Compte-rendu conférence de Jacques LENAIN par J.-S. JAMART

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  • 8/14/2019 Compte-rendu confrence de Jacques LENAIN par J.-S. JAMART

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    Mardi 2 fvrier 2010

    Surtout, ne pas abandonner Bruxelles !

    Franois Perin, ce grand homme d'Etat wallon, n'oubliait jamais Bruxelles, mme s'il combattaitsurtout pour le bien de la Wallonie. Il a proclam plusieurs reprises que les Wallons ne devaientjamais abandonner Bruxelles la Flandre et ne pas lui faire ce "cadeau de dpart". Dans notreoptique rattachiste, Bruxelles comme la Wallonie doit devenir une rgion franaise lorsque la Belgiquedisparatra. Dans cette optique, des rattachistes bruxellois organisaient le 14 novembre 2009 Anderlecht une runion d'information et de discussion autour de Jacques Lenain, qui nous fit part decertains projets spcifiques Bruxelles. Nous vous en livrons ici une synthse, en attendant qu'unopus plus consquent sur le sujet ne soit finalis et publi.

    Le devenir de Bruxelles, aprs la fin du Royaume de BelgiqueBruxelles, Ville franaise et Ville-Libre

    Le 14 novembre 2009, Anderlecht, commune de Bruxelles-rgion, Jacques Lenain, citoyen franaiset fonctionnaire, a expos sa vision de Bruxelles Ville-Libre dans lensemble franais, linvitationde militants runionistes bruxellois. Cet expos est rsum ci-aprs.

    Jacques Lenain a dabord indiqu lassemble, dune quarantaine de personnes, ce qui la amen rflchir, en son seul nom propre, mais aid par sa connaissance de lEtat franais, sur la situation dela Belgique, sa conviction que lEtat belge tait condamn, et que les consquences pour la Wallonieet Bruxelles de sa disparition, mme si celle-ci pouvait ne pas tre proche, devaient tre prpares. Ila rappel son intervention aux Etats Gnraux de Wallonie, grce Jules Gheude, le 6 mai 2009,dont sa contribution crite, quon peut consulter sur le site Internet upbf.net , qui traite des trois

    formes possibles dunion entre la Wallonie et la France, analyse qui vaut aussi pour Bruxelles.Il a rappel aussi sa lettre ouverte du 6 aot 2009 au Prsident du RWF, Paul-Henry Gendebien, danslaquelle il souligne en quoi, selon lui, la conception assimilationniste de celui-ci est peu adapteaux ralits belge et franaise, en ignorant, dune part, la volont de la grande majorit des Bruxelloiset des Wallons de conserver lessentiel de leur hritage belge, dont lautonomie rgionale conquiseces dernires dcennies, et, dautre part, la souplesse de la Constitution franaise, propre reconnatre des statuts diffrencis pour ses collectivits territoriales priphriques , comme ltatdesprit des lites politiques franaises, aptes accepter demain un statut propre pour chacunedes Rgions de Bruxelles et de Wallonie, si celles-ci le demandaient. Une double critique qui vautencore plus pour Bruxelles, du fait de son isolement territorial, de la composition bilingue de sapopulation, et de sa fonction europenne.

    Un statut dautonomie pour Bruxelles et la Wallonie au sein de la Rpublique

    J. Lenain a redit en quoi, daprs lui, une approche assimilationniste tait totalementinapproprie, politiquement et juridiquement, et ce encore plus pour Bruxelles que pour la Wallonie. Ila soulign que sil tait logique pour la France, en 1919, de substituer en Alsace-Moselle son systmejuridique au systme germanique en vigueur de 1871 1918 une entreprise lgitime derappropriation nationale, que sil tait logique pour lAllemagne de lOuest, en 1990, de substituer sonsystme politique et juridique celui lAllemagne de lEst du fait dune incompatibilit totale entre unrgime libre et un rgime autoritaire , pour la France, cette logique naurait pas de raison dtreenvers la Wallonie et Bruxelles si elles faisaient le choix de devenir franaises. Il ne sagirait pas pourla France de grer une reconqute, mais dadopter un mode dunion acceptable des deux cts, decontenu dfinir ensemble.

