Découvre un extrait de Le Mystère du livre disparu

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Tome 1 : Au secours de Peter Pan, de Pierdomenico Baccalario

et Eduardo Jáuregui

Illustration : Stefano Turconi

Emportés par une cascade gigantesque, ils plongèrent dans un chaos où se mêlaient tous les héros de la littérature…

Il était impossible d’en réchapper.

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LE RITE

— Comment ça, nous envoyer dans l’histoire ?demanda Anna.

— C’est impossible ! s’exclama Gabriel.— Bien sûr que c’est impossible, dit leur

tante en fermant d’un seul coup le livre noir eten passant la main sur la copie de Peter Pan.Mais le pistolet laser dans la main du capitaineCrochet l’est aussi. Les problèmes impossiblesexigent des solutions impossibles ! La questionest donc : qui va s’introduire dans l’histoire pourrécupérer le pistolet et le faire sortir du livre ?

— Nous ?— Vous voyez d’autres volontaires ? dit-elle

en regardant autour d’elle.— Mais… tu es sûre que… ?

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CHAPITRE 7

— Non, je ne suis sûre de rien ! répondit Beaen agitant les bras, exaspérée. Si ça se trouve,c’est une idée stupide, comme tout le monde n’acessé de me le répéter depuis deux jours. Maisbien sûr, les gens avec qui j’ai parlé étaient desadultes !

Elle s’agenouilla devant Gabriel et Anna.— J’ai besoin que vous, au moins, vous me

croyiez. Seuls les enfants ont une imaginationsuffisamment puissante pour faire ce que je vousdemande. Je dirais même plus : seuls certainsenfants. J’ai besoin que vous ayez confiance enmoi, et que vous preniez au sérieux l’idée qu’ilest possible de voler jusqu’au Pays imaginaire.Pouvez-vous le faire ? Pouvez-vous le croire ?

Peut-être fut-ce la façon dont elle le dit, avecsa voix profonde et séduisante. Peut-être fut-cel’éclat émeraude de ses yeux. Ou peut-être, plussimplement, fut-ce l’innocente fraîcheur qu’ilsportaient encore en eux, et qui leur permettaitde croire encore, au fond, que les dragons fabri-quaient peut-être réellement leurs nids quelquepart, à l’écart des scientifiques et de leursjumelles. Après tout, ils avaient toujours soup-


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LE RITE

— Comment ça, nous envoyer dans l’histoire ?demanda Anna.

— C’est impossible ! s’exclama Gabriel.— Bien sûr que c’est impossible, dit leur

tante en fermant d’un seul coup le livre noir eten passant la main sur la copie de Peter Pan.Mais le pistolet laser dans la main du capitaineCrochet l’est aussi. Les problèmes impossiblesexigent des solutions impossibles ! La questionest donc : qui va s’introduire dans l’histoire pourrécupérer le pistolet et le faire sortir du livre ?

— Nous ?— Vous voyez d’autres volontaires ? dit-elle

en regardant autour d’elle.— Mais… tu es sûre que… ?


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LE MYSTÈRE DU LIVRE DISPARU

çonné leur tante d’être une espèce de sorcière.Aujourd’hui, ils avaient la possibilité de le véri-fier, une fois pour toutes.

— Moi, je te crois, Bea, dit Anna en posantune main sur son épaule.

— Compte sur moi, renchérit Gabriel.

Plus tard, quand ils essayèrent de se rappelerle rite, ils constatèrent que leurs souvenirsétaient devenus flous. Cela leur échappait,comme les détails d’un rêve d’enfant. Bea quiéteignait les lumières de la librairie et allumaitles bougies, les étranges mots qu’elle prononçaittout en faisant trois fois le tour de l’espacesacré… et la conversation qui décida de tout,pendant laquelle ils parlaient encore comme s’ils’agissait d’un jeu.

— Avant de commencer, vous devez déciderqui vous serez dans l’histoire.

Gabriel regarda sa tante avec une expressionperplexe, mais sa sœur comprit tout de suite.

