Doit Penal International Cours l1

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SOMMAIRE Introduction 1. Dfinition du droit pnal international 2. Diffrence avec le droit international pnal Ire Partie. LE DROIT PENAL TRANSFRONTALIER OU DROIT EXTRANATIONAL Chapitre I. Comptence de la loi pnale: Systmes doctrinaux Section I. La territorialit de la loi pnale ou la comptence territoriale de la loi pnale Section II. La personnalit de la loi pnale ou la comptence personnelle de la loi pnale Section III. Luniversalit du droit de punir ou la comptence universelle de la loi pnale Chapitre II. Comptence de la loi pnale congolaise : Systme en vigueur en Rpublique Dmocratique du Congo Section I. Principe de territorialit Section II. Correctifs IIme Partie. LA COOPERATION INTERNATIONALE CONTRE LE CRIME Chapitre I. lextradition Chapitre II. Les autres formes de collaboration internationale

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INTRODUCTION Ltude du droit pnal international exige, au pralable, que les esprits soient fixs sur la diffrence qui existe entre les concepts droit pnal international et de droit international pnal ainsi que sur leurs dfinitions. A cet gard, le Professeur Jean-Jacques LAVENUE 1, de luniversit de Lille II, en France, donne certaines prcisions. Le Droit international pnal et le droit pnal international relvent de deux ordres juridiques diffrents: - l'ordre juridique international pour le droit international pnal; - l'ordre juridique interne pour le droit pnal international. Pour autant, ces deux ordres et ces deux droits n'en seront pas moins souvent au contact l'un de l'autre. On ne devra pas par consquent ignorer leurs interactions qui peuvent tre la condition de leur efficacit.

1. Le Droit international pnalSelon Herv ASCENCIO, Emmanuel DECAUX et Alain PELLET, dans leur ouvrage "Droit international pnal2", l'tude du droit international pnal a pour objet l'analyse de "la faon dont l'ordre juridique international ragit face des crimes comportant un lment d'internationalit . Exemples: crimes de guerre, crimes contre l'humanit, piraterie (= crimes dfinis au niveau international par des conventions). Il s'agit essentiellement d'un droit "inter-tatique", ou relevant d'Organisations cres par les Etats. On peut donner deux dfinitions du droit international pnal: l'une troite, l'autre largie. Le droit international pnal, au sens le plus strict du terme, est une branche du droit international public qui englobe l'ensemble des institutions (= rgles et organismes) qui organisent la poursuite et le chtiment des personnes ayant enfreint certaines normes du droit international, directement et en vertu de ce mme droit international. Exemples: - crimes de guerre, gnocide, torture, traitements inhumains etc. - convention du 9 dcembre 1948 sur la rpression du gnocide; TPIY;TPIR. Dans une acception plus large, si l'on y inclut toutes les infractions qui sont rgies par le principe universel, qui permet chaque Etat d'engager des poursuites pnales sans qu'il soit tenu compte du lieu de la commission des1 LAVENUE J-J., Cours de Droit International Pnal, disponible sur , 02/4/2008, consult le 22 juillet 2010. 2 ASCENSIO, H. DECAUX, E et PELLET, A., Droit international pnal, d. A. Pdone, Paris, 2000, p.3.

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infractions, le droit international pnal, englobera la prise en compte de l'action unilatrale des Etats contre : la piraterie, la traite des tres humains, l'esclavage, la circulation des publications obscnes, le faux monnayage, trafic de drogue etc. Cette partie du droit international pnal est ne l'origine de la convergence des lgislations nationales et d'un mouvement de solidarit qui ont lev ces comportements au rang de crimes du droit des gens. Des conventions ont ensuite organis au niveau international leur qualification et les modalits de leur poursuite. En bref, le droit international pnal est une branche du droit international public constitue par l'ensemble des rgles imposes la communaut internationale en vue d'assurer l'ordre public international (paix et droits de l'homme) au besoin par des sanctions pnales. Peuvent se rendre coupables de la violation de ces rgles aussi bien les Etats, leurs dirigeants que leurs agents3, ainsi que des particuliers. Chaque Etat signataire d'un trait ou d'une convention visant la sauvegarde d'un intrt essentiel l'ordre public international s'engage poursuivre ou extrader l'auteur prsum de l'infraction, si ce dernier est dcouvert sur son territoire. 2. Le droit pnal international Le droit international pnal se distingue fondamentalement du Droit pnal international qui, de son ct, envisage la faon dont l'ordre juridique interne de chaque Etat ragit face des infractions (crimes ou dlits) comportant un lment d'extranit (= la rencontre d'un ordre juridique tranger). Exemples: - crime commis en RDC par un tranger (= crime dfini par la lgislation interne); - crime commis l'tranger contre un congolais ; - jugement pnal prononc l'tranger contre un congolais rsidant en RDC et demandant son excution (=exequatur). Le droit pnal international est ainsi constitu par la partie du droit interne qui entend rgir les rapports entre le droit pnal national et l'tranger . Il s'attache aux conflits d'autorit (comptence internationale, extradition, effets internationaux des jugements rpressifs...) et aux conflits de lois pnales4. Pour cette branche du droit, le problme essentiel est celui du rapprochement; de l'harmonisation ou de l'unification des rgles nationales pour rsoudre les problmes de conflits de lois et de juridictions dans l'espace. Alors qu'il n'y aura qu'un seul droit international pnal, on peut dire qu'il y aura autant de droits pnaux internationaux que dEtats. Quoique diffrents ces deux ensembles ne manqueront pas toutefois de se rejoindre, de s'opposer, de cooprer, comme dans d'autres domaines du droit chaque fois que l'ordre international, l'ordre communautaire et l'ordre interne se trouvent confronts des problmes de hirarchie des normes ou de rpartition des comptences.3 S. GLASER, Droit international pnal conventionnel, Vol. II, Bruylant, Bruxelles, pp. 7 et 244. 4 Jean PRADEL, Droit pnal, Tome I, Cujas, Paris, 1992, n 49.

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Exemples:

- mise en uvre de l'extradition ;

- application de la clause non bis in idem ; - excution des jugements ; - comptence universelle.

3. Tendance dominante dans le chef des auteursPlusieurs auteurs comme Claude LOMBOIS 5 ; Cherif BASSIOUNI6 ; Herv ASCENCIO, Emmanuel DECAUX et Alain PELLET 7 ; Andr HUET et Rene KOERING-JOULIN8 ou David GOETZ9 abordent les contenus de toutes les deux branches dans leurs ouvrages respectifs. Cette tendance semble rsulter de la conception selon laquelle les deux branches constitueraient deux domaines distincts dun mme droit : le droit pnal international substantiel et le droit pnal procdural. Ainsi pour le Professeur Claude LOMBOIS, par exemple, le droit pnal international contient, dune part, le droit des infractions internationales et, dautre part, le droit pnal extranational 10. Quant David GOETZ, Le concept du droit pnal international sapplique habituellement deux domaines distincts du droit : les dimensions internationales du droit pnal interne, et ce quon pourrait appeler le droit pnal international proprement dit, cest--dire le droit pnal substantiel et les institutions judiciaires pnales au niveau international lui-mme 11 . Pour Andr HUET et Rene KOERING-JOULIN, le droit pnal international est une branche du droit criminel qui rgle l'ensemble des problmes pnaux qui se posent au plan international12. Il rsulte de cette approche, quen dpit de cette volont dtre exhaustif, chacune de ces deux branches a son contenu propre. Et celui qui nous intresse, cest le droit pnal international tel que sus-dfini, c.--d., la branche qui s'attache aux conflits d'autorit et aux conflits de lois pnales dans lespace.

5 LOMBOIS C., Droit pnal international, 2me d., Dalloz, Paris, 1979, p.14.

6 Chrif Bassiouni, Introduction au droit pnal international, Bruylant, dcembre/2002.7 Id.

8 Andr Huet, Rene Koering-Joulin, Droit pnal international, 3me d., Collection Thmis, Puf, Pris,2005 . 9 David GOETZ, Droit pnal international, disponible sur < http://dsp-psd.pwgsc.gc.ca/CollectionR/LoPBdP/BP/prb0117-f.htm>, dernire mise jour le 24/10/2002, consult le 23/7/2010. 10 LOMBOIS C., Droit pnal international, 2me d., Dalloz, Paris, 1979, p.14. 11 David GOETZ, op.cit.

12 Andr HUET, Rene KOERING-JOULIN, Droit pnal international, 3me d., Collection Thmis,Puf, Paris, 2005 .

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I Partie LE DROIT PENAL TRANSFRONTALIER OU DROIT PENAL EXTRANATIONAL Les crimes les plus graves intressent la Communaut internationale et les Etats qui la composent, de sorte que plusieurs Etats peuvent se sentir concerns par les poursuites, soit parce quun crime grave a t commis par ou contre leurs ressortissants, soit parce que le crime a t commis sur leur territoire, soit encore parce que le criminel suppos se trouve sur leur territoire. Il faut dpartager ces Etats quant leurs possibilits dassurer les poursuites re. Le problme essentiel qui se pose ici est de dterminer la loi applicable lorsqu'une personne, auteur de l'infraction, se trouve lors des poursuites, dans un pays diffrent du lieu du crime, ou lorsque l'infraction commise l'tranger lse nanmoins les intrts d'un Etat dtermin. On saisit l'importance et la ralit de ce problme lorsqu'on sait combien les frontires sont devenues permables suite aux moyens modernes de communications et de transports. Certaines formes de criminalit n'atteignent d'ailleurs leur maximum d'efficacit que si le dlinquant ou l'association des dlinquants peuvent oprer sur plusieurs territoires la fois : un vol se commet Kinshasa, mais le butin ne sera en scurit qu' Brazzaville. Un meurtre se commet Zongo, le meurtrier cherchera vite son refuge Bangui, etc. Dans tous ces cas, la question qui se pose est celle de dterminer la loi nationale applicable, entre celle de la Rpublique Dmocratique du Congo, de la Rpublique du Congo, de la Rpublique Centrafricaine, ou tout autre Etat intress. L'objet de cette partie est notamment de fournir des rponses ce genre de questions. Nous allons d'abord exposer les systmes doctrinaux, indiquer, enfin, celui auquel appartient le droit congolais.

re David GOETZ, op. cit., loc. cit.

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CHAPITRE I. COMPETENCE DE LA LOI PENALE: SYSTEMES DOCTRINAUX La doctrine distingue trois systmes : - La territorialit de la loi pnale ; - La personnalit de la loi pnale ; - L'universalit de la loi pnale.

