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Direction de ‘Animation de la Recherche,des Etudes et des Statistiques
Z‘
o2
ORIGINESOCIALE
ET DESTINÉESCOLAIRE
L ‘inégalitédes chances
devant l’enseignementà travers les enquêtes
FQP 1970, 1977,1985 et 1993
Dominique GOUX (Insee)
Eric MAURIN (Dares)
N° 5Décembre 1994
Les documents d’études sont des documents de travail; à ce titre, ils n’enga
gent que leurs auteurs et ne représentent pas la position de la DARES.
Septembre 1994
ORIGINE SOCIALE ET DESTINEE SCOLAIRE
L’inégalité des chances devant l’enseignement
à travers les enquêtes FQP 1970, 1977, 1985 et 1993
Dominique Goux
INSEE, Division Emploi, 18 Boulevard A. Pinard, 75014 Paris
Eric Maurin
DAPLES, Département Emploi, 1 Place de Fontenoy, 75007 Paris
1
Résumé
L’objectif de cette étude est de tracer une image aussi précise que possible des inégalités
devant l’enseignement et de leurs évolutions au cours des dernières décennies. Les
mécanismes générateurs d’inégalités sont réexaminés. Les principaux modèles théoriques
ont été conçus voilà plus de vingt ans dans un contexte de croissance économique forte:
leur confrontation aux données récentes conduit à proposer et tester certaines hypothèses
alternatives.
Trois principaux résultats se dégagent:
— l’ouverture du système scolaire a conduit à une démocratisation rapide, mais uniforme
du système scolaire : les classements scolaires sont à peu près aussi étroitement dépendants
de l’origine sociale des enfants aujourd’hui qu’il y a vingt ans.
— l’origine de ces inégalités est plutôt “culturelle”: les classements scolaires des enfants
dépendent avant tout de celui de leurs parents. Les modèles selon lesquels l’école ne fait
que restituer des inégalités qui lui sont extérieures ne tiennent pas bien.
— Si tendance il y a, elle est précisément à un renforcement des inégalités d’origine
culturelle et un affaiblissement des inégalités d’origines plutôt économique.
Plan
1. Fort développement du système éducatif après guerre.
2. Démocratisation et persistance des inégalités
3. Une modélisation du lien entre origine sociale et performance scolaire
3.1. Evolution de l’inégalité des chances : une approche diachronique
3.2. Une approche complémentaire : la méthode synchronique
4. L’inégalité des chances : les mécanismes
4.1. Le modèle de Boudon: un atout culturel constant
4.2. Un modèle avec atout culturel variable
5. L’importance des facteurs culturels
5.1. Destinées socio-économiquement différenciées contre destinées culturellement
différenciées
5.2. Appartenance familiale au salariat non manuel et destinée scolaire
5.3. Tests complémentaires et extensions
6. L’évolution de l’inégalité des chances : les mécanismes
6.1. Démocratisation uniforme contre démocratisation différenciée
6.2. Appartenance familiale au salariat non manuel et destinée scolaire : étude dynamique
6.3. Appartenance familiale au non salariat et destinée scolaire : étude dynamique
Conclusion
Récapitulatif des notes
Annexe 1 : Eléments pour la résolution des modèles avec “atout culturel constant” et avec
“atout culturel variable”
Annexe 2 : Les nomenclatures utilisées
Tableaux
Bibliographie
4
-
Introduction
Les inégalités scolaires posent de redoutables problèmes théoriques. Dans le
passé, les débats n’ont pas tant porté sur l’existence d’inégalités que sur
l’interprétation qu’il fallait leur donner: de quoi sont-elles le produit? Quelles lois
régissent leurs évolutions? Il s’agit de savoir si, dans une société stratifiée,
l’inégalité des chances est inévitable, ou si, au contraire, une réforme du système
scolaire peut contribuer à la réduire.
Réalisée en 1993, la dernière édition de l’enquête sur la formation et la
qualification professionnelle (FQP) est l’occasion de reprendre ces débats à la
lumière de données récentes. Ce type de relecture nous semble d’actualité pour au
moins trois raisons. D’une part les principales thèses ont été élaborées dans les
années soixante, dans un contexte de croissance économique exceptionnelle. Leurs
conclusions demandent à être vérifiées dans le cadre d’une économie connaissant
un durable et profond ralentissement. D’autre part, les méthodes économétriques à
la disposition du sociologue sont devenues plus solides et permettent de
caractériser de façon rigoureuse les phénomènes pertinents. Enfin, avec le recul, il
est de plus en plus clair qu’entre les théories d’inspiration culturaliste d’une part et
l’approche plutôt individualiste d’autre part, les oppositions sont beaucoup moins
radicales que la vigueur des polémiques a pu le laisser penser. Des modèles
synthétiques peuvent être envisagés’.
Notre cadre de référence sera le modèle proposé par R. Boudon [1973] selon
lequel les inégalités devant l’enseignement sont avant tout le reflet de
comportements socialement différenciés. Certains milieux maîtrisent mieux la
Pour une présentation critique des théories culturalistes et une confrontation de ces théories avec
le “néoindividualisme” de R. Boudon on peut consulter par exemple Cherkaoui [1986] ou Cuin
[1993]. Pour une discussion des limites de l’épistémologie de R. Boudon, consulter par exemple
Favre [1980]. Enfin pour une critique de l’utilitarisme commun aux deux approches, voir Caillé
[1989].
5
culture, les normes et le fonctionnement du système scolaire, mais ces différences
n’ont d’effets que mineurs sur les inégalités observées. Le peu de réussite des
milieux défavorisés résulte d’un calcul coût/avantage, l’école et le langage ne sont
pas en cause. La confrontation de ce modèle aux données récentes nous conduira à
une reformulation de certains de ses axiomes.
Pour ce qui concerne les tests empiriques, nous aurons essentiellement recours au
modèle loglinéaire. Encore peu utilisé en France, ce modèle est pourtant devenu
l’une des techniques standard de la sociologie de la mobilité. Par nature elle est
adaptée à l’étude de variables qualitatives comme le diplôme ou l’origine sociale,
et particulièrement à l’étude de leur indépendance (ou de leur degré d’association).
Or, pour les phénomènes de mobilité, la plupart des questions importantes peuvent
se poser en termes d’indépendance.
Au cours de cette étude, nous n’utiliserons pas le code des catégories socio
professionnelles sous sa forme habituelle (en un seul bloc de six postes par
exemple). Nous préférerons introduire séparément, et tour à tour, les principales
dimensions qui structurent cette nomenclature : dimension verticale (ou
hiérarchique) et dimensions transversales (salariés/non salariés, manuels/non
manuels). S’il peut paraître surprenant pour un lecteur habitué à la “CS” française,
ce choix présente à nos yeux deux avantages : d’une part il oblige à expliciter les
clivages cachés et enchevêtrés de la nomenclature; d’autre part, il conduit à tester
des hypothèses comparables à celles auxquelles se confrontent les sociologues
étrangers, habitués à d’autres nomenclatures, souvent moins synthétiques que la
CS française2.
2 On peut songer aux codes de J.H Goldthorpe, ou à celui de O. Wright. A leur sujet, on peut
consulter Marshall et alu [1988].
6
1 Fort développement du système éducatif après la guerre
En France, plus encore que dans les autres pays développés, le niveau de
formation s’est considérablement renforcé depuis la deuxième guerre (tableau I).
En 1970, plus des trois quarts de la population en âge de travailler n’avaient pas
dépassé le certificat d’étude. Vingt ans plus tard, en 1993, les personnes peu ou
pas diplômées ne représentent plus que 45% de la population.
Cette évolution doit beaucoup aux efforts entrepris dans les années cinquante pour
que les jeunes disposent d’un niveau d’instruction minimal. Elle correspond aussi à
un développement de l’enseignement supérieur. L’université passe peu à peu à la
portée du plus grand nombre. Il y a vingt ans, seuls 6% des actifs étaient diplômés
du supérieur. Aujourd’hui un sur six est titulaire d’un diplôme supérieur au
baccalauréat.
L’allongement des scolarités coïncide en partie avec l’amélioration des conditions
économiques dans lesquelles grandissent les élèves. Les personnes aujourd’hui en
début de carrière (entre 25 et 40 ans) ont accompli leur scolarité dans des milieux
a priori plus propices aux études que leurs aînés: près de 40% sont fils de cadre
(supérieur ou moyen), de chef d’entreprise ou de petit patron. En 1970, au sein de
la génération de leurs parents, seuls 28% des jeunes avaient grandi dans des
milieux aussi favorables.
Le lien entre développement économique et durée des études semble en fait avoir
été assez étroit jusque dans les années cinquante. Ainsi, en 1970, parmi les actifs
de plus de 40 ans (nés entre 1910 et 1930) on comptait à peu près autant de
diplômés du supérieur que de personnes originaires d’un milieu de cadres ou de
chefs d’entreprise. Au sein de ces générations, il n’y avait pas plus d’actifs
titulaires du bac ou d’un diplôme professionnel que d’actifs issus des classes
moyennes, professions intermédiaires ou petits patrons. En 1977, sept ans plus
7
tard, les générations se sont en partie renouvelées, mais le lien est toujours très
direct entre le niveau de formation des actifs de plus de quarante ans et leur niveau
social d’origine. Dans l’entre-deux-guerres, le système éducatif semble s’être
développé en sorte d’absorber les enfants issus des nouvelles classes supérieures et
intermédiaires de la société, ni en-deça ni au-delà. D’une certaine façon, l’école
d’avant-guerre évolue au même rythme que la société qu’elle forme.
Les générations d’après-guerre vont vivre une période économique très différente.
Elles bénéficient d’une phase de croissance unique dans l’histoire du pays et d’un
développement exceptionnel du système éducatif3.
Les effets de cette rupture sont vite perceptibles : en 1970, parmi les jeunes actifs
de moins de 40 ans, le nombre de titulaires du bac ou d’un diplôme professionnel
excède déjà celui des individus issus des classes moyennes.
Par la suite, entre 1970 et 1993, les jeunes arrivent sur le marché du travail avec
des niveaux de formations ayant un rapport de plus en plus lointain avec le milieu
social ou ils ont grandi. En gros, le renouvellement des générations joue dans le
sens d’une hausse du niveau de formation deux fois plus “rapide” que celui des
milieux d’origines. Un décrochage s’est produit, la cohérence semble partiellement
rompue entre l’évolution de la situation des familles et l’augmentation beaucoup
plus rapide du niveau scolaire des enfants.
Au total, il y a aujourd’hui, parmi les actifs de moins de quarante ans, près de deux
fois plus de diplômés du supérieur que de personnes issues de familles de cadres
ou de chefs d’entreprise. L’école a changé: elle est d’une certaine façon “en
avance” sur la société dont elle forme les enfants.
Voir par exemple Carré-Dubois-Malinvaud [1972].
8
2. Démocratisation et persistance des inégalités
En se développant, le système éducatif s’est ouvert à des milieux qui jusqu’alors en
étaient pratiquement exclus. En 1970, les trois quarts des actifs issus d’une famille
d’ouvrier, de paysan ou de simple employé n’avaient pas dépassé le certificat
d’étude. Vingt ans plus tard, une majorité d’entre eux ont au moins un diplôme
professionnel et 20% ont même leur baccalauréat. Il est de moins en moins
exceptionnel qu’ils poursuivent leurs études au-delà: près de 10% sont diplômés
de l’enseignement supérieur. C’est peut-être l’une des conséquences les plus
marquantes des investissements réalisés depuis la guerre pour démocratiser
l’enseignement.
Cela dit, l’ouverture du système scolaire profite aussi aux enfants issus des classes
intermédiaires et supérieures de la société. En 1970, parmi les actifs originaires
d’une famille de cadre ou de chef d’entreprise, moins d’un tiers étaient diplômés de
l’université ou des grandes écoles. Aujourd’hui, en 1993, plus de 50% ont réussi
leur passage dans l’enseignement supérieur.
Autrement dit, l’ouverture du système scolaire contribue à une hausse
considérable, mais générale du niveau de formation. Profitant à tous, il n’est pas
évident que cette évolution ait modifié la hiérarchie scolaire entre les enfants
suivant leurs origines sociales. Le niveau général monte, mais les classements
changent-ils?
Il y a de nombreuses façons de répondre à cette question. Peut-être la plus simple
est-elle de retracer l’expérience que font les individus de la hiérarchie scolaire,
suivant le milieu dont ils sont issus.
9
En 1970, lorsqu’on analyse le niveau scolaire de jeunes de 25-34 ans issus de
milieux plutôt modestes d’une part (ouvriers, agriculteurs ou employés) et de
familles de cadres et chefs d’entreprise d’autre part, trois cas se présentent:
corffiguration la plus fréquente, l’enfant de cadre est mieux diplômé (p=66%); cas
moins fréquent, il est d’un niveau à peu près équivalent (i=24,5%), voire inférieur
(p=9,5%). La comparaison tourne à l’avantage des enfants de cadres sept fois plus
souvent qu’à l’avantage des enfants de classes populaires (66/9,5) (tableau lia).
En 1993, un jeune issu d’un milieu modeste n’a toujours guère plus d’une chance
sur dix d’être (strictement) mieux diplômé qu’un enfant de cadre ou de chef
d’entreprise. Il y a toujours près de deux chances sur trois pour que le niveau
scolaire de la personne issue d’un milieu supérieur soit strictement plus élevé que
celui de la personne issue d’un milieu populaire (62%). Autrement dit, dans le cas
considéré et telle qu’elle est mesurée, la hiérarchie scolaire respecte la hiérarchie
des origines sociales à peine moins souvent qu’il y a vingt ans (62/9.5).
Le même type de comparaison peut être effectué en prenant pour référence les
jeunes issus de milieux intermédiaires (cadres moyens, artisans, commerçants).
