19
Chapitre 3 Equations diérentielles ordinaires 3.1 Introduction Qu’est-ce que c’est une équation diérentielle ordinaire ? C’est une équation définie en termes d’une variable t 2 I , I intervalle réel, une fonction inconnue y : I 7! R n et ses dérivées par rapport à t. En formule : F (t, y (t),y 0(t),y 00(t), ··· )=0. (1) Une fonction y qui vérifie F (t, y (t),y 0(t),y 00(t), ··· )=0 s’appelle solu- tion de l’EDO. Une EDO est d’ordre k si elle contient les dérivées de y jusqu’à l’ordre k. Exemple 14 Le équations : y 0(t) - t = 0; y 2 0(t) - y (t) = 0; e y 2 0(t) - t 2 + y = 0; sont équation diérentielles ordinaires. Si n =1 on parle d’équation diérentielle scalaire. Si n> 1 on parle d’equation diérentielle vectorielle. Par exemple l’équation pour l’incon- nue y (t)=(y 1 (t),y 2 (t))) 2 R 2 : y 0(t)= ||y || 2 y 39

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Chapitre 3

Equations différentielles ordinaires

3.1 Introduction

Qu’est-ce que c’est une équation différentielle ordinaire ? C’est uneéquation définie en termes d’une variable t 2 I , I intervalle réel, unefonction inconnue y : I 7! Rn et ses dérivées par rapport à t. En formule :

F(t, y(t), y0(t), y00(t), · · · ) = 0. (1)

Une fonction y qui vérifie F(t, y(t), y0(t), y00(t), · · · ) = 0 s’appelle solu-tion de l’EDO.Une EDO est d’ordre k si elle contient les dérivées de y jusqu’à l’ordre k.

Exemple 14 Le équations :

y0(t)� t = 0;

y20(t)� y(t) = 0;

ey20(t) � t2 + y = 0;

sont équation différentielles ordinaires.

Si n = 1 on parle d’équation différentielle scalaire. Si n > 1 on parled’equation différentielle vectorielle. Par exemple l’équation pour l’incon-nue y(t) = (y1(t), y2(t))) 2 R2 :

y0(t) = ||y||2y

39

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40 3.2. Existence et unicité locales pour le problème de Cauchy

est un premier exemple simple d’équation vectorielle.

Exemple 15 L’EDO d’ordre 2 la plus célèbre est la deuxième loi de New-ton :

F (x) = mx00(t)qui décrit per exemple la dynamique d’un point matérielle soumis à larésultante des forces F .

On peut écrire la loi de Newton en termes du système :⇢

x0(t) = vv0(t) =

1m

F (x)

de deux équations d’ordre 1. En general une équation scalaire d’ordre kpeut être écrite comme un système de k équations d’ordre 1.Dans la suite on va considerer des équations différentielles d’ordre k sousla forme normale :

y(k) = f(t, y, · · · , y(k�1)) k 2 N

3.2 Existence et unicité locales pour le problème deCauchy

Soit I un intervalle, f : I ⇥ Rn 7! Rn. On considere l’EDO :

y0(t) = f(t, y(t))

On peut penser à cette équation comme un phénomène évolutif en temps( la variable t ). Comme le problème de déterminer toutes les primitivesd’une fonction donnée, cette problème admet en genéral un nombre in-fini de solutions. Pour choisir une solution particulière on impose unecondition initiale, c’est à dire

y(t0) = y0,

ce qui veut dire que à l’instant initial t0 la loi evolutive vaut y0.

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Chapter 3: Equations différentielles ordinaires 41

Définition 3.2.1 [Problème de Cauchy] On appelle problème de Cauchyle problème de trouver une intervalle I tel que t0 2 I et une fonctiony : I 7! Rn qui vérifie :

⇢y0(t) = f(t, y(t)) t 2 Iy(t0) = y0, t0 2 I, y0 2 Rn

Première question : sous quelles conditions existe-t-il une solution du pro-blème de Cauchy ? Deuxième question : cette solution est-elle unique ?Le théorème de Cauchy- Lipschitz donne une réponse à ces deux ques-tions. Si f satisfait une condition supplémentaire, alors l’existence etl’unicité d’une solution sont assurées localement, c’est à dire sur un (pe-tit) intervalle autour de t0.La condition supplémentaire qu’on demande pour la fonction f est d’êtrelipschitzienne par rapport à la variable y dans un voisinage du pointinitial y0.

