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Compte–rendu de l’Académie Scientifique de Communication & Entreprise / Jeudi 15 septembre 2016 1 "Communication & Temporalités" La 4 ème édition de l’Académie Scientifique de Communication & Entreprise, organisée par son Comité Scientifique en partenariat avec la Société Française des Sciences de l'Information et de la Communication (SFSIC) sur la thématique des "Temporalités", a réuni des théoriciens - chercheurs en Sciences de l’Information et de la Communication et des praticiens - responsables opérationnels de la Communication. Une nouvelle fois, ce rendez-vous post estival a illustré la volonté de Communication & Entreprise de s’ouvrir en permanence pour s’enrichir et faire croître la valeur ajoutée du métier de la communication. Mots de bienvenu Jean-Luc Letouzé, Président de Communication & Entreprise a introduit cette 4 ème édition en remerciant tous les acteurs, intervenants et partenaires, dont le CELSA qui accueillait cette académie. Sa directrice, Karine Berthelot-Guiet, a présenté son école et rappelé les partenariats tissés entre elle, la SFSIC et Communication & Entreprise. Au programme Introduction Olivier Beaunay - Directrice adjoint CCI Paris & Chef de projet Innovation Lab CCIR Co-pilote de comité scientifique de Communication & Entreprise Conférence 1 - Articulation entre temps courts et temps longs, le dilemme du stratège. Agathe Lélu - Directrice de la Communication, Roland Berger Olivia Foli - Maître de conférences en SIC, Université Paris-Sorbonne CELSA Laurence Servel - Maître de conférences en sociologie, Université Paris Dauphine Conférence 2 - La mémoire : stratégies de communication identitaires entre continuité et rupture. Xavier Crespin - Directeur de la Communication, Association L'Aventure de Peugeot Citroen DS Jean-Pierre Guéno - Écrivain, historien Julien Tassel - Maître de conférences en SIC, Université Paris-Sorbonne CELSA Conférence 3 - Temps, culture et communication ? Stéphanie Oueda Cruz - Associate Director Diversity & Inclusion, Coca-Cola Cyril Masselot - Maître de conférences en SIC, Université de Bourgogne Franche-Comté Conférence 4 - Quelles organisations de la communication face à l’accélération ? Valérie Renoux - Responsable de la Communication Externe, Poste Immo Marie-Caroline Lopez - Journaliste, La Lettre de l’Expansion Jérémie Nicey - Maître de conférences en SIC, Université de Tours Conférence 5 - Comment la communication interne gère-t-elle l’accélération du temps et les risques psycho- sociaux ? Constance Wiblé - Directrice Communication Groupe, MACSF Assurances Caroline Datchary - Maître de conférences en sociologie, LISST (CNRS, Université de Toulouse) Solveig Evenstad - Doctorante, Université Nice Sophia Antipolis Conclusion Bruno Chaudet – Maître de conférences, Université Rennes 2 Co-pilote de comité scientifique de Communication & Entreprise

Communication & Temporalités…R : même si le PDG est le 1er communiquant de l’entreprise, le Dircom a une réelle valeur ajoutée à lui apporter et à la stratégie de l’entreprise,

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Compte–rendudel’AcadémieScientifiquedeCommunication&Entreprise/Jeudi15septembre2016

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"Communication&Temporalités"La4èmeéditiondel’AcadémieScientifiquedeCommunication&Entreprise,organiséeparsonComitéScientifique en partenariat avec la Société Française des Sciences de l'Information et de laCommunication(SFSIC)surlathématiquedes"Temporalités",aréunidesthéoriciens-chercheursenSciencesdel’InformationetdelaCommunicationetdespraticiens-responsablesopérationnelsdelaCommunication. Une nouvelle fois, ce rendez-vous post estival a illustré la volonté deCommunication & Entreprise de s’ouvrir en permanence pour s’enrichir et faire croître la valeurajoutéedumétierdelacommunication.

Motsdebienvenu

Jean-Luc Letouzé, Président de Communication & Entreprise a introduit cette 4ème édition enremercianttouslesacteurs,intervenantsetpartenaires,dontleCELSAquiaccueillaitcetteacadémie.Sa directrice,KarineBerthelot-Guiet, a présenté son école et rappelé les partenariats tissés entreelle,laSFSICetCommunication&Entreprise.

Auprogramme

IntroductionOlivierBeaunay-DirectriceadjointCCIParis&ChefdeprojetInnovationLabCCIRCo-pilotedecomitéscientifiquedeCommunication&Entreprise

Conférence1-Articulationentretempscourtsettempslongs,ledilemmedustratège.AgatheLélu-DirectricedelaCommunication,RolandBergerOliviaFoli-MaîtredeconférencesenSIC,UniversitéParis-SorbonneCELSALaurenceServel-Maîtredeconférencesensociologie,UniversitéParisDauphine

Conférence2-Lamémoire:stratégiesdecommunicationidentitairesentrecontinuitéetrupture.XavierCrespin-DirecteurdelaCommunication,AssociationL'AventuredePeugeotCitroenDSJean-PierreGuéno-Écrivain,historienJulienTassel-MaîtredeconférencesenSIC,UniversitéParis-SorbonneCELSA

