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Considérations générales relatives aux systèmes hyperstatiques 77 Chapitre 4 CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES RELATIVES AUX SYSTÈMES HYPERSTATIQUES 4.1 INTRODUCTION On a vu que dans le cas des systèmes isostatiques, les composantes de réaction et les éléments de réduction dans n'importe quelle section se calculent au moyen des équations d'équilibre de la statique seules. Il importe de bien noter qu’un système dont les réactions peuvent être connues à partir des équations de la statique mais que ces dernières ne permettent pas de déterminer les efforts M, N, T dans toutes les sections, n’est pas un système isostatique (voir § 4.2). Ce cas est illustré par les exemples de la figure 4.1. Dans une structure isostatique, les liaisons sont strictement suffisantes (en nombre et en nature) pour CALCUL DES STRUCTURES HYPERSTATIQUES a) Arc bi-articulé avec tirant b) Cadre fermé simplement appuyé Figure 4.1

Chap4. Considérations relatives aux systèmes hyperstatiques

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Cons idéra t ions généra les re la t i ves aux sys tèmes hypers ta t iques 77

Chapitre 4

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES RELA-TIVES AUX SYSTÈMES HYPERSTATIQUES

4.1 INTRODUCTION

On a vu que dans le cas des systèmes isostatiques, les composantes de réac-tion et les éléments de réduction dans n'importe quelle section se calculent au moyen des équations d'équilibre de la statique seules. Il importe de bien noter qu’un système dont les réactions peuvent être connues à partir des équations de la statique mais que ces dernières ne permettent pas de déterminer les efforts M, N, T dans toutes les sections, n’est pas un système isostatique (voir § 4.2). Ce cas est illustré par les exemples de la figure 4.1.

Dans une structure isostatique, les liaisons sont strictement suffisantes (en nombre et en nature) pour assurer son équilibre et empêcher tout déplacement ri-gide de la structure (c’est-à-dire un mouvement comme corps rigide). Les condi-tions d’équilibre - entre les réactions et les charges appliquées - suffisent par ailleurs à déterminer les réactions apparaissant dans les appuis. On dit dans ce cas que la structure (isostatique) est statiquement déterminée. Et il n’y a qu’un seul et unique groupe de réactions capable d’équilibrer les charges appliquées (la solution est unique).

CALCUL DES STRUCTURES HYPERSTATIQUES

a) Arc bi-articulé avec tirant

b) Cadre fermé simplement appuyé

Figure 4.1

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Cons idéra t ions généra les re la t i ves aux sys tèmes hypers ta t iques 78

Considérons une structure isostatique (Figure 4.2a). Supprimons la liaison

simple en B et remplaçons-la par une réaction verticale ( ). La structure de-

vient un système libre (mécanisme) pouvant tourner autour de A. Le système de

forces constitué des charges appliquées et de la réaction doit empêcher la ro-

tation autour de A. Cette condition - équilibre de rotation autour de A - permet de

calculer , qui a une valeur particulière. On peut procéder de la même manière

avec l’appui A et déterminer les composantes horizontale et verticale de la réac-tion en A en exprimant l’équilibre de translation horizontale et l’équilibre de ro-tation autour de B. Cet exemple montre que, s’agissant d’une structure isosta-tique, les conditions d’équilibre rendent les réactions déterminées et que ces der-nières ont des valeurs particulières.

Considérons maintenant le système de la figure 4.2b qui a été obtenu en ajou-tant une liaison de moment à l’appui double afin d’empêcher toute rotation de la section extrême A. La nouvelle structure a donc une liaison surabondante par rapport à une structure isostatique. On dit qu’elle est une fois hyperstatique.

Etant donnée une structure hyperstatique, si on supprime toutes les liaisons surabondantes et qu’on les remplace par les réactions correspondantes, on obtient un système isostatique qui reste en équilibre même si on donne des valeurs arbi-traires aux réactions introduites. Dans ce cas, les équations d’équilibre de la sta-tique ne permettent pas de déterminer les réactions. On doit d’abord calculer les réactions des liaisons surabondantes à l’aide de conditions autres que celles ré-gissant l’équilibre du système. Ensuite, on détermine les réactions dans les liai-sons restantes du système rendu isostatique à l’aide des conditions d’équilibre.

Dans le cas de la figure 4.2b par exemple, le système peut être rendu isosta-

tique en supprimant la liaison simple en B. La réaction sera calculée à partir

de la condition de déplacement exprimant que la flèche au point B du système

rendu isostatique, où est considérée comme une force extérieure (Figure

4.2c), doit être nulle :

On voit donc que pour un système hyperstatique la détermination des réac-tions et des éléments de réduction n'est plus possible au moyen des équations d'équilibre seules. Le nombre d’inconnues - composantes de réaction et/ou ef-forts internes - est dans ce cas supérieur au nombre d’équations (linéairement in-dépendantes) fournies par les conditions d’équilibre de la statique.

Le nombre supérieur des inconnues provient comme on l’a vu du fait qu’un système hyperstatique possède des liaisons surabondantes, c’est-à-dire qui sont

CALCUL DES STRUCTURES HYPERSTATIQUES

(a) (b) (c)

Figure 4.2

B B B A A A

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en plus par rapport à un système isostatique. Il est donc nécessaire, pour résoudre le système, de faire intervenir d'autres conditions afin d’obtenir le nombre d'équations qui sont nécessaires à sa détermination complète.

Ces conditions complémentaires peuvent être obtenues en exprimant la conti-nuité de la déformée du système (on tient compte des déformations du système).