Section I. LA TERRITORIALITE DE LA LOI PENALE OU LA COMPETENCE TERRITORIALE DE LA LOI PENALE (Lex loci delicti) Ce principe veut que la loi pnale s'applique tous les individus, quelle que soit leur nationalit ou celle de leurs victimes, qui ont commis une infraction sur le territoire du pays dans lequel cette loi est en vigueur. 1. LES ARGUMENTS EN FAVEUR DE CE SYSTEME

Ils sont de quatre ordres: lintrt social, une meilleure justice, le respect du principe de lgalit et lexercice de sa souverainet par lEtat du lieu de la commission de linfraction. a) L'intrt social Il convient que l'infraction soit juge le plus prs possible du lieu o elle a t commise, car c'est l qu'il y a eu trouble social et c'est celui-ci qu'il faut apaiser. Bien plus, l'effet intimidant que l'on attend de la peine est plus assur. BECCARIA ne dit pas autre chose lorsque, justifiant la comptence territoriale, il crit : Un crime ne peut tre puni que dans le pays o il a t commis, parce que cest l seulement et non ailleurs, que les hommes sont forcs de rparer, par lexemple de la peine, les funestes effets qua pu produire lexemple du crime 13. b) Une meilleure justice Le juge local connat sa loi nationale et pourra donc en faire une bonne application alors que le recours au droit tranger, qu'on ne connat pas ou qu'on connat difficilement, compromettrait srieusement une saine justice. Par ailleurs, la procdure est facilite lorsqu'elle a lieu sur le territoire de l'infraction. Les13 Trait des dlits et des peines, 21.

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enqutes peuvent tre facilement conduites, les indices peuvent tre mieux recueillis et laudition des tmoins devient possible et peu coteuse. La preuve serait autrement difficile si le dlinquant tranger tait jug dans son pays d'origine, sans parler des frais considrables que cela entranerait. c) Le respect du principe de lgalit On suppose en effet que le dlinquant connaissait la loi pnale en vigueur dans le pays o il a pos son acte. Par contre, il n'est pas exclu qu'on le surprenne en lui appliquant sa loi nationale qu'il pouvait effectivement ignorer. d) Exercice de sa souverainet par l'Etat de la commission de l'infraction Le maintien de l'ordre et de la scurit l'intrieur de ses frontires est un attribut essentiel de la souverainet de l'Etat. Toute infraction aux lois qu'il dicte est une atteinte son autorit, qu'il a le droit et le devoir de sanctionner. Inversement, le dlit commis l'tranger lui chappe ; il est pour lui res inter alios acta.14 2. LE REPROCHE ENCOURU PAR LE SYSTEME DE LA TERRITORIALITE Ce systme, appliqu strictement, n'offre pas pleine satisfaction. Il est de nature assurer l'impunit du dlinquant dans de nombreux cas. Il en sera ainsi lorsque le lieu de l'infraction n'est pas connu ou dtermin ou lorsqu'il ne relve d'aucune souverainet territoriale (piraterie, dtrioration des cbles sous-marins, de satellites, etc.). De mme, on se trouve devant un cas d'impunit si un dlinquant, aprs avoir commis une infraction l'tranger, regagne son pays. Celui-ci ne pourra pas le punir car le crime n'a pas t commis sur son territoire. Le pays du lieu de l'infraction ne pourra pas le punir, car cela supposerait que le pays d'origine extrade le criminel. Or, comme nous aurons l'occasion de le prciser, on n'extrade pas ses propres nationaux. On verrait ainsi un dlinquant dangereux chapper toute justice rpressive 15. C'est devant de telles insuffisances que d'autres systmes ont t imagins.

Section II. LA PERSONNALITE DE LA LOI PENALE OU LA COMPETENCE PERSONNELLE DE LA LOI PENALE Au lieu que la loi pnale s'attache au territoire de l'Etat o elle est en vigueur, elle est lie aux personnes qu'elle suit partout o elles se trouvent.14 MERLE et VITU, op. cit., 194. 15 Ce problme s'est pos avec les supporters de Liverpool qu'on appelle les hooligans et quilors de la finale de la Coupe d'Europe des Clubs champions de football qui a oppos, le 29 mai 1985, leur quipe Juventus de Turin au stade bruxellois du Heysel, ont massacr les supporters italiens (plus de 40 morts) et ont regagn leur pays, l'Angleterre. La question se posait en ces termes : Doivent-ils tre jugs en Angleterre, et cela est-il possible, ou doivent-ils tre livrs la Belgique ? Voir D. VANDEN-BOSSCHE, Le droit pnal anglais confront aux crimes et dlits commis par les hooligans au Heysel, in R.D.P.C., 1986, 447-463. Finalement, le 09 septembre 1987, la justice britannique a extrad 25 hooligans en Belgique pour y tre jugs.

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Ce systme se ddouble selon que les personnes sont des dlinquants ou des victimes : on parle alors de personnalit active et de personnalit passive. 1. PRINCIPE DE LA PERSONNALITE ACTIVE

Dans ce cas, la loi pnale s'applique aux infractions que commettent, en quelque lieu que ce soit, les nationaux de l'Etat dtermin. Le dlinquant est jug d'aprs sa loi d'origine et ne relve que des tribunaux de son pays. Ce systme a t justifi en se fondant sur l'ide que la loi nationale est mieux adapte la personne du dlinquant et que le juge national sera plus juste qu'un juge tranger. Le principe de la personnalit active, dite aussi de la comptence personnelle active, a t en vigueur dans le droit ecclsiastique et le droit du Moyen Age europen. Actuellement, il n'existe qu' titre de correctif. C'est ainsi qu'il est appliqu aux stationnements militaires. Ainsi, lorsque les troupes congolaises ont sjourn au Tchad en 1983, leurs membres relevaient du code de justice militaire congolais et non de la lgislation tchadienne. Le NCPF accepte le principe de la personnalit active (comptence de la loi et de la juridiction franaises pour tout crime ou tout dlit commis par un franais) ds lors quil y a rciprocit dincrimination avec la lgislation du pays de commission16. En dautres termes, la loi franaise sera comptente la condition que linfraction, punissable par le droit franais, le soit aussi par le droit pnal du pays o elle a t commise.

2. PRINCIPE DE LA PERSONNALITE PASSIVE

Selon ce principe, la loi pnale suit les ressortissants de l'Etat o elle est en vigueur et s'applique toutes les infractions dont ils sont victimes, o qu'ils se trouvent. Ce principe est justifi par l'ide que la loi pnale de la victime est la plus mme d'assurer sa protection. Cependant, il n'est pas l'abri des critiques. a) D'abord, le juge de la nationalit de la victime peut tre partial. b) Ensuite, adopt titre de principe gnral, ce principe ne serait pas en mesure d'assurer une bonne justice; celle-ci sera inefficace et coteuse, deux inconvnients qu'vite l'application du principe de la territorialit.

16 Article 113-6 du NCPF et article 689 du code franais de procdure pnale.

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Actuellement, on trouve l'application de la comptence personnelle passive dans certains cas o la victime de l'infraction est l'Etat lui-mme, bless dans ses intrts essentiels.

Section III. L UNIVERSALITE DU DROIT DE PUNIR OU LA COMPETENCE UNIVERSELLE DE LA LOI PENALE (Judex deprehensionis) 1. DEFINITION Ce systme, dit aussi de la comptence universelle de la loi pnale, donne au juge du lieu d'arrestation le pouvoir de juger toutes les infractions, quel que soit le lieu de leur commission, sans gard la nationalit du dlinquant ou des victimes. On fait remonter ce systme une priode fort ancienne (JUSTINIEN). Mais on reconnat GROTIUS le mrite de l'avoir systmatis. L'auteur de De jure belli ac pacis (1625) disait du dlinquant trouv sur le territoire national : aut dedere, aut punire (Extrader ou punir). En fait, en nextradant pas, lEtat ne sengage pas punir, mais plutt poursuivre. Or, poursuivre ne veut pas dire ncessairement juger, et encore moins condamner ou punir. Aussi, le principe Aut dedere, aut punire pourraitil aujourdhui connatre une nouvelle formulation : Aut dedere, aut persequi . Extrader ou poursuivre 17. Ce systme de la comptence universelle suppose une communaut d'intrts entre les Etats. De nombreuses conventions internationales existent sur certains problmes qui troublent gravement l'ordre public international; elles engagent les Etats soit poursuivre soit extrader les individus qui se rendraient coupables de certains faits prcis. Bien plus, la philosophie qui sous-tend loctroi aux Etats de la comptence universelle a prcisment pour objectif de supprimer les exigences de rattachement territorial pour que chaque Etat dans le monde soit susceptible de poursuivre tous les crimes contre lhumanit 18. Un exemple de comptence universelle nous est donn par la loi belge du 16/6/1993 relative la rpression des violations graves du droit international humanitaire. Les controverses auxquelles elle a donn lieu et le chantage et lintimidation de la part de certaines puissances et de certains pays sur la politique trangre de la Belgique, ont conduit celle-ci, par sa loi du 05/8/2003, revoir ses ambitions la baisse dabord en abrogeant purement et simplement la loi de 1993. Par ailleurs, la nouvelle loi contient des innovations suivantes :17 Voir Gilbert GUILLAUME, La comptence universelle : formes anciennes et nouvelles, inMlanges offerts Georges LEVASSEUR, Droit pnal, droit europen, Gazette du Palais Litec, Paris, 1992, pp. 31 et s. 18 Voir B. STERN, La comptence universelle en France : le cas des crimes commis en exYougoslavie et au Rwanda, German Yearbook of international Law. Jahrbuch fr international Recht, vol. 40, 1997, 293 et s.

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Son article 1 bis prvoit dsormais le respect des immunits prvues par le droit international, tirant ainsi les leons de larrt du 14/2/2002 de la Cour Internationale de Justice CIJ- dans laffaire YERODIA er ; La possibilit de poursuivre un belge ou une personne rsidant en Belgique suspecte davoir commis un crime de droit international hors du territoire belge19 ; La possibilit de poursuivre un tranger suspect davoir commis ces crimes, mais uniquement dans le cas o la victime est belge ou rside en Belgique depuis au moins trois ans 20. Ce qui est loin dtre le cas des victimes signales dans la plainte contre Ariel SHARON ET BUSH pre ; La comptence du juge ne se dploie et ne sexerce que si linculp est trouv en Belgique21 o ni SHARON ni BUSH pre nont manifestement ni empressement ni envie daller.

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Dans toutes ces pripties de la lgislation belge, E. DAVID y a vu un dbat de principe opposant les tenants dune lutte absolue contre limpunit aux partisans dune vision modeste de la justice universelle compte tenu des impratifs relevant de la politique trangre 22. Il est vident, comme toujours, que la vision modeste, qui est lautre nom du ralisme, a triomph sans gloire. Quant aux tenants de la lutte absolue contre limpunit, en ayant perdu cette bataille, ils ont perdu la guerre. 2. LES INFRACTIONS OU LES ATTEINTES A LORDRE PUBLIC INTERNATIONAL Lexamen des conventions internationales pertinentes et des indices du jus cogens, souligne David GOETZ, permet de croire que le droit international reconnat lexistence des catgories suivantes de crime 23 :1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10.

lagression; le gnocide; les crimes contre lhumanit; les crimes de guerre; les crimes contre le personnel de lONU et le personnel qui lui est associ; lusage ou la possession illicites darmes prohibes; le vol de matires nuclaires; lapartheid; lesclavage; la torture et les autres formes de traitement cruel, inhumain ou dgradant;

er C.I.J., 14/2/2002, Affaire du mandat darrt du 11/4/2000. 19 Article 6. 20 Article 10. 21 Article 12 bis . 22 Eric DAVID, La pratique du pouvoir excutif et le contrle des chambres lgislatives en matirede droit international (1999-2003), in Revue belge de droits international, 2005, 139.