Conférence3-Temps,cultureetcommunication?StéphanieOuedaCruz-AssociateDirectorDiversity&Inclusion,Coca-ColaCyrilMasselot-MaîtredeconférencesenSIC,UniversitédeBourgogneFranche-Comté

Conférence4-Quellesorganisationsdelacommunicationfaceàl’accélération?ValérieRenoux-ResponsabledelaCommunicationExterne,PosteImmoMarie-CarolineLopez-Journaliste,LaLettredel’ExpansionJérémieNicey-MaîtredeconférencesenSIC,UniversitédeTours

Conférence5-Commentlacommunicationinternegère-t-ellel’accélérationdutempsetlesrisquespsycho-sociaux?ConstanceWiblé-DirectriceCommunicationGroupe,MACSFAssurancesCarolineDatchary-Maîtredeconférencesensociologie,LISST(CNRS,UniversitédeToulouse)SolveigEvenstad-Doctorante,UniversitéNiceSophiaAntipolis

ConclusionBrunoChaudet–Maîtredeconférences,UniversitéRennes2Co-pilotedecomitéscientifiquedeCommunication&Entreprise

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Introduction-RéflexionspréliminairesOlivierBeaunay,DirecteuradjointdeCCIParis-Ile-de-France&chefduprojet InnovationLabCCIR,co-piloteduComitéScientifiquedeCommunication&Entreprise«Lacommunicationentrel’impuissanceetlechaos–Réintroduirelanécessitédutempslong»Quelacommunications’emparedelaquestiondestemporalitésrelèved’uncertainparadoxe.Car,elleéchoueàorienterl’action.Quepourraitunchercheurlorsd’unecrisemajeureauseind’ungrandgroupe?... Inversement,enquoi ledirecteurde lacommunicationcontribue-t-ilaudéveloppementréel de son organisation? Assemblage de savoirs et de techniques, la communication entretientl’incapacitéàmaîtriserletempsetalimentel’agitationpermanentedenotreère.Ellecontribueàla«compressiondutemps»etàunefaçond’habiterletempsdemanièreprécaire.Uneperspectivedetemps longest indispensablepouravoirdesrepèresetagirefficacement,pouravoir le souci du monde, la disponibilité pour la rencontre, le temps de réfléchir. Or, lacommunication rejoint la politique; elle accentue l’absence de maîtrise du temps en abusant du«storytelling»etdela«séquence»,supposéscomblerundéficitdesensparunexcèsdesuspens.Enfinnousoscillons,augrédesévénements,entredel’hyper-moderneetdutrèsarchaïque.Labarbarietirenosforcesverslepasséquandnousdevrionsmobilisernotreintelligencesurlefutur.Faceà cela, laphilosophiepourrait introduireunpeude sagesseet lapsychologie compenserunepressionpsychiqueinédite.Hélas,plutôtquedefaireouàtenterdefaireautrement,ellesn’invitentqu’àfaireavec,voireàlaisserfaire,commesiladépriseétaitlaseuleréponsepossibleàl’emprise.Noussommesdonc livrésauxdésordresetdésarmés faceau futur.LeDircom leperçoitmais ilnepeutlecomprendre,jecrois,au-delàd’applicationsponctuelles:doncilagiteetils’agite.Tandisquelechercheur,lui,peutcomprendreetdonneràcomprendremaisiln’apaslesmoyensd’agir.L’entrepreneur peut alors faire figure de modèle. En pensant et en agissant sur le temps desorganisations et des individus simultanément, il fait apparaitre ce qui est central: ce n’est pas letemps mais le sens. Si ce que je fais a du sens, alors, la question du temps ne se pose pas oudifféremmentcarl’actionestunesourced’accomplissement.Fairedelacommunicationlecatalyseurdel’Innovationpeutêtreunepistederechercheappliquée.Dessiner des pistes d’innovation, délaisser un peu les discours pour mieux nous intéresser auxusages,investigueretexpérimenterunnouveaubien-êtresociétal,peutnousdonnerunechancederetrouverunpeudemaîtriseetderefonderleshumanitésàl’èredudigital.Avec nos idées et nos projets, nous avons la capacité de tenter une percée entraînante dans cedésordre,enétablissantdumêmecoupunlienplusengageantentreprésentetfutur.

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Conférence1«Articulationentretempscourtsettempslong,ledilemmedustratège»Présentationsd’étudessurlaréactivité:unecombinaisonentreinstantanéitéetduréeOliviaFoli,MaîtredeconférencesenSIC-UniversitéParis-SorbonneCELSALaurenceServel,Maîtredeconférencesensociologie,UniversitéParisDauphineTémoignagedeAgatheLélu,DirectricedelaCommunication,RolandBergerConstatantl’omniprésencedelaréactivité,fortementvaloriséecommeunequalitédanslediscoursdesDRHetdescadres,lesdeuxchercheusesontvoulucomprendrepourquoiconvoquercettenotionetcommentladéfinir.Avecl’objectifdecernerlesvisagesconcretsdecetteréactivité,encontexte,deuxétudesqualitativesontétéréalisées:l’uneauprèsderesponsablesdecommunicationinterne(CI)dansdesgrandesentreprisesprivéesetpubliques,l’autreauprèsdeDRH,tousdansleprivéetauCODIRmêlantentretiensetobservationssurlelieudetravail.Principalesconclusions:

1. Vue comme une qualité, la réactivité est une nouvelle injonction : le collaborateur est«très»réactifou«pasassez»mais jamais«trop».Laréactivitéparticipeàune imageriedupouvoir caractéristiquede lapériode contemporaineetmarque l’adhésionà l’idéologiemanagériale.L’appelàlaréactivitéestrévélateurdestransformationsducapitalisme(besoind’agilitéfaceauchangement).