    Donc, selon lui, la France naurait nulle raison et nul intrt assimiler brutalement nos deuxRgions qui ont une histoire distincte et un systme juridique spcifique, longuement tablis en

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    dehors du cadre franais, en leur imposant brutalement un centralisme parisien niveleur. Uncentralisme qui au demeurant nest plus aprs trente ans de dcentralisation, si fait que la Constitutionfranaise de 1958, largement rvise, permet de donner aux entits priphriques franaises,priphriques par leur loignement gographique mais aussi par leur personnalit, des statuts lacarte .

    Il a rappel que les Rgions franaises de la mtropole ont bien moins de comptences que lesRgions belges de Bruxelles et de Wallonie et de ce fait des budgets nettement plus modestes.Situation quil explique par le fait que la dcentralisation conduite en France depuis trente ans aessentiellement profit aux Dpartements (quivalents historique et gographique de nos Provinces,mais bien plus puissants), et parce quil est politiquement impossible en France de rgionalisercertaines matires, telles que lducation et la sant, comme il en va dans les pays europenscomparables (Allemagne, Italie, Espagne, et Belgique justement), par refus du peuple franais quicraint une atteinte au principe dgalit. Il juge donc regrettable, alors que la Constitution de la Francepermet un statut dautonomie accentue pour certaines de ses collectivits territoriales priphriques la personnalit affirme (la Corse et les onze entits doutre mer), que le milieurattachiste dfende encore lide que la Wallonie et Bruxelles puissent en tre prives en rejoignant laFrance, alors que ces deux Rgions belges ont derrire elles deux sicles dhritage juridique belge etvingt trente ans dautonomie institutionnelle. Il juge aussi que ce serait techniquement et

    politiquement impossible, vu lampleur considrable du corpus juridique dans les Etats contemporains,qui ne peut donc tre remplac systmatiquement et rapidement par un autre.

    J. Lenain sest donc attach faire valoir combien un statut dautonomie sur le modle quilprconise pour la Wallonie et Bruxelles, et quil nomme union-intgration , serait diffrent de celuides Rgions franaises de droit commun , puisque son projet consiste laisser nos deuxRgions devenues franaises leurs comptences actuelles, enrichies des comptences ex-communautaires, la Communaut franaise disparaissant, en mme temps que lEtat belge. LEtatfranais hriterait tout simplement des comptences de lex-Etat fdral belge, rien de plus et rien demoins. Ce qui veut dire, daprs lui, que lessentiel du corpus juridique belge serait maintenu, peut-tre 90 %. Pour bien se faire comprendre, en reprenant lexemple du rgime juridique dAlsace-Moselle, il a indiqu que, outre quil ny avait pas de Rgion Alsace-Moselle , lAlsace est uneRgion de droit commun, aux comptences tout aussi limites que les autres Rgions franaises, et

    que ce rgime local dAlsace-Moselle, nullement dcentralis puisque largement de la comptence deParis (comme la rmunration, drogatoire au principe de lacit, des reprsentants des cultes), taitbien petit car il ne constituait que de 5 % 10 % des rgles de droit applicables la populationdes trois Dpartements en cause. Autrement dit, il y a pour lui un monde entre un statut pourBruxelles et la Wallonie de droit commun avec quelques amnagements limits de type rgimedAlsace-Moselle (modle assimilationniste ), et celui, le sien, consistant maintenir lessentiel ducorpus juridique et institutionnel belge (modle intgrationniste/autonomiste ), soit au moins 90 %de celui-ci ! Donc des proportions entre droit commun et droit propre totalement opposes

    Toutefois J. Lenain a tenu souligner que le modle dune intgration dans lautonomie quildfend nest nullement une union au rabais avec la France. Cest ainsi que les Bruxellois tout commeles Wallons seraient des citoyens franais et seraient de ce fait reprsents lAssemble nationale etau Snat franais. Et que le droit ex-fdral belge, conserv en presque totalit, plac sous la

    responsabilit de lEtat franais, donnerait notamment celui-ci la matrise de la fiscalit et de laprotection sociale. Qui plus est, la convergence entre les dispositifs belges et franais, dans tous lesdomaines, pourrait se dvelopper au fil du temps.

