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PCSI Lefèvre 2014-‐2015
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CHAPITRE 15 : PRECIPITATION Introduction : mise en solution dans l’eau
La mise en solution d’un composé A dans l’eau aboutit à la prise en charge de l’espèce A par les molécules d’eau. Il existe deux principaux cas :
• Cas des composés moléculaires : la molécule A conserve son intégrité et les molécules d’eau s’organisent autour de A en fonction de leur polarité et proticité (solvatation). Exemples : mise en solution de dichlore gazeux dans l’eau : Cl2(g) = Cl2(aq) mise en solution d’éthanol liquide dans l’eau : C2H5OH(l) = C2H5OH(aq) Mise en solution du sucre (saccharose) C12H22O11 dans l’eau : C12H22O11(s) = C12H22O11 (aq)
• Cas des solides ioniques : un solide ionique est un solide électriquement neutre constitué d’anions et de cations, dont la cohésion est assurée par l’interaction coulombienne.
Nous avons vu dans le chapitre 4 « forces intermoléculaires » que les solides ioniques peuvent se dissocier en leurs ions constitutifs dans l’eau qui est un solvant dispersant (εr élevé) et solvatant (moment dipolaire µ élevé).
Grâce au caractère dispersant et solvatant de l’eau, la solubilité des solides ioniques est grande en général. Exemple : s(NaCl, eau, 15°C) = 357g.L-‐1 Dans la suite, nous allons principalement nous intéresser à la dissolution/précipitation des sels ioniques peu solubles (ceux pour lesquelles la saturation est très vite atteinte). On observe alors la formation d’un précipité (solide non dissous).
Molécule de saccharose
Solution aqueuse de saccharose
Dissolution de NaCl
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I. DISSOLUTION D’UN SOLIDE IONIQUE DANS L’EAU 1. Saturation et solubilté
La dissolution est un phénomène limité. Définition : La quantité maximale d’un soluté que l’on peut dissoudre dans 1L de solvant à une température donnée est appelée solubilité, notée s. Elle s’exprime en mol.L-‐1 (ou en g.L-‐1). Elle dépend du solvant, du solide et de la température. Exemple d’application : s(acide benzoïque (s) , eau, 25°C)=2,4 g.L-‐1 à On peut dissoudre jusqu’à 2,4 g d’acide benzoïque solide dans 1L d’eau à 25°C. On a Macide benzoqïque=60g.mol-‐1. Que vaut s en mol.L-‐1 à 25°C ?
Une solution est dite saturée en composé solide A(s) si elle ne peut plus dissoudre davantage de ce composé. On atteint la saturation, c’est-‐à-‐dire la limite de solubilité, lorsqu’apparaît le premier grain de solide en solution. À partir de ce moment, toute nouvelle quantité de solide ajoutée n’est pas dissoute et se dépose au fond.
On peut alors prévoir le résultat des expériences suivantes :
Dans un volume V de solvant, la quantité maximale que l’on peut dissoudre est nmax=s.V Exemple : quelle est la quantité maximale d’acide benzoïque que l’on peut dissoudre dans 200mL ?
2. Produit de solubilité d’un solide ionique peu soluble
Une solution saturée en composé ionique solide AxBy(s) est siège de l’équilibre de dissolution : AxBy(s) = x Ap+(aq) + y Bq-‐(aq)
où il y a coexistence du solide et des ions solvatés.
Cet équilibre est caractérisé par une constante d’équilibre, notée Ks et appelée produit de solubilité :
Comme toute constante de réaction, Ks(T) dépend uniquement de la température.
Expérience 1 :
Expérience 2 :
Expérience 3 :
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Attention : le système est dans un état d’équilibre et la relation de Guldberg et Waage est vérifiée uniquement si le solide est présent dans la solution, donc si la solution est saturée.
