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Collège C.F.Daubigny Auvers sur Oise - Histoire des art au DNB 2010 /11 – - Arts plastiques M.Digeon - Tête mécanique ou L'esprit de notre temps Centre Pompidou Paris salle 16

Collège C.F.Daubigny Auvers sur Oise - Histoire des art au ... · [5] Tristan Tzara dans le numéro 3 de la revue Dada en 1918, donne le ton d’ une poésie fondée sur le hasard

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Collège C.F.Daubigny Auvers sur Oise - Histoire des art au DNB 2010 /11 – - Arts plastiques M.Digeon -

Tête mécanique ou

L'esprit de notre temps

Centre Pompidou Paris salle 16

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Caractéristiquesde base

Titre : Tête mécanique ou l’Esprit de notre temps

Auteur : Raoul Hausmann [ 1]

Date : 1919

Dimensions : 32,5 x 21 x 20 cmLieu de conservation : MNAM Paris Achat (1974)

Type Volume

Style Figuratif

Genre Portrait Dada [2]

Sujet Une tête constituée d’une marotte de coiffeur [3] en bois et divers objets ou éléments d’objets.

Composition La marotte est surmontée d’un gobelet métallique, télescopique et cylindrique à partir duquel descend jusqu’au milieu des sourcils un morceau de ruban de couturière déroulé sur 10cm.Une plaque rectangulaire, numérotée 22, est clouée sur le front, à gauche du ruban, entre le 5 et le 8.A partir du coin du haut gauche de la plaque, l’intérieur d’une montre laisse apparaître les rouages de son mécanisme.Une boite ouverte (étui à bijou en cuir contenant un rouleau de caractère d'imprimerie axé sur un tuyau de pipe) prend la place de l’oreille gauche.Juste derrière, un porte monnaie en peau de crocodile est déplié, on peut y lire le nom et l’adresse du fabriquant « …wein Berlin Budapest… ».Un système cranté en métal surmonté de deux molettes de réglages est fixé à l’endroit de l’oreille droite, il maintien un double décimètre qui part de la base du cou et s’érige à droite au dessus de la tête.Deux gros clous sont enfoncés à la « Frankenstein » sur chaque tempes.

Couleur Aucun revêtement de peinture n’a été réalisé, aucune modification des surfaces .

Chaque élément a gardé les couleurs des matériaux qui le constituent :

bois naturel (vernis pour la marotte, brut pour le réglet)blanc /gris métallique pour le gobelet, la montre, le rouleau, les clousbrun jaune pour le ruban, la plaque et les boutonsnoir et rouge marbré pour l’étui.

Technique assemblage [4]

Problématiqueet apport

En associant des matériaux hétéroclites, cet assemblage réalisé en 1919 dépasse la notion habituelle de sculpture.

De l’intérieur de la marotte de coiffeur, à l’esthétique anonyme, industrialisée et base pour une fabrication de perruques personnalisées,

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surgissent des objets ou morceaux d’objets, en l’état, sans modification, puisés dans le hasard [5] de la réalité.

Mais le choix de ces objets, mélange et associe le sens lié à leurs fonctions, à leurs symbolismes ou en métaphores, avec la forme, la couleur ou le positionnement de ceux-ci :

Ce qui est à l’intérieur de la boite crânienne est ici visible à l’extérieur (la boite / oreille ouverte en induit l’idée).

Le porte monnaie préfigure les débuts de la société de consommation.

La parole n’est que du vent (tuyau de pipe), l’écriture normalisée (rouleau typographique), .

La pensée est affaire de rouages (mécanisme de la montre).

L’émotion chiffrée (22).

L’intelligence peut se calculée, sur le bombage d’un front, par un étalon de mesure en centimètres.

L’acuité auditive se réglée de façon millimétrée (crans, molettes et réglets).

Si le contenant variable du cerveau a la capacité de s’agrandir ou se réduire, le contenu peut néanmoins resté vide (gobelet télescopique).

Raoul Haussmann est plus engagé que les autres artiste du mouvement Dada. Par des prises de positions politiques écrites, il dénonce la société bourgeoise de son époque qui a, entre autre, conduit à la guerre.Mais surtout par ces œuvres, d’une approche anticonformiste de la notion de l’art, il transgresse les limites des disciplines artistiques classiques (collage / dessin, peinture / objet du quotidien, sculpture / assemblage, photomontages…)Cette petite tête de bois critique la société , « de l’homme machine » qui empêche de penser par soi même. Car « penser comme une machine » était, selon Hausmann, le principal défaut de ses contemporains dont le visage est « une image faite par le coiffeur…leur cerveau est vide…leurs seules capacités sont celles que le hasard leurs a collées à l’extérieur du crane ».Elle caractérise l’une des revendications de Dada qui n’est pas de faire un anti art car « l’anti art c’est aussi l’art » (Huelsenbeck) mais de détruire pour reconstruire.« Ce n’est pas simplement de faire table rase mais c’est renverser la table » comme le dit Behar [6].