23 David GOETZ, op.cit.

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11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22. 23.

la piraterie; le dtournement davion et dautres actes contraires la scurit des transports ariens internationaux; les actes contraires la scurit de la navigation et des plates-formes maritimes; la menace du recours la force et le recours la force contre des personnes jouissant dune protection internationale; la prise dotages civils; lutilisation illicite de la poste; le trafic illicite des stupfiants; la destruction ou le vol de trsors nationaux; les actes illicites lenvironnement; prjudiciables certains lments protgs de

le commerce international de matires obscnes; la falsification et la contrefaon; laltration illicite du fonctionnement des cbles sous-marins; la corruption de fonctionnaires trangers.

Parmi les crimes prcits, on estime que les suivants relvent du jus cogens : lagression, le gnocide, les crimes contre lhumanit, les crimes de guerre, la piraterie, lesclavage et la torture. En dautres termes, les tats ont des obligations pnales incontournables lgard de ces crimes, indpendamment de leurs obligations en vertu de traits et nonobstant celles-ci. Parmi les atteintes les plus graves l'ordre public international, dit le Professeur NYABIRUNGU, figurent certainement les crimes dfinis par le statut portant cration du Tribunal militaire international de Nuremberg, charg de juger les nazis. Il s'agit des crimes contre la paix, des crimes de guerre et des crimes contre l'humanit. Le Tribunal Militaire International pour lExtrme-Orient fut institu le 19 janvier 1946, et install Tokyo. Sa charte tait fortement inspire du Statut de Nuremberg et prvoyait les crimes de mme nature, mais seuls les individus accuss de crimes contre la paix devaient comparatre. Les crimes contre la paix consistent en des initiatives d'invasions d'autres pays et de guerres d'agression en violation des lois et des traits internationaux. Les crimes de guerre sont des atrocits et dlits commis sur des personnes ou des biens en violation des lois et usages de la guerre tels que les assassinats, les mauvais traitements de prisonniers de guerre, les meurtres d'otages, la destruction sans motif des cits, des villes ou villages, etc. Les crimes contre l'humanit sont des atrocits et dlits tels que l'assassinat, l'extermination, la mise en esclavage, la dportation, l'emprisonnement, la torture, le viol ou autres actes inhumains commis contre les populations civiles pour leur appartenance politique, ethnique, raciale, philosophique ou religieuse 24.24 Article 2 de la loi n 10 du Conseil de Contrle.

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Par ailleurs, le droit international classique admettait dj un cas de comptence universelle absolue et sans aucune restriction, celui de la piraterie25. Et ceci est repris aujourdhui larticle 105 de la Convention des Nations Unies de Montego Bay du 10 dcembre 1982 sur le droit de la mer. Tout Etat peut, en haute mer ou tout autre lieu ne relevant pas de la juridiction daucun Etat, saisir un navire ou un aronef pirate les tribunaux de lEtat qui a opr la saisine peuvent se prononcer sur la peine infliger . De mme, la convention du 20 avril 1929 sur le faux monnayage reconnat aussi la possibilit pour un Etat de poursuivre et de punir les trangers se trouvant sur son territoire pour des infractions de faux monnayage commises ltranger, quil sagisse de monnaies nationales ou trangres 26. Quant aux autres atteintes l'ordre public international, nous pouvons nous rfrer, titre d'exemples, aux conventions et traits: Sur les publications obscnes (1923) ; Sur la rpression de la capture illicite d'aronef ( La Haye, 1970) ; Sur la rpression d'actes illicites dirigs contre la scurit de l'aviation civile (Montral, 1948) ; Sur l'limination et la rpression du crime d'apartheid (1973) ; Sur le gnocide (Paris, 1948) ;

Sur le faux monnayage (1929) ; Sur labolition de lesclavage, de la traite des esclaves et des institutions

et pratiques analogues lesclavage (Convention supplmentaire adopte Genve le 7 novembre 1956) ; Sur l'imprescriptibilit des crimes de guerre et des crimes contre l'humanit (1968) ; Sur l'limination de toutes les formes de discrimination raciale (1965) ; Sur llimination de toutes les formes de discrimination lgard des femmes (New York, 18 dcembre 1979) ; Sur la rpression de la traite des humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui (1949) ; Sur la rpression du trafic illicite des drogues nuisibles (1936) ; Sur les droits de lenfant (20 novembre 1989) ; Sur la rpression des attentats terroristes lexplosif (New York, 1998) ; Sur le marquage des explosifs plastiques et en feuilles aux fins de dtection (Montral, 1 mars 1991) ; Les Conventions de type humanitaire de Genve du 12 aot 1949, ainsi que leurs protocoles additionnels, etc.25 Voir Gilbert GUILLAUME, La comptence universelle : formes anciennes et nouvelles, inMlanges offerts Georges LEVASSEUR, droit pnal, droit europen, Gazette du Palais Litec, Paris, 1992, p. 31. 26 Recueil des Traits, Socit des Nations, vol. 12, p. 371.

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Toutes ces conventions forment la base de ce qu'on appelle aujourd'hui le droit international pnal, branche du droit international public, constitue par l'ensemble des rgles imposes la communaut internationale en vue d'assurer l'ordre public international (paix et droits de l'homme) au besoin par des sanctions pnales. Peuvent se rendre coupables de la violation de ces rgles aussi bien les Etats, leurs dirigeants que leurs agents er, ainsi que des particuliers. Chaque Etat signataire d'un trait ou d'une convention visant la sauvegarde d'un intrt essentiel l'ordre public international s'engage poursuivre ou extrader l'auteur prsum de l'infraction, si ce dernier est dcouvert sur son territoire. La CDI a mis au point un projet de code des crimes contre la paix et la scurit de lhumanit. Il sagit du crime dagression, du gnocide, des crimes contre lhumanit, des crimes contre le personnel des Nations Unies et le personnel associ et des crimes de guerre. 3. LA REPRESSION

Aprs Nuremberg et Tokyo, le Conseil de Scurit des Nations Unies a cr respectivement en 1993 et en 1994, deux tribunaux ad hoc chargs de juger les personnes prsumes coupables des violations graves de droit humanitaire au Rwanda et en ex-Yougoslavie. Le Tribunal de Nuremberg a rendu son jugement le 1 octobre 1946. Il a prononc : 12 condamnations mort par pendaison ; 3 condamnations vie ; 2 condamnations 20 ans de prison ; 1 condamnation 15 ans ; 1 condamnation 10 ans ; 3 acquittements ayant t prononcs en faveur de SCHAT, Von PAPEN et FRIETZCHE. Toutes les peines ont t excutes, y compris celle prononce contre GOERING qui, condamn mort, a prfr excuter lui-mme la sentence, en se suicidant. Le Tribunal de TOKYO a rendu son jugement du 04 au 12 novembre 1948. Il a prononc

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Sept condamnations mort ; Seize condamnations de prison vie ; Une condamnation vingt ans de prison ; Une condamnation sept ans.

er S. GLASER, Droit international pnal conventionnel, Vol. II, Bruylant, Bruxelles, pp. 7 et 244.

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Deux personnes, NAGANO et MATSUOKA taient dcdes pendant le procs, et la propagandiste OKAWA avait chapp au jugement pour maladie mentale er. Ce qui ne va pas sans rappeler cet autre malade de Nuremberg du nom de RUDOLF HESS et suggrer la maxime selon laquelle si le crime contre lhumanit nest pas commis par des fous, il rend fous ceux qui le commettent. Le droit international pnal vient de franchir le pas le plus dcisif avec la cration en 1998, dune Cour pnale internationale permanente, appele la Cour Pnale Internationale, et dont le sige est La Haye. Chapitre II. COMPETENCE DE LA LOI PENALE CONGOLAISE : SYSTEME EN VIGUEUR EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO Disons d'emble qu'il existe une certaine controverse autour de la question de savoir quel est le systme applicable en Rpublique Dmocratique du Congo. Des auteurs comme MINEUR27 ou LAMY28 enseignent que le principe applicable est celui de la territorialit. Par contre, le professeur KALOMBO MBANGA estime que le droit congolais applique l'universalit des poursuites 29. Cette controverse peut disparatre notre avis si l'on procde comme nous avons fait :

- Avoir une vue thorique exacte des systmes en prsence. C'est ce que nous venons de faire dans le paragraphe prcdent ; - En faire une application fidle aux textes sans jamais perdre de vue que ceux-ci doivent tre strictement interprts.Sige de la matire La matire est rglemente par les articles 2 et 3 du CP, l'article 14 du code civil, livre 1er et l'article 2 de l'A.R. du 22 dcembre 1934. La lecture de ces textes nous convainc de l'existence du principe de la territorialit. Mais celui-ci est accompagn de deux correctifs emprunts successivement au systme de l'universalit et celui de la personnalit passive. Section I. PRINCIPE DE TERRITORIALITE Il est pos clairement par l'article 2 : L'infraction commise sur le territoire de la Rpublique est punie conformment la loi . Il est renforc par l'article 14 CC, Livre 1er (D. du 20 fvrier 1891) : Les lois pnales ainsi que les lois de police et de sret publique obligent tous ceux qui se trouvent sur le territoire de l'Etat.30er Isabelle FLANDROIS, Le procs de Tokyo, in Les procs de Nuremberg et de Tokyo , sous ladirection dAnnette WIEVIORKA, pp. 159-177. 27 Op. cit., p. 16. 28 Cours, op. cit. p. 160. 29 Voir notes des tudiants, anne acadmique 1980-1981. 30 Il faut relever que le titre II du code civil, livre I dont fait partie l'article 14, n'a pas t abrog par le code de la famille (Voir l'article 915 de ce mme code)

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Larticle 2 de l'A.R. du 22 dcembre 1934 stipule: En matire rpressive, le ministre public recherche les infractions aux lois, aux dcrets, arrts, ordonnances et rglements, qui sont commises sur le territoire de la Rpublique. Il sagit pratiquement de la mme disposition, qui est reprise larticle 7, alina 1er du code dOCJ : En matire rpressive, le Ministre public recherche les infractions aux actes lgislatifs et rglementaires qui sont commises sur le territoire de la Rpublique . Enfin, nous ne pouvons passer sous silence larticle 32, alina 2 de la constitution, selon lequel : Tout tranger qui se trouve lgalement sur le territoire national est tenu de se conformer aux lois et aux rglements de la Rpublique .