Définition 3.2.2 [ Fonction localement lipschitzienne ] Soient I un in-tervalle, D un ouvert de Rn , f : I ⇥D 7! Rn. Soient (t0, y0) 2 I ⇥D.Soit J ⇢ D un voisinage du point y0. On dit que f est lipschitziennepar rapport à la variable y dans le voisinage J si il existe une constanteL > 0 et il existe un voisinage U ⇢ I du point t0 tels que :

||f(t, y1(t))� f(t, y2(t))|| L||y1(t)� y2(t)||

pour y1(t), y2(t) 2 J, t 2 U .

Exemple 16 La fonction f : R 7! R+ :

f(y) =py

n’est pas lipschitzienne au voisinage de y = 0. En fait :

lim

(y1,y2)!(0,0)

|f(y1)� f(y2)||y1 � y2|

= 1

et par conséquence il ne peut pas exister aucune constante L vérifiant lacondition de Lipschitz. Cependant f est lipschitzienne sur tout intervalle

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42 3.2. Existence et unicité locales pour le problème de Cauchy

[a, b] avec b > a > 0. En fait pout tout y1(t), y2(t) 2 [a, b] on a :

|p(y1)�

p(y2)|

|y1 � y2|=

1

|p

(y1)�p(y2)|

1

2

p(a)

Et donc la condition de Lipschitz est vérifiée avec L =

1

2p

(a).

Si une fonction (d’une variable) est dérivable au voisinage d’un point etla dérivée est bornée dans ce voisinage, alors la fonction est localementlipschitzienne. La réciproque est fausse : il y a des fonctions lipschitziennesqui ne sont pas dérivables. Si une fonction est de classe C1 alors elle estlocalement lipschitzienne.

Exemple 17 La fonction f : R 7! R+ :

f(y) = |y|

est lipschitzienne au voisinage de tout y 2 R. En fait pour tout y1, y2 2 Ron a :

|f(y1)� f(y2)| = ||y1|� |y2||.La condition de Lipschitz est donc vérifiée avec L = 1 :

||y1|� |y2|| |y1 � y2|.

Noter que la fonction valeur absolue n’est pas dérivable en y = 0. Ce-pendant elle est lipshcitizienne.

Théorème 3.2.3 [ Cauchy - Lipschitz ] Soient I un intervalle, D unouvert de Rn , f : I ⇥ D 7! Rn. Soient (t0, y0) 2 I ⇥ D. Si f estcontinue et lipschitzienne par rapport à sa deuxième variable dans unvoisinage du point y0, alors le problème de Cauchy :

⇢y0(t) = f(t, y(t)) t 2 Iy(t0) = y0, t0 2 I, y0 2 D

admet une unique solution y définie dans un petit voisinage du point t0.De plus la solution est de classe C1 dans ce voisinage.

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Chapter 3: Equations différentielles ordinaires 43

Grâce au théorème de Cauchy-Lipschitz, on sait que au moins locale-ment et sous certaines conditions, le problème de Cauchy est bien posé.Essayons maintenant de calculer quelque solution d’EDO très simples.

Exemple 18 [ Modèle de Malthus pour la croissance des populations] Undes premières et plus simples modèles pour l’évolution en temps des po-pulations est le modèle de Malthus du 1798. On considère une fonctiont 7! y(t) qui décrit le nombre d’individus à l’instant t. Si l’on supposeque le rapport entre le taux de croissance de la population et la populationmême soit proportionnel au temps passé l’on trouve :

y(t+�t)

y(t)= k�t k 2 R+

et si on fait la limite pour �t ! 0 l’on trouve l’équation différentielle :

y0(t) = ky(t) k 2 R+

La fonction f(t, y) = ky(t) est bien continue et lipschitzienne par rap-port à la variable y pour toute condition initiale (t0, y0). Le théorème deCauchy-Lipschitz assure que pour toute condition initiale (t0, y0) il existeune unique solution du problème :

⇢y0(t) = ky(t) t 2 Iy(t0) = y0 y0 2 J

On observe que si y0 = 0 alors la (seule) solution du problème est lafonction costante y(t) = y0 = 0. Si y0 6= 0 on peut chercher cette solutionpar séparation des variables. Cette méthode s’applique lorsque le termef(t, y(t)) est de la forme :

f(t, y(t)) = a(t)b(y(t))

pour a, b fonction donnés. Ici a(t) = 1 et b(y(t)) = ky(t). Si y0 6= 0,on peut supposer que y(t) 6= 0 ( au voisinage de y0) et diviser par y(t)l’équation différentielle :

y0(t)y(t)