    En outre, J. Lenain, toujours pour se faire mieux comprendre, sest livr une comparaison entreson projet et celui de D. Ducarme de Belgique franaise de juillet 2008. Pour souligner que cesdeux projets ont bien des similitudes, du fait dun mme objectif, arrimer troitement la Wallonie etBruxelles la France (contrairement une opinion fausse et trop rpandue, le projet Ducarme estpleinement intgrationiste a-t-il affirm, texte en main), et de leur but commun de conserver ce quipeut ltre de lhritage juridique et institutionnel belge, par le moyen dun statut de large autonomie.Mais alors que le projet Ducarme sattache aux apparences de cet hritage, notamment enconservant le Roi et son environnement symbolique, et en crant une Assemble et unGouvernement de Belgique franaise tuteurs des deux Rgions (toutes choses que J. Lenain trouvent

    totalement ridicules ), et nglige presque compltement les aspects de fond (qui fait les lois et lesrglements, qui dtient les pouvoirs fiscaux et financiers, comment fonctionne la protection sociale ?),

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    son projet lui sattache, tout au contraire, tre clair sur ces questions essentielles, ainsi que sur ledegr rel dautonomie de nos deux Rgions.

    Abordant la question du financement des dpenses publiques wallonnes et bruxelloises dans uncadre post-belge, J. Lenain, aprs avoir dit quelle est toujours esquive par les tenants de lEtatwallon indpendant ou de la Fdration wallo-bruxelloise, a fait valoir que la France serait

    parfaitement en mesure de se substituer la Flandre pour financer le maintien des services publics etde la protection sociale pour nos deux Rgions. Car, dabord, la France pse , conomiquement,dix fois la Flandre. Ensuite, les services publics et sociaux belges sont de mme niveau quen France,et donc le maintien de la parit sociale entre nos deux Rgions et la France voisine simposerait lEtat franais. Et que ds lors la France pourrait et devrait consacrer les quelque 6 8 milliardsdeuros annuels ncessaires au maintien du niveau des services publics et de la protection socialedes quatre millions et demi de Bruxellois et Wallons (selon lui, elle sacrifie prs de 30 milliardsdeuros par an aux deux millions et demi de Franais dOutre-mer !). Il a ajout que si la crisefinancire et conomique actuelle rend plus sensible un tel effort financier, elle ne le rend pas plusproblmatique car elle nen modifie pas le poids relatif. Il a aussi soulign que cet effort neconcernerait que la Wallonie, puisque Bruxelles, en bnficiant de la taxation des navetteursflamands, devenus des travailleurs frontaliers, naurait nul besoin dun concours financier de lEtatfranais, et atteindrait ainsi la pleine autonomie financire. Avant den venir la teneur de ce statut

    franais propre de Bruxelles, J. Lenain se devait de traiter de lautre cadre politique en comptitionavec le cadre franais, celui dun Etat indpendant, cadre auquel il associe celui de districteuropen .

    Bruxelles Cit-Etat indpendante , District europen ou Ville franaise libre

    Jacques Lenain a reconnu demble la viabilit conomique et financire dun Etat indpendant bruxellois (mais pas dune Union wallo-bruxelloise). Alors quaujourdhui Bruxelles est pauvrefinancirement, du fait de la volont flamande de la tenir en position subordonne, subordinationfinancire grandement facilite par la taxation au lieu de rsidence des 360.000 travailleurs navetteurswallons et flamands quotidiens (qui reprsentent presque la moiti de la force de travail bruxelloise),une Cit-Etat de Bruxelles indpendante, souveraine serait, en thorie, nouvellement et

    considrablement enrichie par la taxation des revenus de ces navetteurs devenus travailleursfrontaliers sur leur lieu de travail, donc Bruxelles ! Son tranglement financier actuel cesseraitdonc, et elle aurait mme vocation devenir alors, financirement parlant, une sorte de nouveau Grand-Duch de Luxembourg . Jacques Lenain croit pouvoir chiffrer le potentiel de ces surplusfiscaux plus de deux milliards /an !

