Charles de Gaulle

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  • Charles de Gaulle

    Pour les autres membres de la famille, voir famillede Gaulle.

    Pour les articles homonymes, voir Charles de Gaulle(homonymie) et CDG.

    Charles Andr Joseph Marie de Gaulle, n le 22novembre 1890 Lille et mort le 9 novembre 1970 Colombey-les-Deux-glises, est un gnral, rsistant,crivain et homme d'tat franais. Il est la tte de laFrance du 25 aot 1944 au 20 janvier 1946 en exerantle poste de premier prsident du Gouvernement provi-soire de la Rpublique franaise, puis du 8 janvier 1959au 28 avril 1969 en tant que 18e prsident de la Rpu-blique franaise.Chef de la France libre puis dirigeant du Comit franaisde Libration nationale pendant la Seconde Guerre mon-diale, prsident du Gouvernement provisoire de la Rpu-blique franaise de 1944 1946, prsident du Conseil desministres franais de 1958 1959, instigateur de la VeRpublique fonde en 1958, il devient le 18e Prsidentde la Rpublique franaise du 8 janvier 1959 au 28 avril1969. Il est le premier occuper la magistrature suprmesous la Cinquime Rpublique.lev dans une culture de grandeur nationale, Charlesde Gaulle choisit la carrire d'ocier. Il est fait prison-nier lors de la Premire Guerre mondiale. Il sert et pu-blie dans l'entourage de Philippe Ptain, prnant l'usagedes divisions blindes dans la guerre moderne auprsde personnalits politiques. En mai 1940, colonel, il estplac la tte d'une division blinde et mne plusieurscontre-attaques pendant la bataille de France ; il est pro-mu gnral de brigade titre temporaire le 25 mai 1940.Il est nomm sous-secrtaire d'tat la Guerre et la D-fense nationale dans le gouvernement Reynaud, pendantl'exode de 1940.Il rejette l'armistice demand par Ptain l'Allemagnenazie. De Londres, il lance, la BBC, l'appel du 18juin 1940 au peuple franais pour rsister et rejoindreles Forces franaises libres. Condamn mort, et dcla-r dchu de la nationalit franaise par dcret du 8 d-cembre 1940 par le rgime de Vichy, il veut incarner lalgitimit de la France et tre reconnu en tant que puis-sance par les Allis. Ne contrlant que quelques coloniesmais reconnu par la Rsistance, il fusionne, en 1943, laFrance libre au sein du Comit franais de Libration na-tionale, dont il nit par prendre la direction. Il dirige lepays la Libration. Favorable un excutif fort, il sop-pose aux projets parlementaires des partis et dmissionne

    en 1946. Il fonde le Rassemblement du peuple franais(RPF), mais son refus de tout compromis avec le rgimedes partis le maintient l'cart des responsabilits.De Gaulle revient au pouvoir lors de la crise du 13mai 1958, pendant la guerre d'Algrie. Investi prsidentdu Conseil, il fait approuver la Ve Rpublique par unrfrendum. lu prsident de la Rpublique, il veut une politique de grandeur de la France. Il aermit les ins-titutions, la monnaie (nouveau franc) et donne un rle detroisime voie conomique un tat planicateur et mo-dernisateur de l'industrie. Il renonce par tapes l'Algriefranaise, malgr l'opposition des Pieds-Noirs et des mi-litaires, qui avaient favoris son retour. Il dcolonise aussil'Afrique noire, en y maintenant l'inuence franaise. DeGaulle prne l' indpendance nationale en rupture avecle fdralisme europen et le partage de Yalta : il prco-nise donc une Europe des nations impliquant la r-conciliation franco-allemande et qui irait de l'Atlantique l'Oural , ralise la force de dissuasion nuclaire fran-aise, retire la France du commandement militaire del'OTAN, pose un veto l'entre du Royaume-Uni dans laCommunaut europenne, soutient le Qubec libre ,condamne la guerre du Vit Nam et reconnait la Chinecommuniste.Sa vision du pouvoir, c'est--dire un chef directement ap-prouv par la Nation, l'oppose aux partis communiste,socialiste, centristes pro-europens et d'extrme droite.Ils critiquent un style de gouvernance trop personnel,voire un coup d'tat permanent , selon la formulede Franois Mitterrand contre lequel de Gaulle est rluen 1965 au surage universel direct. Il surmonte la crisede mai 68 aprs avoir sembl se retirer, convoquant deslections lgislatives qui envoient une crasante majoritgaulliste l'Assemble nationale. Mais en 1969 il engageson mandat sur un rfrendum (sur la rforme du Snatet la rgionalisation) et dmissionne aprs la victoire du non . Il se retire dans sa proprit de Colombey-les-Deux-glises o il meurt, dix-huit mois plus tard.Charles de Gaulle, considr comme l'un des dirigeantsfranais les plus inuents de son sicle, est aussi un cri-vain de renom. Il a notamment crit des Mmoires, danslesquels il sidentie une certaine ide de la France .

    1 Biographie

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  • 2 1 BIOGRAPHIE

    1.1 Origines familiales

    Article dtaill : Famille de Gaulle.

    Charles de Gaulle est le ls d'Henri de Gaulle (1848-1932) et de son pouse Jeanne de Gaulle (ne Maillot)(1860-1940) et est le petit-ls d'un rudit historien pari-sien et d'un entrepreneur manufacturier du Nord. Il estmarqu par les valeurs familiales : catholicisme lgiti-miste, got des tudes et du service de l'tat (droit, ad-ministration des tabacs ou de l'arme).Ct paternel, les de Gaulle taient des membres duparlement de Paris et des lettrs. Les travaux gnalo-giques du grand-pre et du pre de Charles ont pr-tendu les rattacher la noblesse d'pe[Note 2]. Larrire-grand-pre, Jean-Baptiste de Gaulle (1759-1832), estavocat, (ls d'un procureur du parlement de Paris[Note 3]n en Champagne)[1] ; il chappe la guillotine devantle Tribunal rvolutionnaire pendant la Terreur[2] et de-vient directeur des Postes Militaires de la Grande Arme.Il meurt du cholra en 1832. Son ls, Julien, chartiste,enseigne alors Lille, o un de ses oncles a un poste la manufacture de tabac. Julien de Gaulle y pousela lle d'un administrateur de la manufacture, JosphineMaillot. Le pensionnat qu'ils crent Valenciennes faitfaillite. Ils sinstallent Paris pour crire. Lui rdige deuxtudes (sur un peintre paysagiste et sur une biographiede Saint Louis). Sa vaste Histoire de Paris et de ses envi-rons d'inspiration monarchiste et catholique a une prfaceCharles Nodier. Elle, prolique, collabore des revueslittraires et crit plus de 70 ouvrages bien pensants dontcertains dnoncent la pauvret ouvrire du Nord.Ils ont trois ls. Les deux oncles du gnral sont des cher-cheurs rudits : l'an, Charles, son homonyme, paralyspar la polio, tudie les langues celtes et le cadet, Jules,l'entomologie. Henri, pre du gnral, nat en 1848, un 22novembre comme son ls. Form par le jsuite Olivaint,il se lie aux milieux monarchistes et catholiques sociaux,et entre au secrtariat de Talhout-Roy dont il est prcep-teur des enfants. Admissible Polytechnique, il sengageet est bless en 1870. Il sinscrit au barreau et dans uncercle jsuite inuent. Mais, pour entretenir la famille,il renonce une carrire militaire ou politique et entredans l'administration du ministre de l'intrieur jusqu'en1884 (dmission peut-tre lie la lacisation). Il a en-suite trois doctorats (lettres, sciences, et droit) et enseignelettres, histoire et les mathmatiques au collge jsuitede l'Immacule-Conception de Paris. trente-sept ans,il pouse Jeanne Maillot, une petite-cousine de sa mre.Charles de Gaulle est ainsi doublement issu de la familleMaillot par sa mre et sa grand-mre paternelle. Origi-naires de la Flandre franaise, ces industriels catholiquesdescendent d'administrateurs de la manufacture des ta-bacs.Le grand-pre maternel de Charles de Gaulle (mortl'anne de sa naissance) est un entrepreneur qui a rap-

    Maison natale de Charles de Gaulle Lille.

    port une nouvelle machine tisser le tulle d'Angleterre.Il tait issu de l'union de deux familles des manufacturesdu tabac, les Maillot et les Kolb. Louis Philippe Kolb,luthrien du duch de Bade tait, avant 1791, sergent ma-jor de la garde suisse de Louis XVI. Mari Maubeuge en1790 avec une descendante de Jean Nicot, il avait rorga-nis des manufactures de tabac, en particulier Lille. Sesdeux ls y russissent : l'un est urbaniste, l'autre, indus-triel sucrier, devient snateur chrtien social et lgitimiste(Charles Kolb-Bernard[3]).La grand-mre maternelle du futur homme de Londres,Justine Maillot-Delannoy, reoit jusqu' sa mort en 1912ses enfants et petits enfants. Elle est lle d'un avocat etd'une britannique dont le pre tait mdecin de l'armedes migrs. Ses anctres, les MacCartan (en), allis auxcossais Fleming, taient des nobles irlandais[4] jacobitesrfugis en France aprs la Glorieuse Rvolution.Ascendance de Charles de Gaulle[5]

  • 1.4 Ordre no 20.645, extrait 3

    Marie-Agns de Gaulle (1889-1982), nomme titre honorique colonel dans l'arme russe en1950[rf. ncessaire] ;

    Jacques de Gaulle (1893-1946), handicap en 1926 la suite d'une encphalite, pre de quatre ls : Fran-ois (pre blanc), Bernard (27 aot 1923), Jean etPierre (13 aot 1926) ;

    Pierre de Gaulle (1897-1959), rsistant, homme po-litique et administrateur de socits.

    Trs tt, grce son pre, Charles dcouvre les uvresde Maurice Barrs, Henri Bergson et Charles Pguy. Sonpre se dit monarchiste de regret et lit L'Action franaise,mais croit en l'innocence de Dreyfus. Sa mre est davan-tage passionne de politique : ds la premire page desMmoires de guerre, Charles de Gaulle rend hommage sa mre admire, qui portait la patrie une passion in-transigeante l'gal de sa pit religieuse .Charles de Gaulle fait une partie de ses tudes primaires l'cole des Frres des coles chrtiennes de la paroisseSaint-Thomas-d'Aquin. Il a son pre comme enseignantchez les Jsuites. Lors de la crise politico-religieuse rsul-tant des lois de 1901 et 1905 qui interdit aux congrga-tions d'enseigner, le professeur De Gaulle fonde Parisen 1907 un cours libre secondaire "cole Louis de Fon-tanes" et inscrit son ls Charles chez les jsuites franaisen Belgique au collge du Sacr-Cur install au chteaud'Antoing[7]. Le jeune lycen vit ainsi sa premire exp-rience d'exil.Le jeune Charles a quinze ans quand, en 1905, il r-dige un rcit dans lequel il se dcrit en gnral deGaulle sauvant la France, tmoignage d'une ambitionnationale prcoce[8]. Plus tard, il explique son aide decamp Claude Guy avoir eu ds son adolescence la convic-tion qu'il serait un jour la tte de l'tat[9],[Note 4].Entr 119e sur 221 l'cole militaire de Saint-Cyr en1908, aprs avoir suivi une anne de prparation aucollge Stanislas[10] Paris, il en sort diplm en 1912,se classant la 13e place[Note 5], et rejoint l'infanterie. Ilchoisit d'tre aect au 33e rgiment d'infanterie Arraset se retrouve sous les ordres du colonel Ptain.

    1.3 Premire Guerre mondiale

    Articles connexes : Premire Guerre mondiale et Bataillede Dinant (1914).