Entre 1970 et 1993, leurs classements scolaires se rapprochent très légèrement de
ceux des enfants de cadres et chefs d’entreprise. De même, leurs classements
semblent en léger progrès lorsqu’on les compare à ceux des jeunes issus de
milieux populaires.
L’usage de nomenclatures très agrégées (et clairement hiérarchisées) permet
d’obtenir des résultats simples, auxquels il n’est pas trop difficile de donner un
sens. Ce procédé présente toutefois l’inconvénient d”écraser” certaines évolutions
significatives. Ainsi, dès l’instant où l’on distingue les enfants d’agriculteurs des
Ce ratio s’apparente à un coefficient concurrentiel “global”, dans l’esprit des traductionsproposées par Vallet l988J au terme ang’ais ‘odd ratio”.
10
enfants issus des catégories populaires salariées (ouvriers et employés), on obtient
une vision un peu plus précise des inégalités : la position relative des enfants
d’agriculteurs apparaît en effet en net progrès par rapport à celle des enfants des
autres catégories.
Les décennies récentes n’ont pas été celles d’un pur et simple déclin du monde
agricole. Elles ont aussi été celles de la modernisation, de la rationalisation de
l’activité. Les exploitations se sont regroupées, agrandies et ouvertes sur des
marchés mondiaux. Qu’ils restent à la terre ou qu’ils rejoignent la ville, les enfants
d’agriculteurs ont peut-être été confrontés plus directement que d’autres à l’enjeu
que représente une formation adaptée. Contrairement aux enfants d’autres milieux
modestes, ils ont pu bénéficier du développement d’un enseignement spécialisé,
sans souffrir des difficultés de la scolarisation de masse dans les banlieues
urbaines.
Il serait difficile d’aller plus loin sur la base de comparaisons aussi globales. Une
première conclusion semble néanmoins assez robuste : le milieu social est resté un
atout considérable dans la concurrence scolaire. Aucune tendance claire ne se
dégage qui permettrait de conclure à une réduction globale de l’inégalité des
chances devant l’enseignement. Certaines inégalités semblent s’accroître
(catégories intermédiaires / catégories salariées modestes), d’autres diminuent
(agriculteurs / catégories salariées).
Ces résultats provisoires demandent à être consolidés par une investigation
statistique un peu plus poussée5.
Voir l’article de J. C. Combessie [1984) et l’analyse de L. A. Vallet [1988] sur les difficultés liées
au choix des indicateurs statistiques.
11
3. Une modélisation du lien entre origine sociale et destinée scolaire
Telle qu’elle vient d’être caractérisée, la relative stabilité des hiérarchies scolaires
peut en effet correspondre à un renforcement des inégalités à certains niveaux du
cursus et à un affaiblissement à d’autres paliers, les différents phénomènes se
compensant mutuellement.
En outre, les classements scolaires selon l’origine peuvent avoir évolué au cours
du temps, même s’ils sont aujourd’hui redevenus comparables à ce qu’ils étaient
dans les années cinquante. D’une part, les programmes ont évolué, les
recrutements et stratégies des établissements aussi. D’autre part, les milieux
sociaux ne réagissent sans doute pas de la même façon aux tensions du marché du
travail. Leur perception des diplômes et de l’école évolue peut-être suivant des lois
différentes.
Au total, l’inégalité des chances est susceptible de “fluctuations” au cours du
temps, et ces fluctuations peuvent être différentes d’un palier à l’autre du cursus
scolaire.
Pour tester l’existence de ces phénomènes et éventuellement les caractériser, il est
important de se livrer à une étude dynamique approfondie. Cette approche
demande de mobiliser simultanément les différentes tables de mobilité répartissant
les individus suivant leurs origines et leurs niveaux scolaires lors des différentes
enquêtes F.Q.P.
Pour l’essentiel, nous restreindrons l’analyse aux générations ayant atteint entre 25
et 34 ans au moment des différentes enquêtes. Tout d’abord, on peut considérer
que la grande majorité de ces jeunes adultes ont fini leurs études6.D’autre part, ils
ne les ont pas achevées depuis si longtemps que leur mémoire ne commence à
6 Et pour ceux qui ne les auraient pas achevées, on peut supposer que leur situation est acquise auregard de notre nomenclature de formation.
12
déformer la réalité de leurs origines ou de leurs diplômes. De même, les effets de
la mortalité (plus précoce pour les personnes les plus modestes) peuvent être
négligés.
L’idée de la méthode est ensuite assez simple : il suffit de reconstituer les
destinées théoriques, répondant à l’hypothèse d’une stabilité des classements
scolaires au cours du temps. L’écart entre destinées simulées (théoriques) et
destinées réelles permet de caractériser l’existence et le sens (éventuel) des
déformations du lien entre origine sociale et niveau de formation.
Pour fixer les idées, notons Nldt les effectifs d’origine sociale i, ayant déclaré le
diplôme d à la date t.
Dans le cas où la probabilité d’atteindre le niveau d pour quelqu’un d’origine i
serait restée constante au cours de la période 1970-1993, NIdS pourrait se
décomposer en un produit de deux termes, l’un indépendant de t, l’autre de d:
— *idt i*t ‘j*d
Il n’y aurait pas eu d’autres changements que ceux engendrés mécaniquement par
l’élévation du niveau social des familles. Une décomposition telle que (0) n’est pas
unique. Autre désavantage, elle ne permet pas d’identifier les effets et les
interactions élémentaires entre les différentes variables. Pour obtenir un modèle
identifiable et simplement interprétable, il est d’usage de décomposer les effectifs
étudiés (ici Nd ) en autant d’effets indépendants que le demandent les hypothèses
retenues. Dans le cas présent, on écrit7
= * * * *‘i,d,t Pj Pd 11t 11i,d Pj,t
Lestimation des paramètres li se fait sous la contrainte de leur répartition en moyenne
géométrique autour de la valeur 1. Ce type de paramétrisation loglinéaire permet de tester
simplement les hypothèses d’indépendance et d’estimer l’influence dune variable ou d’une
combinaison de variables sur la structure de la table étudiée. Voir en particulier M. Bishop, S.
Fienberg, P. Holland [1988] et L. Goodman [1972j.
13
Appliqué aux données de la démographie scolaire, ce modèle structurel est
évidemment assez peu réaliste (tableau Illa). De fait, les estimations réalisées
dans son cadre ne s’ajustent pas correctement aux données observées (que l’on
raisonne sur la population entière ou sur une classe d’âges particulière). A un
degré ou à un autre, la plupart des milieux envoient leurs enfants plus longtemps à
l’école, et avec plus de réussite, ce que ne prend pas en compte le modèle
structurel.
Il est nécessaire d’affaiblir les hypothèses sur lesquelles il repose. Pour
commencer, nous allons supposer que l’écart entre (1) et les évolutions observées
provient d’une évolution uniforme des niveaux de diplômes: par hypothèse, la
probabilité d’obtenir un diplôme donné ne sera plus supposée constante au cours
du temps (comme dans (1)), mais pourra évoluer de la même façon pour tous les
milieux.
L’écart entre les estimations obtenues dans ce nouveau cadre et les évolutions
observées correspondra aux phénomènes que nous souhaitons isoler, à savoir
l’évolution du lien entre hiérarchies scolaires et origines sociales. Techniquement,
il s’agit d’introduire et d’estimer un terme supplémentaire
KT ( * * * * * 2i,d,t ‘Ji d Pt i,d i,t) Pd,t
Ainsi complété, le modèle s’ajuste beaucoup mieux aux données observées, Pour
la classe d’âges des 25-34 ans il explique plus de 90% des écarts laissés
inexpliqués par le modèle (1)8 (tableaux Illa et IVa). Les ordres de grandeurs
restent les mêmes quand on restreint l’analyse aux 25-29 ans ou aux 30-34 ans.
Autrement dit, le nombre de diplômés a beaucoup augmenté, et de façon en
apparence très diverse suivant les milieux sociaux, mais 90% de cette évolution
s’explique par une hausse uniforme, indépendante de l’origine sociale, des niveaux
de diplômes. L’hypothèse selon laquelle la probabilité d’accéder à un niveau de
8 Plus précisément il explique près 98% de la variance résiduelle dans le cas où Ion distingue 3types de diplômes et 3 types d’origines sociales, et près de 91% de cette même variance résiduellelorsqu’on distingue 4 niveaux de diplômes et d’origines sociales.
14
diplôme donné évolue de façon uniforme entre deux dates représente ainsi une
approximation très correcte de la réalité.
L’économétrie confirme ce qui ressortait déjà à l’issue d’un examen plus global et
moins précis : depuis la fin de la deuxième guerre, l’évolution au cours du temps
du niveau de formation des individus reflète avant tout le développement du
système scolaire dont ils ont çjj pu bénéficier.
En comparaison, les classements scolaires évoluent peu. La déformation des
hiérarchies scolaires suivant l’origine sociale n’explique qu’une petite partie des
transformations survenues dans la répartition des diplômes et certificats scolaires.
3.1. Evolution de l’inégalité des chances : une approche diachronique
Cela dit, s’il est faible, l’écart entre le modèle théorique (2) et les évolutions
observées ne peut être tenu pour aléatoire et doit être examiné en détail. Telles que
nous les mesurons, les fluctuations du lien origine sociale/niveau d’éducation au
cours du temps sont faibles, mais significativement différentes du hasard. S’agit-il
d’un affaiblissement ou d’un durcissement des inégalités? A quel moment les
inflexions se produisent-elles?
Caractériser et dater ce type d’évolution demande d’écrire le modèle complet:
N * * * * * *
i,d,t ‘J-ti d Pï Pi,d i,t Id,t) i,d,t
Pour que la décomposition soit unique et interprétable, on impose encore aux
coefficients lidt de se répartir autour de la valeur 1, en moyenne géométrique. La
différence entre un coefficient particulier et la valeur 1 permet de caractériser la
façon dont les évolutions observées (retracées par le modèle (3)) dévient du
modèle d’indépendance (2). La significativité d’un coefficient 1idt est assez simple
à tester: il suffit de le contraindre à 1 et d’évaluer dans quelle mesure le modèle
ainsi réduit s’écarte de manière aléatoire ou non de la réalité.
15
—-
Appliquée aux générations ayant eu 25-34 ans lors des différentes enquêtes, la
décomposition (3) fournit ainsi quelques confirmations assez claires.
- Tout d’abord, la plupart des coefficients d’ordre 3 sont non significativement
différents de 1: c’est une simple retraduction de la faible amplitude des variations
de l’inégalité des chances au cours du temps.
- Quand on distingue 3 niveaux de diplômes et d’origines sociales, les principales
déviations de (3) par rapport à un modèle de démocratisation uniforme (tel que
(2)) concernent les individus issus des classes intermédiaires par rapport à une
évolution conforme à celles des autres milieux sociaux, ils sont aujourd’hui plutôt
plus nombreux à avoir évité l’échec scolaire (sortie sans diplôme), plus nombreux
aussi à avoir atteint un niveau supérieur ou égal au bac. C’est une confirmation et
une explicitation des tendances relevées à partir des coefficients concurrentiels
globaux.
- Lorsqu’on distingue les diplômés du supérieur des simples bacheliers d’une part
et les agriculteurs des ouvriers et employés d’autre part (au sein de nomenclatures
en quatre niveaux), on obtient quelques éléments complémentaires (tableau IVe).
Tout d’abord, par rapport à une évolution unifonne des niveaux de diplômes, les
agriculteurs apparaissent nettement plus nombreux à avoir obtenu le bac (ou un
diplôme équivalent), beaucoup plus nombreux aussi à avoir évité l’échec scolaire.
En revanche leur arrivée dans l’enseignement supérieur ne semble pas avoir été
particulièrement rapide au cours des décennies récentes. On a une confirmation et
une explicitation de résultats obtenus plus directement dans les précédentes
sections.
Les enfants issus des milieux modestes salariés sont dans une situation opposée.
Ils sont de ceux qui ont le moins profité de l’ouverture du système scolaire. Il peut
être instructif de traduire quantitativement les estimations du modèle qui les
16
concerne : par rapport à une évolution uniforme des nombres de diplômés, ils sont
12% moins nombreux parmi les diplômés du supérieur, 10% moins nombreux
parmi les bacheliers, et 20% plus nombreux à n’avoir aucun diplôme.
Pour ce qui est d’éviter une sortie sans diplôme du système scolaire, l’avantage
d’être issu des classes supérieures a fléchi (en relatif). En revanche, le nombre
d’enfants de cadre diplômés de l’enseignement supérieur a augmenté légèrement
plus vite que ce à quoi aurait conduit une évolution uniforme pour tous entre 1970
et 1993.
Enfin, dernière indication, les hiérarchies scolaires se modifient, mais d’une façon
qui n’est pas forcément linéaire au cours du temps. Par exemple, si la position
scolaire des individus de 25-34 ans issus de milieux salariés modestes (ouvriers ou
employés) a plutôt reculé entre 1970 et 1977, puis de nouveau entre 1977 et 1985,
la tendance s’est plutôt inversée entre 1985 et 1993.
Au-delà des résultats concernant telle ou telle catégorie, les conclusions
précédentes semblent porteuses de quelques hypothèses plus générales : non
seulement les inégalités devant l’enseignement évoluent lentement, mais elles se
“déplacent”. D’une période à l’autre elles ne concernent pas forcément les mêmes
milieux ni les mêmes paliers du cursus scolaire. L’évolution n’est pas forcément
dans le sens d’une plus grande égalité, et ne se produit pas forcément à rythme
constant.
Toutes ces raisons rendent leur évolution délicate à mesurer. En particulier, toute
appréciation se fondant sur un point particulier du cursus (par exemple, le bac)
semble exposée à des biais.