2. Laréactivitéademultiplesvisages.Elleapparaitcommeuneréponseauxsollicitationsetunmoyen de s’approprier le réel et l’activité. Elle est liée à un mode d’organisation. Entreinstantanéité et durée, c’est un élément de positionnement professionnel. C’est unecompétence endossée, mise en avant par les acteurs eux-mêmes, indispensable et trèsvalorisée.

PourAgatheLélu,dansunmonde«VOCA»(volatile,incertain,complexeetambigüe),laréactivité,totalementintégrée,n’estplusuneinterrogation.Celanel’empêchepasdetravaillerdansladurée,d’accompagnersurlelongterme,depensertransversalement.Onsedoitdeprendredurecul.OliviaFolirebonditenévoquantunautrerésultatissudestravauxderechercheetconstatéenphased’observationdesDRH. Ces fonctionnels, sollicités par tous sur demultiples sujets, ont undoublesentimentdedifficultéetdejubilation.De difficulté car l’urgencemet en cause le collectif: quand le rythme s’accélère, la collaborationdiminue devant l’injonction à réagir. Ce qui pose la question de la réactivité «subie» et de sagestion. De jubilation car ces acteurs sous contraintes ne sont pas passifs. Ils évitent de subir enmobilisant des capacités d’apprentissage, d’appropriation et de résistance. Ils adoptent destechniques pratiques de canalisation du flux des sollicitations, d’évitement ou d’arbitrage. Parexemple, ils savent faire «passer le bon sujet», qui leur parait important dans le journal interne,façonnerunrecrutement,fairebaisserlapressiontemporelle,restersurletravailplanifier.Autantdesourcesdefierté.Enfin, la réactivité leur permet de se penser et de se positionner comme un acteur stratégiquelorsqu’ilsfontvaloirleurpointdevueetleurexpertisepouréclairerleDG.Leurpouvoird’influenceetd’anticipationpeutainsis’affirmer.Surletempscourtcommesurletempslong,laréactivitéestdonc une compétence nécessaire et une occasion de construire et d’affirmer son identitéprofessionnelle.

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Question : la réactivité est-elle vécue différemment par les séniors (les exécutifs) / jeunes (lesexécutants)?R:Unetelledifférencen’apparaîtpasdanslesétudesmenéesauprèsd’acteurstousausommet.Q:laréactivitéest-elleunfreinaubonmanagementdeseséquipes?R.Impossibled’apporteruneréponsesystématique.C’esttrèscomplexe.Toutdépenddelamanièredontlemanagers’identifie,seprojette,pourquiilalesentimentdetravailler(poursonéquipe,pourlebien-êtredescollaborateurs,pouruneentrepriseresponsable…),desesvaleurs…Q:leDircoma-t-ilunvraipouvoird’influence,mêmes’iln’estpasauComex?R:mêmesilePDGestle1ercommuniquantdel’entreprise,leDircomauneréellevaleurajoutéeàluiapporteretà lastratégiede l’entreprise,s’ilhabitesa fonctionet jouesonrôle transversal.LesDircomlepensent,lecroientetilsdisentqu’ilsinfluencentlastratégiedesentreprises.Q:quelledifférenceentreréactivité,activitépro-activité?R. : la réactivité, c’est réagir à l’évènement et aussi s’inscrire dans un temps long (cf.Machiavel).Paradoxalement,elleprendencomptecequiexisteetcequel’onsouhaitepourl’avenir.Lapro-activité,elle,évited’êtretoujoursdanslaréactivitégrâceàl’anticipation.

