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Diminuer les TMS dans la filière viande, c’est gagner en performance APPROCHE PARTICIPATIVE PAR BRANCHE FILIÈRE VIANDE DE BOUCHERIE I SANTÉ SÉCURITÉ PROFESSIONNALISATION CLIMAT SOCIAL QUALITÉ EFFICACITÉ RENTABILITÉ

Diminuer les TMS dans la filière viande, c’est gagner …...étroites et ont l'impression de ne pas pouvoir faire autrement. Pour eux, il n'y a pas d'autre alternative. Un certain

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Page 1: Diminuer les TMS dans la filière viande, c’est gagner …...étroites et ont l'impression de ne pas pouvoir faire autrement. Pour eux, il n'y a pas d'autre alternative. Un certain

Diminuer les TMS dans la filière viande, c’est gagner en performance

APPROCHE PARTICIPATIVE PAR BRANCHEFILIÈRE VIANDE DE BOUCHERIE I

SANTÉ

SÉCURITÉ

PROFESSIONNALISATION

CLIMAT SOCIAL

QUALITÉ

EFFICACITÉ

RENTABILITÉ

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Cette brochure a été réalisée grâce au travail mené avec l'ensemble des professionnels

de la filière viande de boucherie.

Nous tenons à remercier tout particulièrement :

Pierre Nahon et Sébastien Arnaud de l'entreprise Ouest-Ergonomie.

Les ergonomes qui sont venus échanger sur leurs interventions dans la filière viande de boucherie, dans le cadre d'un séminaire réunissant :

François Daniellou et Nathalie Gréard (Université Victor Ségalen à Bordeaux), Fabrice Bourgeois (ANACT),

Didier Lochouarn (GRETACT), Bruno Michel (Michel-Mérit Consultants),

Philippe Douillet (ANACT).2

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CComme toutes les entreprises, les industries de la viande sontconfrontées à la recherche d'une meilleure productivité, d'unaccroissement de la qualité et à la demande de plus en plus

diversifiée de leurs clients. Les troubles musculosquelettiques (la maladieprofessionnelle de la filière viande), qui touchent de plein fouet leurs salariés,contrecarrent cette exigence de performance. On comprend dès lors la perplexité,voire l'inquiétude des chefs d'entreprise ou des personnes en charge de laprévention et leur sentiment d'impuissance.

Et pourtant, les TMS ne sont pas une fatalité. Ils n'ont pas pour origine descomposantes purement gestuelles. Ils ne sont pas inhérents à la nature même dumétier.

Au contraire, à condition de se donner dans l'entreprise les moyens d'unecompréhension la plus large possible du phénomène, des moyens d'actionexistent : ils supposent pour être efficaces d'élargir le champ de la réflexion et derepenser de façon globale, dans le cadre d'un projet, l'organisation des modes deproduction, la conception des postes, des produits, des process et des modes degestion et de management. Au-delà de la seule préoccupation de santé au travail,cette dynamique participera ainsi à l'amélioration de la performance globale desentreprises.

Ce document s'adresse aux acteurs de la prévention des risques professionnelsen entreprise : direction, encadrement et agents de maîtrise, représentants dupersonnel, CHSCT, infirmières, médecins du travail.• Une première partie donne un éclairage sur les principaux facteurs de nature à

créer un contexte propice à l’apparition des TMS.• Dans la seconde partie, des conseils permettent d'envisager des méthodologies

d'intervention adaptées à chaque entreprise.

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Lorsque le salarié ressent des sensations degêne ou d'inconfort, il ne peut pas s'arrêter dufait :• de la pression de la hiérarchie,• de la pression de ses collègues de travail,• de la peur de ne pas être à la hauteur,• de la peur de ne pas tenir les performances

attendues,• de son statut (saisonniers, intérimaires,

CDD…),• des primes liées au rendement.

«Quand on a mal du fait des TMS, on tait sasouffrance, on refuse d'en parler, on s'interditd'établir des liens entre la douleur, la souffranceet le travail. On en parle éventuellement à sonmédecin traitant mais on ne fait pas dedéclaration de maladie professionnelle. Onaffecte l'apparition de la pathologie non pas à lasituation de travail mais à sa propre incapacité.On prend sur soi.»

Les salariés en parlent très difficilement

Les TMS génèrent un sentiment de culpabilité à la fois chez les salariés et chez les employeurs

Les TMS sont encore trop souvent considéréscomme des maladies de vieux, de «bonnesfemmes» ou de gens paresseux. Les salariésn'avouent de ce fait pas facilement ce qu'ilsconsidèrent comme une faiblesse. De plus, leregard des autres peut être dépréciateur. Il n'estpas facile non plus de faire état d'une difficulté àtenir les mêmes cadences que les autres,d'autant qu'elle a nécessairement desincidences sur le travail des collègues.

Les employeurs, eux, ont l'impression que c'estla nature même de leur activité qui est mise enquestion. Ils pensent que la recherche de gainsde productivité ne peut s'obtenir qu'en allanttoujours plus vite, ce qui conduit à intensifier letravail. La présence de TMS leur sembleinéluctable. Dépendants des clients, ilsressentent que leurs marges de manœuvre sontétroites et ont l'impression de ne pas pouvoirfaire autrement. Pour eux, il n'y a pas d'autrealternative.

