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ARTICLE IN PRESS G Model Revue du rhumatisme xxx (2013) xxx–xxx Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Mise au point De la discrimination du soi à la perception du « Danger » : l’évolution des grands concepts immunologiques Marie-Élise Truchetet a,,b,c , Christophe Richez a,b , Cécile Contin-Bordes b , Patrick Blanco b , Jean-Franc ¸ ois Moreau b , Cécile Bébéar c,d , Thierry Schaeverbeke a,c,d a Département de rhumatologie, hôpital Pellegrin, CHU de Bordeaux, place Amélie-Raba-Léon, 33076 Bordeaux, France b UMR-CNRS 5164, université de Bordeaux, 33076 Bordeaux, France c USC EA 3671, infections à mycoplasmes et à chlamydiae chez l’homme, université de Bordeaux, 33076 Bordeaux, France d Inra, USC EA 3671, infections à mycoplasmes et à chlamydiae chez l’homme, 33882 Bordeaux, France i n f o a r t i c l e Historique de l’article : Accepté le 24 janvier 2013 Disponible sur Internet le xxx Mots clés : Immunité innée Immunité adaptative Modèle Danger Signal non-danger Auto-immunité Inflammation r é s u m é La défense face aux pathogènes et le contrôle de l’intégrité de l’organisme sont les fonctions cardinales du système immunitaire. La volonté de comprendre les mécanismes qui sous-tendent ces deux fonc- tions a généré différentes théories depuis le début du xx e siècle. Du concept soi/non-soi au modèle « Danger », l’horizon immunologique s’est considérablement élargi. Nous proposons, dans cette mise au point, d’évaluer l’évolution des concepts de réponse anti-infectieuse et d’auto-immunité à travers l’évolution de ces différents modèles, en soulignant les limites et les avantages de chacun d’entre eux. Sur ces bases, nous proposons un modèle « Danger augmenté » intégrant notamment le rôle des flores symbiotiques et du signal non-danger. © 2013 Société Franc ¸ aise de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Les fonctions cardinales du système immunitaire sont le contrôle de l’intégrité de l’organisme et la défense face aux agents infectieux. Depuis le début du xx e siècle, le raisonne- ment immunologique s’est fondé sur des modèles théoriques validés secondairement, parfois bien plus tardivement, par l’expérimentation. Notre incapacité à expliquer parfaitement les phénomènes observés réside probablement dans l’imperfection de ces modèles. Nous proposons, dans cette mise au point, d’analyser l’évolution de ces modèles, des prémices de la distinction du soi et du non-soi (SNS) jusqu’au modèle Danger (Fig. 1), et suggérons des bases de réflexion pour compléter ce dernier concept en intégrant le rôle des barrières et du microbiote. 1. Concept du soi/non-soi 1.1. Description de la théorie Dès le début du xx e siècle, la spécificité de la réponse immuni- taire a été démontrée par la mise en évidence de la spécificité de l’anticorps pour l’antigène dans une conception purement humo- rale de l’immunité [1]. Cette spécificité s’acquiert par un premier contact avec l’antigène. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M.-É. Truchetet). L’immunité était alors exclusivement perc ¸ ue comme la défense de l’hôte vis-à-vis de l’extérieur, et ce jusqu’à la mise en évi- dence du premier auto-anticorps par Waaler en 1939 : le facteur rhumatoïde [2]. Le concept d’auto-immunité apparaît alors. La spécificité vaut pour un antigène étranger comme pour un antigène endogène. Une notion essentielle émerge : le système immunitaire doit effectuer une discrimination entre antigènes endogènes et exogènes. Macfarlane Burnet introduisit dès 1949 le concept de soi/non- soi (SNS) [3]. La discrimination du soi et du non-soi doit être le fruit d’une éducation précoce du système immunitaire, dans les premières années de la vie. Le système immunitaire est ini- tialement capable de répondre à tout type d’antigène (xéno- ou auto-antigènes), le processus d’éducation et de sélection clonale permettant ultérieurement d’éliminer les cellules auto-réactives. Un argument expérimental est apporté peu de temps après par Medawar et al., qui greffent des splénocytes par perfusion intra- veineuse à des souris in utero et montrent que ces souris tolèrent spécifiquement la peau des sujets donneurs de splénocytes, mais pas de toute autre souche de souris [4]. Burnet [5] suggère que : chaque lymphocyte exprime de multiples copies d’un récepteur de surface unique spécifique d’un antigène étranger ; l’activation de ce récepteur par fixation de l’antigène initie la réponse immunitaire (actuel premier signal) ; 1169-8330/$ see front matter © 2013 Société Franc ¸ aise de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.rhum.2013.01.012 REVRHU-4173; No. of Pages 7