1. DEFINITION DU TERRITOIRE Par territoire congolais, il faut entendre : - Le sol congolais, - La mer territoriale (12 miles de rivage)31; - L'espace arien ; - Les navires de commerce ou de plaisance en eaux internationales; - Les navires de guerre Les forces armes stationnant en pays tranger non ennemi sont considres comme se trouvant sur le territoire national. La question que l'on peut se poser est celle de dterminer la loi applicable lorsque les divers lments constitutifs de l'infraction ont t raliss en partie en Rpublique Dmocratique du Congo et en partie l'tranger. Il suffit, pour que la loi congolaise soit applicable, qu'un des lments constitutifs ait t ralis en Rpublique Dmocratique du Congo, et qu'aucun jugement dfinitif n'ait t rendu l'tranger sur le mme fait et quant la mme personne. Il sagit l de lapplication de la thorie de lubiquit qui veut que lorsquun des lments constitutifs de linfraction a t commis sur le territoire dun Etat, linfraction est suppose y avoir t commise dans son intgralit. 2. STATUT DES AMBASSADES Une prcision s'impose propos de l'exterritorialit des ambassades. Gnralement, on dit que les ambassades relvent de la loi du pays qu'elles reprsentent. Est-ce si vrai que cela ?

31 Voir loi n 74/009 du 10 juillet 1974, portant dlimitation de la Mer Territoriale de la RpubliqueDmocratique du Congo in J.O., n 16 du 15 aot 1974, p. 689.

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Concrtement, si un diplomate amricain ou un individu quelconque commet une infraction, un meurtre par exemple, l'ambassade des Etats-Unis, la loi congolaise n'aurait donc aucune prise ? C'est la question de l'exterritorialit qui est pose. Fiction!, dit Claude LOMBOIS32 que de prtendre qu'un immeuble situ dans le 8 arrondissement de Paris ou qu'un navire ancr dans le port du Havre ne se trouvent pas en France! . Et FAUCHILLE de renchrir en disant que lexterritorialit est une fiction inutile, vague, fausse et partant dangereuse me. A dfaut de sa disparition, la thorie dexterritorialit est en recul, et son emploi devrait tre vit dans la mesure o elle accrditerait deux erreurs : - Faire croire certains diplomates quils sont au-dessus des lois du pays daccueil, alors que cest un principe de droit international que les trangers, y compris les diplomates, qui se trouvent sur le territoire dun Etat sont tenus de respecter ses lois, mme si cette dernire catgorie dtrangers bnficient dun traitement spcial (immunit de juridiction) leur permettant daccomplir leur mission ; - Faire croire lopinion que les immeubles dambassade font partie dun territoire autre que celui o ils se trouvent33. A ce sujet, la convention de vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques a fait uvre utile en ne recourant pas, dans sa rdaction, la thorie de lexterritorialit. Et larticle 14 de la convention relative aux fonctionnaires diplomatiques signe la Havane le 20 fvrier 1928 est simplement ainsi formul : les fonctionnaires diplomatiques seront inviolables dans leur personne, dans leur rsidence prive ou officielle et dans leurs biens. Cette inviolabilit stend : a) toutes les classes de fonctionnaires diplomatiques ; b) tout le personnel officiel de la mission diplomatique ; c) tous les membres de la famille respective qui vivent sous le mme toit ; d) aux documents, archives et correspondance de la mission . Nous pouvons encore mieux comprendre ces propositions si nous dcomposons la loi en norme de comportement et en norme de rpression, celle-ci se ddoublant en rgle de comptence et en rgle substantielle. On dira alors 1. que la norme de comportement, celle qui tiquette certains actes en les qualifiant dinfraction, sapplique indistinctement tout le territoire dun Etat. Cest la loi congolaise, par exemple qui est comptente pour qualifier linfraction commise par un diplomate amricain son ambassade. Et linviolabilit reconnue aux locaux dambassade apparait bien ce quelle est : une particularit affectant le mode dexercice de la rpression mais ne dniant pas son principe .32 Claude LOMBOIS, Immunit, exterritorialit et droit d'asile en droit international pnal, inR.I.D.P., 1978, 498. me Cit par Philippe CAHIER, Le droit diplomatique contemporain, Droz, Genve, 164, p. 188. 33 Loc. cit.

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2. que la rgle de comptence peut confier la rpression une autre loi que la moi territoriale ; 3. que la rgle substantielle de rpression peut tre affecte par le statut dinviolabilit de certains lieux. 3. STATUT DES AERONEFS Il faut distinguer selon qu'ils sont en vol ou en arrt. Pendant le vol et pour ce qui se passe l'intrieur, la loi du territoire survol est sans possibilit d'application effective. Seule la loi du pavillon est applicable. Cependant, en cas d'atterrissage, la loi du lieu devient applicable pour les infractions perptres en vol. En cas d'arrt, seule la loi du lieu d'atterrissage est applicable. Mais si l'atterrissage est forc, l'avion est considr comme en vol, jusqu' ce que les personnes et les biens soient pris en charge par l'autorit comptente. En attendant, seule la loi du pavillon s'applique. 4. STATUT DES NAVIRES La rgle est la loi du pavillon. Le code congolais de la navigation maritime prvoit que les infractions commises bord des navires congolais sont rputes commises au Congo et peuvent y tre poursuivies mme si linculp nest pas trouv sur le territoire du Congo. 34 Il sagit l dune illustration de la loi du pavillon. Toutefois, celle-ci cdera

1) Si l'infraction a t commise par ou contre une personne qui ne fait pas partie de l'quipage ; 2) Si l'infraction a troubl la tranquillit du port ; 3) Si les autorits du navire ont demand l'intervention des autorits locales.

SECTION II. CORRECTIFS L'article 3 comprend deux correctifs. 1. CORRECTIF RELEVANT DU SYSTEME DE L'UNIVERSALITE L'article 3, al. 1 du code pnal dispose : Toute personne qui, hors du territoire de la Rpublique Dmocratique du Congo, s'est rendue coupable d'une infraction pour laquelle la loi congolaise prvoit une peine de servitude pnale de plus de deux mois, peut tre poursuivie et juge en Rpublique Dmocratique du Congo, sauf application des dispositions lgales sur l'extradition .34 Article 3, alina 1er .

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Concrtement et en clair, cela veut dire que le tribunal congolais peut juger toute personne, quelle que soit sa nationalit ou celle de sa victime, qui se sera rendue coupable, l'tranger, d'une infraction prsentant une certaine gravit. Cette disposition est facultative. La gravit de l'infraction sera apprcie selon deux critres : - Il faut que la loi congolaise prvoie aussi l'infraction (principe de la double incrimination) ; - Il faut que cette infraction soit punissable par la loi congolaise d'une peine suprieure deux mois. La poursuite et le jugement du dlinquant qui s'est rendu coupable d'une infraction l'tranger sont soumis certaines conditions: 1. Il faut que l'infraction prsente, comme nous venons de le voir, une certaine gravit. Sont ainsi exclues de la possibilit de poursuite les infractions punissables en Rpublique Dmocratique du Congo de deux mois ou moins, ou de l'amende ; 2. Il faut que l'inculp soit trouv en Rpublique Dmocratique du Congo au cours de l'instruction au moins (sauf pour les infractions d'atteinte la sret de l'Etat et la foi publique) ; 3. Il faut que l'inculp n'ait pas encore t jug dfinitivement l'tranger et, en cas de condamnation, n'ait pas subi ou prescrit sa peine ou obtenu sa grce ou encore bnfici de lamnistie (sauf pour les infractions d'atteinte la sret de l'Etat et la foi publique). Ainsi, le droit congolais tient compte des situations juridiques nes l'tranger et s'empche notamment de poursuivre dans les conditions qui viennent d'tre prcises. Il s'agit de l'application du principe non bis in idem. On ne pourra donc pas poursuivre un dlinquant acquitt l'tranger, ou dont le dossier a t class sans suite ou clos par un non-lieu. De mme, on ne poursuivra pas celui qui, aprs avoir t condamn, a excut sa peine, ou dont la peine a t prescrite. Enfin, on ne le poursuivra pas s'il a t graci ou amnisti. Si l'intress n'a subi qu'une partie de la peine et s'est ensuite vad, il pourra tre poursuivi nouveauer. Lapplication du principe non bis in idem ne requiert pas seulement que les nouvelles poursuites aient pour objet les mmes faits que ceux de la cause prcdemment juge, mais galement que les premires poursuites dfinitivement juges et les secondes poursuites concernent la mme personne, pour une infraction commise ltranger35. Le juge congolais ne doit pas tenir compte dune dcision rendue par une juridiction pnale trangre lgard du mme prvenu, lorsque linfraction a t commise au Congo.er G. MINEUR, op. cit., p. 25. 35 Cass., 7 nov. 1995, R.D.P.C., 1996, 751.

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Dailleurs larticle 14, 7 du pacte international relatifs aux droits civils et politiques a pour seul objet dinterdire, dans un mme pays, aprs un jugement dfinitif dacquittement ou de condamnation, des nouvelles poursuites pour la mme infraction. Ds lors, aucune disposition ninterdit de poursuivre et de condamner un prvenu pour des faits commis en RDC, nonobstant une condamnation intervenue ltranger36. Il est bien entendu quil sagit l dun facteur dont le juge peut tenir compte dans la dtermination de la nature ou du taux de la peine37. 4. Il faut une requte du ministre public ; 5. Lorsque l'infraction lse un particulier et qu'elle est punissable de 5 ans ou moins38 par la loi congolaise, il faut ou bien que la partie offense dpose une plainte, ou bien que l'autorit du pays o l'infraction a t commise la dnonce officiellement l'autorit judiciaire de la Rpublique Dmocratique du Congo 39. 2. CORRECTIF EMPRUNTE AU SYSTEME DE LA PERSONNALITE PASSIVE Ce correctif apparat la lecture des alinas 4 et 5 de l'article 3 du code pnal qui disposent : Toutefois, pour les infractions, autres que celles du titre VIII, et des deux premires sections du titre III du deuxime livre du Code pnal, aucune poursuite na lieu si linculp justifie quil a t jug dfinitivement ltranger et, en cas de condamnation, quil a subi ou prescrit sa peine ou obtenu sa grce. Sauf dans les cas prvus par le titre VIII et les deux premires sections du titre III du deuxime livre du Code pnal, la poursuite na lieu que si linculp est trouv en Rpublique dmocratique du Congo . De l'alina 4, il ressort que le juge congolais est comptent pour les infractions commises l'tranger, attentatoires la sret de l'Etat (titre VII) et la foi publique telle que protge par les deux premires sections du titre III, sans qu'en aucun cas il puisse tre tenu compte des situations juridiques nes l'tranger. Notamment, l'application du principe non bis in idem est carte car les intrts en jeu sont tellement essentiels la vie, la scurit et au crdit de l'Etat que celui-ci estime qu'il ne peut en laisser le soin personne d'autre. Il est seul en mesure d'en assurer la protection et d'apprcier objectivement la gravit des atteintes dont ils peuvent tre l'objet. L'article 5 fait comprendre que les atteintes la sret de l'Etat et la foi publique vises ci-dessus sont poursuivables par les juridictions congolaises quelle que soit la nationalit du coupable et quel que soit l'endroit o il se trouve,36 Voir dans ce sens Cass belge, 20/2/1991, RDPC., 1992, p. 76. 37 Chronique sem. Jurispr., in R.D.P.C., 1995, 465-467. 38 La mise jour du code pnal ralise en 1982 par le Service de Documentation du Dpartement

de la justice parle de 5 ans au moins. Cette confusion, due certainement une erreur matrielle, fait dire au texte le contraire du sens voulu par le lgislateur. 39 G. MINEUR, loc. cit.