17
3.2. Une approche complémentaire: la méthode synchronique
Pour mettre les conclusions précédentes à l’épreuve, il est possible de recourir à
une approche complémentaire. De nouveau l’idée est assez simple : plutôt que de
comparer les différentes générations au même âge à des dates différentes, il s’agit
de les comparer à la même date à des âges différents.
Dès l’instant où le lien entre origine sociale et diplôme serait plus faible pour les
jeunes que pour les aînés, il serait possible de conclure à un relâchement des
inégalités au cours du temps. Cette approche peut être qualifiée de synchronique,
par opposition à la précédente qui utilise les données de façon diachronique.
La méthode synchronique offre certains avantages reposant sur une seule enquête
elle permet d’utiliser des nomenclatures de formations et d’emplois homogènes
pour les différentes générations. En contrepartie les comparaisons sont biaisées
d’une part les déclarations sur l’origine et les diplômes varient avec l’âge. En
vieillissant les personnes peuvent avoir tendance à surévaluer leurs performances
scolaires. D’autre part tous les individus n’ont pas la même espérance de vie. Dès
l’instant où les individus moins diplômés exercent des métiers plus durs et
meurent plus tôt, il en résulte (lorsqu’on s’intéresse aux personnes ayant dépassé
un certain âge) une surévaluation des performances scolaires des classes sociales
ayant les moins bons résultats9.Au total, l’approche synchronique conduit sans
doute à surévaluer les mouvements de réduction de l’inégalité des chances. C’est
d’ailleurs pourquoi cette approche ne doit être considérée que comme un
complément à l’approche diachronique, longitudinale.
L’étude des classements scolaires peut cependant-reposer sur le même protocole
empirique, dans le cadre synchronique comme dans le cadre diachronique.
Sur ce type de problème voir C. Baudelot [1989] ou C. Thélot [1989].
18
Notons ainsi Ni,d,a le nombre de personnes d’âge a, d’origine i et titulaires d’un
diplôme de niveau d, en 1993. Dès l’instant où la probabilité d’atteindre un niveau
donné pour une origine donnée serait restée constante au cours du temps on
aurait:
M _ * * * *i,d,a Pd a i,d i,a 15
Ce modèle est le symétrique de (1). Les estimations effectuées dans ce cadre
s’écartent très significativement des données observées en 1993 (tableaux IIIb et
IVb).
Dans le même esprit que précédemment, nous allons supposer que l’écart entre
(ibis) et les évolutions observées correspond à une hausse uniforme des niveaux
de diplôme, dont auraient bénéficié les générations successives, toutes origines
confondues.
Nida = (i * * *i,d
*$•‘ja)
*d,a (2bis)
Ainsi complété, le modèle fournit des estimations beaucoup plus réalistes. En
raisonnant sur tranches d’âges décennales, à peine plus de 10% de la variance
résiduelle du modèle (ibis) reste inexpliquée. Le passage de (ibis) à (2bis) est
presque aussi décisif que le passage de (i) à (2).
Autrement dit, le modèle selon lequel la probabilité d’accéder à un niveau de
diplôme donné évolue de façon uniforme d’une génération à l’autre (à un rythme
indépendant de l’origine sociale), représente une approximation toujours très
correcte de la réalité.
L’examen du modèle saturé complet (3bis) confirme la plupart des tendances
complémentaires déjà repérées à partir de la décomposition (3).
- Comparées à leurs aînées, les jeunes générations-issues de familles d’agriculteurs
sont beaucoup plus souvent titulaires du bac, ou d’un diplôme professionnel, et ce
dans des proportions qu’on ne retrouve dans aucun autre milieu social. Par rapport
aux enfants d’ouvriers et d’employés, le niveau relatif des enfants d’agriculteurs
19
s’accroît ainsi considérablement quand on passe des anciennes générations aux
plus récentes.
- De même, comparé aux individus issus de famille de cadre supérieur ou de chef
d’entreprise, le niveau relatif des enfants issus de milieux intermédiaires est plutôt
plus élevé au sein des jeunes générations que des plus anciennes.
- Les évolutions ne sont pas complètement “linéaires” : pour reprendre le cas
précédent, le niveau relatif des enfants de cadres est plutôt plus fort dans la
génération des 25-34 ans que dans la génération des 35-44 ans.
A l’issue de ces trois premières sections, nous disposons de descriptions
statistiques assez concordantes et finalement assez précises de l’évolution des
inégalités devant l’enseignement. Le problème est maintenant de formuler des
hypothèses les plus plausibles quant aux mécanismes qui génèrent ces inégalités et
quant aux lois qui expliquent leur évolution.
4. L’inégalité des chances : les mécanismes
Comment aller plus loin dans la compréhension des mécanismes générateurs
d’inégalités? En terme abrupt, la question est la suivante : les inégalités traduisent-
elles des dispositions différentes vis-à-vis de l’école, ses exigences et son
fonctionnement? Ou bien sont-elles le produit de décisions faites par les familles à
chaque étape du cursus scolaire (poursuivre/renoncer), arbitrages différents d’un
milieu social à l’autre?
L’enjeu de ce débat est important: dès l’instant où les dispositions des élèves
s’avéreraient décisives, la réduction des inégalités passerait en priorité par une
réflexion sur le système scolaire lui-même, sur sa sélectivité propre. Dans le cas
contraire, les inégalités devant l’enseignement auraient pour origine d’autres
inégalités, économiques et sociales: elles existeraient indépendamment de la
20
qualité et de la sélectivité du message scolaire, ou de la complexité du
fonctionnement du système éducatif. Une réforme pédagogique n’aurait pas d’effet
direct sur elles.
Les travaux fondateurs de B. Bemstein vont à l’appui de la première thèse:
l’acquisition et la maîtrise des normes scolaires dépendent étroitement du milieu
social dans lequel les individus passent leur première enfance. Elles sont décisives
pour son parcours ultérieur’0.En France, Bourdieu et Passeron ont théorisé une
école reproduisant et légitimant les inégalités sociales par l’imposition voilée d’un
arbitraire culturel voilé. Plus récemment, et plus pragmatiquement, A. Prost
documente avec précision l’importance d’une bonne connaissance des différentes
filières, d’une bonne anticipation de leurs rendements’1.
Pour autant, R. Boudon, il y a déjà vingt ans, a proposé un modèle relativisant
l’importance de ce type d’inégalités : le rôle des dispositions culturelles apparaît
mineur comparé à la succession d’arbitrages réalisés en cours de cursus par les
familles et les élèves’2.
4.1. Le modèle de Bondon : un atout culturel constant
Rappelons les grandes hypothèses du modèle de Boudon:
(1) Au sein d’une génération d’élèves, certains sont mieux disposés que d’autres
vis-à-vis de l’école. La proportion d’enfants à fort potentiel est supposée plus
importante dans les milieux aisés.
10 Bernstein met en évidence un lien entre la structure de langage des enfants et les valeurs ayant
cours dans leur entourage familial. Pour simplifier, les normes scolaires favoriseraient les enfants
des classes supérieures où l’on s’attache à prendre de la distance avec ses perceptions, à en
exprimer la singularité. Elles défavoriseraient les enfants des classes populaires dont le langage
cherche plutôt à exprimer l’adhésion aux perceptions communes.
Voir A. Prost [1986].12 A certains égards, la thèse de Boudon prolonge et théorise les travaux empiriques pionniers de
A. Girard. Voir par exemple A. Girard et P. Clerc [1964] ainsi que A. Sauvy et A. Girard [1965].
21
(2) A origine sociale donnée, le niveau relatif des résultats (la réussite) ne dépend
que du potentiel initial.
(3) A origine sociale et potentiel initial donnés, la réussite est donc la même aux
différents paliers du cursus scolaire.
(4) A résultats équivalents, c’est-à-dire à potentiel scolaire donné, la probabilité de
renoncer à ses études est d’autant plus forte qu’on est issu d’un milieu modeste.
Cela peut refléter une valorisation différente des diplômes. Cela peut aussi
correspondre à des coûts anticipés différents suivant la situation familiale.
Pour simplifier à l’extrême on a le schéma suivant, à chaque palier du cursus
Disposition (a) > Résultat (b) > Décision
Les relations (a) et (b) sont indépendantes du point de bifurcation considéré. En
revanche le lien (b) est différent suivant la position sociale de l’entourage familial,
mais les différences entre milieux sociaux sont constantes.
Pour valider son modèle, R. Boudon donne une valeur a priori aux différents
paramètres et procède à des simulations dynamiques. La convergence entre le
résultat des simulations et les tendances observées fournit la base empirique de sa
démonstration’3.
Il existe une stratégie un peu différente: elle consiste à confronter directement le
modèle aux données observées (en l’occurrence les tables croisant origines
sociales et niveaux scolaires) et à rechercher les “vraies” valeurs des paramètres.
Pour mener cette confrontation, il est nécessaire de formaliser les hypothèses (1) à
(4). En supposant simplement deux catégories d’élèves (forts et faibles) et deux
points de bifurcation dans le cursus scolaire (échouer ou réussir à l’entrée dans le
Sur ce point, voir le commentaire de R. Hauser [1976].
22
secondaire, dans le supérieur), le modèle de Boudon s’écrit pour chaque classe
d’origine j
(l-p1) f1 ± (1-q1) (l-f1) = s
(I) + q1 (l-q1) (l-f1) = i,2
p f1 + q (l-f1) =
où (s1) représente les proportions d’élèves d’origine j et sortis du système scolaire
au niveau j, p1 (resp. q1) le taux de passage des élèves à fort (resp. faible) potentiel
à chaque bifurcation, et f la proportion d’élèves à fort potentiel dans la classe i.
Les paramètres (p , q1 , f.1) doivent évidemment vérifier la contrainte
(c) (p1,q1,f1) {0,1]
Dans cette version très simplifiée, le modèle comporte 6 équations indépendantes
et 9 paramètres. Sans la contrainte (c), il serait largement surdéterminé.
Pourtant, il n’existe aucune famille de paramètres permettant de reconstituer les
données de 1993 (annexe 1). La confrontation aux données de 1970 conduit au
même constat : tel quel, le modèle ne s’adapte pas correctement à la réalité.
A priori, le point faible de l’axiomatique initiale de Boudon se situe au niveau de
l’hypothèse (3), selon laquelle, pour un niveau culturel donné, les premiers paliers
du système scolaire ne sont pas plus difficiles à franchir que les derniers.
L’avantage des élèves les mieux disposés pour les études reste constant au cours
du cursus14.
Cette hypothèse peut être modifiée avec un certain profit: l’avantage d’être bien
disposé pour les études (et l’atout d’une bonne connaissance du système), doit
pouvoir se manifester d’autant plus nettement que l’on avance dans le cursus15.
R. Boudon est bien sûr conscient du caractère simplificateur de ce type d’hypothèse (voir
Boudon [1973] chapitre 6).15 Nous présentons, section 5.3., un test empirique direct de ce type dhypothèse.
23
Parallèlement, le niveau relatif des résultats doit baisser au fur et à mesure que la
sélection accroît le niveau de la concurrence.
Par définition, et pour rester dans un cadre très simple, nous supposerons pour
notre part qu’au premier palier du système scolaire, les élèves à fort potentiel
passent tous. Seule une fraction des faibles renonce. Au second palier, les faibles
(rescapés) échouent tous. Une fraction des forts réussit dans l’enseignement
supérieur.
Une telle modélisation reste très simplificatrice, mais elle nous paraît plus réaliste
que le cadre initial. D’autre part, et contrairement à l’hypothèse (3), cette nouvelle
hypothèse exploite le caractère essentiellement relatif des dispositions scolaires
un enfant n’est pas doué pour les études dans l’absolu, il n’est doué que
relativement aux problèmes posés par l’école, aux enfants de sa génération. C’est
pour cette raison qu’il est possible de définir les élèves à fort potentiel comme
n’ayant, par exemple, aucune chance d’échouer aux premiers paliers du parcours
scolaire.
4.2. Un modèle avec atout culturel variable
La fraction des élèves faibles d’origine j franchissant le premier palier (resp. celle
des forts passant le second palier) sera noté q1 (resp. pi).
De même S continuera de représenter les proportions d’élèves d’origines j et
sortis du système scolaire au niveau j.
Le modèle s’écrit désormais, pour tout i
(l-q) (l-fi) = s13
(II) (l—p1) f1 + q1 (1-f1) = s,2
pi f1 = s11
avec les mêmes contraintes (c) (p ,q1 , f1) e [0,1]
24
_____
— -—----—-——
Contrairement à (I), la formalisation (II) permet de reconstituer les données
observées de 1970 à 1993. Point important, les solutions admissibles demandent
toutes un minimum d’hétérogénéité au niveau des dispositions scolaires initiales
pour s’ajuster aux observations, le modèle (II) exige que soient introduites des
inégalités de potentiel scolaire entre les différents milieux d’origine.
Formellement, dès l’instant où l’on impose une contrainte du type (f,=constante), le
modèle (II) ne permet plus reconstituer les données observées (annexe 1).
En revanche, le modèle admet une solution reposant essentiellement sur des
différences initiales de dispositions scolaires. Cette dernière est assez suggestive et
nous allons la détailler
- la fraction d’élèves à faible potentiel renonçant au premier point de bifurcation
est la même dans toutes les classes sociales (1-q1=1-q2=l-q3=’.50).
- la fraction d’élèves à fort potentiel renonçant au dernier palier du cursus est la
même dans les classes intermédiaires et dans les classes populaires (1-P2=1-
p3—.40). Dans les milieux supérieurs, la proportion est plus faible (I-p 1=.15). Pour
s’ajuster aux observations, notre modèle impose donc de doter les classes
supérieures d’une plus grande persévérance’6.
- les proportions d’élèves à fort potentiel sont respectivement de f1=.87 dans les
milieux supérieurs, f2=.77 dans les milieux intermédiaires et f3=.42 dans les
milieux populaires.
