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34 pratique éducation thérapeutique Actualités pharmaceutiques n° 496 Mai 2010 L’acné est une affection dermatologique extrêmement fréquente puisqu’elle atteint plus de 80 % des adolescents. Il faut donc rassurer le patient, lui donner des conseils d’hygiène adaptés et lui expliquer comment suivre au mieux son traitement, que celui-ci soit local ou per os. L’ acné débute aux alentours de la puberté car c’est une affection dépendante des hormones, des androgènes notamment. Le follicule pilosébacé en est le point de départ. Les androgènes agissent en stimulant la glande sébacée qui sécrète alors du sébum en grande quantité, responsa- ble de la séborrhée du visage et du cuir chevelu (peau grasse et cheveux gras). Ils agissent aussi en stimulant la forma- tion de comédons superficiels (les points noirs) et profonds (les microkystes). Si les points noirs s’éliminent assez facilement, les microkystes peuvent évoluer en papu- les, pustules ou nodules. Le sébum qui s’accumule crée un milieu sans oxygène, propice au développement d’une bactérie, Propioni bacterium acnes, responsable de la formation de comédons inflammés. Les principales zones atteintes sont le visage, le cou, le dos, le décolleté et les épaules. Informer sur les origines et facteurs de risque Éliminer les étiologies médicamenteu- ses : vitamine B12, corticoïdes per os, anti- épileptiques, antituberculeux, lithium… Interroger les femmes sur leur cycle (régularité), ainsi que sur une éventuelle modification de la voix et de la pilosité pour dépister une hyperandrogénie. Rechercher toute irritation de la peau, voire une macération entraînées par certains vêtements ou objets (casque, sac à dos…). Rappeler qu’une exposition directe ou répétée de la peau à des produits gras ou huileux (cosmétiques gras, par exem- ple) favorise l’obstruction des pores et la survenue d’acné. Signaler que le stress ainsi qu’une transpiration abondante peuvent être des facteurs aggravants. Informer que le soleil est un faux ami car, dès la fin de l’exposition, un effet rebond et une séborrhée réactionnelle surviennent. Donner des conseils d’hygiène Proscrire le savon de Marseille, ainsi que les produits trop décapants et alcoolisés. Nettoyer le visage matin et soir à l’aide d’un savon doux, de pain dermatologique, de lait de toilette pour peaux grasses ou de gels moussants conçus spécialement pour les peaux acnéiques : La Roche Posay ® pain surgras, Hyseac ® pain, Effaclar ® gel moussant, Exfoliac ® gel nettoyant, Clea- nance ® gel nettoyant, Papulex ® gel net- toyant, Physiogel ® dermonettoyant… Rincer, puis sécher la peau sans frotter. Préférer, chez les hommes, le rasage électrique au rasage mécanique car il est moins traumatisant pour la peau. En cas de rasage mécanique, il est préférable d’utiliser des mousses à raser adoucis- santes, antiseptiques et antibactériennes : Nobacter ® gel ou mousse, Roche Posay XY ® Éviter de toucher les boutons au risque d’entraîner surinfection et cicatrice. Proposer des traitements à l’officine Le pharmacien d’officine peut conseiller un traitement à tout patient atteint d’une légère séborrhée comptant quelques comédons. Une acné importante et très inflammatoire requiert, quant à elle, une orientation vers le généraliste ou le dermatologue. Appliquer, après un nettoyage soigneux de la peau, matin et soir, sur les zones à traiter (visage, torse ou dos), une crème ou une lotion pour peaux grasses ou à tendance acnéique : Eau Précieuse lotion ® , Effaclar Duo ® , Cleanance émul- sion ® , Hyseac ® , Exfoliac ® , Sébium AKN ® Effectuer, deux à trois fois par semaine, des soins gommants et désincrustants doux réalisant un peeling superficiel affinant la couche cornée : Exfoliac désincrustant ® , Hyseac masque gommant ® , Bactopur exfo- liant ® , Normaderm ® Appliquer le soir, de façon ciblée sur les boutons et points noirs, des patchs puri- fiants, des sticks ou roll’on : Effaclar AI ® , Cleanance soin localisé spot treatment ® , Hyseac AI ® , Sébium AI ® . Couvrir éventuellement l’imperfection avec un soin teinté spécifique : Hydrafnia ® , Lutsine teintée ® , Exfoliac teintée ® , Bioderma fluide matifiant teinté ® Préférer un maquillage et des cosmétiques non comédogènes. Dispenser les traitements prescrits Les traitements locaux Les traitements exfoliants contiennent notamment des rétinoïdes (vitamine A acide, isotrétinoïne, adapalène), des antibiotiques locaux (érythromycine, clindamycine) ou du peroxyde de benzoyle. Conseils à un jeune patient acnéique Tableau 1 : Mentions devant figurer sur une ordonnance d’isotrétinoïne Prescription initiale chez une femme Ordonnances en cours de traitement Date du test qualitatif d’hCG* plasmatique Évaluation du niveau de compréhension Signature de l’accord de soins et de contraception Mise en place d’une contraception efficace depuis au moins 1 mois Date du test qualitatif d’hCG plasmatique Évaluation du niveau de compréhension Poursuite d’une contraception efficace * hCG : gonadotrophine chorionique humaine.