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en Rpublique Dmocratique du Congo ou l'tranger. Cela veut dire notamment que pour ce type d'infractions, l'inculp pourra tre poursuivi et jug par dfaut. Le systme de la personnalit passive est dit aussi principe de ralit lorsque la victime dont la loi doit s'appliquer est l'Etat lui-mme 40.

II Partie LA COOPERATION INTERNATIONALE CONTRE LE CRIME40 Voir notamment MERLE et VITU, op. cit.,

n 195.

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Les Etats sont souverains, cest--dire quils dcident sur le territoire quils administrent, et que les autres Etats sont pris de ne pas intervenir dans cette souverainet. Le droit pnal est la mise en uvre du pouvoir de lEtat de dcider que des comportements seront interdits, que ceux qui les posent seront poursuivis et de mettre tout cela en uvre. La collaboration est difficile mais obligatoire. Elle est ne de la ncessit, parce que les auteurs des infractions passent dun pays lautre et quil y a des phnomnes de criminalit qui se ralisent sur le territoire de plusieurs Etats. Ces derniers doivent donc laborer des modalits de collaboration. Ils vont le faire dans plusieurs enceintesme. En bref, la dimension internationale qu'acquiert la criminalit fait que le combat contre celle-ci ne peut russir sans une grande collaboration entre les Etats. Cette collaboration trouve son expression la plus ancienne et la plus importante dans l'extradition. Cela ne saurait cependant nous faire perdre de vue qu'il existe d'autres formes de collaboration internationale contre les crimes 41.

Chapitre I. L EXTRADITION42 Alors que les forces policires, les procureurs et les tribunaux dun pays ne peuvent exercer leurs fonctions qu lintrieur du territoire relevant de leur comptence, la criminalit ne tient pas compte des frontires. Cest pourquoi les tats ont d concevoir des outils juridiques susceptibles de servir dans les cas o un ou plusieurs des lments suivants se trouvent ou se droulent ltranger : le lieu du crime, laccus, les lments de preuve ou les procdures pnales. Les aspects internationaux de lapplication du droit pnal national comprennent la comptence extraterritoriale ainsi que divers mcanismes de coopration intertatique en matire pnale tels que lextradition, lentraide juridique, et la saisie et confiscation des produits de la criminalit 43.

Section I. DEFINITION ET SOURCES 1. DEFINITION L'extradition est une procdure internationale par laquelle un Etat (dit Etat requis) accepte de livrer un individu se trouvant sur son territoire un autre quime Henri BOSLY, Droit Pnal International, notes de cours, Universit catholique de Louvain, 2003-2004, p. 2. 41 En matire de coopration internationale contre le crime, lEurope peut se poser en modle. Voir

ce sujet La coopration inter-tatique europenne en matire pnale, Les instruments juridiques du Conseil de lEurope, Recueil de textes compil et dit par EKKEHART MLLER RAPPARD et M. CHERIF BASSIOUNI, 2 vol. Martinus Nijhoff, Dordrecht, Boston, London, 2e d. 1991, 1725 p. 42 Sur cette question, on peut lire l'intressante tude de J. VERHAEGEN, Le refus d'extrader au regard de la lgislation belge, in Rapports belges au XIme Congrs de l'Acadmie internationale de droit compar, Caracas, 29 aot - 5 septembre 1982, Bruxelles, 1982, 797-820 ; Elisabeth ROLIN, Dveloppements rcents du contrle du Conseil dEtat en matire dextradition, in R.S.C., 1994, 491-501. 43 David GOETZ, op.cit.

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en a fait la demande (Etat requrant) afin que celui-ci puisse le juger ou, s'il est dj condamn, lui fasse purger sa peine ou excuter une mesure de sret 44. Lorsque l'extradition est faite en faveur du pays o l'infraction fut commise, elle permet une justice plus efficace, car le dlinquant est jug par le pays qui dispose de plus d'atouts pour la recherche et la dcouverte de la vrit. Le Professeur BOSLY enseigne quen cas dextradition, du ct de lEtat requrant il sagit dune extradition active (il fait une demande) alors que du ct de lEtat requis il sagit dune extradition passive (il est saisi dune demande). Pour un Etat qui reoit une demande dextradition et qui a sign les traits internationaux, il y a obligation dextrader ou de juger ( aut dedere, aut judicare)45.

2. LES SOURCES DU DROIT DEXTRADITION L'extradition se base juridiquement sur les traits que les Etats concluent entre eux afin de se livrer mutuellement les dlinquants les plus dangereux. Les sources formelles du droit dextradition sont les traits internationaux et le droit propre chaque pays (lois) 46.

A. Les traits dextraditionLes traits internationaux ont pour objet de rgler lextradition entre deux Etats. Avant, il y avait conflit entre le droit dasile et le droit dextradition. Au dpart, il sagit de traits bilatraux, mais la pratique moderne connat plutt des traits multilatraux entre plusieurs Etats partenaires.

1. Traits bilatraux la convention judiciaire du 4 mars 1966 liant la Rpublique Dmocratique du Congo et le Rwanda ; Convention gnrale de coopration en matire de justice du 12 avril 1978, entre la RDC et la Rpublique du Congo47. 27 avril 1888. CONVENTION Portugal. (B.O., 1889, p. 24) ; 21 novembre 1894. CONVENTION Libria. (B.O., 1895, p. 120) ; 30 juillet 1895. CONVENTION Espagne. (B.O., 1895, p. 70) ; 18 novembre 1899. CONVENTION France. (B.O., 1901, p. 6) ; 8 aot 1923. CONVENTION Grande Bretagne. (B.O., 1924, p. 100) ; 21 novembre 1931. CONVENTION Colombie. (B.O., 1937, p. 983) ;44 Se rfrer, titre dexemple, la Convention europenne dextradition, ouverte la signature le13 dcembre 1957, et entre en vigueur le 18 avril 1960.

45 Henri BOSLY, op.cit., p. 4. 46 BOSLY H., op.cit., p. 4. 47 J.O.Z, no18, 15 septembre 1985, p. 35.

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26 janvier 1932. CONVENTION Autriche. (B.O., 1950, p. 2186) ; 3 juin 1932. CONVENTION Finlande. (B.O., 1932, p. 368) ; 4 juin 1932. CONVENTION Bulgarie. (B.O., 1932, p. 663) ; 1er novembre 1932. CONVENTION Pays-Bas. (B.O., 1933, p. 82) ; 16 dcembre 1932. CONVENTION Bolivie. (B.O., 1933, p. 44) ; 6 janvier 1933. CONVENTION Bolivie. (B.O., 1934, p. 86 et 192) ; 3 fvrier 1933. CONVENTION Costa-Rica. (B.O., 1936, p. 31) ; 21 fvrier 1933. CONVENTION Chili. (B.O., 1935, p. 639) ; 23 fvrier 1933. CONVENTION Cuba. (B.O., 1938, p. 54) ; 14 mars 1933. CONVENTION Danemark. (B.O., 1933, p. 280) ; 6 juin 1933. CONVENTION quateur. (B.O., 1935, p. 352) ; 16 juin 1933. CONVENTION Lithuanie. (B.O., 1933, p. 101) ; 17 juin 1933. CONVENTION Honduras. (B.O., 1936, p. 17) ; 13 juillet 1933. CONVENTION Nicaragua. (B.O., 1935, p. 450) ; 4 aot 1933. CONVENTION Grce. (B.O., 1934, p. 753) ; 25 aot 1933. CONVENTION Salvador. (B.O., 1933, p. 820) ; 31 aot 1933. CONVENTION Salvador. (B.O., 1933, p. 820) ; 26 avril 1934. CONVENTION Guatemala. (B.O., 1935, p. 572) ; 2 dcembre 1935. CONVENTION Italie. (B.O., 1936, p. 1056) ; 13 mai 1938. CONVENTION Suisse. (B.O., 1938, p. 600) ; 14 mai 1938. CONVENTION Suisse. (B.O., 1938, p. 600) ; 22 septembre 1938. CONVENTION Mexique. (B.O., 1939, p. 600) ; 9 septembre 1952. CONVENTION Pakistan. (B.O., 1953, p. 1832) ; 28 juillet 1953. CONVENTION Pakistan. (B.O., 1954, p. 5) ; 23 avril 1958. CONVENTION Cuba. (B.O., 1959, p. 12) ; 28 avril 1958. CONVENTION Chili. (B.O., 1958, p. 1430) ; 4 mai 1958. CONVENTION Cuba. (B.O., 1959, p. 12) ; 5 mai 1958. CONVENTION Chili. (B.O., 1958, p. 1430) ; 30 mai 1958. CONVENTION Inde. (B.O., 1959, p. 1060) ; 30 dcembre 1958. CONVENTION Inde. (B.O., 1959, p. 1060)48.48 In Les codes Larcier de RDC, T.1, Droit civil et judiciaire, pp. 386-387.

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2. Traits multilatraux

Le trait type dextradition adopt par lAssemble Gnrale des Nations Unies dans sa rsolution 45/11649.

le Trait Benelux dextradition et dentraide judiciaire en matire pnale du 27 juin 1962. la Convention europenne dextradition du 13 septembre 1957 (approuve par la loi belge du 22 avril 1997, cest--dire seulement 40 ans aprs sa signature !) et les 2 Protocoles additionnels cette convention. la Convention du 19 juin 1990 dapplication de lAccords de Schengen du 14 juin 1985 (art. 59 66). la Convention du 27 septembre 1996 tablie sur la base de lart. K3 du Trait de lUnion europenne relative lextradition entre les Etats membres de lUnion Europenne et ratifie par la Belgique en vertu de la loi du 3 juillet 2001. 3. Les clauses relatives lextradition figurant dans des traits internationaux ayant un autre objet

piraterie arienne : Convention du 16 dcembre 1970 pour la rpression de la

capture illicite daronefs et Convention du 23 septembre 1971 pour la rpression dactes illicites dirigs contre la scurit de laviation civile ; rpression du terrorisme : Convention europenne du 27 janvier 1977 pour la rpression du terrorisme ; lutte contre le trafic illicite de stupfiants : Convention du 30 mars 1961 sur les stupfiants, Convention du 21 fvrier 1971 sur les substances psychotropes, Convention des Nations Unies du 20 dcembre 1988 contre le trafic illicite de stupfiants et de substances psychotropes ; prise dotages : Convention internationale du 17 dcembre 1979 contre la prise dotages. B. Lois congolaises sur lextradition

1. Dcret du 12 avril 1886 sur lextradition50 A notre connaissance, le seul texte qui, en dehors des traits, organise l'extradition est le dcret du 12 avril 1886. Son anciennet appelle des adaptations.

2. la loi n 04/016 du 19 juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment descapitaux et le financement du terrorisme49 Voir ANNEXE II. 50 In Les codes Larcier de RDC, T.1, Droit civil et judiciaire, pp. 386. ANNEXE I.