Un certain nombre de tabous empêche de penser et d'agir

Un sentiment d’impuissance

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Le fait d'en parler risque de faire exploser le nombredes déclarations de TMS…Une mobilisation centrée sur la transformationdes situations de travail dans la filière viande deboucherie est capable de ralentir la progressiondu nombre de déclarations de maladiesprofessionnelles, puis de la diminuer. Àl'inverse, une mobilisation déconnectée desprojets de transformation peut être à l'origined'une forte augmentation des déclarations.

Les TMS sont un phénomène de mode,c'est une maladie de salariés âgés…La progression des TMS avec l'âge n'est passystématique. Tous les salariés d'une mêmegénération ne sont pas touchés. Certainssalariés, avec l'expérience, ont acquis dessavoir-faire qui permettent de mieux gérer lescontraintes qui pèsent sur le travail.

C'est une maladie liée à l'ancienneté…Les TMS surviennent aussi chez des jeunesembauchés. Une formation insuffisante dudébutant, pratique fréquente dans la filièreviande de boucherie, peut entraîner des gestespeu efficaces et un stress qui favorisentl'apparition rapide de TMS, quelquefois au boutde quinze jours.

La modernisation des outils de production suffit à seprémunir contre les TMS…On entend dire que les TMS sont l'héritage desanciennes conditions de travail. Mais on enrecense aussi bien dans des installationsmodernes qui impliquent une nouvelleorganisation. Les TMS apparaissent alors defaçon brutale.

S'attaquer aux TMS, c'est forcément perdre de l'argent…À condition qu'elles aient été bien pensées, ilexiste des actions de prévention qui diminuentles TMS en améliorant la performance del'entreprise, sans pour autant augmenter lescadences de la ligne et la multiplicité desgestes.

Les solutions ne peuvent venir que de l'extérieur…Le problème est propre à l'entreprise. Lesréponses ne peuvent se trouver qu'au sein decelle-ci, grâce à une mobilisation en interne detous les acteurs.

Trop d'idées reçues circulent sur le sujet

Un sentiment d’impuissance

FAUX

FAUX

FAUX

FAUX

FAUX

FAUX

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Moins de désosseurs

Réintroduction des pièces

non-désosséesdans la chaîne

Temps de cycleinchangé

Mobilisation d'un désosseur

pour réintroduireles pièces non

désossées

Augmentation dunombre de pièces

à désosser

La plupart des lignes de production sontprévues pour travailler en continu… Quand lenombre des opérateurs varie, le système esttrès vite déstabilisé. C'est aujourd'hui souvent lecas avec un absentéisme important associé àde grosses difficultés pour remplacer lesabsences imprévues et pour recruter à tempsles personnes compétentes.

Les industries de première et deuxièmetransformation étaient, il y a quelques années,plus proches de l'élevage, de la production. Lemonde agricole constituait traditionnellement leprincipal vivier de main-d'œuvre pour la filièreviande. Aujourd'hui, les nouveaux salariés sontissus du monde urbain. La situation est devenue

critique : le turn-over illustre bien les difficultésde recrutement (image de marque négativedans l'esprit du public et chez les jeunes ;conditions de travail considérées commepénibles, sales et contraignantes surtout dupoint de vue des horaires ; travail au froid ;bruit).

Les salariés qui restent ressentent une chargede travail et un stress importants. Le parcoursdu salarié est souvent un parcours d'exclusion.Ses seules échappatoires sont soit quitterl'entreprise, soit se cantonner à ce qu'il sait faireen refusant toute idée de changement, soit semettre en arrêt maladie, soit continuer àressentir les effets d'un TMS.

Pourquoi des TMS ?

Les absences non remplacées, une chargeplus lourde pour ceux qui restent

La situation est aggravée par l'absentéisme et les difficultésde recrutement

Moins de désosseurs

Réintroduction des pièces

non désosséesdans la chaîne

Temps de cycleinchangé

Mobilisation d'un désosseur

pour réintroduireles pièces non

désossées

Augmentation dunombre de pièces

à désosser

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PERFORMANCETMS

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Les anciens ontmoins de temps

pour former les nouveaux

Les anciens prennent du retard

pour rattraper letemps perdu par

les nouveaux

Perte de qualité et de coupe

Les couteaux des nouveaux coupent moins

Pourquoi des TMS ?

Les jeunes embauchés sont essentiellementdes citadins dépourvus de toute expérience dela matière vivante. Le temps n'est plus oùl'abattage et la découpe de la viande étaientpratiqués dans des ateliers artisanaux par desruraux expérimentés ou des bouchers-charcutiers. Les nouveaux venus entrent le plussouvent comme intérimaires dans les abattoirset les ateliers de découpe sans bénéficier d'unevéritable formation.