    Mais J. Lenain sest ensuite attach souligner combien le choix de loption souverainiste serait dangereux. Car le gros problme de Bruxelles resterait son enclavement territorial en Flandre,laquelle, devenue elle aussi un Etat indpendant, naurait de cesse de vouloir contrler Bruxelles, ladomestiquer, et pour cela ltouffer physiquement, et aurait les moyens de parvenir progressivement ses fins, grce un tel encerclement territorial toujours sa main, et en activant sans cesse laminorit flamande de Bruxelles. Et ce mme dans le cas dune intgration Bruxelles des sixcommunes priphriques facilits majorit francophone , le petit corridor de Rhode-St-

    Gense ntant porteur daucun axe majeur de transport. Cette indpendance bruxelloise, avec untel encerclement flamand, agressif et sournois, serait une indpendance constamment menace,grignote, amoindrie. Rendant la vie pnible aux Bruxellois et entravant le fonctionnement de LEtatbruxellois. Au final, une indpendance illusoire, factice.

    J. Lenain a conclu que Bruxelles a donc besoin dune puissance protectrice, face au nouvel Etatflamand. Il a alors soulign en quoi lUnion europenne ne pourrait tre cette puissance l, pas plusde cet Etat bruxellois indpendant que dun district europen bruxellois. En faisant valoir queles Etats membres de lUE, et les organes de lUE, aujourdhui sous domination anglo-germanique,nauraient gure de motif de prendre partie dans les querelles au jour le jour de lEtat flamand et delEtat bruxellois, a fortiori pour venir en dfense dune communaut francophone bruxelloise quiaurait elle-mme fait le choix de lindpendance, ses risques et prils. Bien au contraire, la majoritde ces Etats et ces organes europens favoriseraient la remise en cause, rampante, du caractre

    francophone de Bruxelles. Et la France, carte comme solution par les Bruxellois

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    francophones , contrairement aux Wallons qui lauraient rejointe, ne serait gure en situation devouloir et de pouvoir agir.

    Ce raisonnement sapplique aussi, selon J. Lenain, au statut de District europen (par rfrence celui de Washington). Un concept au demeurant compltement fumeux selon lui, au planjuridique, puisque que dans ce cas Bruxelles ne serait point un Etat, et ses habitants seraient alors

    dpourvus de citoyennet, la citoyennet europenne ntant quune citoyennet drive descitoyennets des Etats membres, donc pas une vritable citoyennet (aux Etats-Unis, on est pascitoyen texan, californien, ou washingtonien mais tat-unien ). Donc, pour lui, le concept de district sefface compltement devant celui de Cit-Etat souveraine, qui peut certes fairefonction de district , mais ne peut en tre un, juridiquement.

    Ds lors, la seule puissance protectrice possible est la France, qui devrait tre choisie parBruxelles, faisant du mme coup de sa frontire avec la Flandre une frontire franaise, moyen radicalde donner toute sa puissance cette protection. Un choix qui ferait de Bruxelles, comme la Walloniequi laurait prcde dans ce choix, une entit pleinement franaise, mais une entit dote dun statutdautonomie institutionnelle au moins quivalent celui de la Wallonie, avec une autonomie effective renforce du fait dune relle marge de manuvre financire, contrairement laWallonie. Un statut dautonomie inscrit dans la Constitution franaise, avec celui de la Wallonie, dans

    un titre spcial consacr la Belgique franaise . Pour J. Lenain, ce statut de Bruxelles Ville-libre , ce serait pratiquement tout les avantages de lindpendance, sans ses inconvnients, avec, desurcrot, une vraie protection, puissante et prenne, contre le nouvel Etat flamand, celui de la prsence franaise face celui-ci, qui garantirait sans rserve le caractre francophone deBruxelles, qui participerait la gestion du cadre protecteur de la minorit nerlandophone deBruxelles, qui partagerait avec Bruxelles laction de soutien des francophones de la priphriebruxelloise qui seraient rests non rattachs Bruxelles, et qui assurerait le maintien de lienspuissants avec la Wallonie, lune et lautre placs sous le mme toit franais (qui remplacerait le toit belge).