De la discrimination du soi à la perception du « Danger » : l’évolution des grands concepts immunologiques

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Revue du rhumatisme xxx (2013) xxx–xxx

Disponible en ligne sur

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e la discrimination du soi à la perception du « Danger » : l’évolution des grandsoncepts immunologiques

arie-Élise Trucheteta,∗,b,c, Christophe Richeza,b, Cécile Contin-Bordesb, Patrick Blancob,ean-Franc ois Moreaub, Cécile Bébéarc,d, Thierry Schaeverbekea,c,d

Département de rhumatologie, hôpital Pellegrin, CHU de Bordeaux, place Amélie-Raba-Léon, 33076 Bordeaux, FranceUMR-CNRS 5164, université de Bordeaux, 33076 Bordeaux, FranceUSC EA 3671, infections à mycoplasmes et à chlamydiae chez l’homme, université de Bordeaux, 33076 Bordeaux, FranceInra, USC EA 3671, infections à mycoplasmes et à chlamydiae chez l’homme, 33882 Bordeaux, France

i n f o a r t i c l e

istorique de l’article :ccepté le 24 janvier 2013isponible sur Internet le xxx

r é s u m é

La défense face aux pathogènes et le contrôle de l’intégrité de l’organisme sont les fonctions cardinalesdu système immunitaire. La volonté de comprendre les mécanismes qui sous-tendent ces deux fonc-tions a généré différentes théories depuis le début du xxe siècle. Du concept soi/non-soi au modèle

ots clés :mmunité innéemmunité adaptative

odèle Dangerignal non-danger

« Danger », l’horizon immunologique s’est considérablement élargi. Nous proposons, dans cette miseau point, d’évaluer l’évolution des concepts de réponse anti-infectieuse et d’auto-immunité à traversl’évolution de ces différents modèles, en soulignant les limites et les avantages de chacun d’entre eux.Sur ces bases, nous proposons un modèle « Danger augmenté » intégrant notamment le rôle des floressymbiotiques et du signal non-danger.

© 2013 Société Franc aise de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

uto-immuniténflammation

Les fonctions cardinales du système immunitaire sont leontrôle de l’intégrité de l’organisme et la défense face auxgents infectieux. Depuis le début du xxe siècle, le raisonne-ent immunologique s’est fondé sur des modèles théoriques

alidés secondairement, parfois bien plus tardivement, par’expérimentation. Notre incapacité à expliquer parfaitement leshénomènes observés réside probablement dans l’imperfection dees modèles. Nous proposons, dans cette mise au point, d’analyser’évolution de ces modèles, des prémices de la distinction du soi etu non-soi (SNS) jusqu’au modèle Danger (Fig. 1), et suggérons desases de réflexion pour compléter ce dernier concept en intégrant

e rôle des barrières et du microbiote.

. Concept du soi/non-soi

.1. Description de la théorie

Dès le début du xxe siècle, la spécificité de la réponse immuni-

aire a été démontrée par la mise en évidence de la spécificité de’anticorps pour l’antigène dans une conception purement humo-ale de l’immunité [1]. Cette spécificité s’acquiert par un premierontact avec l’antigène.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (M.-É. Truchetet).

169-8330/$ – see front matter © 2013 Société Franc aise de Rhumatologie. Publié par Elsttp://dx.doi.org/10.1016/j.rhum.2013.01.012

L’immunité était alors exclusivement perc ue comme la défensede l’hôte vis-à-vis de l’extérieur, et ce jusqu’à la mise en évi-dence du premier auto-anticorps par Waaler en 1939 : le facteurrhumatoïde [2].

Le concept d’auto-immunité apparaît alors. La spécificité vautpour un antigène étranger comme pour un antigène endogène. Unenotion essentielle émerge : le système immunitaire doit effectuerune discrimination entre antigènes endogènes et exogènes.

Macfarlane Burnet introduisit dès 1949 le concept de soi/non-soi (SNS) [3]. La discrimination du soi et du non-soi doit êtrele fruit d’une éducation précoce du système immunitaire, dansles premières années de la vie. Le système immunitaire est ini-tialement capable de répondre à tout type d’antigène (xéno- ouauto-antigènes), le processus d’éducation et de sélection clonalepermettant ultérieurement d’éliminer les cellules auto-réactives.

Un argument expérimental est apporté peu de temps après parMedawar et al., qui greffent des splénocytes par perfusion intra-veineuse à des souris in utero et montrent que ces souris tolèrentspécifiquement la peau des sujets donneurs de splénocytes, maispas de toute autre souche de souris [4].

Burnet [5] suggère que :

• chaque lymphocyte exprime de multiples copies d’un récepteurde surface unique spécifique d’un antigène étranger ;

• l’activation de ce récepteur par fixation de l’antigène initie laréponse immunitaire (actuel premier signal) ;

evier Masson SAS. Tous droits réservés.