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Larticle 57, alina 3 de la loi n 04/016 du 19 juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme prvoit quen labsence de trait dextradition ou de dispositions lgislatives, lextradition sera excute selon les principes dfinis par le trait type dextradition adopt par lAssemble Gnrale des Nations Unies dans sa rsolution 45/116.

Section II. CONDITIONS D'EXTRADITION

1. L'ETAT REQUERANT L'extradition est accorde sur demande de l'Etat requrant. On admet gnralement que quatre Etats peuvent se prsenter ce titre : - L'Etat sur le territoire duquel l'infraction a t commise (territorialit); - L'Etat dont est ressortissant le dlinquant (personnalit active) ; - L'Etat dont l'infraction a mis en cause les intrts essentiels (principe de ralit) ; - LEtat qui simplique dans le droit humanitaire nouveau et qui, en consquence, au nom de la comptence personnelle passive ou de la comptence universelle, dclare sa loi applicable pour toute atteinte grave ce droit. En effet, le dveloppement de la Communaut internationale et limportance de plus en plus accrue du droit pnal international humanitaire conduisent ce que nimporte quel Etat se considre comme admis demander lextradition de nimporte quel individu, ds lors que celui-ci est prsum coupable des violations graves du droit humanitaire, quel que soit le lieu de ces violations. L'Etat requrant ne peut demander l'extradition que si l'individu a dj fait l'objet des poursuites ou des condamnations par ses propres juridictions. Enfin, outre les Etats, lextradition (ou le transfert) des individus coupables des mmes violations est dsormais possible la requte des tribunaux pnaux internationaux ad hoc (La Haye et Arusha notamment), et de la Cour pnale internationale.

2 L'ETAT REQUIS La demande d'extradition est adresse un Etat, l'Etat requis. Celui-ci est le pays o se trouve actuellement l'individu recherch. 3. L'INDIVIDU RECHERCHE

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L'individu qui fait l'objet de la demande d'extradition doit tre auteur, coauteur ou complice d'une infraction consomme ou tente que l'Etat requrant comptence de rprimer. Une opinion encore dominante veut que l'Etat n'extrade pas ses propres nationaux. Le CP russe de 1997 dispose expressment que Les citoyens de la Russie qui ont commis un crime sur le territoire dun Etat tranger ne peuvent pas tre extrads vers cet Etat 51. Contre lextradition des nationaux, on aligne les arguments suivants : - Lextradition serait, dans ce cas, une mise en cause de sa propre souverainet par lEtat requis ; - Le juge tranger ninspire pas confiance et risque dtre partial ; - Il nest pas juste de soustraire le dlinquant de son juge naturel quest le juge national. Mais cette pratique des Etats est conteste par la majorit de la doctrine 52, et un courant existe pour lextradition des nationaux. LInstitut de droit international (session d'Oxford, 1880), de mme que la Confrence internationale pour l'unification du droit pnal (Copenhague, 1935), ont exprim un vu favorable la disparition de ce principe. L'Angleterre, les Etats-Unis et l'Italie acceptent de livrer leurs propres nationaux, condition d'une rciprocit qu'ils ne trouvent presque nulle part. Les Etats romano-germaniques sont gnralement hostiles une telle remise 53. Le Cuba de Fidel CASTRO naccepte lextradition ni des nationaux ni des trangers poursuivis pour avoir combattu limprialisme, le colonialisme, le nocolonialisme, le fascisme ou le racisme, ou pour avoir dfendu les principes dmocratiques et les droits du peuple travailleur 54. Le progrs du sens de la Communaut internationale conduira coup sr une acceptation de plus en plus large par les Etats d'extrader leurs propres nationaux. A titre dexemple, le Conseil dEtat franais ayant dit que la non-extradition des nationaux ntait pas un principe fondamental reconnu par les lois de la Rpublique, une rforme de la loi de 1927 est en prparation autorisant une telle extradition dans certaines conditions et au bnfice de certains pays 55. Bien plus, larticle 7 de la convention de lUnion europenne du 27 septembre 1996, autorise lextradition des nationaux. Les raisons de cette rupture avec les habitudes lgales et conventionnelles sont les suivantes :51 Article 13, 1. 52 Voir A. HUET et R. KOERING-JOULIN, Droit pnal international, PUF, Paris, 1994, p. 357 ; Michel

MASSE, Lextradition des nationaux, in R.S.C., 1994, 798-804. 53 Laurent DESSARD, Lextradition des nationaux, in R.P.D.P., 1999, 317-327. 54 Voir Jacqueline SACOTTE, Le nouveau code pnal de la Rpublique de Cuba (1979), in R.S.C., 1984 , 580-585. 55 Michel MASSE, La souverainet nationale, in R.S.C., 1999, 908.

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- limportance des valeurs dmocratiques partages par lensemble des Etats membres ; - les traditions juridiques communes ; - la confiance mutuelle dans le bon fonctionnement des systmes de justice pnale des Etats membres56. En Belgique, on applique aux mineurs dge, la Convention sur le rapatriement des mineurs (art. 36 et 38 de la loi belge du 8 avril 1965 sur la protection de la jeunesse). Ils ne peuvent pas tre extrads et seront jugs dans les pays o rsident leurs familles. De mme, la Convention europenne dextradition nest pas dapplication sur les dlinquants malades mentaux. Ils font lobjet de mesures de sret et non de peines (art. 1, 1 et 2 de la loi du 15 mars 1874, art. 2 de la Convention europenne dextradition du 13 dcembre 1957). Les conventions les plus rcentes prvoient que les conventions dextradition seront applicables aux dlinquants malades mentaux qui font lobjet dune peine de sret, de privation de liberter. En Europe, lEtat requrant est fondamentales. Cest ainsi que : tenu au respect de certaines normes

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Lextradition peut tre refuse si lon demande lextradition de lauteur dune infraction qui est punie de la peine de mort dans lEtat requrant (art. 11 de la Convention europenne dextradition du 13 dcembre 1957 et lart. 1, 2, al. 3 de la loi belge du 15 mars 1874). Ce dernier peut garantir que cette peine ne sera pas prononce ou pas excute. Sil ne respecte pas sa parole, des mesures de rtorsion (politiques, conomiques, diplomatiques,...) pourraient tre appliques. La non-discrimination (art. 3 de la Convention europenne dextradition du 13 dcembre 1957 et lart. 2bis de la loi belge du 15 mars 1874) : lextradition ne peut tre accorde sil existe des raisons de croire quelle a t demande pour des considrations de religion, de race, de nationalit ou dopinion politique. Elle doit galement tre refuse si la situation de la personne risque dtre aggrave par ces mmes considrations. Ceci comporte un pouvoir dvaluation, dapprciation de la mesure. Il est interdit dextrader une personne vers un Etat qui userait de la torture (art. 3 de la Convention internationale de New York contre la torture du 10 dcembre 1984 approuve par la loi belge du 9 juin 1999). Il suffit que lEtat requis ait de srieuses raisons de le craindre. On peut prendre cette dcision en tenant compte des connaissances propos des actions habituelles des services de police et de renseignement et en tenant compte du caractre spcifique de la demande.

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4. PRINCIPE DE SPECIALITE Au nom du principe de spcialit, lEtat requis ne peut et ne doit extrader lindividu recherch qu la condition que celui-ci, une fois remis, ne rponde que56 Eric DAVID, op.cit., p. 379. er Henri BOSLY, op.cit., p. 7.

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des actes, ou nexcute que la peine renseign dans la requte dextradition. Cela veut dire, quune obligation sur lEtat requrant, qui ne peut dtourner dautres fins lextradition ainsi obtenu. Telle peut tre considre comme la doctrine classique en la matire. Toutefois, nous devons signaler la convention de lunion europenne du 27 dcembre 1996 qui permet aux Etats de dclarer quils autorisent lEtat requrant poursuivre la personne extrade pour dautres faits que ceux ayant motiv lextradition et antrieurs celle-ci. 5. LES INFRACTIONS EXTRADITIONNELLES

La procdure d'extradition est tellement complique et coteuse qu'il ne saurait tre question d'extrader pour toutes les infractions. Ne donnent lieu l'extradition que les infractions prsentant une certaine gravit. Pour dterminer cette gravit, deux techniques sont possibles : soit l'numration des faits pouvant donner lieu l'extradition dans le corps mme du trait, soit la rfrence la gravit de la peine encourue ou effectivement prononce pour l'infraction dont il s'agit. Cette dernire technique est la plus rcente et la plus rpandue. Elle est notamment utilise par la convention judiciaire du 4 mars 1966 liant la Rpublique Dmocratique du Congo et le Rwanda et qui fixe la limite au moins 6 mois de S.P. encourue (art. 2). Do les rgles suivantes : - Rgle de la double incrimination : le fait doit faire lobjet dune infraction pour les deux parties (respect de la lgalit de lincrimination). Rgle de la double punissabilit : au moment o lextradition est demande, il faut que lauteur puisse encore tre condamn. Cette rgle fait rfrence deux notions : la prescription de laction et de la peine et la rgle quon ne peut pas tre jug deux fois pour la mme infraction, non bis in idem (art. 9 de la Convention europenne dextradition du 13 septembre 1957, Convention du 25 mai 1987 entre les Etats membres de Communauts europennes relative lapplication du principe ne bis in idem approuve par la loi du 13 mai 1999). Il y a des infractions qui, par leur nature, sont exclues de l'extradition. Les infractions purement militaires chappent l'extradition. On n'extrade pas les esclaves fugitifs. Sont enfin exclues de l'extradition les infractions politiques. Vu l'importance de ce dernier point, nous allons lui consacrer un peu plus de commentaires. 6. LES INFRACTIONS POLITIQUES

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L'extradition ne s'applique pas aux infractions politiques. Tel est le principe fort ancr en droit international.er Ce principe fut tabli pour la premire fois par la loi belge sur l'extradition du 1er octobre 1833. Depuis lors, il figure dans de nombreux traits et lois de divers pays.er GLASER, Droit international pnal conventionnel, Vol. II, Bruylant, 1978, p.52.