Dans les industries de main-d'œuvre, onconsidère que le travail est simple et les gestesélémentaires. L'organisation est pensée à partird'une suite d'opérations toujours plus pauvres,toujours plus rapides. Certaines personnessemblent estimer que travailler dans ce contexten'implique pour les ouvriers aucune formationpréalable mais simplement l'acquisition d'untour de main. Pour eux, la qualifications'acquiert en regardant les autres.

Et pourtant, être un bon désosseur, par exemple,nécessite une connaissance de l'animal, de la

matière travaillée, des façons de faire… Uncertain nombre de gestes opératoires,néanmoins essentiels pour la qualité, ne sontpas pris en compte : stabilisation de la pièce àtravailler, retournement, maintien, etc. Le gestemême de tenir un couteau est une composanted'un ensemble de règles, de coups d'œil, etc.

L'apprentissage est une phase déterminantedans l'acquisition de ces savoir-faire. Comme ilest souvent négligé, voire inexistant, le débutantest placé devant un dilemme difficile à résoudreface à la double exigence de faire vite et de fairebien. Il finit par acquérir seul, peu à peu, sonpropre savoir-faire. Cette insuffisance quasigénérale de formation a des incidences sur laproductivité et sur la qualité du travail : le tauxde rebuts s'explique bien souvent par larépétition de gestes moins performants, plusdésordonnés, et plus coûteux en efforts pour lesalarié. Les TMS sont un indicateur de la non-performance de l'entreprise.

Des temps d'apprentissage insuffisantspour les nouveaux embauchés ou lors des changements de postes

L'apprentissage est une phase déterminante dans l'acquisition des compétences

Les nouveaux ne savent pascomment et quand affiler

Augmentation dela force à exercer et du temps pour

travailler

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PERFORMANCETMS

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Pourquoi des TMS ?

L'activité des entreprises fluctue fortement au filde la semaine et des saisons en fonction de lademande du client (côtelettes barbecue enpériode de chaleur, par exemple). Le systèmetechnique ne permet pas d'adapter lescapacités de désossage aux besoins réels de laproduction. Ainsi, en période de forte demandede produits maigres, il arrive que les pièces deviande qui arrivent de découpe primaire soientplutôt grasses. Il faudra alors les accrocher etles mettre en frigo. À ces contraintes s'ajoutentcelles liées à la qualité et à l'hygiène.

L'organisation du travail reste traditionnelle, ycompris sur les sites les plus importants et lamodernisation se fait attendre. Les sociétésd'ingénierie, qui conçoivent les nouvellesinstallations, dupliquent à grande échelle desmodes soi-disant éprouvés, fondés sur lataylorisation et la parcellisation des tâches, pourréduire les coûts de production au maximum.Mais elles oublient souvent de garantir un peude flexibilité sur les lignes de transformation etdonc de souplesse pour l'opérateur. Quand unabattoir traite un bovin par minute, le moindredérapage sur la ligne peut provoquer un

blocage total de la production si l'on n'a pasprévu des amortisseurs et des zones d'attente,dans le respect des règles d'hygiènealimentaire.

Des études ont montré les liens entrel'apparition des TMS et des formesd'organisation du travail dans lesquelles lesmarges de manœuvre laissées aux salariéssont très faibles. On parle de «dépendanceorganisationnelle» : le salarié est contraint parle rythme de travail d'une ligne de production etn'est pas libre de se ménager des interruptionscourtes de travail. Il ne peut pas toujours affilerson couteau dans le temps imparti. Il ne peutpas décider du moment où il va s'approvisionneren matière et doit alors interrompre son travailde découpe. Pour pouvoir travailler dans letemps imparti, il doit accélérer brusquement sonmouvement, au détriment de la précision de sesgestes. Il n'a pas de place pour stocker sa piècesur son poste de travail : il doit réduire l'espacenécessaire pour travailler au détriment de sonconfort gestuel. Tous ces facteurs se combinentet s'amplifient.

L'opérateur subit les contraintes dépendantesde l'amont et de l'aval de la chaîne

Quand l'opérateur subit la fréquence et le rythme de la répétition, le geste répété favorise l'apparition de TMS

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Augmentation des pièces non

désossées

Perte de temps etde performance

Diminution de laprécision de la

découpe

Obligation pour le dernier

opérateur de surveiller l’arrivée

des pièces

Accumulation en fin de tapis de

pièces nondésossées

Interruption dutravail de découpe

pour saisir les pièces non désossées

PERFORMANCETMS

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Dans le secteur de la triperie par exemple, leschaudins ne se ressemblent pas. Un groschaudin nécessite plus de gestes, est plus lourdet ses parois sont tendues et donc fragilisées.Un chaudin emmêlé présente plus deramifications. Certains autres ont des filets denerf ou de graisse plus résistants qui sont àl'origine d'efforts supplémentaires. De la mêmemanière un chaudin refroidi est plus difficile àtravailler.