    Les quatre frres De Gaulle sont mobiliss comme o-ciers. Ils reviennent tous vivants et dcors. Charles quitait lieutenant depuis le 1er octobre 1913, est nomm ca-pitaine en janvier 1915[12]. Ds son premier combat Di-nant le 15 aot 1914, il est touch la jambe ( fracturedu pron par balles avec clats dans l'articulation )[13].Il rejoint ensuite le 33e RI sur le front de Champagne

    pour commander la 7e compagnie. Il est nouveau blessle 10 mars 1915, la main gauche, Mesnil-Les-Hurlusen Champagne. Dcid en dcoudre, il dsobit sessuprieurs en ordonnant de tirer sur les tranches enne-mies. Cet acte lui vaut d'tre relev huit jours de ses fonc-tions. Ocier tatillon, volontiers cassant, son intelligenceet son courage face au feu le distinguent au point que lecommandant du 33e RI lui ore d'tre son adjoint[14].Le 2 mars 1916, son rgiment est attaqu et dci-m, ananti par l'ennemi en dfendant le village deDouaumont, prs de Verdun. Sa compagnie est mise mal au cours de ce combat et les survivants sont encer-cls. Tentant alors une perce, il est oblig par la violencedu combat sauter dans un trou d'obus pour se protger,mais des Allemands le suivent et le blessent d'un coup debaonnette la cuisse gauche[15]. Captur par les troupesallemandes, il est soign et intern. Cette disparition aufront lui vaut d'tre cit l'ordre de l'arme.

    Statue prs du pont de Dinant, o il est inscrit sousle nom de De Gaulle : Dinant Mon champ de ba-taille .

    Plaque sur le pont de Dinant commmorant l'endroitde Gaulle a t bless alors qu'il traversait la Meuseen 1914.

    1.4 Ordre no 20.645, extraitM. De Gaulle, Charles Andr, Joseph, Capitaine com-mandant la 10 Compagnie du 33 Rgiment dInfante-rie, a t nomm dans l'ordre de la Lgion d'Honneur augrade de chevalier. DOUAUMONT le 2 mars 1916 sous un eroyablebombardement, alors que l'ennemi avait perc la ligne etattaquait sa compagnie de toute part, a organis aprs uncorps corps farouche, un lot de rsistance o tous sebattirent jusqu' ce que fussent dpenses les munitions,fracasss les fusils et tombs les dfenseurs dsarms ;bien que trs grivement bless d'un coup de baonnette, acontinu tre l'me de la dfense jusqu' ce qu'il tombtinanim sous l'action des gaz.La prsente nomination comporte l'attribution de laCROIX DE GUERRE avec PALME.Le marchal de France, commandant les armes de l'EstPTAIN Aprs une tentative d'vasion manque Osnabrck[16],il est transfr au fort d'Ingolstadt, en Bavire, uncamp de reprsailles destin aux ociers prisonniers re-muants. Il y croise le futur gnral Georges Catroux,l'aviateur Roland Garros, le journaliste Rmy Roure,l'diteur Berger-Levrault[17] et le futur marchal sovi-tique Mikhal Toukhatchevski. Un lamentable exil ,c'est en ces termes qu'il dcrit sa mre son sort de captif.Pour tromper l'ennui, de Gaulle organise pour ses compa-gnons de captivit des exposs magistraux sur l'tat de la

  • 4 1 BIOGRAPHIE

    guerre en cours. Mais surtout, il tente de svader cinqreprises, sans succs au cours de sa dtention de trente-deux mois dans une dizaine de camps dirents (Osna-bruck, Neisse, Sczuczyn, Ingolstadt, forteresse de Rosen-berg (de), prison militaire de Passau, camps de Wlzburg(de) et de Magdebourg)[18]. Il est libr aprs l'armisticedu 11 novembre 1918 et retrouve les siens le mois sui-vant. De ces deux ans et demi de captivit, il garde unsouvenir amer, estimant tre un revenant , un soldatinutile qui n'a servi rien[19]. Toutefois, il reoit la croixde chevalier de la Lgion d'honneur, le 23 juillet 1919, etla croix de guerre 1914-1918 avec toile de bronze[12].

    1.5 Entre-deux-guerres : ocier d'tat-major

    Article connexe : Entre-deux-guerres.

    1.5.1 De la Pologne l'cole de guerre : ocierconfrencier

    Charles de Gaulle poursuit sa carrire militaire sous laprotection de Ptain, dans un premier temps.Le 20 janvier 1919, il arrive Saint-Maixent suivre lescours de remise niveau destins aux ociers de retourde captivit. Dsireux de relancer sa carrire militairecompromise par ses mois de dtention, il cherche sen-gager sur un thtre d'opration, et postule cet eet si-multanment pour un engagement dans l'arme d'Orientet auprs de l'arme de Pologne. Dbut avril 1919, il ob-tient son dtachement auprs de l'Arme polonaise auto-nome qui commence quitter la France pour la Pologne.Il eectue dans le pays deux sjours trs rapprochs, lepremier d'avril 1919 mai 1920, et le second de juin 1920 la n du mois de janvier 1921. Dans le cadre de la mis-sion militaire franaise du gnral Henrys, le capitaine DeGaulle est aect comme instructeur l'cole d'infanteriede Rembertow. Il y exerce successivement les fonctionsd'instructeur, de directeur des tudes en novembre, et en-n de directeur du cours des ociers suprieurs partirde dcembre. Repoussant l'ore du gnral Henrys quilui proposait de poursuivre sa mission auprs de lui, DeGaulle, qui ambitionne de se prsenter au concours delcole de Guerre dans les meilleures conditions, retourneen France. Du par le poste qui lui choit au cabinet desdcorations du ministre, et alors que la Guerre sovito-polonaise fait rage, il repart en Pologne en mai 1920.D'abord tmoin des preuves traverses par la populationpolonaise, il prend ensuite activement part aux oprationsavec le gnral Bernard au sein du 3e Bureau du Grouped'arme Sud (puis Centre) command par le gnral po-lonais Rydz-Smigly. Il y gagnera une citation. Aprs lavictoire de la Pologne, il rdige notamment un rapportgnral sur l'arme polonaise. Si l'analyse de l'action del'unique rgiment de chars FT 17, il a pu crire Les chars

    doivent tre mis en uvre rassembls et non disperss,de Gaulle dcouvre surtout en Pologne la guerre de mou-vement et l'emploi des grandes units de cavalerie commelment de choc et moyen d'obtenir une dcision portestratgique.Son pre (qui stait fait rappeler 66 ans en 1914) seretire progressivement de l'enseignement et Charles deGaulle indique sa famille qu'il souhaite se marier. Il at aect par le dcs sous les bombes d'une quasi an-ce en 1916 en Belgique. Les familles lui prsentent unejeune lle issue de la bourgeoisie du Nord. Charles deGaulle pouse, le 7 avril 1921 dans l'glise Notre-Damede Calais, Yvonne Vendroux (1900-1979). Ils ont troisenfants :

    Philippe de Gaulle, n le 28 dcembre 1921 Paris,amiral puis snateur ;

    lisabeth de Gaulle, ne le 15 mai 1924 Paris etdcde le 2 avril 2013[20] ;

    Anne de Gaulle, ne le 1er janvier 1928 Trveset dcde le 6 fvrier 1948 Colombey-les-Deux-glises, ne trisomique.

    son retour, le capitaine de Gaulle est charg de coursd'histoire l'cole de Saint-Cyr[21], avant son admission l'cole suprieure de guerre en 1922. En conit de doc-trine avec ses suprieurs dont il conteste la vision stra-tgique trop lie la planication dfensive et compar-timente du terrain, mais bnciant de la protection dumarchal Ptain, il est mal not, mais continue de se faireune rputation prometteuse.En 1924, le marchal Ptain t rectier les notes jugesinjustes iniges son protg[22].En 1925, il est dtach l'tat-major du marchal P-tain, vice-prsident du Conseil suprieur de la Guerre.Celui-ci l'impose comme confrencier l'cole de guerreet lui demande de prparer la rdaction d'un ouvrage surl'histoire du soldat. En 1927, en prsence du marchal P-tain, il prsente l'cole de guerre trois confrences re-marques, respectivement intitules : L'action de guerreet le chef , Du caractre , et enn Du prestige .

    1.5.2 Thoricien militaire : les chars et l'arme demtier

    Promu chef de bataillon le 25 septembre 1927, il part lemois suivant pour Trves prendre le commandement du19e bataillon de chasseurs pied (BCP)[23]. Il y conduitun commandement nergique et continue ses confrencescomme dans son poste suivant.En novembre 1929, il est aect ltat-major desTroupes du Levant Beyrouth o il est responsable des2e et 3e bureaux (renseignement militaire et oprations).Accompagn de sa famille, il y demeure jusqu'en no-vembre 1931. Au cercle des Ociers de Beyrouth, il

  • 1.5 Entre-deux-guerres : ocier d'tat-major 5

    donne des confrences sur l'arme franaise ; il serait parailleurs l'auteur d'une brochure, intitule La questionKurde publie en 1930 par lImprimerie du Bureau to-pographique du Levant.Grce l'appui du marchal Ptain, il est aect en no-vembre 1931 au Secrtariat gnral de la dfense na-tionale Paris. Ce nouveau poste est capital, car c'estl'occasion de sinitier aux aaires de l'tat[24], puisqu'ilest charg en particulier de travailler au projet de loi mi-litaire. Le 25 dcembre 1933, il est promu lieutenant-colonel.C'est durant ces annes que Charles de Gaulle dveloppeses thories militaires : il publie LaDiscorde chez l'ennemi(1924), Le Fil de l'pe (1932), Vers l'arme de mtier(1934) et enn La France et son arme (1938).Ce dernier livre, prpar d'abord en 1925 pour PhilippePtain et auquel de Gaulle se consacra pendant deux ans,ne fut nalement pas retenu par le marchal, qui l'ayantremani cona le travail un autre[25]. Ceci blessa deGaulle qui ddia nanmoins au marchal Ptain son ou-vrage Le Fil de l'pe : Car rien ne montre mieux quevotre gloire, quelle vertu l'action peut tirer des lumiresde la pense . En 1938, de Gaulle dcida de publier sousson nom son texte et en avertit Ptain. Pour arranger leschoses, le marchal le reut chez lui et lui proposa de r-diger une prface que de Gaulle ne reprit pas, d'o unebrouille dnitive entre les deux hommes qui ne se rever-ront brivement qu'en juin 1940[26].Dans son premier ouvrage, de Gaulle insiste sur la n-cessit de l'unit du commandement et de la nation, don-nant la primaut au politique sur le militaire. C'est se-lon lui cause de ses divisions que l'Allemagne a perdu.En publiant la reprise de ses confrences sur le rle ducommandement, en 1932, dans Le Fil de l'pe il rap-pelle l'importance de la formation des chefs et le poidsdes circonstances. Si de Gaulle tudie l'importance dela dfense statique au point d'crire : La forticationde son territoire est pour la France une ncessit per-manente [] L'encouragement de l'esprit de rsistanced'un peuple par l'existence de fortications permanentes,la cristallisation, l'exaltation de ses nergies par la dfensedes places sont des faits que les politiques comme les mi-litaires ont le devoir de reconnatre dans le pass et deprparer dans l'avenir , il n'en est pas moins sensible auxides du gnral Jean-Baptiste Eugne Estienne sur la n-cessit d'un corps de blinds[27], alliant le feu et le mou-vement, capable d'initiatives et d'oensives hardies. Surce point il entre de plus en plus en opposition avec lesdoctrines ocielles, en particulier celles de Ptain.Dans son ouvrage Vers l'arme de mtier, il dveloppecette question de fond qui ncessite la cration d'une ar-me professionnelle aux cts de la conscription. Il de-vient alors le promoteur de la cration d'units blindesautonomes non lies l'infanterie. Cependant, cette iderencontre peu d'chos favorables, l'exception notablede Paul Reynaud, dput de centre-droit, ou de Philippe

    Serre. l'tranger, en revanche, l'ide du gnral Jean-BaptisteEugne Estienne d'employer des blinds dans une per-ce motorise reprise par de Gaulle a dj suscit laplus grande attention (Heinz Guderian, Liddell Hart).Vers l'arme de mtier n'a en France qu'un bref succsde curiosit et n'exerce aucune inuence sur le gn-ral Guderian, dj en train de crer la force mcaniqueallemande[Note 6].En revanche, contrairement son inuent an le colonelmile Mayer, de Gaulle, attach la professionnalisa-tion de l'arme de terre, ne peroit pas l'importance del'aviation laquelle il n'attribue qu'un rle secondaire : les troupes terre recevront de l'aviation une aide pr-cieuse quant leur camouage. Les fumes pandues surle sol du haut des airs cachent en quelques minutes devastes surfaces du sol tandis que le bruit des machinesvolantes couvre celui des moteurs chenills . Il faudraattendre l'dition de 1944 o il fera ajouter une phrase : Mais surtout en frappant elle-mme vue directe et pro-fondment, l'aviation devient par excellence l'arme dontles eets foudroyants se combinent le mieux avec les ver-tus de rupture et d'exploitation de grandes units mca-niques . Paris, de Gaulle frquente diverses personnalits autourdu colonel mile Mayer, retrait trs ouvert, favorable une rforme de la stratgie : l'tat-major ne doit pas secontenter d'une stratgie dfensive derrire la ligne Ma-ginot. Cependant, ni l'un ni l'autre ne sont couts. Par-tant des ides du gnral Fuller et du critique militairebritannique Liddell Hart, Charles de Gaulle dfend uneguerre de mouvement mene par des soldats de mtier,et appuye par des blinds.En revanche, en Allemagne, les thories de Charles deGaulle sont suivies avec intrt en haut lieu, Albert Speerrapportant notamment qu'Adolf Hitler avait lu plusieursreprises le livre du gnral de Gaulle et qu'il armait avoirbeaucoup appris grce lui[28].