Fait assez remarquable, en 1970 comme en 1993, les coefficients f, sont du même
ordre de grandeur que les proportions de diplômés (moyens ou supérieurs) dans la
génération des parents. L’interprétation de ces paramètres en termes de
dispositions culturelles s’en trouve confortée. En outre, pour grossière qu’elle soit,
la démarche formelle suggère assez précisément ce qu’il est possible d’entendre
par “dispositions culturelles” elles semblent avant tout liées à l’expérience faite
par le milieu familial lui-même du système scolaire et de ses codes.
16 Pour une analyse des phénomènes de persévérances différentielles, voir Duru-Jarousse-Mingat
[1993].
25
Les modèles formels que nous venons d’étudier sont très simplificateurs et il serait
imprudent de prendre leurs résultats au pied de la lettre. Retenons simplement la
conclusion suivante : le modèle selon lequel les inégalités devant l’enseignement
seraient le simple produit de la différentiation des choix suivant le niveau
économique et social des familles ne tient pas très bien. Confronté aux données
observées, un formalisme légèrement différent permet de supposer un rôle
important aux dispositions culturelles, et plus précisément au niveau scolaire de
l’entourage familial lui-même.
5. L’importance des facteurs culturels
D’un point de vue empirique, il est évidemment difficile de cerner dans quelle
mesure les inégalités observées à la sortie du processus scolaire, sont le reflet de
différences intrinsèques entre les élèves ou le produit d’arbitrages différents
réalisés en cours de cursus’7.Les données dont nous disposons se prêtent mal à
l’identification des variables pertinentes et à l’élaboration de tests qui permettraient
réellement de trancher. Nous allons cependant essayer de cerner les hypothèses les
plus plausibles.
Conformément aux indications suggérées par l’approche théorique, il semble
inévitable d’enrichir l’analyse d’indicateur sur le niveau culturel des familles. Dès
l’instant où les résultats scolaires dépendraient uniquement du niveau économique
et social des familles (et pas du tout de leur niveau culturel), il serait difficile de
rejeter l’idée d’une prépondérance des différences dans les façons d’arbitrer, dans
17 Il faudrait pouvoir identifier les arguments de la fonction d’utilité des individus (en particulierleur résultat et leur ‘facilité’ scolaire) et les fonctions d’utilité elles-mêmes (comment les individusse décident en fonction de leur résultat). Or fondamentalement les données utilisées ne permetd’observer que les issues.
26
les choix plutôt que dans les dispositions initiales18. Simplement il resterait à
renouveler l’expression formelle de cette thèse.
Dans le cas où les facteurs culturels s’avéreraient dominants, en toute rigueur on
ne pourrait pas conclure à la prépondérance des dispositions initiales (des
inégalités liées à 1”offre”). Une forte corrélation entre destinée scolaire et origine
culturelle pourrait encore s’interpréter (de façon néanmoins plus précaire) en terme
de différenciation des principes d’arbitrages : le niveau de diplôme des parents
n’est sans doute pas seulement l’indice de leurs ressources culturelles. Peut-être
est-il parfois une composante à part entière de leur position de classe. Peut-être
une partie de l’effort éducatif parental tend-il parfois simplement à préserver et
reproduire un statut scolaire, indépendamment du rendement social ultérieur de ce
statut. 19
5.1. Destinées socio-économiquement différenciées contre
destinées culturellement différenciées
Selon une procédure maintenant rôdée, notons Nid le nombre d’individus ayant
grandi dans un milieu de niveau social i, dont le père avait un niveau de diplôme j,
et ayant eux-mêmes acquis le niveau de diplôme d.
Si le diplôme obtenu par les individus était indépendant de leurs origines sociales
et culturelles, on observerait au niveau agrégé
*lj
*Pd (4)
Ce modèle d’indépendance est bien sûr très peu réaliste. Les estimations
auxquelles il conduit diffèrent largement des données observées, en 1993 comme
18 on comprendrait en effet difficilement pourquoi les dispositions économiques à elles seules
pourraient faciliter l’apprentissage précoce d’un langage “formel” plutôt que ‘commun”, pour
reprendre la typologie majeure de B. Bernstein.19 Sur ce point, voir par exemple la discussion de Thélot [19821 à propos du certificat d’étude et sa
critique des thèses de Bertaux.
27
aux enquêtes précédentes. Sa distance aux données empiriques va néanmoins nous
servir de référence et permettre de comparer les principales hypothèses
concurrentes (l’analyse statistique qui suit est synthétisée dans le tableau V).
La première est celle de carrières scolaires dont l’issue dépendrait bien plus du
niveau socio-économique que des ressources culturelles de l’entourage familial.
Nous désignerons cette thèse comme celle de destinées socio-économiquement
différenciées (DSD).
N ( * * * ‘* 5ij,d ‘Pj Pj d ij) kd
Les estimations réalisées à partir du modèle (5) sont significativement plus
proches des données observées que celles issues de (4). L’amélioration est
néanmoins assez faible : environ 40% des écarts initiaux restent inexpliqués.
La thèse concurrente correspond à des carrières dont la réussite reflète avant tout
la capacité des familles à préparer les enfants au langage scolaire aussi bien qu’aux
difficultés de l’orientation et du choix des filières. En lui-même le niveau socio
économique est supposé n’avoir d’importance que secondaire. Cette thèse peut se
traduire empiriquement selon un formalisme symétrique de (5), dans le cadre d’un
modèle de destinées culturellement différenciées (DCD).
N ( * * * 6i,j,d ‘J-ri j I-td Ilij,’ Pj,d
Comparées aux simulations issues de (5), les estimations obtenues à partir de (6)
sont deux fois plus proches des données observées: 20% seulement du résidu de
référence reste inexpliqué.
La confrontation des deux effets (DSD et DCD) au sein d’un même surmodèle
confirme la nette prépondérance des inégalités d’origine culturelle sur les
inégalités d’origine plutôt économique. La hiérarchie scolaire des enfants traduit
davantage la hiérarchie scolaire des parents que leur classement socio
économique.
Il est éclairant de traduire quantitativement certaines des estimations de ce
modèle : toutes choses égales par ailleurs, un enfant de diplômé du supérieur a
28
__
— ------ ------- --------- -- - -----------— - ------
environ 3,8 fois plus de chances d’être lui-même diplômé du supérieur qu’un
enfant issu d’une famille dont le père était dépourvu de diplôme. L’avantage d’un
enfant de cadre sur un enfant d’ouvrier ou d’employé est moitié moindre (1 sur
1,8).
Combinant de manière indépendante les deux effets DCD et DSD, le surmodèle
(DSD+DCD) permet de reconstituer les données observées de façon assez
satisfaisante (p>.01). L’effet subsistant correspond à la combinaison des inégalités
d’origines culturelle et économique : il peut pratiquement être considéré comme
aléatoire. Pour simplifier, la différence entre un enfant d’ouvrier diplômé et un
enfant d’ouvrier non diplômé n’est guère distinguable de celle existant entre un
enfant de cadre diplômé et un enfant de cadre non diplômé. Tels que nous les
mesurons, les différentes types de ressources ne semblent guère redondants et les
inégalités s’ajoutent.
5.2. Appartenance familiale au salariat non manuel et destinée scolaire
Les paramètres culturels revêtent donc une importance prépondérante dans la
génération de l’inégalité des chances. L’analyse statistique confirme ce que
suggérait la confrontation des modèles explicatifs et des données empiriques.
En toute rigueur, répétons-le, une question très importante reste ouverte (même si
elle se recentre peu à peu) : les différences portent-elles sur la façon dont sont
prises les décisions, ou au contraire sur la proximité des enfants au système
scolaire. Les enfants sont-ils intrinsèquement inégaux devant le système
pédagogique, ou bien est-ce la valeur qu’ils accordent aux études qui n’est pas la
même? Ou plus exactement: lequel de ces deux facteurs domine l’autre?
Pourquoi, à niveau social donné, les familles les mieux dotées culturellement
valoriseraient-elles davantage l’école? Une réponse s’impose : tout simplement
29
—- -- —- - ---- - - —
parce que ces familles seraient aussi celles dont le statut et sa “reproduction”
dépendent le plus étroitement du capital scolaire.
Pour éprouver statistiquement cette idée, il est nécessaire d’introduire une nouvelle
dimension dans notre représentation des milieux sociaux. A chaque échelon de la
hiérarchie socio-économique, cette dimension doit capter l’intérêt porté à la
réussite scolaire, la plus ou moins grande nécessité d’une telle réussite.
De fait une telle dimension est déjà présente dans la plupart des schémas de
stratification sociale, qu’ils soient théorisés comme celui de J.H. Goithorpe en
Angleterre, ou qu’ils soient plutôt issus d’un travail de compromis et
“empiriquement raisonné” comme celui du code des PCS en France.
Traditionnellement cette dimension non verticale oppose les milieux sociaux
suivant la nature des tâches effectuées (manuelles ou non) et le statut dans
l’emploi du chef de famille (non salarié ou salarié).
Pour notre part, nous nous restreindrons à la distinction entre salarié non manuel
d’une part, et non salarié et salarié manuel d’autre part. En haut de l’échelle socio
économique, cette distinction oppose les cadres aux chefs d’entreprise. En bas, les
ouvriers et paysans aux employés. A chaque échelon, les salariés non manuels
sont plutôt plus diplômés que les autres, et évoluent dans des structures où le
diplôme joue un rôle décisif.
Précisons une nouvelle fois l’hypothèse que nous cherchons à tester: le niveau
scolaire de l’entourage familial n’est pas source d’inégalités en lui-même
(inégalités “à la Bernstein” ou “à la Prost”). Simplement il est plus élevé dans les
milieux dont le niveau social est le plus étroitement dépendant du capital scolaire.
Les enfants dont l’entourage familial est moins cultivé ne sont pas pénalisés par le
système pédagogique, mais appartiennent à des milieux pour qui en moyenne, les
performances scolaires ont moins d’importance.
30
Considérons donc Nj,hJ,d le nombre d’individus ayant obtenu le diplôme d, dont
l’origine sociale peut être caractérisée par un niveau socio-économique j, une
position structurelle h (salariat non manuellautres catégories), et un niveau culturel
j. Le modèle de base sera cousin du modèle (5) de la section précédente.
NhJd = I.Ij*
11h* 1j * ILd *
Pih*
lij*
hj*
i,hj*
i,d (5bis)
Dans ce modèle, la destinée scolaire dépend uniquement de la position de
l’entourage familial dans la hiérarchie socio-économique. Les estimations réalisées
dans ce cadre s’éloignent très significativement des données observées. L’écart
nous servira de référence (l’analyse statistique qui suit est synthétisée dans le
tableau VI).
Supposons maintenant que les destinées scolaires dépendent aussi de
l’appartenance familiale au salariat non manuel (sensée mesurer le degré auquel le
statut familial est lié à l’école). Par rapport à (Sbis), il s’agit d’admettre l’existence
d’un lien direct entre h et d.
N —f * * * * * * * * * *
i,hj,d — ‘4t 11h Pi Pd Pi,h ItiJ hj Pi,hJ !ti,d) Ph,d Pi,h,d 15
Les estimations obtenues sous cette nouvelle hypothèse sont plus réalistes que
celles obtenues sous (5bis), mais dans des proportions assez décevantes. Plus des
deux tiers du résidu de référence restent inexpliqués.
Plaçons nous maintenant dans le cadre concurrent et postulons un lien direct entre
la hiérarchie scolaire des pères et celles des fils indépendamment de
l’appartenance au salariat non manuel (et de l’intérêt supposé pour le capital
scolaire).
= (i’ * * Pj *11d ‘‘ 11i,h
*Iij
*hj
*Iihj
*i,d)
*j,d (7bis)
Les estimations deviennent cette fois beaucoup plus réalistes: les trois quarts des
écarts mesurés entre (5bis) et les évolutions observées sont expliqués par le seul
lien direct (j*d)
31
Quand on confronte les deux effets au sein d’un même surmodèle, le lien direct
entre le niveau scolaire du père et celui des enfants explique une partie des
relations observées près de 3,5 fois plus importante que le lien entre l’appartenance
familiale au salariat non manuel et le niveau scolaire atteint par les enfants.
Au total, pour autant que les distinctions introduites permettent réellement
d’évaluer les degrés de motivation familiale, l’analyse précédente confirme
l’influence significative de ce type de facteur sur la destinée scolaire des enfants.
5.3. Tests complémentaires et extensions
Les méthodes statistiques utilisées jusqu’à présent traitent simultanément
l’ensemble du système scolaire. Cette démarche est nécessaire dès l’instant où l’on
cherche à tester les propositions contenues dans les différents modèles explicatifs.
Une vision globale permet de minimiser les erreurs de perspectives. Un éclairage
complémentaire peut toutefois être recherché à l’aide de tests locaux, réalisés
directement en certains points clefs du cursus scolaire.
Considérons tout d’abord, au sein d’une génération particulière, la population des
bacheliers. Conformément aux modèles formels envisagés précédemment,
supposons que la probabilité de poursuivre et réussir des études supérieures
dépende de façon indépendante de l’origine socio-économique d’une part et du
niveau culturel de l’entourage familial d’autre part. L’estimation de ce modèle sur
données individuelles conduit à des résultats assez robustes20:
- la probabilité de réussite est significativement plus forte pour les individus issus
de milieu socio-économique très favorisé (cadre supérieur, chef d’entreprise). De
même, et de façon indépendante, elle est significativement plus forte pour ceux
dont le père est diplômé du supérieur.
20 L’estimation de la probabilité de réussite dans l’enseignement supérieur d’un bachelier esteffectuée au moyen d’un modèle Logit dichotomique, à partir des données individuelles del’enquête FQP 1993.