Ces chaudins tous différents sont acheminésaux différents postes par tapis roulant, àcadence régulière. Une fois le produit en main,l'opérateur commence l'opération de décerclage :par mouvements successifs et coordonnées des

deux poignets, il démêle progressivement sonchaudin. Décercler, c'est à la fois démêler etdécoller, opérations d'autant plus compliquées etplus longues que le chaudin est difficile à traiter.Le chaudin est fragile et, une fois percé, le boyaudevient plus difficile à travailler et perd de savaleur. Le salarié doit alors nettoyer le plan detravail. Il le refroidit ainsi que les chaudinsprésents ce qui va rendre plus difficile le travaildes chaudins suivants.

Tous ces paramètres jouent directement sur lapénibilité et le temps de décerclage.

La variabilité des pièces à travailler,une dimension à prendre en compte

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Un geste fait sans précipitation est précis et n'entraîne pas de gestes supplémentaires

Retard

Nettoyage du poste

Pénibilité plusgrande et

accélération dutravail de

décerclage

Temps de décerclage

plus long

Chaudin compliqué à traiter

Risque de percerle chaudin

Refroidissementdu chaudin quidevient plus dur

à travailler

Pourquoi des TMS ?

PERFORMANCETMS

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Pourquoi des TMS ?

Sur certaines lignes de transformation, lescadences de production atteignent des niveauxélevés. Ces cadences vont de pair avec unegrande parcellisation des tâches.

Sous forte contrainte de temps, il devient demoins en moins possible pour un opérateur dese forger une habileté, d'avoir des gestes préciset d'acquérir une compétence : il a de plus enplus de mal à donner un sens à son travail.

La nature des efforts exercés par les salariésvarie en outre d'une pièce à l'autre, en fonctionde sa taille, de sa qualité, de sa texture. Unepièce grasse, glissante ou froide se travailleplus difficilement. Ainsi, sur les lignes têtes parexemple, les têtes de porcs n'ont pas toutes lesmêmes formes (longueur de la tête, cloisonsnasales différentes). Ce qui signifie des effortssupplémentaires, des gestes moins assurés,

car l'opérateur ne dispose pas de temps pourfaire face à la diversité des pièces qui défilent.

Pour suivre le rythme de la chaîne, il faut allervite. La moindre erreur a des effets sur le travaildes collègues, entraîne des retards, voire peutfaire arrêter la chaîne, créant ainsi d'autresretards qu'il faudra rattraper dans une urgencetoujours plus grande.

Une autre difficulté réside dans le fait que letravail s'effectue sur des pièces en mouvement.Elles arrivent à cadence régulière sur la chaîne.La gestuelle de l'opérateur est soumise à unesérie d'activités simultanées et différentes(surveiller l'arrivée des pièces, alimenter la lignede fabrication, effectuer un choix, retenir lapièce, la positionner...) qui amplifient sa chargede travail et notamment sa charge mentale.

Travail sur chaîne et sur pièces en mouvement,des contraintes qui s'amplifient

La cadence de la ligne limite le sens et l'autonomie du geste 10

Accélération dupositionnement

des têtes

Accumulation detêtes

L'opérateuren début de ligne

continue à recevoirdes têtes

de l'abattoir

La ligne têtess’arrête

Les têtes mal positionnées

bloquent la ligne

Retard à rattraperquand la ligne

têtes redémarre

Difficultés pour les positionner correctement

PERFORMANCETMS

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Le travail sur pièces ayant subi un trop longstockage au froid est plus pénible : les tissusgraisseux et musculaires se raffermissent (lesopérateurs disent de ces pièces qu'elles sont«rassies»). Le nombre de coups de couteaupour décoller les os de la poitrine, étape quidemande le plus d'efforts, peut être augmentéde 30 %. La pénibilité est ressentie par lesopérateurs.

Travailler sur des pièces froides demande enoutre davantage de temps. Pour une opérationde désossage de poitrines, le temps de cycle dutravail est de 10 à 20 % plus long pour les piècestrop froides. En conséquence, la productivitéglobale des opérateurs travaillant sur la lignediminue. La probabilité d'avoir des pièces nonfinies en bout de ligne augmente, ainsi que lesmises en frigo. Lorsqu'elles sortiront du frigo,

après plusieurs jours de stockage, elles serontencore plus difficiles à traiter.

Même des écarts de température faibles (1° à 2°C) sont perçus par les opérateurs et setraduisent par une pénibilité plus importante.Tous les effets de ces contraintes s'additionnent,voire s'amplifient au cours du temps.

Le fil du couteau s'use beaucoup plusrapidement sur une pièce froide. Mais l'activitéd'affilage n'est pas prise en compte dans letemps imparti à l'opérateur pour effectuer satâche. L'opérateur, pour ne pas prendre deretard, n'affile plus aussi fréquemment qu'il lefaudrait. La qualité de son travail s'en ressent.Les efforts qu'il déploie sont propices àl’apparition de TMS.

Travailler sur des pièces trop froides,plus d'efforts

11Le froid contraint l’opérateur à exercer une force plus importante

Pourquoi des TMS ?