— Je veux être Wendy ! s’écria-t-elle.Son frère saisit aussitôt de quoi il était question.— Et moi, Peter !


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çonné leur tante d’être une espèce de sorcière.Aujourd’hui, ils avaient la possibilité de le véri-fier, une fois pour toutes.

— Moi, je te crois, Bea, dit Anna en posantune main sur son épaule.

— Compte sur moi, renchérit Gabriel.

Plus tard, quand ils essayèrent de se rappelerle rite, ils constatèrent que leurs souvenirsétaient devenus flous. Cela leur échappait,comme les détails d’un rêve d’enfant. Bea quiéteignait les lumières de la librairie et allumaitles bougies, les étranges mots qu’elle prononçaittout en faisant trois fois le tour de l’espacesacré… et la conversation qui décida de tout,pendant laquelle ils parlaient encore comme s’ils’agissait d’un jeu.

— Avant de commencer, vous devez déciderqui vous serez dans l’histoire.

Gabriel regarda sa tante avec une expressionperplexe, mais sa sœur comprit tout de suite.

— Je veux être Wendy ! s’écria-t-elle.Son frère saisit aussitôt de quoi il était question.— Et moi, Peter !


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CHAPITRE 7

— Non, non. Vous ne pouvez pas être Wendyou Peter, ni aucun autre personnage qui figuredéjà dans l’histoire.

Anna et Gabriel firent la moue, déçus.— Non, il faut qu’on invente deux nouveaux

personnages qui pourraient être dans l’histoire.— Nous serions deux nouveaux enfants per-

dus, alors ? suggéra Gabriel.Il songeait déjà à combien il s’amuserait au

Pays imaginaire, au sein du légendaire grouped’enfants sous les ordres de Peter Pan, à chasserles Indiens, lutter contre les pirates, et mêmevoler, avec l’aide de la poussière de fée.

— En réalité, je pensais plutôt à faire de vousdes pirates, dit leur tante. Ainsi, vous seriez plusproche du capitaine Crochet, et il serait plus facilede lui voler son pistolet.

— Ça me semble une bonne idée, acquiesçaAnna. Je pourrais être Anna Requin, la pirate laplus redoutée des Caraïbes ! Et toi, Gaby Navajas !

Mais Gabriel, voyant que ses rêves de joueravec Peter Pan et de faire la connaissance dessirènes étaient menacés, secoua furieusement latête.


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— Nous ne pouvons pas être des pirates :nous serions du mauvais côté ! objecta-t-il. Vousne vous rappelez pas toutes les choses horriblesque font les hommes du capitaine Crochet ? Ilstrahissent les Peaux-Rouges, et ils en assassinentplein ! Ils torturent les enfants perdus…

— Tu as peut-être raison, admit Bea. Maisdans ce cas, comment comptes-tu récupérer lepistolet laser ?

— C’est facile. Il suffira d’en parler à Peteret de lui demander son aide pour le chiper. Jesuis certain qu’une aventure pareille le ravira.Ou nous pourrions le subtiliser au moment oùPeter Pan sauve la princesse Lily la Tigresse, etoù les enfants perdus se battent contre lespirates. Ou quand Crochet organise son attaquesurprise contre la maison souterraine des enfantsperdus. Après tout, pour nous, ce ne sera pasune surprise, pas vrai ?

Bea sourit avec fierté à son neveu.— Je vois que tu connais l’histoire sur le bout

des doigts ! D’accord, vous serez des enfantsperdus.


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CHAPITRE 7

Ils décidèrent donc que Gabriel et Annaseraient un frère et une sœur qui, comme lesautres enfants perdus, s’étaient égarés dans leparc de Kensington Gardens à Londres, et quePeter Pan avait emmenés sur son île quand ilsétaient petits.

Minuit approchait. Beatriz s’installa devantla table ronde et ouvrit la copie de Peter Pan à lapage où les enfants perdus sont présentés pourla première fois. Elle ouvrit le flacon d’atramen-tum et demanda à chacun d’eux d’introduire leurpouce dans le flacon d’encre pour laisser uneempreinte en marge de la page.