    1.5.3 Ides et frquentations politiques avant laguerre

    Charles de Gaulle fait une confrence la Sorbonne auprintemps 1934, sous l'gide du cercle Fustel de Cou-langes, une vitrine de lAction franaise[29]. Inuencoriginellement par la tradition monarchiste, Charles deGaulle, militaire soumis au devoir de rserve, rvle danssa correspondance prive son peu de considration pourle parlementarisme et lui prfre un rgime fort, tout ense tenant publiquement l'cart de lanti-rpublicanismed'une partie de l'arme[30]. Cette mance l'gard duparlementarisme explique que Charles de Gaulle se soitsenti avant la guerre proche de l'Action franaise, avantque la position de Maurras relative aux accords de Mu-nich ne l'en loignent. Ainsi, Paul Reynaud, qui rencontraen captivit en Allemagne la sur du gnral de Gaulle,

  • 6 1 BIOGRAPHIE

    Marie-Agns Caillau, note dans ses carnets de captivi-t parlant de cette dernire[31] : Trs franche, intelli-gente et bonne, [elle] nous raconte que Charles tait mo-narchiste, qu'il dfendait Maurras contre son frre Pierrejusqu' en avoir les larmes aux yeux dans une discussion.Mais au moment de Munich, il a dsapprouv entire-ment l'attitude de Maurras. De mme, Christian Pi-neau dira Andr Gillois que le gnral avait recon-nu devant lui quil avait t inscrit lAction franaise etquil stait ralli la Rpublique pour ne pas aller contrele sentiment des Franais [32]. Lui-mme rsistant degauche, Claude Bourdet qualiera de Gaulle dhommede droite, longtemps proche de lAction franaise, de-venu rpublicain par mimtisme[33]. Selon Edmond Mi-chelet, de Gaulle subit linuence de Maurras[34],[Note 7].Ses ides se heurtent pourtant d'une part au profondconservatisme des dirigeants militaires, et d'autre part auxrticences des rpublicains face un militaire de rputa-tion maurrassienne.Pourtant, si la pense de Maurras a inuenc deGaulle[35],[Note 8], celui-ci est aussi un disciple de Pguy,inuenc par le socialisme de Pierre Leroux et deBergson. Il a t form par le colonel Mayer, ocierd'origine isralite, dreyfusard et socialisant. Ayant avantla Premire Guerre mondiale assist Lille des mee-tings de Jaurs, il a aussi frquent le socialiste Club duFaubourg et les mouvements non-conformistes des an-nes 30 (Esprit). Il adhra galement aux Amis de TempsPrsent, groupe de militants qui soutenait Temps prsent,comme l'indique ric Roussel, qui signale cependant quede Gaulle n'est pas devenu pour autant dmocrate-chrtien, loin sen faut[36]. Cet hebdomadaire est eneet de la mouvance catholique progressiste et prochedu Sillon de Marc Sangnier[37], mouvance qui fut favo-rable au Front populaire et l'intervention de la Franceaux cts des Rpublicains espagnols. L'hebdomadaireTemps prsent saluera la nomination de Charles de Gaullecomme sous-secrtaire d'tat la guerre dans son der-nier numro de juin 1940, comme le signale le Centred'information sur le gaullisme[38], signalant au passage quede Gaulle fut aussi l'un des premiers abonns Sept, heb-domadaire direction religieuse dont Temps prsent taitle successeur.Le 1er janvier 1934, Charles de Gaulle publie dans la re-vue militaire une tude sur la mobilisation conomique l'tranger. la recherche d'exemples pour la France,il cite parmi d'autres l'Italie mussolinienne[39],[Note 9]. Legnral de Gaulle fera l'apologie du livre La rforme del'tat publi par Andr Tardieu en 1934 et dira sen treinspir pour la constitution de la Ve Rpublique[40].De fait, avant la guerre, de Gaulle n'est pas un idologue,mais un homme d'action[Note 10] et d'ambition prt faireson miel de tout. cette n, il se rapproche d'hommes politiques de dif-frentes tendances pour se faire connatre et faire pro-gresser ses ides. S'il frquente beaucoup Paul Reynaud

    qui il crira soixante fois de 1936 1940[41],[Note 11], ilse rapproche galement de Marcel Dat qui aprs avoirrompu avec Lon Blum, souhaite intgrer au projet so-cialiste les valeurs d'ordre, d'autorit et de nation. DeGaulle rencontre Marcel Dat plusieurs reprises grce un de ses proches, l'avocat Jean Auburtin ; les deuxhommes sestiment et resteront en contact jusqu' la veilledu conit[42]. De Gaulle arme propos de Marcel D-at en novembre 1937[43] : Dat a sans aucun doute ungrand talent et une haute valeur. C'est de quoi on lui enveut. Mais patience, je crois qu'on le verra remonter etaller trs haut. la publication de l'ouvrage, Lon Blum manifeste savive hostilit pour les ides de l'arme de mtier du co-lonel de Gaulle dans trois articles publis par le Popu-laire, car il craint qu'elle ne soit utilise contre le peuple,notamment les grvistes. Et, de fait, comme le montreune lettre de 1935 envoye Paul Reynaud, de Gaullen'excluait nullement une telle possibilit. Certains pas-sages des livres publis par le colonel de Gaulle suscitentd'ailleurs l'approbation de l'Action franaise[44].En 1935, de Gaulle approuve le pacte franco-sovitiquesign par Laval et Staline, voquant l'alliance de FranoisIer avec les Musulmans contre Charles Quint pour justierune alliance destine assurer la survie du pays pour justi-er un accord avec les Russes quelque horreur que nousayons pour leur rgime [45]. La vision de De Gaulle faitabstraction des idologies qui pour lui comptent peu faceaux permanences gopolitiques et nationales, l'alliance estavec les Russes, non avec le communisme, de mme quela guerre est contre l'Allemagne, non contre le national-socialisme[46].Charles de Gaulle explique dans Vers l'arme de mtierquelle est la condition pour faire aboutir ses ides qui sontd'abandonner le service militaire universel au prot d'unearme motorise compose exclusivement de profession-nels : Il faut qu'un matre apparaisse, indpendant dansses jugements, irrcusable dans ses ordres, crdit parl'opinion. Serviteur du seul tat, dpouill de prjugs,ddaigneux des clientles, commis enferm dans sa tche,pntr de longs desseins, au fait des gens et des chosesdu ressort, faisant corps avec l'arme, dvou ceux qu'ilcommande, homme assez fort pour simposer, assez ha-bile pour sduire, assez grand pour une grande uvre, telsera le ministre, soldat ou politique, qui la patrie de-vra l'conomie prochaine de sa force. Il arme gale-ment : Il n'est point de regroupement, de parti, de consul,qui n'invoque le redressement, l'ordre nouveau, l'autorit.Nul doute qu' bref dlai le jeu des institutions, suivantle mouvement des besoins, n'ouvre le champ aux rso-lus. Cet appel la gure du grand homme tait djprsente dans Le Fil de l'pe, o, ds 1932, il exalte[47], les ambitieux de premier rang [...] qui ne voient d'autreraison que d'imprimer leur marque aux vnements ;dans cet ouvrage, il arme galement : On ne fait riende grand sans de grands hommes, et ceux-ci le sont pourl'avoir voulu. Dans le Fil de l'pe, il dresse le portrait

  • 1.6 Seconde Guerre mondiale 7

    de l'ambitieux de haute stature qui n'est pas seulement unsoldat : c'est un soldat qui parfois prend en charge les af-faires de la nation et il ore comme exemples Louvois etCarnot[48], dictateurs de guerre .Nanmoins, Blum se laisse progressivement intresserpar la thmatique des chars qu'il soutiendra tardivementau moment de la guerre.En juillet 1937, le lieutenant-colonel de Gaulle est aectau 507e rgiment de chars de combat bas au quartier Li-z Montigny-ls-Metz. C'est la rencontre concrte avec son outil. Il en prend le commandement par intrim enseptembre suivant[49], sous les ordres du gnral CharlesDelestraint[50]. Lieutenant-colonel depuis le 25 dcembre1933, il est promu colonel le 25 dcembre 1937. Lorsdes manuvres, il tente d'imposer, contre le rglement,sa conception de l'usage autonome des blinds, ce qui luivaut l'hostilit de son suprieur, le gnral Henri Giraud.

    1.6 Seconde Guerre mondiale

    Article connexe : Seconde Guerre mondiale.

    Lorsque la guerre clate, Charles de Gaulle est toujourscolonel, commandant le 507e rgiment de chars de com-bat (RCC), Metz. En janvier 1940, il envoie quatre-vingts personnalits, dont Lon Blum et Paul Reynaud,ainsi qu'aux gnraux Maurice Gamelin et Maxime Wey-gand, un mmorandum fond sur les oprations de Po-logne. Intitul L'Avnement de la force mcanique, letexte insiste sur la ncessit d'allier le char et l'aviation.Trois jours avant l'oensive allemande du 10 mai 1940,qui conduit une perce rapide du front franais, le colo-nel de Gaulle est averti de la dcision du commandementde lui coner la 4e DCR, la plus puissante des grandes uni-ts blindes de l'arme franaise (364 blinds[51]) dont ilprend eectivement le commandement le 11 mai.Le 15 mai 1940, il reoit la mission de retarder l'ennemidans la rgion de Laon an de gagner des dlais nces-saires la mise en place de la 6e arme charge de bar-rer la route de Paris. Mais sa division blinde n'est en-core qu'en cours de constitution, ses units n'ayant ja-mais opr ensemble. Il dirige pourtant avec cette unitune contre-attaque vers Montcornet, au nord-est de Laon.C'est l'une des seules qui parvient repousser momenta-nment les troupes allemandes. Prvoyant la dfaite ra-pide de l'arme franaise sous l'oensive allemande, lescivils et les militaires dsarms sur les routes, il armeque c'est durant la journe du 16 mai que ce qu'[il]a pu faire, par la suite, c'est ce jour-l qu'[il] l'a rso-lu. [Note 12]. N'ayant reu qu'une partie des units de la4e DCR, le colonel de Gaulle lance une premire attaqueavec 80 chars pour tenter de couper les lignes de com-munication des divisions blindes allemandes le 17 mai.Aprs avoir atteint ses objectifs dont la ville de Mont-cornet, la 4e DCR, n'tant pas appuye, est contrainte de