Stockage depièces non traitées

en frigo

Augmentation dunombre de piècesà désosser en fin

de tapis

Augmentation dela force à exercer

Augmentation dutemps de travail

Difficulté à traiterdes pièces froides

qui reviennent du frigo

Retard dans le travail de

désossage

PERFORMANCETMS

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Le stress entraîne des modifications dansl'équilibre interne de l'organisme, dont uncertain nombre de conséquences a pour effetde favoriser les TMS. Le stress est fréquentdans les ateliers de viande où certains typesd'organisation ont imposé cadences et surcroîtde contraintes de rendement. La perte du sensmême du travail et la peur des salariés de nepas tenir les performances attendues sont desdéclencheurs possibles de TMS.

D'autres facteurs entrent en jeu : la crainte d'uneremise en cause d'un savoir-faire péniblementacquis à la suite par exemple d'un changementd'organisation, les difficultés à gérersimultanément les exigences de vitesse et dequalité, l'inquiétude sur l'avenir, la qualité desrelations au sein du collectif de travail et avecl'encadrement. Une mobilisation entière de lapersonne est requise pour concilierl'inconciliable. Le salarié se trouve engagé àprendre des décisions sans avoir deresponsabilité reconnue.

Dans ces situations, d'autres salariésaccélèrent leurs gestes, repoussent leurslimites individuelles, vont plus vite que ce qu'onleur demande pour ne pas penser. Ils nepeuvent pas se permettre d'avouer leurdéfaillance à leurs collègues, ils se sententresponsables personnellement de la survie del'entreprise.

Pris dans la course au temps, les opérateurspeuvent réagir de façon différente, mais leseffets en sont toujours pernicieux ; la vitesse aun effet anesthésiant, il faut y arriver, on se meten défi par rapport à soi et aux autres... Lavitesse provoque aussi des situations de stresset d'irritabilité.

Toutes ces situations vécues négativement sontsusceptibles de générer des désordres à la foisphysiques et psychologiques. Plus l'on eststressé, plus la tension musculaire estimportante, plus le risque TMS augmente.

Pourquoi des TMS ?

Des relations de travail dégradées, un stress accru

Il existe une corrélation entre le stress et les TMS

PERFORMANCETMS

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Paroles de professionnels

«On s'énerve sur le morceau deviande, on sait qu'on n'avance pas, onsait que les autres avancent à côté etça énerve encore plus. Ceux qui sontderrière, ils ont tout à récupérer à toutevitesse.»«On met les autres en retard, on se faitallumer la tête après…»«On fatigue. On ne pense à rien mais ilfaut tenir, alors c'est comme unedrogue… on va de plus en plus vite…»

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AAu long des pages précédentes, des schémas ont mis enévidence comment des facteurs concomitants et denature diverse se combinent et s'amplifient pour créer

des situations en boucle dont il est difficile de sortir. Dans l'exempledu couteau (page 7), nous avons vu que moins le couteau coupe, pluslong est le travail à réaliser et moins le salarié a le temps d'affiler… Ilforce, il fatigue, il s'énerve, la qualité de la coupe se dégrade. Il s'agitbien là de véritables cercles vicieux, des boucles d'amplification descontraintes.

L'analyse du travail doit s'attacher à identifier ces situationsperturbées. Il s'agira d'établir les liens qui existent entre la dégradationdu travail, la perte d'une productivité dont la source n'est pas détectéepar l'entreprise et la recherche des moyens de régulation quel'opérateur adopte au détriment de sa santé.

Cette identification des boucles permet de désamorcer les réactionsen chaîne qui les caractérisent en centrant l'action sur les pointsnévralgiques. Cette identification permettra d'envisager desperspectives d'actions possibles et contribuera à créer unedynamique.

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D

La rigidité du système contribue à diminuer la performance de l'entreprise et à augmenter les TMS

Depuis une vingtaine d'années, selon desrythmes divers, l'évolution des exigences enmatière de sécurité sanitaire, la progression destechniques et la mise aux normes des outilspénètrent progressivement les industries de laviande. Des ateliers ont été conçus pluspropres, plus lumineux ; les manutentionsmanuelles sont moins nombreuses.

Mais quand le système technique reste rigide, lamodernisation des outils de production ne suffitpas à se prémunir des TMS, alors que lescommandes tardives et les demandes desclients de produits de plus en plus diversifiés

exigeraient au contraire de la souplesse et uneadaptation des hommes plus rapide. Il estimportant de repérer les facteurs de rigidité surlesquels on peut agir en tenant compte descontraintes.

Dans un système rigide, les hommes restent lesmeilleurs éléments régulateurs grâce à leurspossibilités d'entraide et de coopération. Laprévention consiste donc à favoriser les liensqui s'établissent entre eux. Lors detransformations, il faudra veiller à repérer cesformes de solidarité dans le travail et valoriserces modes de régulations.

Remettre en cause des facteurs

de rigidité du système

pour le rendre plus efficace

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Il a été constaté que l'apparition des TMS étaitsurtout manifeste dans des formesd'organisation du travail qui laissaient desmarges de manœuvre faibles aux opérateurs.Plus que les contraintes de temps, c'estl'absence d'autonomie de l'opérateur qui poseproblème : dans l'organisation en «juste àtemps» par exemple, le salarié ne peut pas agirsur la fréquence et le rythme imposés par lachaîne d'approvisionnement. Pour pouvoirtravailler dans le temps imparti, il doit accélérersa cadence, au détriment de la précision de sesgestes.