Exemple 1 : Soit une solution saturée de chlorure d’argent AgCl(s). Equation de dissolution : Lorsque la solution est saturée, la réaction de dissolution est à l’équilibre, donc : Exemple 2 : Soit une solution saturée de phosphate d’argent Ag3PO4(s). Equation de dissolution :
Exemples de Ks et pKs à 25 °C. Composé Ks pKs = -‐log(Ks)
AgCl 2,0.10-‐10 9,7 AgBr 5,0.10-‐13 12,3 AgI 6,3.10-‐17 16,2
Ag2CrO4 1,0.10-‐12 12,0 Fe(OH)2 7,9.10-‐16 15,1 Ag3PO4 1,3.10-‐20 19,9 Fe(OH)3 1,0.10-‐38 38,0 PbI2 6,3.10-‐9 8,2 PbS 2,5.10-‐27 26,6 HgI2 5,0.10-‐29 28,3 HgS 1,0.10-‐52 52
Lorsque la solution est saturée, la réaction de dissolution est à l’équilibre, donc :
3. Lien entre produit de solubilité Ks et solubilité s dans l’eau pure La solubilité d’un solide ionique est liée au produit de solubilité Ks. Exemple 1 : calculons la solubilité du chlorure d’argent AgCl dans l’eau pure à 25°C. Donnée : à 25°C, Ks(AgCl) = 2,0.10-‐10 Dès qu’un solide est présent, faire les tableaux d’avancement en mol (ou à la rigueur en mol.L-‐1, mais dans ce cas ne pas donner de valeur pour le solide (écrire « solide »))
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Exemple 2 : calculons la solubilité du chromate d’argent Ag2CrO4(s) dans l’eau pure à 25°C. Donnée : à 25 °C, Ks(Ag2CrO4) = 1,0.10-‐12.
La relation entre Ks et s est à redémontrer à chaque fois. Remarque importante : Ks(AgCl) > Ks(Ag2CrO4) mais s(AgCl) < s(Ag2CrO4) donc Ag2CrO4 est plus soluble que AgCl. Conclusion : de deux composés, le plus soluble n’est pas toujours celui qui a le plus grand Ks car dépendance à la stoechiométrie !
4. Condition de précipitation
Objectif : prévoir une éventuelle précipitation suite à la mise en solution d’espèces ioniques, c’est-‐à-‐dire savoir si une solution sera saturée ou non. Exemple : Considérons une solution contenant des ions Pb2+ et I-‐ aux concentrations initiales [Pb2+]0 et [I-‐]0. Le précipité PbI2 peut-‐il se former ? Donnée : pKs(PbI2)=8,2
Méthode : 1. Ecrire l’équation de la réaction de précipitation susceptible de se produire :
2. Déterminer la valeur numérique de sa constante d’équilibre (à l’aide des données de l’énoncé). 3. Calculer Qinitial :
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4. Comparer Qinitial et K° : 3 situations sont possibles : • Qinitial < K° : le système évolue dans le sens direct : le solide précipite. Le système évolue jusqu’à ce que Qeq=K°
(relation de Guldberg et Waage). L’équilibre est alors établi. La solution est saturée. • Qinitial= K° : Le système n’évolue pas, la solution est juste saturée (limite d’apparition du premier grain de
solide). • Qinitial > K° : (réaction dans le sens indirect impossible, car il n’y a pas de solide au départ) L’équilibre
hétérogène ne peut pas être établi. Le précipité n’existe pas. Les ions sont libres en solution. La solution n’est pas saturée.
Remarque : dès lors qu’une solution est saturée, il y a équilibre donc Qeq=K°. Application : [Pb2+]0=4.10-‐2 mol.L-‐1 ; [I-‐]0=3.10-‐2 mol.L-‐1. Y’a-‐t-‐il apparition d’un précipité ?