    Le statut de Bruxelles Ville franaise et Ville-libre

    Jacques Lenain, dans le temps qui lui restait, a ensuite tent de prciser ce statut propre de Bruxelles en France . Il sest notamment attach mieux justifier ce paradoxe selon lequel Bruxelles aurait, en France , une autonomie bien suprieure son autonomie actuelle. Il a insist sur le statutprotecteur maintenir, en lamnageant, pour la minorit nerlandophone de Bruxelles. Il sestattach aussi traiter de la question territoriale bruxelloise.

    a) les institutions politiques bruxelloises. Alors que les institutions rgionales bruxelloisconserveraient leurs caractristiques et les pouvoirs quelles ont dj, J. lenain considre quelles setrouveraient renforces avec lacquisition de lautonomie constitutive, la suppression de la paritcommunautaire dans lexcutif bruxellois, la fin des excs des cadres linguistiques de ladministrationbruxelloise, et la simplification radicale de leur fonctionnement puisque les structures des deux Communauts , franaise et flamande , Bruxelles seraient supprimes. Les institutionscommunales pourraient tre maintenues, face un pouvoir rgional renforc.

    b) le champ des comptences bruxelloises. J. Lenain croit que les comptences rgionalesbruxelloises seraient maintenues sans restriction, et mme trs largies puisque la Rgion bruxelloisereprendrait les comptences ex-communautaires franaise (tout comme la Rgion wallonne) et aussiflamande (enseignement, culture, action sociale). Elles pourraient mme tre tendues certainescomptences ex-fdrales, comme les institutions ex-royales qui y sont presque toutes implantes, oucomme le droit du travail. La prolongation internationale de ces comptences serait conserve.

    c) lautonomie financire de Bruxelles. Si lautonomie fiscale de Bruxelles resterait, du point devue de J. Lenain, encore limite, les comptences fiscales ex-fdrales belges tant reprises par lEtatfranais, lautonomie financire de la Rgion bruxelloise serait certainement bien suprieure son autonomie actuelle, quel que serait le rsultat du partage du produit de la taxation des revenus dutravail des frontaliers flamands entre lEtat franais et Bruxelles. Sachant que lEtat franais devrait

    lgitiment conserver une grosse fraction des deux milliards en cause au titre de sa prise en chargede la quote-part bruxelloise (et wallonne) de lex-dette fdrale belge (et que rien ne changerait pour

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    la destination des impts des navetteurs franco-wallons), il nen demeure pas moins que Bruxellesdisposerait dau moins un demi-milliard deuros par an de recettes fiscales supplmentaires, soit plusque ce quelle demande aujourdhui en vain.

    d) le territoire bruxellois. J. Lenain constate que, dj, par le seul fait que la frontire autour deBruxelles serait une frontire de la France, la protection de Bruxelles par lEtat franais contre la

    Flandre serait acquise. Mais il resterait rgler le sort des territoires population majoritairement francophones de la priphrie. En outre, selon lui, la France naccepterait pas quune Bruxellesfranaise soit entirement enclave dans un autre Etat, et elle exigerait donc un corridor territorialentre Bruxelles et le reste de son territoire, qui inclurait par hypothse la Wallonie. Il a alors voquplusieurs conceptions sur llargissement du territoire de Bruxelles, jusquau ring autoroutier quientoure Bruxelles, et la teneur du corridor entre celui-ci et celui de la Wallonie, deux Rgionsfranaises. En invoquant divers prcdents , les moyens de pression de la France pour aboutir, etune hypothse de compensation territoriale. Tous ces lments sont abords plus loin.

