Paris, 15 juin 1989, n°89-10.709, Antenne2 c/ TF1

CA Paris, 1ère ch. conc., 10 février 1992, La Cinq c/ FFF

CA Paris, 4ème ch., sect. A, 28 mars 2001, Sté Gemka Production SA c/ Sté Tour de France et Sté Amaury Sport Organisation

CA Paris, 4ème ch., sect. A, 28 janvier 2004, n°2002/15549, L'Equipe c/ TF1

CA Versailles, 1ère ch. sect. 1, 23 septembre 2004, n°03-06.239, LNF c/ L'Equipe TV

CA Paris, 14ème ch., 4 janvier 2006, n°05/15.773, Zeturf c/ PMU

CA Paris, 18ème ch., 12 février 2008, n°07-02.721, SAS Glem c/ A. Laize et a.

CA Paris, 14 octobre 2009, n° 08/19179, FFT c/ Unibet

CA Paris, 16 mars 2011, n°09-22.229, FFR c/ VIP Consulting

CA Paris, 12 décembre 2012, n°10-10.996, FFR c/ Fiat France et a.

80

◦ Décisions de la Cour de cassation

Cass. com., 1er mars 1984, (Bull civ. IV n°91)

Cass. 1ère civ., 6 février 1996, n°93-17.670, FOCA

Cass. com., 17 mars 2004, n°02-12.771, Andros c/ Motor Presse France

Cass. com., 8 février 2005, n°04-13.104, L'Equipe c/ TF1

Cass. com., 10 juillet 2007, n° 06-13.986

Cass. com., 20 mai 2014, n°13-12.102, FFR c/ Fiat France et a.

◦ Décisions communautaires

Tribunal de première instance des Communautés européennes :

TPICE, 3ème ch., 12 juin 1997, SA Tiercé Ladbroke c/ Commission

Tribunal de l'Union européenne :

TUE, 17 février 2011, aff. T-385/07, FIFA et UEFA c/ Commission européenne

Cour de justice de l'Union européenne :

CJCE, 24 mars 1994, aff. C-275/92, Schindler

CJCE, 21 octobre 1999, aff. C-67/98, Zenatti

CJUE, 4 octobre 2011, C-429/08, Premier League c/ Murphy

◦ Décisions étrangères

Bundesgerichtshof, 27 avril 2006, deux arrêts : I, ZB 96/05 (Fussball WM 2006) et I, ZB 97/05 (WM 2006)

OHMI, division d'annulation, 28 octobre 2005, Ferrero oHGmbh c/ FIFA (réf. 969C002155521)

81

X. Autres documents

◦ Droit étranger

Loi brésilienne n°5.988 du 14 décembre 1973

Loi brésilienne n°9.615/98 du 24 mars 1998 (loi Pelé)

Loi brésilienne n°12.395 du 16 mars 2011

◦ Articles de presse

F. Schmitt, Droits TV du football : Canal + vainqueur de l'appel d'offres de la Ligue, Les Echos, 04.04.2014http://www.lesechos.fr/04/04/2014/lesechos.fr/0203422669233_droits-tv-du-football---canal--vainqueur-de-l-appel-d-offres-de-la-ligue.htm

S. Cassini, Le streaming, nouvelle ''drogue dure'' du sport, Le monde, économie, 24.08.2013 http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/08/24/le-streaming-nouvelle-drogue-dure-du-sport_3465851_3234.html

P. Reynaud, Evénement sportif : le monopole de l'organisateur n'est pas absolu, Droit & Technologies, 13.12.2012http://www.droit-technologie.org/actuality-1566/evenement-sportif-le-monopole-de-l-organisateur-n-est-pas-absolu.html

82

Table des matières_______________________________________________

Remerciements.........................................................................................................1

Liste des principales abréviations............................................................................ 2

Sommaire................................................................................................................. 4

Introduction............................................................................................................5

Partie 1 : L'introduction d'un monopole d'exploitation spécifique...................10

Titre 1 : Le passage d'un monopole de fait à un monopole de droit........................ 11

Chapitre 1 : La consécration législative d'un monopole.............................. 11

Section 1 : Un domaine sous la régence des usages.........................11

§ 1 : Les usages consacrant un monopole au niveau international...11§ 2 : Les usages consacrant un monopole au niveau national.......... 14

Section 2 : Un nouveau domaine d'intervention législative............. 15

§ 1 : Les premières lois du monopole d'exploitation........................15§ 2 : La récente loi du monopole d'exploitation : le « droit au pari » en ligne......................................................17

Chapitre 2 : Les exceptions légales au monopole de droit...........................20

