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1 Jean-François BOUGEARD La science économique à l'épreuve de la comptabilité. La comptabilité, la vraie celle des entreprises, peut être comprise si on l'aborde avec une démarche théorique qui élimine le piège des règles incompréhensibles, ennuyeuses, rébarbatives des débits et crédits traditionnels. Cette démarche logique, très simple car résumée dans une équation élémentaire, peut surprendre. Elle permet d'abord de tenir intelligemment une comptabilité. Elle apporte également un nouvel éclairage sur les domaines essentiels de la science économique que sont, la monnaie, le rôle des banques, la comptabilité nationale, le budget de l'Etat, l'économie de marché et, mieux encore, un éclairage plus simple et plus proche de notre vie courante que celui que nous propose la science économique. Faire appel à l'intelligence plutôt qu'à la mémoire pour découvrir la richesse de la comptabilité, est-ce une découverte que la science économique peut ignorer ? Jean-François Bougeard Né en 1935. Ingénieur. Après avoir eu des responsabilités dans différentes entreprises a terminé sa vie professionnelle en partageant son temps entre le conseil d'entreprise, la formation et l'écriture de logiciels.

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  • 1Jean-Franois BOUGEARD

    La science conomique l'preuvede la comptabilit.

    La comptabilit, la vraie celle des entreprises, peut tre comprise si onl'aborde avec une dmarche thorique qui limine le pige des rglesincomprhensibles, ennuyeuses, rbarbatives des dbits et crditstraditionnels.Cette dmarche logique, trs simple car rsume dans une quationlmentaire, peut surprendre. Elle permet d'abord de tenir intelligemmentune comptabilit. Elle apporte galement un nouvel clairage sur lesdomaines essentiels de la science conomique que sont, la monnaie, le rledes banques, la comptabilit nationale, le budget de l'Etat, l'conomie demarch et, mieux encore, un clairage plus simple et plus proche de notrevie courante que celui que nous propose la science conomique.Faire appel l'intelligence plutt qu' la mmoire pour dcouvrir la richessede la comptabilit, est-ce une dcouverte que la science conomique peutignorer ?

    Jean-Franois BougeardN en 1935. Ingnieur. Aprs avoir eu des responsabilits dans diffrentesentreprises a termin sa vie professionnelle en partageant son temps entrele conseil d'entreprise, la formation et l'criture de logiciels.

  • 2Du mme auteur.

    Comprendre la comptabilit gnrale,analytique et budgtaire.Editions ouvrires 1981

    La comptabilit, une cl pour l'conomie.Editions du seuil 1991Points Economie

    Edition : Jean-Franois Bougeard4 square Alain Fergent35000 RENNESTl. 02.23.42.09.08Mail : [email protected] Jean-Franois Bougeard fvrier 2005

    ISBN : 2-9523938-O-X

    Dpt lgal : mars 2005

    Imprim par : Sarl IDENTICBP 11414 rue de la Carrire35514 Cesson Svign

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  • 4SOMMAIRE

    Avant propos..

    L'image de la comptabilit....La comptabilit et les comptables....La comptabilit et les profanes....La comptabilit et les conomistes..

    D'abord une unit de mesure et la mmoire des dettes..Un peu d'histoire..Un bilan primitif..La monnaie disponible.....La dfinition de la monnaie disponible...La bonne et la mauvaise monnaie....

    Le retour du bilan primitif...La naissance de la comptabilit...Les dbits et les crdits....La caisse l'envers ?La naissance du compte de rsultat.....Notre comptable de la Renaissance, Pierre de Savone....Un nouveau mystre .Une petite astuce de l'arithmtique..

    La thorie comptable commence par le bilan.....Le bilan de dpart de Pierre de Savone...

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  • 5Un exercice pour illustrer le bilan....Le bilan....L'quilibre par la situation nette...D'abord et avant tout, le bilan de dpart..

    De la thorie la pratique ...Un logiciel de comptabilit..Le plan comptable........Nos sept lments et les sept classes du plan comptable.Le logiciel Compt'in et le bilan d'ouverture.....La saisie des critures L'exercice comptable...L'enregistrement des vnements....Les diffrents vnements enregistrer..La saisie logique du logiciel Compt'in....La saisie dbits/crdits traditionnelle...

    Consquences d'une nouvelle thorie et pratique comptableUn dernier rappel.....Les indispensables critures d'inventaire....L'ancienne et la nouvelle pratique comptable.....L'analyse du logiciel Compt'in....Un nouvel enseignement de la comptabilit et de l'conomie.La comptabilit et la gestion....La comptabilit analytique...La comptabilit budgtaire......

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  • 6La comptabilit et l'conomie...Une nouvelle dfinition de l'conomie....L'conomie dirige...L'conomie librale..Le capitalisme..

    La comptabilit et la gestion de la monnaie....La monnaie......Les masses montaires.La gestion par les banques de la monnaie disponible..Un exemple concret..La gestion des placements par les banques.....L'huile des premiers conomistes....Une quantit d'huile minimum....Rsumons....Les monnaies trangres..

    La comptabilit et la gestion d'une nation......Le modle actuel de comptabilit nationale....Notre modle....La thorie comptable applique la comptabilit nationaleLes mnages consommateurs...La construction de notre modle.....La production marchande et non marchande..Les consommations intermdiaires de la production...Cohrence de la production avec la consommationLes statistiques montaires......Quelques surprises !.

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  • 7La comptabilit et la gestion d'un Etat....Le budget actuel de l'Etat public.....Le bilan de l'Etat.....Place et rle de l'Etat...Les recettes et les dpenses du budget de l'Etat..Une classification des impts et leur destination....Quel montant d'impts prlever ?...Quelques remarques sur les impts et les profits des entreprisesLes frais financiers de l'Etat....Un vague espoir !.

    CONCLUSION...

    Thorie comptableThorie de la monnaieTlcharger le logiciel Compt'in .Schmas de la comptabilit nationale..

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  • 8Avant proposCet ouvrage a l'ambition de promouvoir une technique, lacomptabilit, or cette comptabilit a une trs mauvaise rputation.Quelle gageure ! Elle a une image rbarbative, ennuyeuse. Nousesprons que sa seule vocation ne vous incitera pas arrter l votrelecture. Elle provoque une raction de rejet chez la plupart de nosconcitoyens et pourtant c'est cette comptabilit que nous avonsl'intention de vous faire aimer pour en dcouvrir toute la richesse.Cette richesse ne se limite pas la gestion des entreprisesindustrielles et commerciales. Cette comptabilit peut et doit apporterun nouvel clairage la science conomique.Cette merveilleuse technique est absente de notre culture gnrale caril est impossible, tant que l'on n'a pas dcouvert sa thorie, decomprendre ses rgles normes et procdures, d'une manire logique.Elle dmarre sur une convention, l'galit des dbits et des crdits,impossible justifier. Nous en parlerons longuement. Elle rappelle detrs mauvais souvenirs aux tudiants qui n'ont rien retenu des rglesconventionnelles, apprendre par cur, et sans aucune logique. Onpeut les rassurer. Ces tudiants ont fait preuve d'intelligence car ilsont eu raison de refuser un enseignement ne faisant appel qu' lammoire la plus lmentaire, celle qui ne peut pas faire appel aumoindre raisonnement. La comptabilit telle qu'elle est actuellementet a toujours t enseigne est incomprhensible. Les consquencesen sont catastrophiques. La comptabilit, rserve aux seulscomptables aprs un long et pnible apprentissage, est absente de laculture gnrale de tous les citoyens, y compris de ceux qui enauraient le plus grand besoin, les conomistes. Nous dcouvrirons lesraisons de cette ignorance grce une initiation originale. Cetteinitiation va emprunter des chemins trs diffrents de ceux de ladmarche traditionnelle.Ce chemin n'est pas un sentier troit limit la seule techniquecomptable. C'est un grand boulevard avec de nombreuses voiesparallles dcouvrir en mme temps. L'on ne comprend rien lacomptabilit sans une nouvelle dfinition de la monnaie et cettenouvelle dfinition est trs diffrents de celle que nous propose la

  • 9science conomique. On ne peut pas aborder l'conomie sansmatriser son instrument de mesure, la comptabilit. La comptabilitet la monnaie sont les deux notions, de base, essentielles, ncessairespour dcrire et surtout mesurer l'conomie. Or la monnaie est maldfinie et la comptabilit ignore par la science conomique. Cesdeux notions redcouvertes nous permettront d'aborder quatredomaines essentiels de la macro-conomie, l'conomie de march, lesstatistiques montaires y compris le rle des banques, la comptabilitnationale, le budget de l'Etat.Il faut dcouvrir la vritable comptabilit en commenant par l'effort faire pour liminer ce qu'elle n'est pas. L'histoire de cette techniqueassocie, nous venons de le suggrer, celle de la monnaie sera notrefil conducteur.Une fois cette initiation ralise, la comptabilit aura une thorie dontle champ d'application est trs vaste. Nous ne nous attarderons passur ce qu'elle sait dj faire, la mesure des activits des entreprises.Cette comptabilit, toujours prsente dans les entreprises, nouspermettra de donner une nouvelle dfinition l'conomie de march.Nous dvelopperons galement les trois domaines de la macro-conomie dj cits, les phnomnes montaires, la comptabilitnationale et le budget de l'Etat. Il est trop tt de dire, pour l'instant etdans cet avant-propos, pourquoi la comptabilit est indispensable cette conomie de march et ces trois domaines de la macro-conomie. Il faut commencer par dcouvrir la vraie nature de lacomptabilit associe son unit de mesure, la monnaie.Avant de terminer cet avant-propos rassurons le lecteur. Ce n'est pasparce que nous parlons d'une thorie de la comptabilit que nousallons tomber dans le pige d'une science conomique emptre dansun jargon mathmatique comme si cette science tait une scienceexacte, une science "dure". La science conomique est une science"molle" et sans doute la plus "molle" de toutes les sciences humaines.Grce au dveloppement de son cerveau, l'espce humaine inventedes comportements conomiques originaux dont la nature animale etencore moins physique ou chimique ne nous offre aucun exemple.On peut parler d'une sociologie ou d'une psychologie animale, mais ilne viendrait l'ide de personne de parler d'une conomie animale.

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    La dmarche dite scientifique de nos anciens conomistes, fascinspar les dcouvertes de leurs collgues physiciens ou chimistes,dcouvertes rendues possibles grce un langage mathmatique deplus en plus puissant, est un pige dans lequel la science conomiqued'aujourd'hui est encore englue.Revenons la thorie comptable et prenons l'exemple de lamdecine. Nous proposons une thorie de la comptabilit l'imaged'une thorie de la radiologie, du stthoscope ou mme du simplethermomtre, c'est--dire des instruments qui permettent de faire desdiagnostics mais nous ne proposons pas une thorie des maladies. Lascience conomique est un art et chacun peut et doit avoir uneopinion sur ce qu'il pense tre la meilleure organisation conomiquepossible. La science conomique est d'abord et avant tout uneconomie politique. Mais avant d'mettre une opinion et surtout deprendre une dcision il faut faire un diagnostic, mesurer le plusobjectivement possible les phnomnes conomiques. Nous allonsdcouvrir que, pour ce faire, la comptabilit est un instrument gnialque la science conomique n'a jamais su exploiter.Nous nous permettrons d'mettre quelques opinions sur ce qui noussemble la meilleure organisation conomique possible. Noustenterons d'tre le moins possible doctrinaire en vitant autant lepige d'un ultra libralisme, trop souvent prsent chez de nombreuxconomistes aujourd'hui, que d'un tatisme primaire qui vient deprouver dans les pays qui avaient choisi le communisme sa totaleinefficacit. La comptabilit, bien comprise grce sa thorie, nousincitera prfrer une conomie de march dans un libralismematris par le pouvoir politique, lui-mme inscrit dans une vritabledmocratie.