REVRHU-4173; No. of Pages 7

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2 M.-É. Truchetet et al. / Revue du rhumatisme xxx (2013) xxx–xxx

Fig. 1. Évolution des modèles immunologiques. a : le modèle de Burnet met en avant la discrimination entre le soi et le non-soi (SNS), et pose les bases de la reconnaissancebactérienne par les lymphocytes B (Lc B) ; b : le centre de contrôle de la réaction immunitaire est rapidement déplacé vers le lymphocyte T (Lc T) via la reconnaissance indirectede l’antigène apprêté, puis présenté par le Lc B par l’intermédiaire du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) ; c : le chef d’orchestre de la réponse immunitaire estla cellule dendritique dans le modèle du non-soi infectieux (NSI), et le signal (sig.) 1 de la reconnaissance de l’antigène s’accompagne du sig. 2, qui est la co-stimulation etdu sig. 3, constitué de la sécrétion de cytokines pro-inflammatoires. Elle reconnaît, via les Toll-like receptor (TLR), et est activée par des motifs du NSI hautement conservés,les Pathogen-Associated Pattern (PAMP) ; d : le modèle Danger déplace encore le niveau de contrôle de la réponse plus en amont vers les tissus lésés, qui peuvent être lesite de la libération de Danger-Associated Molecular Pattern (DAMP), permettant de placer la cellule dendritique dans un niveau d’alerte propice à l’activation des Lc T aprèsr ns quev r. TCRc

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econnaissance de PAMP ; e : dans un modèle de danger augmenté, nous proposoia notamment la présence de cellules stromales sécrétant des signaux non-dangeonsidéré comme contrôle pour chaque modèle.

les lymphocytes auto-réactifs sont éliminés très tôt dans lavie.

Ce modèle apporte les bases de la tolérance immunitaire auoi. L’auto-immunité, considérée comme une erreur du proces-us d’éducation et de sélection, est une rupture de cette tolérancecquise dans les premières années de vie.

Différents marqueurs du soi ont été découverts : les groupes san-uins ABO, puis le système Rhésus, et en 1958, le complexe majeur’histocompatibilité (CMH) par Jean Dausset [6]. Les molécules duMH sont initialement considérées comme de simples marqueursu soi avant d’être incluses dans un processus plus complexe : laestriction H2. Le lymphocyte T ne reconnaît l’antigène que lorsqu’ilst présenté par une molécule du CMH [7,8].

.2. Les limites

Le concept du SNS s’est rapidement heurté à plusieursifficultés :

comment expliquer l’absence de rejet du fœtus ;l’évolution du soi à l’adolescence et au cours du vieillissement,

états caractérisés par l’expression d’épitopes non présents dansl’enfance ;la présence de T auto-réactifs et d’auto-anticorps naturels chezl’individu non malade ;

le tissu de soutien environnant soit capable de moduler la réponse immunitaire : T cell receptor, les zones grisées indiquent le niveau de la réponse immunitaire

• la nécessité d’un adjuvant pour induire une réponse immunitairelors des vaccinations.

2. Le modèle du non-soi infectieux

2.1. Description de la théorie

L’immunité a deux composantes distinctes sur le plan qualita-tif et temporel : l’une est précoce, aspécifique et rapide, il s’agit del’immunité innée et l’autre est spécifique et plus lente à se mettreen place, c’est l’immunité adaptative. La recrudescence de l’intérêtporté à l’étude de l’immunité innée à partir des années 1970 a favo-risé en grande partie l’élaboration de la théorie du NSI [9]. Unantigène doit non seulement être reconnu par le récepteur lym-phocytaire, mais il doit aussi être capté, apprêté et présenté par unecellule exprimant une molécule du CMH, la cellule présentatrice del’antigène (CPA) [10,11]. Comment cette cellule identifie-t-elle lastructure étrangère ? Comment parvient-elle à activer la cellule àlaquelle elle présente l’antigène ?

Janeway propose un nouveau paradigme, dans lequell’immunité innée devient le chef d’orchestre du système immuni-

taire. La décision de répondre ou non à un antigène repose sur lareconnaissance par les CPA de motifs étrangers par des récepteurshypothétiques qu’il appelle Pattern Recognition Receptors (PRR)[12,13].
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Les CPA sont activées via ces PRR, dédiés à la reconnaissancee molécules issues d’agents phylogénétiquement très distants de

’homme, appelées Pathogen-associated Molecular Patterns (PAMP).es molécules ancestrales précédant, sur le plan évolutif, le déve-

oppement des organismes vertébrés contrôleraient la réponsennée et l’ensemble du système immunitaire. Cette modification

ajeure du système SNS est connue sous le nom de modèle duon-soi infectieux (NSI).