    e) le statut de la minorit nerlandophone de Bruxelles. J. Lenain a insist sur le fait que lemaintien des droits gnraux, linguistiques et culturels de la minorit nerlandophone seraitassur, droits qui seraient mentionns dans la Constitution franaise, dans le titre spcial consacr la Belgique franaise (il a tenu souligner lvolution des esprits en France sur ces questions

    linguistiques en mentionnant le fait que la Constitution reconnat depuis 2008 que les languesrgionales font partie du patrimoine de la France ). Ds lors, Bruxelles maintiendrait unereprsentation politique de la minorit nerlandophone , une commission communautaire, et uneadministration ddie lexercice des droits des nerlandophones en matire et ducativeculturelle. Et un dispositif spcifique serait toujours assur en matire judiciaire. La France pourraitaussi donner le choix de la nationalit aux Flamands nerlandophones de Bruxelles, voire celui dela double nationalit.

    f) les relations de Bruxelles et de la Wallonie. Entre Bruxelles et la Wallonie, Rgions autonomesde France, J. Lenain a not que le maintien du corpus juridique belge entretiendrait des lienspuissants. Il y aurait, de plus, des possibilits de cooprations propres pour des matires quiresteraient spcifiques aux deux Rgions, comme dans le champ de la protection sociale. Pour lesystme ducatif et les mdias publics, passs sous comptence rgionale, une cogestion serait

    dapplication, par exemple sur le modle de ce qui se fait en Suisse romande. LEtat franaissoutiendraient des cooprations bilatrales entre les deux Rgions plus srement que ne le faitprsentement lEtat belge, y compris financirement, par exemple au titre dinvestissements dintrtcommun dans le Brabant wallon.

    g) les relations de Bruxelles et de la Flandre. Aprsune priode difficile, les relations deBruxelles avec la Flandre prendraient un cours normal, a pronostiqu J. Lenain, du fait de limbricationdes intrts conomiques des deux entits. Pour les questions difficiles, comme celle de la minorit francophone de Flandre, elles seraient cogres par lEtat franais et la Rgion bruxelloise. Aterme, sur le modle de lagglomration franco-suisse de Genve, une vritable cooprationtransfrontalire se mettrait en place.

    h) la place de lEtat franais Bruxelles. La place de lEtat franais Bruxelles serait

    ncessairement infrieure la prsence de lEtat belge aujourdhui, dj du seul fait que ce ne seraitpas sa capitale, et parce que son intrt politique serait dy tre discret . LEtat franais nexerceraitpas de tutelle dans le champ des comptences bruxelloises : selon J. Lenain, il y aurait, au plus, unCommissaire de la Rpublique qui assurerait la liaison avec Paris, la direction des services territoriauxex-fdraux belges, lexercice du contrle de lgalit, la responsabilit du maintien de lordre. Lascurit interne du territoire et de la population serait assure avec la France. Par ailleurs, lesinstitutions judiciaires locales bruxelloises relveraient du Ministre franais de la Justice. Ce serait peu prs tout.

    i) le rle europen de Bruxelles. Bruxelles resterait une grande ville europenne, accueillanttoujours le sige des plus importantes institutions de lUnion europenne, car le statut franais deBruxelles serait tout fait compatible avec son rle europen. Pour J. Lenain, le risque dun dpartmassif des institutions europennes de Bruxelles, au motif que la population bruxelloise aurait choisi

    la voie franaise, est inexistant. Outre quil voit mal quels arguments publics et juridiques un collectifdEtats membres pourrait invoquer pour nier, de la sorte, la lgitimit du principal membre fondateur

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    du march commun et donc de lUnion recevoir le sige des principaux organes europens, mmesi cest par le bnfice dun simple effet daubaine (la France ne serait pour rien dans la disparition duRoyaume belge), il a rappel que la fixation de ces siges relve de lunanimit, donc que la Francedispose dun pouvoir de veto comme tout Etat membre (pouvoir double, pour dcider dun transfertcomme pour fixer le nouveau sige). Le rle de Bruxelles faisant fonction de capitale europenne serait au final plus valide et mme plus entier du fait que Bruxelles ne sera plus la

    capitale de lEtat belge.

    La question territoriale bruxelloise

    Bien que ce soit une question dlicate, particulirement dlicate parce que dangereuse, JacquesLenain a constat que ce nest pas en ne la traitant pas quon neutralise sa nuisance potentielle.