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Conférence2«Lamémoire:stratégiesdecommunicationidentitairesentrecontinuitéetrupture»Quefait-ondupassédanslesorganisations?JulienTassel,MaîtredeconférencesenSIC-UniversitéParis-SorbonneCELSAL’histoireest-elleuninstrumentdemanagementetdecommunication?Les stratégies de communication identitaires: entre continuité et rupture. Les entreprisess’intéressentdepuislongtempsàleurpasséettoutparticulièrementdepuislesannées80’pourunedoubleraison:l’entrepriseestdevenueunsujetpourdeshistoriensenquêtederenouvèlement;lesentreprises,conscientesde leurmortalitéetsouhaitantsedifférentier,sesont intéresséesàcequiforgeaitleuridentité.D’oùdenombreuxprojets,notammentdanslessecteursduluxe,bancaireouautomobileavec,soit lavolontédevaloriserunsavoir-faire,soitdefaireœuvredetransparenceetde clarifier leur position auprès de l’opinion publique (fonds juifs, travail forcé…). L’histoire s’écritsousleregardvigilentdespartiesprenantes.Lesrapportsaupassésontdifférenciésdanslesentreprises:histoire,passéetpatrimoine.Lepassépeutêtreconvoquéàl’auneduprésentetilest,surtoutdepuis70,’liéàlamémoireetaupatrimoinedes entreprises. Une mémoire qui est moins rigoureuse que l’histoire puisqu’elle concerne lesorganisationset lessouvenirscollectifsmaisa l’avantaged’êtreplusaffectiveetdepouvoir inclurelesrevendicationsdessalariés.Lepassécontribueàlacommunicationavecdepuis5-6ansdeplusenplusdeliensaveclesMusées(expositionLVMH).L’histoire,ressourcepourlespouvoirsetinstrumentmanagérial.Lesdirigeantsutilisentl’histoireetl’exemplaritédesfondateurscommeunmoyendese légitimer,décidentdecequiestdigned’êtreconservéetleDircomfaçonnecequienestdit.Celapeutinciterdesanciensoudesjeunesàécrireune«contre»histoire.Ainsi, l’histoireestuninstrumentdevalorisationavecunrisqued’enfermementdanslepassémaisaussidelégitimationdesproduitsetdesmanagers,d’identificationetdecohésion.L’identitédesentreprisesest-ellesolubledanssonamnésie?Jean-PierreGuéno,écrivain,historienL’avenir n’est fait que de l’épaisseur du temps. La mémoire de l’entreprise, c’est sa conscience,déclinéeenpointsderepère,valeursetéthique.Orl’entreprise,entantqu’organisation,estcommel’individu menacée d’Alzheimer par le contexte de globalisation. Les grandes entreprises ont uneprédisposition physiologique et structurelle à l’amnésie (structures centralisées, pyramidales,rivalités internes, cloisonnement…). Tandis que les PME et les start-up, elles, ont un problème depérennité.Derrière cela, c’est la question de la place de l’hommedans l’entreprise qui est posée.Pour se développer durablement, l’entreprise doit trouver un équilibre entre propriétaires,actionnaires, collaborateurs et clients, entre structure fossile, source de défiance et structurevivante, sourcedeconfiance.Elleabesoind’avoir (ducapital)etd’être (demémoireetdeprojetshumanistes).Si l’écrit est un antidote à l’amnésie digitale, médiatique et au court-termisme des nouveauxcapitalistes,développerl’écologie,lasciencedesconditionsd’existence,dansl’entrepriseetdanslamémoireapparaît indispensablepourparveniràunecohésionmondialeetsociale,faceauxgrandsenjeux que sont : la multiplication par quatre de nombre d’humains sur terre et le danger de labarbarie.

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XavierCrespin,DirecteurdelaCommunication–AssociationL’AventuredePeugeotCitroënDSPourquesonpatrimoinesurviveetqu’ilnepèsepassurlaperformancedesmarquesetdesproduits,PSA a choisi le dissocier de l’entreprise et Pierre Peugeot a créé début novembre 2016 uneassociationchargéede lepréserveretde leprotéger.Maisausside le fairepartageren lerendantaccessibleàdeshistoriensetaugrandpublic.Grâceàcetteassociation, l’histoired’uneentrepriseprivéeneseraplusjamaisdétournéeouinstrumentalisée,saresponsabilitéestderaconterl’histoire– y compris cachée - avecdu contenuetdes faits que chacunpeut lire comme il le souhaite. Sonaction,auservicedesmarquesetdetouteslespartiesprenantes,s’inscritdanslelongterme.Question:Ya-t-ildeszonesd’ombresdansl’histoiredePSAcommedanscelledeVolkswagen?R:Ilyenadanstoutesleshistoiresindustrielles.Nousassumonslafabricationd’obusavantcelledevoitures.Nousnoussommespromisd’écrirenotrehistoireréelleetcomplèteaprèsavoirréunidestémoins.Etdeladiffusersousdifférentsanglesviaunecollection.Q:QuelledifférenceentreADN,notionnéedansles90’ethistoire?R.: l’ADNestunemétaphoremédiatiquede l’histoire.Qui légitimeune stratégieen illustrantquetoutestcohérentettracédepuisl’origine.Onvoitd’oùl’onvient.Onpeutcapitalisersursesvaleurspourévoluer.Q.: le passé n’est-il pas un poids pour les entreprises au moment où elles doivent envisagerl’avenirdansunepérioded’accélérationdutemps?R.:Ceuxsontlesoutils(web)quinousdonnentl’impressiondecetteaccélération.Paradoxalement,c’estentre1880et1900queletempss’estvraimentaccéléré.Beaucoupdecequenouscroyonsêtredes idées neuves aujourd’hui ont déjà été inventées à cette époque. Face à ce sentimentd’accélération, l’histoire peut être un outil au service des managers pour rassurer en phase dechangement,unpointd’appuipourpouvoirévoluer(ex.laCaissed’Epargnes’appuiesursesvaleurssocialesetsolidairesquiremontentau1èrescoopérativesau14ème-15èmesiècles).ChezPSA,lepasséestunlevieraudéveloppementfuturdesmarques.L’expositionsurla«croisièrejaune»enChineaeuunsuccèsincroyable;lesmarquesenprofitentpours’yimplanter.

