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Chopin

Chopin - BOSZNicolas Chopin (1771–1844), père du compositeur banquier à Torun, pour payer ses dettes. La dot ne suffit pas, les dettes s’accumulent et le comte fuit à l’étranger,

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  • Chopin

  • Texte, sélection de photographies et conceptionMieczysław Tomaszewski

    Conception graphiqueWładysław Pluta

    TraductionBertrand Pério, www.atominium.com

    RédactionTomasz Chomiszczak, Joanna Kułakowska-Lis

    Coordination des tâches rédactionnellesJoanna Kułakowska-Lis, Jakub Kinel

    CoopérationMałgorzata Fiedor, Agnieszka Simonides

    Rédaction de la description et de la liste des illustrationsJoanna Kułakowska-Lis

    DTPBOSZ, Jakub Kinel

    Photographies contemporainesWaldemar Panów, Zbigniew Panów, Wojciech Buss

    Préparation des photographies à l’impressionStudio Kolor

    ImpressionGorenjski Tisk, Kranj

    Printed in Slovenia

    © Copyright by Polskie Wydawnictwo Muzyczne SA, Kraków, 2009

    © Copyright by BOSZ, Olszanica, 2009

    Aucune partie de la présente publication ne peut être utilisée sans l’accord préalable écrit des éditeurs et des propriétaires des objets reproduits. Les objets et les documents d’archive présentés proviennent des collections suivantes : l ’Institut National de Frédéric Chopin, la Société Frédéric Chopin, le Musée de Frédéric Chopin à Varsovie, la Bibliothèque Jagellonne, le Musée National de Varsovie, le Musée National de Cracovie, la Bibliothèque Nationale, la Fondation des Princes Czartoryski, le Musée National de Poznan, PWM (maison d’édition polonaise d’oeuvres musicales), le Musée Historique de la Ville de Varsovie, le Musée de la Littérature « Adam Mickiewicz » à Varsovie, la Fondation Ciechanowiecki à Varsovie, Tate Galery, Londres, le Musée Carnavalet, Paris (©Bridgeman/BE&W), le Musée du Louvre, Paris (©RMN/BE&W)

    Première éditionMaison d’édition BOSZOlszanica, Pologne, 2010Polskie Wydawnictwo Muzyczne SACracovie, Pologne, 2010

    38-622 Olszanica 311 Bureau: 38-600 Lesko, ul. Przemysłowa 14tél. +48 13 469 90 00fax +48 13 469 61 88e-mail: [email protected] 978-83-7576-089-7

    31-111 Krakówal. Krasińskiego 11atél. +48 12 422 70 44 centralfax +48 12 422 01 74e-mail: [email protected]

  • S o m m a i r e 1 F o y e r f a m i l i a l 6 2 R a c i n e s 2 4 3 L a c a m p a g n e 3 6 4 V a r s o v i e 5 2 5 L e s p r e m i e r s v o y a g e s 7 8 6 S o u l è v e m e n t 1 1 6 7 P a r i s 1 4 2 8 M o u v e m e n t r o m a n t i q u e 1 6 0 9 P i a n i s t e 1 7 6 10 C o m p o s i t e u r 1 9 0 11 S a l o n s 2 0 2 12 R e n c o n t r e à M a r i e n b a d 2 1 8 13 M a j o r q u e 2 3 2 14 N o h a n t 2 5 2 15 D i s s o n a n c e s 2 7 0 16 L a p a t r i e e t   l a f o i 2 8 4 17 D e r n i è r e s a n n é e s 3 0 0 18 D e r n i e r s j o u r s 3 1 8 19 R é s o n a n c e 3 3 8 L i s t e d e s i l l u s t r a t i o n s 3 5 2

  • F o y e r f a m i l i a l

    Les habitudes, que Chopin connut avant toutes autres, et entre lesquelles il grandit comme dans un berceau solide et moelleux, furent celles d’un intérieur uni, calme, occupé ; aussi ces exemples de simplicité, de piété et de distinction lui restèrent toujours les plus doux et les plus chers

    Franz Liszt, Chopin, 1852

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  • Tekla Justyna Chopin, née Krzyzanowska (1782–1861), mère de Frédéric Chopin

    Toutes les sources – lettres, souvenirs et recueils – s’accordent pour parvenir au même constat : Frédéric Chopin naît, grandit et reste jusqu’à la fin de ses jours entouré d’une famille unie et heureuse. Franz Liszt a raison : la maison familiale de Chopin est un véritable refuge « uni, calme, occupé ». Cet ami et premier monographe de Chopin couronne son opinion par une phrase dont la vérité semble être confirmée par d’autres témoignages : « Les domestiques vertus, les religieuses coutumes, les pieuses charités, les rigides modesties l’entourèrent d’une pure atmos-phère, où son imagination prit ce velouté tendre des plantes qui ne furent jamais exposées aux poussières des grands chemins »1.