Section 1 : Les exceptions légales suite à l'intervention du juge..... 20

§ 1 : Les droits radiophoniques........................................................ 20§ 2 : Le droit d'accès des journalistes aux enceintes sportives.........21

Section 2 : Les autres exceptions légales......................................... 22

§ 1 : Le droit de citation : résultat d'un Code de bonne conduite..... 22§ 2 : Les événements sportifs d'importance majeure : le produit d'une directive européenne...................................... 24§ 3 : L'interdiction de « gel des droits »........................................... 25

83

Titre 2 : L'identification du monopole de droit........................................................ 26

Chapitre 1 : La question de la nature du droit d'exploitation....................... 26

Section 1 : L'absence de définition de la nature et de l'assiette du monopole d'exploitation......................... 26

§ 1 : L'absence de définition du droit d'exploitation (la nature).......26§ 2 : L'absence de définition de la manifestation ou

de la compétition sportive (l'assiette)........................................29

Section 2 : Une possible comparaison avec le droit brésilien et son droit d'arène.........................................................31

§ 1 : L'influence du monopole sur les sportifs................................. 31§ 2 : L'influence du monopole sur les organisateurs d'événements sportifs............................................................... 33

Chapitre 2 : La question de l'appropriation de l'événement sportif par le par le droit de la propriété intellectuelle.........................34

Section 1 : L'admission de protection d'un investissement.............. 35

§ 1 : La protection d'un investissement au nom de la propriété intellectuelle.............................................................. 35

§ 2 : L'illustration jurisprudentielle de protection d'un investissement...................................................................36

Section 2 : Le rejet de la théorie du droit d'auteur et des droits voisins........................................................ 38

§ 1 : Le rejet préventif de cette théorie par les juges français.......... 38§ 2 : Le rejet partiel de cette théorie avec l'arrêt Murphy de la CJUE........................................................40

Conclusion Partie 1................................................................................................42

Partie 2 : L'appréciation d'un monopole d'exploitation ambiguë.....................43

Titre 1 : Le problème du défaut de la délimitation du périmètre............................. 44

Chapitre 1 : L'intervention prudente des juges.............................................44

Section 1 : L'interprétation extensive en relation avec la volonté des organisateurs...................................44

84

§ 1 : Une interprétation extensive dans le but de protection des organisateurs...................................................................... 44§ 2 : Une interprétation extensive et sa confirmation par la loi du droit au pari......................................................... 46

Section 2 : L'interprétation restrictive contre les tentatives d'extension du monopole................................................ 48

§ 1 : Les affaires à conception restrictive.........................................48§ 2 : L'interprétation restrictive comme limite du droit exclusif d'exploitation.................................................49

Chapitre 2 : L'intervention divergente des juges..........................................51

Section 1 : L'intervention divergente des juges dans l'affaire Fiat c/ FFR ...............................................51

Section 2 : L'intervention incidente du droit de la responsabilité délictuelle................................................ 54

Titre 2 : Le problème du défaut de garantie de la sécurité juridique....................... 56

Chapitre 1 : Le monopole d'exploitation comme source d'atteintes............ 56

Section 1 : Le problème de protection des différents intérêts.......... 56

§ 1 : La question de la frontière entre la protection de l'organisateur et la préservation de la liberté du commerce et de l'industrie et de la concurrence........................................ 56§ 2 : La question de la protection du consommateur face au monopole..................................................................... 58

Section 2 : Le marché particulier des droits de retransmission face au droit de la concurrence....................................... 60

§ 1 : Le marché particulier des droits de retransmission..................60§ 2 : Le marché des droits de retransmission et le droit de la concurrence..................................................... 61

Chapitre 2 : Le monopole d'exploitation et le problème de l'ambush marketing..............................................................62

Section 1 : Le monopole d'exploitation et la lutte contre l'ambush marketing..................................63

85

§ 1 : La lutte contre l'ambush marketing à l'aide des mécanismes du droit commun..................................................63§ 2 : La lutte contre l'ambush marketing à l'aide du parasitisme..... 65

Section 2 : Le monopole d'exploitation et les moyens alternatifs de lutte contre l'ambush marketing.................................66

§ 1 : La nécessité d'une prévention en avant-plan............................ 66I : La nécessité d'une prévention à l'aide de techniques contractuelles.................................................67II : La nécessité d'une prévention à l'aide de codes de bonne conduite.................................................68

§ 2 : La nécessité d'une intervention législative............................... 69

Conclusion Partie 2................................................................................................71

Conclusion générale...............................................................................................72

Bibliographie........................................................................................................... 73

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