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    L'image de la comptabilit

    La comptabilit et les comptables

    La comptabilit et les profanes

    La comptabilit et les conomistes

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    La comptabilit et les comptablesLes comptables savent pratiquer la comptabilit, nous n'en doutonspas, mais ne connaissent pas la thorie comptable. Voil unephrase abrupte et probablement choquante. Il faut rapidement direpourquoi nous osons lancer cette affirmation. Toute la pratiquecomptable est base sur l'galit des dbits et des crdits. Or, voilnotre pav dans la mare, les dbits ne sont pas gaux aux crdits.Cette affirmation est trs difficile admettre tellement elle estcontraire aux ides reues. L'illusion de l'galit des dbits et descrdits est aussi forte que l'illusion du soleil tournant autour de laterre. Comment oser dire que les dbits ne sont pas gaux auxcrdits alors que toute la pratique comptable est fonde sur cettegalit ? Il faudrait avoir termin notre initiation originale lacomptabilit pour en tre convaincu. En attendant, que dire quefaire pour que ceux qui sont choqus par notre affirmationn'abandonnent pas immdiatement la lecture de notre ouvrage ? Unpeu de patience et contentons-nous de dire ceci. L'galit des dbitset des crdits est l'galit de deux valeurs absolues traites commesi elles taient toujours positives. Il suffit d'ajouter ces deuxvaleurs absolues leur signe arithmtique, plus (+) ou moins (-) quenous avons tous appris l'cole primaire, pour que leurs vraiesvaleurs, les valeurs relatives, ne soient plus gales. C'est aussisimple mais aussi difficile admettre que de passer d'un systmegocentrique, un systme hliocentrique. Il faudra le dmontrerultrieurement mais pour l'instant nous pouvons rpter cettephrase trs simple. Il suffit d'ajouter aux deux valeurs des dbits etdes crdits leurs signes positifs ou ngatifs pour constater que lesdbits ne sont pas gaux aux crdits.Mieux encore que cette ingalit des valeurs relatives, quelledfinition donner ces deux mots : dbit et crdit ? Les comptablesdoivent avoir le courage d'admettre qu'ils ne savent pas donner unedfinition logique et rigoureuse ces deux mots. Pousss dansleurs retranchements, leur seule rponse se rduit une convention.Il faut respecter en permanence l'galit des valeurs montairesportes aux dbits et aux crdits des comptes. Pourquoi ? Pas de

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    rponse. Toutes les dfinitions imagines pour dfinir les dbits etles crdits aboutissent une impasse. Pour les comptables, commepour les conomistes, il s'agit d'une convention, d'un postulat, d'unaxiome, qu'importe le mot choisi. Partir de l'galit des dbits etdes crdits sans dire clairement qu'il ne s'agit que de valeursabsolues aboutit des contradictions que nous ne manquerons pasd'voquer. Nous ne rpterons jamais assez que pris avec leursvraies valeurs, c'est--dire les valeurs relatives, les dbits et lescrdits sont parfois gaux, tous positifs ou tous ngatifs, maisparfois ingaux, l'un positif et l'autre ngatif, et voil tout leproblme. Il suffit d'additionner les deux colonnes du journal, entenant compte, bien videmment, de leurs vritables valeurs,positives ou ngatives, pour constater au final deux totauxparfaitement alatoires l'un par rapport l'autre. Les dbits ne sontplus gaux aux crdits.

    La comptabilit et les profanesLa comptabilit ne se limite pas l'enregistrement des recettes etdes dpenses qu'il suffirait de savoir ventiler dans les comptes descomptables pour tenir une comptabilit. Voil une autre affirmationtrs simple mais aussi difficile admettre par les profanes quel'ingalit des valeurs relatives des dbits et des crdits par lescomptables.Commenons par une erreur de langage, pas bien grave, maissignificative. Pour dterminer une quantit par un calcul, tablir unnombre, nous avons le verbe compter notre disposition. Inutile des'tendre sur la signification de ce verbe, tout le monde lecomprend. Alors pourquoi remplace-t-on souvent, et mme trssouvent, le verbe compter par le verbe comptabiliser ? Cette erreurde langage met dans la tte des gens qu'il suffit d'apprendrequelques rgles et de savoir compter (ou comptabiliser!) pour tenirune comptabilit. Il est vrai qu'il y a encore peu de temps, avantl'apparition des machines calculer, la premire qualit demande un futur comptable tait d'tre le meilleur possible en calculmental. Savoir compter et avoir une bonne mmoire pour retenir et

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    appliquer les rgles comptables. Cette image poussireuse n'ajamais pu donner une opinion valorisante du comptable. Aprsnotre initiation la comptabilit il deviendra vident que lacomptabilit a une thorie trs riche et que le verbe comptabiliserne doit pas tre utilis la place du verbe compter.Revenons nos recettes et dpenses. Voil encore deux mots trssimples dont il faut donner une dfinition lmentaire maisrigoureuse. Une recette est une entre d'argent dans notre porte-monnaie ou sur notre compte bancaire, une dpense, une sortie dece mme argent. Ces entres et ces sorties font partie de lacomptabilit car mme avant d'avoir abord la thorie de latechnique comptable tout le monde sait que ces recettes et cesdpenses font videmment partie de la foule des critures qu'il fautenregistrer. L'erreur est d'en dduire que le bnfice sera ladiffrence positive entre ces recettes et ces dpenses et une perteune diffrence ngative. Le "dficit" du budget de l'Etat, nous leverrons plus tard, illustre cette erreur.Nous avons dcouvert des auteurs qui, partant de ce qui leursemble une vidence "mon bnfice est bien ce qui me reste dansma caisse", tentent de relier ce point de dpart la techniquecomptable dite "fondamentale". Leurs raisonnements aboutissent une impasse. D'autres s'insurgent contre les rsultats ditscomptables des entreprises lorsque ceux-ci ne sont pas gaux latrsorerie qui reste en fin d'exercice. Quand ces crits sont destins des tudiants susceptibles d'acqurir quelques connaissances enconomie, on peut mesurer le chemin parcourir.N'accablons pas le profane. Il est persuad que la gestion de sesrecettes et de ses dpenses est suffisante pour tenir sa"comptabilit" et il n'a pas compltement tort pour la raisonsuivante. Sans en tre conscient, le profane dissocie d'un ct lagestion de son patrimoine et d'un autre ct la gestion de son trainde vie quotidien par l'addition et la comparaison de ses recettes etde ses dpenses qu'il suffit de savoir compter.Commenons par celui qui ne cherche pas, ou ne peut pas,augmenter son patrimoine. Il est locataire de son logement, ne

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    possde que quelques meubles dont il ne retirerait pratiquementrien s'il les vendait, et possde une voiture bien usage. Il lui suffitde vrifier que ses dpenses ne seront pas suprieures ses recettespour tre persuad de tenir sa comptabilit. Mieux encore le rythmede ce contrle peut tre mensuel car il a de fortes probabilits d'treun salari mensualis dont les autres revenus du genre allocationsfamiliales sont galement mensuelles. Les organismes qui il doitrgulirement de l'argent l'ont fortement incit faire un rglementmensuel de la location de son logement, de ses frais d'lectricit,d'eau, de tlphone, etc., y compris de ses impts. Cette habitudede mensualiser la quasi totalit des recettes et des dpensesconfirme l'vidence qu'il suffit de contrler les entres et les sortiesdu compte bancaire pour tenir sa "comptabilit". Comme en plus ilsuffit de "compter" d'un ct les recettes et de l'autre les dpensespour en dduire si la fin du mois sera pnible ou non, on comprendpourquoi comptabiliser et compter sont devenus des synonymes.Le citoyen qui possde quelques biens, sa voiture, quelques beauxmeubles, son logement, ventuellement une rsidence secondaireet, pourquoi pas, quelques appartements donns en location pourarrondir sa future retraite aura galement l'impression de tenir luiaussi sa "comptabilit" avec les seules recettes et dpenses. En fait,il dissocie sa gestion courante de son patrimoine mme si les"dpenses" de ses emprunts pour acqurir son logement ou sesappartements sont en ralit un enrichissement. L'essentiel de sa"comptabilit" reste un quilibre entre ce qui sort et ce qui rentretous les mois de son compte bancaire. Dans sa tte, et sans faire unlien direct, rigoureux, comme un comptable, avec les recettes et lesdpenses, il estime la valeur de son patrimoine et le compare avecle reliquat de ses emprunts pour faire rapidement le calcul de sarichesse. Il n'oublie pas l'argent plac sur des comptes d'pargnequ'il additionne avec le solde de son compte courant bancaire. Pourlui, cet pargne est une monnaie quasi disponible et il serait tonnd'apprendre qu'il ne s'agit plus de monnaie mais de dettes recevoir. Voil une nouvelle confusion avec laquelle nous auronsdu mal lorsqu'il s'agira de dfinir la monnaie d'une manirerigoureuse. Avec le temps, d'anne en anne, la "richesse" de notre

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    profane augmente alors que son objectif reste l'quilibre de sesrecettes et de ses dpenses, c'est--dire une trsorerie tendant enpermanence vers zro. Il est inutile de garder de l'argent dormir surun compte courant bancaire. D'o vient l'augmentation de sarichesse ? Il faut savoir se poser des questions trs simples, mmesi la rponse est vidente.

    La comptabilit et les conomistesL'conomiste raisonne comme le profane. C'est le cas du prixNobel d'conomie J. Hicks qui n'hsite pas dfinir le revenu de lamanire suivante. "Le revenu d'une personne n'est autre que cequ'elle peut consommer durant la semaine, tout en comptant treaussi riche la fin de la semaine qu'au dbut". On peut la rsumeren disant : "Le revenu est ce que l'on peut consommer sanss'appauvrir". Cette phrase peut, la rigueur, dcrire la situationparticulire du revenu d'une personne dans un contexte particulieret pour une priode donne, mais ne dfinit pas un revenu engnral. On peut avoir des revenus (ou produits) et desconsommations (ou charges) tels qu'il en rsultera (compte dersultat) un dficit qui appauvrira le bilan par une diminution de lasituation nette. Mais encore faut-il savoir ce qu'est un compte dersultat avec ses charges et ses produits et surtout un bilan avec sonactif et son passif, et surtout la situation nette. Lorsque J. Hicks secontente d'employer le mot "riche" est-ce le total du patrimoinequivalent l'actif ou le patrimoine net gal au total du patrimoinediminu des dettes ? Il faudrait le prciser car il suffit de recevoirun don, un hritage par exemple, ou de gratter le bon numro duLoto, pour augmenter sa "richesse" et cette augmentation n'a rien voir avec un revenu. A la limite, la dfinition du prix Nobel est lecas particulier d'un rsultat comptable (revenus moinsconsommations sans oublier les amortissements) gal zro danslequel il ne faut pas confondre les revenus avec les recettes et lesconsommations avec les dpenses. En supposant cette confusionsurmonte, ce qui est loin d'tre vident pour la grande majorit desconomistes, le cas particulier d'un rsultat gal zro n'autorisepas une dfinition gnrale. Cette dfinition du revenu, aurole