    De tous les compositeurs, c’est bien Chopin qui a eu une enfance «  idyllique ». Jaroslaw Iwaszkiewicz, un poète polonais, conclut ses pensées au sujet du foyer familial de Justyna et Nicolas Chopin – ap-pelé par ailleurs « une maison extraordinaire » – par une comparaison : « Dans ce foyer familial, chacun des membres éprouve pour les autres une amitié profonde et rare. Alors que Beethoven doit se battre contre son père ivrogne et que Bach, jeune orphelin, est laissé à la merci de son frère, Chopin, dans son cocon familial, est entouré de l’amour tendre de sa mère, de son père et de ses sœurs »2.

    A la naissance de Chopin, cette « maison extraordinaire » se situe à Zelazowa Wola, au calme, loin de l’agitation du monde, bercée par le murmure tranquille de la rivière Utrata, au bord de la forêt de Kampinos sur la terre de Sochaczew en Mazovie, à cinquante kilomètres de Varsovie.

    Même si le futur auteur de Fantaisie sur des airs polonais n’a vécu ici que les six ou sept premiers mois de sa vie, et qu’il n’y reviendra qu’à quelques reprises, cet endroit restera à jamais associé au nom de Chopin et de-viendra pour tous les amoureux de sa musique un lieu culte.

    C’est à Zelazowa Wola que les parents de Chopin se sont connus et aimés avant de se marier en 1806 à Brochow, commune avoisinante. A l’époque, le village appartient depuis huit ans seulement à la famille Skarbek. Cette famille particulière est marquée par une destinée très spéciale, pour ne pas dire romanesque. Le propriétaire de Zelazowa Wola est le comte Kacper Skarbek, capitaine de la cavalerie nationale. Ce bon vivant irresponsable épouse Ludwika, fille de Jakub Fenger,

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  • Nicolas Chopin (1771–1844), père du compositeur

    banquier à Torun, pour payer ses dettes. La dot ne suffit pas, les dettes s’accumulent et le comte fuit à l’étranger, laissant à Zelazowa Wola sa brave femme et leurs cinq enfants. C’est sa cousine germaine et amie, Justyna Krzyzanowska, probablement déjà orpheline, qui l’aide à la ges-tion domestique. « Probablement », car le fil retracé scrupuleusement par les héraldistes examinant sa généalogie s’arrête là3. Tout ce que l’on sait des grands-parents maternels de Chopin, Jakub Krzyzanowski et Antonina Wolominska, est que, le 14 septembre 1782, ils ont eu une fille nommée Tekla Justyna (à Izbica Kujawska, territoire appartenant à  la famille Skarbek). Au moment de son mariage avec Nicolas Chopin, de six ans son aîné, Justyna a 24 ans et se distingue par sa beauté exceptionnelle aux nobles traits, que l’on devine encore 24 ans plus tard sur le portrait peint par Ambrozy Mieroszewski.

    Nicolas Chopin arrive à Zelazowa Wola en 1802 en tant que précepteur des enfants de la famille Skarbek, abandonnés par leur père. A l’époque, il vient d’être libéré de sa tâche qui était d’assurer l’éducation de deux jeunes filles, mesdemoiselles Laczynski, du village voisin de Kiernozia. L’une d’elles, Maria, se mariera bientôt. Devenue madame Walewska, elle charmera Napoléon non seulement par sa beauté mais également par sa subtile connaissance de la langue française. Parmi les jeunes de la famille Skarbek, c’est le comte Fryderyk qui mérite le plus que l’on s’y attarde. Il rentrera dans l’histoire de la culture polonaise en tant que savant, historien et écrivain. Il deviendra également le parrain4 de Chopin, qui portera son prénom en sa mémoire. Leurs destins vont se croiser à nouveau : Jozef, son fils, épousera Maria Wodzinska, dont les projets de mariage avec Chopin ne verront pas le jour ; Jozef et Maria divorceront peu de temps après. Un autre élève de Nicolas, Michal, l’héritier de Zelazowa Wola, se suicidera.

    Jusqu’à il n’y a pas très longtemps, l’histoire de la famille du père de Chopin était emplie de mystères et d’incertitudes. Des études rigou-reuses, menées notamment par Gabriel Ladaique5, ont levé le voile sur de nombreuses questions, mais quelques zones d’ombre subsistent. Ces études ont notamment permis de rejeter une hypothèse, autrefois très répandue, qui prêtait des origines polonaises à  la famille de Nicolas,

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  • Justyna Izabela (1811–1881), sœur du com-positeur, épouse d’Antoni Feliks Barcinski, professeur de mathématiques

    Ludwika Marianna (1807–1855), sœur aînée de Chopin, épouse de Jozef Kalasanty Jedrzejewicz, professeur de droit et d’administration

    soi-disant arrivée en Lorraine avec le roi Stanislas Leszczynski. Bien que Nicolas Chopin se soit rendu en Pologne (1787) grâce à ses relations avec le groupe des anciens participants à la confédération de Bar, qu’il se soit intégré et polonisé, les origines françaises de sa famille ne laissent planer aucun doute.

