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Concernant la présence d’un atelier de lectures McDonald’s/Hachette jeunesse au SalonDE QUOI S’AGIT-IL ? En premier lieu, pour éviter tout débat à « l’emporte-pièce » -le sujet est trop sensible et important-, disons les choses telles qu’elles sont : McDonald’s n’est ni « invité », ni « partenaire » du Salon, il n’y a pas de stand de malbouffe au Salon, il n’y a ni vente, ni don de livres, ni aucun signe ostentatoire de l’enseigne. Il s’agit d’un espace de lecture, accolé à celui d’Hachette jeunesse, où sont présentés et racontés les albums réalisés par cet éditeur, comme cela se réalise toute l’année dans plus de 650 restaurants Mc Do… Comme dans un passé très récent il y eut au Salon un stand d’établissement bancaire ou d’assurance autour de leurs actions pour la lecture, sans autre traitement ou statut que celui d’exposant et hors de la programmation artistique et littéraire du Salon. Nous n’avons aucunement l’intention d’esquiver le débat. Alors pourquoi cette présence ? Cette décision discutée et prise par l’assemblée générale de notre association n’est pas partie d’une position politique ou idéologique, et nous ne jugeons pas ici du bien fondé de celles-ci, mais d’une réalité. Celle des familles et enfants, qu’on le veuille ou non, qui découvrent leur premier livre dans ces lieux. Et si nous y sommes si sensibles, c’est que nous travaillons sans relâche cet enjeu de la culture dans les milieux populaires, au quotidien, avec le Salon et avec toutes les actions que nous menons dans les quartiers et les écoles. Cette expérience nous a appris l’indispensable modestie pour aborder la complexité de ce sujet dans notre société. L’importance de ne pas « prendre de haut » ou juger a priori des manières ou occasions qu’ont des publics de découvrir le livre, a fortiori s’ils sont éloignés de la lecture. Notre attachement à ce que l’excellence de la littérature de jeunesse soit à la portée de tous nous a conduit à ne jamais rien entreprendre qui puisse paraître mépriser la pratique culturelle de quiconque. Les familles qui viendront au Salon et dont le premier contact avec le livre a été celui offert à leurs enfants dans un Mc Do sont bien plus nombreuses qu’on le pense. Pourquoi leur dire « ce que vous, vous connaissez du livre, n’a pas sa place ici » ? Comment devraient-elles l’interpréter ? En quoi cela constituerait une victoire culturelle ? Voilà les raisons pour lesquelles cet espace de lecture se tient : parce que nous ne sommes pas partis de McDonald’s mais que nous choisissons en tout point de cheminer avec les publics, de leur faire confiance. D’ouvrir avec eux de nouvelles portes vers la littérature de jeunesse sans leur claquer au nez celle par laquelle ils sont arrivés à la lecture ou se sont retrouvés en possession d’un livre. Le Salon n’est-il pas un formidable endroit pour ça, avec la diversité de ses auteurs, de ses illustrateurs, de ses éditeurs, de ses bibliothécaires, libraires, animateurs, familles et enfants ? Voilà ce que nous cherchons simplement à dire et franchement bien au-delà de cet espace de lecture qui n’occupe jamais que 1/1000 ème de la surface du Salon. Nous espérons sincèrement que les uns et les autres auront à cœur d’enrichir le dialogue et la réflexion sur ce sujet si important. Faisons-nous pour autant preuve de naïveté ? Les pratiques de green-washing culturel d’un nombre croissant de grandes entreprises, ce que McDonald’s constitue comme symbole ou sa puissance communicationnelle, tout cela nous aurait-il échappé ? Evidemment pas ! McDonald’s a-t-il besoin du Salon pour communiquer et développer sa stratégie de marque ? Soyons lucides : évidemment pas non plus ! Et, même à notre corps défendant, la présence de cet atelier de lectures vaudrait-elle soutien, même implicite ? Petit clin d’œil à ceux qui le craignent : faites un tour du côté de la sélection de nos 18 Pépites et savourez le décapant Junk Food book de Noémie Weber (Gallimard) qui commence par : "Malbouffe city : la ville aux 500.000 fast- food". Cet ouvrage, également inscrit en battle BD dans la programmation littéraire du Salon vient témoigner, s’il le fallait, du fait que notre liberté de ton, d’action et de pensée n’est en rien entamée. Au fond, le Salon est un lieu de multiples contradictions, dans lequel nous agissons avec sincérité. Sur tous les sujets nous sommes ouverts à la discussion, à la réflexion, à l’échange d’arguments sans jamais être habités du sentiment de « détenir la vérité ». Nous ne souhaitons pas polémiquer, moins encore subir de procès d’intention. La qualité artistique de la programmation du Salon qui traite cette année, autour du thème Nos futurs, de grandes questions sociales, sociétales et humaines nous semble en témoigner et sera, nous l’espérons, pour toutes celles et ceux qui font la réussite de cet événement, une source de satisfactions et d’enrichissement multiples…et certainement pas de résignation au monde tel qu’il est. L’équipe du Salon du livre et de la presse jeunesse

DE QUOI S’AGIT-IL · 2018-11-21 · Concernant la présence d’un atelier de lectures McDonald’s/Hachette jeunesse au Salon… DE QUOI S’AGIT-IL ? En premier lieu, pour éviter