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Conférence3«Temps,cultureetcommunication»CyrilMasselot,MaîtredeconférencesenSIC-UniversitédeBourgogneFrance-Comté

Revuedesanciensetdesmodernespourdonnerenvied’allerplusloin:• P.Watzlawick:a travaillé sur ladimensionsocialeet culturellede la communicationet les

processus informationnels. Ilspermettentdecomprendre les rapports sociauxet laculturedes territoires. Il a révélé le problème de la ponctuation, qui laisse ou non de l’espace àl’autre:«Lanatureetladuréed'unerelationdépendentdelaponctuationdesséquencesdecommunication entre les partenaires» => on peut évaluer la «qualité» d'une relationcommunicationnelle; un mauvais rythme entraîne l'interruption de l'échange, c’est unepathologiedelacommunication.

• E.T.Hall:aapportélanotiondelangagesilencieuxquiinfluesurnosrelationsetconstituenoscultures(êtreenretardestvécudifféremmentselonlescultures,nossociétéssontplusoumoins polychroniques (capacité à gérer à demultiples évènements enmême temps, àêtre «slow»…). Et la notion de proxémique => Les relations interpersonnelles et socialess’organisentenfonctiondeproximitésdéfiniesparletemps:ladistancedansl’espaceentrel’unetl’autrevarie.

• RaulMontenegro:amontré,enobservantdestribusindiennesmenacéesdedéforestation,quelaperceptiondesonespacevarieselonsonstatut,lemomentetsonétatémotionnel.

• Eric Dacheux: définit la communication comme « une relation humaine intentionnelle departagedetemps,et/oud’espaceet/oudesens,quis’inscritdansladurée.».Constateque«Lenumériqueatendanceàrenforcerletempsdestribusplutôtquedecréerducommun».Et, sur le rapport entre temps et culture, observe que «Internet est l’accomplissementtechnique du rêve libéral: «C’est «Time ismoney», «Tout estmaintenant»;unprésent,quiestunenégationdupasséetdufutur.

StéphanieOuedaCruz,AssociateDirectorDiversity&InclusionCoca-Cola(Europedel’Ouest)

La diversité, c’est tous les éléments visibles et invisibles de chaque individu. Les entreprises seprojettentaujourd’huisurcetteproblématiqueetladéclinesurdesdimensionstellesque:légalitéhomme-femme, l’intergénérationnel/savoir de l’entreprise, l’orientation sexuelle, le handicap et ladiversitéculturelle.Mêmes’ilestpossibled’accéléreretdeforcerlechangement,lesévolutionssurcessujetssemesurentdansladuréecarellesreflètentcellesdelasociététouteentière.ChezCocaCola,ladiversités’inscritàlafoisdanscetempslongetdansletempscourt.Desgrainessont plantées pour l’avenirmais avec des échéances et des résultats. Si l’on ne peut pas avoir unretoursurinvestissementimmédiat,onsedoitd’avoirunevisiondynamiquesurladurée.Parlerdediversitéetd’inclusionpose laquestiondu« comment travaillezensemble?». L’undesingrédients majeurs pour y répondre est le respect et la valorisation et si Coca Cola œuvreparticulièrement en ce sens avec une vision transversale, l’entreprise s’adapte aussi à chaqueterritoire.Carlaconduiteduchangementsurladiversitéestpluscomplexedanslespaysdusuddel’Europe que dans ceux du nord. Il faut s’adapter au contexte légal et business pour définir unestratégied’inclusionetlesprioritésàtravailler.Concrètement,celasetraduitpardesformations,notammentàlasuitedefusions.Ilestimportantd’allerau-delàdesclichésetdemettrel’hommeaucentredesorganisations.Lanotiondutempseneffetpeut-êtretrèsvariableselonlescultures.Parexemple,lemotmexicainquipeutêtretraduitenfrançaispar«maintenant»peutsignifierpourunmexicain«surlemoment,dans5’,dans3joursoujamais». Il est crucial de faire de la pédagogie sur l’interculturalité, afin que chacun puissecomprendrelaculturedesoninterlocuteur.Réussirlacohésionentreleshommesnepeutêtrepensésurletempscourt.

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Question:lenumériquepeut-illibérerl’individu?R :c’est lemonde libéralquia leplusprofitédesoutilsnumériquesquipermettent l’instantanéitédes échanges. Ca n’est pas le cas ailleurs. Deux mondes coexistent en parallèle. Par ailleurs, onassiste à un essor du participatif mais pas à un développement du coopératif au sens positif duterme.Q : quand la diversité est un affichage, est-elle contreproductive? Quand elle est vraimentintégrée,a-t-elleunimpactsurlaperformance?R : le temps où certaines entreprises y travaillaient par réaction à la réglementation ou pour êtredans l’air du temps est révolu. Elles se professionnalisent, savent que les consommateurs veulentquelesproduitsetlesentreprisesreflètentleurdiversité.Ellesontbesoind’attirerdesjeunestalentsquisontsensiblesàl’équitéhomme-femme…Lesdirigeantssontchallengéssurdesquestions.Ladiversitéinterneestindispensablepourcapterdesmarchésémergents.C’estdoncunesourcedeperformance.Q : la différence fait peur. Comment ne pas utiliser la diversité de façon défensive ou ne pasadopterunestratégiecompensatoire?R : il faut dépasser cette peur à tous les niveaux hiérarchiques, le rôle des managers doit êtreexemplaire. Lors des recrutements ou des promotions, ils doivent prendre conscience qu’il fautdécidersurlesfaitsetpasseulementsurl’émotionnel.Àretenir:«Toutcequidiffèredemoi,loindemelésermeréussit»SaintExupéry.