    Certains détails relevés récemment peuvent paraître étonnants. La fa-mille Chopin ne vient pas de Lorraine, mais du Dauphiné. Le grand-père paternel de Chopin, François, le deuxième prénom de Frédéric Chopin, a pendant des années fait de la contrebande de tabac avant de s’installer à Marainville, où il travaillait en tant que charron et viticulteur. Ces chemins de contrebande reliaient selon toute vraisemblance la mer Méditerranée à la Lorraine6.

    Dans la correspondance entre Nicolas et ses parents, une seule lettre a pu être retrouvée. Nicolas l’a expédiée de Varsovie en septembre 17907, et il y mentionne son envie de retourner à Marainville. Pourquoi décide-t-il finalement de rester en Pologne, de participer au soulèvement de Kosciuszko et de travailler comme précepteur puis comme professeur de français ? Nous l’ignorons, comme nous ignorons également ce que Frédéric connaissait du passé de son père et de son grand-père. Lorsqu’il vivait en France, pourquoi n’a-t-il jamais essayé de rendre visite à sa fa-mille française ?

    La vie familiale se déroule au début entre les quatre murs de la dé-pendance de la famille Chopin à Zelazowa Wola, puis à Varsovie, dans l’appartement réservé au professeur du Palace Saski. Tous les biographes s’accordent à dire qu’ils vivaient heureux, sous l’œil bienveillant du père. Il est homme des Lumières, rationaliste et pragmatique. Un peu froid et conservant une certaine distance, il est cependant aimé. Le jour de la saint Nicolas, Chopin, alors âgé de huit ans, écrit ceci : « Mon cher papa ! Il me serait plus facile d’exprimer mes sentiments si je pouvais les mettre en musique… »8. Plus tard, les  idées du père et du fils se heurteront. Malgré tout son respect et son dévouement, Chopin ne se laissera jamais convaincre par le loyalisme politique de son père, ni par sa règle d’or : « épargner pour les mauvais jours ! ». Toutefois, suite à sa mort au printemps 1844, Chopin sombrera dans une dépression sévère.

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  • Emilia Chopin (1812–1827), sœur cadette de Frédéric, très talentueuse, décédée très jeune de la tuberculose

    Il gardera en mémoire les images pleines de douceur de Nicolas jouant, à la flûte ou au violon, des mélodies comme Malbrough s’en va-t-en guerre.

    Justyna Chopin remplit la maison de chants et de chansonnettes. Apparemment, elle aime particulièrement la romance de Laura et Filon (probablement la plus populaire églogue polonaise). Après avoir accompli les tâches quotidiennes, elle s’assied au piano pour accompagner les danses des jeunes gens. Dans les souvenirs, elle apparaît comme l’âme de la maison, une personne « d’une douceur exceptionnelle ». Chopin tient probablement de sa mère son goût pour le poétique et le spirituel. Pendant son séjour à Paris, elle veille sur lui de loin. « Mon cher Frédéric, qu’est-ce que je peux te dire le jour de ton anniversaire et de ta fête ? Toujours la même chose, que je te confie à la Bonté Divine et que je prie tous les jours pour que ton âme et ton corps soient bénis, car sans cela, tout n’est rien »9.

    Chopin a la chance de grandir entouré de ses sœurs. La plus jeune d’entre elles, Emilia, sa compagne de jeu et de créations artistiques, dis-paraît très jeune. Des deux autres sœurs, Izabela est d’un an sa cadette et Ludwika de trois ans son aînée. Frédéric est particulièrement proche de Ludwika. Ils s’entendent à merveille. Tout indique que c’est elle qui l’a introduit la première dans le monde de la musique ; plus tard, elle deviendra sa confidente. Les deux sœurs fonderont leur propre famille, mais elle resteront éblouies par le talent exceptionnel de leur frère, dont la vie deviendra pratiquement l’essence de leur vie. « Pas une journée ne passe sans que nous pensions à toi et que nous parlions de toi, tu es notre unique consolation », écrit Izabela à son frère10.

    Toutes les lettres de Chopin expriment ce sentiment : les liens qu’il entretient avec sa famille sont devenus pour lui l’ancre de sa vie. L’amour qu’il reçoit est indéfiniment réciproque. L’attente d’une lettre de la maison fait partie de ses rituels quotidiens à Paris ou à Nohant. La nostalgie de la maison et du pays s’est glissée dans les manuscrits de ses compositions.