II. FACTEURS INFLUENÇANT LA SOLUBILITE 1. Effet de la température
Cas des solides En général, la solubilité des solides augmente quand la température augmente
Exemple : s(acide benzoïque, eau, 10 °C) = 1,4 g.L-‐1 s(acide benzoïque, eau, 25 °C) = 2,4 g.L-‐1 Remarque : ceci n’est pas vrai pour le calcaire CaCO3(s) : sa solubilité diminue lorsque la température augmente. C’est pourquoi le calcaire se dépose plus facilement sur les tuyaux d’eau chaude (saturation plus vite atteinte dans l’eau chaude).
Effet de la température sur la solubilité dans l’eau de quelques
solides.
Cas des gaz
La solubilité des gaz diminue quand la température augmente.
Ainsi, la concentration en dioxygène O2(g) dans l’eau froide en équilibre avec l’air est plus importante que dans l’eau chaude.
Solubilité dans l’eau pour différents gaz pour une pression extérieure de 1 bar
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2. Effet d’ion commun
On parle d’effet d’ion commun lorsqu’un ion est commun à plusieurs espèces dissoutes dans la même solution.
Exemple : On a calculé au I.3 la solubilité de AgCl dans l’eau pure à 25°C (à 25°C, pKs (AgCl) = 9,7). On a trouvé : Que devient la solubilité dans une solution de chlorure de sodium NaCl (infiniment soluble) à c = 0,1 mol.L-‐1 ?
L’effet d’ion commun diminue la solubilité.
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3. Influence de la complexation Un précipité peut être dissous par la formation d’un complexe.
Exercice : Soit une solution saturée de chlorure d’argent AgCl. Un précipité blanc est présent. Lorsque l’on ajoute goutte à goutte une solution concentrée d’ammoniac, le précipité disparaît.
1) Expliquer qualitativement ce phénomène. On place n0 = 1,0.10-‐3 mol de chlorure d’argent dans V = 0,50 L d’eau pure. On ajoute sans dilution de l’ammoniac à cette solution.
2) Ecrire la réaction de dissolution du précipité par formation du complexe [Ag(NH3)2]+. Calculer sa constante. 3) Quelle quantité n d’ammoniac faut-‐il ajouter pour que le précipité soit entièrement dissous ?
Données : constante de formation globale de [Ag(NH3)2]+ : β2 = 107,2 ; pKs(AgCl) = 9,7.
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4. Influence du pH sur la précipitation
Exercice 1 : Dissolution d’un précipité par ajout d’acide On considère une solution saturée d’acétate d’argent (I) AgCH3COO. Qualitativement : quelle est l’influence du pH sur la solubilité ? Quantitativement : à quel pH doit on amener 100 mL de solution pour dissoudre 100 mmol de précipité ? Données : pKS(AgCH3COO) = 2,7 ; pKA(CH3COOH/CH3COO-‐) = 4,8
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Exercice 2 : Précipitation des hydroxydes métalliques De très nombreux cations métalliques Mn+ comme Al3+, Fe2+, Fe3+, Mg2+… donnent en présence d’ions hydroxydes HO-‐
des hydroxydes métalliques M(OH)n(s) selon : Mn+(aq) + n HO—(aq) = M(OH)n(s)
Exemple : Fe2+(aq) + 2 HO—(aq) = Fe(OH)2(s) K° = 1/KS
L’existence ou non de ce type de précipité dépend du pH. Soit une solution de Fe2+ de concentration [Fe2+]0 = c0 = 10-‐2 mol.L-‐1. Déterminer la valeur du pH de la solution lors de l’apparition du premier grain de solide (donnée : pKs(Fe(OH)2) = 15).
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III. DIAGRAMME D’EXISTENCE D’UN PRECIPITE
Un précipité étant seul dans sa phase, la notion de prédominance n’a pas de sens : un précipité existe ou n’existe pas.
À la frontière du domaine d’existence du solide, il existe un unique grain de solide et l’espèce en solution est encore à sa concentration initiale.