Gabriel et Anna éprouvèrent la même sensa-tion quand leur peau entra en contact avecl’encre froide et visqueuse. Ils frissonnèrent. Cen’était ni douloureux ni désagréable, mais leliquide semblait s’insinuer dans les rugosités deleurs doigts comme s’il était vivant. Comme s’ilavait voulu fouiller dans la chair. Ensuite, quandils pressèrent leur pouce sur le papier, ils eurentl’impression qu’ils allaient rester collés. Ils furentpresque surpris de constater que leur doigt se


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— Nous ne pouvons pas être des pirates :nous serions du mauvais côté ! objecta-t-il. Vousne vous rappelez pas toutes les choses horriblesque font les hommes du capitaine Crochet ? Ilstrahissent les Peaux-Rouges, et ils en assassinentplein ! Ils torturent les enfants perdus…

— Tu as peut-être raison, admit Bea. Maisdans ce cas, comment comptes-tu récupérer lepistolet laser ?

— C’est facile. Il suffira d’en parler à Peteret de lui demander son aide pour le chiper. Jesuis certain qu’une aventure pareille le ravira.Ou nous pourrions le subtiliser au moment oùPeter Pan sauve la princesse Lily la Tigresse, etoù les enfants perdus se battent contre lespirates. Ou quand Crochet organise son attaquesurprise contre la maison souterraine des enfantsperdus. Après tout, pour nous, ce ne sera pasune surprise, pas vrai ?

Bea sourit avec fierté à son neveu.— Je vois que tu connais l’histoire sur le bout

des doigts ! D’accord, vous serez des enfantsperdus.


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soulevait facilement de la page. Ils avaient lesentiment que leurs pouces étaient reliés au livrepar un fil invisible.

Bea leur demanda de s’allonger sur le tapisrouge. Chacun s’installa d’un côté de la petitetable ronde, en posant la tête sur le coussinallongé.

— À présent, fermez les yeux, ordonna-t-elleen prenant la plume.

C’est à ce moment-là qu’ils se rendirent vrai-ment compte de ce qu’ils étaient sur le point defaire.

Ils s’apprêtaient à entrer dans l’histoire.Brusquement, la chose leur parut terriblement

réelle, et la peur les saisit.— Attends, Bea ! l’interrompit Anna en rou-

vrant les yeux. Que devrons-nous faire quandnous aurons réussi à voler le pistolet ? Et…comment sortirons-nous de l’histoire ?

Les yeux de Gabriel s’étaient ouverts égale-ment. Il était très pâle.

— Bonne question…Bea consulta le livre noir, faisant défiler une

page de hiéroglyphes après l’autre.


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CHAPITRE 7

— Ce n’est pas expliqué avec précision. Letexte répète des phrases telles que « laisse l’atra-mentum te guider », ou « demande à l’encre etelle parlera »… Je ne sais pas ce que ça veut dire,mais sans doute le comprendrez-vous quandvous serez dans le roman.

Juste à ce moment-là, l’horloge de la librairiese mit à sonner.

— Il est minuit. Je dois commencer, ou ça nefonctionnera pas.

Les enfants refermèrent les yeux.— Une dernière chose ! s’exclama Beatriz, ce

qui leur fit rouvrir les yeux en sursaut. J’ai faillioublier. Vous ne devez jamais dire à personneque vous venez du monde réel. Sinon, tout leroman pourrait disparaître. Compris ?

— Compris ! dirent-ils à l’unisson en refer-mant les yeux pour la dernière fois.

Pendant que l’horloge terminait de sonner,l’odeur douceâtre de la cire fondue des bougiespénétrait dans leurs narines, et la lumièrevacillante des quatre flammes tressautait sur lafine membrane de leurs paupières, créant desformes et des ombres capricieuses qui dansaient


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soulevait facilement de la page. Ils avaient lesentiment que leurs pouces étaient reliés au livrepar un fil invisible.

Bea leur demanda de s’allonger sur le tapisrouge. Chacun s’installa d’un côté de la petitetable ronde, en posant la tête sur le coussinallongé.