    « J’ai toujours un pied chez vous, et l’autre pied dans une pièce à côté, où la maîtresse de maison travaille », écrit-il l’été 184511, alors qu’il est invité au manoir à Nohant, dont les fenêtres donnent sur l’Indre qui lui rappelle sa rivière Utrata. L’automne l’année suivante, il exprimera l’état de son âme d’une façon encore plus nostalgique : « J’aimerais remplir ma

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  • Manoir de la famille Skarbek à Zelazowa Wola, xylogravure d’Ignacy Chelmicki, inspirée d’un dessin d'un auteur inconnu. Après leur mariage en 1806, les Chopin em-ménagent dans la dépendance gauche du ma-noir, où viendra au monde leur fils, Frédéric

    lettre de bonnes nouvelles, mais je ne sais rien à part que je vous aime, je vous aime. Je joue un peu, j’écris un peu »12.

    Norwid – absorbé par la musique de Chopin qu’il considère comme une perfection, résume sa compréhension de l’art en une seule phrase : « Que sais-tu de la beauté ? Que sa forme est amour »13.

    1 Franz Liszt, Chopin (Paris 1852), Cracovie, 1960, p. 123. 2 Jaroslaw Iwaszkiewicz, Chopin, Cracovie, 1955, p. 16. 3 Andrzej Sikorski, Piotr Myslakowski, Rodzina matki Chopina. Mity i rzeczywistosc,

    Varsovie, 2000. 4 Pamietniki Fryderyka hrabiego Skarbka, réd. P. Myslakowski, Varsovie, 2009. 5 Gabriel Ladaique, les ancêtres paternels de Frédéric François Chopin, Lille–Paris, 1987. 6 Cf. A. Sikorski, P. Myslakowski, Rodzina matki Chopina, op. cit., p. 16–17. 7 De la collection de la Bibliothèque Nationale à Paris. Copie de la lettre dans: Krystyna

    Kobylanska, Chopin w kraju, Cracovie, 1956, p. 2–3. 8 Une carte de voeux de Chopin du 6 décembre 1818. 9 Justyna Chopin à son fils, février 1848. 10 Izabela Barcinska à son frère, le 16 octobre 1842. 11 Chopin à sa famille, Nohant, 18–20 juillet 1845. 12 Chopin à sa famille, Nohant, le 11 octobre 1846. 13 Cyprian K. Norwid, Promethidion, 1851.

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  • 1 3

  • Acte de baptême de Frédéric François Chopin, du 23 avril 1810, en l’église St Roch à Brochow, établi par le vicaire, Jozef Morawski. Lors du baptême, Franciszek Grembecki représente le parrain, absent lors de la cérémonie.

    Fryderyk Skarbek, économiste, écrivain, professeur à l’Université de Varsovie, parrain de Frédéric Chopin.

    Anna Skarbek (1793–1873), sœur de Fryderyk Skarbek, marraine de Frédéric Chopin. En 1820, elle épouse Stefan Wiesiolowski en l’église de Brochow. Selon certains récits, elle entretiendra des relations cordiales avec les Chopin.

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  • Eglise fortifiée à Brochow, vue contemporaine

    Gravure de l’église à Brochow

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  • Chaussée près de Brochow

    Paysage de Mazovie

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  • Meule de foin près de Zelozowa Wola

    Zelazowa Wola, parc du manoir

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  • Intérieur du manoir, aménagé après la guerre, qui n’est pas une reconstitution fidèle de la maison de Chopin, mais reflète l'ambiance et le style de cette époque

    Manoir de Zelazowa Wola, où Frédéric Chopin passe les premiers mois de sa vie. Aujourd’hui, c’est un musée consacré au compositeur, reconstruit grâce aux dons de ses compatriotes et ouvert au public avant la Seconde Guerre Mondiale

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  • Napoleon Orda, Zelazowa Wola, gravure dans Album des vues historiques de la Pologne. A la fin de l’année 1810, la famille Chopin quitte le manoir et emménage à Varsovie

    Chant préféré de la mère de Chopin. Chopin l’a introduit dans la Fantaisie en la majeur sur des airs polonais pour piano et orchestre

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  • Vœux, écrits par Frédéric à sa mère, à l’occa-sion de sa fête, le 16 juin 1817

    Palais Saski, où se trouvent le Lycée de Varsovie et l’appartement des Chopin

    Carte de voeux, faite par le petit Frédéric à son père, le jour de sa fête, le 6 décembre 1816

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  • Lettre de sa mère à Frédéric, février 1848

    Tombeau du Soldat Inconnu, cette arcade est l’unique trace du Palais Saski, détruit pendant la guerre

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  • R a c i n e s

    La Pologne lui a donné son esprit chevaleresque et sa souffrance historique, la France – sa légèreté, son élégance et son charme, l ’Allemagne – sa profondeur romantique

    Heinrich Heine, Xème Lettre de Paris, 1838

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  • Wojciech Zywny, premier professeur de Chopin

    Heine a essayé plus d’une fois de décrire le phénomène Chopin. Ses remarques ne sont que superlatifs. Sa sensibilité presque excessive lui permet de capter dans cette musique ce que les autres sont incapables de saisir. Il est le premier à remarquer et à souligner que Chopin ne doit pas être considéré au même rang que des pianistes compositeurs comme Thalberg, Liszt, Moscheles ou Kalkbrenner. « Non seulement est-il un virtuose – écrit-il dans sa dixième lettre de Paris – mais également un poète, et sa musique reflète la poésie qui habite son âme. Chopin est un poète des sons (Tondichter) et rien n’est comparable au plaisir qu’il nous offre lorsqu’il s’assoit au piano et improvise »1.