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    par un prix Nobel, semble tre celle qui a t adopte par lesthoriciens de la comptabilit nationale.Le problme est encore plus grave lorsque les conomistestransposent les recettes et les dpenses ou les dbits et les crditsdans l'laboration de leurs thories conomiques. Comme la recettede l'un est toujours la dpense d'un autre, ils en dduisent un"quilibre" souvent dnomm "quilibre gnral". L'galit envaleur absolue des dbits et des crdits de la comptabilittraditionnelle les conforte dans leurs hypothses. L'entreprise estsouvent prsente, cause de cette galit, comme tant toujoursen "quilibre". L'conomie se rsumerait une circulation de "flux"devenant pour certains la "thorie des flux". Nous sommes lencore dans l'illusion la plus parfaite. Pas de problme, nousl'avons dj dit, la recette de l'un est toujours la dpense de l'autre.Elles sont par dfinition gales ou plus exactement elles s'annulentcar le rservoir de l'un se vide de la mme quantit que leremplissage de l'autre. Alors d'o vient la "richesse" de notreprofane, les "profits" des entreprises, et plus globalement, par quelmystre cet quilibre des rservoirs qui se vident pendant que lesautres se remplissent peut-il se traduire par une augmentation duproduit national brut de la comptabilit nationale ? Encore desquestions simples mais les rponses ne sont pas videntes. Certainsconomistes, recherchant l'origine de cette augmentation suggrentqu'elle pourrait provenir d'une augmentation de la masse montaire"cre!" par l'Etat. Comme on ne peut pas transformer lesfonctionnaires du fisc en distributeurs de billets, les thoriciensnoient le problme dans un fatras de courbes mathmatiques dugenre IS LM et toujours dans la recherche de "l'quilibre". Il fautpouvoir mettre un signe gal dans des quations d'une extrmecomplexit et parfois dnommes comptables ! Cette cuisinemathmatique mlange des tas d'ingrdients qui n'ont rien voir lesuns avec les autres. Par exemple, la monnaie, en tant qu'unit demesure de l'change, puis la monnaie disponible scinde en deuxgroupes, les billets dits de premier rang et les comptes courantsbancaires dits de second rang, des crdits considrs comme tantde la monnaie, enfin des taux d'intrts, etc. Nous verrons que

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    seule la thorie comptable permet d'claircir ces diffrents lmentset de dfinir le rle et la place de chacun.Cette manire d'aborder la science conomique est une catastrophesur le plan scientifique. Elle provient d'une ignorance de lacomptabilit, ignorance renforce, bien involontairement sansdoute par les comptables, mais nanmoins renforce, par latrompeuse galit des dbits et des crdits. L'quilibre, rduit auxvaleurs absolues, des dbits et des crdits du journal, de la balance,des soldes dbiteurs et crditeurs, et mme de l'actif et du passif dubilan, le tout ajout l'vidente galit de la recette de l'un avec ladpense de l'autre est un pige qui emprisonne la scienceconomique.Nous allons dtruire ces fondements en dcouvrant que lacomptabilit mesure toujours une diffrence et mieux encorequ'elle pourrait se passer des recettes et des dpenses. Voil unedernire affirmation brutale avant d'aborder notre initiation lacomptabilit. Nous allons dmontrer que l'on peut tenir unecomptabilit, dcrire des phnomnes conomiques, sans avoirbesoin des recettes et des dpenses, les flux de trsorerie chers auxthories conomiques. Mais rassurons tout de suite les profanes etles conomistes. Les recettes et les dpenses sont une inventiongniale et tellement pratique pour notre vie courante que l'on nepourrait plus s'en passer. Il faut seulement abandonner l'ide queces recettes et ces dpenses peuvent mesurer l'conomie. Cetteproposition est rapidement dcrite mais difficile admettre. Nousdonnerons l'exemple de recettes et de dpenses, bien prsentesdans le budget de l'Etat, mais qui n'ont aucune incidence sur sagestion. Elles tournent en rond sans rien apporter ni retrancher.La comptabilit a t redcouverte, nous disons bien redcouverte,pour limiter les flux des recettes et des dpenses une poque, laRenaissance, o l'activit conomique se dveloppait. Encore unparadoxe. L'conomie se dveloppe et nos marchands de Venisemettent au point un systme pour limiter les recettes et lesdpenses, autrement dit les flux financiers. On peut dj en dduireque les thories quantitatives de la monnaie vont souffrir.

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    D'abord une unit de mesure et la mmoire des dettes

    Un peu d'histoire

    Un bilan primitif

    La monnaie disponible

    La dfinition de la monnaie disponible

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    Un peu d'histoireRemonter aux dbuts de l'humanit pour dcouvrir les origines del'conomie est une dmarche que nous abordons, nous aussi, bienvolontiers. A partir d'une certaine poque, bien difficile dater,l'on peut facilement imaginer qu'au lieu de se disputer la nourritureou tout autre bien l'homme a dcouvert l'change. Cet change nonseulement garantissait une certaine paix sociale mais en plus ellesatisfaisait mieux les besoins de chacun. L'humanit a donc trsvite invent un systme pour raliser ces changes et surtoutpermettre l'change lorsque les deux biens changs n'taient pasperus comme ayant la mme valeur. Dire que l'conomie acommenc par le troc et que ce troc a t remplac par ladcouverte et l'usage de la monnaie est une erreur et pour deuxraisons. La premire, la plus simple, est que ce troc existe encoreaujourd'hui non seulement entre des particuliers mais parfois entredeux nations lorsque l'une des nations n'a gure confiance dans lamonnaie de l'autre. On peut encore aujourd'hui changer deslocomotives contre des crales. La deuxime raison vient du faitque le troc limite srieusement les changes car il faut que les deuxvaleurs changes soient perues comme tant gales. Le troc est lecas particulier d'un change par dfinition gal. Il est inutile des'attarder sur un cas particulier, toujours possible dans les changesd'aujourd'hui, pour comprendre les origines de l'conomie.Une autre raison limine le troc comme tant les premiers pas deschanges entre les humains lorsque nous dcouvrirons qu'unrglement d'une dette avec des pices d'or est un troc. L'change dedeux biens estims la mme valeur. Ce type de troc, l'change demarchandises contre de l'or, quel que soit le lieu o cet or taitentrepos, a t particulirement florissant dans le commerceinternational du XIX me sicle. On ne peut pas dire qu'au XIXme sicle nous tions encore l'origine de l'conomie.

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    Un bilan primitifL'change tant, cas gnral, ingal, il fallait trouver le moyen de leraliser. Nos plus lointains anctres ont t suffisammentintelligents pour comprendre qu'il fallait d'abord une unit demesure pour donner chaque bien chang une valeur puis unsystme pour garder la mmoire de la diffrence de valeur entre lesbiens changs. Cette unit de mesure, que l'on peut dj appeler lamonnaie, tait propre chaque civilisation et il serait trop long d'enfaire ici une tude. Les plus connues taient les units de mesurequi prenaient leur rfrence sur une tte de btail par exemple ouencore sur une certaine quantit de crales comme le riz ou uncertain poids de mtal comme l'argent. Cette unit permettaitd'abord de mesurer la diffrence puis de conserver la mmoire decette diffrence. Ces donnes crites sur des tablettes peuvent treconsidres comme tant les prmisses d'une sorte de bilan, quenous appellerons un bilan primitif. Nous dcouvrirons en quoi cebilan primitif ressemblait dj notre bilan moderne.De quoi s'agit-il ? Les changes tant souvent ingaux, conserverla mmoire de ces ingalits devenait d'autant plus complexe queces changes taient nombreux et portaient sur des biens diffrents.La meilleure solution consistait et consiste toujours traduire cesingalits dans la mme unit de mesure. Une fois cettetransposition ralise les additions deviennent possibles. Nousfaisons l'hypothse que la dcouverte de la monnaie en tantqu'unit de mesure de l'change est largement antrieure l'usagede la monnaie telle qu'elle est dfinie par les conomistes. Celuiqui avait reu moins avait une dette recevoir qui avait sonquivalent en dette payer pour celui qui avait reu plus, le touttraduit dans la mme unit de mesure que celle qui avait servi derepre au moment de l'change.Allons un peu plus loin et l'on peut facilement imaginer, qu'en plusdes dettes, ce bilan primitif pouvait mesurer, toujours avec la mmeunit, la valeur des biens possds. L'addition de ces biens avec lesdettes recevoir devait tre suprieure au total des dettes payer.La diffrence, que nous appellerons la situation nette, mesure larichesse de celui qui tablit sa situation financire et prouve qu'il

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    est capable de payer ses dettes. Il en est de mme pour celui quiattend le rglement de ses dettes recevoir. Le bilan mme primitifde celui qui doit cette dette peut le rassurer. En quelques phrasesnous avons donn la dfinition d'un bilan. Ces quatre notions, lesbiens et les dettes recevoir d'un ct et les dettes payer avec lasituation nette pour quilibrer l'ensemble sont des notions que nousretrouverons dans notre bilan moderne. Nous y ajouterons lamonnaie disponible mais dj tout le monde sait que la meilleuregestion de cette monnaie disponible est celle qui tend vers un soldegal zro. Inutile de garder de l'argent dormir sur un comptecourant bancaire ou d'imaginer qu'il tombe dans une trappe. Lesconomistes reconnatront ce clin d'il. Encore un paradoxelorsque les conomistes nous dfinissent la monnaie comme tantun bien. Comment peut-on dfinir ce quelque chose, la monnaiecomme tant un bien, lorsque la bonne gestion de ce quelque choseest de tendre vers zro ?La monnaie et la comptabilit, nous venons de parler d'un bilanmme s'il est encore primitif, sont insparables si l'on veutcomprendre quelque chose la mesure de tous les phnomnesconomiques. Notre bilan primitif est vieux comme le monde avec chaque fois une unit de mesure, la monnaie, indispensable pourmesurer les diffrences. Ce bilan primitif enregistraitessentiellement la dette recevoir qui avait et a toujours sonquivalent en dette payer chez celui qui doit cette dette. Certainshistoriens de socits primitives parlent de dons et de contre-donset recherchent dsesprment l'origine de la monnaie, telle qu'elleest dfinie par les conomistes, sans comprendre qu'il s'agit denotre bilan primitif qui pour l'instant n'a qu'une unit de mesure lamonnaie, mais ne connat pas encore la monnaie disponible. Anotre avis, c'est encore une fable car un don est un don et s'il y a uncontre-don c'est qu'en ralit le premier don n'tait pas pour celuiqui recevait ce don, un don, mais une dette payer, le contre-don.Pour comprendre ces fameux dons et contre-dons, en termesconomiques et non pas en termes sociologiques, car tel n'est pasnotre propos, mieux vaut quelques comptences comptables pour

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    les analyser dans un bilan mme primitif plutt que de rechercherla circulation d'un symbole montaire qui n'existe pas encore.