= k

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44 3.3. EDO linéaires

On intégre entre t0 et t :Z

t

t0

y0(t)y(t)

dt =

Zt

t0

kdt

ln |y(t)|� ln |y0| = k(t� t0)

et on explicite la solution y(t) en fonction de t et de la condition initiale :

y(t) = y0ek(t�t0)

On remarque que la solution est définie pour tout t 2 R.

3.3 EDO linéaires

Soient I un intervalle, D un ouvert de Rn , f : I ⇥ D 7! Rn. On ditque f est linéaire par rapport à la variable y si pour tout t 2 I fixé l’ona :

f(t,�1y1(t) + �2y2(t)) = �1f(t, y1(t)) + �2f(t, y2(t))

pour tout y1(t), y2(t) 2 D, �1,�2 2 R. Si f est linéaire alors il existeune matrice A : I 7! M

n

(R) telle que f(t, y(t)) = A(t)y(t). On appelleéquation différentielle linéaire (du premier ordre ) toute équation de laforme :

y0(t) = A(t)y(t)

oú y : I 7! Rn est une fonction inconnue et A : I 7! Mn

(R) est unematrice.

Proposition 3.3.1 Soient I un intervalle, D un ouvert de Rn, A :

I 7! Mn

(R) une matrice. Soient (t0, y0) 2 I ⇥D. Si A est continue surI alors pour tout (t0, y0) 2 I⇥D il existe une unique solution y : I 7! Rn

du problème de Cauchy :⇢

y0(t) = A(t)y(t) t 2 Iy(t0) = y0 y0 2 D

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Chapter 3: Equations différentielles ordinaires 45

Ce résultat est une simple conséquence du théorème de Cauchy-Lipschitz.Le prochaine théorème donne une caractérisation des solutions d’uneéquation différentielle linéaire.

Théorème 3.3.1 Soient I un intervalle et A : I 7! Mn

(R) une matricecontinue. Alors l’ensemble des solutions de l’équation différentielle :

y0(t) = A(t)y(t)

est une espace vectoriel de dimension n. Notamment il existe n fonctionsy(1)(t), · · · , y(n)(t) telles que :

— y(i)(t) est solution de l’EDO pour tout i = 1, · · · , n ;

— les y(i)(t) sont linéairement indépendants :nX

i=1

ci

y(i)(t) = 0 ) ci

= 0 8i, ci

2 R

— si y(t) est une solution de l’EDO et y(t) 6= y(i)(t) pour tout i =

1, · · · , n alors y(t) il existe k1, · · · , kn 2 R tels que :

y(t) =nX

i=1

ci

y(i)(t)

3.4 EDO linéaires à coefficients constants

On cherche à résoudre le problème de Cauchy :⇢

y0(t) = Ay(t)t 2 I

y(t0) = y0 y0 2 D(1)

dont la matrice A 2 Mn

(R) ne dépend pas de t. Par analogie avec le casscalaire ( modèle de Malthus ) on a la tentation d’affirmer que la solutiondu problème est donné par y : I 7! Rn ainsi définie :

y(t) = eA(t�t0)y0 (2)

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46 3.4. EDO linéaires à coefficients constants

Dans l’expression de la solution on voit apparaître l’exponentielle d’unematrice A. Qu’est-ce c’est l’exponentielle d’une matrice ? Formellementelle est définie comme la matrice égale à

eA =

+1X

k=0

Ak

k!

Avec un peu de théorie d’operateurs dans les espaces de Banach on pour-rait montrer que cette série est convergente. On appelle sa limite ex-ponentielle de la matrice A. En supposant d’avoir donné un sens à lanotion d’exponentielle d’une matrice, on pourrait aussi démontrer que 2est l’unique solution du problème 1. En pratique, pour calculer la solu-tion d’un problème de type 1 il faut calculer l’exponentielle de la matriceassociée au problème. Si cette matrice est diagonalisable alors le calculde l’exponentielle est plutôt simple.