— À présent, fermez les yeux, ordonna-t-elleen prenant la plume.

C’est à ce moment-là qu’ils se rendirent vrai-ment compte de ce qu’ils étaient sur le point defaire.

Ils s’apprêtaient à entrer dans l’histoire.Brusquement, la chose leur parut terriblement

réelle, et la peur les saisit.— Attends, Bea ! l’interrompit Anna en rou-

vrant les yeux. Que devrons-nous faire quandnous aurons réussi à voler le pistolet ? Et…comment sortirons-nous de l’histoire ?

Les yeux de Gabriel s’étaient ouverts égale-ment. Il était très pâle.

— Bonne question…Bea consulta le livre noir, faisant défiler une

page de hiéroglyphes après l’autre.


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comme des sorcières autour d’un chaudron. Ledernier coup de minuit se confondit avec la voixde Beatriz, qui ressemblait désormais vraimentà celle d’une prêtresse égyptienne.

La langue antique et étrange se déversa dansleurs oreilles telle une rivière d’encre noire,virant et coulant jusqu’à l’océan immense deleur imagination, un océan plein de possibilitésvertigineuses, de merveilles et de dangers. Parmiles paroles incompréhensibles que prononçaitBeatriz, un seul mot surnageait comme un kra-ken surgi des profondeurs de l’eau : « Thot…Thot… Thot… »

Quand ils s’enfoncèrent dans cet océan obscur,le frémissement né sur leurs pouces commençaà s’étendre et à se transformer, engourdissanttoute la main, puis l’avant-bras, puis le coude.En quelques secondes, leurs épaules furent tou-chées ; avec horreur, ils le sentirent ensuite dansleur poitrine, dans leur cœur, dont les batte-ments évoquaient désormais la houle d’un océantourmenté. À ce moment-là, Anna essaya decrier, et Gabriel commença à être parcouru desecousses terribles tandis qu’il essayait en vain


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comme des sorcières autour d’un chaudron. Ledernier coup de minuit se confondit avec la voixde Beatriz, qui ressemblait désormais vraimentà celle d’une prêtresse égyptienne.

La langue antique et étrange se déversa dansleurs oreilles telle une rivière d’encre noire,virant et coulant jusqu’à l’océan immense deleur imagination, un océan plein de possibilitésvertigineuses, de merveilles et de dangers. Parmiles paroles incompréhensibles que prononçaitBeatriz, un seul mot surnageait comme un kra-ken surgi des profondeurs de l’eau : « Thot…Thot… Thot… »

Quand ils s’enfoncèrent dans cet océan obscur,le frémissement né sur leurs pouces commençaà s’étendre et à se transformer, engourdissanttoute la main, puis l’avant-bras, puis le coude.En quelques secondes, leurs épaules furent tou-chées ; avec horreur, ils le sentirent ensuite dansleur poitrine, dans leur cœur, dont les batte-ments évoquaient désormais la houle d’un océantourmenté. À ce moment-là, Anna essaya decrier, et Gabriel commença à être parcouru desecousses terribles tandis qu’il essayait en vain


CHAPITRE 7

d’ouvrir les yeux. Emportés par une cascadegigantesque, ils plongèrent dans un chaos où semélangeaient tous les héros et les méchantsinventés par la littérature. Des batailles et des his-toires d’amour se déroulaient tout autour d’eux.Des rires, des baisers, des cris et des discussionss’élevaient simultanément, formant une caco-phonie insupportable. Des trames entières, descomplots sinistres et des stratégies ingénieusesse tissaient telles des toiles d’araignées. Nais-sances, mariages, enterrements pleuvaient enune averse torrentielle. Des tonnes d’encre gout-taient, dégoulinaient et tourbillonnaient jusqu’àse jeter dans un ouragan noir de plus en plusgrand. Il était impossible d’en réchapper. Anna etGabriel étaient plus qu’assommés par cette merfurieuse aux vagues gigantesques. Ils s’étaientdéjà noyés.


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