Notes [1]Raoul Hausmann (1886 – 1971) artiste d’origine autrichienne cofondateur avec Huelsenbeck du groupe Dada-Berlin de Berlin en 1918[2] Dada « un mot venant dont ne sait où » disait Tristan Tzara. Le mouvement Dada naît en 1916, à Zurich, autour de l’écrivain et poète Hugo Ball, et réunit Marcel Janco, Tristan Tzara, Jean Arp, bientôt rejoints par Richard Huelsenbeck, Hans Richter, Sophie Taeuber et Emmy Hennings.

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En 1917, Huelsenbeck quitte Zurich et introduit Dada à Berlin. Il fonde le Club Dada en 1918 avec Raoul Hausmann, Johannes Baader, Franz Jung, George Grosz, Hannah Höch et les frères Herzfelde.Dada a la volonté de tourner le dos à la peinture classique et de réinventer la relation entre l’art et la réalité.[3] Tête de mannequin en bois qui sert à la réalisation de perruque.[4] Les assemblages sont des œuvres en volume, obtenues associant des objets divers sur un support rigide.Les collages sont des œuvres obtenues en réunissant des matériaux divers collés sur un support. Le photomontage est une découpe de photographies collés sur une nouvelle photographie (Hausmann semble être le premier créateur du photomontage en 1918).Les photogrammes sont des photographies tirées en déposant des fragments de matériaux, sur la surface sensible d’une plaque ou d’un papier photographique.Les poèmes phonétiques de Raoul Hausmann associent les sons récités, la gestuelle du conteur ainsi que le caractère esthétique de la typographie et de la mise en page employées pour leur impression. Ces poèmes « bruitistes » sont des assemblages de syllabes, d’onomatopées déclamées.[5] Tristan Tzara dans le numéro 3 de la revue Dada en 1918, donne le ton d’ une poésie fondée sur le hasard. Il y publie notamment un poème énonçant sa fabrication. Il propose de prendre des coupures de journaux, de découper des mots au hasard de la page, et de les assembler ensuite au gré de la pioche.[6] Henri Béhar, né en 1940 à Paris, professeur et historien de littérature française, spécialiste de la littérature d’avant-garde :Alfred Jarry, Dada et le Surréalisme.

Kurt Schwitters

Sans titre 1920-1922

assemblage, huile sur miroir cloué à une toile28,50 x 11 cm

Musée d’art moderne de la ville de Paris

Francis Picabia

L’œil cacodylate 1921

huile sur toile collage de photographies cartes postales et papiers

découpés148,6x117,4 cmMNAM Paris

Sophie Taeuber

Tête Dada 1920

Bois tourné et peint, hauteur : 29,43 cm

MNAM Paris

Francis Picabia

Danse de Saint-Guy1919-1920

Carton, encre, ficelles, bois, 104,4 x 84,7 cm

MNAM Paris

II – approche théorique

Lorsque Léonard de Vinci fait référence au hasard, celui-ci se place en observateur extérieur à l’œuvre, c’est l’imagination du spectateur qui reconstruit une réalité, car jusqu’au XXme

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siècle le postulat de la peinture occidentale s’accroche à la notion de représentation; dont la phrase de Boltansky : « il faut lutter contre le hasard » est l’aboutissement à l’extrême.A partir de 1910, lorsque par hasard (toile retournée dans l’atelier), Kandinsky invente l’abstraction cette référence à la représentation s’efface.Certains artistes vont alors intégrer cette notion de hasard dans leur pratique, non plus comme un élément extérieur a intérioriser, mais comme un élément constitutif de leur œuvre :Driping de Pollock, compression / expansion de César, tir à la carabine de Niki de Saint Phale, éclaboussure de Man Ray, grattage de Fautrier, tachisme…Ces interventions du hasard ont cependant des objectifs différents :Les inventions techniques du mouvement Dada (photomontages, fatagada…) ont pour base une volonté de subversion sociale.Tandis que celles des surréalistes (frottages, cadavres exquis, écriture automatique, mises en transes…) chasse sur les terres du conflit entre le conscient et l’inconscient théorisée par Freud.A l’opposé, même « libérés » de la représentation, d’autres artistes vont s’attacher à réduire l’irruption du hasard dans leurs œuvres :Suprématisme / Malévitch, cubisme / Mondrian, opt art / Vasarely, art conceptuel / Kosuth, art visuel / Morelet, minimal art / Sol LeWitt…

Fautrier Pollock Magritte Mondrian