    La monnaie disponibleLa tenue de ces bilans primitifs tait loin d'tre simple surtout pourles populations qui ne connaissaient pas l'criture. A ce propos,l'tude de l'Egypte ancienne nous semble un bon exemple. Cettecivilisation matrisait parfaitement l'criture mais ne semble pasavoir connu la monnaie telle qu'elle a t dfinie par lesconomistes. Ils avaient une unit de mesure, un certain poidsd'argent, et de nombreux scribes tenaient d'une manire rigoureusela situation des dettes recevoir et payer de leurs concitoyens.Les gyptologues, qui l'on ne peut pas reprocher de chercher lamonnaie telle qu'elle est dfinie par les conomistes, ne semblentpas avoir dcouvert ni des pices d'argent ni des pices d'or niaucun autre symbole qui auraient pu servir directement de moyensd'changes. A notre avis, les Egyptiens matrisaient suffisammentla tenue de leurs bilans primitifs pour pouvoir se passer de lamonnaie disponible telle que nous allons maintenant la dfinir.Tant que nous employons le mot monnaie seul il s'agit de l'unitqui mesure les changes et permet de conserver la trace desdiffrences. La mmoire de ces diffrences est conserve dans ceque nous avons appel les bilans primitifs. Lorsque nous ajoutonsau mot monnaie l'adjectif disponible il s'agit toujours de lamonnaie, mais la monnaie prise dans son usage le plus courant, lespices, les billets, votre compte courant bancaire. Autrement dit, neconfondez jamais la monnaie qui mesure la valeur d'un change etla monnaie disponible de votre compte courant bancaire bien qu'ils'agit de la mme unit de valeur. Nous esprons que vouscomprenez cette subtilit que nous pouvons illustrer par unexemple simpliste. Vous convoitez un objet propos 100 maisque vous trouvez un peu cher. Tant que vous hsitez, vous mesurezson prix avec de la monnaie (sans adjectif). Si vous vous dcidez l'acheter et si vous faites un chque de 100 , ou si vous utilisezdeux billets de 50 , ces 100 sont de la monnaie disponible. Si

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    vous faites une lecture rapide de cet ouvrage, ne confondez jamaisle mot monnaie employ seul avec le mme mot accoupl avecl'adjectif disponible.Reprenons notre fil historique. A notre avis, cette monnaiedisponible est une invention de l'humanit plus tardive que lamonnaie seule c'est--dire l'unit de mesure de l'change. Cettemonnaie disponible a permis et permet toujours de rgler sur-le-champ les dettes rciproques ce qui simplifie normment la viecourante et surtout ne nous oblige plus tenir l'tat de nos dettes.Voil la consquence norme de cette dcouverte. Elle n'obligeplus tenir nos bilans primitifs car il suffit de faire circuler cettemonnaie disponible sans qu'il soit utile d'crire, de mmoriser, lemontant de l'change. A la limite l'on pourrait encore parler d'untroc sauf que, s'il s'agit d'une vritable monnaie disponible, il s'agitd'un symbole et ce symbole n'a aucune valeur en soi. Donc le mottroc est inadapt. Cette circulation a galement l'avantage detoujours prsenter l'galit de celui qui reoit avec celui qui donne.Cette galit de la recette de l'un avec la dpense de l'autre afascin les conomistes qui ont voulu trouver dans le volume decette circulation un critre de l'activit conomique. Hlas ! Laredcouverte de la comptabilit la Renaissance viendra, aucontraire, dmontrer qu'elle pourra, cette comptabilit, remplaceren grande partie la circulation de cette monnaie disponible.Cette monnaie disponible est donc une invention gniale maisterriblement difficile matriser. Nous dvelopperons lesvicissitudes de cette monnaie disponible et dcouvrirons que c'estdepuis fort peu de temps, moins d'un sicle, qu'elle est devenueenfin fiable et grce quoi ? A la comptabilit. Dj la tenue denos bilans primitifs supposait une sorte de comptabilit. Mieuxencore la monnaie disponible trouvera sa vraie nature et sa seulejustification avec la mme comptabilit. Arriv ce stade nousassocions monnaie et comptabilit. Il est impossible de comprendrel'un sans comprendre l'autre. Monnaie et comptabilit sonttellement insparables que l'on pourra dnommer la monnaiedisponible comme tant une monnaie comptable.

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    La dfinition de la monnaie disponible.Que n'avons nous pas dit de btises sur cette monnaie disponibleque les conomistes dfinissent comme tant un "bien". Certes,vous savez que votre billet de banque, votre carte bancaire ou lechque de votre compte courant vous permettent d'acheter desbiens mais le bout de papier, le rectangle en plastique avec sa pucelectronique ou l'criture sur le chque ne sont pas des biens. Lesconomistes tentent de s'en sortir en disant qu'il existe plusieurssortes de monnaie remplissant diffrentes fonctions mais quelleque soit cette fonction la monnaie reste dfinie comme tant unbien. Sans doute un bien de rfrence pour pouvoir mesurer lavaleur de tous les autres biens sur la valeur d'un seul bien maistoujours un "bien". Ils confondent galement les diffrentes formesprises par les monnaies disponibles au cours des temps et lesdiffrentes fonctions remplies par cette monnaie.Pour qu'elle existe, il suffit que cette unit de mesure, que nousappelons de la monnaie disponible, soit reprsente par un symboleou mieux encore crite d'une manire fiable et tout le monde saitque l'essentiel de cette monnaie disponible est aujourd'hui critdans la comptabilit des banques. Les pices et les billets sont desmoyens pratiques pour ne pas crire de toutes petites sommes dansles ordinateurs des banques ou encore un moyen discret pour fairedes changes plus ou moins douteux et que l'on souhaite gardersecrets. Aujourd'hui encore, le mot monnaie voque d'abord lesbillets et les pices c'est dire un trs faible pourcentage de l'ordrede 10 % car l'essentiel de cette monnaie disponible est reprsentpar des critures comptables. Il suffirait que chaque citoyen ait unecarte bancaire avec un terminal de paiement comme il en existechez presque tous les commerants pour que les billets et lespices, disparaissent dfinitivement. Avec un tel systmegnralis nous perdrions un peu de libert. Ce systme permettraitde suivre les transactions des trafiquants de drogue mais galementles petites dpenses de l'honnte homme qui a droit ses petitssecrets.

    En rsum, et pour reprendre le fil de notre dmonstration, neconfondons pas les formes prises par les diffrentes monnaies au

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    cours des temps avec sa vraie nature et surtout avec les vritablesbiens, les pices en mtal prcieux, quand on ne pouvait pas encoreavoir confiance dans la seule criture de cette monnaie disponible.Et comment peut-on avoir confiance dans cette criture? Par lacomptabilit et la boucle est boucle, comptabilit et monnaie,monnaie et comptabilit sont insparables. Sans thorie comptable,il ne peut y avoir une thorie de la monnaie. Voil une ide neuve,une proposition indite, que nous n'avons jamais rencontre sous laplume des conomistes.C'est donc avec une norme difficult que l'humanit a pu donnerune fiabilit cette unit de mesure particulire, la monnaiedisponible, mais inversement l'utilisation de cette monnaiedisponible ne nous oblige plus tenir notre bilan primitif. Si nousavons confiance dans cette monnaie disponible qui nous permet dergler sur-le-champ nos dettes rciproques, nous n'avons plusbesoin de les enregistrer dans un bilan. Il suffit de constater quenotre partenaire de l'change a suffisamment de monnaiedisponible pour accepter cet change sans qu'il soit ncessaire qu'ilnous fasse un talage de sa situation financire.Ce deuxime truc gnial invent par l'humanit, la monnaiedisponible qui efface sur-le-champ et instantanment, et sans avoirbesoin de les noter, les dettes rciproques, a relgu le bilan dansles oubliettes. Notre comptabilit primitive a disparu. Lesconomistes, ignorent ce bilan primitif et supposent que l'conomiea dmarr directement avec l'usage de la monnaie. Ils en dduisentqu'il suffit d'abord sur un plan individuel de grer cette monnaiedisponible pour tenir sa comptabilit, puis sur un plan macro-conomique de mesurer les flux de cette monnaie pour dcrirel'conomie. Nous retrouverons cette erreur lorsque nousaborderons la comptabilit nationale telle qu'elle est actuellementthorise. Le budget de l'Etat est lui aussi bti sur les recettes et lesdpenses. Nous retrouvons notre premier pige. L'usage de lamonnaie disponible, dans la mesure o elle est fiable et aujourd'huielle l'est grce la comptabilit des banques, nous met dans la ttequ'il suffit de contrler les entres et les sorties de cette monnaiedisponible pour tenir une comptabilit et grer l'conomie. Nous

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    n'insisterons jamais assez sur ce pige dont les conomistes ne sontpas sortis car ils ignorent la vritable comptabilit et, parce qu'ellessont lies l'une l'autre, la vraie nature de la monnaie.

    La "bonne" et la "mauvaise" monnaieAvant la scurit donne par la comptabilit, la fiabilit de cettemonnaie disponible posait de graves problmes. Comment trecertain que ces coquillages, ces pices en fer, ces bouts de papiersreprsentent une vritable valeur. Ds que l'on possdait cette sortede monnaie disponible et que l'on ne pouvait ou dsirait l'changersur-le-champ, l'on cherchait la transformer en pices de mtalprcieux en "bonne monnaie sonnante et trbuchante". L'on nefaisait pas autre chose que de transformer cette monnaie disponibleen vritables biens que l'on conservait prcieusement. Du coup l'onconstatait que ces biens, "la bonne monnaie" disparaissaientchasss par "une mauvaise monnaie" c'est--dire une vritablemonnaie disponible qui n'est pas un bien. Tous les conomistesconnaissent la loi de Gresham (14me sicle) "la mauvaise monnaiechasse la bonne". Encore aujourd'hui, les auteurs qui tententd'crire l'histoire de la monnaie ne comprennent pas que la "bonnemonnaie" de cette loi n'est pas une monnaie mais un bien et que la"mauvaise monnaie" est la vritable monnaie disponible condition que la comptabilit la rende fiable. Utiliser une "bonnemonnaie", c'est faire un troc, changer un bien contre un autre bien.Cet autre bien est une certaine quantit de mtal prcieux et le trocn'exige ni monnaie ni bilan.Un autre exemple illustre cette confusion entre la "bonne" et la"mauvaise" monnaie. Platon raconte que les spartiates utilisaientdeux sortes de monnaie: des pices en fer donc sans valeur pourleurs changes intrieurs et des pices en mtal prcieux (or ouargent) pour leurs changes avec des trangers. Les pices en ortaient interdites pour leur commerce interne. Ces spartiatesn'avaient-ils pas dcouvert la vraie nature de la monnaie disponible? Les pices en fer taient des symboles, certes non encorejustifies par une tenue comptable, mais nanmoins des symboles

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    et les pices en or de vritables biens changs dans un troc contredes marchandises venues de l'extrieur. Il ne faut plus opposer labonne et la mauvaise monnaie. La "bonne monnaie" de la loi deGresham est tout simplement un bien et la "mauvaise monnaie" lavritable monnaie disponible.

    Il serait passionnant de reprendre toute l'histoire de la monnaie encomprenant que l'utilisation de la "bonne monnaie" est un trocalors que l'utilisation de la vritable monnaie disponible "lamauvaise monnaie" est terriblement difficile mettre en place tantque l'on ne matrise pas la technique comptable. Il y aurait l un filconducteur qui expliquerait bien des mystres lorsque l'on veutcrire l'histoire de la monnaie.

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    Le retour du bilan primitif

    La naissance de la comptabilit

    Les dbits et les crdits

    La caisse l'envers ?