.2. Les preuves de concept

Les cellules dendritiques (CD), CPA professionnelles, ont étéécouvertes par Ralph Steinman [14,15]. Ce sont des cellules poten-iellement mobiles qui sont normalement présentes dans les tissusous forme immature. Au cours de leur maturation, elles exprimentes molécules de co-stimulation [16] et produisent les cytokinesécessaires à l’induction de la réponse adaptative. Il s’agit res-ectivement des second et troisième signaux, après le premierignal constitué par la présentation antigénique par le CMH. Lao-stimulation est fondamentale pour activer le lymphocyte T. Sia CD est immature (non activée), elle n’exprime pas de molé-ules de co-stimulation ; elle peut toujours présenter un antigèneu lymphocyte T, mais induit une tolérance à l’antigène [17]. Leaintien de l’homéostasie immunologique est également assuré

ar les lymphocytes T régulateurs induits. Ceux-ci dépendent dea présentation d’antigènes par la CPA dans un microenvironne-

ent riche en TGF-ß et IL-2 [18]. La tolérance n’est plus seulemententrale thymique et réservée aux premières années de vie. La ren-ontre de la CD activée et du lymphocyte spécifique de l’antigènest un élément clé de la réponse adaptative. L’activation de laD par les PAMP entraîne sa migration dans l’organe lymphoïdeecondaire le plus proche, ce qui favorise sa rencontre avec lesymphocytes T. Leur aptitude à induire une tolérance périphériqueu une réponse serait conditionnée par le nombre des CD acti-ées et l’environnement inflammatoire au site de leur activation19].

La description des Toll-like receptors (TLR) validera quelquesnnées plus tard le concept de PRR. La protéine Toll de la Droso-hila melanogaster, initialement impliquée dans la différentiationorso-ventrale, est identifiée comme une composante majeuree la réponse immunitaire innée chez ces insectes [20]. Rapi-ement, Janeway et al. clonent puis décrivent un homologuehez l’homme qu’ils appellent TLR [21]. L’activation de ce TLRTLR4) induit l’activation de la CPA, l’expression de molécules deo-stimulation et la sécrétion de cytokines pro-inflammatoires per-ettant l’activation de cellules T. Beutler complète le modèle enontrant que TLR4 reconnaît des lipopolysaccharides (LPS) bacté-

iens [22]. Par la suite, d’autres TLR et d’autres familles de PRR sontécrits, accréditant le concept de pattern recognition [23].

La discrimination mise en place par le système immunitairenné n’est pas aussi spécifique que celle du système adaptatif.ependant, le type de PRR mis en jeu contribue à l’orientation de

a polarisation de la réponse adaptative vers la voie Th1, Th2 ouh17. La sécrétion d’IL-12 (cytokine pro-Th1) est largement induitear la stimulation des TLR4 tandis que celle d’IL-23 (pro-Th17) estréférentiellement induite par stimulation du TLR2 [24,25]. Unathogène donné n’est pas reconnu par un TLR unique mais parn groupe de TLR, tel un code barre, dépendant de la nature de

’ensemble des PAMP caractérisant la bactérie. Enfin, une fonctione discrimination entre soi et non-soi des TLR intracellulaires até identifiée. Elle permettrait à la CD de classifier la source de’antigène et de générer des complexes peptides-CMH phagoso-

aux plus ou moins associés à des molécules de co-stimulation26]. La capacité activatrice sur les CD de l’ARN bactérien compa-ée à celle de l’ARN des mammifères a été notamment attribuée àa moindre richesse en nucléosides méthylés [27]. De plus, chaque

PRESSmatisme xxx (2013) xxx–xxx 3

motif étranger selon sa nature est reconnu de manière différentepar les TLR, notamment endosomaux, ce qui explique en partie lavariation de la réponse induite [28].

Le système immunitaire est à la fois informé de la nature del’agression et du moyen le plus approprié pour la combattre.

2.3. Les limites

Le glissement du modèle SNS à celui de NSI élargit spectacu-lairement l’horizon immunologique. Cependant, des incohérencessubsistent :

• la tolérance aux commensaux ;• le rejet de greffe ;• l’auto-immunité ;• la reconnaissance par les TLR de motifs endogènes ;• le mode d’action des adjuvants non bactériens.

Même la réponse anti-infectieuse n’est pas totalement expli-quée par ce modèle [29] : comment expliquer qu’elle diffère s’ils’agit d’un PAMP isolé ou d’une bactérie entière ? D’une bactériemorte ou vivante ?

3. Le concept de danger

Parallèlement à l’avènement du modèle du NSI, Matzinger déve-loppe une théorie dont le postulat initial est radicalement différentdes précédentes. Si la discrimination existe toujours, le systèmeimmunitaire ne réagit pas spécifiquement à ce qui est étranger maisuniquement à ce qui est dangereux [30].