32
- en revanche, les différences de réussite associées aux autres types d’entourage
familial (intermédiaire et inférieur) ne sont pas significatives. Plus précisément, on
rejette l’existence de différences au seuil de 1%.
Considérons maintenant l’ensemble d’une génération, et dans le même esprit que
précédemment, intéressons-nous à la probabilité d’obtenir au moins un diplôme.
Supposons qu’elle dépend des mêmes facteurs que la réussite des bacheliers dans
le supérieur. L’estimation de ce modèle sur données individuelles amène là encore
quelques résultats solides
- la probabilité d’échec scolaire est d’autant plus forte qu’on est issu d’un milieu
socio-économique modeste. De façon indépendante, elle est significativement plus
élevée pour ceux dont le père n’avait aucun diplôme.
- en revanche il n’y a pas de différence entre les individus dont le père était
moyennement diplômé et ceux dont le père était très diplômé.
Ces deux investigations très simples fournissent quelques confirmations directes
et importantes aux analyses précédentes
D’une part les différences culturelles ne jouent pas de la même façon en début et
en fin de cursus scolaire. En début de parcours, les inégalités sont surtout réelles
entre les plus démunis et les autres. En fin de parcours, elles distinguent surtout
les individus les mieux dotés de l’ensemble des autres. Ce résultat donne un appui
empirique aux remaniements proposés au modèle de référence avec “atout culturel
constant”.
Il permet aussi de mieux se représenter les mécanismes “culturels” de l’inégalité
des chances : réussir son cursus scolaire, ce n’est pas seulement disposer des
bonnes bases et éviter l’élimination précoce. C’est bien aussi, semble-t-il, savoir
s’orienter, choisir les filières et les voies les plus adaptées à ses moyens: de ce
point de vue, un entourage ayant l’expérience d’études supérieures est un avantage
significatif pour les bacheliers.
33
6. L’évolution de l’inégalité des chances : les mécanismes
Nous avons désormais une idée plus précise des mécanismes générant les
inégalités scolaires entre enfants d’une génération donnée : tant d’un point de vue
théorique qu’empirique, il est impossible de négliger le niveau scolaire de
l’entourage familial.
Il reste à comprendre pourquoi et selon quel principe évoluent ces inégalités.
L’une des hypothèses les plus simples et les plus fécondes concernant la
dynamique scolaire est celle rappelons-le de la ‘démocratisation uniforme’ : les
enfants poursuivent leurs études plus longtemps, obtiennent des diplômes plus
élevés, mais cette évolution concerne tous les milieux, quelles que soient leurs
ressources économiques ou culturelles.
C’est sur ce type d’hypothèse que R. Boudon fonde ses simulations dynamiques: à
disposition culturelle et niveau social donnés, les élèves ont une probabilité
croissante au cours du temps de franchir les différents paliers du cursus scolaire.
Le processus est exogène, le même pour tous, à chaque palier du cursus20.
Dans ce cadre, par construction, l’inégalité des chances n’évolue guère : les
niveaux de diplômes augmentent uniformément pour tous, mais les hiérarchies
scolaires restent stables.
Cette propriété du modèle de démocratisation uniforme (pour simplifier: DU) est
importante et fait de lui une référence idéale: toute “déviation” des évolutions
observées par rapport à une démocratisation uniforme permet de juger de la
réduction (ou au contraire du renforcement) des inégalités.
De quelles déviations peut-il s’agir? Autrement dit : sous quelles conditions les
évolutions réelles peuvent-elles être différentes des estimations obtenues dans le
cadre d’un modèle DU. Par définition, il suffit qu’à un palier ou à un autre du
20 s’agit d’un cas particulier de modèle de démocratisation uniforme: dans le cas générall’augmentation des taux de passages peut varier d’un palier à l’autre.
34
cursus, les taux de passage augmentent plus vite pour certains enfants que pour
d’autres.
Deux grands types d’hypothèses sont alors envisageables:
- ou bien, ces enfants se distinguent par les dispositions culturelles de leur
entourage familial. On peut alors parler de modèle de démocratisation
culturellement différenciée (DCD).
- ou bien, ces enfants se distinguent par la position de leur famille dans une
hiérarchie plutôt socio-économique, indépendante des ressources scolaires et
culturelles. On peut dans ce cas parler de modèle de démocratisation socio
économiquement différenciée (DSD).
6.1. Démocratisation uniforme contre démocratisation différenciée
Pour tester les modèles dynamiques concurrents (DU, DSD, DCD), il est
nécessaire d’analyser simultanément la déformation du lien entre le niveau social
des parents, leur niveau scolaire et le diplôme obtenu par les enfants.
Notons Nj,j,d,t les effectifs des individus ayant entre 25 et 34 ans à la date t, issus
d’un milieu de niveau social j, de niveau scolaire j (toujours repéré par le diplôme
du père) et eux-mêmes titulaires d’un diplôme de niveau d.
Pour commencer, supposons que la hausse du niveau scolaire est le simple produit
de l’élévation du niveau culturel et social dans lequel grandissent les générations
successives.
M — * * * * * * * * * *
“ij,d,t —!t1 P Pd -4 P,t I-ij Pj,t i,d Pj,d PiJ,d
Ce modèle structurel correspond à un cas très particulier de démocratisation
uniforme, un cas pour ainsi dire dégénéré, où les destinées scolaires des enfants de
chaque milieu social restent stables au cours du temps : seule joue la déformation
des structures sociales (démocratisation à “vitesse nulle”).
35
Les estimations réalisées sur ces bases s’écartent très significativement des
évolutions observées. Il faut affaiblir les hypothèses sur lesquelles repose le
modèle (l’analyse statistique qui suit est synthétisée dans le tableau VII).
Supposons tout d’abord que l’écart entre le modèle (8) et les évolutions observées
correspond à une augmentation uniforme des taux de passages, identique pour
tous les enfants, quelle que soit leur origine sociale et culturelle. On reconnaît
l’hypothèse DU de démocratisation uniforme, sous sa forme la plus générale.
Le nouveau modèle s’écrit:
N.. =(* * * * .* ..* .* * . * . * * 9ij,d,t ‘.P1 1d 11t l,t J1ij j,t P-,J,t P1,d j,d I1ij,d’ Pd,t
Les estimations réalisées sur ces bases sont beaucoup plus réalistes que celles
obtenues à partir du modèle (8).
Elles diffèrent néanmoins de façon encore très significative des évolutions
observées : pour proche qu’il en soit, le développement du système scolaire ne
correspond pas à une démocratisation uniforme, les inégalités ont évolué.
Pour donner un sens à cette évolution (réductionlrenforcement des inégalités) et
comprendre les mécanismes en jeu, il faut de nouveau chercher à affaiblir les
hypothèses de départ.
Dans un premier temps, supposons que l’écart entre le modèle DU et les
évolutions observées traduise une évolution des niveaux de diplômes différente
suivant le niveau social des familles. Restons en revanche dans le cadre où le
rapport entre la hiérarchie scolaire des familles et celle des enfants est stable dans
le temps. On reconnaît le modèle de démocratisation socio-économiquement
différenciée (DSD).
N.. (* .* * * .* * .*l,j,d,t \P1 Pj Pd Pt P,t !- P,t I-’,t
* * * * *!Lj,d j,d ij,d d,t) ILi,d,t
36
Les estimations réalisées dans ce cadre sont de meilleure qualité que celles
obtenues à partir du modèle DU. L’ajustement n’est toutefois pas complètement
satisfaisant.
Revenons donc aux simulations issues du modèle (8) et supposons cette fois que
leurs déviations par rapport aux évolutions observées traduisent une évolution des
niveaux de diplômes différente selon le seul niveau scolaire des familles. On
reconnaît cette fois le modèle de démocratisation culturellement différenciée
(DCD).
KT —( * * * * * * *ij,d,t — ‘li lij lid lIt Pj lij,t liij,t
* * * * ‘* 11lii,d lij,d liJ,d lid,t) liJ,d,t
Sous cette nouvelle hypothèse, les estimations sont de meilleure qualité que celles
obtenues dans le cadre DSD.
Il est possible de se livrer à des estimations prenant simultanément en compte les
deux types de différenciations (culturelle et économique), au sein d’un même
surmodèle: de nouveau la contribution de l’effet “DCD” apparaît
significativement plus forte que celle de l’effet “DSD”21.
Telle que nous la mesurons, l’inégalité des chances évolue donc d’abord sous
l’effet des variations de l’avantage d’être bien entouré scolairement.
L’examen des coefficients du surmodèle permet de mieux préciser les mécanismes
en jeu : entre 1970 et 1993 les liens entre la hiérarchie scolaire des pères et des
enfants ont plutôt eu tendance à se renforcer. Cette évolution est plus
particulièrement sensible au cours de la période récente. En revanche, le lien entre
hiérarchie socio-économique des milieux familiaux et hiérarchie scolaire a eu
tendance à se relâcher. De nouveau le phénomène est plus particulièrement
significatif au cours de la période récente.
21 Les simulations obtenues à partir du surmodèle ne different pas significativement des évolutions
observées. Autrement dit, le lien entre hiérarchie scolaire des parents et des enfants évolue à peu
près indépendamment du lien entre hiérarchie socio-économique des parents et destinée scolaire
des enfants.
37
Pour fixer les idées, il est éclairant de traduire “quantitativement certaines
estimations du modèle : au cours de la période récente, entre 1985 et 1993,
l’évolution du lien entre les hiérarchies scolaires des pères et des enfants joue dans
le sens d’une hausse d’environ 20% de la probabilité d’être au moins bachelier pour
un individu (de 25-34 ans) dont le père est lui-même bachelier. Dans le même
temps, l’évolution du lien entre hiérarchie socio-économique et destinée scolaire
joue dans le sens d’une baisse équivalente de la probabilité d’être au moins
bachelier pour un individu issu d’un milieu de cadre et chef d’entreprise.
Le relâchement des inégalités d’origine économique et le renforcement des
inégalités d’origine culturelle semblent ainsi avoir pris corps au cours des deux
dernières décennies, avec le ralentissement économique.
6.2. Appartenance familiale au salariat non manuel et destinée scolaire:
étude dynamique
En toute rigueur, les résultats précédents posent des problèmes d’interprétation
déjà rencontrés lors de l’analyse “statique”. L’évolution des inégalités d’origines
culturelles traduit-elle une évolution de l’école, une évolution de l”offre”? Serait-
elle aujourd’hui plus sélective à l’égard des enfants dont l’entourage est le plus
éloigné de la culture scolaire? Ou au contraire les tendances nouvelles reflètent-
elles l’apparition de nouveaux comportements, une évolution de la demande?
Face à ces questions redoutables, la distinction entre les milieux de salariés non
manuels et les autres types de milieux sociaux peut de nouveau être introduite
avec profit. Qu’ils soient cadres, professions intermédiaires ou employés, les
salariés non manuels ne sont pas seulement ceux dont le statut dépend le plus d’un
“capital” scolaire. La tendance depuis plusieurs décennies est aussi celle d’une
38
___________
--—- -----— ---------------—----------------—----
augmentation de leurs emplois. En revanche, les non salariés et les ouvriers font
plutôt face à un rétrécissement de leurs perspectives22.
De fait, quelle que soit leur place dans la hiérarchie salariale, les familles de “cols
blancs” ont un destin lié à des entreprises, des fonctions ou des secteurs plutôt en
essor (en particulier les services). De leur côté, paysans et ouvriers oeuvrent dans
des secteurs industriels et agricoles particulièrement exposés à la concurrence
internationale et où les gains de productivité sont très rapides.
Cette dynamique de “tertiairisation” déforme les structures sociales. Dans une
certaine mesure, ce phénomène peut expliquer certains aspects des évolutions
récentes de l’inégalité devant l’enseignement
- d’une part, avec le déclin paysan, la tertiairisation est plutôt plus rapide en bas de
la hiérarchie sociale qu’en haut. Tel que nous l’avons mesuré, l’affaiblissement des
inégalités d’origines économiques n’est peut-être ainsi qu’un effet de structure : si
les enfants issus de milieux socio-économiques modestes semblent aujourd’hui un
peu moins défavorisés vis-à-vis de l’école, c’est qu’ils sont de plus en plus souvent
issus du salariat non manuel. Ils cumulent de moins en moins souvent le handicap
de ressources économiques modestes, avec celui d’un entourage familial dont le
statut dépend peu l’école et pour qui la poursuite des études n’est pas une
nécessité23.
- d’autre part, le déplacement des emplois vers le salariat non manuel ne peut
qu’inciter les milieux en déclin (manuel et non salarié) à investir dans un capital
scolaire nécessaire à la reconversion, à la mobilité de leurs enfants. Cela dit, face à
la montée du chômage et des risques de déclassement, tous les milieux sans
exception sont conduits à investir dans l’école. D’une façon ou d’une autre, la
concurrence scolaire s’est sans doute durcie et c’est peut-être l’une des clefs pour
22 Voir par exemple Goux-Maurin [1993bJ.23 Nous avons pu vérifier, section 5, l’avantage scolaire faible, mais significatif, des enfants issus
du salariat non manuel.
39
comprendre l’évolution récente des inégalités : la motivation s’accroît pour tous,
mais à des degrés divers et en disposant d’atouts scolaires différents24.
Pour tester les deux hypothèses précédentes (effets de structure, modification de
comportements), la stratégie est assez simple:
- Retracer l’évolution des effectifs de diplômés non seulement suivant le niveau
socio-économique et scolaire de l’entourage familial, mais aussi suivant
l’appartenance au salariat non manuel (la “service class”).
- Vérifier dans quelle mesure les destinées scolaires évoluent ou non de manière
indépendante de ce statut familial.