    La naissance du compte de rsultat

    Notre comptable de la Renaissance

    Un nouveau mystre

    Une petite astuce de l'arithmtique

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    La naissance de la comptabilitNous tions dans cette situation la Renaissance au moment o leschanges commerciaux prenaient un large dveloppement. Fairebeaucoup de commerce supposait faire autant d'changes demonnaie et comme l'on n'avait gure confiance dans la "mauvaisemonnaie" il fallait faire circuler une grande quantit de "bonnemonnaie" c'est--dire des vritables biens, du mtal prcieux, quepouvaient convoiter les brigands de grands chemins. C'est causede cette difficult, le risque de voir les pices d'or vols par lesbandits, que d'une manire empirique nos marchands de laRenaissance ont rinvent la comptabilit. Nous disons bienrinvent. L'humanit avait dj invent notre bilan primitif mais ladeuxime invention gniale, la monnaie disponible, nous avait faitoublier ce bilan primitif. Nous sommes dans le paradoxe suivant.C'est pour ne pas utiliser ou du moins utiliser au minimum la"bonne monnaie" que la comptabilit a t rinvente. Des peuplesqui ont mis beaucoup plus de temps savoir utiliser la comptabilitont t brims dans leurs changes faute d'avoir suffisamment demtal prcieux pour faire leur commerce sous la forme du troc,c'est--dire une bonne monnaie sous forme de mtal prcieuxcontre des marchandises. Inversement, un excs de mtal prcieux,suite par exemple la dcouverte de nouveaux gisements,dvalorisait la bonne monnaie. Ce qui est rare est cher, et ce qui estabondant perdait sa valeur dans le troc contre des marchandises.Cette redcouverte du bilan s'est faite d'une manire empirique carc'est la suite d'un grand nombre de ttonnements que noussommes arrivs la vritable comptabilit. Comment les choses sesont-elles passes ?

    Les dbits et les crditsLa premire ide est toute simple, et nous retrouvons notre bilanprimitif. On enregistre les dettes rciproques. Notre marchand deVenise Martini a vendu des marchandises notre collgue de

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    France Dupont. Il enregistre la dette dans un compte qu'il va toutbtement appeler "Mon client Dupont". Il prvoit deux colonnesl'une pour enregistrer la dette recevoir et l'autre pour enregistrerson rglement. Comme il crit en commenant par la gauche ilnomme cette premire colonne de gauche "dbit", la dette "due"par son client Dupont, et garde la colonne droite pour sonextinction future.Dans le mme temps, notre marchand Martini a pu acheter de lamarchandise un autre collgue franais, Durand. Ce dernier vanoter galement gauche dans la colonne dbit la dette recevoirdu client Martini. Martini souhaite voir clair dans ses comptes et vanoter cette dette payer son fournisseur Durand. Il ne peut pasprendre la mme mthode car il ne peut pas dire que Durand luidoit (dbit) de l'argent parce que c'est l'inverse et il finirait parconfondre ses clients avec ses fournisseurs. Pour viter cetteconfusion il inverse les deux colonnes, crit la dette payer droite et nomme cette colonne "crdit" du latin crederer confiancecar il constate que son fournisseur Durand lui fait confiance tantqu'il ne rgle pas sa dette.Nous avons maintenant deux sortes de comptes l'un avec les dbits gauche pour enregistrer les dettes recevoir des clients et l'autreavec les crdits droite pour enregistrer les dettes payer auxfournisseurs. Avec un crayon et un papier vous pouvez ouvrir lesfameux comptes en T des comptables. Un premier compte en Tavec le ct gauche le dbit pour noter la dette recevoir du clientet un autre compte en T avec un ct droit le crdit pour noter ladette payer au fournisseur. Vous pourrez mieux suivre ladmonstration si vous prenez un papier et un crayon pour bienvisualiser les dbits gauche et les crdits droite. Commentappeler l'autre colonne, celle de droite pour les clients et celle degauche pour les fournisseurs ? Tout simplement gardons notregauche / droite et appelons la colonne de droite des clients crdit etla colonne de gauche des fournisseurs dbit. N'hsitez pas prendre un exemple chiffr et noter les dbits gauche et lescrdits droite aussi bien sur le compte du client que sur le comptedu fournisseur. Lorsque le client nous rgle sa dette nous avons eu

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    raison de lui faire confiance (crdit) et quand nous rglons la dette notre fournisseur (dbit) il s'agissait bien d'une dette due cefournisseur. Les dbits et les crdits sont invents et peu prscomprhensibles pour l'enregistrement des dettes recevoir desclients ou payer aux fournisseurs. Disons bien peu prs car ladette recevoir enregistre au dbit du compte client estdnomme crance mot plus proche du mot crdit que du motdbit. Nous n'avons pas fini d'avoir du mal avec ces deux mots.Cette manire d'enregistrer les dettes rciproques a galementl'avantage de pouvoir fonctionner lorsque notre collgue marchandest de temps en temps notre client et d'autre moment notrefournisseur. Nous pouvons tout rsumer sur un seul compte.Lorsqu'il est notre client nous portons la dette recevoir au dbit (gauche) et lorsque qu'il est notre fournisseur nous portons la dette payer son crdit ( droite). Il suffit d'additionner les cts gaucheet droite de son compte. Si la partie dbiteur, gauche, est pluslourde il nous doit de l'argent, et si la partie crditeur, droite, estplus lourde c'est nous qui lui en devons. Cette pratiqued'enregistrer les dettes est d'une telle efficacit qu'il n'est mme pasncessaire de prvoir au dpart s'il s'agit d'un client ou d'unfournisseur. Il suffit d'ouvrir un "compte de tiers" comme disent lescomptables. Cette manire de pratiquer ne facilite pas lacomprhension de la technique comptable par le profane car rienn'est plus oppos qu'un client qui nous doit de l'argent et unfournisseur qui nous devons de l'argent, mais cette pratique resteefficace.Quel est l'avantage de l'enregistrement des dettes rciproques denos trois marchands de la Renaissance dans le renouveau de notrebilan primitif ? Imaginons l'exercice suivant. Notre marchandMartini vend notre franais Dupont pour 1.000 Ducats (ou Livretournois, ou Ecus, ou n'importe quelle autre unit de mesure,l'essentiel est que cette unit de mesure, notre seule dfinition de lamonnaie, l'unit qui mesure l'change, soit la mme). Martini agalement achet pour 1.500 Ducats Dupont et vendu pour 500Ducats notre troisime marchand Durand qui a son tour a vendupour 500 Ducats Dupont. Les dettes rciproques de nos trois

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    marchands, Martini, Dupont et Durand s'annulent. Il est inutilequ'ils s'changent ni de la bonne monnaie, les pices en mtalprcieux, des vritables biens, ni mme de la mauvaise monnaie,celle qui n'tant pas un bien est quand mme une vritable monnaiedisponible dans la mesure o un systme la rend fiable. L'avantageest norme, il n'y a plus besoin de faire circuler des pices d'or nimme de la "mauvaise monnaie" pour rgler les dettes ou du moinsil suffit de n'en faire circuler qu'une trs faible quantit, celle quiajuste les dettes rciproques qui ne sont pas toujours gales commeelles le sont dans notre exemple thorique.Cette premire pratique comptable a retrouv notre bilan primitif,celui qui existait avant l'apparition d'une monnaie disponiblefiable. Elle utilise les dbits et les crdits mme si ces dbits etcrdits sont inverss entre les dettes recevoir, au dbit gauche,et les dettes payer au crdit droite. On peut les comprendrelogiquement, le client "doit", dbit, et le fournisseur que nous nerglons pas tout de suite nous fait "confiance" crdit. Lorsque leclient nous rgle nous avons eu raison de lui faire confiance"crdit" et lorsque nous rglons notre dette au fournisseur ils'agissait bien d'une dette "dbit". Si nous voulons nous initier lacomptabilit en utilisant la dfinition apparemment logique de cesdeux mots nous serons vite drout.

    La caisse l'envers ?Nos trois marchands tiennent leur caisse, les entres et les sorties.Quand le client rgle sa dette avec de la monnaie, "bonnemonnaie", un bien ou "mauvaise monnaie" de la vritable monnaiedisponible, il faut enregistrer une entre et lorsque l'on paye unfournisseur il faut enregistrer une sortie. Il faut galement noterdans l'autre colonne du client, droite donc au crdit, le rglementde sa dette et dans l'autre colonne du fournisseur, gauche donc audbit, notre rglement. Le compte du client ou celui du fournisseurmarche en mme temps que celui de la caisse. De plus l'on s'esthabitu crire gauche, au dbit, la dette du client et nouscrirons droite, au crdit, son rglement. Inversement nous

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    enregistrons droite au crdit la dette due au fournisseur et gauche au dbit notre rglement.La caisse, elle aussi, doit avoir deux cts un ct pour les entreset l'autre pour les sorties. N'hsitez pas ouvrir un troisimecompte en T pour la caisse. Un ct est gauche, dbit, l'autre est droite, crdit. Comment choisir celui qui enregistre les entres,l'autre ct tant videmment pour les sorties. L'on peut tre tentde choisir la colonne crdit pour une entre d'argent car cela sonnemieux que dbit. Dans ce cas, on crit deux fois droite une foissur le compte du client et une autre fois toujours droite sur lecompte de la caisse. La mme chose pour le compte du fournisseurune fois gauche pour enregistrer notre rglement et encore gauche sur le compte de la caisse. Il faut faire trs attention car l'onn'a aucun moyen de vrifier que l'on a bien enregistr deux fois lamme somme.Ayons le courage d'inverser notre caisse, les entres gauche et lessorties droite. Du coup le rglement du client sera port ladroite de son compte, son crdit, et l'entre sur la caisse gauche, son dbit ! Quel scandale ! Nous esprons que vous avez toujoursvotre papier avec les comptes en T. Ecrivant systmatiquement uncoup droite et un coup gauche vous avez enregistr le rglementde la dette du client d'abord droite son crdit et obligatoirementl'entre de l'argent dans la caisse gauche donc au dbit. La mmechose pour le fournisseur. Notre rglement la gauche de soncompte donc au dbit et la sortie de la caisse la droite du comptedonc au crdit. Le scandale persiste. Mais avantage suprme, sinous tenons un journal de nos oprations et que nous crivons aujour le jour comme son nom l'indique les oprations, nous crironstoujours une fois droite et une fois gauche. Il suffitd'additionner les deux colonnes et de comparer les deux totaux quidoivent tre gaux pour vrifier que l'on ne s'est pas tromp.Revenons sur notre scandale. Pour avoir la sacro-sainte galit desdeux colonnes de notre journal il faut enregistrer l'entre d'argentau dbit de la caisse, comme si elle nous "devait" de l'argent, et lasortie au crdit de cette mme caisse comme si elle nous faisait"confiance". Nous n'en sommes pas encore revenus 500 ans aprs.

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    Ni les profanes persuads du contraire cause de leur relevbancaire ni mme les conomistes qui, comme Jean Fourasti dansson petit livre "La comptabilit" dit dans la collection "Que sais-je ?", nous supplie d'admettre ce paradoxe sans pouvoir l'expliquer.Les dbits et les crdits, si pratiques pour nos clients et nosfournisseurs, deviennent incomprhensibles et toutes les tentativesque les malheureux professeurs de comptabilit tentent d'inventerpour expliquer ces dbits et ces crdits leurs lves sont toutesvoues l'chec. Il faut imposer l'existence de ces dbits et de cescrdits et surtout leur galit permanente comme tant uneconvention, un point c'est tout. Nous en sommes toujours au mmepoint. La comptabilit reste un ensemble de conventions que seulsles lves qui ont une bonne mmoire peuvent finir aprs un longet pnible apprentissage ingurgiter. Les lves qui veulent faireappel leur logique sont drouts. Ils oublient tout ce qu'ils ont puapprendre et restent dfinitivement allergiques cette technique.