3.1. Description de la théorie

Dans le modèle du NSI, le contrôle de la réponse immunitairea été déplacé du lymphocyte T à la CPA. Cependant, pour Mat-zinger, Janeway commet la même erreur que Burnet. Le modèleSNS n’intégrait pas la nécessité d’activer le lymphocyte T (secondsignal). De la même manière, le système du NSI n’explique pas com-ment la CPA est activée pour être capable de stimuler en aval lescellules T [14]. Le modèle Danger déplace le contrôle en amont :jusqu’aux cellules constituant les tissus où résident les CPA. Poursolliciter le système immunitaire, les CPA doivent être activées pardes molécules endogènes, issues du tissu environnant [31,32].

Selon le modèle Danger, quand un tissu est lésé, il exprimedes signaux appelés Danger-Associated Molecular Patterns (DAMP).Ceux-ci induisent la maturation des CPA. Elles sont sensibili-sées aux PAMP environnants qui sont perc us comme dangereuxpuisqu’associés à une perturbation du métabolisme cellulaire ou àune destruction tissulaire ; elles déclenchent alors une réponse dusystème immunitaire. Ce modèle suggère que le système immuni-taire est spontanément en position « off » (tolérance), l’activation seproduit quand un signal danger est émis. L’acquisition de la tolé-rance du système immunitaire ne se limite pas à une éducationlymphocytaire dans le thymus et à l’ontogénie précoce, commedans le modèle du SNS. Les antigènes qui apparaissent au coursde la vie de l’hôte (du soi ou du non-soi) sont naturellement tolé-rés tant qu’ils apparaissent en dehors de tout signal danger. Cettethéorie expliquerait très naturellement la tolérance des flores sym-biotiques, la tolérance fœtale et la tolérance des tumeurs.

3.2. Les preuves de concept

Comme pour le modèle du NSI de Janeway, les preuves ont com-mencé à s’accumuler après la genèse du concept.

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4 M.-É. Truchetet et al. / Revue du rhumatisme xxx (2013) xxx–xxx

Fig. 2. Place de l’inflammasome dans le modèle Danger. La cellule dendritiqueest présente dans les tissus, quiescente, mais avec des senseurs prêts à cap-ter différents motifs : les Toll-like receptor (TLR). Lors de la reconnaissance d’unPathogen-Associated Molecular Pattern (PAMP), le TLR active la voie NF-�B. Le pro-moteur du gène de la pro-IL1� contient de multiples éléments de réponse à NF-�B.Un pool de pro-IL1� est synthétisé, ce qui arme la cellule dendritique. Si par ailleursles senseurs intracellulaires (NLRP : NOD Like Receptor Protein par exemple) captentdsa

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Fig. 3. Mort cellulaire et signal danger. Les cellules du système immunitaireexpriment des Toll-like receptor (TLR) capables de reconnaître des Damage-AssociatedMolecular Pattern (DAMP) normalement cachés à l’intérieur des cellules. À l’occasiond’un stress, un processus de nécrose peut s’enclencher et aboutir à la rupture dela membrane cellulaire avec libération et exposition des DAMP cachés. Ils sontreconnus par le TLR ad hoc et la réponse inflammatoire débute. Dans le cadre durenouvellement cellulaire, l’apoptose est la mort cellulaire privilégiée. Dans ce cas,

es signaux dangers ou Danger-Associated Molecular Pattern (DAMP) traduisant untress cellulaire, l’inflammasome se forme et clive la pro-IL1� en IL1�, déclenchantinsi une réponse inflammatoire.

.2.1. Toll-like receptors et ligands endogènesLes TLR, initialement décrits comme des récepteurs reconnais-

ant des PAMP étrangers, sont en fait également capables deeconnaître des molécules endogènes. La plupart de ces moléculesndogènes sont issues de la mort cellulaire ou de la dégradation dea matrice extracellulaire : matériel nucléique, fraction hydrophobee lipoprotéines membranaires. . . [33,34].

Ces molécules endogènes ne sont accessibles aux TLR que danses situations anormales où l’hôte doit se défendre pour parer

une agression. Par ailleurs, d’autres récepteurs équivalents ontté mis en évidence au sein du cytosol : les récepteurs Nucleotide-inding Oligomerization Domain (NOD), également impliqués dansette double reconnaissance de motifs exogènes et endogènes.