Proposition 3.4.1 [ Exponentielle d’une matrice diagonalisable dansR ] Soit A 2 M

n

(R) une matrice diagonalisable dans R. Alors il existen valeurs propres �1, · · · ,�n

2 R et une matrice C 2 Mn

(R) inversibletels que :

A = C diag (�1, · · · ,�n

)C�1

Sous ces hypothèse on peut montrer que l’exponentielle de la matrice A

est simplement :

eA = C diag (e�1, · · · , e�n

)C�1

Ainsi, si A est diagonalisable, le calcul de la solution du problème 1 reposesur le calcul des valeurs propres (et vecteurs propres ) de la matrice A.Si A n’est pas diagonalisable, le calcul repose sur sa décomposition deJordan.

Exemple 19 On cherche à calculer l’exponentielle de la matrice :

A =

✓5 4

1 2

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Chapter 3: Equations différentielles ordinaires 47

Est-elle diagonalisable (dans R) ? On cherche les valeurs propres :

p(�) = det(A� �I) = y2 � 7y + 6 = 0 ssi � = 1,� = 6.

Elle est bien diagonalisable. On cherche les vecteurs propres v et w so-lutions des équations :

Av = v et Aw = 6w.

Un simple calcul conduit à v = (1 � 1) et w = (4 1). Ainsi :

A =

1

5

✓1 4

�1 1

◆✓1 0

0 6

◆✓1 �4

1 1

eA =

1

5

✓1 4

�1 1

◆✓e 0

0 e6

◆✓1 �4

1 1

◆=

1

5

✓e+ 4e6 �4e+ 4e6

�e+ e6 4e+ e6

Exemple 20 On cherche la solution t 7! y(t) = (y1(t), y2(t)) du pro-blème : ⇢

y10(t) = y1(t) + 2y2(t) , y1(t0) = y10y20(t) = 2y1(t) + y2(t) , y2(t0) = y20

Ce problème est de la forme 1, avec :

A =

✓1 2

2 1

◆, y0 =

✓y10y20

Tout d’abord on calcule l’exponentielle de A. On cherche les valeurspropres :

p(�) = det(A� �I) = �2 � 2�� 3 = 0 ssi � = �1,� = 3

On cherche les vecteurs propres v et w solutions des équations :

Av = �v et Aw = 3w

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48 3.4. EDO linéaires à coefficients constants

Un simple calcul conduit à v = (1 � 1) et w = (1 1). Ainsi :

eAt =1

2

✓1 1

�1 1

◆✓e�t

0

0 e3t

◆✓1 �1

1 1

◆=

1

2

✓e�t

+ e3t �e�t

+ e3t

�e�t

+ e3t e�t

+ e3t

La solution y définie pour tout t 2 R est donnée par :

y(t) =

✓y1(t)y2(t)

◆= eA(t�t0)

✓y01y02

◆=

1

2

✓(y10 � y20)e

�(t�t0)+ (y10 + y20)e

3(t�t0)

(�y10 + y20)e�(t�t0)

+ (y10 + y20)e3(t�t0)

Et si les valeurs propres de la matrice du système sont des nombrescomplexes ? On cherche à diagonaliser A dans C, c’est à dire on chercheune matrice inversible C 2 M

n

(C) et une matrice diagonale ⇤ 2 Mn

(C)tels que :

A = C⇤C�1.

et on calcule eA avec la strategie usuelle. Même si les calculs reposentsur les nombre complexes, la matrice eA sera toujours une matrice denombres réels. Sauriez-vous expliquer pourquoi ?

Exemple 21 [ Exponentielle d’une matrice réelle dans C ] On cherche àcalculer l’exponentielle de la matrice :

A =

✓↵ ��� ↵

avec ↵, � 2 R,↵, � 6= 0. On cherche les valeurs propres :

p(�) = det(A� �I) = �2 � 2↵�+ �2= 0 ssi � = ↵ + i�,� = ↵� i�

On appelle � = ↵+ i� et � = ↵� i� les valeurs propres (complexes) dela matrice A. On cherche les vecteurs propres v et w solutions :

Av = �v et Aw = �w

Un simple calcul conduit à v = (1 � i) et w = (1 i). Ainsi :

eA =

1(�i)

2i(�i)

✓1 1

�i i

◆✓e� 0

0 e�

◆✓i �1

i 1

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Chapter 3: Equations différentielles ordinaires 49

Pour tout t 2 R :

eAt =1

2

✓1 1

�i i

◆✓e�t 0

0 e�t

◆✓1 i1 �i

◆=

e

�t+e

�t

2i(e�t�e

�t)

2�i(e�t+e

�t)

2e

�t+e

�t

2

!.