Conseils à un jeune patient acnéique

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34pratique

éducation thérapeutique

Actualités pharmaceutiques n° 496 Mai 2010

L’acné est une affection

dermatologique extrêmement

fréquente puisqu’elle

atteint plus de 80 %

des adolescents. Il faut donc

rassurer le patient, lui donner

des conseils d’hygiène adaptés

et lui expliquer comment suivre

au mieux son traitement,

que celui-ci soit local ou per os.

L’acné débute aux alentours de la puberté car c’est une affection dépendante des hormones, des

androgènes notamment. Le follicule pilo sébacé en est le point de départ. Les androgènes agissent en stimulant la glande sébacée qui sécrète alors du sébum en grande quantité, responsa-ble de la séborrhée du visage et du cuir chevelu (peau grasse et cheveux gras). Ils agissent aussi en stimulant la forma-tion de comédons superficiels (les points noirs) et profonds (les microkystes). Si les points noirs s’éliminent assez facilement, les micro kystes peuvent évoluer en papu-les, pustules ou nodules.Le sébum qui s’accumule crée un milieu sans oxygène, propice au développement d’une bactérie, Propioni bacterium acnes, responsable de la formation de comédons inflammés. Les principales zones atteintes sont le visage, le cou, le dos, le décolleté et les épaules.

Informer sur les origines et facteurs de risque

Éliminer les étiologies médicamenteu-ses : vitamine B12, corticoïdes per os, anti-épileptiques, antituberculeux, lithium…

Interroger les femmes sur leur cycle (régularité), ainsi que sur une éventuelle modification de la voix et de la pilosité pour dépister une hyperandrogénie.

Rechercher toute irritation de la peau, voire une macération entraînées par certains vêtements ou objets (casque, sac à dos…).

Rappeler qu’une exposition directe ou répétée de la peau à des produits gras ou huileux (cosmétiques gras, par exem-ple) favorise l’obstruction des pores et la survenue d’acné.

Signaler que le stress ainsi qu’une transpiration abondante peuvent être des facteurs aggravants.

Informer que le soleil est un faux ami car, dès la fin de l’exposition, un effet rebond et une séborrhée réactionnelle surviennent.

Donner des conseils d’hygiène

Proscrire le savon de Marseille, ainsi que les produits trop décapants et alcoolisés.

Nettoyer le visage matin et soir à l’aide d’un savon doux, de pain dermatologique, de lait de toilette pour peaux grasses ou de gels moussants conçus spécialement pour les peaux acnéiques : La Roche Posay® pain surgras, Hyseac® pain, Effaclar® gel moussant, Exfoliac® gel nettoyant, Clea-nance® gel nettoyant, Papulex® gel net-toyant, Physiogel® dermonettoyant…

Rincer, puis sécher la peau sans frotter.Préférer, chez les hommes, le rasage

électrique au rasage mécanique car il est moins traumatisant pour la peau. En cas de rasage mécanique, il est préférable d’utiliser des mousses à raser adoucis-santes, antiseptiques et antibactériennes : Nobacter® gel ou mousse, Roche Posay XY®…

Éviter de toucher les boutons au risque d’entraîner surinfection et cicatrice.

Proposer des traitements à l’officine Le pharmacien d’officine peut conseiller un traitement à tout patient atteint d’une légère séborrhée comptant quelques comédons. Une acné importante et très inflammatoire requiert, quant à elle, une orientation vers le généraliste ou le dermatologue.

Appliquer, après un nettoyage soigneux de la peau, matin et soir, sur les zones à traiter (visage, torse ou dos), une crème ou une lotion pour peaux grasses ou à tendance acnéique : Eau Précieuse lotion®, Effaclar Duo®, Cleanance émul-sion®, Hyseac®, Exfoliac®, Sébium AKN®…

Effectuer, deux à trois fois par semaine, des soins gommants et désincrustants doux réalisant un peeling superficiel affinant la couche cornée : Exfoliac désincrustant®, Hyseac masque gommant®, Bactopur exfo-liant®, Normaderm®…

Appliquer le soir, de façon ciblée sur les boutons et points noirs, des patchs puri-fiants, des sticks ou roll’on : Effaclar AI®, Cleanance soin localisé spot treatment®, Hyseac AI®, Sébium AI®.

Couvrir éventuellement l’imperfection avec un soin teinté spécifique : Hydrafnia®, Lutsine teintée®, Exfoliac teintée®, Bioderma fluide matifiant teinté®…

Préférer un maquillage et des cosmétiques non comédogènes.

Dispenser les traitements prescrits

Les traitements locaux

Les traitements exfoliants contiennent notamment des rétinoïdes (vitamine A acide, isotrétinoïne, adapalène), des antibiotiques locaux (érythromycine, clinda mycine) ou du peroxyde de benzoyle.