.2.2. Les récepteurs Nucleotide-binding Oligomerizationomain, Pattern Recognition Receptors intracytoplasmiques

Les récepteurs NOD sont une famille composée de trois enti-és : les NOD, les NOD Leucine rich Repeat and Pyrin domainontaining (NLRP), et un groupe distinct formé par ICE Protease-ctivating Factor (IPAF) et Neuronal Apoptosis Inhibitory ProteinNAIP) [35]. Ces récepteurs, décrits il y a une dizaine d’années,ont susceptibles de détecter la présence de composants bacté-iens intracytoplasmiques, comme le muramyl dipeptide [36]. On aécouvert quelques années plus tard que certains de ces récepteursont capables, lorsqu’ils ont fixé leur ligand, d’induire la forma-ion d’un composant majeur de l’activation de l’immunité innée :’inflammasome.

.2.3. L’inflammasome : structure de détection et d’interprétationu signal danger

L’inflammasome correspond à un complexe protéique associantn récepteur, une ou plusieurs protéines d’assemblage et la caspase

. La formation de l’inflammasome entraîne l’activation de la cas-ase 1, qui a comme principale fonction de cliver les précurseurs

nactifs de l’IL-1 ou de l’IL-18 en cytokines actives, l’IL-1 étant unédiateur majeur de la réaction inflammatoire [37] (Fig. 2).

il y a formation de corps apoptotiques sans rupture de l’intégrité membranaire. Cesfragments cellulaires sont phagocytés rapidement sans que les DAMP intracellu-laires ne soient exposés. Il n’y a pas de réponse inflammatoire.

3.2.4. Nature et variété des signaux dangers détectés parl’inflammasome

Les signaux détectés par les NLRP comme la NLRP3 sont majo-ritairement des particules endogènes, normalement séquestréesdans des compartiments cellulaires, et dont la présence à l’étatlibre témoigne d’un dysfonctionnement cellulaire. Ces DAMP sonttrès variés : radicaux oxygénés, particules de silice ou d’alumine,cristaux d’urate, baisse du contenu cellulaire en potassium, influxd’ATP, ou simple stress hypotonique [38]. La mort cellulaire estun phénomène majeur dans le modèle Danger. La nécrose résulted’une agression et est pourvoyeuse de nombreux DAMP ; elleinduit logiquement une réponse immunitaire [39]. Au contraire,l’apoptose, mort cellulaire « normale » ou programmée en réponse àdes stimuli non dangereux, n’entraîne pas la libération de matérielnucléaire ou cytosolique mais la phagocytose des corps apopto-tiques [40,41] (Fig. 3).

3.3. Cohérences et limites

Le modèle Danger explique beaucoup mieux que les modèlesprécédents un certain nombre de phénomènes :

• la tolérance du fœtus pendant la grossesse ;• la tolérance aux nouveaux auto-antigènes apparaissant au cours

de la vie ;• la discrimination entre flore commensale et bactéries patho-

gènes ;• l’incapacité du système immunitaire à réagir à un tissu tumoral

(pas ou peu de signaux dangers émis par les cellules tumorales) ;• la meilleure tolérance à un transplant sans ischémie froide, issu

d’un donneur vivant.

Cependant, plusieurs limites subsistent. Le modèle Danger sug-gère que le système immunitaire est spontanément en position de

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olérance et qu’il ne réagit que s’il est activé par un signal danger. Or,n biologie, tout système activable repose sur un couple activateur-épresseur. On a montré ces dernières années qu’il existe designaux « safe » ou « non-danger ». Enfin, les bactéries commensalesont loin d’être passives : elles peuvent utiliser la signalisation cel-ulaire humaine et manipuler le système immunitaire à leur profit.

.4. Ce que devrait prendre en compte un modèle Danger augmenté »

.4.1. L’existence de signaux non-dangerSi l’origine du signal d’activation se situe au niveau des tissus

ériphériques où résident les CPA, c’est également là qu’il faut envi-ager l’expression d’un signal non-danger, susceptible de stoppera réponse immunitaire ou d’éviter son emballement. Les cellulesouches mésenchymateuses (CSM) semblent être de bonnes can-idates pour jouer ce rôle [42]. Elles exercent des effets inhibiteursur la prolifération des cellules T CD4+ et CD8+ et seraient uneource majeure de signaux inhibiteurs du système immunitaire43]. Par ailleurs, ces cellules sont présentes dans de nombreuxissus comme le foie ou encore la synoviale.

D’autres cellules peuvent jouer un rôle majeur dans la toléranceériphérique et sont à intégrer au modèle : il s’agit des lymphocytes

régulateurs. Ils peuvent être de deux types : naturels, dérivés duhymus, et induits. Ces derniers, générés notamment à partir de T

atures lorsque l’environnement ne contient pas de signaux dan-ers, participent au maintien de l’homéostasie immunologique pare biais de la production de cytokines anti-inflammatoires comme’IL-10 [18].