Nous n’allons pas reprendre le détail de l’analyse statistique, en tout point
semblable à celle des sections précédentes, mais en venir directement aux résultats
(l’analyse statistique est synthétisée dans le tableau VIII)
- en raisonnant au sein de chacune des deux grandes catégories (salariat non
manuellsalariat manuel, non salariat) le lien entre la hiérarchie socio-économique
des familles et la hiérarchie scolaire des enfants est stable. Plus exactement:
l’évolution est si faible qu’il n’est pas besoin d’en postuler l’existence pour simuler
correctement les évolutions observées. Autrement dit, l’apparente diminution des
inégalités d’origine économique (relevée dans la section précédente) correspondait
surtout à des effets de structure: une augmentation de la part du salariat non
manuel relativement plus rapide en bas de la hiérarchie sociale qu’en haut.
- en lui-même, le lien entre l’appartenance familiale au salariat non manuel et la
destinée scolaire des enfants n’évolue pas. Il n’y a pas de tendance claire dans
24 Concrètement, si ces évolutions de comportement correspondaient à un aspect important de la
réalité, le lien entre la destinée scolaire des enfants et l’appartenance familiale au salariat non
manuel diminuerait. Dans ce cas, on tiendrait une manifestation des évolutions de la “demande”
des familles en réponse aux modifications rapides des opportunités d’emplois.
40
l’évolution des hiérarchies scolaires des enfants suivant qu’ils sont issus de milieux
plutôt “économiques en déclin” ou plutôt “scolaires en croissance”. Saris doute, les
milieux en déclin sont-ils particulièrement incités à investir dans l’école. Mais,
avec la multiplication des filières, le salariat non manuel dispose peut-être d’un
avantage informationnel et stratégique croissant.
- par ailleurs, le modèle confirme le renforcement du lien entre la hiérarchie
scolaire des parents et celle des enfants. Ce phénomène caractérise la destinée
scolaire de l’ensemble des individus, qu’ils soient issus du salariat non manuel ou
des catégories concurrentes.
- enfin quoique indirects et de sens variables, quelques-uns des effets liés à
l’appartenance familiale au salariat non manuel sont assez tranchés. En particulier,
en bas de la hiérarchie socio-économique, on peut constater un affaiblissement
significatif du handicap d’être issu d’un milieu “manuel”.
Ce dernier résultat invite à se pencher de nouveau sur l’hétérogénéité des origines
sociales populaires.
6.3. Appartenance familiale au non salariat et destinée scolaire: étude
dynamique
Nous avons déjà eu l’occasion, au début de cette étude, de constater la rapidité
particulière avec laquelle les enfants d’agriculteurs ont profité du développement
du système scolaire.
Il est possible d’étudier ce dynamisme propre au milieu agricole dans un cadre un
plus général (moins ad hoc), en explicitant plus proprement les principes de
41
stratification en jeu. Pour cela, il suffit de déplacer l’axe “non vertical” de notre
représentation des milieux sociaux25.
Désormais, à chaque échelon de la hiérarchie socio-économique, la distinction
sera faite entre salariat et non salariat. Par rapport à l’analyse précédente (section
6.2), la différence se situe, comme nous le souhaitons, en bas de la hiérarchie
socio-économique: la ligne de partage passe désormais entre agriculteurs d’une
part, ouvriers et employés d’autre part (et non plus entre agriculteurs et ouvriers
d’une part, employés d’autre part).
De nouveau nous ne retracerons pas l’ensemble de l’analyse statistique (elle est
synthétisée dans le tableau IX). Nous présentons directement les principaux
résultats
- Il n’y a pas à proprement parler de déformation du lien entre destinée scolaire et
le niveau social d’origine. On n’observe pas davantage de déformation du lien
entre destinée scolaire et l’origine sociale repérée dans la dimension “non
verticale”, opposant salariat d’une part et non salariat d’autre part.
Certaines évolutions sont significatives, mais elles sont de sens opposés et se
compensent. Autrement dit, entre les enfants issus du salariat d’une part et du non
salariat d’autre part, les inégalités évoluent, mais elles évoluent de façon
différentes en haut et en bas de la hiérarchie des origines sociales : au sein des
classes modestes, on constate ainsi une amélioration de la situation relative des
enfants d’agriculteurs par rapport aux enfants issus des milieux ouvriers ou
employés (en phase avec les résultats “ad hoc” de la section 2). Dans les classes
intermédiaires, on relève au contraire, une amélioration du niveau de diplôme
25 Dans la plupart des schémas de stratification sociale, les agriculteurs forment une classe à part.Cette distinction correspond à plusieurs clivages importants de la société, tant du point de vue desmodes de vie, que du contexte socioprofessionnel. Aucune des dimensions étudiées jusqu’à présentne la capte réellement, qu’il s’agisse de la hiérarchie socio-économique, ou de l’axe salariat nonmanuellautres catégories.
42
relatif des enfants de salariés (profession intermédiaire) par rapport à celui des non
salariés (artisanat, petit commerce). En haut de la hiérarchie sociale, les
différences d’évolution sont moins tranchées entre salariat (cadres) et non salariat
(chefs d’entreprise).
- le renforcement des inégalités liées à la hiérarchie scolaire des parents reste
significatif, valable quel que soit le niveau socio-économique ou le statut
(salariatlnon salariat) de l’entourage familial.
43
Conclusion
Au cours des dernières décennies, les inégalités n’ont guère suivi de tendance
ferme, ni dans le sens d’une réduction, ni dans celui d’un renforcement. Sans
doute, est-ce le principal enseignement de cette étude. Certes, les enfants
obtiennent aujourd’hui des diplômes plus élevés qu’il y a trente ans, quelle que soit
leur origine sociale. En ce sens, on peut parler de démocratisation : l’accès à la
formation est plus large. Mais ce type de diffusion ne réduit pas forcément les
inégalités. Il faut aussi qu’elle concerne plus spécifiquement les catégories les
moins scolarisées. Or les évolutions récentes ne s’écartent guère d’une
démocratisation “uniforme” qui concerne tous les enfants indépendamment de leur
milieu d’origine.
Au fil des générations, on ne décèle en réalité qu’une seule véritable inflexion : le
lien se renforce peu à peu entre la hiérarchie scolaire des parents et celle des
enfants. Tel est peut-être le second résultat important de cette investigation
l’explication des inégalités peut de moins en moins faire abstraction de la
proximité très variable des familles au système scolaire.
D’un point de vue théorique, le réexamen du modèle de Boudon conduit à
reformuler certains de ces axiomes. Le modèle qui en résulte est hybride: par sa
conceptualisation, il reste proche du formalisme de R. Boudon. En revanche, par
l’importance qu’il donne à l’évolution de la concurrence scolaire au cours du cursus
(concurrence entre “survivants”), il incorpore un mécanisme propre à des modèles
tel celui de Bourdieu-Passeron.
Plus qu’un modèle, c’est une classe de modèles que ce type d’approche conduit à
valider: ils ont en commun de mêler de façon irréductible certains mécanismes
proprement culturels et d’autres dérivant indirectement de la stratification sociale.
44
D’un point de vue empirique, il est délicat de pondérer l’influence des différents
mécanismes. Il est particulièrement difficile de quantifier le rôle propre de
l’offre” (sélectivité de l’école et de son fonctionnement) ou celui de la “demande”
(choix et comportement des familles). Les propriétés formelles des modèles sont
suggestives, mais ne permettent pas de trancher.
On vérifie toutefois le peu d’influence propre (sur la destinée scolaire) d’une
enfance passée dans les classes salariées non ouvrières. Toutes choses égales par
ailleurs, le statut des salariés non ouvriers dépend pourtant davantage du diplôme
et de l’école que celui des non salariés ou des ouvriers. De façon générale on ne
décèle pas de comportements particuliers, liés à une plus étroite dépendance du
statut familial aux sanctions scolaires.
A l’issue de cette étude plusieurs questions restent évidemment posées. Les
modèles explicatifs sont à approfondir, notamment dans leur version dynamique.
Le rôle des anticipations est à expliciter. Celui des “marchés scolaires” et de leurs
rationnements est à formaliser, dans des termes qui pourraient s’inspirer de la
modélisation des déséquilibres (et de leur agrégation) en économie.
Plus généralement, il serait souhaitable de prolonger l’analyse des mécanismes de
la mobilité sociale. Le destin social des individus ne dépend pas seulement du
niveau atteint en fin de scolarité. A diplôme donné, tout le monde ne débute pas sa
carrière au même point de l’espace social. Les opportunités de promotions et les
risques de déclassement se déclinent eux aussi selon des lois différentes suivant le
milieu dont on est issu.
Le concept clef n’est plus celui de démocratisation, mais celui de “méritocratie”,
avec toutes les difficultés qu’il y a à cerner clairement le contenu et les limites de
ce principe.
45
Récapitulatif des notes
(1) Pour une présentation critique des théories culturalistes et une confrontation de
ces théories avec le “néoindividualism&’ de R. Boudon on peut consulter par
exemple Cherkaoui [1986] ou Cuin [1993]. Pour une discussion des limites de
l’épistémologie de R. Boudon, consulter par exemple Favre [1980]. Enfin pour une
critique de l’utilitarisme commun aux deux approches, voir Caillé [1989].
(2) On peut songer aux codes de J.H Goldthorpe, ou à celui de O. Wright. A leur
sujet, on peut consulter Marshall et alu [1988].
(3) Voir par exemple Carré-Dubois--Malinvaud [1972].
(4) Ce ratio s’apparente à un coefficient concurrentiel “global”, dans l’esprit des
traductions proposées par Vallet [1988] au terme anglais “odd ratio”.
(5) Voir l’article de J. C. Combessie [1984] et l’analyse de L. A. Vallet [1988] sur
les difficultés liées au choix des indicateurs statistiques.
(6) Et pour ceux qui ne les auraient pas achevées, on peut supposer que leur
situation est acquise au regard de notre nomenclature de formation.
(7) L’estimation des paramètres t se fait sous la contrainte de leur répartition en
moyenne géométrique autour de la valeur 1. Ce type de paramétrisation
loglinéaire permet de tester simplement les hypothèses d’indépendance et
d’estimer l’influence d’une variable ou d’une combinaison de variables sur la
structure de la table étudiée. Voir en particulier M. Bishop, S. Fienberg, P.
Holland [1988] etL. Goodman [1972].
(8) Plus précisément il explique près 98% de la variance résiduelle dans le cas où
l’on distingue 3 types de diplômes et 3 types d’origines sociales, et près de 91% de
cette même variance résiduelle lorsqu’on distingue 4 niveaux de diplômes et
d’origines sociales.
(9) Sur ce type de problème voir C. Baudelot [1989] ou C. Thélot [1989].
(10) Bemstein met en évidence un lien entre la structure de langage des enfants et
les valeurs ayant cours dans leur entourage familial. Pour simplifier, les normes
scolaires favoriseraient les enfants des classes supérieures où l’on s’attache à
prendre de la distance avec ses perceptions, à en exprimer la singularité. Elles
défavoriseraient les enfants des classes populaires dont le langage cherche plutôt
à exprimer l’adhésion aux perceptions communes.
(11) Voir A. Prost [1986].
46
(12) A certains égards, la thèse de Boudon prolonge et théorise les travauxempiriques pionniers de A. Girard. Voir par exemple A. Girard et P. Clerc [1964]ainsi que A. Sauvy et A. Girard [1965].
(13) Sur ce point, voir le commentaire de R. Hauser [1976].
(14) R. Boudon est bien sûr conscient du caractère simplificateur de ce typed’hypothèse (voir Boudon [1973] chapitre 6).
(15) Nous présentons, section 5.3., un test empirique direct de ce typed’hypothèse.
(16) Pour une analyse des phénomènes de persévérances différentielles, voirDuru-Jarousse-Mingat [1993].
(17) Il faudrait pouvoir identifier les arguments de la fonction d’utilité desindividus (en particulier leur résultat et leur “facilité” scolaire) et les fonctionsd’utilité elles-mêmes (comment les individus se décident en fonction de leurrésultat). Or fondamentalement les données utilisées ne permet d’observer que lesissues.
(18) On comprendrait en effet difficilement pourquoi les dispositionséconomiques à elles seules pourraient faciliter l’apprentissage précoce d’unlangage “formel” plutôt que “commun”, pour reprendre la typologie majeure de B.Bernstein.
(19) Sur ce point, voir par exemple la discussion de Thélot [1982] à propos ducertificat d’étude et sa critique des thèses de Bertaux.
(20) L’estimation de la probabilité de réussite dans l’enseignement supérieur d’unbachelier est effectuée au moyen d’un modèle Logit dichotomique, à partir desdonnées individuelles de l’enquête FQP 1993.
(21)11 s’agit d’un cas particulier de modèle de démocratisation uniforme: dans lecas général l’augmentation des taux de passages peut varier d’un palier à l’autre.
(22) Les simulations obtenues à partir du surmodèle ne different passignificativement des évolutions observées. Autrement dit, le lien entre hiérarchiescolaire des parents et des enfants évolue à peu près indépendamment du lien entrehiérarchie socio-économique des parents et destinée scolaire des enfants.
(23) Voir par exemple Goux-Maurin {1993b].
(24) Nous avons pu vérifier, section 5, l’avantage scolaire faible, mais significatif,des enfants issus du salariat non manuel.
(25) Concrètement, si ces évolutions de comportement correspondaient à unaspect important de la réalité, le lien entre la destinée scolaire des enfants et
47
l’appartenance familiale au salariat non manuel diminuerait. Dans ce cas, on
tiendrait une manifestation des évolutions de la “demande” des familles en
réponse aux modifications rapides des opportunités d’emplois.
(26) Dans la plupart des schémas de stratification sociale, les agriculteurs forment
une classe à part. Cette distinction correspond à plusieurs clivages importants de
la société, tant du point de vue des modes de vie, que du contexte
socioprofessionnel. Aucune des dimensions étudiées jusqu’à présent ne la capte
réellement, qu’il s’agisse de la hiérarchie socio-économique, ou de l’axe salariat
non manuel/autres catégories.