Mieux vaut avoir un cycle un peu plus courtavec des marges de manœuvre importantes,plutôt qu'un cycle un peu plus long associé àune marge de manœuvre restreinte. Dans lessituations de travail analysées, les opérateursles plus touchés ne sont bien souvent pas ceuxqui produisent le plus mais ceux qui produisentle moins. Dans le premier cas, l'opérateur peutgérer son effort dans le temps, dans le secondcas, il le subit.

Dans les ateliers de découpe, comme dans leslignes d'abattage à cadence élevée, il estpossible de redonner des marges de manœuvreen multipliant par exemple les zones d'attentedans le respect des contraintes sanitaires, afinde laisser aux opérateurs le temps de réagirface à une anomalie.

La présence de temps individuels derécupération est indispensable. Mais plus queleur quantité, c'est davantage leur nature,volontaire et maîtrisée par l'opérateur, qui estimportante. Ils n'arrivent en effet pasnécessairement au moment le plus opportun,quand l'opérateur en aurait besoin. Ils n'ont pasforcément la bonne durée. Trop courts, ils nepermettent pas de véritable récupération, troplongs, ils entraînent une augmentation de lacharge de travail. Ils peuvent en outre être«subis» dans les moments d'attente de piècespar exemple, et déstructurer le rythme detravail. Le salarié qui attend en bout de tapis estcondamné à l'immobilité, son geste est entravé.

1 - Redonner aux opérateurs des marges de manœuvre qui leur permettent de maîtriser les contraintes de temps

Agir sur les TMS dans la filière viande, c'est permettrede mieux travailler dans un temps donné

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Les salariés ont élaboré, tout au long de leurtrajectoire professionnelle, des savoirs et dessavoir-faire indispensables au bon exercice del'activité. Cet apprentissage a supposé uninvestissement personnel et la mobilisation deressources à la fois physiques et intellectuelles(habiletés, tours de main, repérage des phasesplus délicates, savoir-faire de prudence..). C'està ce prix qu'ils sont capables d'intervenir demanière pertinente et efficace sur le processusde travail.

L'un des enjeux pour la prévention estd'identifier ces compétences pour lestransmettre et entrer dans un processus deprofessionnalisation. Ce travail est difficile, les

connaissances sont diffuses et souvent nonexprimées. Le salarié qui s'est progressivementapproprié ces savoirs et savoir-faire "met ensilence" ce qu'il fait et enchaîne avec une tellehabileté ce qu'il a à faire que les opérations etles actes les plus élémentaires ne sont plusvisibles ni pour un observateur, ni pour lui-même. Par ailleurs, il peut avoir oublié leprocessus par lequel il a appris.

Prendre le temps de comprendre cescompétences et de réfléchir sur leurtransmission aux nouveaux arrivants est unecomposante essentielle de la prévention desTMS.

2 - Apprendre à reconnaître les savoir-faire

L'entreprise doit se donner les moyens de former les salariés pour leur permettre de s'aménager desmarges de manœuvre

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Les entreprises de la viande en sont biensouvent réduites aujourd'hui à embaucher quiveut bien venir travailler chez elles. Quand ilarrive, le nouveau ne sait pas où se situent seslimites. Il est souvent seul, il faut aller vite. Lagestuelle professionnelle n'est pas encoreacquise, les postures de travail, coûteuses eneffort et en fatigue, sont tenues longtemps. Lesmanutentions, les manipulations, le travail aucouteau et les prises d'information sontdésordonnés, multiples. Le nouveau ne sait pasdistinguer l'essentiel de l'accessoire.

Il a besoin d'un apprentissage qui l'aide àacquérir les repères tactiles, visuels et auditifsqui lui permettront de mieux maîtriser sonactivité. Dans cette construction, les collèguesplus expérimentés ont un rôle important à jouer.Parce qu'ils ont un statut hiérarchique proche decelui du nouveau, ils peuvent assurer unefonction de tuteur, en guidant le nouveau pourlui permettre de comprendre l'origine de sesessais ou erreurs. Pour cela, ils doivent avoir été

préparés à cette fonction et avoir les moyens del'exercer. Pour réduire efficacement les TMS, cetaccompagnement doit se poursuivre bien au-delà de l'accueil du nouveau.

C'est de cette façon que le nouveau pourraalors progressivement avancer dans laconnaissance du produit travaillé, le maniementet l'entretien des outils, la conduite à tenir faceaux anomalies généralement rencontrées etmesurer l'importance des prises de repères surles pièces en mouvement. Il saura ainsis'approprier sa propre gestuelle, dans lerespect des règles d'hygiène sanitaire.Progressivement, il apprendra à se situer dansle déroulement du processus de transformation,faire des liens entre l'amont et l'aval et vice-versa. Cette vision globale lui permettra d'agirefficacement, en économisant ses efforts etdonnera du sens et une finalité à son travail ausein de l'équipe.