    se replier face l'intervention de renforts ennemis. Lesautres units de la 4e DCR ayant rejoint, une nouvelleattaque peut tre lance avec 150 chars qui, aprs avoirpermis d'atteindre les premiers objectifs, est arrte parl'intervention de l'aviation d'assaut et de l'artillerie alle-mandes.Le 25 mai 1940, il est nomm gnral de brigade titretemporaire[52],[53]. Cette nomination, dans une promotionde six colonels, correspond au fait que de Gaulle en tantque commandant d'une division blinde depuis le 7 mai1940, fait dj fonction de gnral, ses trois collguescommandants de division blinde (DCR) tant tous djgnraux. Elle suscite la satisfaction de Charles Maurrasdans l'Action franaise[54],[55],[Note 13].Trois jours plus tard, le 28 mai, il attaque deux reprisespour dtruire une poche que l'ennemi a conquise au sud dela Somme, hauteur d'Abbeville. Malgr un dplacementpralable de 200 km qui a lourdement prouv le mat-riel de la 4e DCR, l'opration est un succs[rf. ncessaire].Elle permet de faire plus de 400 prisonniers et de rsor-ber toute la poche l'exception d'Abbeville, en raison dela supriorit en nombre et en artillerie de l'adversaire.Celui-ci ne peut franchir la Somme que plus tard au nordd'Abbeville, mais une deuxime attaque ne permet pas la 4e DCR de prendre la ville.Commentant le comportement militaire de De Gaulle surle terrain, l'historien Henri de Wailly avance que celui-ci,loin d'avoir t particulirement brillant, a montr dansla bataille les mmes faiblesses et les mmes incom-ptences que les autres dirigeants militaires[56]. De sonct, le gnral Weygand, chef des armes, dcerne, le31 mai 1940, au gnral ( titre temporaire) de Gaulleune citation trs logieuse en tant que commandant d'unedivision blinde prs d' Abbeville : Chef admirable decran et d'nergie. A attaqu avec sa division la tte de pontd'Abbeville trs solidement tenue par l'ennemi. A rompula rsistance allemande et progress de 14 kilomtres travers les lignes ennemies, faisant des centaines de pri-sonniers et capturant un matriel considrable [57].Le 6 juin, le gnral de Gaulle est convoqu d'urgence Paris par Paul Reynaud, prsident du Conseil, pour oc-cuper un poste ministriel dans son gouvernement, celuide sous-secrtaire d'tat la Guerre et la Dfense na-tionale. Charles de Gaulle sort alors de la hirarchie mi-litaire. Il a pour mission de coordonner l'action avec leRoyaume-Uni pour la poursuite du combat. Le 9 juin,il rencontre Churchill qu'il tente en vain de convaincred'engager davantage de forces, y compris ariennes, dansla bataille. Le 10 juin, de Gaulle quitte Paris qui est d-clare ville ouverte. Il rejoint alors Orlans, Briare etTours[58]. C'est le moment des ultimes runions du Comi-t suprme interalli o Churchill, lors de la confrencede Briare laquelle de Gaulle participe[Note 14], tentede convaincre le gouvernement franais de continuer laguerre. Le 16 juin, il est en mission Londres. Il ydicte au tlphone la note de Jean Monnet Paul Rey-

  • 8 1 BIOGRAPHIE

    naud, intitule Anglo-French Unity, et qui voque unepossible union franco-britannique. De retour de mission, Bordeaux, il apprend, le 17 juin 1940, la dmissiondu prsident du Conseil, Paul Reynaud, son remplace-ment par le marchal Ptain et la demande d'armistice. Lemme jour, le gnral Weygand alors chef d'tat-majorde l'Arme est nomm ministre de la Dfense nationale.Le transfert des pouvoirs au marchal Ptain n'ayant lieuque le lendemain, de Gaulle est encore membre du gou-vernement et court alors peu de risque[59]. Aprs mainteshsitations selon l'ocier de liaison le gnral britanniqueEdward Spears[60], il a l'intention de regagner Londres. Ilrencontre Paul Reynaud pour lui faire part de son projet.Ce dernier lui fait remettre par son ex-directeur de cabinetJean Laurent 100 000 francs prlevs sur les fonds secretspour sa logistique Londres. Le 17 juin, accompagnantSpears qui n'a pas russi convaincre Reynaud et GeorgesMandel de rejoindre Londres, il senvole Londres avecson aide de camp Georoy Chodron de Courcel dans lede Havilland Flamingo, son avion de la veille que Chur-chill a laiss sa disposition[61],[62].

    1.6.1 Appel du 18 juin 1940

    Article dtaill : Appel du 18 juin.Le 18 juin 1940, de Gaulle se prpare parler au peuple

    Achette placarde dans toute la ville de Londres, souventconfondue avec l'Appel du 18 juin.

    franais via Radio Londres de la BBC. Ce jour-l, il ap-pelle les Franais, et tout particulirement les militaires,

    Plaque commmorative sur le mur de Carlton House Terrace(Londres), quartier gnral de De Gaulle lors de la SecondeGuerre mondiale.

    la rsistance depuis l'Angleterre o il sest rfugi. EnFrance, l'Appel du 18 juin peut tre entendu 19 heures.Depuis ce jour, ce texte demeure l'une des plus clbresallocutions de lHistoire de France, l'origine du mythefaisant du gnral le pre de la Rsistance alors que cedernier ne prend conscience de l'intrt de la Rsistanceintrieure qu' partir de 1941[63]. Aucun enregistrementn'a t conserv, contrairement au discours du 22 juin1940, que l'on confond parfois avec le vritable appel.Le gouvernement britannique avait au pralable propo-s au ministre franais de l'Intrieur Georges Mandel depasser au Royaume-Uni et de lancer lui-mme un ap-pel. Par ses avertissements rpts contre les menaces duIIIe Reich (et en opposition ce sujet avec son ami leprsident du Conseil Lon Blum), Mandel stait signalcomme un homme d'tat et de caractre. Tout au longde la journe du 18 juin, le Conseil des ministres bri-tannique discute du texte de De Gaulle. Le cabinet bri-tannique tente de sy opposer, mais Winston Churchill lesoutient[64]. Les anciens Munichois, derrire le ministredes Aaires trangres lord Halifax, veulent encore m-nager le gouvernement Ptain et attendre de voir sil va ef-fectivement signer l'Armistice. Winston Churchill, vieuxpartisan de la fermet contre Hitler et de la poursuite de lalutte, doit mettre son autorit dans la balance. De Gaullepeut nalement prononcer son texte, mais doit accepterd'en modier les deux premires lignes[65] dans un sensmoins dur pour le gouvernement franais. Cette modi-cation longtemps occulte disparait dans le texte transmis la presse, puis dans les Mmoires de De Gaulle.Le 19 juin, Weygand, suprieur hirarchique de DeGaulle, lui ordonne de revenir de Londres, ignorantl'invitation poursuivre le combat que ce dernier luiadresse[66],[67]. Peu aprs, de Gaulle est rtrograd aurang de colonel par son ministre qui convoque successi-

  • 1.6 Seconde Guerre mondiale 9

    vement deux tribunaux militaires, le premier n'ayant pro-nonc qu'une peine symbolique. Le second condamne mort le chef de la France libre, le 2 aot 1940.

    1.6.2 France libre

    Articles dtaills : France libre et Forces franaises libres.

    De Londres, de Gaulle cre puis dirige les Forces fran-aises libres. Il est reconnu par Winston Churchill chefdes Franais libres le 27 juin 1940. Le but n'est pas demettre en place une lgion de volontaires qui continueraitla lutte aux cts de l'Empire britannique. Il sagit pourde Gaulle de remettre la France en tant que telle dans laguerre contre Hitler, en formant une arme et un contre-tat dot de tous les attributs de souverainet et lgitimi-t, et qui se donne une base territoriale en ralliant les ter-ritoires franais de l'Empire colonial, future plate-formede la reconqute[68].Ds le dbut de l't 1940, partir de presque rienet assist de quelques volontaires, de Gaulle jette ainsiles bases d'une marine (FNFL), d'une aviation (FAFL),de forces terrestres (FFL), d'un service de renseigne-ments (le BCRA du colonel Passy, vite actif en m-tropole). La Croix de Lorraine propose par l'amiralMuselier[Note 15],[69],[70], devient son emblme. Les sta-tuts juridiques de la France libre et ses rapports avec legouvernement anglais sont xs par le juriste Ren Cas-sin. La France libre a bientt sa banque, son journal of-ciel, ses dcorations le Gnral fonde l'Ordre de laLibration Brazzaville ds octobre 1940, pour honorerses compagnons . Des comits franais libres actifsdans le monde entier se constituent et tentent de rallier de Gaulle les Franais de l'tranger, les opinions et lesgouvernements[71].En France, de Gaulle est condamn deux fois parcontumace, d'abord quatre ans de prison et la pertede la nationalit franaise[72], puis, le 2 aot 1940, leTribunal militaire de Clermont-Ferrand le condamne mort, dgradation militaire et conscation de ses biensmeubles et immeubles pour trahison, atteinte la s-ret extrieure de l'tat, dsertion l'tranger en tempsde guerre sur un territoire en tat de guerre et de sige .En Grande-Bretagne, il trouve en revanche le soutien deWinston Churchill, mais aussi celui du Parlement, de lapresse et de l'opinion publique, reconnaissantes au gallantFrench d'tre rest aux cts du pays au pire moment de lamenace allemande. Cet appui, comme celui de l'opinionamricaine, se rvle plus tard un atout trs prcieux lorsdes tensions avec Londres et Washington[73].Obtenant le ralliement de plusieurs possessions colonialesfranaises, notamment en Afrique grce au ralliement ra-pide du gouverneur Flix bou (le 28 aot le Tchad, leCongo et le Cameroun, le Gabon tant conquis dans lemois de novembre 1940), de Gaulle se place la tte duComit national franais partir du 24 septembre 1941.

    De Gaulle et le gouverneur-gnral Flix bou au Tchad(Afrique-quatoriale franaise) vers la n 1940.

    Mais il fait surtout en sorte que la France reste prsentedans le camp alli, par ses Forces franaises libres (FFL)qui continuent le combat sur les dirents fronts. Enoutre, partir de 1941-1942, il stimule et obtient le rallie-ment de la rsistance intrieure, grce au colonel Passy, Pierre Brossolette et Jean Moulin. Le 13 juillet 1942,le Comit national franais propose au gouvernement bri-tannique, qui l'accepte, de changer l'appellation ocielledu mouvement France libre en France combattante, and'intgrer la Rsistance intrieure[74].De nombreux facteurs sopposaient ce rapprochementde la rsistance intrieure et des forces franaises libres.Dans La France de Vichy, Robert O. Paxton remarquequ'en 1940, bien des rsistants de gauche refusent de voirun chef convenable dans ce militaire qu'ils croient tortproche de l'Action franaise, et qui en 1940, est entou-r par des Franais libres favorables un changement dergime. Selon Jean Pierre-Bloch, Christian Pineau, Henrid'Orlans ( comte de Paris ) et mme le gaulliste PierreLefranc, le ralliement la Rpublique n'aurait d'ailleurst que tactique. l'inverse, beaucoup de rsistants dedroite lui reprochent sa dissidence explicite avec Vichy moins qu'ils ne prfrent, comme Marie-MadeleineFourcade, n'avoir de relations qu'avec les services secretsbritanniques. Le rle de la radio, qui permet De Gaulled'tre la voix de la France et son acceptation politiqued'un retour la rpublique permettent Jean Moulin de lefaire reconnatre comme chef par lessentiel des rseaux,y compris communistes.Ds 1940, de Gaulle n'a de cesse que soient protgs lesintrts de la France, dans la guerre et aprs le conit.

  • 10 1 BIOGRAPHIE

    Le 7 aot 1940, il obtient ainsi de Churchill la signa-ture de l'accord des Chequers, par lequel le Royaume-Uni sengage sauvegarder l'intgrit de toutes les pos-sessions franaises et la restauration intgrale del'indpendance et de la grandeur de la France . Le gou-vernement britannique sengage de plus nancer toutesles dpenses de la France libre, mais de Gaulle insistepour que ces sommes soient des avances remboursables etpas des dons qui jetteraient une ombre, aussi tnue soit-elle, sur l'indpendance de son organisation.

    Wladyslaw Sikorski, Andrew McNaughton, Winston Churchill etCharles de Gaulle en 1941.