    La naissance du compte de rsultatL'histoire de la comptabilit n'est pas termine. Nous avons pourl'instant enregistr la dette due par le client au dbit de son compteet une seule fois et la dette due au fournisseur au crdit de soncompte et toujours une seule fois. Pendant de longues annes lacomptabilit se limitait la gestion des dettes rciproques avec lacaisse mme si cette dernire paraissait l'envers. Puis un jour uncomptable fut a eu l'ide d'enregistrer deux fois la dette recevoirdu client et la dette payer au fournisseur. Il a ouvert un compte depertes et profits et comme un coup droite et un coup gauchec'tait pratique il a enregistr la dette due par le client au dbit deson compte, comme il avait l'habitude de le faire, et la mmesomme au crdit du nouveau compte de pertes et profits. Le mmechose pour le fournisseur. La dette payer au crdit du compte dufournisseur et au dbit de ce compte de pertes et profits. Notrecompte de rsultat d'aujourd'hui tait invent. Mieux encore, l'oncontinuait utiliser les dbits et les crdits et enfin suprmeavantage toutes, absolument toutes, les critures du comptablepouvaient tre enregistres au dbit et au crdit de tous les comptes

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    et au dbit et au crdit du journal, le tout en conservant une parfaitegalit non seulement du journal mais galement des mmesommes portes aux dbits et aux crdits des comptes.L'aspect pratique d'un tel systme est vident car l'on pouvait etl'on peut encore aujourd'hui se vrifier par l'galit permanente desdbits et des crdits, mais la logique de ces deux mots devenaitencore plus incomprhensible. Comment expliquer que le motdbit s'applique l'enregistrement des achats, de la dette recevoirou de l'entre d'argent dans la caisse ? Comment expliquer qu'unedette payer, une vente ou la sortie d'argent de la caisse s'appelleun crdit ? Il faut apprendre par cur, absolument par cur, cesconventions et ne pas chercher une dfinition logique de ces deuxmots : dbit et crdit. Soyez rassur, cher lecteur, si, au cours devos tudes, vous n'avez rien compris la comptabilit c'est parcequ'elle est incomprhensible. N'essayez pas de remplacer les dbitspar les emplois et les crdits par les ressources comme on peut leconstater sur la plupart des ouvrages d'initiation la comptabilit.L'galit des emplois et des ressources est aussi mystrieuse quel'galit des dbits et des crdits. N'ayons pas la navet de croirequ'il suffit de remplacer un mot par un autre, dbit par emploi etcrdit par ressource, pour apporter un peu de logique. C'estpourtant dans ce pige que tombe la comptabilit nationalelorsqu'elle justifie son "cadre comptable" par des emplois assimilsaux dbits et des ressources assimiles aux crdits. Si deux motslogiques, comprhensibles, vidents, pouvaient remplacer lesdbits et les crdits, l'on comprendrait difficilement pourquoi,depuis 500 ans, les comptables ne les auraient pas invents. Hlas,ces deux mots n'existent pas.

    Notre comptable de la Renaissance, Pierre de SavoneA la fin du seizime sicle un ouvrage crit par un franais Pierrede Savone et intitul "Brves instructions de tenir livres de raisonou de compte" nous prouve que la technique comptable, telle quenous la pratiquons aujourd'hui, tait invente. Nous avons

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    photocopi cet ouvrage la Bibliothque Nationale puis traduitdans notre franais moderne. Il n'est pas facile lire mais est ladisposition des personnes qui souhaitent approfondir notreinitiation originale la comptabilit. Dans cet ouvrage noustrouvons une foule d'exemples avec leurs rgles disant quel compteil faut dbiter et quel compte il faut crditer. Il ressemble nosouvrages d'initiation modernes toujours avec les mmes rgles ettoujours sans la moindre explication du pourquoi au dbit et dupourquoi au crdit. L'ouvrage de Pierre de Savone a toutefois lemrite d'insister sur la ncessit d'un bilan de dpart, souventoubli par les professeurs de comptabilit qui commencent leurscours par la caisse et non pas par ce bilan de dpart. Il manque cet ouvrage l'exemple des dotations aux amortissements dont lescommerants de la Renaissance n'avaient pas encore besoin. Cesamortissements sont arrivs avec la rvolution industrielle et leslourds investissements dans les usines. Le chapitre du livre dePierre de Savone intitul "Le vrai ordre de dresser un carnet despayements d'une foire Lyon" nous explique comment lesmarchands se runissaient l'occasion de foires avec leurs livres decomptes sous le bras pour compenser leurs dettes rciproques afinde transporter le minimum de pices d'or ncessaires pour annulerle reliquat de leurs dettes. Ce chapitre de Pierre de Savone illustrel'exemple de nos trois marchands Martini, Durand et Dupont.

    Un nouveau mystreEt voil o nous en sommes encore aujourd'hui. La comptabilitreste fonde sur l'galit des dbits et des crdits du journal,reports dans les mmes dbits et crdits des comptes le toutcentralis dans une balance dont les totaux des dbits et des crditsdoivent tre gaux ceux du journal. De cette balance on extraitles soldes dbiteurs qui doivent tre gaux aux soldes crditeursdans les deux documents fondamentaux le bilan et le compte dersultat. Les dbits et les crdits restent toujours incomprhensibleset pire encore personne ne se pose une question trs simple,lmentaire, vidente : comment se fait-il qu'aprs avoir toujours ettoujours respect l'galit des dbits et des crdits (ou des emplois

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    et des ressources !) l'on aboutisse une diffrence, le rsultat ? Unrsultat n'est pas un vnement mais la consquence desvnements pralablement enregistrs. Impossible de confondre lersultat issu des vnements avec les vnements eux-mmes.Vous avez toujours respect l'galit des sommes portes lagauche et la droite des comptes, l'enregistrement des vnements,et malgr ce respect scrupuleux de l'galit d'une quation (Dbits= Crdits) vous en dduisez une diffrence, le rsultat. Quelmystre !Les dbits, certes gaux aux crdits en valeur absolue, ne le sontplus s'ils sont pris avec leur vraie valeur, leur valeur relative. Cetteconfusion dure depuis des sicles et n'a jamais t explique. Aucontraire, la science conomique s'appuie sur l'galit des dbits etdes crdits du client avec les mmes galits des dbits et descrdits de leurs fournisseurs, le tout renforc par la non moinsvidente galit de la recette de l'un avec la dpense de l'autre pourillustrer les thories des "flux montaires" et autre "quilibregnral". Cet "quilibre gnral" nous semble, notre avis, unevidence. La vente du vendeur n'est-elle pas, par dfinition, gale l'achat de l'acheteur ?Pour sortir de la contradiction entre l'galit des dbits et descrdits de la balance toujours quilibre au centime prs avecl'ingalit du rsultat il faut d'abord dmontrer pourquoi les dbitset les crdits, pris avec leurs vritables valeurs, les valeursrelatives, ne sont pas gaux. Nous verrons galement que leschanges ne se traduisent pas toujours de la mme faon dans lesdeux comptabilits, celles des vendeurs et celles des acheteurs. Parexemple, la vente d'un camion est pour le constructeur de cecamion un produit, nous dirons une ressource d'activit, et pourl'entreprise qui l'achte un investissement. La comptabilit place lavente du vendeur dans un compte de rsultat dynamique et l'achatde l'entreprise dans un bilan statique. Impossible de les confondre.La monnaie disponible des recettes et des dpenses, malgrl'galit rciproque des dbits et des crdits de la trsorerie et descomptes de tiers, n'a t qu'un moyen confortable pour rgler ladette de l'achat de ce camion. Sa "quantit" augmente l'activit du

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    vendeur et contribuera un rsultat positif mais ne diminue paspour autant le rsultat de l'acheteur. Nous retrouvons l'huile despremiers conomistes. Ils avaient raison de dfinir la monnaiecomme tant non pas l'origine de l'nergie qui fait tourner lemoteur de l'conomie mais comme tant seulement l'huile quifacilite le rglement des dettes. Ils auraient sans doute t tonnsde voir leurs successeurs confondre monnaie et intrts et inventerdes thories sur l'offre et la demande de cette monnaie sanscomprendre que seuls les intrts ont de l'importance. Avant derevenir sur ces sujets, dcouvrons pourquoi des valeurs absoluestoujours gales peuvent cacher des valeurs relatives qui ne sont pasgales.

    Une petite astuce de l'arithmtiqueVous prenez une quation avec un nombre de termes gauche quelque soit le nombre de ces termes et un autre ensemble de termes droite, toujours quel que soit le nombre de ces termes. Il suffit derespecter l'galit. Par exemple : A + B + C + D = E + F + G.Vous pouvez modifier la valeur des termes droite ou gauche oumme seulement droite ou gauche, l'essentiel est de conserverl'galit. Par exemple vous partez de A=+3, B=+7, C=-2, D=+4 letout gal E=+5, F=+8, G=-1 soit : 3 + 7 - 2 + 4 = 5 + 8 - 1 ou 12= 12.Vous ajoutez +5 B, +7 E et -2 F. Pas de problme, vousconservez l'galit : 17 = 17.Vous dcidez maintenant que chaque terme A, B, C, D, E, F et G achacun un ct gauche et un ct droite. Tiens ! Gauche droite,cela nous rappelle quelque chose. Puis si vous tes gauche del'quation le ct gauche cumulera les valeurs positives et le ctdroite les valeurs ngatives. Inversement droite de l'quation, lect droite cumulera les valeurs positives et le ct gauche lesvaleurs ngatives.L'quation devient A + B + C + D = E + F + G +3/ + +7/ + /-2 + +4/ = /+5 + /+8 + -1/ +5/ = /+7 + -2/

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    Vous cumulez tout ce qui est crit d'abord gauche des barres defraction comme vous avez appris le faire l'cole primaire, c'est--dire en tenant compte des signes, puis ce qui est crit droite. Agauche : +3 +7 +5 +4 -1 -2 = +16, droite : -2 +5 +7 +8 = +18.Rien signaler, l'addition des sommes crites gauche, +16, n'arien voir avec l'addition des sommes crites droite, +18. Onpouvait s'en douter.Maintenant, "cachez ce signe que je ne saurai voir", les comptablesont horreur du signe ngatif. L'addition donne l'galit en valeurabsolue :A gauche (3) + (7) + (5) +(4) +(1) + (2) = (22)A droite (2) + (5) + (7) + (8) = (22)Vous pouvez recommencer l'exercice avec n'importe quelle valeur.Il suffit de respecter l'galit de l'quation. L'addition en valeurabsolue des sommes crites gauche sera toujours gale l'addition, toujours en valeur absolue, des sommes crites droite.Cette petite astuce de l'arithmtique, grce l'inversion des signesentre les deux termes de l'quation, a donn et donne toujoursl'illusion de l'galit des sommes crites gauche, au dbit, et dessommes crites droite au crdit. Si l'on remplace dbit par emploiet crdit par ressource, l'illusion, au moins pour certaines critures,est encore plus forte.Et voil, la gauche devient gale la droite, les dbits gaux auxcrdits, Ouf ! La tradition est sauve mais quel prix ! Il ne fautpas tenir compte de la vritable valeur des nombres, exit les signesngatifs. Alors soyons clair, comment accepter de dire que lesdbits sont gaux aux crdits quand on les ampute de ce quicontribue leur donner leur vraie valeur, une valeur positive ouune valeur ngative.Etes-vous convaincu que les dbits ne sont pas gaux aux crdits ?Peut-tre pas encore car vous confondez une astuce del'arithmtique avec une pratique qui permet de vrifier que l'on nes'est pas tromp dans l'criture du journal et dans le report dujournal sur les comptes mais qui en soi n'a aucune logique. On perd