    Vient ensuite cette tournure où Heine semble contredire l’intuition qui lui avait dicté le passage sur la triple provenance de la musique de Chopin. Il écrit : « Dans ces moments-là, il n’est ni Polonais, ni Français, ni Allemand, il dévoile une origine d’un niveau supérieur, on a alors l’impression qu’il vient du pays de Mozart, Raphaël, Goethe, et que sa vraie patrie est le royaume enchanté de la poésie »2.

    Au fond, il n’y a pas de contradiction entre les deux jugements ; ils s’accordent, en se complétant. Le premier parle d’une triple genèse, et le second d’une résonance commune et universelle, qui sonne à une orbite plus élevée. Et même si l’on peut ne pas être d’accord avec les dé-tails de cette conception et souligner son aspect incomplet, le constat de la multiple provenance reste indéniable.

    Robert Schumann a perçu les multiples aspects de la musique de Chopin d’une façon similaire et différente à la fois. Il a vu son origine dans l’esprit des oeuvres de certains compositeurs qui ont inspiré Chopin : Beethoven, Schubert et John Field. Selon lui, Beethoven a introduit l’audace dans l’âme de Chopin, Schubert a éveillé en lui la tendresse du coeur et John Field a donné l’habileté à ses doigts3.

    Tout s’accorde ici avec une trop grande aisance pour que l’intuition de Schumann soit parfaitement juste. Chopin n’avait besoin de chercher ni l’audace ni la tendresse du cœur loin de son pays, de son histoire et de sa tradition. Quant à l’habilité de ses doigts, il est né avec ce don. Aussi incroyable que cela puisse paraître, Chopin n’a pas eu de maître. Son unique professeur de métier était davantage violoniste que pianiste.

    2 6R a c i n e s

  • Ludwig van Beethoven, Sonate en fa mineur op. 57, nommée « Appassionata » (extrait)

    Début du I Prélude en ut majeur BWV 870 de Jean-Sébastien Bach de Das wohltemperierte Klavier

    Lacrimosa dies illa du Requiem en ré mineur KV 626 de Wolfgang Amadeus Mozart (extrait)

    Le personnage coloré de Wojciech Zywny apparaît dans la biographie de Chopin au moment où, enfant, il affiche son grand talent et une sen-sibilité exceptionnelle à la musique. Selon des renseignements somme toute peu fiables, on peut supposer que Zywny a emménagé à Varsovie en 1811 et que cinq ans plus tard il s’est lié d’amitié avec la famille Chopin, quasiment au point d’en devenir un membre à part entière. Il enseigne le piano non seulement à Chopin, mais aussi à ses sœurs et aux garçons de la pension créée par Nicolas Chopin. Il est omniprésent dans les lettres et toujours décrit avec une pointe d’humour. Ce Tchèque d’origine, qui prise constamment du tabac, fait rire avec son drôle d’accent et sa per-ruque jaune datant du temps de Bach.

    De la même génération que Mozart, il amène en Pologne une tra-dition encore plus ancienne – datant de Bach précisément. Grâce à lui, la musique de Bach, et notamment Wohltemperierte Klavier, devient une véritable bible pour Chopin et le fondement de sa pensée musicale. Sans les préludes et les fugues de Bach, il n’y aurait pas eu les préludes et les études de Chopin. Chopin emmène à Majorque un exemplaire de Wohltemperierte. Il joue « Bach et uniquement Bach » pour préparer ses propres concerts et il donnera le même conseil à ses élèves. Une de ses élèves, Frédérique Müller, se rappelle qu’un jour Chopin lui a joué de mémoire quatorze préludes et fugues4. Beaucoup d’indices prouvent que ce véritable culte que Chopin voue à Bach est dû à « ce bon vieux Zywny avec sa vieille perruque »5.

    Zywny enseigne à Chopin pendant six ans, jusqu’à ses douze ans, ensuite la relève est assurée par Jozef Elsner. Chopin remerciera son professeur en lui dédiant la Polonaise en la bémol majeur (WN 3). Des années plus tard, un critique viennois, ébloui par le niveau d’éducation du jeune virtuose de Varsovie, recevra cette réponse courtoise de Chopin : « avec messieurs Zywny et Elsner, même le plus grand âne aurait appris »6.