    Malgr les relations de conance scelles par traits entreChurchill et de Gaulle, les deux hommes ont des relationsparfois tendues, gnes par l'anglophobie que manifestaitle Gnral dans les annes 1920 et 1930. Et quand Chur-chill, court d'arguments, lance de Gaulle : Mais vousn'tes pas la France ! Vous tes la France combattante,nous avons consign tout cela par crit , de Gaulle r-plique immdiatement : J'agis au nom de la France.Je combats aux cts de l'Angleterre mais non pour lecompte de l'Angleterre. Je parle au nom de la France etje suis responsable devant elle . Churchill abdique alorsen poussant un J'avais espr que nous pourrions com-battre cte cte. Mais mes espoirs ont t dus parceque si vous tes si combatif que non content de luttercontre l'Allemagne, l'Italie et le Japon, vous voulez aussicombattre l'Angleterre et l'Amrique . De Gaulle re-cadre alors le dbat en prcisant : Je prends cela commeune plaisanterie, mais elle n'est pas du meilleur got. S'il ya un homme dont les Anglais n'ont pas se plaindre, c'estbien moi . Ils sont au bord de la rupture en 1941, au su-jet de la Syrie, puis en 1942 au sujet de sa convocation Alger aprs l'opration Torch.Les relations avec Franklin Delano Roosevelt sont plusproblmatiques. Le prsident amricain, personnellementfrancophile, a t du par l'eondrement de la Franceen 1940 et refroidi l'gard de De Gaulle par l'checde son entreprise devant Dakar (n septembre 1940).Les antigaullistes franais sont nombreux Washington,par exemple l'ancien secrtaire gnral du Quai d'OrsayAlexis Lger (Saint-John Perse) qui lui dcrit ce gn-

    ral comme un apprenti dictateur . Le prsident estaussi trs mal inform sur la situation en France parl'ambassadeur amricain Vichy (jusqu'au mois de mai1942), l'amiral Leahy, lui-mme intoxiqu par les p-tainistes. Il n'a donc aucune conance en de Gaulle. Unmot de De Gaulle Churchill explique en partie l'attitudefranaise face l'Amrique : Je suis trop pauvre pourme courber. De surcrot, au contraire du Gnral quimise beaucoup sur l'Empire franais, le prsident amri-cain est profondment hostile au systme colonial. Roo-sevelt projetait de faire de la France un tat faible, et leprojet d'Allied Military Government of Occupied Ter-ritories (AMGOT) allait d'ailleurs trs loin dans cette di-rection, en traitant la France comme un vaincu, plutt quecomme une des puissances victorieuses. La haine de Roo-sevelt tait tellement amboyante (il considrait de Gaulleau pire comme un futur tyran, au mieux comme un op-portuniste) que mme ses adjoints nirent par en prendreombrage, y compris le Secrtaire d'tat Cordell Hull qui,nalement, se rangea aux cts de la France libre et deson chef.

    Charles de Gaulle en compagnie du Premier ministre duRoyaume-Uni, Winston Churchill Marrakech en 1944.

    Jusqu'en 1943, les gouvernements en exil en Angleterrestaient contents de relations de bon voisinage avec lesgaullistes. C'est que tous ces gouvernements, qui taientlgaux, sestimaient installs dans une meilleure positionque les gaullistes qui taient, de fait, des dissidents parrapport au gouvernement Ptain que les Franais avaientinstall dans des conditions reconnues lgales, au dbut,par les grandes puissances. Cette situation volua lente-ment. Mais, en 1943, le gouvernement belge en exil deHubert Pierlot et Paul-Henri Spaak prcipita le mouve-ment et fut le premier reconnatre ociellement les Franais Libres et de Gaulle comme seuls reprsen-tants lgitimes de la France. Le gouvernement anglais, enl'occurrence Anthony Eden, un proche de Churchill, avaittent de dissuader les Belges, craignant que leur initia-tive serve de modle aux autres gouvernements en exil.Les Amricains eux-mmes intervinrent, croyant pou-voir utiliser les relations commerciales belgo-amricainespour faire pression sur les Belges (notamment quant leurs commandes d'uranium du Congo belge). Rien n'y t.

  • 1.6 Seconde Guerre mondiale 11

    Malgr les pressions britanniques et amricaines, Spaakt savoir ociellement que la Belgique considrait dslors le gouvernement Ptain comme dpourvu de lgiti-mit et le Comit des Franais libres, plus tard Gouver-nement provisoire de la France, comme seuls habilits reprsenter lgalement la France[75].

    1.6.3 Libration de la France et de ses colonies

    Le gnral de Gaulle, serrant la main du gnral Giraud, lademande de Franklin Delano Roosevelt (au centre) et de WinstonChurchill ( droite), lors de la Confrence d'Anfa Casablancale 17 janvier 1943.

    Malgr son exclusion par Roosevelt du dbarquementamricano-britannique en Afrique du Nord (oprationTorch), et surtout malgr le soutien apport par les tats-Unis l'amiral Franois Darlan, puis au gnral HenriGiraud, de Gaulle russit prendre pied Alger enmai 1943. Le Comit national franais fusionne avec leCommandement en chef franais civil et militaire dirigpar Giraud, pour donner naissance au Comit franais deLibration nationale (CFLN), dont Giraud et de Gaullesont coprsidents. Mais en quelques mois, de Gaulle mar-ginalise Giraud au sein du CFLN, avant de l'vincer ennovembre la faveur de la formation d'un nouveau gou-vernement, et de sarmer comme le seul chef politiquedes forces franaises allies[76]. Les Forces franaiseslibres fusionnent quant elle avec l'Arme d'Afrique pla-ce sous le commandement de Giraud : l'Arme franaisede la Libration, compose de 1 300 000 soldats, parti-cipe aux combats aux cts des Allis. Le 3 juin 1944 Alger, le CFLN devient le Gouvernement provisoire dela Rpublique franaise (GPRF).Aprs le dbarquement de Normandie, le 6 juin 1944,le gnral de Gaulle fait son entre en territoire franaissur la plage de Courseulles-sur-Mer, en Normandie, le 14juin, bord du torpilleur La Combattante. Ce mme jour,il prononce le premier discours de Bayeux et les Franaisdcouvrent alors son imposante silhouette (il mesure 1,93m).La fermet et la rapidit avec lesquelles le gnral de

    Gaulle rtablit l'autorit d'un gouvernement national per-mettent d'viter la mise en place de l'AMGOT, prvu parles Amricains, qui aurait fait de la France libre un tatadministr et occup par les vainqueurs.

    De Gaulle avec le gnral Charles Mast Tunis en 1943.

    L'itinraire du 20 au 25 aot 1944 du gnral de Gaullen'est pas tout fait clair ; il comporte des imprcisionset mme des incohrences selon les sources. Le 20 aot,il est Cherbourg. Il rencontre le gnral Eisenhower Tournires. Il passe par Coutances, Avranches, Fougrespour se rendre Rennes. Le 21 aot, il se recueille Paimpont sur la tombe de sa mre. Le 22 aot 1944, ilest Laval[77], o il prononce un discours type dans lasuite du discours de Bayeux. Il passe ensuite Meslay-du-Maine, Sabl, Le Mans, puis le 23 aot La Fert-Bernard, Nogent-le-Rotrou, Chartres, et arrive enn Rambouillet 18 h.La 2e division blinde du gnral Leclerc libre Paris le25 aot et celui-ci reoit la reddition de Von Choltitz. Cemme jour, le gnral de Gaulle se rinstalle au ministrede la Guerre, rue Saint-Dominique Paris, dans le bureauqu'il occupait jusqu'au 10 juin 1940, signiant ainsi queVichy tait une parenthse et que la Rpublique n'avaitjamais cess d'exister. Puis il se rend l'Htel de ville,o il prononce un discours dans lequel il insiste sur le rleessentiel jou par les Franais pour leur propre libra-tion. Le lendemain, 26 aot, il descend triomphalementles Champs-lyses et eurit la tombe du soldat inconnu.Le peuple dans ses profondeurs manifeste un enthou-siasme indescriptible[78].Le GPRF est transfr Paris. Le 9 septembre 1944, ungouvernement d'unit nationale est constitu, sous la pr-sidence du gnral de Gaulle. L'Assemble constituanteest ensuite lue en octobre 1945, six mois aprs la n dela guerre.

    Discours de De Gaulle aprs la Libration de Paris.

  • 12 1 BIOGRAPHIE

    Le gnral de Gaulle et son entourage dlent auxChamps lyses aprs la libration de Paris en aot1944.

    Charles de Gaulle prononant un discours Cherbourg, en aot 1944.

    1.7 Au Gouvernement provisoire de laFrance

    Article dtaill : Gouvernement provisoire de la Rpu-blique franaise.

    Bien aprs d'autres pays europens, les femmes franaisesobtiennent le droit de vote exerc pour la premire foisaux lections municipales de 1945. Pour la professeuredhistoire luniversit dAngers Christine Bard : Dansses mmoires, le droit de vote tient en trois lignes. Il avaitdes conceptions traditionnelles sur le rle des femmes,mme si cela ne la pas empch daccepter lide de la ci-toyennet des femmes, plus aussi subversive quau XIXesicle [79].D'autres rformes gurant dans ce mme pro-gramme sont entreprises la Libration : depuisles nationalisations la mise en place du monopolede l'assurance maladie obligatoire qu'est la scuritsociale (l'Alsace et la Moselle conserveront le systmed'assurance maladie instaur par Bismarck). Ellesdoivent beaucoup la SFIO, au Parti communiste et auMouvement rpublicain populaire (MRP) qui taient lesforces politiques les plus reprsentes dans le Conseilnational de la Rsistance.Prsident du Gouvernement provisoire, mais en dsac-cord avec l'Assemble constituante sur la conception del'tat et le rle des partis, de Gaulle remet sa dmis-sion sur la question des crdits militaires au prsident del'Assemble nationale, Flix Gouin, le 20 janvier 1946. Ila rempli la mission qu'il stait donne le 18 juin 1940 :librer le territoire, restaurer la Rpublique, organiser deslections libres et dmocratiques, entreprendre la moder-nisation conomique et sociale. Durant cette priode, ilexera de fait une fonction quivalente celle de chef del'tat.

    1.8 Parcours politique pendant la IVe R-publique

    Le 16 juin 1946, de Gaulle expose sa vision del'organisation politique d'un tat dmocratique fort Bayeux, en Normandie, dans un discours rest clbre ;mais il nest pas suivi. Il inaugure alors sa fameuse traverse du dsert jusqu'en 1958, date de son retourau pouvoir.

    1.8.1 Fondation du RPF

    Article dtaill : Rassemblement du peuple franais.