Les signaux non-danger peuvent être classés en deux catégo-ies :

ceux qui suppriment la réponse immunitaire ; il s’agit parexemple de l’indoléamine 2,3-dioxygenase (IDO) et de laPGE2 notamment [44,45], produites entre autres par les CSM ;ceux qui assurent la clairance des molécules pro-inflammatoires ;les CSM présentent à leur surface des récepteurs pour les molé-cules de l’inflammation. Il a été suggéré que la combinaisonligands-récepteurs de surface sur les CSM participerait en grandepartie au nettoyage des molécules pro-inflammatoires.

L’efficacité in vivo du potentiel immunorégulateur des CSM a étéestée. Augello et al. ont démontré l’intérêt d’une injection de CSMans la prévention de l’arthrite induite au collagène [46]. Cepen-ant, l’administration des CSM après le début de la pathologie n’estas efficace [47]. Des observations similaires ont été effectuéesvec d’autres cellules stromales comme les fibroblastes dermiques48,49].

.4.2. La manipulation du système immunitaire par les floresolonisant les muqueuses

Une lecture stricte du modèle Danger amènerait à conclure quees symbiontes n’entraînent aucune réponse immunitaire puisqu’ils’induisent pas de signal danger. En fait, les symbiontes parti-ipent à l’éducation du système immunitaire de l’hôte et ont unerande influence sur ses orientations. Les relations entre l’hôte eton microbiote ne constituent pas une guerre froide où chacun estur ses gardes, où rien ne filtre, où les barrières sont infranchis-ables. Il s’agit plutôt d’un dialogue permanent. Le développemente l’immunité des muqueuses est dépendant des bactéries qui leolonisent et le microbiote ne participe pas uniquement à la défensear simple compétition avec les bactéries pathogènes, mais favorise

ussi une réponse immunitaire spécifique.

Le microbiote digestif influence la balance Th1/Th2 ainsi quea polarisation vers la voie Th17. À titre d’exemple, les cellulesh17 n’existent pas dans la lamina propria de souris axéniques

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(germ-free). La colonisation par les bactéries filamentaires segmen-tées suffit à la constitution d’un pool de cellules Th17. Ce rôle desbactéries de la flore intestinale a notamment été étudié dans desmodèles murins gnotobiotiques (à flore digestive contrôlée). Lesbactéries filamentaires induisent une différenciation Th17, qui aun rôle majeur dans la réponse inflammatoire vis-à-vis de patho-gènes intracellulaires, notamment dans les infections fungiques.Cette utilisation du système immunitaire par la bactérie lui permetde lutter contre ses propres compétiteurs, mais cette promotion dela voie Th17 a d’autres conséquences pour l’hôte : s’il résiste mieuxaux pathogènes, il devient parallèlement plus sensible aux arthritesou encéphalites expérimentales, qui reproduisent les maladiesauto-immunes humaines [50]. Une dépendance étroite existe entreTh17 et microbiote avec une influence directe sur les pathologiesauto-immunes dans lesquelles cette voie est impliquée.

Matzinger et al. ont montré qu’il existe un dialogue tripartitedans l’intestin de souris entre le microbiote, l’épithélium et leslymphocytes B [51]. La puissance et le type de la réponse doiventêtre pris en compte : il ne s’agit pas d’un mécanisme on/off maisd’une modulation adaptée à l’environnement local. Ainsi la naturede la réponse immunitaire, qui est classiquement décrite commeintimement liée à la nature du microorganisme en cause, pourraitdépendre au moins en partie du tissu environnant, expliquant parexemple une réponse humorale à IgA au niveau d’une muqueuse,à IgM ou IgG pour une infection systémique.

Il s’agit d’une évolution majeure du modèle Danger, puisquele dialogue « tissu–microorganisme » n’aurait plus seulement pourrôle « d’allumer ou d’éteindre » la réponse immunitaire, il contrôle-rait également la nature de la réponse [52].

3.5. Le modèle Danger « augmenté » en situation réelle

3.5.1. Le modèle Danger dans la réponse bactérienne : exempledes mycoplasmes

Dans les modèles SNS et NSI, les bactéries commensales ne sontpas prises en compte. Le modèle Danger classe les antigènes endangereux, qui doivent être attaqués, et non dangereux, tolérés. Laflore commensale, tant qu’aucun dommage tissulaire n’est réalisé,appartient à cette seconde catégorie. Certaines bactéries commeMycoplasma hominis sont considérées comme commensales dansla plupart des cas [53]. Tant qu’elles ne déclenchent pas de lésionstissulaires, et donc pas de signaux dangers, elles sont toléréespar le système immunitaire. Dans certains cas, M. hominis devientpathogène (souche à virulence accentuée, volume de l’inoculumbactérien, facteurs de susceptibilité de l’hôte. . .), et peut provo-quer des endométrites chez des sujets immunocompétents, voiredes arthrites septiques, chez les patients agammaglobulinémiques[54]. La présence de M. hominis est alors associée à des lésions tissu-laires, et donc à la perception d’un signal Danger qui peut activer lesCPA. Ces dernières passeraient alors du mode « vigilance » (simplereconnaissance de M. hominis via TLR2) à un mode « réponse immu-nitaire active ». La présence de M. hominis serait perc ue commedangereuse, induisant une réponse adaptative de type IL-23/Th17,initiant ou perpétuant ainsi une poussée inflammatoire articulaire[25].