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    les valeurs ngatives pour ne conserver que les valeurs absoluestraites comme tant toujours des valeurs positives.Dans l'introduction de son ouvrage notre comptable de laRenaissance Pierre de Savone, est fier de dire qu'il utilise toutes lesressources des "divines" mathmatiques pour nous enseigner lacomptabilit. Nous pouvons lui pardonner d'avoir prsent l'galitdes dbits et des crdits comme tant une conqute de l'espritscientifique sans se rendre compte qu'il manipulait des valeursabsolues considres comme tant toujours des valeurs positives. Ilse contente de dfinir le dbit, main gauche, et le crdit, maindroite, rien de plus. Ses "divines" mathmatiques ne lui servent rien mais il est plus prudent que les professeurs qui tentent dedonner une dfinition logique ces deux mots. A son poquel'utilisation du signe ngatif tait loin d'tre vidente. L'quation +7-3 = +4, comme si le solde d'un compte tait toujours positif, ne luiposait pas de problme mais l'quation -7 + 4 = -3 lui aurait parudiabolique. Comment est-il possible qu'il y ait moins que rien !Comment peut-on enlever 7 pommes d'un panier qui n'en contientque 4 ? La monnaie, disent les conomistes, tant un "bien"comment peut-il y avoir moins de "biens" que pas de "biens" dutout ? Aujourd'hui cette deuxime quation avec son rsultatngatif ne vous effraie plus. Il serait temps qu'il en soit de mmepour comprendre logiquement la comptabilit avec ses vraiesvaleurs, les valeurs positives et les valeurs ngatives.Donc pas de problme, si les dbits sont gaux aux crdits envaleur absolue, ils ne le sont plus si l'on tient compte de leur vraievaleur, les valeurs relatives. Les critures gauche et droite desbarres de fraction de notre exercice sont exactement les mmes queles critures des comptables aux dbits et aux crdits de leurscomptes.Maintenant quoi peut nous servir cette dcouverte lmentaire.Dj nous pouvons rpondre la deuxime question sur l'ingalitdu rsultat dcoulant comme par miracle d'une galit (maintenantseulement apparente) des dbits et des crdits. Les dbits et lescrdits n'tant plus gaux, grce leurs valeurs relatives, uneingalit, le rsultat, peut logiquement dcouler d'une tenue

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    comptable. Nous sommes rassurs. Le chef d'entreprise rechercheune ingalit positive la plus grande possible, un profit, pendantque son comptable recherche une galit au centime prs de sabalance.Le problme maintenant est de dcouvrir comment on peut tenirune comptabilit en tenant compte des vraies valeurs, les valeursrelatives avec leur signe. La prise en compte des vritables valeurspositives ou ngatives enregistres par la comptabilit permet enfinde comprendre ce que l'on fait.

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    La thorie comptable commence par le bilan

    Le bilan de dpart de Pierre de Savone

    Un exercice pour illustrer le bilan

    Le bilan

    L'quilibre par la situation nette

    D'abord et avant tout le bilan de dpart

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    Le bilan de dpart de Pierre de SavoneRendons grce notre ami Pierre de Savone d'avoir ajout undernier chapitre dans sa dernire dition imprime le 31 mars 1608.Nous retrouverons plus tard son prdcesseur, Luca Pacioli, maisc'est Pierre de Savone qui a le mieux prcis la ncessit, dans tousles cas d'une tenue comptable, d'un bilan de dpart. Dans cechapitre il explique comment un jeune homme tenant sacomptabilit doit commencer son grand-livre. Il doit d'abord etavant tout tablir son bilan de dpart avec d'un ct, gauche, lavaleur des marchandises en stock, les dettes recevoir des clients,le solde de la caisse et droite, les dettes dues aux fournisseurs etun compte de capital, toujours droite, qui quilibrera l'ensemble.Il simplifie encore plus l'exemple prcdent en supposant que"Notre jeune homme n'ayant pas encore son train demarchandises, ni dbiteurs, ni crditeurs, il faut qu'il dresse soncompte capital la premire feuille de celui-ci le faisant crditeurde l'argent qu'il met en caisse, en passant son rencontre en dbit un compte de caisse qu'il dressera au mme livre entre ses mainsou de celui qui sera son caissier" La littrature de Pierre de Savonen'est pas facile lire mais le jargon de nos comptablesd'aujourd'hui n'est gure plus comprhensible. Ils diraient que notrejeune homme doit crditer un compte de capital et dbiter uncompte de caisse. Est-ce plus clair ?Il s'agit en fait d'un bilan de dpart et Pierre de Savone a raisond'expliquer que l'on ne peut pas tenir une comptabilit, mme s'iln'y a qu'un fonds de caisse, sans ce bilan de dpart. De nombreuxouvrages d'initiation la comptabilit tentent d'expliquer latechnique comptable en partant directement des entres et dessorties de la caisse sans parler du bilan de dpart. Cette dmarcheengage les lves sur une fausse piste et contribue enfoncer dansleurs ttes que la comptabilit se rduit la gestion des recettes etdes dpenses. Pour comprendre la comptabilit il faut d'abordcomprendre le bilan.

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    Un exercice pour illustrer le bilanOn peut illustrer le propos de Pierre de Savone, lorsqu'il nous ditqu'il faut toujours un bilan de dpart, avec l'exercice suivant. Cetexercice aura en plus l'avantage de nous poser de bonnes questionssur la nature de la monnaie. Comptabilit et monnaie, le coupleindissociable.Imaginons notre jeune homme dmarrant son activit le premierjanvier. Il achte un produit 100 et le revend immdiatement 130 soit une marge de 30 %. Le mme jour, toujours le premierjanvier, il achte un deuxime article identique 100 mais ne levendra que le 31 dcembre 143 car entre temps l'argent a subiune dprciation value 10 %. Il estime que s'il avait achet cetarticle le 31 dcembre il l'aurait pay 110 (100 + 10 %) et comme ilveut conserver une marge de 30 % il applique 30 % sur 110 soit 33+ 110 = 143 . Ce dernier jour de l'anne il achte un troisimearticle 110 , et le revend immdiatement 143 .Voulant connatre son bnfice il fait le raisonnement suivant. S'iln'y avait pas eu de dprciation il aurait achet 3 articles 100 soit 300 revendus 130 soit 390 d'o un bnfice de 90 . Ladprciation tant de 10 % son bnfice doit tre de 90 + 10 % soit99 . Voulant se vrifier avec les recettes et les dpenses il calculeles trois dpenses 100 + 100 + 110 = 310, puis les trois recettes130 + 143 + 143 = 416 et fait la diffrence 416 310 = 106. Tiens! Mon bnfice n'est plus de 99 mais de 106 . D'o vient cettediffrence de 7 , quel est le vritable bnfice de mon activitcommerciale ?Nous pouvons vous laisser chercher la raison pour laquelle unpremier calcul nous donne un bnfice de 99 et un deuxime de106 . Mais comme vous risquez de passer un long moment pourdcouvrir pourquoi il y a deux rsultats possibles, nous allonsdemander Pierre de Savone de nous aider. Il nous conseille detoujours faire un bilan de dpart. Nous n'avons ni dettes payer nidettes recevoir ni marchandises en stock mais quel est l'tat denotre caisse ? La petite astuce trompeuse de cet exercice est desous-entendre que la caisse de notre jeune homme avait au moins

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    70 au dpart. En effet, comment peut-il acheter pour 100 + 100 =200 le premier janvier s'il vend le mme jour un seul article 130. Soit il lui manque 70 soit il les a dj en caisse. L'exercice nedit pas qu'il a besoin d'emprunter. Les 70 taient dj dans sacaisse.S'il n'avait pas eu ces 70 , autrement dit un bilan de dpart gal zro, il aurait fallu les emprunter la banque. Supposons que labanque lui applique un taux gal la dprciation soit 10 %.Comme il n'a pas pu rembourser son prt avant le 31 dcembre il asubi une charge d'intrts de 10 % sur l'anne et sur 70 soit lesmystrieux 7. Aprs le rglement de ces intrts il lui reste unbnfice de 99 .Le non-dit de l'expos de l'exercice supposait la prsence des 70 en caisse. Notre jeune homme avait un bilan de dpart avec gauche une caisse de 70 l'actif et droite un capital propre(nous prfrerons l'appeler une situation nette) de 70 galementau passif. Comme il n'a pas eu besoin de les emprunter, les 70 dedpart se sont valoriss eux aussi de 10 % soit les 7 supplmentaires qu'il suffit d'ajouter aux 99 pour expliquer sonbnfice de 106 . La diffrence entre les 99 et les 106 vient soitd'un bilan de dpart gal zro (rsultat gal 99 ) soit d'un bilande dpart avec 70 en caisse l'actif et 70 en situation nette aupassif (rsultat gal 106 ).Rappelons que notre jeune homme n'a ni dettes payer ni dettes recevoir ni marchandises en stock. Dans ce cas trs particulier,jamais prsent dans la ralit d'une entreprise, le calcul du rsultatpeut se rduire la diffrence entre les entres et les sorties demonnaie disponible. Cette simplification est dangereuse sur unplan pdagogique mais comme il tait dj difficile de dcouvrirpourquoi nous avions deux rsultats possibles (99) ou (106) nousne voulions pas compliquer le problme.Rflchissons sur les 7 prsents dans notre caisse le 31 dcembrealors que nos 70 de dpart ont disparu ds le premier janvier. Lesdeux achats 100 et la seule vente 130 ont vid la caisse dsle dpart. Si la monnaie est un "bien" comment se fait-il que ce

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    bien disparaisse pendant les 365 jours de l'anne et rapparaisse enayant automatiquement rcupr la dprciation de 10 % ?La monnaie n'est pas un bien mais seulement l'unit de mesure denos achats et ventes avec des partenaires, y compris la banque s'ilavait fallu emprunter, qui ont estim la dprciation de la mmefaon. Dans notre exercice la monnaie disponible est le moyenpratique pour rgler les dettes rciproques. Elle peut disparatre etse retrouver prsente dans la caisse revalorise de 7 grce l'activit conomique des changes. Si notre particulier, partantavec les 70 , n'avait eu aucune activit, les 70 seraient toujoursl le 31 dcembre mais dprci de 10 %. Si par contre, il avaitachet un bien, un vritable bien, avec ces 70 de dpart il pouvaitesprer le revendre le 31 dcembre au moins 77 . Si la monnaieest un "bien", et mieux encore le "bien de rfrence", pourquoi ce"bien" est-il le seul et unique "bien" tre incapable de rattraper ladprciation ?Nous pouvons compliquer le problme en supposant que nospartenaires n'ont pas appliqu la dprciation de la mme faon.L'exercice risque de devenir fastidieux mais permet d'arriver auxmmes conclusions. Simplifions en supposant que notre jeunehomme a achet son dernier article 115 au lieu de 110 et revendu160 au lieu de 143. Son bnfice reste les 99 prcdents plus les 7de son capital de dpart moins 5 du dernier achat et plus 17 sadernire vente soit un total de 118. Nous les retrouvons pardiffrence entre les trois ventes (130 + 143 + 160) moins les troisachats (100 + 100 + 115) soit 118. Comme prcdemment les 70 de dpart se sont apprcis de 7 parce que ces 70 n'taient pasdans la caisse. Quel "bien" mystrieux, cette monnaie ! Il fautqu'elle disparaisse pour garder sa valeur.La monnaie est souvent dfinie comme tant non seulement unbien mais plus encore un bien "talon". Que faut-il penser de cetterfrence "talon", un talon tant par dfinition stable ? Avec ledeuxime exemple, le dernier achat et la dernire vente n'ont plusrien voir avec la dprciation moyenne du premier exemplesuppose applique uniformment pour toutes les transactions. Onpeut illustrer cette erreur de considrer la monnaie comme tant un