    En 1947, il fonde un mouvement politique, leRassemblement du peuple franais (RPF), an detransformer la scne politique franaise, de lutter contrele rgime exclusif des partis, de sopposer l'avancedu communisme et de promouvoir une nouvelle rformeconstitutionnelle privilgiant le pouvoir excutif. Ilpropose galement une troisime voie conomique(l'association capital-travail). Le RPF reprend galementles thmes de la droite la plus traditionnelle : ultra-conservatisme colonial (il critique jusqu' la constructionde lyces d'enseignement gnral Madagascar), an-ticommunisme virulent (exploitant les inquitudes surl'avance du communisme dans l'Union franaise eten Indochine) et mme, au moins jusqu'en 1950, laclmence l'gard de Philippe Ptain. Toutefois, lesdclarations du colonel Rmy rhabilitant le rle dumarchal Ptain seront immdiatement dsavoues parle gnral de Gaulle, mais pas l'initiative de Terrenoire,demandant son amnistie. Il est vrai, comme le rappellel'historien Ren Rmond (dans Les Droites en France),que c'est au nom de la rconciliation nationale qu'en1949 et 1950, le mme gnral de Gaulle plaidait pourl'largissement du vieillard de quatre-vingt-quinzeans .Le parti rallie des rsistants (dont Jacques Chaban-Delmas) mais aussi des notables comme douardFrdric-Dupont ou Edmond Barrachin (qui fut, dans lesannes 1930, directeur du comit central du Parti socialfranais). D'anciens ptainistes et mme d'anciens col-laborateurs parviennent sy faire admettre, notammentdans les sections d'Indochine et d'Algrie, dans le serviced'ordre, dans les rangs des syndicats ouvriers proches duR.P.F. et parmi les maires lus en 1947. Certains pol-mistes du parti, notamment Jean Nocher, dploient uneextrme agressivit verbale. Pour ces raisons, l'historienHenry Rousso (dans Le Syndrome de Vichy) discerne auRPF des tendances pro-ptainistes, soit quelles aientt envotes par la magie du verbe marchaliste, soitquelles aient t convaincues de son impact dans lopi-nion . Ren Rmond (Les Droites en France) prfrerapprocher le RPF de la ligne du bonapartisme et duboulangisme, tout en observant que le RPF est, dansl'histoire du gaullisme, l'pisode le moins loign de cequ'en France on a l'habitude de qualier de fascisme .Aprs un grand succs en 1947-1948 (35 % des suragesaux municipales de 1947, 42 % des snateurs lus en1948), le RPF dcline de 1949 1951. La gestion e-cace des vnements sociaux de l'automne 1947 par legouvernement de la troisime force a aaibli le mouve-ment gaulliste. Le recours de Gaulle semble alors moinsncessaire pour les conservateurs, les modrs et le patro-nat. Dans l'opposition, le RPF est frapp d'un vritableostracisme de la part des autres partis politiques, entrete-

  • 1.8 Parcours politique pendant la IVe Rpublique 13

    nu par le refus du gnral de Gaulle de se compromettreavec les autres partis. En 1951, le RPF obtient encore plusde 4 millions de voix (22,3 % des surages et 16,8 % desinscrits) et 117 dputs.Le RPF est irrmdiablement aaibli par la dfection devingt-sept dputs : ainsi, contre les consignes du Gnral,douard Frdric-Dupont et Edmond Barrachin votent laconance au gouvernement d'Antoine Pinay en 1952. Enjuillet, quarante-cinq autres font dfection. Les gaullistesse divisent alors entre les loyalistes, qui fondent l'Uniondes rpublicains d'action sociale (URAS), et les autres,qui rejoignent l'Action rpublicaine et sociale (ARS).

    1.8.2 Mise l'cart du pouvoir

    Aux lections locales de 1953, le RPF perd la moitide ses surages. Il entre alors en hibernation. Les lusgaullistes participeront encore avec le PCF l'chec dela Communaut europenne de dfense (CED) en 1954,avant la mise en sommeil dnitive du RPF le 13 sep-tembre 1955. la suite de la dfaite lectorale de son parti, le gnralde Gaulle se retire Colombey-les-Deux-glises et r-dige ses Mmoires de guerre. Pour certains observateurs,ce sont les cinq annes qui suivent qui constituent sa tra-verse du dsert proprement dite (voir ci-dessus).

    1.8.3 Retour au pouvoir en 1958

    Articles dtaills : Crise de mai 1958 et Communautselon la Constitution de 1958.

    L'instabilit ministrielle, l'impuissance de la IVe Rpu-blique face la question algrienne, dclenche par uneinsurrection le 1er novembre 1954, conduisent le rgime une crise grave. Des responsables politiques de tous bordsen viennent souhaiter le retour du Gnral.Le 13 mai 1958, un comit de vigilance appelle mani-fester contre le FLN Alger. Un comit de salut publicest cr, la tte duquel se trouve le gnral Massu, etcompos notamment du gnral Salan. Ce dernier pousspar Lon Delbecque, lance son appel au retour du gnralde Gaulle vive de Gaulle du haut du Gouvernementgnral, devant la foule le 15 mai. L'insurrection prendde l'ampleur et risque de dgnrer en guerre civile. Le19, le Gnral se dit prt assumer les pouvoirs de laRpublique[80] . Certains voient dans cette dclarationun soutien l'arme et sinquitent. Il rassure et insistesur la ncessit de l'union nationale et sil se prsente en-core comme le recours, il ne donne ociellement aucunecaution ni l'arme ni quiconque. Nanmoins, un pland'action militaire, baptis Rsurrection , a dj t misen place en cas d'chec des ngociations politiques.Le 29 mai, le prsident de la Rpublique, Ren Coty,fait appel au plus illustre des Franais . Charles de

    Gaulle accepte de former un gouvernement. Sous pres-sion, l'Assemble nationale l'investit le 1er juin, par 329voix sur 553 votants. Le gnral de Gaulle devient ain-si le dernier prsident du Conseil de la IVe Rpublique.Les dputs lui accordent la possibilit de gouverner parordonnance pour une dure de six mois, et l'autorisent mener bien la rforme constitutionnelle du pays[81].La nouvelle Constitution, labore au cours de l't 1958,est trs proche des propositions avances Bayeux, avecun excutif fort. Le gnral de Gaulle accepte cependantque le Parlement ait plus de poids qu'il ne le souhaitait.En particulier, de Gaulle doit renoncer l'lection du pr-sident de la Rpublique au surage universel (un lmentcentral de son dispositif constitutionnel qu'il nira par im-poser en 1962).La Constitution est adopte par rfrendum le 28 sep-tembre 1958, avec 79,2 % de oui . L'Empirel'approuve galement, sauf la Guine qui devient ainsi lapremire colonie franaise de l'Afrique sub-saharienne obtenir son indpendance. Charles de Gaulle est lupar un large collge lectoral, prsident de la Rpubliquefranaise et de la Communaut africaine et malgache, le21 dcembre, avec 78,51 % des surages. Il prend sesfonctions le 8 janvier 1959.Entre le moment de son entre en fonctions commeprsident du Conseil et son lection la prsidence dela Rpublique, Charles de Gaulle a largement amorc lapolitique qui marquera son passage au pouvoir : outrela volont de doter la France d'une nouvelle Constitu-tion, le Gnral se soucie de la politique europenne de laFrance (rencontre avec le chancelier Adenauer le 14 sep-tembre[Note 16]), de l'indpendance du pays face aux tats-Unis (mmorandum du 17 septembre adress au pr-sident Eisenhower), de l'assainissement des nances pu-bliques (mesures du 27 dcembre) et du sort de l'Algrie(il refuse les choix des comits de salut public et appelle la Paix des Braves en octobre).

    1.8.4 Crise de l'Algrie

    Articles dtaills : Guerre d'Algrie, Putsch d'Alger(1958), Je vous ai compris et Aaire Si Salah.Article connexe : Dcolonisation.

    la suite des checs de la IVe Rpublique en Indochineet en Algrie, une insurrection clate Alger et les put-schistes civils et militaires organisent un Comit de sa-lut public (en rfrence celui de la Rvolution fran-aise) le 13 mai 1958 pour maintenir l'Algrie fran-aise. Ils en appellent au retour du gnral de Gaulle.L'antenne d'Alger mise en place par le ministre de laDfense Jacques Chaban-Delmas ds 1957, dirige parLucien Neuwirth et Lon Delbecque, a inuenc les parti-sans de l'Algrie dans la Rpublique franaise. Comme l'arapport Olivier Guichard dans Avec de Gaulle (voir bi-bliographie), l'antenne d'Alger faisait surtout de la trans-

  • 14 1 BIOGRAPHIE

    mission : le travail d'inuence tait supervis par les deuxplus proches collaborateurs du gnral de Gaulle, Gui-chard lui-mme et, pour les militaires, Jacques Foccart.

    1.9 Mise en place des rseaux franais enAfrique

    Article dtaill : Franafrique.

    C'est sous l'autorit de De Gaulle que les rseaux de ceque l'on appellera plus tard la Franafrique furent misen place[82]. la tte d'une partie de son cabinet, issuede l'phmre Communaut franaise, Jacques Foccartmaintient des liens troits, non seulement de coopration,mais souvent de contrle, avec les nouveaux pouvoirs destats africains ayant accd l'indpendance, notammentau moyen d'accords de coopration militaire et nanciersmais aussi par l'action des services secrets. L'expressionde pr carr est alors courante, et ces liens politiqueset conomiques assurent un soutien diplomatique dans lastratgie d'entre deux blocs de De Gaulle.

    1.10 Prsident de la Ve Rpublique

    En novembre 1958, les gaullistes remportent les lectionslgislatives et obtiennent une confortable majorit. Le 21dcembre suivant, de Gaulle est lu prsident de la Rpu-blique avec 78,51 % des voix, au surage indirect, par uncollge de plus de 80 000 grands lecteurs[83].Charles de Gaulle prend ses fonctions de prsident de laRpublique le 8 janvier 1959, succdant ainsi RenCoty. Il engage de diciles mesures pour revitaliserle pays, avec en particulier une dvaluation de 29 %et l'introduction du nouveau franc (valant 100 anciensfrancs), qui fait revenir les centimes disparus depuis 1945.Sur la scne internationale, refusant la domination destats-Unis comme de l'URSS, il dfend une France ind-pendante, disposant de la force de frappe nuclaire. Il meten place galement les dbuts du programme spatial fran-ais. En tant que membre fondateur de la Communautconomique europenne (CEE), il pose son veto l'entredu Royaume-Uni.Le 6 fvrier 1968, dans le stade olympique de Grenoble,il devient le second prsident franais ouvrir une cr-monie olympique, l'occasion des Xe jeux olympiquesd'hiver[84].

    1.10.1 Quatre annes de conit en Algrie

    En ce qui concerne la guerre d'Algrie, de Gaulle suscitadabord de grands espoirs parmi les Franais dAlgrie,auxquels il dclara Alger le 4 juin 1958 : Je vous aicompris . Ce jour-l, il se garda de rien leur promettre deprcis, lors de ce discours, et ne reprit ni leur mot d'ordre

    d' intgration ni leur slogan Algrie franaise . Ilproclame que partir d'aujourd'hui, la France considreque, dans toute l'Algrie, il n'y a qu'une seule catgoried'habitants : il n'y a que des Franais part entire . Cen'est qu' Mostaganem, le 6 juin, qu'il pronona les mots : Vive l'Algrie franaise [85], exception davantage r-vlatrice d'un dsaccord que d'une adhsion, pour RenRmond[86].Mais il adopta aussi quelques mesures librales en direc-tion des insurgs algriens : paix des braves proposeau FLN en octobre 1958, grces accordes plusieursrebelles dont Yacef Sadi, condamn mort comme an-cien dirigeant du FLN pendant la bataille d'Alger, in-terdiction ocielle formelle des actes de torture. C'estgalement sous de Gaulle que les femmes musulmanesd'Algrie obtinrent le droit de vote, que l'on vit les mu-sulmans pouvoir enn voter galit avec les Europens(de ce fait, ds avant l'indpendance en 1962, une majori-t des maires d'Algrie sont eux-mmes des musulmans),ou que fut nomm le premier prfet musulman d'Algrie(Mahdi Belhaddad Constantine). De Gaulle annonaen personne la mise en uvre du plan de Constantine,dans cette ville, en septembre 1958 : ce plan prvoyait,sur cinq ans, la redistribution de 250 000 ha de terres, laconstruction de 200 000 logements et la cration de 400000 emplois[87].Il laissa son Premier ministre, Michel Debr, vilipen-der comme manuvre communiste le rapport acca-blant tabli par le jeune Michel Rocard, et qui dnonaitl'entassement inhumain de deux millions de personnes ci-viles dans des camps de regroupement . Ds 1959, deGaulle en revint aussi une solution classique de rpres-sion militaire. l't 1959, l'opration Jumelles , diteplan Challe, porta au FLN ses coups les plus rudes tra-vers tout le pays. Certes, de Gaulle ralisa rapidementqu'il n'tait pas possible de rsoudre le conit par unesimple victoire militaire, et l'automne 1959 il commen-a sorienter vers une solution conduisant inluctable-ment l'indpendance de l'Algrie. Mais jusqu' l'hiver1961/62, il choisit tout de mme de poursuivre la guerre,au prix de nombreuses victimes et, selon l'historien RmiKauer, d'un accroissement de l'usage de la torture. Jus-qu' la n de 1961, la lutte contre le FLN est mene avecautant de vigueur, et mme davantage, qu'avant. SelonConstantin Melnik, conseiller spcial de Michel Debrcharg de coordonner les services secrets, il y eut envi-ron 500 assassinats politiques entre 1958 et 1961.Il reste dicile de savoir quand de Gaulle comprit quel'indpendance tait la seule solution pour sortir d'unconit coteux en hommes, en argent et en prestige in-ternational. D'autant plus qu'il perd le soutien de procheset d'anciens combattants luttant pour l'Algrie franaise.douard Lebas, cet eet, crit le 17 mars 1963 dansCombat : Nous vivons depuis mai 1958 sur la plusgrande duperie de l'histoire et depuis octobre 1962 sur laplus grande imposture. La cause du mal c'est la volont te-nace, bien que suprieurement camoue, du Gnral de