    Parmi les dieux de l’Olympe musical, Chopin place Mozart juste après Bach, et Beethoven après Mozart. L’auteur des Variations sur la Ci Darem la Mano op. 2 considère Don Juan, qu’il a vu et entendu déjà à Varsovie, ainsi que Requiem comme des chefs-d’œuvre absolus. Dès que la possibilité lui en est donnée, il écoute à nouveau ces oeuvres.

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  • Jozef Elsner (1760–1854), compositeur, pédagogue, directeur du Conservatoire et de l’Ecole Supérieure de Musique. Chopin suit des cours chez lui dès l’âge de 13 ans

    Selon Karol Mikuli, son maître « jouait surtout du Bach, mais il est dif-ficile de dire lequel des deux il préférait – Bach ou Mozart. Il joue d’une façon grandiose les oeuvres des deux compositeurs »7. Chopin partage son culte pour Mozart avec Pauline Viardot et surtout avec Eugène Delacroix. Le peintre note dans son journal les conversations qu’il entretient avec Chopin à ce sujet. Un jour il écrit : « Jamais Mozart ne commet d’er-reur ! ». Selon Liszt, aussi surprenant que cela puisse paraître, Chopin considère que c’est Mozart qui, à travers ses dernières œuvres, a ouvert une nouvelle période romantique. Jean-Jacques Eigeldinger voit en Chopin un « héritier de Mozart »8.

    L’enracinement dans la musique de Beethoven n’avait pas la même profondeur. Autant il admire l’auteur d’Appassionata, autant il en est distant ; et s’il écoute la IXème Symphonie à plusieurs reprises, à Paris, à Aix-la-Chapelle et à Londres, dans ses discussions avec Delacroix, il reste relativement critique. Il n’apprécie pas au même degré toute l’œuvre de Beethoven. Il joue volontiers certaines sonates mais, selon les experts, d’une façon qui n’est pas beethovénienne. Il les joue à sa façon9. Toutefois, avec du recul, on peut considérer que sans l’influence de Beethoven, Chopin n’aurait écrit ni ses sonates, ni ses ballades, ni ses scherzos.

    Bach, Mozart, Beethoven, chacun à sa manière et à une échelle dif-férente, influence la création du style de Chopin, lui qui reste si unique malgré ces diverses sources d’inspiration qui ne se limitent pas à ces trois illustres prédécesseurs. Avant que «  l’enfant destiné à remplacer Mozart » commence à  jouer les œuvres de grands compositeurs, il s’était déjà beaucoup exercé sur la musique d’un autre milieu : le chant populaire polonais. Par la variété de ses thèmes, par son ambiance et son caractère, le chant populaire polonais inondait de sa richesse le manoir de Zelazowa Wola, puis le Palace Saski. De ce répertoire ancré dans son cœur et dans son imagination et composé de berceuses, de romances, de chants de Noël et de chants patriotiques, Chopin puisera à chaque fois qu’il sentira le poids de la nostalgie. Il confie dans une lettre à sa famille : « J’ai passé la soirée chez moi, à jouer et à fredonner des chants du bord de la Vistule »10. Dès son plus jeune âge, son œuvre est influen-cée par le chant populaire : dans les réminiscences, allusions, citations.

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  • Page de titre de Vingt exercices et préludes de Maria Szymanowska

    Aleksander Kokular, Portrait de Maria Szymanowska, vers 1825 ; Maria Szymanowska (de domo Wolowska), née en 1789, pianiste et compositeur ; se produit partout en Europe ; à la fin de sa carrière, elle sera pianiste à la cour de la tsarine à Saint-Pétersbourg

    Michal Kleofas Oginski (1765–1833), compositeur aristocrate, engagé dans le mouvement d’indépendance, combattant du soulèvement de Kosciuszko, auteur des fameuses polonaises

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  • Konstancja Dmuszewska dans le rôle princi-pal de l’opéra Jadwiga, de Karol Kurpinski

    On retrouve Juz miesiac zeszedl  (La lune s’est levée) dans Fantaisie sur des airs polonais, l’air du chant de Noël Lulaj-ze Jezuniu  (Dors, petit Jésus) dans le Trio du scherzo viennois en si mineur ou le motif du chant Tam na bloniu blyszczy kwiecie (Une fleur brille sur le pré) servant de base à la mazurka en mi mineur composée à Majorque.

    La musique de Chopin s’est également inspirée de la musique contem-poraine polonaise et des chants historiques.

    Même si cette influence n’a jamais été étudiée de façon méthodique, on peut facilement imaginer et recréer ce répertoire dans lequel Chopin a bai-gné pendant son enfance et son adolescence. Celui-ci est principalement composé de chants, de chansons et de danses : les polonaises de Michal Kleofas Oginski, les mazurkas de Jan Stefani et Maria Szymanowska, les dumkas et les polonaises de Karol Kurpinski, les chants pastoraux et les danses polonaises de Jozef Elsner… Ce ne sont pas des chefs d’œuvre au sens artistique, mais des compositions plus proches de la musique populaire. Toutefois, une particularité commune en ressort, que l’on peut nommer l’idiome polonais. Selon les biographes, la mère de Chopin chantait et jouait certains de ces chants pour accompagner les danses.