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Conférence4«Quellesorganisationsdelacommunicationfaceàl’accélération?»JournalismeetgestiondestempsJérémieNicey,MaîtredeconférencesenSIC-UniversitédeToursLesmediacherchentlameilleureorganisationrédactionnellepourcolleraurythmedeleurpublic.L’enjeu:croiserletempsdel’évènement(quis’impose),celuidelaproduction(quienprend),àceluide l’usager (qui en manque). Il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau mais les modalités ontchangé.D’oùlaquestion:dansquellemesureletempsest«volé»auxusagers?Réponseendeuxpoints:

1. Capterletempsdansune«économiedel’attention»Lejournalismereposesurunelogiquedepub:dansuncontextedesur-stimulation,ils’agitde créer des contenus et des rendez-vous pour obtenir un consentement à payer, unesatisfaction à consommer, un engagement. Il dispose d’outils de plus en plus fin grâce aunumérique pour suivre les tendances, s’orienter vers ce qui va intéresser, vers ce qui est«adéquat»enfonctiondel’heure.Pourcolleraurythmedeslecteurs,leGuardiandétachedeséquipesauxEtats-UnispouralimenterlaFranceenjouantsurlesdécalageshoraires.Lamultiplicationdesindicateursdeduréedelectureestunenouveautéàsouligner.

2. FaireperdredutempsLa «tyrannie» de l’urgence conduit à un manque de recul, à une baisse du temps derecherche, d’investigation et de vérification des informations diffusées. Qui conduit à unepertedecrédibilitéetdeconfiance(ex:erreurdel’AFPavecl’annoncedelamortdeMartinBouyguesen2015)età l’essordesitesdevérification.C’est lamaîtrisedescontenusetdeleurdiffusionquiestencauseetnonpaslamaîtrisedutemps.

Silesujetl’intéresse,l’internauteluiaccordetoutletempsnécessaire=>penserlelongetlelentesttendance; donner du sens est gagnant. Le lecteur n’a pas forcement besoin de news en continuentre22h30et7h=>sortirdelacoursevaineaprèslespublics,ajusterutilité/futilité.Les enjeux: développer l’économie de l’expérience, la fidélisation à long terme plutôt que desconsommations courtes successives. Le critère temps est désormais repris par les régies. Le faitqu’ellesmesurent les audiences « qualifiées», «engagées», le temps passé sur une page et nonplusletauxdeclic,montrentquelesmediasesontréappropriéscesquestions.ValérieRenoux,ResponsableCommunicationExterne,PosteImmoLetempslongdel’immobilierestbousculéparl’ubérisation(findesbaux3-6-9ans)etparletravail,toutletempsetpartout(co-working,télétravail…).Cette accélération impacte l’activité de Poste Immoqui doit piloter la transformation immobilièrerapidedugroupeetreconfigurerlesréseaux(pourlenouveaucampus,unanentrelademandeetles1èrsemménagements)toutendéployantdenouveauxservices.Elle impacte également l’activité de la Dircom, qui doit d’une part incarner et accompagner latransformationdugroupe,d’autrepartdévelopper lanotoriétéet la connaissancedesactivitésdePoste Immo. D’où son recours à l’agilité: la communication interne fonctionne comme lesmédiatype20’ouMétro,avecdesnewsramassées,desarticlestrèscourtsquidonnentdusens,destitrespeoplepourattirer.Etunrythmedeparutionnéanmoinsralentiparlestempsdevalidation.

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La technique redonne du temps au service communication, notamment pour mettre à jour lesfichierspresseoudiffuserdescommuniqués.Laréalisationd’infographieseninterneestégalementungaindetemps.Le rôle de la Direction estmodifié et enrichit par lamultiplication des acteurs, qu’elle forme à laproductiondecontenus.Lescollaborateursdisposentenfind’undroitàladéconnection.Marie-CarolineLopez,Journaliste,LaLettredel’ExpansionMarie-Caroline Lopez a témoigné de l’expérience qu’elle a vécu début 2012, alors qu’elle étaitjournalisteàlaTribune.Lorsquelequotidienpapierpayantestpasséau«pursiteweb»gratuit,leparamètretempsetavec lui lamanièredefaire le journalontradicalementchangé.Pourfairedesclicsetde l’audience, il fallait faireplusd’articles,plus courts,àeffectifs constant. Les journalistessontpassésd’unpapiertousles2joursenmoyenneà4-5parjour.D’oùmoinsd’enquête,d’analyseetdevérification;plusdetitres«racoleurs»etde«recopiage»àfaiblevaleurajoutée=>Letempsmodifielargementleproduitfinietdoncletravail.Aujourd’hui,lesjournalistesdeLaTribune–qu’elleaquitté–sontrevenusà2articlesparjouretletoutgratuitamontréseslimites.Siécriredelongspapiersn’estpaspourautantredevenupossible,être le premier à publier reste une exigence car cela a une valeur économique dans unenvironnement très concurrentiel. Les média continuent de chercher un nouveau modèleéconomique,unnouveléquilibrepourque l’accélérationn’empêchepas laqualitéde l’informationetneruinepaslaconfiancedanslesmedia.Question:neveut-onaujourd’huiquedu«court»?R :non, lesgens raisonnenten fonctiondu tempsdont ilsdisposent.Uneexpériencemenéedansunegareoùétaitproposéunehistoirede30’’,de2’oude10’,amontréquetousn’ontpaschoisi30‘’.Q.:quediredu«tempspourri»?R.:Prendreletempsdecapterunprospectetneplusprendreletempsdes’enoccuperquandilestclientauneffetdésastreux.Q.:enquoilewebpolariseletemps?R.: les internautes sont preneurs d’informations très courtes ou au contraire très longues.Parallèlement, des contenus ont été ré-internalisés au sein des services communication. Car il estdifficiledegérerunecrisesurfacebookavecuneagenceexterne.Q.:n’ya-t-ilpasenconséquenceunrisqued’embourgeoisementdesservicescommunication?R.: sic’est lecas,c’estunrisqueàprendrecarc’estsur lescontenusque lacommunicationaunevaleur ajoutée. Tous les collaborateurs de l’entreprise peuvent produire des contenus et lacommunicationpeutmonterenpuissanceenconseilstratégiqueetenformationtechnique.