Conseils à un jeune patient acnéique

Tableau 1 : Mentions devant figurer sur une ordonnance d’isotrétinoïne

Prescription initiale chez une femme Ordonnances en cours de traitementDate du test qualitatif d’hCG* plasmatiqueÉvaluation du niveau de compréhensionSignature de l’accord de soins et de contraceptionMise en place d’une contraception efficace depuis au moins 1 mois

Date du test qualitatif d’hCG plasmatiqueÉvaluation du niveau de compréhensionPoursuite d’une contraception efficace

* hCG : gonadotrophine chorionique humaine.

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Actualités pharmaceutiques n° 496 Mai 2010

Les traitements locaux doivent toujours être appliqués sur une peau propre et sèche. Il est conseillé de répartir équitablement l’équiva-lent d’un “pois” de gel sur l’ensemble de la surface à traiter, puis de l’étaler en massant légèrement du bout des doigts, jusqu’à pénétration complète, sans jamais frotter.En début de traitement, ces médicaments peuvent entraîner une desquamation, une sécheresse de la peau, une sensation de brûlure ou de tiraillements, ainsi qu’un érythème. L’espacement des applications (un soir sur deux, par exemple) ou l’utilisation de formes moins concentrées permettent d’atténuer ces désagréments. Une recru-descence de l’acné s’observe également, de façon très fréquente, au début de leur utilisation, l’amélioration ne survenant alors que vers la 6e ou 8e semaine de traitement.Les traitements locaux sont généralement tous photosensibilisants et doivent donc être, de préférence, appliqués le soir. En période d’exposition au soleil, les applications doivent être suspendues et/ou une protection solaire d’indice maximal utilisée.Le peroxyde de benzoyle peut, quant à lui, provoquer une décoloration des draps, des taies d’oreiller et des vêtements.

Il est impératif de ne pas utiliser ces produits pendant la grossesse.

Les traitements par voie orale

– Les anti biotiques per os : les tétracyclines sont photosensibilisantes et sont contre-indi-quées pendant la grossesse et l’allaitement car elles peuvent provoquer des dyschro-mies dentaires. – L’isotrétinoïne (Roaccutane®, Procuta®)Le risque tératogène étant très élevé, certai nes précautions doivent être prises pendant le traitement sous isotrétinoïne. Tout d’abord, toute ordonnance d’iso-trétinoïne per os établie pour une femme en âge de procréer est désormais valable un mois et non renouvelable. Lors de l’ini-tiation du traitement tout comme chaque mois, la délivrance doit être effectuée au plus tard 7 jours après la réalisation d’un test de grossesse. Enfin, une contracep-tion rigoureuse est établie avant le début du traitement, maintenue pendant toute sa durée et poursuivie un cycle entier après son arrêt.Lors de la dispensation, le pharmacien doit vérifier que certaines mentions figurent sur l’ordonnance (tableau 1). Une élévation des transaminases hépati-ques, du cholestérol et des triglycérides est possible, une surveillance biologique est alors indispensable. L’isotrétinoïne asséchant les lèvres, les conjonctives et le nez, il faut conseiller d’uti-liser un stick à lèvres réparateur mais non allergisant ainsi que des larmes artificielles, d’éviter le port des lentilles de contact et d’appliquer une crème hydratante pour le visage (Effaclar H®, Cleanance AC®, Hyseac soin restructurant apaisant®…).

Il est proscrit d’utiliser d’autres médica-

ments contre l’acné, notamment à usage local, car une irritation, une brûlure ou une forte desquamation pourraient survenir.Le patient ne peut effectuer aucun don de sang pendant le traitement ni au cours du mois suivant son arrêt.– Le zinc (Rubozinc®)La prise de zinc doit se faire à distance des repas. L’association aux pansements gastriques et aux médicaments à base de calcium ou de fer doit être évitée car un risque de chélation existe. De même, les aliments à forte teneur en acide phytique (pain complet, germe de soja, grains de

maïs) doivent être exclus des repas suivant la prise de zinc.– L’hormonothérapie (éthinylestradiol + cyprotérone).

Renseigner sur le bilan biologiqueLe bilan biologique n’est obligatoire que dans le cadre d’une prescription d’iso trétinoïne per os et doit comprendre :– le dosage des transaminases, du cho-lestérol et des triglycérides qui doit être à nouveau effectué un mois après le début du traitement ; si le bilan est normal, il ne devra être réitéré que si des facteurs de risque tels que diabète, hyperlipidémie, alcoolisme ou obésité existent ;– le test sérologique de grossesse effectué mensuellement ainsi que cinq semaines après l’arrêt du traitement.

Orienter vers le médecinLe pharmacien doit orienter son patient vers une consultation médicale dans certains cas :– acné importante, généralisée et très inflammatoire ;– réaction d’hypersensibilité (éruption, rash cutané, prurit…) ou allergie ;– élévation importante des transaminases, du cholestérol et des triglycérides en cas de prise d’isotrétinoïne par voie orale. �

Stéphane Berthélémy

Pharmacien, Royan (17)

[email protected]

ImportantL’exposition au soleil ou aux rayons ultraviolets

doit être évitée pendant toute la durée

du traitement par voie orale.

Une acné importante et très inflammatoire requiert une orientation vers le généraliste ou le dermatologue.

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