  • 1.10 Prsident de la Ve Rpublique 15

    Gaulle. Il faut donc dnoncer la masse, sans subterfugeset sans faux-fuyants, le responsable du mal dont meurentla Rpublique et la Libert [88]. En 1961, de Gaulle tencore rdiger par Alain Peyrette un plan de partitionde l'Algrie, sans doute en fait pour faire pression sur leFLN. Au mme Alain Peyrette, il expliquait ds 1959que l'intgration de l'Algrie la France, dfenduepar les partisans de l'Algrie franaise, tait une utopie :deux pays culturellement si loigns et prsentant un telcart de niveau de vie n'avaient pas vocation en formerun seul. Sans compter qu'au vu de l'accroissement dmo-graphique des musulmans, ce serait ouvrir la porte leurimmigration massive en mtropole, dpassant de fort loinla simple venue traditionnelle de populations trangresappeles se fondre dans le creuset franais : Mon vil-lage deviendrait Colombey-les-Deux-Mosques ! [89].Ds le 16 septembre 1959, de Gaulle parle de l'autodtermination de l'Algrie. En janvier 1960, lelimogeage du gnral Jacques Massu, qui avait critiqu sapolitique, provoque la rupture avec les Franais d'Algrieet l'rection de barricades au centre d'Alger. Malgr ceclimat insurrectionnel, de Gaulle abroge dnitivement,par une ordonnance du 4 juin 1960, la peine de dporta-tion[90]. En janvier 1961, un rfrendum valide cependantmassivement sa politique des deux cts de la Mditerra-ne.Avec l'arme de conscription, il fait chec au putsch desgnraux Alger en avril 1961. Quatre jours susent mettre en droute le quarteron de gnraux la re-traite stigmatiss dans un de ses plus clbres discours.Cette attitude provoqua de fortes rsistances dans certainsgroupes nationalistes et de Gaulle fut oblig de rprimerdes soulvements de pieds-noirs en Algrie.Il fut la cible d'organisations terroristes telles quel'Organisation arme secrte (OAS), qui le surnommait la Grande Zohra . La mtropole devint alors l'objet deplusieurs vagues d'attentats commis par l'OAS. L'amiralPierre Lacoste, ancien directeur de la DGSE, a dclar en1992 dans un interview au journal The Nation que cer-tains lments du rseau Gladio taient impliqus dansdes activits terroristes contre le gnral de Gaulle et sapolitique en Algrie[91],[92],[93].Dans la nuit du 17 au 18 octobre 1961, une manifestation,interdite par les autorits franaises, fut organise parle FLN. Les manifestants protestaient contre le couvre-feu impos en mtropole aux ressortissants d'Afrique duNord. Cette manifestation fut frocement rprime. Leprfet de police Maurice Papon couvrit ses policiers etle gouvernement l'ensemble de ses fonctionnaires. Se-lon le rapport de l'avocat gnral Jean Geromini, remisle 5 mai 1999, il y aurait eu au moins 48 noys pen-dant la nuit du 17 au 18 octobre, sans compter les per-sonnes dcdes des suites de leurs blessures ou de leursconditions d'internement. Selon l'historien et ditorialisteAlain-Grard Slama et Linda Amiri (laquelle a dpouillles archives de la prfecture de police), le chire total est

    de l'ordre d'une centaine de victimes (L. Amiri compte100 morts certains et 31 disparus). Les propos tenus parde Gaulle en conseil des ministres quelques jours aprs ledrame sont connus grce aux notes prises par son ministreLouis Terrenoire, et publies par ric Rossel.Quelques mois plus tard, le 8 fvrier 1962, lors d'une ma-nifestation interdite, huit manifestants sont tus par lesforces de police au mtro Charonne et un autre mour-ra l'hpital. Selon l'historien Jean-Paul Brunet, Charlesde Gaulle est tout autant responsable de cette tragdieque le ministre de l'Intrieur Roger Frey, le prfet de po-lice Maurice Papon, et toute la hirarchie policire . Unedes raisons est, explique J.-P. Brunet, l'autoritarisme du Gnral. Selon l'historien Alain Dewerpe, directeurd'tudes l'cole des hautes tudes en sciences sociales,le massacre de Charonne n'est qu'une consquence lo-gique des habitus de pouvoir de De Gaulle et des gaul-listes, dans la situation de la guerre d'Algrie.Quant l'organisation terroriste OAS, elle fut rprimepar des moyens impitoyables : excutions sommaires, tor-tures, polices parallles, lesquelles n'hsitaient pas re-cruter des truands, comme Georges Boucheseiche et JeanAug. La Cour de sret de l'tat fut cre en janvier1963 pour en condamner les chefs, lesquels seront amnis-tis quelques annes plus tard (la Cour continue ensuitede juger des terroristes, jusqu' sa suppression, en aot1981). En 1962, la suite des accords d'vian, un cessez-le-feu est proclam en Algrie. Le gnral de Gaulle tadopter par rfrendum l'indpendance de l'Algrie, ef-fective en juillet 1962[94].Trs irrit par le ralliement massif des Pieds-Noirs l'OAS, l'heure o celle-ci lance une vague de terreuret de terre brle en Algrie, de Gaulle n'aura aucun motde compassion ni en public ni en priv pour le sort dumillion de Franais rapatris d'Algrie en juillet 1962 la suite de la non-application des accords d'vian par lapartie algrienne.Le lendemain de la signature des accords d'vian, les sup-pltifs de l'arme franaise, les harkis, furent dsarmspar la France, et abandonns sur place. Le gouvernementsopposa au rapatriement de la majorit d'entre eux, et tinterdiction aux ociers de l'arme de les aider gagnerla France, hors du cadre d'un plan de rapatriement g-nral. Le 25 juillet 1962, en Conseil des ministres, alorsque les massacres de pieds-noirs et harkis avaient com-menc, Charles de Gaulle sopposa au repli des harkisen France[95]. Par la suite, plusieurs dizaines de milliersfurent torturs et massacrs[96].En avril 1962, le Premier ministre Michel Debr futremplac par Georges Pompidou, et, en septembre dela mme anne, Charles de Gaulle proposa d'amender laConstitution an de permettre au prsident d'tre lu ausurage universel direct, dans le but de renforcer sa lgiti-mit gouverner directement. La rforme de la Constitu-tion, malgr l'opposition du Parlement, de la totalit de lagauche et d'une bonne partie de la droite, fut aisment ac-

  • 16 1 BIOGRAPHIE

    cepte lors du rfrendum du 28 octobre 1962 avec 62,25% de oui .En octobre, l'Assemble nationale vota une motion decensure contre le gouvernement Pompidou, mais le G-nral refusa la dmission que lui prsentait le Premier mi-nistre et choisit de dissoudre l'Assemble. Les nouvelleslections renforcrent la majorit parlementaire gaulliste.

    1.10.2 Opposition arme

    Attentat du Petit-Clamart Article dtaill : Attentatdu Petit-Clamart.

    Un polytechnicien ingnieur de l'armement nomm JeanBastien-Thiry g de 35 ans considrait la politique al-grienne du gnral de Gaulle comme une politiqued'abandon et de trahison. Il conut donc, avec l'aide depersonnes partageant son point de vue (appartenant l'OAS - Organisation arme secrte), d'enlever de Gaulle,voire, si ce rapt se rvlait impossible, de le tuer. Un at-tentat fut ainsi organis au Rond Point du Petit-Clamartle 22 aot 1962. Il choua, bien que la DS prsidentiellemontrt, parmi les impacts (environ 150 balles tires),une trace de balle passe latralement quelques centi-mtres des visages du couple prsidentiel.Dans la dclaration qu'il t lors de l'ouverture de son pro-cs en 1963, Bastien-Thiry dveloppa les motivations ducomplot bas essentiellement sur la politique algriennedu gnral de Gaulle. Parce qu'il avait fait tirer sur unevoiture occupe par une femme et parce que, contraire-ment aux autres membres du commando, il n'avait paspris de risques directs, Bastien-Thiry ne fut pas graci parle gnral de Gaulle, comme le furent les autres membresdu commando (tout comme d'ailleurs les autres membresde l'OAS qui furent pris). Bastien-Thiry sera fusill aufort d'Ivry en mars 1963.En 1968, une premire amnistie permit aux derniersresponsables de l'OAS, aux centaines de partisans del'Algrie franaise encore dtenus, et d'autres, exils,comme Georges Bidault ou Jacques Soustelle, de ren-trer en France. D'anciens activistes de l'Algrie franaisese rallirent alors au gaullisme, en adhrant au SAC ouaux Comits de dfense de la Rpublique (CDR). DeGaulle dclare Jacques Foccart le 17 juin 1968 : Ilfaut que nous allions vers une certaine rconciliation. .Les autres condamnations pnales sont eaces par leslois d'amnistie de 1974 et 1987.

    Autres attentats L'attentat du Petit-Clamart fut celuiqui fut le plus prs de russir. De nombreux autres atten-tats furent organiss contre la personne du Gnral, parmilesquels :

    8 septembre 1961 : une bombe commande distance est enterre sur la route de Colom-

    bey, Pont-sur-Seine, mais la DS prsidentielleconduite par le gendarme Francis Marroux n'est pasendommage[97].

    23 mai 1962 : de Gaulle devait tre abattu surle perron de l'lyse par un tireur post prs del'lyse[98].

    15 aot 1964 : de Gaulle est en visite au Mont Fa-ron, prs de Toulon. Une jarre avait t pige dehuit pains de TNT mis feu distance. Ceux-cin'explosent pas, le dclencheur tant trop faible[99].

    Le thme d'un attentat imaginaire contre le gnral deGaulle faisant suite celui du Petit-Clamart fut exploi-t dans le lm Chacal (1973) tir du roman ponyme deFrederick Forsyth.

    1.10.3 lection prsidentielle de 1965

    Article dtaill : lection prsidentielle franaise de1965.Durant la campagne de l'lection prsidentielle de 1965,

    Rsultats (par dpartement) de l'lection prsidentielle de 1965.

    ses adversaires lui reprochent en particulier son na-tionalisme . La tlvision, pour la premire fois dansl'Histoire, joue un rle trs important dans une cam-pagne ; malgr son refus de jaspiner dans lestranges lucarnes , le Gnral se plie cette nouvellemode entre les deux tours. On note aussi l'apparition dessondages, qui mettent en vidence la baisse des intentionsde vote en sa faveur avant le premier tour[100].Lors du premier tour, il arrive en tte avec 44,65 % dessurages, devant notamment le candidat de la gauche,

  • 1.10 Prsident de la Ve Rpublique 17

    Charles de Gaulle en compagnie du chancelier allemand, KonradAdenauer (1963).

    Franois Mitterrand (31,72 %), et Jean Lecanuet (15,57%). Il est rlu prsident de la Rpublique le 19 dcembre1965, avec 13 083 699 voix, soit 55,20 % des voix.

    1.10.4 Politique trangre

    Article connexe : Histoire de France sous la CinquimeRpublique.