Compte–rendudel’AcadémieScientifiquedeCommunication&Entreprise/Jeudi15septembre2016

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Conférence5«Comment la communication interne gère-t-elle l’accélération du temps et les risquespsycho-sociaux?»Lesorganisationsetlesdispositifsdecommunicationconduisent-ilsaustressetàtermeauburnoutet comment la communicationpeut accompagner les collaborateurs pour l’éviter? Réponses en 3éclairages.L’accélérationdutempsest-elleunfacteurderisquespsychosociaux?CarolineDatchary,Maîtredeconférencesensociologie,LISST(CNRS,UniversitédeToulouse)1er éclairage: l’analysedeplusieursmétiersmontre que le travail est aujourd’hui dispersé.Définircettedispersionpermetdesaisirlesphénomènesauxquelsnoussommesconfrontésaujourd’hui.Sous la pression d’un environnement changeant, les personnes au travail sont amenées àreconfigurerleuractivitéenpermanence.Lasociologueacomparédessituationsetdesrythmestrèscontrastés - des traders… aux égoutiers - pour analyser les différentes formes de cette dispersion(préoccupation, attention périphérique ou stratégique, multi tasking, transition, défaut deconcentrationchoisieousubie).Lesrésultatsmontrentqueladispersionrelèvedel’environnementet de la personne elle-même: on est dispersé et on se disperse. Elle est dynamique et c’est unprocessusconnoténégativement. Ilya10ans,noussommespassésd’unenormehégémonique, lafocalisation, à une norme attentionnelle plus labile: une attention, qui flotte et se distribue surplusieurschoses,estvuecommeunecompétence.ConstanceWiblé,DirectricedelaCommunicationGroupe,MACSFAssurances2èmeéclairageensituationdetravail:laplupartdenoscollaborateurshabituésàutiliserdansleurvieprivélesoutilsd’immédiateté(sms,Facebook,Youtubeetautresapplis).Enentreprise,ilsquittentcetempsaccéléréqu’ilsconsidèrentcommenormaldansleurvieprivé,enpartieparcequ’ilsn’ontpas le choix, ces outils n’étant pas disponibles dans les entreprises. Et ils se scindent en deuxpopulations.Lesplusjeunessontchoquésqueletempsdansl’entreprisesoitralentietpensentqueladispersionestunecompétence.Alorsque«ceuxd’avant»apprécientcettelogiquedifférenteetqualifientleurentreprise«d’îlotoùilspeuventrespirer».Notreambitionestdetravaillerpourcescollaborateursdedemaintoutenaidantcescollaborateursd’hieràévoluer.SolveigEvenstad,Doctorante,UniversitédeNiceSophiaAntipolis3ème éclairage: Sloveig Evenstad amené une étude comparative en Norvège et en France sur lesmodes de communication stressant qui causent le burn out. Dans sa thèse, la communication«déficiente»et/ou«pathologique»,estanalyséecommeunehypothèsepossible,parmid’autresfacteursdeburnout.Elleparledeculturetoxiquedel’organisation.Etproposeunmodèleillustrantcomment une communication stressante conjuguée à d’autres facteurs (surcharge de travail,manquedereconnaissance,conflitsdevaleurs…)pourraientconduireauburnout,silecollaborateurd’adoptepaslabonnestratégied’adaptation.Elleanalyselesdifférentsniveauxdelacommunication(organisationnelle,interetintra-personnelle,médiatisée par ordinateurs) et les acteurs (managers, collègues, clients…), liste les facettes de lacommunicationstressanteintentionnelleounon(manipulation, injonctionsparadoxales,guerreparemails…) ou déficiente (surcharge ou sous charge d’information…). Etre toujours connecté etdisponible,lesorientationsàcourtterme,lechangementcontinuoulesdélaisirréalistesprovoquentunsentimentdedéshumanisationetcréentundéséquilibreentrevieprofessionnelleetvieprivée…