Il est également possible que M. hominis puisse moduler laréponse immunitaire indépendamment de toute lésion tissulaire. Ila été montré récemment que l’inflammasome contenant la protéineNRLP7 est activé par des lipopeptides microbiens, motifs caractéris-tiques des mycoplasmes en général et de M. hominis en particulier[55].

3.5.2. Le modèle Danger et l’auto-immunitéUne maladie auto-immune est une situation dans laquelle des

lymphocytes reconnaissent des molécules du soi, sont activés etentraînent des dommages tissulaires durables. Dans le modèle

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anger, l’auto-réactivité est un aspect normal de l’inflammationissulaire physiologique. En effet, des T auto-réactifs sont activésu même titre que les T allo-réactifs au cours d’une agression.uand celle-ci est résolue, la plupart des cellules T meurent. Cer-

aines deviennent cependant des cellules mémoires. Cette situationourante est normalement sans risque puisque ces T mémoiresuto-réactifs reconnaissent régulièrement les antigènes du soi sanso-stimulation associée, le signal danger ayant disparu. Le mêmehénomène a été observé avec la présence à l’état quiescent de

ymphocytes B auto-réactifs dans les tissus [56]. Une tolérance enerpétuel mouvement s’installe, incomplète, mais à l’équilibre. Il’agit d’un premier niveau de contrôle.

Cependant, si le soi devient « dangereux », par exemple unissu exprimant des signaux dangers de fac on prolongée, lesellules T auto-réactives ne peuvent pas conserver leur orienta-ion « tolérance ». Les stimuli activateurs doivent disparaître, être

nettoyés » ou remplacés par des signaux inhibiteurs, il s’agitu second niveau de contrôle. De même, en cas de rupture de

’homéostasie, les lymphocytes B auto-réactifs décrits ci-dessusont activés en présence d’un complexe immunoglobuline-hromatine reconnue par le TLR9 et sont capable de produire desuto-anticorps.

Le problème n’est donc pas ce qui rompt la tolérance (puisqu’ellest déjà incomplète) mais plutôt :

quel est le phénomène à l’origine de l’activation des T auto-réactifs (premier contrôle) ?quel est le stimulus qui maintient les T auto-réactifs activés (second contrôle) ?

Le modèle Danger place la « mauvaise » mort cellulaire au centree la réponse à ces questions. Le matériel issu de la nécrose consti-ue un signal danger. L’élément qui rompt le premier contrôle peuttre un agent de l’environnement pathogène ou toxique qui causen stress cellulaire. S’il existe des mutations pour les gènes quiouvernent la mort physiologique (apoptose) ou la clairance designaux dangers, le second contrôle est dépassé. Des mutationse ce type ont été retrouvées dans différentes maladies auto-

mmunes, notamment le lupus érythémateux disséminé [57,58].ans ce modèle, le lien entre environnement, génétique et auto-

mmunité est très fort. Ce n’est pas le système immunitaire quist pris en défaut ; il remplit sa mission face à un signal dangerersistant mais dans ce cas au détriment de l’hôte [32].

Enfin, l’immunité a un prix et la tolérance de quelques dom-ages causés par l’auto-immunité pourrait être considérée comme

ne stratégie défensive indispensable dans certaines situations à laurvie de l’hôte [59]. Dans ce cas, la susceptibilité du tissu cible auxésions et ses capacités de régénérations ou de réparations vontntervenir au premier plan [60].

. Conclusion

La compréhension du lien entre les deux versants du sys-ème immunitaire ou comment d’une lésion tissulaire secondaire

une bactérie ou à un autre facteur d’environnement, on peutboutir à une réaction inflammatoire exacerbée et promouvoir’auto-immunité est largement approfondie dans le modèle Dan-er. Cependant, la complexité ne s’arrête pas à cette interactionntre tissu et système immunitaire. Nous commenc ons juste àomprendre les premières bribes de la communication entre les

ommensaux et l’hôte, ou bien les mécanismes (signaux non-anger) qui permettent au système de ne pas s’emballer. Tout celaevra encore être intégré dans un futur modèle pour parfaire notreompréhension du système immunitaire et de ses fonctions.

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Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-tion avec cet article.

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