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Concernant la présence d’un atelier de lectures McDonald’s/Hachette jeunesse au Salon…

DE QUOI S’AGIT-IL ? En premier lieu, pour éviter tout débat à « l’emporte-pièce » -le sujet est trop sensible et important-, disons les choses telles qu’elles sont : McDonald’s n’est ni « invité », ni « partenaire » du Salon, il n’y a pas de stand de malbouffe au Salon, il n’y a ni vente, ni don de livres, ni aucun signe ostentatoire de l’enseigne. Il s’agit d’un espace de lecture, accolé à celui d’Hachette jeunesse, où sont présentés et racontés les albums réalisés par cet éditeur, comme cela se réalise toute l’année dans plus de 650 restaurants Mc Do… Comme dans un passé très récent il y eut au Salon un stand d’établissement bancaire ou d’assurance autour de leurs actions pour la lecture, sans autre traitement ou statut que celui d’exposant et hors de la programmation artistique et littéraire du Salon. Nous n’avons aucunement l’intention d’esquiver le débat. Alors pourquoi cette présence ? Cette décision discutée et prise par l’assemblée générale de notre association n’est pas partie d’une position politique ou idéologique, et nous ne jugeons pas ici du bien fondé de celles-ci, mais d’une réalité. Celle des familles et enfants, qu’on le veuille ou non, qui découvrent leur premier livre dans ces lieux. Et si nous y sommes si sensibles, c’est que nous travaillons sans relâche cet enjeu de la culture dans les milieux populaires, au quotidien, avec le Salon et avec toutes les actions que nous menons dans les quartiers et les écoles. Cette expérience nous a appris l’indispensable modestie pour aborder la complexité de ce sujet dans notre société. L’importance de ne pas « prendre de haut » ou juger a priori des manières ou occasions qu’ont des publics de découvrir le livre, a fortiori s’ils sont éloignés de la lecture. Notre attachement à ce que l’excellence de la littérature de jeunesse soit à la portée de tous nous a conduit à ne jamais rien entreprendre qui puisse paraître mépriser la pratique culturelle de quiconque. Les familles qui viendront au Salon et dont le premier contact avec le livre a été celui offert à leurs enfants dans un Mc Do sont bien plus nombreuses qu’on le pense. Pourquoi leur dire « ce que vous, vous connaissez du livre, n’a pas sa place ici » ? Comment devraient-elles l’interpréter ? En quoi cela constituerait une victoire culturelle ? Voilà les raisons pour lesquelles cet espace de lecture se tient : parce que nous ne sommes pas partis de McDonald’s mais que nous choisissons en tout point de cheminer avec les publics, de leur faire confiance. D’ouvrir avec eux de nouvelles portes vers la littérature de jeunesse sans leur claquer au nez celle par laquelle ils sont arrivés à la lecture ou se sont retrouvés en possession d’un livre. Le Salon n’est-il pas un formidable endroit pour ça, avec la diversité de ses auteurs, de ses illustrateurs, de ses éditeurs, de ses bibliothécaires, libraires, animateurs, familles et enfants ? Voilà ce que nous cherchons simplement à dire et franchement bien au-delà de cet espace de lecture qui n’occupe jamais que 1/1000ème de la surface du Salon. Nous espérons sincèrement que les uns et les autres auront à cœur d’enrichir le dialogue et la réflexion sur ce sujet si important. Faisons-nous pour autant preuve de naïveté ? Les pratiques de green-washing culturel d’un nombre croissant de grandes entreprises, ce que McDonald’s constitue comme symbole ou sa puissance communicationnelle, tout cela nous aurait-il échappé ? Evidemment pas ! McDonald’s a-t-il besoin du Salon pour communiquer et développer sa stratégie de marque ? Soyons lucides : évidemment pas non plus ! Et, même à notre corps défendant, la présence de cet atelier de lectures vaudrait-elle soutien, même implicite ? Petit clin d’œil à ceux qui le craignent : faites un tour du côté de la sélection de nos 18 Pépites et savourez le décapant Junk Food book de Noémie Weber (Gallimard) qui commence par : "Malbouffe city : la ville aux 500.000 fast-food". Cet ouvrage, également inscrit en battle BD dans la programmation littéraire du Salon vient témoigner, s’il le fallait, du fait que notre liberté de ton, d’action et de pensée n’est en rien entamée. Au fond, le Salon est un lieu de multiples contradictions, dans lequel nous agissons avec sincérité. Sur tous les sujets nous sommes ouverts à la discussion, à la réflexion, à l’échange d’arguments sans jamais être habités du sentiment de « détenir la vérité ». Nous ne souhaitons pas polémiquer, moins encore subir de procès d’intention. La qualité artistique de la programmation du Salon qui traite cette année, autour du thème Nos futurs, de grandes questions sociales, sociétales et humaines nous semble en témoigner et sera, nous l’espérons, pour toutes celles et ceux qui font la réussite de cet événement, une source de satisfactions et d’enrichissement multiples…et certainement pas de résignation au monde tel qu’il est.

L’équipe du Salon du livre et de la presse jeunesse