1. Construction du diagramme d’existence d’un solide
Exemple : Soit une solution de nitrate d’argent (Ag+, NO3-‐) à cT=
1,0.10-‐1 mol.L-‐1. Remarque : s(AgNO3, eau, 25°C)=2340 g.L-‐1 : considéré comme totalement soluble. On ajoute du chlorure de potassium (K+, Cl-‐) (totalement soluble). Tracer le diagramme d’existence du chlorure d’argent AgCl, c’est à dire le domaine de pCl=-‐log[Cl-‐] pour lequel le précipité existe, pour une concentration totale en Ag+ cT= 1,0.10-‐1 mol.L-‐1 (appelée « concentration de tracé ») Donnée : pKs(AgCl)=9,7.
Construction d’un diagramme d’existence (Attention : il faut choisir une concentration de tracé)
1) Tracé qualitatif du diagramme d’existence en fonction de pCl. 2) Recherche de la valeur de pClfrontière :
a) Ecriture du bilan de la réaction permettant de passer de AgCl(s) à Ag+ et détermination de sa constante d’équilibre.
b) Ecriture de la relation de Guldberg et Waage associée à cette réaction à l’équilibre. Attention : cet équilibre n’est établi que dans le domaine d’existence du précipité (à partir de la frontière = apparition du premier grain de solide).
c) Utilisation de la convention à la frontière : un seul grain de AgCl existe, [Ag+]frontière=cT.
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Remarque importante La valeur de pCl à la frontière dépend de CT et doit être systématiquement calculée.
Ainsi, si CT = 0,010 mol·∙L−1 alors pCl = 7,7 à la frontière. Remarque 2 : Dans le domaine ou AgCl(s) existe, la solution est saturée donc l’équilibre de dissolution est établi :
Relation de Guldberg et Waage : Qeq=Ks. Donc 𝐴𝑔! !" . 𝐶𝑙! !" = 𝐾! ó 𝐴𝑔! !" =!!
!"! !"= !!
!"!!!"
Exemple : Si pCl=2, [Ag+]eq =
2. Courbes de distribution On peut également tracer le diagramme de répartition des espèces en fonction de pCl. On y visualise la limite d’existence du précipité AgCl pour une concentration initiale C0 = 0, 10 mol·∙L−1 en ion Ag+ ainsi que le pourcentage de cet ion dans le bécher en fonction de pCl.
3. Cas des hydroxydes métalliques Tracer le diagramme d’existence de l’hydroxyde de magnésium Mg(OH)2(s) en fonction du pH pour une concentration totale en magnésium cT= 1,0.10-‐1 mol.L-‐1. Donnée : pKs(Mg(OH)2(s))=11
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4. Etude d’un hydroxyde amphotère
Définition : Certains hydroxydes métalliques M(OH)Z peuvent être dissous par la formation d’un complexe : 𝑴(𝑶𝑯)𝒁!𝒏𝒏! :
M(OH)Z(s) + n HO-‐(aq) = 𝑴(𝑶𝑯)𝒁!𝒏𝒏!
(𝒂𝒒)
Ces hydroxydes sont dits amphotères.
Exemple : Al(OH)3(s) + HO-‐(aq) = 𝐴𝑙(𝑂𝐻)!!(!")
Remarque : Pourquoi parle-‐t-‐on d’hydroxyde amphotère ? Conséquence : Si à une solution de Al3+ on ajoute progressivement de la soude, alors à partir d’un certain pH, Al(OH)3(s) précipite, puis il se redissout par formation du complexe 𝐀𝐥(𝐎𝐇)𝟒!(𝐚𝐪).
Exercice : Tracer le diagramme d’existence du solide Al(OH)3 en fonction du pH pour une concentration totale en aluminium cT=10-‐2 mol.L-‐1.
Données : pKs(Al(OH)3(s))= 32 ; Al(OH)3(s) + HO-‐(aq) = [Al(OH)4]-‐(aq) : K°=102.
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Pour aller plus loin: Voici le tracé de log(caluminium dissous) = log([Al3+]+[Al(OH)4-‐]) en fonction du pH pour une concentration totale en aluminium cT=10-‐2 mol.L-‐1.