    De Gaulle dut attendre la n du conit en Algrie

    Tmoignage de la rconciliation franco-allemande, en 1962.

    pour lancer rellement sa politique trangre. En eet,le boulet algrien [101] rduisait considrablement la

    marge de manuvre franaise et, d'une faon ou d'uneautre, il fallait avant toute chose mettre un terme ceconit. La politique de l'indpendance nationale estalors pleinement mise en application.Sur le plan international, de Gaulle continua promou-voir l'indpendance de la France : il refusa deux reprises(en 1963 et en 1967) l'entre du Royaume-Uni dans laCEE[102] ; il condamna ds 1964 l'aide militaire apportepar les tats-Unis la Rpublique du Vit Nam (dite VitNam du Sud) contre la rbellion communiste mene par leVit Cong (gurilla soutenue par le Nord-Vit Nam), ain-si que la riposte isralienne au blocus du dtroit de Tiranpar l'gypte, lors de la Guerre des Six Jours en 1967. Ilprit l'une de ses dcisions les plus spectaculaires en 1966,lorsque la France se retira du commandement militaireintgr de l'OTAN, expulsant les bases amricaines deson territoire.En ce qui concerne l'Europe, de Gaulle tait partisand'une Europe des nations et des tats, qui peuventseuls rpondre des nations, celles-ci devant conserverleur pleine souverainet et leur personnalit historique etculturelle : Si vous voulez que des nations sunissent, necherchez pas les intgrer comme on intgre des mar-rons dans une pure de marrons. Il faut amener leursgouvernants lgitimes se concerter, et un jour, seconfdrer, c'est--dire mettre en commun certainescomptences, tout en restant indpendants pour tout lereste[103] ; de Gaulle tait franchement hostile l'ided'une Europe supranationale, c'est--dire celle prne parJean Monnet, une Europe avec un gouvernement fd-ral compos des actuelles commissions, qui surplombe-rait des gouvernements provinciaux, lesquels ne soccu-peraient plus que des questions secondaires ; en 1962, leterme volapk[Note 17] qu'il employa pour parler de la co-opration europenne entrana le dpart du gouvernementdes cinq ministres MRP.C'est l'Europe qui xe le cadre de son ambition, une Eu-rope qui va mme de l'Atlantique l'Oural , gommantd'un trait le provisoire rideau de fer. En eet, le pivotde la politique trangre franaise est le rapprochementavec l'autre poids lourd du continent, l'Allemagne. Ainsi,de Gaulle tourne le dos aux Anglo-Saxons .On pourrait en eet stonner de l'intransigeance gaul-lienne vis--vis du Royaume-Uni, tout particulirement.Pour de Gaulle, comme pour Churchill d'ailleurs, leRoyaume-Uni n'avait fait que son devoir en 1940, et iln'existait pas de dette franaise envers Londres lie la Seconde Guerre mondiale. De Gaulle dsapprou-vait les relations privilgies rapprochant le Royaume-Uni des tats-Unis depuis la guerre, ainsi que la prf-rence conomique impriale qui jouait entre celle-ci et lestats du Commonwealth, rendant ainsi dicile son ad-mission au sein de l'Europe. Aussi l'entre d'un tel che-val de Troie amricain au sein de l'Europe lui paraissait-elle non souhaitable. Les Britanniques attendront donc1973 avant de rejoindre la communaut conomique eu-

  • 18 1 BIOGRAPHIE

    ropenne (CEE).

    Charles de Gaulle et H Chi Minh suspendus en egie lors du Jour national de la honte , Sagon, en juillet 1964.

    La position de De Gaulle face au monde communistetait sans ambigut : il tait totalement anticommuniste.Il prne la normalisation des relations avec ces rgimes transitoires aux yeux de l'Histoire de faon jouerle rle de pivot entre les deux blocs. La reconnaissancede la Rpublique populaire de Chine ds le 27 janvier1964 va dans ce sens. De mme sa visite ocielle enRpublique populaire de Pologne (6-11 septembre 1967)fut un geste qui montrait que le prsident franais consi-drait le peuple polonais dans son ancrage historique. Laquestion allemande, et donc le trac de la frontire occi-dentale de la Pologne, ont jou un grand rle dans les dis-cussions ocielles. Malgr la domination exerce alorspar l'URSS, de Gaulle fut accueilli spontanment par desfoules enthousiastes. Il misait, comme il l'a dit devant ladite (Assemble nationale) polonaise, sur un futur ola Pologne recouvrerait sa place d'tat indpendant. Ilsagissait une fois de plus de son projet d'Europe conti-nentale largie[104]. Durant la Seconde Guerre mondiale,De Gaulle avait soutenu le mouvement royaliste tchetnikde Draza Mihailovic, dont il tait un admirateur[105].Tito, l'un des leaders des non-aligns, ne le lui pardon-nera jamais et soutiendra fortement l'indpendance alg-rienne avec des livraisons massives d'armes au FLN viala Tunisie.Les relations entre de Gaulle et les tats-Unis sont assu-rment les plus pices. Malgr quelques tensions vives,de Gaulle sera toujours au rendez-vous en cas de vraicoup dur : Berlin ou Cuba, notamment. En revanche,ds que les Amricains entament le processus d'escalade,de Gaulle prend publiquement ses distances, notammentpar son discours du 1er septembre 1966 Phnom Penhvilipendant l'attitude amricaine au Vit Nam, thtred'opration que la France connaissait fort bien[106].La notion gaullienne d' une certaine ide de la France se manifeste surtout en politique trangre. De Gaullepuise une force dans sa connaissance de l'Histoire deFrance, qu'il a d'ailleurs enseigne Saint-Cyr. Selon lui,

    le poids de cette Histoire donne la France une posi-tion particulire dans le concert des nations. Convaincuque les relations internationales reposent avant tout surles ralits nationales et les rapports entre tats, il sur-nomme l'ONU le machin et refuse que la Franceparticipe au nancement des oprations menes par les casques bleus contre la scession katangaise au Congoex-belge. Passablement irrit par l'attitude du Nigeria lorsde l'explosion de Gerboise bleue[107], le troisime essainuclaire franais, en 1960, et souhaitant le morcelle-ment de ce pays, comme il le raconte son conseilleraux aaires africaines, Jacques Foccart[107], de Gaullesoutient la scession du Biafra en 1967-68, qui fait un deux millions de morts[107].En Afrique francophone, il ne prend pas position face auxcoups d'tat qui se succdent, mais apporte son soutienaux rgimes en place quand il le juge ncessaire, faisantintervenir les troupes franaises au Gabon (1964) et auTchad (1968).

    Force de frappe Article dtaill : Force de dissuasionnuclaire franaise.

    Convaincu de l'importance stratgique de l'arme nu-claire, de Gaulle poursuit le dveloppement de celle-ci,sous la protestation de l'opposition qui n'y voyait qu'une bombinette . La rponse de De Gaulle sera : Dansdix ans, nous aurons de quoi tuer 80 millions de Russes.Eh bien je crois qu'on n'attaque pas volontiers des gensqui ont de quoi tuer 80 millions de Russes, mme si ona soi-mme de quoi tuer 800 millions de Franais, sup-poser qu'il y et 800 millions de Franais [108],[109].Le rle des tats-Unis dans cette aaire parat trange.Kennedy proposa de Gaulle de lui donner des missilesPolaris, comme il l'avait fait avec le Royaume-Uni(accords de Nassau). Mais de Gaulle refusa, dclarantqu'il voulait que la France se btisse elle-mme unearme. La question nuclaire empoisonna les relationsfranco-amricaines durant toutes les annes 1960. Il fal-lut attendre Richard Nixon pour trouver un premier pr-sident amricain clairement gaullien . Nixon contournad'abord les contraignantes lgislations amricaines dansle domaine nuclaire avant d'ouvrir ociellement la voiede la collaboration nuclaire franco-amricaine. Le grosdu travail tait dj fait et les bombinettes franaisesdj fort ecaces.

    Conversion des dollars Sur la recommandation del'conomiste Jacques Rue qui voyait la conqute del'espace et le conit vietnamien dsquilibrer la balancedes paiements des tats-Unis, de Gaulle rclama cesderniers la contrepartie en or d'une forte proportion desdollars dtenus par la France. L'opration tait lgale, carle dollar tait dni ociellement comme correspondant 1/35 d'once d'or. Rglements internationaux obligent,les tats-Unis durent obtemprer et de Gaulle t proc-

  • 1.10 Prsident de la Ve Rpublique 19

    der par la Marine nationale au rapatriement de la part del'or de la Banque de France dpos New York auprsde la Banque fdrale de rserve[110]. En 1971, les tats-Unis mettront n la parit pour faire otter le dol-lar. la suite des chocs ptroliers de 1973 et de 1979,les cours de l'or senvoleront : le conseil de Jacques Ruetait judicieux long terme.

    Le Qubec libre Article dtaill : Vive le Qubeclibre !.

    Lors d'une visite d'tat au Canada en 1967 an, ociel-lement, de prendre part aux festivits entourant l'expo67 comme l'y avait invit le Premier ministre qubcoisDaniel Johnson, de Gaulle provoqua l'indignation des au-torits fdrales canadiennes, lorsqu' Montral, devantune foule de plus de 100 000 Qubcois, il ponctua sondiscours d'un retentissant : Vive Montral, vive le Qu-bec vive le Qubec libre ! , salu par une ovation g-nrale. Cela dclencha une crise avec le gouvernement ca-nadien. la suite du discours de De Gaulle, qui contenaitun certain nombre de clins d'il, le Premier ministre ca-nadien, Lester B. Pearson rpliqua schement de Gaulledans un discours livr le lendemain, dclarant que lesCanadiens n'ont pas besoin d'tre librs , et faisant sa-voir trs clairement que de Gaulle n'tait plus le bienvenuau Canada. Il repartit sance tenante pour la France, d-laissant le croiseur qui l'avait amen, le Colbert. Le but deDe Gaulle n'tait pas de provoquer un scandale entrele Qubec et le gouvernement fdral canadien, mais plu-tt de regoner les Franais du Canada face aux voi-sins Anglo-Saxons. Il dclara d'ailleurs dans la foule decette visite au Qubec, je leur ai fait gagner 30 ans .Dans la perspective de la Seconde Guerre mondiale, cettedclaration fut ressentie comme injuste par les Canadiensanglophones qui avaient soutenu la France libre, alors queles Qubcois francophones, soucieux de l'indpendancedu Canada vis--vis du Royaume-Uni, taient moins en-thousiastes pour participer l'eort de guerre. Des en-voys de la France libre, lisabeth de Miribel et le ca-pitaine de vaisseau Georges Thierry d'Argenlieu - dontle titre de suprieur majeur de la province des Carmesde Paris tait cens lui valoir le respect des catholiques -tentrent en 1941 de rallier les Canadiens la cause dugnral de Gaulle.Les ractions furent non seulement diplomatiques, maisaussi populaires. Par exemple, les habitants du boule-vard de Gaulle, Ottawa, obtinrent de la ville en d-cembre 1967 que leur rue soit rebaptise boulevardConfdration, une dcision qui ne t toutefois pasl'unanimit[111],[112].Le gouvernement d'Ottawa dut ds cette poque traiteravec une attention particulire les revendications du Qu-bec qui, fort de cet encouragement qui laissait prsager unsoutien fort de la France si besoin, commena parler defaire scession.

    De plus, lors de la confrence de presse du 27 novembre1967 l'lyse, Charles de Gaulle justia une fois de plusson geste d'clat par un discours engag, ponctu par unsolennel allons, allons, pour eux aussi, pour eux surtout,il faut que la France soit la France ! [113].Cette dclaration tait cohrente avec la pense du g-nral de Gaulle qui, dclar Alain Peyrette en sep-tembre 1965 : L'avenir du Canada franais, c'estl'indpendance. Il y aura une Rpublique franaise duCanada . Selon Alain Peyrette, sans prjuger de laforme que la souverainet qubcoise devait revtir, deGaulle, avec ce sens historique qui valut la France sonsalut, sen vint donc Montral, en juillet 1967, exhorterles Canadiens franais prserver leur identit franaisedont, sous Louis XV, l'indirence des lites franaisesavait fait si lgrement bon march. Vive le Qubeclibre ne fut pas plus improvis que l'appel du 18 juin1940. L'appel la libert, lanc le 24 juillet, n'eut rien defortuit[114].

    1.10.5 Mai 68

    Article dtaill : Mai 68.

    Outre la rforme nancire de 1958, la France bn-cie des Tre