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Il est devenu une vritable coutume internationale. Ainsi, mme lorsqu'un trait d'extradition ne le rappelle pas de manire expresse, il passe en gnral pour sous entendu ... On peut donc soutenir que le principe selon lequel l'extradition ne s'applique pas aux infractions politiques constitue prsent une rgle gnrale du droit international.57 En France, depuis 1848, on nextrade pas les dlinquants politiques. Cette position a connu la conscration par la loi du 10 mars 1927. La non-extradition des dlinquants politiques est un renversement dune tradition politique, lextradition ayant toujours favoris la livraison entre souverains de leurs ennemis personnels. Toutefois, malgr cette gnralit du principe et cette vigueur dans son affirmation, nous devons relever, d'abord la difficult de dfinir l'infraction politique et constater, ensuite, le recul dont ce principe souffre la suite notamment du dveloppement du terrorisme. 1) Dfinition de l'infraction politique Constatant que la loi ne dfinissait pas l'infraction politique, HAUS y avait trouv une explication : Le lgislateur s'est abstenu, en cette matire, de toute dfinition parce que, pour tre pratique, celle-ci et exig des explications et des dveloppements qui ne peuvent faire l'objet d'une loi 58. Pour navoir pas retenu cette leon, le lgislateur congolais du 19/12/2005, dans la loi portant amnistie pour faits de guerre, infractions politiques et dopinion, a pris le risque de dfinir les infractions politiques comme les agissements qui portent atteinte lorganisation et au fonctionnement des pouvoirs publics, les actes dadministration et de gestion ou dont le mobile de son auteur ou les circonstances qui les inspirent revtent un caractre politique . Pour navoir pas contenus les explications et les dveloppements exigs par HAUS, cette dfinition ne va pas sans problmes, dont nous voudrions pingler celui relatif aux actes dadministration et de gestion. Il y a lieu de se demander en quoi les actes dadministrations peuvent devenir des infractions politiques, sil ne sagit que des actes des fonctionnaires, que ceux-ci soient de droit ou de fait. La mme question se pose relativement aux actes de gestion, dautant plus que rien ne permet de les distinguer des actes dadministration. Nous osons croire que le lgislateur na pas entendu amnistier notamment des actes tels que les faux en critures, les dtournements des deniers publics, les concussions ou la corruption qui, en aucun cas ne peuvent revtir le caractre politique. Nous pensons quil y a eu fourvoiement dans cette tentative de dfinition et que celle-ci ne peut tre esquisse, pour le moment, qu partir de la jurisprudence. Daprs la jurisprudence de la Cour de cassation de Belgique, linfraction politique est celle qui, dans lintention de son auteur comme par ses effets, porte directement et immdiatement atteinte aux institutions politiques 59.

57 Op. cit., pp. 52-53. 58 HAUS., Principes gnraux, op. cit., I, n 345. 59 Cit par Fr. TULKENS, op. cit., p. 184.

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La participation une association de malfaiteurs se livrant la bombe dans un pays tranger, mme inspire par un but politique, ne constitue pas une infraction politique, ces faits nayant pas port directement atteinte aux institutions politiques de notre pays ou mme nont pas t susceptibles de les atteindre60. En doctrine, on rencontre trois catgories d'infractions politiques : 1. Les infractions politiques pures Par infractions politiques, dit HAUS, on doit entendre les crimes et les dlits qui portent uniquement atteinte l'ordre politique. 61 Cette doctrine est dite objective : la nature de l'intrt auquel l'infraction porte atteinte en dtermine le caractre politique. Il en est ainsi du complot ou de la haute trahison. La jurisprudence de la Cour de cassation de Belgique montre que celle-ci retient plusieurs dfinitions de linfraction politique, dont celle de linfraction politique par nature : une infraction ne peut tre un dlit politique que si, par sa nature mme, elle porte directement atteinte aux institutions politiques dans leur existence, leur organisation ou leur fonctionnement 62.

2. Les infractions politiques complexes ou mixtes L'infraction complexe existe lorsqu'un seul et mme fait a caractre double, lorsqu'il viole la fois le droit commun et le droit politique 63. On l'appelle aussi infraction politique par mobile. Cette doctrine est dite subjective car c'est le but vis par l'agent, sa volont qui confre l'acte son caractre politique. Nous pouvons citer, titre dexemple, lattentat contre les particuliers en vue d'attirer l'attention de l'opinion publique. La jurisprudence de la Cour de cassation de Belgique connat aussi les infractions politiques mixtes, quelle dfinit trs restrictivement comme tant celles qui, dans lintention de leurs auteurs comme par leurs effets portent directement et immdiatement atteinte aux institutions politiques 64. Les institutions politiques, au sens du patrimoine juridique entach par linfraction politique, comprennent notamment la forme de lEtat, le Snat et60 F. BERNARD et TULKENS, op. cit. 61 Op. cit., I, n 346. 62 Cass., 18 nov. 2003, J.T., 810 ; J.L.M.B., 2003, 1788 ; R.D.P.C., 2004, 526-527 et 835. 63 MERLE et VITU, op. cit., n 227 ; HAUS, op. cit., I, n s 353-354. 64 Cass., 18 nov. 2003, R.D.P.C., 2004, 835, et 526-527.

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lAssemble Nationale en tant que Parlement de la Rpublique, lautorit et les prrogatives du Chef de lEtat, laccession au mandat politique, lexercice du pouvoir et les droits politiques. Mme sil peut constituer un rouage ou un moyen de fonctionnement des institutions politiques, un parti politique ne constitue pas lui-mme une institution politique, et ne peut donc constituer le patrimoine juridique auquel le dlit politique porte atteinte65. 3. Les infractions connexes des dlits politiques Ce sont des infractions de droit commun inhrentes une action politique . Ces infractions se commettent gnralement l'occasion de l'insurrection et des guerres civiles : destructions des proprits publiques et prives, massacres des adversaires, enlvement des armes d'un arsenal, etc. Tous les actes de la lutte, autoriss par les usages de la guerre, doivent tre considrs comme des crimes politiques, ou pour mieux dire, ils ne forment qu'un seul et mme crime de cette espce; car ils sont les lments constitutifs de l'insurrection qui a un caractre essentiellement politique 66. Ces infractions ne donneraient lieu l'extradition que si elles constituaient des actes de barbarie odieuse et de vandalisme dfendus suivant les lois de la guerre et seulement lorsque la guerre a pris fin.67 Conclusion A partir de la dfinition donne des infractions connexes des dlits politiques, nous pouvons structurer la terminologie de la loi du 19/12/2005 portant amnistie et comprendre que les faits de guerre, rigs en catgorie part, cot des infractions politiques, rentrent en fait dans celle-ci. Ils sont constitutifs des infractions politiques car ils sont connexes des infractions politiques. 2) Le recul du principe de la non extradition du dlinquant politique Le respect du principe de la non-extradition du dlinquant politique est un corollaire du droit d'asile. Toutefois, face la monte des prils et au surgissement du terrorisme organis, efficace, arm et mettant srieusement en danger les systmes et les rgimes, de nombreux projets et instruments internationaux ont affirm le devoir de l'extradition inconditionnelle des coupables du terrorisme. C'est dans ce contexte que le Conseil de l'Europe s'est dot d'une Convention europenne sur le terrorisme (10 novembre 1976), ouverte la signature Strasbourg le 27 janvier 1977. Elle est entre en vigueur le 4 aot 1978. L'importance de cet instrument dans l'volution du droit extraditionnel et les controverses auxquelles il a donn lieu surtout dans les pays europens justifient qu'on s'y arrte un peu. 1. L'conomie de la Convention Trois articles de la Convention doivent particulirement retenir notre attention :

65 Cass., 18 nov. 2003, R.D.P.C., 2004, 835, et 526-527. 66 HAUS, op. cit., I, n 355. 67 Institut de droit diplomatique, Oxford, 1880.

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* L'article 1 qui numre une srie d'infractions qui ne pourront, en aucun cas, tre couvertes, pour les besoins de l'extradition, par leur caractre politique : - Infractions relatives la capture illicite d'aronefs (Convention de la Haye, 1970) ; - Infractions contre la scurit de l'aviation civile (Convention de Montral, 1971) ; - Infractions graves constitues par une attaque contre la vie, l'intgrit corporelle ou la libert des personnes ayant droit une protection internationale, y compris les agents diplomatiques ; - Infractions comportant l'enlvement, la prise d'otage ou la squestration arbitraire; - Infractions comportant l'utilisation des bombes, grenades, fuses, armes feu automatiques, ou des lettres ou des colis pigs dans la mesure ou cette utilisation prsente un danger pour des personnes ; - La tentative et la participation ces infractions ne seront pas considres non plus comme couvertes par leur caractre politique. * L'article 2 indique les infractions que, pour les besoins de l'extradition, les Etats ont la facult de ne pas considrer comme politiques. Il s'agit d'abord de tout acte grave de violence qui n'est pas vis l'article 1er et qui est dirig contre la vie, l'intgrit corporelle ou la libert des personnes. Il s'agit ensuite de tout acte grave contre les biens, autres que ceux viss l'art. 1erer lorsqu'il a cr un danger collectif pour des personnes. La tentative et la participation ces deux types d'infractions ne peuvent non plus bnficier du caractre politique pour tre soustraites l'extradition. * Enfin, l'article 5 qui dispose qu'aucune disposition de la prsente convention ne doit tre interprte comme impliquant une obligation d'extrader si l'Etat requis a des raisons srieuses de croire que la demande d'extradition motive par une infraction vise l'article 1er ou 2 a t prsente aux fins de poursuivre ou de punir une personne pour des considrations de race, de religion, de nationalit ou d'opinions politiques ou que la situation de cette personne risque d'tre aggrave pour l'une ou l'autre de ces raisons. Il s'agit de la clause de conscience. L'Etat requis, s'il n'extrade pas, doit nanmoins poursuivre ou faire excuter sa peine au dlinquant. Comme on le voit, cette convention soustrait une srie d'infractions politiques au principe de non-extradition dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Beaucoup y ont vu une atteinte au droit sculaire d'asile et un cheminement vers un systme politique autoritaire et intolrant. Et pourtant, il y a des antcdents68.

2. Les antcdents les plus connus

- La clause d'attentat, dite aussi la clause belge69.

68 Voir F.TULKENS, in R.D.P.C., Numro Spcial Extradition et terrorisme, 1980, pp. 86-87. 69 Sur la clause belge et son extension, voir A. VITU, Le meurtre politique en droit internationalet extraditionnel, in Mlanges offerts Georges LEVASSEUR, op. cit., p. 365.