3 - Favoriser la transmission des savoir-faire dans unelogique de professionnalisation

Le tuteur, à travers la formation en alternance, aide le nouveau à franchir le cap de l'autonomie

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L'évolution très rapide des modes de distribution a eupour conséquence que les unités de production sontpassées très rapidement d'un stade artisanal à unstade industriel. Les entreprises ont alors été tentéesd'aller chercher à l'extérieur les réponses à leursproblèmes : consultants extérieurs, préventeurs,ergonomes, sociétés prestataires de service…, sansobtenir une réelle satisfaction dans la mesure oùelles se sont déchargées des problèmes plutôt qued'avoir participé à leur compréhension.

En ce qui concerne la formation par exemple, il estvrai qu'il n'existe, la plupart du temps, aucunprocessus d'analyse structurée des besoins. Lesentreprises ne mesurent pas bien l'importance deleur rôle pour formuler leurs objectifs et définir si laformation est une réponse pertinente au problèmeposé. La même attitude se retrouve lorsqu'il s'agit deconcevoir et d'aménager de nouveaux espaces detravail. L'externalisation des analyses et desréponses apportées semble d'autant plus facile queles équipementiers et les fournisseurs proposent desschémas techniques pré-établis et des organisationsde travail standardisées.

Dans ces deux cas, l'entreprise s'interdit dessolutions originales, innovantes et mieux adaptées àses spécificités. La relation entre les lieux de travail,les systèmes techniques que les concepteurs

proposent et l'activité humaine qui va s'y déployer,n'est pas réfléchie. Et pourtant, l'entreprise est lamieux placée pour analyser son propre problème, enidentifier les points névralgiques et définir sesbesoins. Elle bénéficie en interne de personnescapables d'apporter les réponses pertinentes etadaptées, notamment les membres du CHSCT (oules représentants du personnel), l'encadrement deproximité et toutes les personnes chargéesd'organiser la production. Pour être efficaces, cesdifférentes personnes peuvent être accompagnéesdans un premier temps par des intervenantsextérieurs (agents de prévention CRAM, MSA,ANACT, ergonomes…) qui leur permettrontd'acquérir des connaissances sur les TMS.

Réduire les maladies professionnelles – et bien sûrles TMS – suppose une écoute des plaintes dessalariés et de leur douleur. Le médecin du travail etsurtout l'infirmière sont les mieux placés pour uneprise en charge précoce.

Développer la compétence interne permet en outrede transférer des savoir-faire dans d'autresdomaines, au-delà du projet envisagé. Se donner letemps d'analyser ses besoins, de réaliser desétudes, d'anticiper sur le futur permet de garder lamaîtrise de son activité et de se préparer auxévolutions à venir.

4 - Développer les compétences internes

L'homme doit être considéré comme un véritable acteurde son travail, et non comme un instrument au service desobjectifs techniques et économiques de l'entreprise

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La conduite d’un projet requiert une compréhensiondes logiques et des points de vue

Tous les acteurs de l'entreprise doivent se sentirmobilisés. Ils n'apporteront leurs compétences,leurs idées et suggestions qu'à la condition quela direction manifeste sa volonté de mener àbien son projet d'entreprise de manière durable.

La conduite du projet passe par la désignation,par le chef d'entreprise, d'un responsabledisposant de temps et de moyens pour instaurerle dialogue avec toutes les composantes del'entreprise, faire circuler les informations ets'entourer des compétences-clés : selonl'entreprise, les ressources humaines, laproduction, les bureaux des méthodes et lamaintenance, les services généraux. L'équipeconstituée sera alors en mesure d'aborder lesdifférents domaines concernés : les machineset les outils, la circulation et les flux, la gestionde la qualité, l'aménagement des espaces detravail, l'organisation du travail, les relations

avec les clients et les fournisseurs... Le chef deprojet pourra se faire accompagner par desmédecins et des infirmières du travail, desergonomes ou autres consultants extérieurs, etdes agents de prévention (CRAM, MSA).

Il faudra envisager la création d'un ou plusieursgroupes de travail pour instruire les problèmeset assurer le suivi des axes d'améliorationretenus. Il n'y a pas une seule manière demaîtriser les TMS dans l'entreprise. Des débatsautour des choix en matière de process etd'équipements de travail, des analyses encommun sur les situations de travail, et descoopérations entre les individus et les servicessur les questions concrètes de travailpermettront de confronter les différenteslogiques et d'envisager des solutionsacceptables par tous.

Inscrire la lutte contre les TMS

dans un projet d'entreprise

1 - Instaurer une conduite de projet collective dans l'entreprise

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Un engagement manifeste et clair de la direction est primordial. Il est tout aussi impor-tant de mobiliser l'encadrement, et tout particu-lièrement l'encadrement de proximité, et decréer les conditions nécessaires pour favoriserl'implication des opérateurs et de leurs représentants.

La démarche doit s'inscrire dans une dynamique où la communication des infor-mations joue un rôle essentiel. Tous les acteursde l'entreprise doivent être convaincus de sonintérêt stratégique pour l'entreprise.