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autantdefacteursquipeuventconduireauburnout,notammentparmilesinformaticiens,vecteursetvictimesdel’accélération.Elle conclut sur les similitudes qui existe entre les groupes français et norvégiens: le vécu et lesantécédentsduburn-outsontpresquesimilaires; l’accélérationestdonc,pourelle,productricedepathologiescommeleburn-out.Ladispersionmène-t-ellenécessairementauburnout?SelonCarolineDatchary,êtreconfrontédemanièrerépétéeàdessituationsdedispersioninduitdescharges cognitives (interruptions, surcharge d’informations, énergie pour entretenir le réseau etpression temporelle), psychiques (préoccupation lancinante/liste à traiter, improvisation dansl’urgence, sentiment de culpabilité: faire face à l’imprévu n’est pas reconnu), physiques (fatigue,risquesmusculo-squelettiques).Cestroistypesdechargesserenforcentetsecumulent.Face à elles, les uns acquièrent plus de compétences: quand on sait utiliser et canaliser lestechnologies de l’information et de la communication, évoluer au sein d’un collectif stable, saisirl’occasion(agilitétemporelle),onpeutmaîtriserlesémotionsetlimiterlesrisquesdeburnout.Maisd’autresentrentensouffrance.Pour Constance Wiblé, ces maladies peuvent aussi venir de la sacralisation du tempsorganisationnel:celuiquiestprescrit (plandecomannuel).Alorsque le tempsutilisépar l’équipecommunicationn’estjamaisécritetprévu:c’estceluidel’instant,del’opportunité,del’interstice.Lacommunicationinternenegèrepasl’accélérationdutemps.Elleestcoupablecarelleycontribue.Etelle seraitdeux foisplus coupable siellen’aidaitpas ceuxdu tempsorganisationnelàaller vers letempsdel’instant.Queldispositifd’accompagnementdecettedispersion?PourCarolineDatchary,celasejoueessentiellementàunniveauindividueletauseind’uncollectifdetravail: lemanagerdeproximitécréeunrempartetprotègesonéquipe.Favoriser leséchangesdans un collectif stable limite la dispersion car chacun sait quand il peut interrompre celui quitravaille à ses côtés. Beaucoup se joue également sur l’aménagement de l’espace de travail(possibilité de s’isoler en open space, d’indiquer sa disponibilité)… Il n’y a pas de solutions clé enmain à l’échelle d’une grande organisation mais des solutions dans un même groupe decollaborateurs.Unauditparlebasestdoncnécessaire.Néanmoins, globalement, reconnaitre la chargede travail, encourager le collectif, fixeretpartagerunenormeàrespecter(ex.délaisderépondreàunmail,pasdeportableenréunion)sontdespistesàexploreretl’exemplaritédesmanagersdeproximitéestessentielle.Question:Faut-ilrepenserlesopenspaces?R.Toutdépendde l’activité.Cette«mode»est liéeavanttoutàdes logiquesfinancières. Ilpeutyavoir des choix hybrides (open space et lieux d’isolement) et chacun peut organiser descloisonnements(ex.plusieursadressesmails).

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Conclusion

Bruno Chaudet, Maître de conférences, Université Rennes 2, co-pilote du Comité Scientifique deCommunication&Entreprise

Bruno Chaudet a conclu cette académie par une réflexion générale et spéculative sur la notiond’espace-temps-communication-entreprise. En partant des physiciens qui, depuis Einstein,considèrentque l’espaceet le tempssontplusséparés:c’estuneseuleetmêmechoseetsicettechoseestuneboîte«espacetemps»,ellepeutêtredéforméeparlamatière.Transposer cette idée permet de définir cette boite: elle contient trois «espaces temps» (public,professionneletprivé).Quelesobjetsnumériques–commelamatière-déformentenpermanence:en créant des passerelles entre ces trois sphères devenues totalement poreuses, ils créent destensions.D’oùl’émergencedenouvellesformesdecommunication,d’organisationsetdenormesnotammentmanagériales pour recréer des limites. D’où la question, posée par le cas Orange: est-cel’organisationoulesindividusquidoiventgérereux-mêmescettesituation?Si c’est l’organisation, cela implique la déconnection et de traiter la charge de travail. Le plussouvent,ceuxsontlescollaborateursquirecréenteux-mêmesdesfrontièresetgèrentl’organisationdeleurtravail.Ce qui est troublant, c’est également que ces espaces temps sont à la fois physiques etmétaphoriques : on peut être dans une sphère privée en étant dans un espace professionnel.L’entreprisepeutdoncêtredésignéecommeunespacetemps-espacephysiqueetsymbolique,cettepartiesymboliqueprenantdeplusenplusdeplacedansleprojetdel’entreprise.Onobserveeneffetdepuis plusieurs années la dislocation de l’entreprise-espace physique au profil de l’entreprise–projet.Elledevientunespaced’informationetdecommunicationquiessaiedestabilisersonprojetetletemps,enrendantreproductiblesdesflux.Aujourd’hui, le numérique est notre capacité à spatialiser les relations sociales et à les rendrereproductibles et observables. Avec les réseaux sociaux, les relations sont spatialisées etrationalisées. Dans l’entreprise, le numérique déforme les processus de collaboration existants etinduitdesmodificationsprofondesdel’organisationdutravailetdelacommunication.Unenouvellespatialisationestenmarche.

ProposrecueillisparIsabelleLeprévotsConceptionrédaction