Pour tout x 2 R on a les formules :

cos x =

eix + e�ix

2

, sin x =

eix � e�ix

2i.

A l’aide de ces formules on trouve :

eAt =

e

(↵+i�)t+e

(↵�i�)t

2i(e(↵+i�)t�e

(↵�i�)t)

2�i(e(↵+i�)t+e

(↵�i�)t

2e

(↵+i�)t+e

(↵�i�)t

2

!= e↵t

✓cos(�t) � sin(�t)

sin(�t) cos(�t)

◆.

ce qui est une matrice à coefficients réels !

Exemple 22 [ Exemple 7 bis ] Reprenons la matrice A définie dans l’exempleprécédent :

A =

✓↵ ��

� ↵

avec ↵, � 2 R,↵, � 6= 0. On peut calculer eA sans faire les calculs com-plexes. La matrice A admet la décomposition :

A = ↵I + �J , I =

✓1 0

0 1

◆, J =

✓0 �1

1 0

Dés que IJ = JI on a la suivante propriété (croyez-moi) :

eAt

= e↵It+�Jt

= e↵Ite�Jt

IMPORTANT : cette propriété c’est pas vrai si IJ 6= JI ( rappel : engénéral le produit matriciel n’est pas commutatif !). La matrice ↵I estdiagonale et sa exponentielle est simplement

e↵It = e↵t✓1 0

0 1

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50 3.4. EDO linéaires à coefficients constants

Essayons de calculer l’exponentielle de la matrice �Jt :

e�Jt =+1X

k=0

Jk

(�t)k

k!

Comment sont faites les puissances de la matrice J ? Vérifiez vous-mêmes que :

J (2k)= (�1)

kI et J (2k+1)= (�1)

kJ k 2 N

Ainsi on trouve :

e�Jt =

+1X

k=0

J2k(�t)2k

2k!+

+1X

k=0

J2k+1(�t)2k+1

(2k + 1)!

e�Jt = I

+1X

k=0

(�1)

k

(�t)2k

2k!+ J

+1X

k=0

(�1)

k

(�t)2k+1

(2k + 1)!

Rappelons que ces deux dernières séries (réelles) sont convergentes et seslimites sont bien connues :

+1X

k=0

(�1)

k

(�t)2k

2k!= cos(�t)

+1X

k=0

(�1)

k

(�t)2k+1

(2k + 1)!

= sin(�t)

Ainsi on trouve :

e�Jt = cos(�t)I + sin(�t)J =

✓cos(�) � sin(�)sin(�) cos(�)

◆.

Finalement on peut calculer eAt et retrouver le résultat attendu :

eAt

= e↵tIe�Jt = e↵t✓cos(�t) � sin(�t)sin(�t) cos(�t)

◆.

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Chapter 3: Equations différentielles ordinaires 51

3.5 EDO linéaires à coefficients constants non ho-mogènes

On cherche à résoudre le problème de Cauchy :⇢

y0(t) = Ay(t) + B(t)t 2 Iy(t0) = y0 y0 2 D

(1)

avec I intervalle,A 2 Mn

(R), B : I 7! Rn continue, y : I 7! Rn, y0 2 Rn.On appelle équation homogène associée à l’équation y0(t) = Ay(t)+B(t)l’équation

y0(t) = Ay(t)

oú le second membre B(t) est nul. On appelle équation non homogènel’équation y0(t) = Ay(t) + B(t) avec B(t) non nul. Toute solution del’équation différentielle non homogène s’écrit comme somme de la solu-tion générale de l’équation homogène plus une solution particulière del’équation non homogène :

y(t) = yh

(t) + yp

(t).

La solution de 1 qui vérifie la condition initiale y(t0) = y0 s’écrit sous laforme :

y(t) = eA(t�t0)y0 +

Zt

0eA(t�s)B(s)ds.

Le première terme est la bien connue solution du problème de Cauchyhomogène. Le deuxième terme est une solution particulière de l’équationnon homogène.