Or, le milieu de la viande est peu familiariséavec le partage d'informations. Les agents demaîtrise issus du rang sont perçus comme unecourroie de transmission d'informations unique-ment descendantes. L'initiative est concentrée

sur l'encadrement, au plus haut niveau. Le chefd'entreprise, de son côté, se débat avec lescontraintes réglementaires et économiques etest surtout préoccupé de l'efficacité productive.En outre, la participation des exécutants n'estque rarement sollicitée. Les salariés sont peuinformés sur l'évolution de l'organisation du tra-vail, sur la situation économique de l'entrepriseou sur les raisons des crises que traverse lafilière.

Dans les industries de la viande, il a été consta-té que la maîtrise des TMS et la performancevont de pair. La lutte contre les TMS va dans lesens des enjeux économiques de l'entreprise.Tous les acteurs doivent en être convaincus.

2 - Mobiliser l'ensemble du personnel de l'entreprise

Aucune action de prévention des TMS ne peut espéreraboutir sans s'appuyer sur une mobilisation interne

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Aborder la question des TMS sous l'angle d'unedynamique capable de renforcer la performancede l'entreprise et l'amélioration du climat socialouvre sur une logique d'action. Dès lors, afinque la mobilisation collective soit possible, il fauttrès vite montrer que quelque chose deperceptible est réalisable, qui à la fois diminue lasouffrance et facilite le travail. Si aucuneperspective d'action n'est envisageable, unsentiment général d'impuissance s'installe et on préfère bien souvent ne pas parler des TMS. Ainsi, par exemple, dans une entreprisede la filière porcine, si les difficultés liées au désossage ont pu être débattues entre les opérateurs et la maîtrise, c’est parce quedes effets bénéfiques ont été constatésaprès des réglages de températures le lundi

matin : la viande est moins froide, le travail dedésossage est moins pénible.

S'inscrire dans cette dynamique supposeégalement que soit perceptible une évolutiond'un certain type de management, propre à lafilière, notamment de l'encadrement deproximité.

Sortir du fatalisme, c'est commencer à réfléchirà partir de quelque chose de concret et ressenticomme positif. Ainsi, tant que le salarié n'a paséprouvé les effets dans son corps de ladifférence entre un couteau qui coupe et uncouteau qui coupe mal, aucun apprentissagen'est possible.

3 - Se situer dans une dynamique de changement

La prévention des TMS passe par une dynamique de réflexion et d'action qui ouvre des débats au sein del'entreprise : c'est cette ouverture qui permettra à tous les acteurs de participer à l'analyse fine des situationsde travail

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• Les troubles musculosquelettiques du membre supérieur.Guide pour les préventeurs.INRS, ED 797, 2001, 64 pages.

• Passer commande d'une prestation ergonomique dans le cadre d’une action de prévention des TMS.Guide à l'usage du chef d'entreprise.INRS, ED 860, 2001, 38 pages.

• Comprendre et agir.DVD-Rom de formation. INRS, VM 0300, 2001.

• Troubles musculosquelettiques et travail. Quand la santé interroge l'organisation.ANACT, éditions de l'Anact, collection Outils et Méthodes, 2000, 252 pages.

• Agir sur... les maladies professionnelles.L’exemple des TMS.Éditions Liaisons, éditions de l'Anact.

• Guide TMS.Fédération générale agroalimentaire (FGA-CFDT), 1999, 100 pages.

Pour en savoir plus

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Achevé d’imprimer sur les presses de l’Imprimerie de MontligeonDépôt légal : 21512

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CAISSE CENTRALE DE LA MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLELes Mercuriales 40 rue Jean-Jaurès 93547 Bagnolet . Tél 01 41 63 77 77

réf. 10388

INSTITUT NATIONAL DE RECHERCHE ET DE SÉCURITÉ 30 rue Olivier-Noyer 75680 Paris cedex 14 . Tél. 01 40 44 30 00Fax 01 40 44 30 99 . Internet : www.inrs.fr . e-mail : [email protected]

© INRS ED 878 . 1re édition (2001) . Réimpression juin 2002 . 5 000 ex. ISBN 2-7389-0974-4

Caisse nationale de l’assurancemaladie

Mutualitésocialeagricole

IInstitut national de recherche et de sécurité

Pourquoi compte-t-on aujourd'hui plus de troubles musculosquelettiques (TMS) qu'hier ?

L'explication du caractère contemporain de cette maladie professionnelle tient à l'évolution ducontenu du travail. L'exigence de qualité, la segmentation des produits, la diversité des cahiers descharges, la sécurité sanitaire, la traçabilité et les flux tendus accroissent la dépendanceorganisationnelle entre les opérateurs et les obligent à se soumettre à des rythmes imposés.

Dans les industries de la viande, la lutte contre les TMS et la performance vont de pair. La maîtrisedes TMS va dans le sens des enjeux économiques de l'entreprise. En effet, s'engager dans laprévention des TMS, c'est à la fois apporter des réponses immédiates aux problèmes les plusvisibles et réfléchir à long terme à des transformations plus profondes.

Conception Michèle Lefebvre

APPROCHE PARTICIPATIVE PAR BRANCHE FILIÈRE VIANDE DE BOUCHERIE