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Elle fut introduite par la loi belge du 22 mars 1856 et reprise, depuis le trait d'extradition franco-belge de la mme anne, par la plupart des traits d'extradition. Elle est ainsi formule: Ne sera pas rput dlit politique ni fait connexe semblable dlit l'attentat contre la personne du chef d'un gouvernement tranger ou contre celle des membres de sa famille lorsque cet attentat constitue le fait de meurtre, d'assassinat, ou d'empoisonnement . Cette mme loi belge a introduit la formule juridique de la dpolitisation de l'infraction politique. - La Convention de Paris du 9 dcembre 1948, sur le gnocide, dispose que celui-ci n'est pas un dlit politique pour ce qui est de l'extradition. - Les conventions humanitaires de Genve du 12 aot 1949 donnent aux crimes de guerre le caractre d'infraction de droit commun. Bref, il se dveloppe actuellement un certain courant moderne de restriction du droit d'asile l'gard des dlits politiques auxquels se trouve ml un lment de droit commun: L'extradition pourrait avoir lieu quand ce dernier lment apparat prdominant en raison notamment du caractre odieux des procds que l'agent a mis en uvre70. 3. La controverse La Convention europenne a donn lieu des controverses, certains auteurs estimant que dans la lutte contre le terrorisme, la priorit doit tre accorde la sauvegarde de l'ordre public et que, dans ce sens, la convention venait point nomm71. D'autres, par contre, trouvent cette convention dangereuse et menaante pour les liberts publiques et la dmocratie 72. Pour notre part, nous constatons que bientt trente ans aprs son entre en vigueur, la Convention a fait ses preuves comme un mcanisme valable contre le terrorisme, alors que la dmocratie et les liberts publiques en Europe ne se sont jamais aussi bien portes. Section III. LA PROCEDURE D'EXTRADITION La procdure d'extradition est un problme qui se pose essentiellement dans l'Etat requis, l'Etat requrant se contentant de formuler sa demande par voie diplomatique. Toutefois, par voie conventionnelle, les Etats peuvent dterminer dautres voies de demande dextradition. Ainsi, la convention dapplication de laccord de SCHENGEN, qui est entre en vigueur le 26 mars 1995 lgard des trois Etats du Benelux, de lAllemagne, de lEspagne, de la France et du Portugal, prvoit que la transmission des demandes dextradition soprera directement entre ministres de la justice, sans ncessairement emprunter la voie diplomatique, sauf pour les demandes adresses ou provenant de la France73. La procdure que l'Etat requis utilise relve de son droit interne. En Rpublique Dmocratique du Congo, c'est l'organe ayant la politique extrieure dans ses70 Article cit, pp. 87-88. 71 Voir les points de vue de Me VARAUT, avocat La Cour dappel de Paris, in R.D.P.C. Numrospcial dj cit, p. 99 ; DU JARDIN, loc. cit. 72 Voir les points de vue de Mme F. TULKENS, professeur lUCL et, aujourdhui, juge La Cour Europenne des Droits de lhomme, mme revue, p. 92 ;

73 J Y . MINE, Chronique de la lgislation pnale, in R.D.P.C., 1996, 276.

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attributions, en d'extradition.

l'occurrence

le

gouvernement,

que

revient

le

pouvoir

Pour que l'extradition soit accorde, l'Etat requrant doit produire les pices justificatives ncessaires: jugement de condamnation ou tout autre acte de procdure tablissant les poursuites engages contre la personne recherche 74. Tous ces actes ne produiront leurs effets qu'aprs avoir t rendus excutoires par la Cour d'Appel, qui dsignera le magistrat, l'officier ou l'agent des Forces Armes, charg de l'excution, et le lieu de dtention du dlinquant. En cas d'urgence, l'autorit judiciaire comptente de l'Etat requrant peut demander et obtenir l'arrestation provisoire du dlinquant par simple message tlgraphique, postal ou envoy par tout autre moyen, tel que le fax ou lE-mail aujourdhui75. Dans ce cas, les pices justificatives doivent tre transmises endans trois mois, dlai au-del duquel le dlinquant sera mis en libert 76. Le dlinquant auquel il est notifi la demande d'extradition peut formuler un mmoire en dfense l'attention du gouvernement, et se faire assister d'un conseil dans la rdaction de ce mmoire77. On remarquera que l'avis des tribunaux n'est pas demand, et que les voies de recours ne sont pas prvues. Une lgislation plus adapte aux exigences des droits de l'homme et des liberts individuelles devrait permettre l'intervention du juge pour avis ou dcision une phase dtermine de la procdure, et des voies de recours aussi bien contre les dcisions du juge que celles du gouvernement devraient tre prvues. Dans le cadre du droit compar, nous pouvons relever la convention dapplication de laccord de SCHENGEN qui vise complter et faciliter les procdures dextradition entre ces Etats, fixes par le convention europenne dextradition du 13 septembre 1957. Les frais pouvant donner lieu extradition sont dsormais dtermins sur la seule base dun taux de peine minimum : soit un an demprisonnement (avec dispositions particulires lgard de la France).

74 Article 3 du dcret du 12 avril 1886. 75 Article 5, al. 2 du mme dcret. 76 Article 5, al. 3 77 Article 6, al. 4.

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Chapitre II. LES AUTRES FORMES DE COLLABORATION INTERNATIONALE Cette coopration porte sur autre chose que lextradition et prend une autre forme que lextradition. On parle ici de coopration pour laudition de tmoins, les enqutes, les saisies, la collaboration des experts, les commissions rogatoires, la mise excution des jugements (transfert inter-tatique des condamns), etc. Ces formes de coopration ne sont pas limites par des conventions 78.

Section I. LA COLLABORATION POLICIERE INTERNATIONALE 1. LEVOLUTION HISTORIQUE ET INSTITUTIONNELLE DEPUIS LA SECONDE GUERRE MONDIALE La coopration internationale policire est issue de la constatation que les dlinquants franchissaient les frontires alors que celles-ci taient des barrires infranchissables pour les services de police. De plus, on ne pouvait pas dire que la coopration entre les services de police se passait aisment. Par la ralit, par les contacts informels est ne la coopration internationale (coopration entre les policiers qui avaient lhabitude de se ctoyer ou qui se rencontraient lors de78 H. BOSLY, op.cit. p. 7.

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runions internationales). Par la suite, ce nest que petit petit que cette coopration a t lgalise. Quelques annes aprs la 2 guerre mondiale, on a cre loffice international de police criminelle ou Interpol. Il tait convenu que tout ce qui faisait partie de la dlinquance politique serait exclu de ses activits. Ceci nest plus toujours vrai au vu des ncessits de la lutte contre le terrorisme, par exemple. Au dpart, Interpol est surtout une banque de donnes. Il faut signaler que les polices nationales, surtout celles des pays partageant les frontires, collaborent entre elles et s'changent des informations, voire des dlinquants. 2. ORGANISATION REGIONALE DE COOPERATION DES COMMISSAIRES DE POLICE EN AFRIQUE AUSTRALE (SARPCCO) Dans le cadre de la Communaut de dveloppement de lAfrique Australe (CDAA, SADEC), dont la RDC est membre, la principale structure des services de rpression est lOrganisation rgionale de coopration des commissaires de police en Afrique australe (SARPCCO), dont les oprations sont diriges par les chefs des services nationaux de police. Son comit directeur est compos des ministres ayant la police dans leurs attributions. Cette organisation simplique essentiellement dans la prvention du crime et de labus de drogue, et coordonne laction de la police contre la criminalit transnationale me. 3. ORGANISATION INTERNATIONALE DE POLICE CRIMINELLE (O.I.P.C.), COURAMMENT APPELEE INTERPOL Mais la forme la plus labore de collaboration policire contre les criminels internationaux (escrocs, faussaires, faux-monnayeurs, trafiquants de drogues, proxntes notamment), c'est assurment l'Organisation Internationale de Police Criminelle (O.I.P.C.), couramment appele Interpol , d'aprs son adresse tlgraphique. Elle comprend plus d'une centaine de pays et a son sige Lyon depuis 1989. LInterpol dispose ainsi dun Bureau sous-rgional pour lAfrique australe, bas Harare, et qui assure le secrtariat de la SARPCCO 79. Les Bureaux Centraux Nationaux (B.C.N.), raison d'un dans chaque pays membre, assurent la liaison entre elle et les polices nationales, et peuvent communiquer entre eux. L'Interpol possde des fichiers extrmement dtaills sur les dlinquants internationaux et assure ses membres une diffusion rapide des renseignements qu'elle dtient80.me Rob BOONE, Gary LEWIS, et Ugljesa ZVEKIC, Mesure de la dlinquance et lutte contre la

criminalit en Afrique australe, in Forum sur le crime et la socit , Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, vol. 3, numros 1 et 2, dcembre 2003, 155. 79 Op. cit. 80 Sur la coopration policire en Europe, voir notamment H.D. BOSLY et G. RENAULT, La coopration policire et judiciaire, in La justice pnale et lEurope, Travaux des XV journes dtudes juridiques Jean DABIN, Bruylant, Bruxelles, 1996, p. 339.

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Section II. LA COLLABORATION JUDICIAIRE INTERNATIONALE

1. COOPERATION ENTRE LES ETATS Les actes de procdure tant soumises absolument au principe de la territorialit, il s'avre que le concours des autorits judiciaires trangres devient indispensable lorsque ces actes dbordent le territoire national. Il en est ainsi lorsqu'il s'agit d'interroger un tmoin se trouvant l'tranger, d'obtenir l'extrait du casier judiciaire d'un individu n l'tranger, d'effectuer une enqute prliminaire, d'adresser des commissions rogatoires l'tranger, etc. 81 La collaboration judiciaire internationale se fait essentiellement par voie diplomatique. 2. EXPERIENCE BELGE82

1. Les commissions rogatoires internationales :Une commission rogatoire est une demande par laquelle lEtat requrant demande lEtat requis que ce dernier fasse procder certains actes denqute. Deux types dactes peuvent mener davantage des conditions restrictives : les perquisitions et les saisies.

a. Les actes pouvant faire lobjet dune demande dentraide :(Art. 1 de la Convention europenne dentraide, art. 49 et 50 de la Convention dapplication Schengen) A priori, aucun acte qui est prvu par une convention dentraide nest impossible (sauf lextradition qui est rgle par dautres conventions). Sil ny a pas de convention entre 2 pays, ils peuvent tablir un accord international.

b. Le refus dentraide :(Art. 22, 2 du Trait Benelux, art. 2 de la Convention europenne dentraide, art. 50, 2 et 4 de la Convention Schengen) Il existe des motifs de refus facultatifs (cf. textes lgaux), ce qui signifie que, partir de ces motifs, lEtat requis peut mais nest pas oblig de refuser une commission rogatoire.

c. Les prcautions particulires en matire de perquisitions et de saisies :(art. 5 de la Convention europenne dentraide, art. 51 de la Convention Schengen) Pour les perquisitions et les saisies, il faut que le fait puisse faire lobjet dune demande dextradition. On peut prvoir ici une procdure particulire pour la communication des rsultats de ces actes. En droit belge, il faut que cette communication soit juge par la Chambre du conseil. Ceci permet des inculps, suspects ou tmoins de faire valoir leurs objections.81 Voir G. DEMANET, Considrations sur lentraide judiciaire en matire pnale, in R.D.P.C., 1997,809-831.

82 H. BOSLY, op.cit., pp. 12-15.

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Droit pnal international, Notes de c o u r s | 38

d. La procdure dexcution de la commission rogatoire :

(art. 26 du Trait Benelux, art. 14 20 de la Convention europenne dentraide, art. 52 et 53 de la Convention Schengen) Les commissions rogatoires sont excutes par les autorits du lieu requis, lautorit de lEtat requrant pouvant demander dassister ces actes denqute. Le magistrat ou lenquteur connatra alors beaucoup plus vite les rsultats de lacte. Certaines conventions requirent que lEtat requrant reste passif mais, lorsque les relations judiciaires sont bonnes, lEtat requrant peut avoir un rle plus actif dans lacte dinvestigation (ex : tablir la liste des questions poser lors dun interrogatoire). A cause de toute la lenteur administrative, certains magistrats ont lanc un appel la communaut internationale, l appel de Genve , dans lequel ils dclarent que les Etats doivent imprativement cooprer et ne pas ralentir la procdure pour des investigations sur la criminalit organise, par exemple.

2. La remise dactes de procdure et de dcisions judiciaires, lacomparution de tmoins et de personnes poursuivies : (art. 7 12 de la Convention europenne dentraide) Dans la pratique, il y a dautres procdures qui demandent des rglementations comme la convocat