    Le deuxième des répertoires mentionnés a marqué Chopin d’une façon différente. Les Chants historiques de Niemcewicz, mis en musique dans un élan patriotique par treize compositeurs de l’époque, sont devenus un véritable symbole pour l’unité nationale. Publiés pour la première fois en 1816, ils deviennent rapidement un véritable recueil où l’histoire du pays est contée par la parole, la musique et l’image. Tout le monde les récitait et les chantait, y compris dans la pension de Nicolas Chopin. « A la tombée de la nuit, ayant quelques instants libres – se souvient un des pensionnaires11 – nous nous remémorions les grands moments de l’histoire polonaise, comme la mort du roi Ladislas III ou de l’hetman Zolkiewski, les grandes batailles menées par nos héros, etc. Tout cela, le jeune Chopin le jouait au piano… Plus d’une fois nous avons versé des larmes en écoutant cette musique. Quant à Zywny, il s’émerveillait devant tant de virtuosité ».

    Le destin fera rencontrer quelques années plus tard Chopin et Niemcewicz, devant lequel il improvisera sur le thème des Chants

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  • A. Molinari, Karol Kurpinski, 1825 ; Kurpinski (1785–1857), compositeur et pédagogue, chef d’orchestre puis directeur de l’Opéra National de Varsovie, il conduit l’or-chestre pendant l’avant-première du Concerto pour piano en fa mineur de Chopin

    Litwinka de Karol Kurpinski, a inspiré la Fantaisie en fa mineur op. 49 de Chopin

    historiques à Paris. Ces improvisations sur les thèmes patriotiques ont laissé une empreinte dans les compositions les plus prestigieuses de Chopin. Sans ces improvisations, la Fantaisie en fa mineur aurait-elle vu le jour ? Quant à l’idée de composer la Polonaise-Fantaisie en la bémol majeur, peut-être a-t-elle germé lors de ces improvisations ?

    1 Heinrich Heine und die Musik, réd. Gerhard Müller, Leipzig, 1987, p. 106. 2 Heinrich Heine und die Musik, op. cit., p. 107. 3 Robert Schumann, Schriften über Musik und Musiker, réd. Josef Häusler, Stuttgart, 1982, p. 91;

    discours de 1836. 4 Discours de Friederike Müller-Streicher, comp. : Jean-Jacques Eigeldinger, Chopin w oczach

    swoich uczniow, trad. Zbigniew Skowron, Cracovie, 2000, p. 178–179. 5 Voir lettres de Chopin à Jan Bialoblocki du 27 juillet 1825 et à Tytus Woyciechowski

    du 9 septembre 1828. 6 Chopin à sa famille, Vienne, le 19 août 1829. 7 Karol Mikuli, Préface dans : F. Chopin’s Pianoforte-Werke, Leipzig, 1879, F. Kistner. 8 J.J. Eigeldinger, Chopin w oczach swoich uczniow, op. cit., p. 34. 9 Wilhelm von Lenz, Die grossen Pianoforte-Virtuosen unserer Zeit aus persönlicher Bekanntschaft.

    Liszt, Chopin, Tausig, Henselt, Berlin, 1872. 10 Chopin à sa famille, Paris, le 15 avril 1847. 11 Eustachy Marylski, Z pamietnikow, [dans:] Ferdynand Hoesick, Slowacki i Chopin,

    Varsovie 1932, p. 90.

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  • Garçons de la pension des Chopin écou-tant le petit Frédéric jouer ; peinture de A.C. Gow, A Musical Story by Chopin

    Julian Ursyn Niemcewicz (1758–1841), poète et officier adjoint d’Adam Kazimierz Czartoryski, membre engagé du Mouvement Patriotique, président de l’Association des Amis des Sciences, ses Chants historiques sont devenus le manuel d’histoire dans la Pologne sous l’occupation ; Chopin improvise sur leur thème dès son plus jeune âge

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  • Page de titre des Chants historiques de Niemcewicz, publiés en 1816 avec « la musique et les gravures », et page avec les partitions pour le chant Jan Kazimierz. La musique pour Les chants a été composée par treize compositeurs polonais de l’époque, y compris Franciszek Lessel, Karol Kurpinski et Maria Szymanowska

    Illustration de Réflexion sur Stefan Potocki des Chants

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  • L a c a m p a g n e

    Si tu vois Szafarnia, Plonne, Gulbiny, Radomin, Ornowek, pense à moi…

    Chopin à Jan Bialoblocki, le 20 juin 1826

    Tes champs ont laissé en moi comme une nostalgie

    Chopin à Tytus Woyciechowski, le 21 août 1830

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  • Exposition au Musée de la Campagne de Mazovie, à Sierpc

    « Je ne suis pas fait pour la campagne », se plaint Chopin dans une lettre à sa famille écrite à Nohant durant l’été 18451. Quelques jours aupa-ravant, du même endroit, il envoie à un de ses amis parisiens ces mots pleins d’émerveillement : « la campagne est si belle que je vous plaindrais fortement d’être enfermé en ville, si ce n’était à Paris »2.