Exemple 23 Cherchons à résoudre problème de Cauchy linéaire du pre-mière ordre non homogène :

⇢y10(t) = y1(t) + e�t , y1(0) = 1

y20(t) = �y2(t)� 2e�2t , y2(0) = 1

Si l’on pose Y (t) = (y1(t), y2(t)) alors le problème de Cauchy s’écrit sous

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52 3.6. EDO linéaires à coefficients constants d’ordre 2 homogènes

forme matricielle Y 0(t) = AY (t) + B(t), Y (0) = Y0, avec :

A =

✓1 0

0 �1

◆, Y0 =

✓1

1

◆, B(t) =

✓e�t

�2e�2t

◆,

Dès que la matrice A est diagonale, l’exponentielle eAt est simplement :

eAt

=

✓et 0

0 e�t

◆.

Ainsi la solution du problème homogène est :

Yh

(t) = eA(t)Y0 =

✓et

e�t

◆.

Calculons maintenant le terme :Z

t

0eA(t�s)B(s)ds.

eA(t� s)B(s) =

✓et�s

0

0 e�(t�s)

◆✓e�s

�2e�2s

◆=

✓et�2s

�2e�t�s

Zt

0eA(t�s)B(s)ds =

Rt

0 et�2s dsR

t

0 �2e�t�s ds

!=

✓�1

2et

(e�2t � 1)

2e�t

(e�t � 1)

La solution du problème de Cauchy est :

Y (t) =

✓et � 1

2et

(e�2t � 1)

e�t

+ 2e�t

(e�t � 1)

3.6 EDO linéaires à coefficients constants d’ordre 2homogènes

Considérons l’équation différentielle d’ordre 2 homogène :

y00(t) + a1y0(t) + a0y(t) = 0 (1)

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Chapter 3: Equations différentielles ordinaires 53

oú I est une intervalle, y : I 7! R, a1, a0 2 R. On sait que l’espace dessolutions de l’équation est un espace vectoriel de dimension 2. On chercheune base de l’espace. On cherche des solutions de la forme y(t) = e�t.En reportant dans 1 on voit que y(t) est solution si et seulement si �vérifie :

�(t)2 + a1�(t) + a0 = 0.

Ainsi on s’est ramené au calcul des racines d’une polynôme. On appellece polynôme le polynôme caractéristique de l’équation. Selon la naturedes racines du polynôme caractéristique on peut distinguer trois cas.

Cas 1 : racines distinctes et réelles

Si le polynôme caractéristique admet deux racines distinctes et réelles�1,�2 2 R alors une base de l’espace vectoriel des solutions estdonne par les fonctions :

e�1t , e�2t.

Toute solution de l’équation différentielle 1 s’écrit sous la forme :

y(t) = c1e�1t

+ c2e�2t

avec c1, c2 2 R.

Cas 2 : une racine réelle multiple

Si le polynôme caractéristique admet une racine réelle multiple � 2R alors une base de l’espace vectoriel des solutions est donne parles fonctions :

e�t , te�t.

Toute solution de l’équation différentielle 1 s’écrit sous la forme :

y(t) = c1e�t

+ c2te�t

avec c1, c2 2 R.

Cas 3 : deux racines complexes

Si le polynôme caractéristique admet deux racines complexes �1 =

↵ + i�,�2 = ↵ � i� 2 C alors une base de l’espace vectoriel des

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54 3.7. EDO linéaires à coefficients constants d’ordre 2 non homogènes

solutions est donne par les fonctions :

e↵t cos(�t) , e↵t sin(�t).

Toute solution de l’équation différentielle 1 s’écrit sous la forme :

y(t) = e↵t(c1 cos(�t) + c2 sin(�t))

avec c1, c2 2 R.

3.7 EDO linéaires à coefficients constants d’ordre 2non homogènes

Considérons l’équation différentielle d’ordre 2 non homogène :

y00(t) + a1y0(t) + a0y(t) = f(t) (1)

oú I est une intervalle, y : I 7! R, a1, a0 2 R, f : I 7! R continue. Toutesolution de 1 s’écrit comme somme de la solution générale de l’équationhomogène 1 plus une solution particulière de l’équation non homogène1 :

y(t) = yh

(t) + yp

(t).

On a vu comment calculer la solution homogène yh

(t). Essayons main-tenant de calculer une solution particulière de l’équation non homogène.