48
Annexe 1
Eléments pour la résolution des modèles avec “atout culturel constant”
et avec “atout culturel croissant”
Notations :-p est le taux de réussite des élèves de la classe j à fort potentiel.
- qj le taux de réussite des élèves de la classe j à faible potentiel.
- f indique la proportion d’élèves à fort potentiel dans la classe j.
sj,j représente la proportion d’élèves d’origine j sortis du système
scolaire au niveau j.
A) Résolution du modèle (I)
(I)
(l-pi) f + (l-q1) (l-fi) s3
+ q (l-q1) (l-f1) s2
p f1 + q (l-f1) = s1
Conformément aux données empiriques, et pour ne pas multiplier les cas sans
rapport avec la réalité, nous supposerons que (511 + S1,2)>
Remarquons tout d’abord que la condition O <f1 < 1 implique
(1) SI,1 + Si,2 <JJj <1
Notons ensuite S et P la somme et le produit des paramètres (pj, qj)
En éliminant f, on a:
S (1-s13) = P + s11
S’ils existent p et qj sont solutions de l’équation
x2 - S x + (S (1-s13) - s11) O
Le déterminant D(S) s’écrit: D(S) = S2 - 4 S (1-s13)+ 4 si,1
Il est facile de vérifier qu’il a deux racines réelles, Nous les notons S+ et S.., avec
(s.. <S±).
D’après (1), S vérifie nécessairement: 1— 51,3 < S <1 +
49
—
-t:;— -—-———-—----— ——- -—-——— ——--—---r-—-----—
Autrement dit, dès l’instant où
(2) S- <(1— Si,3) <(1+) <s+
le système (I) n’a pas de solutions admissibles. Les inégalités (2) sont une
condition suffisante pour que le modèle ne puisse rendre compte des données
empiriques.
En 1993, on peut par exemple vérifier (2) pour les enfants d’origine populaire (de
père ouvrier, employé ou agriculteur) comme pour ceux d’origine moyenne.
B) Résolution du modèle (II)
(1-q1) (1-f1) = s3
(II) (l-pi) f1 + q (1-f1) = s2
pi f = s1
En éliminant f on obtient, pour tout i:
(3) (l-q1) (l-pi) + s3 (qi + p1-1) = s2 (l-q)
li Dans un premier temps, nous allons chercher les solutions telles que, à potentiel
équivalent, les élèves ont à peu près tous la même destinée scolaire, quelle que
soit leur origine sociale. Seule exception: les enfants à fort potentiel, issus des
classes supérieures, renoncent plutôt moins souvent que les autres à
l’enseignement supérieur. Toutes les autres formes d’inégalités sont produites par
le système scolaire lui-même.
Techniquement il s’agit de résoudre (II) sous contraintes:
F q1 =q2 q3(a)
L. P2 = P3
Le système (II) + (a) admet une solution unique, que l’on peut caractériser
itérativement comme suit:p2 = = (1 - (s33 s2,2 - s32s23)/(s33 - s23)) p
f2 2,1 “P
f3=s31 /p
q1=q2=q3= 1 -s3! (l-f3)= q
f1 =1— s13 / (l—q)
p1 =s11 If1
50
La solution de ce système s’explicite aisément:
f1 = (s21s3 —s31s23— l3’I +s13s31) / (s21s33 —s31s23)
f2 2I (s33 — s23) / (s33s21 —s,3s31)
f3 =s31(s33 —s23) / (s33s21 —s23s31)
=s11(s21s33 —s31s23) I (s2s33 —s31s23 —s13s21 +s13s31)
P2 = (s33s21 —s23s31) / (s33 — s,3)
q1 (s21s3, —s31s27) / (s21 — s31)
Appliqué à la génération des 25-34 ans de 1993, le modèle conduit aux
proportions suivantes d’élèves à fort potentiel
f1=0,87; f,0,77;f3=0,42;
Ces proportions sont très proches de celles de diplômés au sein de la génération
des parents. La résolution pour 1970 conduit aux mêmes conclusions (f1=0,77;
f2=0,53 ; f3=0,23).
2/ Supposons maintenant qu’il existe un solution telle que f:f, c’est-à-dire ne
reposant sur aucune inégalité scolaire intrinsèque entre la classe j et la classe j.
Dans ce cadre, on a:
(4) (l-q)/(1-q) = s3 / s3
(5) et (p,rp) = s11 / s1
( —q)s1Par ailleurs, d apres (3), on a: p1 =
l—q1 —sf3
Pour les deux classes j et j le système (II) est équivalent à:
= (l—q1)s(6.1)
I — q1 — s13(1—q.)s.
(6) pi =
t jI (6.2)1 — q. — s3
s.q =1—(1—q1)--- (6.3)
si3
On recherche une (ou des) solution(s) dans le sous-espace O < p < 1, 0 <j < 1,
O <qj < 1 et O <qj < 1, donc (6) admet une solution si et seulement si:
q1 <1—S13
(d’après6.1)1 — s.
rs. +s.3<1e[0,l]; q1 <1— 13 (d’après 6.2)
LI
1—si1 s1 +s13 <1
1—--<q1 <1 (d’après6.3)si3
51
En 1993 comme en 1970, cette condition n’est pas vérifiée pour le couple classes
supérieures, classes populaires. Autrement dit, il n’existe aucune solution ne
supposant pas des inégalités scolaires intrinsèques entre les enfants de cadres et
ceux des classes populaires.
52
Annexe 2
Nomenclatures utilisées
1. Nomenclatures d’origines sociales
• Nomenclature en trois catégories : les milieux “supérieurs” regroupent les cadres et
chefs d’entreprise de plus de 10 salariés. Les petits patrons, artisans ou commerçants, et
de professions intermédiaires forment les milieux “intermédiaires”. Ouvriers, employés
et agriculteurs constituent les milieux populaires.
• Nomenclature en quatre catégories : identique à la précédente, sinon que les
agriculteurs sont distingués des autres catégories populaires.
• Deux axes complémentaires sont utilisés : le premier correspond à la distinction entre
le salariat non manuel et les autres catégories. Il oppose (cadres/chefs d’entreprise),
(petits patrons, artisans, commerçants/professions intermédiaires salariées), et
(agriculteurs, ouvriers/employés). Le second correspond à la distinction salariatlnon
salariat. Il est identique au précédent, sinon qu’il distingue cette fois
(agriculteurs/ouvriers, employés).
La combinaison de la nomenclature en trois catégories et de l’un ou l’autre des deux axes
complémentaires permet de reconstituer des codes très proches de l’actuelle
nomenclature des CS en 6 postes.
2. Nomenclatures de diplômes
• Nomenclature en trois niveaux: le niveau le plus élevé correspond à des diplômes
supérieurs ou égaux au bac. Le niveau intermédiaire correspond au CAP, BEP, BEPC et
équivalents. Le niveau inférieur correspond au certificat d’étude ou à l’absence de
diplôme.
• Nomenclature en quatre niveaux: identique à la précédente, sinon qu’elle distingue
les diplômes du supérieur du simple baccalauréat.
53
Tableau I: Niveau de formation dans quelques pays industrialisés en 1991
(part des individus ayant achevé le second cycle de l’enseignement secondaire (*))
en %
25 à 34 ans 35 à 44 ans 45 à 54 ans 55 à 64 ans Ensemble
France 66 56 45 27 50Allemagne 88 86 79 67 82Royaume-Uni 79 69 58 48 65Etats-Unis 86 88 81 72 83Source: QCDE -Zkegards sur l’éducation 1993Lecture: en Allemagne, 88% des personnes égées de 25 à 34 ans en 1991 ont atteint un niveau d’étudescorrespondant à lafin du second cycle d’enseignement secondaire, contre 66% en France.(*) le niveau de formation correspondant à la fin du second cycle d’enseignement secondaire est défini àpartir de la nomenclature internationale desformations CITE, postes 3 à 7.
54
Tableau II : Hiérarchies scolaires et origines sociales
(niveaux relatifs de diplôme en 1970 et 1993)
Tableau lIa : Comparaison dans le cadre de nomenclatures en trois niveaux (*)
en %
Origine supérieure (a) OrigineNiveau de Origine supérieure (a) /Origine intermédiaire intermédiaire (a)
/Origine populaire (b)diplôme (b) /Origine populaire (b)
relatif 1970 1993 1970 1993 1970 1993
1. a>b 65,9 61,7 53,6 42,2 42,9 47,7
2. a=b 24,7 28,8 29,5 42,7 38,8 33,6
3. a<b 9,4 9,5 16,9 15,0 18,3 18,7
Total 100 100 100 100 100 100
Rapport 1/3 7 6,5 3,2 2,8 2,3 2,6
Champ : jeunes ôgés de 25 à 34 ans en 1970 (resp. 1993).
Source: enquêtes FQP 1970, 1993, INSEE.
Lecture: en 1970, la probabilité pour qu’un jeune adulte d’origine supérieure soit
strictement mieux diplômé qu’un jeune d’origine populaire s’élève à 65,9%, contre
61,7% en 1993. En 1970, la hiérarchie scolaire respecte la hiérarchie sociale 7 fois
plus souvent qu’elle ne la bouscule(65,9/9, 4).
Tableau IIb : Comparaison dans le cadre de nomenclatures en quatre niveaux (*)
en %
Origine supérieure (a) Origine intermédiaire Origine employé etOrigine supérieure (a)Niveau de /Origine intermédiaire (a) /Origine employé ouvrier (a) /Origine/Origine agricole (b)
diplôme (b) et ouvrier (b) agricole (b)
relatif 1970 1993 1970 1993 1970 1993 1970 1993
1. a>b 57,5 53,2 42,1 51,8 71,0 66,7 31,1 30,6
2. a=b 23,0 27,3 37,0 27,8 21,6 20,4 51,5 31,6
3. a<b 19,5 19,5 20,9 20,4 7,4 12,9 17,4 37,8
Total 100 100 100 100 100 100 100 100
Rapport 1/3 2,9 2,7 2 2,5 9,6 5,2 1,8 0,8
Champ : jeunes ôgés de 25 à 34 ans en 1970 (resp. 1993).
Source: enquêtes FQP 1970, 1993, INSEE.
Lecture: en 1970, la probabilité pour qu’un jeune adulte d’origine supérieure soit strictement mieux diplômé
qu’un jeune d’origine intermédiaire s’élève à 57,5%, contre 53,2% en 1993. En 1970, la hiérarchie scolaire
respecte la hiérarchie sociale 2,9 fois plus souvent qu’elle ne la bouscule (57,5/19,5).
(*) Pour les nomenclatures utilisées, voir annexe 2.
55
------
----
----
-----
- ----
---
Graphique B Hiérarchies scolaires et origines scolaires
(niveaux relatifs de diplôme en 1970 et 1993)
Avantage croissant aux enfantsde père bachelier
19O l977 195 19b3
.-sup/inf -sup/moyen-.-moyen/inf IChamp :jeunes âgés de 25 à 34 ans aux dfférentes enquêtesSource: enquêtes FQP 1970, 1977, 1985, 1993
Lecture: en 1970, la hiérarchie scolaire des enfants de père moyennement ou très
diplômé respecte la hiérarchie scolaire des pères 2,2 fois plus souvent qu’elle ne la
bouscule, contre 4,2 fois plus souvent en 1993.
56
Tableau III : Origine sociale et destinée scolaire (nomenclatures en 3 postes (*))
Tableau Illa : Evolution du lien entre 1970 et 1993 (approche diachronique)
Source : enquêtes FQP 1970, 1977, 1985 et 1993. Champ : jeunes âgés de 23 à 34 ans à la date des enquêtes.
Lecture : entre 1970 et 1993, le niveau de formation s’est accru de manière importante au sein de chaque milieu
social. Près de 98% de cette hausse peut être attribuée à une élevation uniforme pour tous les milieux. 2%
seulement relèvent d’évolutions ayant modifié les hiérarchies scolaires suivant l’origine sociale.
Tableau IIIb : Variation du lien selon l’âge en 1993 (approche synchronique)
Modèles DF X2 rX2 p G2 rG2 p
Modèle structurel (S): Os*D+Os*A 18 2 189 - 0.000 2 421 - 0.000
Démocratisation uniforme (DU):12 76 96.5 0.000 78 96.8 0.000
05*D +05*A + D*A
Test S-DU (effet DA) 6 2 1 12 0.000 2 343 0.000
Source : enquête FQP 1993. Champ : 25 à 64 ans, répartis en quatre tranches d’âges décennales.
Lecture: en 1993, plus de 95% des différences de niveau de diplôme entre les générations correspondent à une
évolution uniforme, qui ne modifie pas les hiérarchies scolaires suivant l’origine sociale.
(*) Pour le détail des nomenclatures, voir annexe 2.
Note : l’adéquation des modèles aux données empiriques est estimée par le X2 de Pearson d’une part et par la
statistique de vraisemblance G2. X2 et 02 suivent asymptotiquement une loi de x2 à DF degrés de liberté. rX2
(resp. rG2) indique le pourcentage de la distance, séparant le modèle S des données empiriques, que “parcourt’ le
modèle DU. p est le niveau de significativité du test d’adéquation du modèle aux données ou de comparaison de
deux modèles entre eux.
Modèles DF X2 rX2 p G2 rG2 p
Modèle structurel (S): 05*D + 05*T 18 1 575 - 0.000 1 667 - 0.000
Démocratisation uniforme (DU):12 36 97.7 0:000 37 97.8 0.000
Q*D + Os*T + D*T
Test S-DU (effet DT) 6 1 539 0.000 1 630 0.000
57
Tableau IV : Destinée scolaire et origine sociale (nomenclatures en 4 postes (*))
Tableau IVa : Evolution du lien entre 1970 et 1993 (approche diachronique)
Modèles DF X2 rX2 p G2 rG2 p
Modèle structurel (S): Os*1)+ Os*T 36 1 660 - 0.000 1 788 - 0.000
Démocratisation uniforme (DU):27 150 91.0 0.000 156 91.3 0.000
Os*1D + Os*T ± D*T
Test S-DU (effet DT) 9 1 510 0.000 1 632 0.000
Source : enquêtes FQP 1970, 1977, 1985 et 1993. Champ : jeunes âgés de 25 à 34 ans à la date des enquêtes.