    Il était partagé. D’un côté, il appartenait aux citadins. Mais d’un autre côté, peut-être en tant que citadin précisément, il était séduit par les charmes sentimentaux et l’aura romantique de la campagne : « La campagne est belle, des rossignols, des alouettes »3 – par ces paroles, il invite Wojciech Grzymala à le rejoindre dans la résidence de campagne de George Sand. Cependant, les jours de mauvais temps, de pluie, d’orage et de vent, sa nature délicate disait : non. Il avait alors, comme le disait George Sand, tous ses pauvres nerfs à l’envers4.

    Sa première vraie rencontre avec la campagne a éveillé chez Chopin adolescent un enthousiasme illimité, une fascination et un émerveille-ment pour cette vie différente et l’exotisme du folklore. C’était en 1824 à Szafarnia, un petit village perdu parmi les champs et les forêts sur la terre de Dobrzyn, à l’endroit où se rencontrent la Mazovie, la Poméranie et la Cujavie. C’était le temps des premières vraies vacances passées dans la famille d’un de ses amis, élève de la pension de son père.

    La lecture de la série de lettres envoyées de Szafarnia à sa famille, sous forme d’une parodie humoristique de la gazette locale « Kurier Szafarski », permet de suivre toutes les étapes de cet émerveillement qu’éprouve un jeune garçon de la ville pour les charmes de la campagne. Ici, tout est nouveau : l’air de la campagne et le pain traditionnel, la faune domestique et l’équitation, et surtout les chants, les danses et les coutumes, étrangement attirants par leur exotisme et leur rusticité.

    Au début prévaut le regard de l’observateur. Selon le « Kurier Szafarski » du 24 août : « Une fête des battages a eu lieu à Obrowo. Assemblé devant le manoir, tout le village faisait la fête, surtout après avoir bu de la vodka et les filles chantaient une chanson connue avec leur voix un peu sémi-tonique et un peu fausse : Devant le manoir, les canards dans la mare, /Et notre maîtresse toute en or… ».

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  • Intérieur d’une chaumière dans le musée en plein air à Sierpc

    A Nieszawa, il entend « une Catalani de campagne chanter à tue-tête assise sur la clôture ». Cela lui donne l’idée de collectionner des chants folkloriques. Chopin donne trois sous à la fille pour qu’elle récite sa « petite mazurka » dont il notera les paroles.

    « Regarde, derrière les collines, / le loup danser,Pourtant il n’a pas de femme / tellement il se soucie ».

    A la fin, ce citadin de passage semble entièrement absorbé par la magie de la fête paysanne, il veut percevoir et goûter chacun de ses sons pour s’en souvenir à jamais. Il joue, il danse et il chante avec les autres jusqu’à la nuit, jusqu’à l’épuisement. Ensuite, il raconte tout dans les moindres détails dans une lettre envoyée de Szafarnia. Ce rapport de l’événement vaut la peine d’être cité, au moins en extraits : « Nous étions au dîner en train de finir le dernier plat, quand au loin nous entendîmes une chorale de faux accords, composée tantôt de bonnes femmes à la voix nasillarde et tantôt de jeunes filles piaillant un demi-ton plus haut de toutes leurs forces, accompagnées d’un violon à trois cordes, qui répétait chaque strophe avec sa voix d’alto ». Les chants improvisés n’épargnaient personne, même le jeune garçon de la capitale a eu droit à quelques couplets :

    « Devant le manoir il y a un arbuste /Notre varsovien est un chien robuste.Dans l’étable il y a du vide /Notre varsovien est très rapide ».

    Enfin, « commencent les sauts, les valses et l’obertas ; pour encourager les valets de ferme intimidés, j’invite à une valse mademoiselle Tekla [Borzewska] puis madame Dziewanowska. Ensuite, tout le monde s’amuse tellement qu’ils dansent jusqu’à l’épuisement… ». Toujours d’une humeur joyeuse, Frédéric écrit plus tard : « je saisis un archet poussiéreux et me mis à jouer si fort que tout le monde vînt regarder… ». Et, l’œil sensible, il n’oublie pas de souligner : « La nuit était belle, la lune et les étoiles brillaient… »5.

    Szafarnia n’est pas le seul endroit de la campagne polonaise que Chopin apprécie. Szafarnia est entourée d’une constellation de villages, de hameaux et de bourgs, nommée ensuite, non sans raison, « Terroir de Chopin »6.

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