4.2 LIAISONS SURABONDANTES

On appelle liaisons surabondantes, les liaisons qu'il faudrait supprimer à un système hyperstatique pour obtenir une structure isostatique (géométriquement stable, qui ne soit pas libre). Leur nombre représente le degré d'hyperstaticité du système.

On peut classer les liaisons surabondantes en deux groupes : les liaisons sur-abondantes extérieures et les liaisons surabondantes intérieures. Les liaisons sur-abondantes extérieures sont celles qui se trouvent dans les appuis (Figure 4.3a).

Les liaisons surabondantes intérieures sont celles qui proviennent de la

conception intérieure du système (Figure 4.3b). Généralement, les structures hy-perstatiques ont des liaisons surabondantes tant à l'extérieur qu'à l'intérieur (Fi-gure 4.3c).

4.3 CALCUL DU DEGRÉ D'HYPERSTATICITÉ

Comme il a été mentionné, le nombre de liaisons surabondantes constitue le degré d'hyperstaticité de la structure. Il existe plusieurs méthodes pour détermi-ner le degré d'hyperstaticité (noté H) ; nous en examinerons deux.

4.3.1 Méthode de la suppression des liaisons

La méthode consiste à supprimer des liaisons jusqu'à ce que la structure de-vienne isostatique indéformable (s'assurer qu'aucune barre ou partie du système ne constitue un mécanisme). Le nombre de liaisons supprimées représente le de-gré d'hyperstaticité (voir exemples figure 4.4).

CALCUL DES STRUCTURES HYPERSTATIQUES

Figure 4.3

(a) (b) (c)

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4.3.2 Méthode des contours fermés

Appelons :

- "c" le nombre de contours de la structure- "a" le nombre d'articulations (y compris les appuis doubles)- "s" le nombre d'appuis simples

Le degré d'hyperstaticité est donné par :

H = 3c - a - 2s

CALCUL DES STRUCTURES HYPERSTATIQUES

Figure 4.4

(h)(g)

(f)(e)(d)

(a) (b) (c)

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Cas des poutres en treillis chargées indirectement

H = b + l - 2n

• b + l - 2n < 0 système déformable• b + l - 2n = 0 système isostatique• b + l - 2n > 0 système hyperstatique

avec :

- "b" nombre de barres- "l" nombre de liaisons dans les appuis (encastrement = 3 ; appui double = 2; appui simple = 1)- "n" nombre de nœuds

4.4 MÉTHODES FONDAMENTALES DE CALCUL DES STRUCTURES HYPERSTATIQUES

Nous avons vu précédemment que pour déterminer les réactions et les élé-ments de réduction des systèmes hyperstatiques, il fallait des équations supplé-mentaires, qui sont obtenues à partir des conditions de continuité de la déformée de la structure ou à partir des conditions d'équilibre statique de la structure défor-mée.

Dans le cadre de l'hypothèse des petites déformations, les efforts sont indé-pendants des déformations dans les structures isostatiques, alors que pour les systèmes hyperstatiques les efforts sont fonctions aussi bien des charges que des déformations de la structure (voir § 3.17, exemple de la poutre continue soumise au seul déplacement de l’un de ses appuis).

En raison de l'interdépendance entre les efforts et les déformations (donc les déplacements), il en résulte deux possibilités générales d'aborder le calcul des structures hyperstatiques, c'est-à-dire soit en s'intéressant aux efforts (dans les liaisons surabondantes) (méthode des forces), soit en s'intéressant aux déplace-ments (méthode des déplacements).

4.4.1 Méthode des forces

Elle est parfois appelée méthode des efforts ou méthode des sollicitations. Avec cette méthode, on prend comme inconnues les forces dans les liaisons sur-abondantes. Les liaisons surabondantes sont supprimées et remplacées par des forces inconnues qu'il faut chercher en premier lieu. La structure initiale (hyper-statique) est transformée en une structure isostatique soumise aux charges exté-rieures de départ et aux forces introduites (les inconnues hyperstatiques).

Les équations supplémentaires qui permettent de déterminer les forces incon-nues sont obtenues en exprimant la "continuité" de la structure déformée dans les liaisons supprimées (surabondantes).

Comme il y a plusieurs possibilités de rendre isostatique un système hyper-statique, il en résulte plusieurs façons de mettre le problème en équations. Pour la simplification des calculs, il y a intérêt à considérer les liaisons surabondantes qui rendent les équations générales de continuité aussi simples que possible.

CALCUL DES STRUCTURES HYPERSTATIQUES

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Cette méthode est essentiellement caractérisée par la création de coupures qui libèrent chacune une liaison surabondante. Chaque liaison supprimée est ensuite remplacée par une force qui joue le même rôle qu'elle.

4.4.2 Méthode des déplacements (ou des déformations)

Avec cette méthode, on prend comme inconnues les déplacements générali-sés (rotations et translations) subis par les nœuds de la structure. Le nombre d'in-connues de cette méthode est égal au nombre de déplacements généralisés pos-sibles des nœuds (les degrés de liberté de la structure), qui est généralement dif-férent du degré d'hyperstaticité.

Les équations supplémentaires sont obtenues en exprimant les conditions d'équilibre statique de la structure déformée.

On verra plus loin que cette méthode est caractérisée par le blocage des nœuds de la structure.

Conclusion :

La méthode des déplacements est généralement plus intéressante quand le de-gré d'hyperstaticité devient important. La méthode des forces est efficace quand le nombre de liaisons surabondantes (degré d’hyperstaticité) n'est pas très élevé. Mais en définitive le choix d'une méthode dépend plus des affinités et des apti-tudes de chacun.

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