Lecture : entre 1970 et 1993, le niveau de formation s’est accru au sein de chaque milieu social. Plus de 90% de
cette hausse peut être attribuée à une élevation uniforme pour tous les milieux. 10% relèvent dévolutions ayant
modifié les hiérarchies scolaires suivant l’origine sociale.
(*) Pour le détail des nomenclatures, voir annexe 2.
Tableau IVb : Variation du lien selon l’âge en 1993 (approche synchronique)
Modèles DF X2 rX2 p G2 rG2 p
Modèle structurel (S) : Os*D + Os*A 36 2 158 - 0.000 2 500 - 0.000
Démocratisation uniforme (DU):27 244 88.7 0.000 263 89.5 0.000O*D +05*A ± D*A
Test S-DU (effet DA) 9 1 914 0.000 2 237 0.000
Source : enquête FQP 1993. Champ : 25 à 64 ans, répartis en quatre tranches d’âges décennales.
Lecture: en 1993, près de 90% des différences de niveau de diplôme entre les générations correspondent à uneévolution uniforme, qui ne modifie pas les hiérarchies scolaires suivant l’origine sociale.
Tableau IVc : Principaux écarts entre les évolutions observées et les simulations du modèle DU
a) les enfants d’agriculteurs
Diplôme 1970 1977 1985 1993
enseignement o o o osupérieur
Bac ou O O ++équivalent -
CAP, BEP, o o o oBEPC
CEP, sans++ O O --diplôme
Lecture: le lien entre hiérarchie scolaire et originesociale s’est modflé: le nombre de sans diplômes aparticulièrement baissé chez les enfantsd’agriculteurs.
b) les enfants d’ouvriers et d’employés
Diplôme 1970 1977 1985 1993
enseignement + O - Osupérieur
Bac ou + O - Oéquivalent
CAP,BEP, o - + oBEPC
CEP, sans + + o‘ diplôme - -
Lecture: le lien entre hiérarchie scolaire et originesociale s’est modflé: le nombre de sans diplômes abaissé plutôt moins vite pour les enfants d’ouvrierset d’employés.
58
Tableau V La destinée scolaire suivant le niveau social et le niveau scolaire de l’entouragefamilial (nomenclatures en 3 postes (*))
ModèlesDF X2 rX p G2 rG2 p
Modèle structurel (S):Os*Oc+D 16 1 329 - 0.000 1 659 - 0.000
Destinée culturellement différenciée(DCD): 0s*0c+0c*D 12 293 78.0 0.000 319 80.8 0.000
Test S-DCD (effet OD) 4 1 036 0.000 1 340 0.000
Destinée socialement différenciée (DSD)0s*0c+0s*1 12 499 62.5 0.000 547 67.0 0.000
TestS-DSD(effetO5D) 4 830 0.000 1 112 0.000
Des cement et culturellement8 20 98.5 0.010 20 98.8 0.010
Os*Oc + Oc*D + Os*D
TestDSD-DCSD(effetOD) 4 479 0.000 527 0.000
Test DCD-DCSD (effet OD) 4 273 0.000 299 0.000
Modèle saturé : Os*Oc*D 0 0 100.0 0 100.0
Test de l’effet OD 4 328 0.000 338 0.000
Testdel’effetO5D 4 148 0.000 135 0.000
Test DCSD-saturé (effetO5OcD) 8 20 0.010 20 0.010
Source: enquête FQP 1993. Champ :jeunes âgés de 25 à 34 ans.
Lecture : en 1993, le niveau de formation des jeunes varie d’un milieu à l’autre. Près de 80% de ces inégalités
scolaires entre enfants peuvent s’expliquer par les inégalités scolaires existant entre leurs entourages familiaux
(modèle DCD). Les inégalités d’origine économique (Os) ont un pouvoir explicatif significativement moins
important (modèle DSD ou surmodèle DCD + DSD).
(*) Pour le détail des nomenclatures, se reporter à l’annexe 2.
59
Tableau VI: La destinée scolaire suivant le niveau social d’origine, le niveau scolaire du père
et l’appartenance familiale au “salariat non manuel” (*)
DF X2 rX2 p G2 rG2 pModèles
Destinée verticalement différenciée (R): 30 666 - 0.000 739 - 0.000Ov*Oh*Oc ÷ Ov*D
Destinée verticalement et horizontalement24 454 31.8 0.000 501 32.2 0.000
différenciée (DVHD)Ov*Oh*Oc ±
Test R-DVHD (effets OhD et OvOhD) 6 212 0.000 238 0.000
Destinéeverticalementetculturellement26 178 73.3 0.000 180 75.6 0.000
différenciée (DVCD)Ov*Oh*Oc + Ov*D + Oc*D
TestR-DVCD(effetOD) 4 488 0.000 559 0.000
Modèle quasi-saturé (QS): 20 47 92.9 0.00 1 50 93.2 0.000Ov*Oh*Oc + Ov*Oh*D + OC*D
Test DVHD-QS (effet OD) 4 407 0.000 449 0.000
Test DVCD-QS (effets OhD et OVOhD) 6 131 0.000 130 0.000
Source : enquête FQP 1993. Champ : jeunes âgés de 25 à 34 ans.
Lecture: en 1993, le niveau de formation des jeunes ne varie pas seulement en fonction de la position de leur
famille dans la hiérarchie socio-économique (dimension 0v). Il dépend aussi de la structure des ressources de cet
entourage familial telle que la mesure l’appartenance ou non au salariat non manuel (dimension Oh). Ce dernier
facteur est toutefois nettement moins discriminant que le niveau scolaire du père (dimension Oc).
(*) Pour le détail des nomenclatures, se reporter à l’annexe 2.
60
Tableau VII : Evolution de l’influence de l’origine socio-culturelle sur le diplôme
- nomenclatures en 3 postes (*)
Modèles DF X2 rX2 p G2 rG2 p
Modèle structurel (S): 54 1 343 - 0.000 1 409 - 0.0000
Os*Oc*D + Os*Oc*T
Démocratisation uniforme (DU):48 103 92.3 0.000 107 92.4 0.0000
Os*Oc*D + Os*Oc*T + D*T
Test S-DU (effet DT) 6 1 240 0.000 1 302 0.000
Démocratisation culturellement différenciée
(DCD):Os*Oc*D+Os*Oc*T+Oc*D*T 36 64 95.2 0.003 64 95.5 0.002
TestDU-DCD(effetODT) 12 39 0.000 43 0.000
Démocratisation socialement différenciée
(DSD):Os*Oc*D+Os*Oc*T+Os*D*T 36 74 94.5 0.000 76 94.6 0.000
TestDU-DSD(effetO5DT) 12 30 0.003 31 0.003
Démocratisation socialement et
culturellement différenciée (DCSD): 24 30 97.8 0.181 30 98.8 0.182
Os*Oc*D + Os*Oc*T + Oc*D*T +05*D*T
Test DSD-DCSD (effet OcDT) 12 43 0.000 46 0.000
TestDCD-DCSD(effetO5DT) 12 34 0.001 34 0.001
Modèle saturé : Os*Oc*D*T 0 0 100 0 100
Test de l’effet OCDT 12 30 0.003 30 0.003
Testdel’effetO5DT 12 21 0.055 21 0.051
TestDCSD-saturé(effetO5ODT) 24 30 0.181 30 0.182
Source : enquêtes FQP 1970, 1977, 1985 et 1993. Champ :jeunes âgés de 25 à 34 ans à la date des enquêtes.
Lecture: entre 1970 et 1993, le niveau de formation s’est accru de manière importante au sein de chaque milieu
social. Plus de 90% de cette hausse peut être attribuée à une élevation uniforme pour tous les milieux tant culturels
que socio-économiques.
(*) Pour le détail des nomenclatures, se reporter à l’annexe 2.
61
Tableau VIII : Evolution de la destinée scolaire suivant le niveau social d’origine, le niveauscolaire du père et l’appartenance familiale au “salariat non manuel” (*)
Modèles DF X2 rX2 p 02 rG2 p
Modèle structurel (S): 108 1 429 - 0.000 1 523 - 0.000Oh*Ov*Oc*D + Qh*Qv*Qc*T
Démocratisation uniforme (DU):0h*0v*0c*D+0h*0v*0c*T+D*T 102 186 85.5 0.000 201 86.8 0.000
Test S-DU (effet DT) 6 1 243 0.000 1 322 0.000
Démocratisation culturellement différenciée(DCD): 90 145 89.0 0.000 157 89.7 0.0000Oh*Ov*Oc*D + Oh*Ov*Oc*T + Oc*D*T
TestDU-DCD(effetOcDT) 12 41 0.000 44 0.000
Démocratisation “verticalement”différenciée (DVD): 90 160 87.5 0.000 173 88.6 0.000Oh*Ov*Oc*D + Oh*Ov*Qc*T + Ov*D*T
TestDU-DVD(effetODT) 12 26 0.012 28 0.007
Démocratisation “horizontalement”différenciée (DHD): 96 175 86.4 0.000 191 87.5 0.000Oh*Ov*Oc*D + Oh*Ov*Oc*T + Qh*D*T
TestDU-DHD(effetOhDT) 6 11 0.106 10 0.115
Démocratisation socialement etculturellement différenciée (DCHVD): 72 110 91.7 0.003 120 92.1 0.000Oh*Ov*Oc*D + Oh*Ov*Oc*T
+ (Oh + O,, +
Testdel’effetOcDT 12 42 0.000 45 0.000Test de l’effet OVDT 12 27 0.007 29 0.004Test de l’effet OhDT 6 5 0.506 6 0.415
Oh*Ov*Oc*D+Oh*Ov*Oc*T 30 46 96.3 0.028 55 96.4 0.004
+ O,,*0D*T + OhOv1T+ OhOcDT
Testdel’effetODT 12 14 0.282 15 0.222Test de l’effet OCDT 12 35 0.000 35 0.000
Test de l’effet OvOcDT 24 25 0.4 15 26 0.375Test de l’effet OvOhDT 12 20 0.064 20 0.075Test de l’effet OhOCDT 12 18 0.120 20 0.06 1
Champ : jeunes âgés de 25 à 34 ans à chaque enquête.Source: enquêtes FQP 1970, 1977, 1985, 1993.
Lecture : entre 1970 et 1993, le niveau de formation des jeûnes s’est accru de manière importante. Plus de 85%de cette hausse peut être attribuée à une élevation uniforme pour tous les milieux. Le niveau de formation desjeunes ne varie pas seulement en fonction de la position de leur famille dans la hiérarchie socio-économique(dimension 0v). Il dépend aussi de l’appartenance familiale au salariat non manuel (dimension Oh). Ce lienn’évolue guère (effet OhDT), ce qui n’est pas le cas de l’association entre le niveau scolaire du père et celui desenfants (effet OcDT).
(*) Pour le détail des nomenclatures, voir annexe 2.
62
Tableau IX: Evolution de la destinée scolaire suivant le niveau social d’origine, le niveau
scolaire du père et l’appartenance familiale au “salariat” (*)
Source : enquêtes FQP 1970, 1977, 1985, 1993.
(*) Pour le détail des nomenclatures, voir l’annexe 2.
Champ : jeunes âgés de 25 à 34 ans à chaque enquête.
Modèles DF X2 rX2 p G2 rG2 p
Modèle structurel (S): 108 1 518 - 0.000 1 644 - 0.000Oh*Ov*Oc*D ± Oh*Ov*Oc*T
Démocratisation uniforme (DU):0h*0v*0c*D+0h*0v*0c*T+D*T 102 313 79.4 0.000 336 79.6 0.000
Test S-DU (effet DT) 6 1 205 0.000 1 308 0.000
Démocratisation culturellement différenciée
(DCD): 90 273 82.0 0.000 292 82.2 0.0000Oh*Ov*Oc*’ + Oh*Ov*Oc*T + Oc*D*T
TestDU-DCD(effetODT) 12 40 0.000 44 0.000
Démocratisation verticalement”différenciée(DVD): 90 286 81.2 0.000 306 81.4 0.000
Oh*Ov*Oc*’ + Oh*Ov*Oc*T +
TestDU-DVD(effetODT) 12 27 0.007 30 0.004
Démocratisation “horizontalement”différenciée (DHD): 96 246 83.8 0.000 261 84.1 0.000
Oh*Ov°c*D + Oh*Ov*Oc*T + Oh*D*T
Test DU-DHD (effet OhDT) 6 67 0.000 75 0.000
Démocratisation socialement etculturellement différenciée (DCHVD): 72 168 88.9 0.000 178 89.2 0.000
Oh*Ov*Oc*D + Oh*Ov*Oc*T
(0h + O,, +
Testdel’effetOcDT 12 41 0.000 43 0.000
Test de l’effet OVDT 12 40 0.000 43 0.000
Test de l’effet OhDT 6 72 0.000 78 0.000
oh*ov*Oc*D+Oh*ov*oc*T 36 79 94.8 0.000 89 94.6 0.000
+ Oh*Ov*D*T + Qv*Oc*D*T
Testdel’effetODT 12 11 0.496 13 0.344
Testdel’effetODT 12 31 0.002 31 0.002
Testdel’effetOhDT 6 9 0.153 11 0.076
Test de l’effet OVOhDT 12 58 0.000 57 0.000
Test de l’effet OvOcDT 24 25 0.412 25 0.386
63
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