    Sagissant du droit des populations frontalires choisir leur Etat dappartenance, il nemconnat pas la volont internationale et europenne contemporaine de sen tenir la transformationen frontire dEtat, sans modification, et donc sans consultation des populations, des limitesadministratives prexistantes. Il observe que, toutefois, il existe une autre tradition politiqueinternationale, en Europe prcisment, qui a consist, au contraire, consulter les populations pour

    fixer une frontire (aprs la premire guerre mondiale, entre Allemagne et Danemark, entre Allemagneet Belgique (!), entre Autriche et ex-Yougoslavie, entre Pologne et ex-Tchcoslovaquie, et mme entrela France et lAllemagne sagissant de la Sarre, etc.). Il lui parait paradoxal quon puisse demain, encas dclatement de la Belgique, reconnatre, dans le mme lan, le droit du groupe germanophone dEupen/St-Vith, l o il est majoritaire, de quitter la Rgion Wallonne, dont ilfait juridiquement partie, tout en refusant le droit au groupe francophone , aussi nombreux, dequitter la Rgion flamande devenue un Etat qui se veut unilingueEn tout tat de cause, il luiparait que la communaut internationale, et lUnion europenne, si elles senttaient refuser lareconnaissance dun tel droit choisir son Etat dappartenance, seraient alors contraintes, selon leurspropres normes, exiger de lEtat flamand la reconnaissance de sa minorit francophone dans saConstitution (comme cela fut imposer pour leur propre minorit la Slovaquie, la Croatie, laSerbie, au Kossovo, etc.), sauf le sanctionner, notamment en diffrant son adhsion commemembre plnier de lUnion europenne, tant quil sy refuserait. Cest pourquoi, selon lui, les dirigeants

    nationalistes flamands, une fois au pied du mur, hsiteraient entre garder en Flandre une minoritjuridiquement reconnue et protge, remuante et contestataire, ou sen sparer, donc sendbarrasser, pour la plus grosse part du moins...

    Pour autant, la question territoriale bruxelloise dpasse, daprs J. Lenain, le sort de la minorit francophone priphrique. Il dfend le droit de lentit bruxelloise de disposer duneautonomie vritable vis vis de la Flandre, Etat tranger, donc une autonomie territoriale concrte,question que les communauts internationale et europenne ne pourront ngliger (il constate quilnexiste pas une seule entit de nature tatique sur terre qui soit la fois de taille consquente etentirement enclave dans une autre tout en tant considre comme vraiment autonome). Or cetteautonomie effective suppose bien un lien territorial direct avec la Wallonie. Un lien substantiel,porteur des principaux axes de communication qui relie Bruxelles au monde extrieur nonflamand , une bande territoriale donc plus large que celle de Rhode-St-Gense, incluant, au moins,

    lest, la voie ferre Bruxelles/Namur et la branche sud-est du Ring .

    lappui de sa position, J. lenain invoque le prcdent de Genve, Cit-Etat indpendante quivoulut et obtint en 1816, la suite du congrs de Vienne, un couloir pour la relier la Confdrationsuisse laquelle elle avait dcid dadhrer, et dont elle tait jusqualors spare par le territoirefranais. Il fait galement tat du statut belge, depuis 1922, de la voie ferre situe en territoireallemand sur plus de 25 Km, la Venbahn , statut susceptible de servir de rfrence pour dterminercelui des sections de quelques Km des axes de communication Bruxelles-Wallonie qui sont extrieurs la bande territoriale de Rhode-St-Gense mme largie (un segment du canal Bruxelles-Charleroi,de la voie ferre majeure Bruxelles/Paris/Londres, et des deux autoroutes ouest et est), et quidevraient tre placs sous souverainet bruxelloise.

    Encore pour montrer le caractre lgitime, raliste et accessible de telles exigences bruxelloises,

    il invoque aussi le dossier pendant du corridor maritime rclam par la Slovnie aux dpens de la merterritoriale croate pour accder directement la haute mer. Diffrend qui justifie, de la part de la

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