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    talon en prenant un exemple encore plus simple. Personne neserait tonn de voir le mme camembert vendu en promotion 1dans un super march, 2 dans un autre super march, 3 dansune picerie de quartier et 4 dans un magasin ouvert la nuit.Quelle est la rfrence qui permet de dfinir l'talon de mesure dece camembert identique dans tous les magasins ? Si l'on veutcontinuer utiliser le mot "talon", quel sens faut-il lui donner ?Il faut profiter de cet exercice, avant d'aborder l'initiation lacomptabilit, pour partir sur de bonnes bases. La monnaie est lavaleur de l'change, et comme cette valeur peut varier avec chaquetransaction et que chaque transaction sera enregistre par lacomptabilit, cette monnaie deviendra la variable de l'quationcomptable. Nous employons dessein le mot variable, l'exemple denotre camembert avec ses diffrents prix est vident. Profitons decet exemple, mme si nous n'avons pas encore abord lacomptabilit, pour constater que les annes pendant lesquelles ladprciation moyenne, qui n'est qu'une statistique, est trs fortecette dprciation moyenne n'est jamais reprise dans l'tablissementdu bilan qui clt l'exercice. Les comptables ont raison d'additionnerles euros du premier janvier avec ceux du 31 dcembre sanss'occuper de la valeur d'un "talon". Nous avons dj parl d'unbilan avec des mots aussi barbare que dbit, crdit, actif, passif,etc. Il faut tout reprendre zro pour bien expliquer le bilan.

    Le bilanUn bilan est une photo de la situation patrimoniale d'une entit,quelle que soit cette entit, une socit, un artisan, une association,un particulier, et mme pourquoi pas l'Etat lui-mme, nous leverrons ultrieurement. L'usage du bilan n'est pas limit auxentreprises industrielles et commerciales. Toutes les entits quellesque soient leur taille ou leurs activits ont un bilan, mme leclochard avec ses quelques pices de monnaie dans sa poche. S'iln'a aucun bien ni dettes payer ou recevoir ces quelques picesde monnaie sont gales sa situation nette. Ce bilan est ngligeable

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    mais sur un plan thorique il est aussi prsent que celui de notrejeune homme avec ses 70 .Cette situation patrimoniale est prsente sous deux aspects, d'unct, et pourquoi pas gauche, le patrimoine juridique et de l'autrect, droite, l'origine de ce patrimoine. Pour les civilisations quicrivent de la gauche vers la droite, il serait plus logique decommencer par l'origine gauche avec la description du patrimoine droite. Mais comme le bilan a t redcouvert d'une manireempirique nous allons conserver cette inversion. C'est donc lamme ralit, le patrimoine, mais vu sous ses deux aspects. Latradition a malencontreusement dnomm le patrimoine juridiquel'actif et l'origine de ce patrimoine le passif. Ne nous battons pascontre les moulins vent. Malgr le ridicule de ces deux mots nousallons les employer. Donc l'actif, le patrimoine juridique, cumuletout ce que l'entit possde juridiquement et que l'on peutregrouper dans trois ensembles. D'abord les biens corporels ouincorporels, stocks compris, puis les dettes recevoir et enfin lesolde positif de notre monnaie disponible. Il est vident que tout ceque l'on peut trouver dans l'actif d'un bilan et malgr l'sotrismedes termes employs peut rentrer dans l'une ou l'autre de ces troiscatgories. Malheureusement certains lments sont portspositivement dans la colonne de l'actif du bilan au lieu d'treindiqus avec un signe ngatif dans l'autre colonne. L'inverse estaussi vrai. L'on trouve parfois des valeurs positives dans le passifqui auraient mieux leur place dans l'actif avec une valeur ngative.Ces inversions compliquent la comprhension des bilans par lesprofanes et toujours cause de cette peur ridicule d'employer lessignes ngatifs. Amusons-nous constater que lorsqu'il estimpossible de ne pas porter un chiffre ngatif, comme par exempleune perte, celle-ci est entoure de parenthses au lieu d'utiliser lebon vieux signe arithmtique ngatif plac devant le chiffre etque nous avons tous appris l'cole primaire. Sur d'autresdocuments comptables, le signe ngatif est prsent mais la droitedu nombre comme si on voulait le cacher.

    L'quilibre par la situation nette

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    Aprs cette digression, encore une fois cause du nombre ngatif,revenons notre bilan. Donc pour l'instant nous avons gauche leslments du patrimoine juridique, l'actif, que nous pouvonsregrouper dans trois ensembles, les biens, les dettes recevoir et lamonnaie disponible. A droite, l'origine de ce patrimoine, le passif,l'on trouve d'abord l'ensemble de toutes les dettes payer. Unedette payer est une origine de patrimoine juridique, sans douteune origine due un tiers, mais reste une origine. Si vous n'tes pasconvaincu, rflchissez l'achat de votre maison ou de votreappartement avec sans doute une bonne dose d'emprunt. Vous tesd'un ct juridiquement propritaire de la totalit de votre maisonet de l'autre ct l'emprunt est une dette qui est l'origine, au moinsen partie, de votre maison. Il en est de mme de toutes les dettes payer, l'essentiel est que ce total de dettes ne soit pas suprieur autotal de votre patrimoine juridique. Nous souhaitons qu'il reste unelarge diffrence positive entre le total du patrimoine juridique et letotal des dettes payer. Cette diffrence est l'origine non due devotre patrimoine juridique. Nous l'appelons votre situation nette. Ilen est de mme pour une socit malgr le cafouillage desnombreux comptes, en haut et droite, dont seule l'additionarithmtique donnant la situation nette est significative. Cettesituation nette quilibre automatiquement tous les bilans pardiffrence entre le total du patrimoine juridique diminu du totaldes dettes payer. N'oublions pas les chiffres inverss, c'est direpositifs dans l'actif ou le passif au lieu d'tre clairement ports avecun signe ngatif dans l'autre colonne. Cette pratique alourditinutilement les deux colonnes de l'actif et du passif et complique lalecture de certains bilans traditionnels.

    D'abord et avant tout, le bilan de dpartRevenons la tenue comptable. Il faut commencer par tablir lebilan de dpart. La manire traditionnelle d'tablir ce bilan dedpart avec les critures de report nouveau est incomprhensiblepar les profanes. Il s'agit l des critures les plus difficiles comprendre, et manque de chance, c'est par cette norme difficultqu'il faudrait en toute logique commencer l'initiation la pratique

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    comptable traditionnelle. Bien videmment on ne le fait pas car ilest impossible d'expliquer, d'emble et ds le dbut de l'initiation,pourquoi il faut dbiter certains comptes, les quels ? en crditerd'autres, les quels ? par le crdit ou le dbit d'un compte bizarre quimalgr l'normit des sommes enregistres doit disparatre. Or ilsuffit tout simplement, dans le patrimoine juridique, l'actif, dedonner une valeur aux biens, de noter les dettes recevoir etd'indiquer le montant de monnaie disponible prsent dans la caisseet sur le compte courant bancaire. Dans la colonne de l'origine dece patrimoine, le passif, bien noter toutes les dettes payer, puisfaire la diffrence qui, si elle est positive, nous l'esprons, sera lasituation nette quilibrant automatiquement ce bilan. Si cettediffrence est ngative, vous, l'entreprise, l'association, etc.,qu'importe l'entit, vous tes en situation de faillite.La tradition appelle cette situation nette les capitaux propres. Sicette situation nette est positive les deux termes sont quivalents.Si elle devient ngative, il est difficile d'imaginer des capitaux"ngatifs". Dans ce cas douloureux, les "capitaux !" ayant disparu,le mot passif est rduit au total des dettes payer. Voil pourquoile passif est, dans le langage courant, mais aussi trs souvent dansle langage conomique, assimil aux seules dettes payer alors quesa vritable dfinition est l'origine du patrimoine juridique. Prenonsl'exemple de deux citoyens. Le premier, locataire de son logement,peut avoir un passif sans dettes payer, mais avec une situationnette modeste et mme quasiment nulle s'il ne possdepratiquement rien. Le second, propritaire de son appartement,dont il a financ la moiti avec un emprunt, aura un passif avec unesituation nette beaucoup plus avantageuse malgr la prsence d'untotal de dettes payer important.

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    De la thorie la pratique

    Un logiciel de comptabilit

    Le plan comptable

    Nos sept lments et les sept classes du plancomptable

    Compt'in et le bilan d'ouverture

    La saisie des critures

    L'exercice comptable

    L'enregistrement des vnements

    Les diffrents vnements enregistrer

    La saisie logique du logiciel Compt'in

    La saisie dbits / crdits traditionnelle

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    Un logiciel de comptabilitNous avons traduit notre approche originale la comptabilit dansun logiciel de tenue comptable dnomm Compt'in. Ce logicielcrit une premire fois en 1982 vient d'tre remis au got du jour. Ilest propos dans une formule dite "shareware". Cette formulepermet de l'utiliser gratuitement et pour un exercice complet d'unan. Nous donnons en fin d'ouvrage les rfrences d'un site internet partir duquel il est possible de tlcharger ce logiciel. Nousferons allusion, dans la suite de notre propos, la manire dont celogiciel permet de tenir une comptabilit car il ne suffit pas deproposer une thorie comptable encore faut-il prouver que cettethorie peut trouver son application pratique.

    Le plan comptableL'utilisateur du logiciel Compt'in dcouvre, ds le dpart, qu'il doitchoisir un plan comptable. Qu'est-ce qu'un plan comptable ?Comment peut-on le dfinir ? On pourrait vous rpondre par ladfinition officielle. Le plan comptable est l'ensemble des compteset un compte un lment du plan comptable mais comme cettedfinition pourtant officielle mais parfaitement tautologique nevous apporte rien essayons d'tre plus prcis.Nous partons d'un ensemble, le patrimoine vu sous ses deuxaspects. D'un ct le patrimoine juridique, l'actif, avec les biens, lesdettes recevoir et la monnaie disponible et de l'autre ct l'originede ce patrimoine, le passif, avec les dettes payer et la situationnette. Nous avons cinq lments mais il nous manque un autrelment le rsultat car ds que nous agirons, ds que cette photo dubilan deviendra un film, un film est une succession de photos, noussouhaitons savoir si nous faisons du bnfice ou de la perte. Lefameux dsquilibre cach par les valeurs absolues mais bienprsent avec les vraies valeurs positives ou ngatives. Nouspourrions nous contenter d'un seul compte donnant le rsultat maiscomme l'on perdrait beaucoup d'informations trs utiles pour notregestion, nous allons enregistrer d'un ct les activits de la priodesusceptibles d'engendrer un bnfice mais galement les

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    consommations de la mme priode malheureusement ncessairespour raliser nos activits. Ces consommations viendront parsoustraction de