3.7.1 Méthode des coefficients indéterminés

La méthode des coefficients indéterminés vise à trouver une solutionparticulière à 1. Cette méthode ne s’applique que dans le cas oú le termef(t) est somme ou produit de polynômes, fonctions trigonométriques (sin(!t), cos(!t)), fonctions exponentielles ( e↵t). L’idée générale derrièreette méthode est de poser comme candidat pour une solution particu-lière une ou des fonctions similaires à celles apparaissant dans f(t) maisavec des coefficient à déterminer. On substitue ensuite ce candidat dansl’équation pour déterminer la valeur des coefficients inconnues. Si f(t)

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Chapter 3: Equations différentielles ordinaires 55

est somme ou produit de fonctions essentielles u1(t), · · · , un(t) ( avec ui

polynôme, trigonométrique ou exponentielle) alors on pose comme candi-dat solution y

p

(t) une somme ou produit des fonctions essentielles ui

ettoutes fonctions qui proviennent par dérivations successives des fonctionsui

, toutes multipliés par des coefficients à déterminer.

Exemple 24 Cherchons une solution particulière de l’équation :

y00(t) + 6y0(t) + 25y(t) = 3 sin(2t) + 5t

Le terme f(t) est somme d’une fonction trigonométrique et d’un poly-nôme. On pose comme candidat solution :

yp

(t) = A sin(2t) + B cos(2t) + Ct+D

avec A,B,C,D coefficients à déterminer.

Exemple 25 Cherchons une solution particulière de l’équation :

y00(t) + 6y0(t) + 25y(t) = 2 sin

2(t) + 3e2t

Le terme f(t) est somme d’une fonction trigonométrique et d’une expo-nentielle. On pose comme candidat solution :

yp

(t) = A sin

2(t) + B cos(t) sin(t) + C cos

2(t) +De2t

avec A,B,C,D coefficients à déterminer.

Exemple 26 Cherchons une solution particulière de l’équation :

y00(t) + 4y0(t) = 2e�3t

On pose comme candidat solution :

yp

(t) = Ae�3t

avec A coefficient à déterminer. On calcule les dérivées d’ordre 1 et 2 dela fonction y

p

(t) :

yp

0(t) = �3Ae�3t , yp

00(t) = 9Ae�3t

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56 3.7. EDO linéaires à coefficients constants d’ordre 2 non homogènes

Après substitution dans l’équation on trouve :

9Ae�3t+ 4Ae�3t

= 2e�3t,

et donc A =

213. La solution cherchée est :

yp

(t) =2

13

e�3t

Dans le cas special ou le candidat solution particulière est essentielle-ment identique à une partie de la solution homogène cette méthode peutéchouer. En fait il faut proposer comme candidat solution une solutionqui ne fait pas partie de l’équation homogène. Par exemple soit à ré-soudre :

y00(t)� 9y0(t) = 2e3t.

La solution homogène est :

yh

(t) = c1e3t+ c2e

�3t.

Si l’on pose come candidat solution :

yp

(t) = Ae3t

en reportant dans l’équation l’on trouve :

9Ae3t � 9e3t = 2e3t

et cette dernière équation est impossible. Ce comportement est lié à laprésence de la même solution ( e3t) dans la solution homogène et dansle candidat solution particulière. Dans ce cas il suffit d’utiliser plutôt lecandidat :

yp

(t) = Ate3t.

Considérons un autre exemple. Soit à résoudre :

y00(t) + 3y0(t) + 2y(t) = 2te�2t+ 3 sin(5t).

La solution homogène est :

yh

(t) = c1e�t

+ c2e�2t.

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Chapter 3: Equations différentielles ordinaires 57

Si l’on pose come candidat solution :

yp

(t) = (At+B)e�2t+ C sin(5t) +D cos(5t),

alors il y a chevauchement être les termes Ate�2t et 2te�2t. Pour réglerle problème ou choisira plutôt :

yp

(t) = (At2 +Bt)e�2t+ C sin(5t) +D cos(5t).

Exemple 27 Soit à résoudre :

y00(t)� 6y0(t) + 9y(t) = e3t.

La solution homogène est :

yh

(t) = c1e3t+ c2te

3t.

Si l’on pose come candidat solution :

yp

(t) = Ae3t

alors il y a chevauchement être les termes Ae3t et e3t. Dans ce cas mul-tiplier par t ne règle pas le problème du chevauchement car te3t apparaîttoujours dans la solution homogène. Pour régler le problème ou choisiraplutôt de multiplier par t2 :

yp

(t) = At2e3t.